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Dossier

Contraception et avortement dans les Antilles françaises (Guadeloupe et Martinique, 1964-1975)

Contraception and abortion in the French Antilles (Guadeloupe and Martinique, 1964-1975)
Michelle Zancarini-Fournel
p. 87-108

Résumés

L’article se propose de voir comment ont été promus par les gouvernements de la Ve République la contraception et l’avortement en Guadeloupe et Martinique entre 1964 et 1975. La volonté de différencier la métropole (politique nataliste) des Antilles (politique néo-malthusienne) a été battue en brèche par le refus de l’Église et de certains partis politiques antillais. Les féministes ont dénoncé ces différences de politique. La contraception a été par ailleurs encouragée par des associations et des médecins soucieux d’améliorer la vie des femmes en limitant les grossesses à répétition. En fin de compte, ce sont les femmes elles-mêmes qui ont décidé (ou non) de limiter les naissances.

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Texte intégral

  • 1 Archives nationales (AN) 19940386/12, instructions n° 973 aux préfets du ministre d’État chargé d (...)
  • 2 Pavard, Rochefort & Zancarini-Fournel 2012.
  • 3 Rapport d’Alfred Murcy cité par Gautier 1988 : 389-402.
  • 4 Vergès 2017. Voir le compte rendu du livre dans ce numéro, rubrique Clio a lu.
  • 5 Paris 2018.
  • 6 Gautier 1988 : 400. Arlette Gautier a produit de nombreux articles sur le système d’allocations f (...)

1Le projet de cet article est né d’une phrase glanée dans les archives du préfet de la Guadeloupe (juillet 1965-juillet 1967), Pierre Bolotte : il indiquait, rétrospectivement, n’avoir pas pu appliquer la politique du gouvernement en matière d’espacement des naissances et de contraception, rappelée dans une note du 9 mai 1966, parce que l’évêque s’y était opposé1. Cette affirmation – qui devait être confirmée – m’avait étonnée à double titre : la précocité en Guadeloupe de la politique contraceptive du gouvernement de Georges Pompidou, alors que les lois restrictives de 1920 sur l’interdiction de la propagande anticonceptionnelle et celle de 1923 sur la correctionnalisation de l’avortement étaient appliquées fermement dans l’hexagone2 ; et une conception particulière de la laïcité de l’État avec, selon les Mémoires du préfet, cette intervention déterminante de l’évêque dans une politique publique. Autre piste suggérée dans un rapport sur « Le régime des prestations familiales dans les DOM », la diversité des contextes où étaient soulignées les différences d’application des lois entre les quatre départements d’Outre-mer3. Ces réflexions et la lecture du livre de Françoise Vergès sur Le Ventre des femmes4 m’ont conduite à enquêter sur les politiques de restriction des naissances par la contraception et l’avortement en Martinique et en Guadeloupe entre 1964 et 1975 (pour pouvoir ultérieurement les comparer avec celles pratiquées à la Réunion évoquées par Françoise Vergès, mais surtout développées plus longuement dans la thèse de Myriam Paris soutenue en 20185). Par ailleurs j’ai commencé à jauger l’implication pour la régulation des naissances d’actrices et d’acteurs locaux en faveur du planning familial, comme l’avait souligné dès 1988 la démographe Arlette Gautier6.

  • 7 Manicom 1972.

2Conçu comme un rapport d’étape d’une recherche en cours de plus longue haleine, cet article examine la spécificité des politiques démographiques de l’État destinées aux femmes dans les départements de la Caraïbe et les initiatives d’Antillais et d’Antillaises, professionnels du milieu médical ou enseignant, pour se confronter à la question des très nombreuses naissances au regard des aspirations de certaines mères qui souhaitaient en limiter le nombre. En effet, dans le premier xxe siècle, l’amélioration progressive de la situation sanitaire aux Antilles françaises s’est traduite par une baisse de la mortalité, mais aussi par une hausse de la natalité. De 1950 au milieu des années 1960, les Guadeloupéennes ont donné naissance en moyenne à six enfants par femme et, vingt ans plus tard, ce nombre était divisé par deux. Tenter d’expliquer cette diminution drastique des naissances sera l’objet de cet article à l’aide du suivi des politiques démographiques en direction des Antillaises non dans les textes programmatiques ou les discours, mais dans les pratiques à travers les sources étatiques (dossiers aux Archives nationales : correspondances des préfets, rapports d’experts du Plan et rapports de démographes), ou encore les témoignages des protagonistes impliqués dans la diffusion d’une politique de planning familial – publique dans le cas du docteur Yoyo en Martinique au Centre d’études, de documentation, d’information familiale et de formation, le CEDIF ; ou privée, comme dans le cas de Jacqueline Manicom en Guadeloupe avec l’association « La maternité consciente »7. Il s’agira de comparer les intentions néo-malthusiennes des gouvernements successifs de la IVe et Ve République avec le bilan contrasté de la mise en œuvre de ces politiques étatiques en Guadeloupe et Martinique en direction des Antillaises, face aux réactions défavorables de l’Église, et avec le soutien d’associations promouvant la régulation des naissances.

Inquiétudes démographiques et tentatives de planification étatique pour une régulation des naissances

  • 8 Leiris 1955 : 178.

La question du surpeuplement se pose en termes plus abrupts ; toutefois, elle interfère avec celle des relations interraciales dans la seule mesure où, dans les conditions présentes, la forte densité de la population est un facteur aggravant du bas niveau de vie de la masse de couleur et où seraient inéluctablement interprétées comme imbues de « racisme » les solutions, parfois préconisées, consistant à n’adopter aucune mesure susceptible d’encourager la natalité (ce qui serait senti comme discriminatoire) ou bien à susciter un courant migratoire vers la Guyane française (ce qui prendrait pour la plupart la signification d’une invitation à l’exil dans une région ingrate, ou même d’une sorte de déportation)8.

  • 9 Voir le chapitre 5 de la thèse de Myriam Paris (2018).
  • 10 Giacottino 1967 : 221.
  • 11 Expression de l’éducateur et psychanalyste, André Berge en 1961 citée par De Luca Barrusse 2018 : (...)

