Navigation – Plan du site

AccueilNuméros46DossierLes danseuses en Grèce antique. P...

Dossier

Les danseuses en Grèce antique. Performance, capacité d’agir et divertissement1

The dancing girls of Ancient Greece: performance, agency, and entertainment
Sarah Olsen
Traduction de Antoine Heudre
p. 19-42

Résumés

La « danse grecque antique » évoque en général des images de chœurs imposants et de festivités dionysiaques, ou encore d’Isadora Duncan dansant au milieu des ruines de l’Acropole. Dans cet article, j’étudie une figure peu connue de la danseuse de l’Antiquité : l’orchestris, ou danseuse de banquet. De ces femmes, marginalisées par leur genre et leur classe, il ne demeure que des traces éparses dans la littérature et les vestiges matériels. En réunissant ces traces, cet article met en lumière la place de la danseuse de banquet dans l’imaginaire culturel grec. Il montre ensuite que l’exploration fictionnelle de la subjectivité des femmes dans le dialogue III des Dialogues des courtisanes de Lucien doit nous inciter à réfléchir à la façon dont le mouvement et l’incarnation ont pu constituer – à toutes les époques – des sources essentielles, bien qu’à jamais hors de notre portée, de la capacité d’agir des orchestrides.

Haut de page

Notes de la rédaction

Traduit de l’américain par Antoine Heudre.

Texte intégral

  • 1 Les traductions du grec ancien sont de moi-même, sauf indication contraire. Les abréviations suiven (...)
  • 2 Platon, Les Lois, 813b.

1La « danse grecque antique » évoque en général des images de chœurs imposants et de festivités dionysiaques, ou encore d’Isadora Duncan dansant au milieu des ruines de l’Acropole. Dans cet article, j’entends étudier une danseuse de l’Antiquité peu connue : l’orchestris. Strictement parlant, ce terme désigne tout simplement une « danseuse » en grec ancien, mais à l’exception d’un passage particulier chez Platon, il est employé plus précisément pour désigner des femmes rémunérées pour danser individuellement et divertir les participants lors d’un symposion2. De ces orchestrides, marginalisées par leur genre et leur classe, il ne demeure que des traces éparses dans la littérature et les vestiges matériels. Je commencerai par réunir ces traces afin de mettre en lumière la place de la danseuse de banquet dans l’imaginaire culturel grec, en me concentrant sur Athènes aux époques archaïque et classique. Dans un second temps, j’examinerai comment le dialogue iii des Dialogues des courtisanes de Lucien (iie siècle) reprend d’anciens motifs genrés produits par les Grecs sur la danse rémunérée tout en abordant la culture de la performance telle qu’elle avait cours dans l’Empire romain à son époque. Je suggérerai qu’en explorant de manière fictionnelle la subjectivité et la capacité d’agir des femmes dans le cadre de la danse, Lucien soulève des questions essentielles ayant trait à l’existence réelle des danseuses de banquet, même si notre possibilité d’accéder à cette réalité historique est nécessairement limitée.

L’orchestris dans la Grèce antique

  • 3 Sur le banquet grec : Lissarrague 1990 ; Murray 1990 ; Schmitt-Pantel 1992 ; Schäfer 1997 ; Lynch (...)
  • 4 Voir en particulier Goldman 2015 (une étude exemplaire de la joueuse d’aulos), ainsi que Kurke 19 (...)

2Le symposion était une institution culturelle importante et complexe en Grèce, associée à la construction de l’identité de l’élite masculine et à la consolidation de groupes sociaux spécifiques au sein d’une communauté donnée. Les participants prenaient part à des plaisirs divers : vin, conversation, performances musicales, jeux, sexe, et participaient à une procession bruyante (komos) dans les rues. Les représentations littéraires et visuelles des banquets des époques archaïque et classique s’étendent de la calme discussion politique et philosophique aux orgies au cours desquelles l’alcool coulait à flot, et les pratiques historiques étaient probablement aussi variées3. Le statut social des prostituées et des professionnelles du divertissement impliquées dans ces événements était très variable, et la littérature grecque à partir de l’époque archaïque présente une hiérarchie complexe et flexible des femmes intervenant dans les banquets, allant de l’hétaïre (que l’on peut traduire par « courtisane ») de la classe supérieure jusqu’à la pornê débauchée (« putain », « prostituée »)4. S’il est utile de rappeler la nature discursive de la distinction hétaïre/pornê, il faut néanmoins admettre que l’existence d’une esclave prostituée, employée dans une maison close, était tout à fait différente de celle d’une femme libre jouissant d’une sécurité financière lui permettant de choisir ses clients et même ses conditions de travail.

