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AccueilClio. Histoire‚ femmes et sociétés32Regards complémentairesLa « maternité » de l’Odyssée

Regards complémentaires

La « maternité » de l’Odyssée1

Fortune d’un fantasme victorien
The “maternity” of the Odyssey: the waxing and waning of a Victorian fantasy
Lillian Doherty
p. 149-164

Résumés

La publication de la première traduction française de The Authoress of the Odyssey (1897) de Samuel Butler, en 2009, suscite un nouvel examen du livre et de sa thèse volontairement provocatrice : l’Odyssée aurait été écrite par une jeune femme. Les préfaces aux éditions anglaises de 1967 et 2004 soulignent la justesse des interprétations de Samuel Butler relatives au style et au ton du poème, ainsi que sa manière de revendiquer son propre positionnement critique – ceci bien avant que la démarche soit théorisée par les études académiques modernes. En ce qui concerne la place fondamentale accordée aux personnages féminins et à leurs points de vue dans l’épopée, l’article propose ici une alternative à la thèse insolite de Butler, rejetée par presque tous les spécialistes, en faisant état des recherches actuelles qui s’intéressent à la réception du poème, à la mixité de l’auditoire et à l’existence de traditions poétiques orales spécifiquement féminines.

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Texte intégral

  • 1 Cet article est dédié à la mémoire d’Andrew Grene, aide diplomatique de l’onu mort dans le tremble (...)
  • 2 Butler 2009 : 12.
  • 3 « See the heart of the writer […] for art is only interesting in so far as it reveals an artist », (...)

1L’Odyssée serait-il l’ouvrage d’une jeune femme sicilienne de culture grecque ? Telle est la thèse soutenue par Samuel Butler dans L’auteure de l’Odyssée, un ouvrage paru en anglais en 1897 sous le titre The Authoress of the Odyssey. Relisant le poème homérique plus de 35 ans après l’avoir découvert et après avoir étudié le grec à Cambridge, Samuel Butler est « saisi par le sentiment […] que quelque chose ne colle pas, que quelque chose [lui] échappe »2. Samuel Butler traduit alors le poème en anglais, « en prose simple », pour mieux le comprendre et surtout, dit-il, pour essayer de « saisir le cœur de l’écrivain. […] car l’art n’est intéressant que dans la mesure où il révèle un artiste »3. À la lecture de l’épisode phéacien, Samuel Butler a soudain l’intuition qu’il lit l’ouvrage d’une jeune femme décrivant des personnes et des lieux qu’elle connaît. Il en conclut que l’auteur du poème n’est autre que le modèle historique qui a inspiré le personnage de Nausikaa, la princesse du royaume phéacien. Après cette première trouvaille, S. Butler s’attache à trouver quelle cité antique pourrait bien correspondre à Schérie, la cité phéacienne mise en scène dans l’Odyssée. C’est la cité sicilienne de Trapani qui lui semble la meilleure candidate. L’Ithaque de l’Odyssée elle-même ne pouvait pas non plus avoir été inspirée par un paysage extérieur à la Sicile, pour la simple raison que, selon S. Butler,  l’auteure du poème n’était jamais sortie de son île natale. Le livre The Authoress of the Odyssey présente les arguments qui ont conduit S. Butler à de telles conclusions, des arguments souvent étayés par ses propres observations du paysage sicilien. Son raisonnement, fort peu scientifique et aux propositions souvent très contestables, aboutit à donner un livre étrange à l’étonnante longévité éditoriale. Le succès (relatif) de sa thèse auprès du public trouverait-il aujourd’hui de nouvelles explications ? Les études féministes n’ont-elles pas, d’une autre manière, été guidées par des intuitions similaires ?

Une première édition française

  • 4 Je remercie Ch. Angelliaume de m’avoir envoyé son curriculum vitae. Dans sa traduction il y a des (...)
  • 5 « J’avais l’immense avantage d’aborder le poème avec un regard neuf» (Butler 1967 : 6).
  • 6 Voir Whitmarsh 2002 et Holt 1989 : 95-97.

