Navigation – Plan du site

AccueilNuméros9Notes de lectureLes souffrances d’un rescapé

Notes de lecture

Les souffrances d’un rescapé

Albert Mingelgrün
p. 191-192
Référence(s) :

Sylvain Gutmacher, Témoignage, Poèmes, Contes (Achevé d’imprimer le 15 juillet 2008 sous les presses de l’imprimerie Relie-Art, Exemplaire n° 187), 142 pages.

Texte intégral

1Retrouvant la Belgique après Auschwitz en avril 1945, Sylvain Gutmacher pouvait espérer une vie meilleure, rescapé qu’il était comme le seraient ses frères Félix et Marcel, alors que leurs parents avaient été exterminés. Et en effet, dans un premier temps, il reprenait ses études de droit à l’ULB, composant parallèlement un récit autobio­graphique dans lequel, se mettant en scène sous les traits de Max Gor­der, il manifestait son souhait d’exorciser le passé récent à travers cette formule révélatrice accompagnant le nom propre du titre : ou par-delà la haine.

2Cela ne l’empêchera pas de se suicider en mars 1948, survivre après l’épreuve lui étant sans doute devenu insupportable face à l’incompréhension et à l’indifférence de l’“autre” monde.

3Récit-témoignage donc, qui enregistre scrupuleusement les étapes des tourments endurés à Auschwitz en leurs résonances les plus intimes et cela depuis l’arrivée au camp, visions insoutenables de la déporta­tion tissées au fil de brefs chapitres.

4Les mêmes sobriété et densité caractérisent la quarantaine de poèmes reproduits ensuite, issus de divers moments et circonstances, de 1940 à 1945 : scènes de la vie quotidienne familières ou dramatiques, rêveries musicales, évocations sentimentales, notations d’atmosphère ou frémissants in memoriam pour ses compagnons de souffrance.

5Voici, par exemple, extraits de cet ensemble, quelques vers prémo­nitoires de juin 1945 :

« Quand mon âme fanera comme jaunissent les feuilles

Quand mes rêves ne seront plus que flambeaux poussiéreux

Quand mon coeur battra comme le rouage d’une montre [...]

Je veux que mon corps s’efface avec ma vie

Quand mon âme pâlira comme un soleil d’automne

Quand mes rêves n’auront plus d’ailes pour voler

Quand mon coeur fatigué aura cessé d’aimer. »

6Soulignons au passage les reprises significatives qui scandent ces deux strophes ouvrant et clôturant respectivement le poème cité.

7L’obsession suicidaire se trouve comme confirmée par les Deux contes noirs sur lesquels se referme l’ouvrage, chacun de leurs protago­nistes se donnant la mort par pendaison.

8On ne laisse pas d’être impressionné par cette écriture qui fait litté­ralement coïncider en leurs limites extrêmes l’œuvre et l’expérience vécue...

Haut de page

Pour citer cet article

Référence papier

Albert Mingelgrün, « Les souffrances d’un rescapé »Les Cahiers de la Mémoire Contemporaine, 9 | 2010, 191-192.

Référence électronique

Albert Mingelgrün, « Les souffrances d’un rescapé »Les Cahiers de la Mémoire Contemporaine [En ligne], 9 | 2010, mis en ligne le 01 février 2020, consulté le 21 septembre 2024. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/cmc/656 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/cmc.656

Haut de page

Auteur

Albert Mingelgrün

Albert Mingelgrün, docteur en Philosophie et Lettres, professeur émérite à l’Université libre de Bruxelles, section de Langues et Littératures romanes, est président de la Fondation de la Mémoire contemporaine.

Articles du même auteur

Haut de page

Droits d’auteur

Le texte et les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés), sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.

Haut de page
Rechercher dans OpenEdition Search

Vous allez être redirigé vers OpenEdition Search