3Dans la conclusion de son rapport sur les civilisations de la Martinique et de la Guadeloupe établi à la demande de l’UNESCO, l’ethnologue Michel Leiris, visiblement embarrassé, faisait part de questions importantes à ses yeux pour l’avenir : le « surpeuplement » et le projet gouvernemental (non abouti) d’envoyer des Antillais en Guyane pour soulager la « forte densité de la population » auquel s’ajoutait la question du faible niveau de vie des classes populaires distinguées par la couleur. Publié en 1955, ce rapport témoigne de la précocité de la réflexion gouvernementale sur la question de « l’explosion démographique » et les réactions supposées à ces projets. Depuis le début des années 1950, la croissance de la population mondiale est une préoccupation de l’ONU en particulier concernant les pays dits alors « du Tiers Monde »9. Le débat international sur la régulation des naissances s’accompagne des mesures drastiques mises en pratique en Chine et en Inde depuis 1951, mais également dans l’île antillaise de la Barbade – anglaise depuis 1625, indépendante en 1966 – qui devient un modèle pour les démographes et les planificateurs des Antilles françaises : la croissance démographique a été freinée dès 1961 du fait de l’émigration des jeunes Barbadiens ; les contraceptifs sont en vente libre comme dans tout l’Empire britannique mais peu utilisés et un réseau de visiteuses médicales est organisé à la Barbade afin d’en promouvoir l’usage ; des cliniques sont ouvertes pour la pose des stérilets10. Paradoxalement, la France métropolitaine est, dans le même temps, travaillée par « le complexe de la dénatalité »11.

Les obstacles rencontrés par la politique néo-malthusienne de l’État français aux Antilles

  • 12 George (1962) analyse dans le fascicule 4, le rapport rédigé par Mr Pellier consacré à « La popul (...)
  • 13 Placide 2009 ; Jalabert 2007 ; Dumont 2010 ; Sainton 2012.
  • 14 Jean Rigotard, Chef du service des DOM au Commissariat au Plan. Rapport général du iiie plan, p.  (...)

4Dès 1952 le gouvernement français s’était préoccupé de l’évolution démographique dans « les départements français d’Outre-mer et dans les pays africains d’expression française ». Sollicité, le Haut comité consultatif de la population et de la famille avait produit plusieurs rapports, relayés par le géographe Pierre George, dans lesquels étaient avancées des projections démographiques considérées comme inquiétantes, pour la Martinique (276 000 habitants en 1960, prévision de 460 000 en 1980) et la Guadeloupe (236 000 habitants en 1960, 433 000 en 1980)12. Après les rébellions urbaines de décembre 1959 à Fort-de-France en Martinique, le gouvernement définit une nouvelle politique de développement économique et social pour les Antilles13. Le conseil restreint du gouvernement de Michel Debré du 2 octobre 1961 entend assurer, face aux revendications autonomistes, le statu quo institutionnel mais aussi, en encourageant l’émigration des habitants des départements d’Outre-mer, contribuer à la croissance démographique de la métropole l’accroissement naturel y étant considéré comme insuffisant. Les diverses commissions locales du Plan proposent une double stratégie avec des objectifs déclarés pour l’amélioration du niveau de vie, de la santé et de l’alimentation des enfants grâce à des prestations en nature et pour une politique de limitation des naissances nécessitant la transformation de la loi de 192014.

5Le gouvernement a appelé dans un premier temps cette politique « contrôle des naissances » avant de choisir ultérieurement l’expression « régulation des naissances » moins autoritaire et prescriptive en apparence, comme le constate en avril 1968 le secrétaire général de la préfecture de Guadeloupe :

  • 15 AN 19940386/12. Contrôle des naissances. Dossier général. Note du secrétaire général de la préfec (...)

L’expression malencontreuse de « contrôle des naissances » a pu faire croire à certains que l’État envisageait une immixtion dans la vie privée du couple et dans le domaine de la conscience individuelle, mais en réalité les auteurs et les responsables d’un tel « contrôle » ne peuvent être que les parents eux-mêmes et au premier chef les mères. Si les pouvoirs publics estiment de leur devoir de leur en donner les moyens ils ne songent nullement à leur en imposer l’usage15.

  • 16 Condon 2000 : 169-200 ; Milia 2007 : 93-101 ; Pattieu, 2016 : 81-113.
  • 17 AN 19940386/12. Claude Charpentier, Mémoire de stage de l’ENNA (1966) « Le problème démographique (...)

6L’autre volet de la politique néo-malthusienne concerne l’organisation de l’émigration vers la métropole. C’est dans cet objectif qu’est créé le BUMIDOM (Bureau pour le développement des migrations dans les départements d’Outre-mer), pour prévenir les risques d’explosion sociale dans les trois départements insulaires (Guadeloupe, Martinique, Réunion) du fait de l’augmentation du chômage des jeunes Antillais et Antillaises qui forment la moitié de la population et aussi pour répondre aux besoins de main-d’œuvre de la France métropolitaine. De 1963 à 1981 (année de sa suppression) le BUMIDOM a ainsi organisé l’émigration en France métropolitaine de 42 689 Guadeloupéens et 42 622 Martiniquais16. Un stagiaire de l’ENA à la préfecture de la Martinique propose même en 1966 de « faire partir les femmes surtout […] si l’on veut que cela se traduise par une diminution de naissances »17. Promue par l’État, cette émigration de femmes (de 1/3 à la moitié des départs selon les années) et d’hommes jeunes en âge de procréer a, de fait, freiné les naissances aux Antilles.

  • 18 AN 19940386/12. Contrôle de naissances. Dossier général. Note du secrétaire général de la préfect (...)
  • 19 AN 19940386/12. Rapport du préfet de la Martinique, Pierre Lambertin, le 30 janvier 1967 au minis (...)

7La politique gouvernementale de « contrôle des naissances » est justifiée par les projections des démographes estimant que la population de la Guadeloupe devrait doubler en 25 ans18. En avril 1965, un comité interministériel avait décidé que « le contrôle des naissances » se révélait nécessaire à l’équilibre démographique des départements des Antilles et de la Réunion. Des instructions sont envoyées aux préfets le 9 mai 1966. On est frappé dans les archives par la masse de documents administratifs sur le « contrôle des naissances », et par la répétition des consignes eu égard à la non effectivité des prescriptions ministérielles. Inappliquées aux Antilles comme le constatent maints rapports, elles sont rappelées par lettre du 13 janvier 1967. Le préfet de la Martinique préconise de surseoir à l’application de cette directive jusqu’aux élections législatives de mars 1967 du fait des difficultés de tous ordres : politiques (la « dénonciation par les autonomistes du malthusianisme néo-colonialiste »), sociales et morales (la contraception favorise la « licence des mœurs », à l’encontre de la « politique de nuptialité » prônée par l’Église), religieuses (très grandes réticences du clergé catholique « dont la collaboration est impossible à obtenir ») et médicales (« les médecins sont réticents par peur des accidents »)19.