2La publication en 2009 de la première traduction française du livre de S. Butler écrit il y a plus d’un siècle suscite quelques interrogations. Si le traducteur de l’édition française signale que « chaque génération de langue anglaise lui a consacré une réédition », il faut préciser qu’il s’agissait de réimpressions, en 1921-1922, 1967 et 2004, les deux dernières étant complétées par des préfaces dues respectivement à David Grene et Tim Whitmarsh, tous deux hellénistes de profession, ce que le traducteur français n’est assurément pas4. Samuel Butler qui était lui-même romancier et essayiste se vantait de son statut d’intrus et de la fraîcheur qu’une telle distance ne pouvait manquer de donner à sa lecture de l’épopée5. Samuel Butler lit l’Odyssée comme un roman, avec des yeux de romancier. Surtout, le ton moqueur qu’il adopte parfois ne permet pas de démêler facilement la part de satire et la part de sérieux dans son livre. D’ailleurs, les hellénistes de son époque, pas plus que ceux d’aujourd’hui, ne le prenaient au sérieux. Cela dit, le fait que Butler ait consacré une série de publications et plusieurs années de sa vie6 à défendre la thèse de l’auteure sicilienne de l’Odyssée suggère un enjeu d’importance.

Les apports de Samuel Butler : la fraîcheur et la cohérence du poème

  • 7 Butler 1892 : 98.
  • 8 Butler 1967 : vii.
  • 9 Dans le milieu américain, au moins, les méthodes critiques des littéraires sont adoptées par les a (...)
  • 10   Titre d’une version de la préface de D. Grene : Grene 1967.

3Selon David Grene, dans son introduction à la réimpression de 1967, c’est sa sensibilité d’écrivain qui permettait à S. Butler d’apprécier les qualités littéraires de l’Odyssée, des qualités selon lui ignorées par les hellénistes attitrés de son époque. Ceux-ci s’intéressaient plutôt, disait-il, aux minuties du digamma ou de la particule ge7 et voyaient dans l’épopée une compilation plus ou moins cohérente de chants traditionnels. Influencé par le New Criticism américain, D. Grene affirme que sur une question, au moins, la science a fini par donner raison8 à Samuel Butler : l’Iliade et l’Odyssée sont désormais considérés comme étant l’œuvre de deux auteurs distincts9. Tout en rejetant la thèse de la « maternité » de l’Odyssée, et en traitant le livre de « livre le plus étrange de toutes les études classiques »10, David Grene reconnaît que Samuel Butler apprécie très justement le ton de l’Odyssée. Il est vrai, dit-il, que l’épisode phéacien est l’un des plus vivants du poème et qu’il suggère un milieu social particulier et observé de près par l’auteur. Il reconnaît aussi, avec S. Butler, une différence de ton entre l’auteur de l’Odyssée et celui de l’Iliade, différence due au laps de temps écoulé entre les deux compositions mais aussi à l’ambivalence dont témoigne l’Odyssée vis-à-vis des valeurs guerrières développées dans la première épopée. D. Grene approuve ce qu’en dit S. Butler :

  • 11 Butler 1967 : 268, cité et édité par D. Grene, Butler 1967 : xi, et traduit par Angelliaume 2009 : (...)

Il n’y a rien [dans l’Odyssée] qui ne m’impressionne plus profondément que le flux sous-jacent de mélancolie que j’y perçois de bout en bout […] le sentiment que le monde, malgré toutes ses joies, était toujours déplacé – un sentiment indéfinissable et inexprimé, mi-pathos, mi-furie confuse… le sentiment de faiblesse, tout autant que de force, exquisément subtile qui émane du poème11.

4Pour D. Grene, c’est le talent de S. Butler, véritable homme de lettres, qui lui permet de saisir et de traduire (il a également publié une traduction de l’Odyssée) l’unité et la subtilité de ton du poème. Il est clair que D. Grene apprécie particulièrement le style de Samuel Butler, sa vivacité, son enthousiasme, son humour. L’essai est amusant et spirituel, qualités que le traducteur français n’a malheureusement pas bien saisies ou pas su rendre, privant ainsi le lecteur de ce qui est probablement la meilleure raison de le lire.

Une critique située

5Lorsque Tim Whitmarsh rédige en 2004 la préface à la dernière réimpression du livre, il apprécie également le style de Samuel Butler mais, sensible au New Historicism, met davantage l’accent sur les rapports de S. Butler avec le milieu universitaire anglais du xixe siècle. Le choix d’un ton moqueur (« playful ») et l’emploi de « preuves » en forme d’anecdotes seraient des formes délibérées d’un affrontement avec les hellénistes de son époque dont S. Butler déplorait l’aveuglement. Il ne s’agissait pourtant pas d’un simple jeu. Certes Samuel Butler voulait épater les professeurs mais il cherchait également à provoquer une réponse de leur part et il multiplie ses efforts en ce sens pendant dix ans.

  • 12 Un autre écrivain qui s’est inspiré des recherches de Butler sur l’Odyssée est Robert Graves, qui (...)