  • 5 Anacréon, fragments 458, PMG ; Kurke 1997 : 115 ; McClure 2004 : 120-123 ; Boner 2009. Boner iden (...)

3Il est difficile de savoir où les orchestrides s’inscrivent dans cette hiérarchie, car la frontière entre les mouvements érotiques et de séduction, susceptibles d’être pratiqués par n’importe quelle travailleuse du sexe ou danseuse, doit être déterminée avec une certaine flexibilité. Les représentations littéraires les plus anciennes des orchestrides remontent à la période classique, mais la poésie archaïque établit un lien entre le mouvement et la séduction sexuelle en décrivant la démarche caractéristique de l’hétaïre à l’aide de l’expression saula bainein, qui signifie en grec « avoir une démarche chaloupée ou marcher en se déhanchant »5. Même s’il existait une distinction fonctionnelle et hiérarchique entre les hétaïres (engagées pour faire la conversation, accorder des faveurs sexuelles et offrir une compagnie séduisante lors d’un banquet) et les orchestrides (rétribuées pour danser), les mouvements du corps et la sexualité sont étroitement liés dans la description des deux catégories de professionnelles. Dans cette section, j’examinerai les principales représentations visuelles et littéraires des danseuses de banquet à Athènes de la fin de la période archaïque à l’époque classique, afin d’éclairer leur place dans l’imaginaire culturel grec.

  • 6 Les deux objets sont de fabrication attique et associés à des contextes de banquet. Le kylix a ét (...)
  • 7 Bundrick 2005 : 47 ; Griffith 2012 : 144-145.
  • 8 Euripide, Les Bacchantes, est incontournable pour discuter de la représentation et de la réalité (...)

4Les danseuses de banquet sont bien représentées dans l’art grec ancien, et j’insisterai ici sur deux objets significatifs6. Le premier, un kylix de la fin du vie siècle av. J.-C., dépeint une femme se tournant pour faire face à un joueur d’aulos (fig. 1). Le personnage est vêtu d’une courte peau de léopard, la rotation de sa taille et ses bras en extension laissent apparaître ses seins entièrement nus. L’accompagnement musical et la pose dynamique de la femme laissent supposer qu’elle danse ; les krotala (castagnettes) qu’elle utilise et sa tenue en peau de léopard évoquent Dionysos en cohérence avec le contexte du banquet7. Les éléments dionysiaques évoquent également un autre type de danseuse, à savoir les ménades, les délirantes suivantes de Dionysos. Ce mode de performance féminine collective, que ce soit pratique historique ou trope littéraire, occupe une place complexe dans l’art, la littérature et la culture de la Grèce, car il reflète à la fois une sorte d’inversion rituelle tolérée socialement et une image plus menaçante de femmes – en général folles – saisies de frénésie8. Ce vase n’évoque qu’indirectement ces associations, et le présent article n’a pas pour ambition d’analyser de manière approfondie le lien entre les femmes, la danse et la folie dans la Grèce antique, mais je voudrais signaler que tant les objets que les textes sont susceptibles de faire référence simultanément à différents modèles de danse et de représentation.

Fig. 1. Kylix par Épictète, ca 500 av. J.-C. Londres, British Museum [1843.1103.9]

Fig. 1. Kylix par Épictète, ca 500 av. J.-C. Londres, British Museum [1843.1103.9]

© The British Museum

  • 9 Kurke 1999 : 209-211 ; Coccagna 2011.

5La nature de ce récipient indique la position théorique des danseuses de banquet grec. Un kylix est une coupe peu profonde servant à boire du vin. Cette image figure sur le fond circulaire de la coupe, à l’endroit où le vin est versé. Lorsque le buveur tient le kylix dans ses mains et qu’il en boit le contenu, il dévoile l’image provocante de la danseuse. Des historiens ont souligné l’objectivation des femmes représentées sur la vaisselle de banquet, en reliant la consommation de ces images par les participants masculins avec leur appréciation des danseuses se produisant devant leurs yeux9. Ce kylix fait de la danseuse soliste un objet érotique à la disposition du plaisir masculin, fût-il dissimulé puis révélé de manière amusante à chaque fois que la coupe est remplie et vidée.