  • 20 AN 19940386/12. Lettre du préfet de la Martinique le 4 octobre 1967 au ministre d’État des DOM et (...)
  • 21 Gautier 1988 : 393. AN 19940180/19. Créé par la loi 63-778, Journal Officiel 2 août 1963, le fond (...)
  • 22 AN 19940386/12. Lettre datée du 26 octobre 1967 du Dr Fouché, gynécologue-accoucheur à Fort-de-Fr (...)
  • 23 Bolotte 2001 : 526 (cf. ici note 1).

8Après une nouvelle lettre ministérielle de rappel en mai, le nouveau préfet de la Martinique, Jean Deliau, rend compte avec moult précautions oratoires de son activité le 4 octobre 196720 : à titre de « ballon d’essai », il a promu l’ouverture en octobre 1967 d’un centre d’orthogénie à la maternité dirigé par le Dr Fouché, avec assistante et infirmière, rémunérées sur les crédits du Fonds d’action sanitaire et sociale obligatoire (FASSO)21 et qui s’adresse seulement aux femmes mariées avec enfant(s). Il est nécessaire selon lui de réaliser un « débridage psychologique du problème » (sic) pour recueillir l’assentiment des « éléments les plus représentatifs de la population ». Il entend aussi constituer avec le bureau local de l’INSEE un échantillon-type de 1 500 femmes afin de comptabiliser celles qui « se prêteraient à une expérience de régulation des naissances » et celles qui y seraient réfractaires ; il s’agira de tester avec les « favorables » le processus psychologique et l’efficacité technique des différentes méthodes. Des demandes de matériel contraceptif (stérilets) passent par le cabinet du ministère des Départements et Territoires d’Outre-mer, démarche expliquée par l’interdiction habituelle de la commercialisation de ces produits contraceptifs en métropole22. Le préfet de Guadeloupe, Pierre Bolotte, rappelle dans ses Mémoires les admonestations du ministre d’État chargé des Départements et Territoires d’Outre-mer, Pierre Billotte, déplorant un taux de progression démographique de la Guadeloupe qui l’apparenterait « aux pays sous-développés de type asiatique ou africain »23.

9En effet, malgré les différents rappels de l’administration centrale aux préfets des départements antillais, le bilan de ce volontarisme gouvernemental reste très limité avant 1972. L’application anticipée en Guadeloupe et en Martinique de la loi Neuwirth sur la contraception de décembre 1967 était censée autoriser à terme la mise en œuvre d’une politique recherchée, en vain, depuis plusieurs années. L’ancien secrétaire général de la préfecture de la Martinique de 1967 à 1971, Claude Silberzahn, a témoigné de cette volonté politique d’appliquer rapidement la loi de décembre 1967, volonté quelque peu freinée par les débats jusqu’en 1972 au sujet des décrets d’application de la loi :

  • 24 Entretien réalisé par Sylvain Mary le 14 avril 2016 avec Claude Silberzahn ; je remercie Sylvain (...)

Le gouvernement avait entrepris vers 1967 de lancer une politique visant à faire baisser les taux de fécondité des Antillais. Pendant presque cinq ans, j’ai consacré beaucoup d’énergie à cette tâche. Je me suis entouré de deux médecins martiniquais, le docteur Pierre Petit, qui est devenu mon ami et qui bien plus tard a fait carrière politique de député, et le docteur Michel Yoyo. La tâche était difficile mais passionnante. En tant que protestant, j’étais convaincu des vertus d’une politique encourageant la limitation des naissances au regard de la situation locale et des perspectives de développement compliquées. Il a fallu d’abord affronter le clergé catholique local et ensuite certaines forces politiques et syndicales locales, par principe hostiles à la départementalisation et plus généralement à l’action de l’État sur l’île : nous avons été accusés de tous les maux24.

10L’éthique personnelle de ce haut fonctionnaire protestant correspond à celles d’autres actrices et acteurs sociaux – des sages-femmes et des médecins antillais – persuadés d’œuvrer pour le mieux-être des femmes des milieux populaires sujettes aux très nombreuses naissances et aux avortements clandestins.

  • 25 AN 19940386/12. Compte rendu de la réunion des préfets au secrétariat général des DOM le 25 avril (...)
  • 26 AN 19940386/ 16 et 17. Coupures de presse à propos de la discussion au Conseil général de Guadelo (...)

11Pour éviter les oppositions et les obstructions en particulier de l’Église catholique très influente localement, les préfets unanimes préfèrent ne pas proposer un texte spécifique d’application pour les DOM prévu par la loi de décembre 1967 afin ne pas avoir à le soumettre aux conseils généraux25. Désavoué sur ce point par le Conseil d’État, le gouvernement doit faire machine arrière. Effectivement, les débats devant les conseils généraux de Martinique et de Guadeloupe se révèlent très vifs en particulier à propos du texte sur l’application de la loi de 1967 aux DOM, concernant le droit des mineures de moins de 18 ans à recourir à la contraception sans autorisation des parents si elles sont déjà mères ou si elles sont émancipées : les filles des Antilles seraient de ce fait condamnées à la prostitution par ces mesures. On retrouve non sans surprise ce même argument dans le journal ecclésial Clartés (30 juin 1972) et sous la plume des communistes du journal guadeloupéen L’Étincelle (1er juillet 1972). L’Étincelle du 13 juillet 1967 conclut le débat par un éditorial au vitriol intitulé « La pilule » : « Les ovaires de nos femmes sont responsables de nos malheurs, il faut les castrer »26.

  • 27 AN 19940386/12. Lettre du préfet de la Guadeloupe au ministre d’État chargé des DOM et des TOM, 3 (...)

12Le décalage réel entre la politique nataliste conduite en métropole et la politique antinataliste dans les DOM insulaires, a été souligné y compris par l’évêque de Guadeloupe à l’assemblée du Conseil pastoral diocésain le 22 janvier 1969. Le propos est rapporté par le secrétaire général de la préfecture, venu devant le Conseil présenter la politique prônée par les pouvoirs publics à l’égard du planning familial. Le secrétaire général expose devant les ecclésiastiques de l’île les problèmes économiques des DOM du fait de l’éloignement de la métropole, le sous-développement réel, mais aussi l’ampleur de l’aide du gouvernement français. Il souligne le respect total de la part des pouvoirs publics de la liberté individuelle. Donner à chacun la liberté de choix n’entend pas contredire l’action éducative de l’Église, affirme-t-il. L’évêque en profite pour solliciter une subvention pour le centre de préparation au mariage catholique à Pointe-à-Pitre. Le président des associations familiales et catholiques demande avec insistance que les règlements d’application de la loi de 1967 soient soumis au Conseil général. Le juge pour enfants au tribunal de Basse-Terre, par ailleurs militant d’action catholique d’origine guadeloupéenne, dénonce la différence de politique suivie dans les DOM et en métropole. Un médecin catholique antillais, organisateur d’un planning des naissances avec la méthode des températures (méthode Ogino), s’insurge contre une peur de l’enfant qui « porterait atteinte au patrimoine humain antillais »27. Les débats de cette assemblée diocésaine avec le secrétaire général de la préfecture de Guadeloupe traduisent une interprétation quelque peu surprenante de la laïcité de l’État dans ce département antillais.