6Selon T. Whitmarsh, l’étude des langues classiques, telle que Butler l’a connue à l’école et à l’Université de Cambridge, représentait pour lui (avec l’Église anglicane) « le plus haut point du snobisme brutal et absurde de la société victorienne » (p. x). S. Butler aurait donc choisi le terrain de l’épopée à cause du rôle capital qu’elle jouait dans l’idéologie dominante de l’époque : son but aurait été « de contester l’emprise de l’establishment académique sur les poèmes homériques qui, parce qu’ils étaient considérés comme des textes fondateurs de la tradition européenne, jouaient un rôle idéologique capital » (p. xiv). Non seulement le ton de Samuel Butler, mais le ton de l’Odyssée selon S. Butler, est parfois plaisant, voire moqueur. En entendant la voix d’une jeune femme, en insistant sur la « passivité » d’Ulysse, en donnant aux personnages féminins un rôle central et en identifiant un cadre très restreint pour l’action du poème (qui se déroulerait entièrement en Sicile), Samuel Butler voulait « miniaturiser » l’Odyssée : « L’épopée de l’endurance masculine est réinterprétée en roman ironique » (xiv-xv). Il est d’ailleurs significatif que la traduction de S. Butler ait été celle que lut James Joyce avant d’écrire son roman parodique12.

  • 13 Butler 2004 : xii-xiii.

7Tim Whitmarsh observe également que, pour quelqu’un qui s’affichait comme un intrus dans le milieu universitaire, S. Butler a déployé pas mal d’efforts pour constituer un réseau de relations parmi les professeurs de Cambridge, dont il listait les noms et à qui il envoyait des exemplaires de ses publications. Dans les carnets qu’il portait partout avec lui, comme dans ses lettres dont il gardait des copies, il travaillait à construire sa propre réputation13. J’ajouterais que cette préoccupation est bien visible dans la façon qu’a S. Butler de se féliciter de la découverte de l’auteure de l’Odyssée : il l’évoque comme s’il s’agissait d’un personnage de roman qu’il aurait créé. Samuel Butler s’approprie en quelque sorte le poème comme s’il s’agissait de sa propre création.

8T. Whitmarsh souligne également que Butler a anticipé sur un certain nombre de points les résultats de la critique plus récente des épopées homériques. L’idée de l’unité du poème, déjà soulignée par D. Grene, va ici de pair avec le refus de voir en l’auteur un « grand écrivain » (« le “grand écrivain” comme génie prophétique », p. xviii). Aujourd’hui, les spécialistes d’Homère font appel, pour expliquer l’unité des poèmes, à la tradition orale qui aurait formé le langage poétique et même l’architecture des deux épopées. L’insistance que met S. Butler à soutenir que les deux épopées sont composées par des auteurs différents, une thèse acceptée par D. Grene, est transformée chez T. Whitmarsh en reconnaissance des différences radicales, de thèmes et de valeurs, entre l’Iliade et l’Odyssée. Lorsque S. Butler prétend que l’auteure veut « blanchir » la réputation de Pénélope, ceci correspond, pour T. Whitmarsh, à la perception chez des critiques plus récents des contradictions inhérentes au personnage (par exemple, chez Marylin Katz, Penelope’s Renown: Meaning and Indeterminacy in the Odyssey, 1991). Pour T. Whitmarsh cependant, l’apport le plus important de S. Butler réside dans sa volonté d’afficher sa personnalité et ses préjugés :

Le « post-modernisme » a mis en cause le positionnement traditionnel de la recherche prétendue hors du temps, universelle et autorisée. On demande aujourd’hui, au contraire, que toute écriture s’explique sur ses propres conditions de production, historiques et idéologiques... Les écrits de Butler – anecdotiques, personnels, autobiographiques même – étaient perçus par les chercheurs de son temps comme relevant d’un total amateurisme, mais, rétrospectivement, nous pouvons les considérer comme de véritables armes dans la guerre qu’il menait à l’establishment académique (p. xxi).

  • 14 Dougher 2001.

9Le mérite du livre de S. Butler serait donc, à côté de son style et de son appréciation des qualités propres de l’Odyssée, d’avoir surtout anticipé la perception post-moderne du savoir, situé dans le temps et l’espace. Je suis d’accord avec T. Whitmarsh – et avec Sarah Dougher qui l’a écrit avant14 – que Butler est un maître de la « voix personnelle » (autrement dit de l’intrusion de la subjectivité de l’auteur), traditionnellement écartée par les universitaires. S. Dougher ajoute que la « voix personnelle » est également une posture rhétorique dont Butler s’est servi en alternance avec une voix professionnelle (autrement dit, « objective ») afin de refuser la supériorité que l’une pouvait avoir sur l’autre. C’est cette alternance qui a dérouté les professeurs et peut encore nous dérouter.