Face aux politiques de l’État, les prises de position des associations féminines et féministes

  • 28 Pavard 2012 : 37-42.
  • 29 AN 19940386/11. France Antilles, 22 avril 1967, « La Martinique à l’heure du Planning familial ».

13En 1953, s’était constituée une fédération mondiale d’associations néo-malthusiennes militant pour le contrôle des naissances, l’International planned parenhood committee (IPPC), prônant la « parenté planifiée », thème qui rencontre un écho aux États-Unis et en Europe en raison de l’inquiétude sur la croissance démographique dans les pays du Sud. L’expression est traduite en France par « Planning familial » par Marie-Andrée Lagroua Weill-Hallé, fondatrice en 1956 de « La Maternité heureuse » qui adhère en 1959 à l’International planned parenhood committee. Elle prend cependant quelque distance avec la fédération (IPPC) et rejette toute forme de malthusianisme pour ne pas heurter de front ce qui a été une constante, les politiques natalistes françaises depuis un siècle28. L’association change de nom en 1960 pour devenir Mouvement français pour le planning familial (MFPF) en métropole et se situe progressivement dans une optique de revendication du droit d’accès à la contraception en opposition à la politique des pouvoirs publics, alors que les associations de Guadeloupe et Martinique, avec leur objectif d’éducation et de limitation des naissances, ont été d’emblée soutenues par les autorités. Le 20 avril 1967, la doctoresse Christiane Verdoux, secrétaire générale du collège des médecins du Planning familial, de retour de la 8e conférence de l’International Planned Parenthood Fédération à Santiago, présente publiquement à Fort-de-France (Martinique) le planning familial et les moyens de contraception (en parlant cependant de « comprimé » et non de pilule contraceptive pour n’effrayer personne) devant une assemblée nombreuse composée surtout de femmes, conférence relayée par le journal gaulliste France Antilles29.

  • 30 Témoignages, 22 mai 1971 cité par Paris 2018 : 298, note 1198.

14Des féministes ont également souligné les différences de politique entre la métropole et les quatre départements d’Outre-mer. Le journal du parti communiste réunionnais, Témoignages, dont le directeur est Paul Vergès, publie même le 22 mai 1971 un tract des féministes métropolitaines du « Mouvement pour la liberté de l’avortement ! » qui dénonce la position du député Michel Debré opposé à la libéralisation de l’avortement, mais promouvant une politique antinataliste à La Réunion, se rendant ainsi « complice » des avortements et des stérilisations pratiqués sur les femmes réunionnaises30. La charte du Mouvement pour la liberté de l’avortement et de la contraception (le MLAC) fait le même constat en avril 1973 :

  • 31 Mouvement français pour le planning familial 1982 : 421.

La suppression des inégalités d’une contraception qui est réprimée en métropole, pour les mineures en particulier et favorisée par une politique raciste et malthusienne dans les DOM/TOM31.

15L’avocate Gisèle Halimi, créatrice du mouvement Choisir, le souligne également, dans La Cause des femmes en 1973 :

  • 32 Halimi 1973 : 116.

Il est clair qu’il y a une politique de contraception (pour ne pas dire de l’avortement) qui est bonne pour ces départements et qui ne l’est pas pour la France métropolitaine […] Le gouvernement a choisi au lieu d’industrialiser le pays, au lieu de créer des emplois, d’importer cette main-d’œuvre réunionnaise et antillaise. Le tout à bon marché et pour des emplois subalternes que seule l’immigration accepte encore32.

  • 33 AN 19940386/12. Rapport du préfet de la Guadeloupe, 1969 ; Pavard, Rochefort & Zancarini-Fournel (...)

16Pour faire face aux avortements clandestins, le préfet de Guadeloupe Jean Deleplanque, avait effectivement proposé en 1969, sans succès du fait de l’opposition de l’Église, « une politique de gratuité et de légalité de l’avortement », alors même que ce dernier est réprimé par la loi française et que les gouvernements successifs ont fait jusqu’en 1972 (procès de Bobigny) preuve de fermeté dans un contexte national marqué par l’intervention des mouvements féministes (le Mouvement de libération des femmes – MLF – et Choisir en 1971, le MLAC en 1973) en faveur de la contraception et de l’avortement libres et gratuits33.

17D’autres associations s’étaient constituées précocement dans le monde caribéen et avaient développé des actions très liées au contexte local avec des différences sensibles entre la Guadeloupe et la Martinique.

Sages-femmes, médecins et démographes, nouveaux et nouvelles protagonistes du planning familial aux Antilles

  • 34 Gautier 1988 : 400.

On a pu voir cependant dans les années 1960 l’émergence de nouveaux acteurs : les associations de planning et leur cooptation par les experts du plan, ou des « coups » politiques, tel celui qui constitua en 1975 l’attribution des prestations aux mères sans activité professionnelle. Toutefois ce qui frappe le plus c’est l’absence de dessein d’ensemble34.

18Tel était en 1988, le diagnostic de la démographe Arlette Gautier sur la situation antillaise. Si la mention des nouvelles et nouveaux protagonistes (médecins, démographes et militants et militantes du Planning familial) semble pertinente, on ne peut totalement souscrire à l’appréciation sur l’absence de dessein d’ensemble. En témoignent la volonté gouvernementale de faire diminuer la croissance de la population et l’élaboration d’un plan fondé sur l’émigration et le contrôle des naissances dont l’application n’a pas été évidente. En revanche rendre visibles l’action de nouveaux acteurs et actrices et les convergences entre les fondateurs et fondatrices des associations de planning familial, les planificateurs et les administrations préfectorales permet de comprendre la complexité de situations locales. En effet, en dépit de politiques identiques et des mêmes freins, les centres de planning familial ne se développent pas au même rythme en Martinique et en Guadeloupe. Il faut sans doute prendre en compte les différentes personnalités des préfets et des médecins impliqués dans la politique de régulation des naissances.

  • 35 Yoyo & Maxime 2014 : 28-29.