  • 15 Christian Angelliaume, communication personnelle (courriel), 1er février 2010.
  • 16 Butler 1967 : vii.

10Mais c’est peut-être cette même alternance – ou ce mélange – de positions qui attire les lecteurs non-professionnels du livre. S. Butler est d’un abord plutôt facile tout en assumant une autorité fondée sur la connaissance du grec et sur des recherches entreprises pour prouver son hypothèse (y compris des voyages en Sicile pour vérifier des détails géographiques). Si S. Butler voulait se faire entendre par les spécialistes, il est clair qu’il cherchait également à se gagner un public plus large. C’est d’ailleurs une des raisons pour lesquelles il a traduit l’Odyssée, et plus tard l’Iliade, non seulement en anglais, mais surtout en prose. Or, c’est bien pour ce public, et non pour un public de spécialistes, que la nouvelle traduction française a été réalisée15, de même que la réimpression chez Forgotten Books et que la mise en ligne sur le site http://www.sacred-texts.com (« la plus grande collection gratuitement disponible sur internet de livres sur la religion, la mythologie, les traditions populaires, et l’ésotérisme »). Pour ce public, ne serait-ce pas la thèse principale, la thèse aujourd’hui rejetée par les hellénistes de profession – à savoir que l’Odyssée est l’ouvrage d’une jeune femme – qui suscite l’intérêt ? Bien que je n’accepte pas cette thèse, je crois que nous devons nous y arrêter pour comprendre l’étonnante survie du livre de S. Butler. Quels aspects de l’épopée – ce que D. Grene appelait « les faits vérifiables dans le poème»16 – ont bien pu conduire S. Butler à élaborer une telle théorie ?

Les femmes, le féminisme et la tradition épique

  • 17 Ce que l’on appelle aussi le situationnisme ou la standpoint theory.

11Pour continuer dans cette direction où il est question de « savoir situé »17, il convient que je m’identifie à mon tour. Je suis professeure d’université, spécialiste d’Homère et féministe. Il y a, bien entendu, plusieurs manières d’être féministe. Le livre de S. Butler est-il féministe ou est-il « pré-féministe » ? L’auteur de l’Odyssée l’est-il (ou l’est-elle) ? Si une réponse affirmative suggère l’appartenance à un mouvement collectif, la réponse aux deux questions est bien entendu négative. S’il suffit en revanche de croire en l’importance des femmes et en leurs capacités intellectuelles et sociales pour être considéré comme féministe, la question devient bien moins extravagante. L’Odyssée, on le sait, fait une place importante aux personnages féminins, surtout si on la compare à l’Iliade. Quelles conclusions peut-on tirer de l’importance qui leur est ici accordée ?

  • 18 Ruyer 1977. Je remercie Louise Bruit Zaidman de m’avoir signalé ce livre.
  • 19 Ruyer 1977 : 34.

12En 1977, dans une période de plein essor de la critique féministe, Raymond Ruyer reprenait la thèse centrale de S. Butler – qu’il prenait très au sérieux – pour y apporter de nouvelles preuves, bien entendu selon lui plus solides. Dans Homère au féminin18, ce professeur de philosophie – comme Butler en marge de la profession des études classiques – essaie d’établir la « maternité » de l’Odyssée en complétant l’inventaire des aspects du poème suggérant que l’auteur est une femme. Ses arguments, comme ceux pointés par S. Butler, sont typiquement des arguments que nous qualifierons d’essentialistes puisqu’ils reposent sur l’idée que les femmes, quelles que soient leur époque et leur culture, partagent nécessairement les mêmes intérêts (domestiques, religieux), les mêmes perspectives (« sentimentalité et utilitarisme »), les mêmes « incompétences » et les mêmes défauts (surtout le narcissisme). R. Ruyer parle de féminisme sans se déclarer lui-même féministe et il est clair que le choix d’un tel sujet, au moins, a dû être influencé par ce qu’il désigne comme la « querelle des sexes » de son époque19. Selon lui, l’auteure de l’Odyssée est sinon féministe, au moins interprète d’un « féminisme inarticulable » : non seulement elle met en scène plus de personnages féminins que de personnages masculins, mais ses personnages féminins sont bienveillants plutôt que séducteurs (Hélène, par exemple, qui de femme fatale est transformée en « femme du monde accomplie », p. 36). En outre, ces personnages qui donnent des conseils aux personnages masculins sont moteurs de l’action narrative. « Femmes ou déesses, […] elles sont aussi, dans leur bienveillance, fermes, autoritaires, sachant toujours “la chose à faire”, devant les hommes embarrassés » (p. 39), tels Ménélas à côté d’Hélène ou Télémaque à côté d’Athéna.