19Dans un premier temps, la Martinique a paru être à l’avant-garde de la lutte contre « la surpopulation ». Le préfet de Martinique avait réuni en mai 1962 un groupe de travail pour envisager la mise en œuvre d’une politique démographique dans le département. Tout est compliqué et très long à se mettre en place malgré la précoce initiative publique. Constituée dans le cadre des discussions des commissions locales du Plan, une association dépose ses statuts en préfecture le 13 avril 1965 : le CEDIF (Centre d’étude, de documentation et de formation), dirigée par le docteur Yoyo, est la première association de planning familial en Martinique. Le récit de la formation du CEDIF écrit par ses concepteurs plus de 40 ans après la création insiste beaucoup sur la formation des parents pour mettre en place une régulation des naissances (et non limitation, écrivent-ils/elles) et souligne leur refus de s’appeler « planning familial ». Le but était, selon eux, de donner une information sur les méthodes contraceptives et former les couples qui le désirent à la méthode des températures (dite méthode Ogino)35.

  • 36 AN 19940386/12. Lettre du préfet de Martinique au ministre d’État des DOM et des TOM, 28 janvier (...)

20À l’automne 1967, une consultation d’orthogénie est organisée à la maternité de Fort-de-France dirigée par le médecin-chef le Dr Fouché, une fois obtenu, non sans difficulté en raison de l’hostilité des catholiques, l’accord de la commission administrative de l’établissement. Le 3 février 1968 se constitue l’Association martiniquaise pour l’information et l’orientation de la famille dont le président est le docteur Fouché, qui réunit tous les gynécologues de l’île et de nombreux médecins généralistes. Une section « éducation » se charge d’une « véritable propagande en faveur d’une famille restreinte et constituée » calquée sur le modèle de la famille française36. Les membres des commissions locales du plan se félicitent en 1968 que le problème de la population donne lieu à de nombreux articles dans les journaux et sur les ondes ; mais selon le docteur Yoyo, France Antilles et la radio nationale sont les relais du pouvoir gaulliste et donc le porte-voix de la politique du gouvernement. L’activité du CEDIF et du docteur Yoyo n’est pas particulièrement appréciée par le préfet, sans doute du fait du positionnement à gauche des membres du CEDIF :

  • 37 AN 19940386/12. Lettre du préfet de Martinique au ministre d’État des DOM et des TOM, 30 janvier (...)

Le docteur Yoyo bien que PSU et de tendance nettement autonomiste, est personnellement convaincu de la nécessité de l’action mais l’a jusqu’à présent limitée à la forme éducative qu’il lui a donnée dans des conférences et des causeries dont il ne semble pas que le résultat ait été sensible37.

La Maternité consciente en Guadeloupe, l’efficace d’une association privée militante

  • 38 André Laplante, « Mémoire sur les notions et attitude qui peuvent affecter la diffusion du planni (...)
  • 39 Moutoussamy 2014 : 91.
  • 40 Brochure : « L’association guadeloupéenne pour le planning familial ou 40 ans d’Histoire de la Ma (...)
  • 41 Marie-Antoinette Simet-Lutin, « La régulation des naissances de 1964 à 1974 », document ronéoté, (...)
  • 42 Sa biographie est présentée dans Nicolas 2016 : 103-106, 145-149, 177-178. Voir ses romans autobi (...)
  • 43 « Déposition de Mme Jacqueline Manicom, épouse Letourneur, sage-femme des hôpitaux de Paris » (Ch (...)
  • 44 Dictionnaire littéraire des femmes de langue française : 398-400.
  • 45 Sur les événements de mai 1967 en Guadeloupe voir Sainton 2012 ; Collectif, Rapport de la Commiss (...)

21L’association « La Maternité consciente » a été déclarée en préfecture de Guadeloupe le 10 juillet 1964 avec son siège à Pointe-à-Pitre. Le logo porte le nom d’« Association Planning familial », dénomination plus présente dans les mémoires que celle de « Maternité consciente » selon une enquête menée en 197038. Les membres du bureau sont liés au milieu médical et au milieu enseignant, un certain nombre seraient proches ou membres actifs du parti communiste guadeloupéen39. Le premier président, Jacques Abel, est un médecin généraliste de Pointe-à-Pitre présenté comme un humaniste préoccupé des problèmes des couples40 ; la trésorière Marie-Antoinette Simet-Lutin (1927-2000), professeure de collège, obtient un détachement de l’Éducation nationale comme conseillère pédagogique pour l’éducation sexuelle dans l’association « La maternité consciente »41. Pionnière de la cause des femmes, elle a largement contribué comme Déléguée régionale aux droits de la femme (ministre Yvette Roudy) à la diffusion d’un féminisme institutionnel en Guadeloupe, outre la création de plusieurs associations. Dans le bureau, une sage-femme, présentée comme l’inspiratrice de l’association, Jacqueline Manicom-Letourneur (1935-1976) joue un rôle pivot (avec son mari Yves Letourneur, professeur de philosophie). Guadeloupéenne d’une famille d’origine indienne, elle était l’aînée de 20 enfants dont seuls six ont survécu. Révoltée par la vie de sa mère entre grossesses et deuils, elle choisit de devenir sage-femme des Hôpitaux de Paris en 195842. Elle entre en contact avec l’organisation Choisir en métropole, dépose en novembre 1972 comme témoin au procès de Bobigny sur son expérience de création d’un centre de planning familial en Guadeloupe ; elle précise « Le Planning là-bas donne gratuitement des stérilets et des pilules. En France, les femmes n’ont pas les mêmes avantages »43. C’est aussi une écrivaine féministe dont l’œuvre autobiographique dénonce l’exploitation de classe, de sexe et de race44. La Graine (1973) est le journal fictionnel sur son expérience de sage-femme noire qui doit se confronter à la domination de genre, de classe et de race du médecin accoucheur. Pour Jacqueline Manicom, la littérature doit servir à la justice sociale. Dans Mon examen de Blanc (1972), l’héroïne avorte elle-même de l’enfant du Blanc, abandonne ses études de médecine et retourne en Guadeloupe. Le roman est dédié « à ceux qui sont morts place de la Victoire en mai 1967 » et participe de la conscience historique guadeloupéenne45. Mais le suicide de l’auteure à 41 ans en 1976 ferme la voie.

  • 46 AN 19940386/12. Note du 12 mars 1968 sur l’activité du Planning familial et contrôle des naissanc (...)
  • 47 Jean-Pierre Guengant, Commission locale du plan, novembre 1970.

22En janvier 1968, la Maternité consciente ouvre son premier centre de consultations gratuites de planning familial à Pointe-à-Pitre, juste après l’adoption de la loi du 28 décembre 1967 qui a légalisé la contraception. Le second est ouvert à Basse-Terre en mars 1968. Entre 1969 et 1971, ouvrent en Guadeloupe 23 centres de planning familial dont 18 où travaillent des visiteuses qui vont dans les familles tenir des réunions d’information sur le modèle des visiteuses de l’île de La Barbade. L’association a recruté pour ces centres deux médecins d’origine guadeloupéenne à plein temps, parlant créole, qui distribuent gratuitement les contraceptifs aux femmes qui le souhaitent46. Ces centres ont vite connu le succès, et le démographe Jean-Pierre Guengant a estimé en 1970 que 3 000 à 4 000 femmes, soit 8 % des femmes de 20 ans à 40 ans y étaient déjà venues en consultation47.

23Depuis sa création la Maternité consciente a reçu de la préfecture encouragements et discrètes subventions. Une douzaine de médecins volontaires reçoivent en cabinet 700 à 800 consultations par an. Une statistique, un peu étonnante, a répertorié les catholiques parmi les consultantes : elles sont l’immense majorité (90 %). Au total entre 1968 (1 825 consultantes) et 1973 (12 573 consultantes), l’augmentation de la fréquentation est notable : il est estimé en 1973 à 35 % des femmes en âge de procréer. Selon la trésorière Marie-Antoinette Simet-Lutin, l’âge des consultantes a tendance à baisser, y compris chez des femmes célibataires.

24En fait, même certains catholiques reconnaissent la nécessité d’une diminution de la fécondité bien que l’évêque se soit prononcé en faveur des « méthodes naturelles ». Des médecins, des sages-femmes, des enseignants catholiques se mobilisent volontairement dans le cadre des associations de planning familial. Certains s’expriment dans le journal catholique de la Guadeloupe, Clartés, en précisant le sens de leur action :

  • 48 Clartés, 17 février 1967, n° 1044.

L’extrême misère physiologique et morale de tant de femmes accablées de maternités répétées et non voulues, ses répercussions sur l’enfant mal nourri, mal éduqué, mal aimé ; le drame de tant de couples pour qui toute nouvelle grossesse est considérée comme une catastrophe ; c’est la lutte contre ce fléau qu’est l’avortement. Voilà les raisons de notre action et non le surpeuplement, la famine ou la guerre nucléaire qui relèvent du domaine politique48.

  • 49 « Le peuple martiniquais est-il en voie de disparition ? » écrit le journal du parti communiste, (...)
  • 50 Cité par Paris 2018 : 370.

25Les auteurs de la tribune insistent sur l’épanouissement familial et non sur le règlement d’une question de « surpopulation ». L’appréciation correspond également au point de vue de médecins, de sages-femmes et d’experts soutiens de la cause autonomiste, tels le docteur Pierre Sainton ou le démographe Jean-Pierre Guengant, mais ne supportant pas la détresse de femmes des milieux populaires qu’ils côtoient en permanence. Certains journaux de gauche ou d’extrême gauche et les milieux indépendantistes – minoritaires mais très actifs – critiquent une politique de « génocide et de transformation de la composition des DOM par émigration noire et immigration blanche »49. C’est encore le point de vue d’Aimé Césaire en 1975 qui, à la tribune de l’Assemblée nationale, lors de la discussion sur le budget des DOM le 13 novembre 1975, proclame : « Je redoute autant la recolonisation sournoise que le génocide rampant »50.

26En 1975, la DASS de la Martinique récuse le retard dénoncé dans des rapports ministériels de l’application des textes relatifs à la régulation des naissances :

  • 51 Yoyo & Maxime 2014 : 59.

Nous tenons à rectifier notre erreur d’appréciation et à rendre un hommage particulier à tous ceux (médecins publics et privés, responsables des associations familiales membres du CEDIF) qui depuis plus de dix ans et parfois sans le secours d’aucune subvention ont apporté leur soutien actif au planning familial et permis l’infléchissement dès 1965, de la courbe de natalité de notre département51.

  • 52 AN 19940386/11. Rapport INSEE sur « La situation démographique dans les départements de la Martin (...)

27En réalité les phénomènes sont plus complexes qu’il n’y paraît puisque la baisse de la natalité avait commencé dès 1957 en Martinique tout en restant relativement élevée52.

Que peut-on savoir des souhaits et des réactions des Antillaises ?

  • 53 Yves Charbit, « Transition démographique aux Antilles françaises », Population et Sociétés, 139, (...)
  • 54 Mulot 2013.

28La politique gouvernementale sous-entend que les structures familiales antillaises caractérisées par un nombre important de naissances illégitimes et de familles monoparentales, devraient être modifiées. Le démographe de l’INED, Yves Charbit, conclut en 1980 que « la départementalisation a accéléré la diffusion du modèle de famille restreinte »53. Quelle a été la réaction des Antillaises à cette volonté politique de promouvoir le modèle européen de la famille nucléaire, même si cet objectif présent dans les rapports administratifs n’a jamais été assumé publiquement ? Stéphanie Mulot a souligné « la complexité des comportements féminins et maternels » et la « dynamique d’adaptation socio-économique » avec une diversité de formes familiales, dont la matrifocalité54. Une enquête orale approfondie auprès des sages-femmes ou de mères âgées serait nécessaire pour poursuivre la recherche, mais quelques indices statistiques nous permettent de dessiner une modification des attitudes face à la contraception et la planification des naissances.

29Une enquête réalisée en Guadeloupe en 1976, révèle ainsi que :

  • 55 Guengant & Geoffroy 2017 citant Charbit 1980. Le même auteur remet en cause le concept de transit (...)

85,5 % des Guadeloupéennes âgées alors de moins de 45 ans indiquaient ne plus vouloir d’enfants du fait des difficultés d’ordre économique liées à la taille de la famille, en invoquant en particulier le fait qu’elles devaient d’abord compter sur elles-mêmes pour élever leurs enfants (à cause de l’instabilité des unions), et aussi de leur souci de donner aux enfants déjà nés une éducation convenable55.

  • 56 Léridon & Charbit 1980 : 113 et 131.

30Il s’agit donc avant tout d’une contraception d’arrêt. Selon les résultats de cette enquête, la majorité des Guadeloupéennes et Guadeloupéens étaient informés de l’existence de la planification familiale, et 29 % des femmes de 15 ans à 49 ans utilisaient alors une méthode contraceptive (8 % des méthodes traditionnelles et 21 % des méthodes modernes dont 8 % la ligature, 7 % la pilule et 2,4 % le stérilet). De plus, 46 % des femmes déclaraient avoir déjà utilisé à un moment ou à un autre une méthode de contraception. La progression des consultations en planification familiale s’est poursuivie ensuite non seulement dans les centres de la Maternité consciente, mais aussi dans les centres de PMI et dans les cabinets médicaux privés. À partir de 1972, les centres de la Maternité consciente ne sont plus subventionnés par le FASSO et doivent fermer les uns après les autres. En 1974, il n’en reste plus que quatre. En Martinique, le taux de natalité a fortement baissé, passant de 34,9 ‰ en 1965 à 20,89 ‰ en 1975 et c’est la pilule qui a été diffusée massivement après 1968 et plébiscitée par les femmes, avec ou sans accord du conjoint56. Ces chiffres marquent un changement dans les relations femmes/hommes.