  • 20 Doherty 1995.

13Le rôle actif des personnages féminins est aujourd’hui largement reconnu par les spécialistes – est-ce parce qu’il y a parmi eux désormais davantage de femmes ? – sans pour autant que ces mêmes spécialistes en tirent les conclusions de S. Butler ou de R. Ruyer. J’ai essayé, il y a quinze ans, d’expliquer un tel accent mis sur les personnages féminins par un désir du poète de s’adresser à un auditoire composé non seulement d’hommes mais également de femmes20. Pour expliquer le fait qu’une fois arrivé aux enfers Ulysse aperçoit d’abord les femmes illustres du passé, avant les hommes illustres, et pour étayer sa thèse sur le fait que le poète ne pouvait être qu’une femme, Samuel Butler s’était amusé à questionner les dames de son entourage en leur demandant qui elles souhaiteraient rencontrer en arrivant au Ciel. De son ton mi-moqueur mi-sérieux, il tirait argument de ce qu’elles demandaient toutes à voir la Vierge Marie, Éve, Cléopâtre, Sapho, etc. plutôt que les hommes illustres qu’il aurait, lui, voulu rencontrer : seule une femme pouvait avoir composé le récit d’Ulysse aux Enfers !

  • 21 Le poème ne s’adresse pas non plus aux femmes esclaves, à moins que ce soit pour leur faire une le (...)

14Mon interprétation est différente et fondée non sur la simple prééminence des femmes dans l’Odyssée mais sur le fait que c’est la reine Arété qui répond la première pour louer le récit d’Ulysse et pour l’en récompenser. Si l’aède voulait suggérer, par la réponse favorable de la reine et du roi au récit d’Ulysse, qu’il méritait lui-même une récompense, la priorité qu’il donne à la réponse de la reine peut être interprétée comme un signe envoyé aux dames de son propre auditoire : il leur faisait, à elles aussi, un compliment en leur adressant un épisode de « leur » histoire. À partir de cette observation et à l’aide des concepts de la narratologie, j’ai étudié les rapports établis dans l’Odyssée entre narrateurs et narrataires, ceci sous le signe du genre (gender). Contrairement à S. Butler et R. Ruyer, j’ai pensé – et je pense toujours – qu’il n’est pas spécialement valorisant pour une femme de s’identifier aux personnages féminins de l’Odyssée. Malgré R. Ruyer, je vois à côté des personnages dits « bienveillants » des femmes fatales privées de parole, ou presque, ainsi Clytemnestre ou les Sirènes. Hélène, après avoir exprimé le même repentir de ses actions passées que celui qui lui est attribué dans l’Iliade, tente de se justifier par le récit de son entente avec Ulysse, entré dans Troie par la ruse. Or, ce récit est aussitôt démenti par celui que fait Ménélas (Odyssée iv, 235-289). Même Pénélope, qui a le privilège de raconter ses propres aventures au héros avant d’écouter les siennes, n’a que quelques vers pour le faire (xxiii, 302-305). Le lendemain, lorsqu’Ulysse part à la campagne pour se préparer à rencontrer les parents des prétendants assassinés, il ordonne à Pénélope de rester chez elle et de se taire (xxiii, 361-365) ; elle n’apparaît d’ailleurs pas dans le chant xxiv. S’il y a compliment fait aux femmes, de la part de l’aède et du héros qui le double, c’est un compliment intéressé. Chez les Phéaciens, Ulysse raconte son voyage pour se procurer l’aide de son auditoire, y compris de la reine Arété. Chez lui à Ithaque, il raconte son voyage à Pénélope en récompense de sa fidélité. L’épopée s’adresse donc non pas aux femmes en général, non pas aux femmes constituées en groupe, mais à certaines femmes, celles qui peuvent se mettre à la place d’Arété ou de Pénélope, c’est-à-dire à des femmes aristocrates à titre individuel21. La logique du récit réclame leur adhésion et leur promet en échange des louanges comparables à celles que font Ulysse et le poète aux personnages secondaires féminins.

15Faut-il s’en tenir là ? Aujourd’hui, à une époque où les féministes ont tendance à souligner l’activité des femmes davantage que les limites posées à cette activité, je me demande si des chants de femmes n’ont pas existé, à côté des chants d’hommes qui nous sont parvenus. Si l’Odyssée n’est pas l’œuvre d’une femme, doit-on pourtant négliger l’hypothèse de l’existence historique de poétesses à l’époque de la composition de l’épopée ?