  • 57 Insee Antilles-Guyane : Recul de la natalité en Guadeloupe depuis 2005, Antianéco, 26, janvier 20 (...)
  • 58 Voir la tribune d’historiennes publiée dans Le Monde.fr le 8 mars 2018 « Simone Veil va au Panthé (...)

31Cependant la baisse rapide de la fécondité aux Antilles résulte aussi du nombre important d’avortements longtemps pratiqués clandestinement au péril de la santé et de la vie des femmes L’application de la loi Veil promulguée en janvier 1975 qui a encadré la pratique des IVG (Interruption volontaire de grossesse) a permis que celles-ci s’effectuent dans d’autres conditions sanitaires57. La sauvegarde des archives des IVG (fiches individuelles classées par département) conservées aux Archives nationales permettra à terme de connaître plus précisément et de rendre compte d’une sociohistoire des femmes ayant eu recours à l’IVG58.

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32Les projections démographiques et les prévisions catastrophistes et anxiogènes des hommes politiques des années 1950-1960 n’ont pas été validées par les faits. Alors que les experts du plan imaginaient en 1969 la poursuite de « l’explosion démographique », avec des fourchettes allant pour la Guadeloupe, par exemple, de 353 000 à 411 000 habitants en 1975, l’île atteint 235 000 habitants en 1974. Si le phénomène antillais s’explique en partie par le résultat des politiques d’émigration et de limitation des naissances à l’opposé de celles, natalistes, pratiquées en métropole, des dynamiques sociales profondes interfèrent :

  • 59 Sainton 2012 : 13. Une habitation est une plantation sucrière ; on parle de civilisation de post- (...)

Le basculement de la société antillaise de l’habitation tardive telle qu’elle fut léguée de la période post-esclavagiste du début du siècle à une nouvelle société antillaise : civilisation de la post-habitation, urbaine, mobile, consommatrice, soucieuse de modernité […] et vivant dans le trouble culturel identitaire et l’indécision politique59.

  • 60 Une enquête serait à mener sur le rôle de la franc-maçonnerie antillaise à l’image de l’influence (...)
  • 61 Vergés 2017.

33Promotrices de la planification familiale, sages-femmes, enseignant.es, médecins, travailleuses sociales, incarnent cette modernité décrite par l’historien Jean-Pierre Sainton. L’éducation des femmes pour une vie meilleure et l’amélioration de leur sort sont au centre des préoccupations de ces militantes et militants antillais60. Le bilan des politiques de limitation des naissances se révèle plus complexe qu’annoncé et ne peut se réduire à la « racialisation du ventre des femmes » décrite par Françoise Vergès61. La baisse précoce de la natalité avant l’effectivité de la mise en œuvre des politiques publiques discriminantes, comme la volonté des Antillaises de mieux assurer l’avenir de leurs enfants témoignent d’une mutation des cultures sociales et de l’affirmation de la capacité d’agir des femmes au-delà des volontés politiques, des habitudes et des traditions.

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Bibliographie

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Notes

1 Archives nationales (AN) 19940386/12, instructions n° 973 aux préfets du ministre d’État chargé des DOM et des TOM, 9 mai 1966 sur la régulation des naissances. Archives de Sciences Po, PB14, fonds Bolotte, Mémoires « Souvenirs et témoignages d’un préfet de la République (1944-2001) », tapuscrit, 2001, p. 527.

2 Pavard, Rochefort & Zancarini-Fournel 2012.

3 Rapport d’Alfred Murcy cité par Gautier 1988 : 389-402.

4 Vergès 2017. Voir le compte rendu du livre dans ce numéro, rubrique Clio a lu.

5 Paris 2018.

6 Gautier 1988 : 400. Arlette Gautier a produit de nombreux articles sur le système d’allocations familiales aux Antilles (voir le site de l’université de Brest où elle est professeure de sociologie).

7 Manicom 1972.

8 Leiris 1955 : 178.

9 Voir le chapitre 5 de la thèse de Myriam Paris (2018).

10 Giacottino 1967 : 221.

11 Expression de l’éducateur et psychanalyste, André Berge en 1961 citée par De Luca Barrusse 2018 : note 2.

12 George (1962) analyse dans le fascicule 4, le rapport rédigé par Mr Pellier consacré à « La population à la Guadeloupe, à la Martinique, à la Guyane et à La Réunion », La Documentation française, 1958, 239 p.

13 Placide 2009 ; Jalabert 2007 ; Dumont 2010 ; Sainton 2012.

14 Jean Rigotard, Chef du service des DOM au Commissariat au Plan. Rapport général du iiie plan, p. 405-407.

15 AN 19940386/12. Contrôle des naissances. Dossier général. Note du secrétaire général de la préfecture de Guadeloupe, avril 1968, p. 15. 

16 Condon 2000 : 169-200 ; Milia 2007 : 93-101 ; Pattieu, 2016 : 81-113.

17 AN 19940386/12. Claude Charpentier, Mémoire de stage de l’ENNA (1966) « Le problème démographique et la limitation des naissances en Martinique », Martinique, décembre 1966, p. 18.

18 AN 19940386/12. Contrôle de naissances. Dossier général. Note du secrétaire général de la préfecture de Guadeloupe, avril 1968.

19 AN 19940386/12. Rapport du préfet de la Martinique, Pierre Lambertin, le 30 janvier 1967 au ministre d’État des DOM et des TOM.

20 AN 19940386/12. Lettre du préfet de la Martinique le 4 octobre 1967 au ministre d’État des DOM et des TOM Pierre Billotte sur les mesures prises pour « la régulation des naissances ».

21 Gautier 1988 : 393. AN 19940180/19. Créé par la loi 63-778, Journal Officiel 2 août 1963, le fonds d’action sanitaire et sociale obligatoire (FASSO, appelé aussi FASO) est financé par un prélèvement de 40 % à 45 % sur le montant global des allocations familiales destinées aux Antilles pour subventionner la formation professionnelle, les cantines scolaires (un repas par jour dans les écoles maternelles et primaires) et les travailleuses familiales. À partir de 1967 et jusqu’en 1972, c’est le cas aussi pour la planification des naissances.