Poétesses antiques et traditions collectives féminines

  • 22 Butler 1967 : 11-12. Des noms qu’il cite, un au moins (Érinne) est d’une poète hellénistique ; d’a (...)
  • 23 Pour d’autres exemples, voir plus bas, note 26.

16Samuel Butler, pour appuyer sa thèse, cite l’exemple de Sappho et de celles dont les noms et parfois même quelques fragments ont subsisté22. R. Ruyer estime que la poétesse de l’Odyssée était obligée de s’exprimer par le genre de l’épopée parce que la poésie lyrique n’existait pas encore. Or, il n’y a aucune raison de croire que le lyrisme est né avec Sappho. Il est plus probable, vu le raffinement de sa poésie, que celle-ci soit le fruit d’une tradition établie depuis déjà longtemps. Il est certes difficile d’imaginer une femme ayant eu la possibilité de devenir aède, c’est-à-dire d’entrer en apprentissage, de voyager, de chanter en solo pour un public d’hommes ou un public mixte. Pourtant, des indices montrent que certaines femmes connaissaient très bien la tradition épique, ainsi, par exemple, l’usage qu’en fait Sappho dans ses poèmes, notamment le fragment 56 (édition Reinach-Puech), composé en mètres surtout dactyliques et où il est question d’un thème épique, le mariage d’Hector et d’Andromaque23.

  • 24 Par exemple, Euripide, Ion 196-200 ; Mélanippe philosophe, fr. cité par Denys d’Halicarnasse, Rhét(...)

17Puisque les traces d’une tradition orale féminine en Grèce sont faibles (nous disposons de quelques remarques chez les auteurs tragiques sur les contes ou chants de femmes au travail24), le chercheur a profit à regarder les traditions toujours vivantes ailleurs. Je reconnais qu’il faut se méfier – l’exemple de S. Butler nous montre ô combien – des comparaisons rapidement établies avec des cultures éloignées dans l’espace et le temps. Un tel regard comparatiste peut néanmoins être particulièrement suggestif parce qu’il nous donne des idées sur ce qui a pu exister et peut ainsi orienter la recherche vers de nouvelles pistes.

  • 25 Rao 1991.
  • 26 DuBois 1978 ; Winkler 1990 : 167.
  • 27 Winkler 1990 : 162-187.

18J’ai, de mon côté, cherché à comprendre le fonctionnement de traditions orales en Grèce moderne, en Inde, en Serbie et Bosnie, ainsi qu’en Afrique. Dans ces pays où il reste (ou restait encore, il y a quelques décennies) une tradition vivante, on s’aperçoit que les femmes y prennent une part active, souvent avec des genres – au sens littéraire – qui leur sont propres mais qui sont toujours en liaison avec les traditions masculines. En Inde, par exemple, les femmes brahmines de la région d’Andhra Pradesh chantaient, il y a cinquante ans, leurs propres versions de certains épisodes du Ramayana qui se distinguaient par la place d’honneur qui était dévolue aux personnages féminins et à leur point de vue (ce que les narratologues appellent la focalisation)25. Plusieurs critiques ont, de la même manière, repéré chez Sappho des répliques à la tradition épique masculine26. John Winkler a plaidé avec éloquence pour la présence chez la poétesse de Lesbos de ce qu’il désigne comme une « connaissance double » : en tant que membre du public d’Homère, elle partage la perspective masculine dominante, et en tant que femme, elle est susceptible de voir la réalité différemment, intégrant des savoirs inconnus des hommes27. Dans ses poèmes à perspectives multiples, Sappho offre ainsi à son auditoire la possibilité de s’identifier tantôt aux personnages masculins, tels Diomède ou Ulysse, tantôt à des personnages féminins aimés de la narratrice, tantôt à l’une des figures de la narratrice (présente, passée, angoissée, réservée) qu’elle met en scène.

  • 28 Cette thèse est soutenue en détail dans Doherty 2008.