22 AN 19940386/12. Lettre datée du 26 octobre 1967 du Dr Fouché, gynécologue-accoucheur à Fort-de-France, au cabinet du ministre pour une demande de 300 stérilets.

23 Bolotte 2001 : 526 (cf. ici note 1).

24 Entretien réalisé par Sylvain Mary le 14 avril 2016 avec Claude Silberzahn ; je remercie Sylvain Mary de m’avoir autorisée à citer cet extrait d’entretien qu’il a réalisé pour sa thèse (Mary 2018 : 706).

25 AN 19940386/12. Compte rendu de la réunion des préfets au secrétariat général des DOM le 25 avril 1968.

26 AN 19940386/ 16 et 17. Coupures de presse à propos de la discussion au Conseil général de Guadeloupe sur les règlements d’administration publique de la loi de décembre 1967.

27 AN 19940386/12. Lettre du préfet de la Guadeloupe au ministre d’État chargé des DOM et des TOM, 31 janvier 1969.

28 Pavard 2012 : 37-42.

29 AN 19940386/11. France Antilles, 22 avril 1967, « La Martinique à l’heure du Planning familial ».

30 Témoignages, 22 mai 1971 cité par Paris 2018 : 298, note 1198.

31 Mouvement français pour le planning familial 1982 : 421.

32 Halimi 1973 : 116.

33 AN 19940386/12. Rapport du préfet de la Guadeloupe, 1969 ; Pavard, Rochefort & Zancarini-Fournel 2012.

34 Gautier 1988 : 400.

35 Yoyo & Maxime 2014 : 28-29.

36 AN 19940386/12. Lettre du préfet de Martinique au ministre d’État des DOM et des TOM, 28 janvier 1968.

37 AN 19940386/12. Lettre du préfet de Martinique au ministre d’État des DOM et des TOM, 30 janvier 1967.

38 André Laplante, « Mémoire sur les notions et attitude qui peuvent affecter la diffusion du planning familial en Guadeloupe », mai 1970, cité par Moutoussamy 2014 : 99-101.

39 Moutoussamy 2014 : 91.

40 Brochure : « L’association guadeloupéenne pour le planning familial ou 40 ans d’Histoire de la Maternité consciente (1964-2004) », 2004.

41 Marie-Antoinette Simet-Lutin, « La régulation des naissances de 1964 à 1974 », document ronéoté, 1976, 19 pages.

42 Sa biographie est présentée dans Nicolas 2016 : 103-106, 145-149, 177-178. Voir ses romans autobiographiques : Manicom 1972, 1973.

43 « Déposition de Mme Jacqueline Manicom, épouse Letourneur, sage-femme des hôpitaux de Paris » (Choisir 2006 [1973] : 89-91).

44 Dictionnaire littéraire des femmes de langue française : 398-400.

45 Sur les événements de mai 1967 en Guadeloupe voir Sainton 2012 ; Collectif, Rapport de la Commission d’information et de recherche historique sur les événements de décembre 1959 en Martinique, de juin 1962 en Guadeloupe et en Guyane, et de mai 1967 en Guadeloupe à Madame la ministre des Outre-mer, La documentation française, novembre 2016 [en ligne].

46 AN 19940386/12. Note du 12 mars 1968 sur l’activité du Planning familial et contrôle des naissances. Rapport du 27 mars 1968 du préfet de Guadeloupe au secrétariat des DOM.

47 Jean-Pierre Guengant, Commission locale du plan, novembre 1970.

48 Clartés, 17 février 1967, n° 1044.

49 « Le peuple martiniquais est-il en voie de disparition ? » écrit le journal du parti communiste, Justice, le 17 mars 1977.

50 Cité par Paris 2018 : 370.

51 Yoyo & Maxime 2014 : 59.

52 AN 19940386/11. Rapport INSEE sur « La situation démographique dans les départements de la Martinique, de la Guadeloupe et de la Réunion en 1961. Dossier Démographie 4 DOM. Recensement de 1961 et évolution, note sur la Martinique : « Diminution sensible de la natalité entre 1957 et 1962 de 40,7‰ à 35,6‰ ».

53 Yves Charbit, « Transition démographique aux Antilles françaises », Population et Sociétés, 139, septembre 1980, Paris, Institut national d’Études démographiques.

54 Mulot 2013.

55 Guengant & Geoffroy 2017 citant Charbit 1980. Le même auteur remet en cause le concept de transition démographique : voir Charbit & Gaimard 2014. Je remercie Jean-Pierre Guengant de m’avoir transmis ce rapport tapuscrit.

56 Léridon & Charbit 1980 : 113 et 131.

57 Insee Antilles-Guyane : Recul de la natalité en Guadeloupe depuis 2005, Antianéco, 26, janvier 2013.

58 Voir la tribune d’historiennes publiée dans Le Monde.fr le 8 mars 2018 « Simone Veil va au Panthéon, les femmes ordinaires vont au pilon » à la suite de laquelle les archives des IVG (1975-1992) ont été conservées.

59 Sainton 2012 : 13. Une habitation est une plantation sucrière ; on parle de civilisation de post-habitation avec le déclin de la culture de la canne et de l’industrie sucrière à partir des années 1960.

60 Une enquête serait à mener sur le rôle de la franc-maçonnerie antillaise à l’image de l’influence au Planning familial des loges maçonniques et des personnalités telles que Yvonne Dornès ou Pierre Simon (Pavard 2012 : 50).

61 Vergés 2017.

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Michelle Zancarini-Fournel, « Contraception et avortement dans les Antilles françaises (Guadeloupe et Martinique, 1964-1975) »Clio, 50 | 2019, 87-108.

Référence électronique

Michelle Zancarini-Fournel, « Contraception et avortement dans les Antilles françaises (Guadeloupe et Martinique, 1964-1975) »Clio [En ligne], 50 | 2019, mis en ligne le 02 janvier 2023, consulté le 07 octobre 2024. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/clio/17067 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/clio.17067

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Auteur

Michelle Zancarini-Fournel

Michelle Zancarini-Fournel est professeure émérite de l’université Lyon 1, Laboratoire de recherche historique Rhône-Alpes (LARHRA). Co-fondatrice et membre du comité de rédaction de CLIO FGH. Elle a publié récemment Les Luttes et les rêves. Une histoire populaire de la France de 1685 à nos jours, La Découverte/Zones, 2016 et Une histoire nationale est-elle encore possible ?, Presses universitaires de Bordeaux et de Pau et des pays de l’Adour, 2018. Elle prépare en collaboration avec Bibia Pavard et Florence Rochefort un livre sur l’histoire des féminismes de la Révolution française à nos jours. michelle.zancarini-fournel@wanadoo.fr

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