19Par cette enquête sur les possibles élaborations poétiques féminines, la question a donc été déplacée : y aurait-il, dans l’épisode phéacien de l’Odyssée où Ulysse décrit sa rencontre avec les femmes illustres du passé, des traces de genres ou de traditions mythiques féminines ? Il me semble que la célèbre rencontre d’Ulysse et de Nausikaa sur la plage, lorsqu’il lui fait une sorte de cour manquée et qu’elle le prend pour un dieu déguisé, rappelle les liaisons entre dieux et femmes mortelles qui figurent dans le récit d’Ulysse prononcé au chant xi de l’Odyssée ainsi que dans le Catalogue des femmes attribué à Hésiode. Est-ce que l’effet de perspective remarqué par S. Butler, et qui l’a fait penser à une femme auteure, ne laisse pas plutôt entrevoir des versions féminines de l’Odyssée, comme celles du Ramayana, qui auraient été composées avant ou parallèlement à la version homérique ? Je pense l’hypothèse probable, non seulement à cause de la focalisation de l’épisode qui fait une place si importante aux paroles de Nausikaa, mais également à cause de la reconnaissance chez le narrateur d’un écart presque culturel entre la perspective des femmes et celle des hommes en Phéacie. Selon Nausikaa, et selon Athéna déguisée en fillette, c’est la reine Arété qui décidera du sort d’Ulysse. Athéna rappelle à propos (Od. vii, 58-77) l’ascendance de la reine selon le schéma typique des généalogies de femmes illustres conservées dans le Catalogue hésiodique. Cet avis, respecté par Ulysse, n’est cependant pas celui des hommes de Phéacie, comme le montrent les interventions du vieux conseiller Echenêos : selon lui, c’est au roi d’accueillir l’étranger (vii, 155-161) et d’approuver les propos de la reine (xi, 342-6). Ulysse, pour sa part – comme ailleurs dans le poème – se montre sensible à la perspective féminine : dans son récit, au chant xi, ce sont les femmes elles-mêmes qui lui content leurs histoires. Est-ce une manière de reconnaître que les femmes ont leurs propres versions de l’histoire, et que celles-ci peuvent être reprises dans les versions masculines ou les influencer28 ?

20Je sais bien qu’en cherchant des traces de tradition féminine parmi les restes de traditions surtout masculines, je cours le risque de l’argumentation circulaire. S. Butler avait tort de croire qu’il est facile de déterminer le sexe de l’auteur d’une œuvre anonyme. Un homme peut mettre en scène des personnages féminins et leur donner la parole, ou faire la place d’honneur à leur point de vue. Une femme peut en faire autant pour des personnages masculins. S’il y a des femmes (et des hommes) qui contestent l’idéologie masculine, il y en a qui la soutiennent et la font respecter dans leur entourage. Narayana Rao remarque que les femmes brahmines dont il a étudié les chants n’avaient aucune conscience d’un écart entre leurs versions et celles de l’épopée masculine. Cela dit, quand les traditions féminines sont accessibles, il est possible d’étudier les échanges et les circulations de thèmes aves les traditions masculines. Quand ces traditions féminines manquent, nos hypothèses – si suggestives soient-elles – ne peuvent malheureusement être démontrées. Est-ce une raison pour ne pas les formuler ?

  • 29 « Comment distinguer des différences de genre en matière d’histoire culturelle lorsqu’un groupe en (...)

21Je crois qu’il est important de tenir compte de la présence des femmes dans toute société et de leur possible participation aux activités pour lesquelles il existe des parallèles ailleurs, comme c’est le cas en ce qui concerne les traditions orales. La volonté de « retrouver les femmes » a marqué les débuts de la recherche féministe dans les années 1960 et 1970. Elle est perçue aujourd’hui comme simpliste, une première phase dépassée, parfois résumée en anglais par add women and stir (« versez les femmes et touillez »). Quarante ans de recherches nous ont appris à repérer les nuances d’application des catégories du genre/gender, qui varient de culture à culture et d’époque en époque. La catégorie du féminin, ce n’est pas la même chose que « les femmes » (qui, elles, ne sont pas toutes les mêmes !). Pour certaines cultures du passé, il est possible que les femmes soient perdues à jamais. Pourtant, je crois qu’il faut continuer nos efforts pour les retrouver29. Samuel Butler nous sert en quelque sorte de leçon en nous rappelant, à son insu, qu’une telle recherche n’est pas facile et risque de buter sur des anachronismes ; il nous rappelle également que la plupart des lecteurs s’intéressent aux œuvres classiques précisément dans la mesure où elles laissent entrevoir un monde vivant, peuplé de femmes autant que d’hommes.

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Bibliographie

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Sources citées

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Notes

1 Cet article est dédié à la mémoire d’Andrew Grene, aide diplomatique de l’onu mort dans le tremblement de terre à Haïti, en janvier 2010. Je tiens à remercier Violaine Sebillotte Cuchet qui m’avait invitée à présenter ces réflexions lors d’un séminaire tenu à Paris et qui a relu et corrigé mon français pour cette version écrite.

2 Butler 2009 : 12.

3 « See the heart of the writer […] for art is only interesting in so far as it reveals an artist », Butler 1967 : 6.

4 Je remercie Ch. Angelliaume de m’avoir envoyé son curriculum vitae. Dans sa traduction il y a des fautes qu’un helléniste ne ferait pas : par exemple, là où S. Butler écrit « the Greek being easy » (Butler 1967 : 6), voulant dire que le grec de l’Odyssée est facile, le traducteur met « le grec étant une langue facile » (Butler 2009 : 12). Il semble que le traducteur n’aie pas toujours compris l’anglais de S. Butler et ne soit pas assez référé au texte homérique.

5 « J’avais l’immense avantage d’aborder le poème avec un regard neuf» (Butler 1967 : 6).

6 Voir Whitmarsh 2002 et Holt 1989 : 95-97.

7 Butler 1892 : 98.

8 Butler 1967 : vii.

9 Dans le milieu américain, au moins, les méthodes critiques des littéraires sont adoptées par les antiquistes avec un retard souvent important. Dans les études homériques, l’influence du New Criticism, qui veut minimiser les données biographiques et même historiques pour insister sur la structure interne d’une œuvre, prend la forme de l’« unitarianism » ou croyance en « the unity of authorship » de chaque épopée. Voir, par exemple, Whitman 1958 : 1-2, 12-14 ; Bassett 1938 : 1.

10   Titre d’une version de la préface de D. Grene : Grene 1967.

11 Butler 1967 : 268, cité et édité par D. Grene, Butler 1967 : xi, et traduit par Angelliaume 2009 : 272-273.

12 Un autre écrivain qui s’est inspiré des recherches de Butler sur l’Odyssée est Robert Graves, qui dans son roman Homer’s Daughter a élaboré l’histoire de l’« auteure » et de sa rencontre avec le modèle historique d’Ulysse.

13 Butler 2004 : xii-xiii.

14 Dougher 2001.

15 Christian Angelliaume, communication personnelle (courriel), 1er février 2010.

16 Butler 1967 : vii.

17 Ce que l’on appelle aussi le situationnisme ou la standpoint theory.

18 Ruyer 1977. Je remercie Louise Bruit Zaidman de m’avoir signalé ce livre.

19 Ruyer 1977 : 34.

20 Doherty 1995.

21 Le poème ne s’adresse pas non plus aux femmes esclaves, à moins que ce soit pour leur faire une leçon de fidélité.

22 Butler 1967 : 11-12. Des noms qu’il cite, un au moins (Érinne) est d’une poète hellénistique ; d’autres sont des noms de femmes à qui s’adresse Sappho dans ses poèmes. Il est probable que Sapho avait des amies et rivales qui elles aussi étaient poètes, mais il n’y a pas moyen de savoir si elles sont nommées dans les poèmes subsistants.

23 Pour d’autres exemples, voir plus bas, note 26.

24 Par exemple, Euripide, Ion 196-200 ; Mélanippe philosophe, fr. cité par Denys d’Halicarnasse, Rhét. 9, 11 (= Dionysius Halicarnaseus, De antiquis oratoribus, éd. Hermann Usener et Ludwig Radermacher, Stuttgart, Teubner [1899], réimprimé en 2 vols, 1965, vol. II, p. 346); Diodore de Sicile I, 7, 7.

25 Rao 1991.

26 DuBois 1978 ; Winkler 1990 : 167.

27 Winkler 1990 : 162-187.

28 Cette thèse est soutenue en détail dans Doherty 2008.

29 « Comment distinguer des différences de genre en matière d’histoire culturelle lorsqu’un groupe entier est silencieux? Ce silence vaut-il consentement ? Ou bien n’avons-nous pas encore trouvé les bonnes questions ni les bonnes formulations pour ces questions ? », Winkler 1990 : 164.

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Pour citer cet article

Référence papier

Lillian Doherty, « La « maternité » de l’Odyssée »Clio, 32 | 2010, 149-164.

Référence électronique

Lillian Doherty, « La « maternité » de l’Odyssée »Clio [En ligne], 32 | 2010, mis en ligne le 31 décembre 2012, consulté le 09 décembre 2024. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/clio/9877 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/clio.9877

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Auteur

Lillian Doherty

Professeure à l’Université du Maryland. Ses domaines de recherche sont l’épopée grecque, la mythologie classique, et leur réception à l’âge moderne, surtout sous le signe du genre/gender. Elle a notamment publié Siren Songs: Gender, Audiences, and Narrators in the Odyssey (Michigan, 1995) et Gender and the Interpretation of Classical Myth (Londres, 2001). Ldoherty@umd.edu

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