  • 10 Sur les hanches comme point focal dans l’iconographie des orchestrides : Lawler 1964 : 133-134. S (...)
  • 11 Sur cet objet, voir Oakley 1990 : 38 et Bundrick 2005 : 89-90.
  • 12 Neils 2007 : 70-74.
  • 13 Cohen 2015 : 131-154.

6Une autre danseuse figurant sur une phiale du ve siècle av. J.-C. (fig. 2) rappelle celle représentée sur le kylix. Bien que cette femme soit vêtue d’une courte tunique, la torsion de son corps et les krotala qu’elle utilise rappellent la posture de la première danseuse, et les vêtements posés sur la chaise, derrière elle, indiquent qu’elle s’est partiellement dévêtue. La manière dont le bas de sa tunique se soulève suggère le mouvement de ses hanches10. Un spectateur tend la main vers elle, soulignant son attrait érotique11. Plusieurs figures de femme sont représentées sur la phiale, et Jenifer Neils suggère qu’elles symbolisent quatre étapes dans la vie d’une travailleuse du sexe12. Si Neils a raison, la phiale nous rappelle que les orchestrides ne doivent pas être réduites à des motifs littéraires ou à des images aguicheuses. C’était des femmes en chair et en os qui subvenaient à leurs besoins en mettant leur corps à contribution pour offrir des performances ou des prestations sexuelles. Hormis l’attrait esthétique et érotique direct qu’elle avait probablement aux yeux des symposiastes, cette phiale évoque également des aspects du travail et de l’expérience des femmes au-delà du strict cadre du banquet. Selon Edward Cohen, la prostitution dans l’Athènes classique était souvent une affaire familiale impliquant mères et filles, et la présence d’instructrices sur cet objet suggère une transmission du savoir de la performance, de femme à femme13.

Fig. 2. Phiale par le peintre de la Phiale, ca 430 avant J.-C. Boston, Museum of Fine Arts (97.371).

Fig. 2. Phiale par le peintre de la Phiale, ca 430 avant J.-C. Boston, Museum of Fine Arts (97.371).

© Museum of Fine Arts

  • 14 Goldhill 2015 : 192.

7De même, ces deux vases mettent en lumière le statut de la danseuse en tant qu’objet érotique mis à la disposition du plaisir visuel des hommes participant à un banquet, et les références dont nous disposons encore au sujet des orchestrides dans la littérature grecque classique les présentent également comme muettes, ravalées au rang d’objet sexuel et instrumentalisées. Avant d’aborder les traces textuelles, je tiens à préciser que leur traitement ici sera nécessairement succinct, et qu’il conviendrait d’examiner plus profondément chacun de ces passages à la lumière du texte duquel il est extrait. Mon objectif est d’insister sur les motifs récurrents et de mettre en lumière certaines variations sur les thèmes majeurs du silence, de l’objectivation érotique et de la marchandisation. Les sources que j’aborde ne nous renseignent pas directement sur l’existence et l’expérience des danseuses de banquet ; elles nous montrent seulement comment elles sont vues à travers le prisme de textes littéraires d’auteurs masculins. Comme le fait remarquer Goldhill, les hétaïres de la Grèce antique sont « bonnes à penser », et l’on peut étendre cette appréciation aux prostituées et aux professionnelles du divertissement en général14. L’orchestris, en tant que femme louée pour exhiber et mouvoir son corps pour le plaisir des hommes, s’impose comme un sujet particulièrement intéressant pour les dramaturges, les philosophes et les historiens de la Grèce antique qui souhaitent utiliser le corps féminin comme outil littéraire ou instrument symbolique.

  • 15 Austin & Olson 2004 : 340-341.

8Dans la pièce d’Aristophane Les Thesmophories, une orchestris est employée pour détourner l’attention d’un garde. Euripide, le dramaturge grec qui est un des personnages de cette comédie, explique que la femme s’exerce à une danse qu’elle s’apprête à exécuter chez « des hommes » (v. 1178), probablement lors d’un banquet. Euripide est lui-même déguisé sous les traits d’une vieille femme (v. 1194) – proxénète de la danseuse, à ce qu’il paraît : allusion au rôle historique joué par les femmes dans le domaine de la prostitution et du divertissement lors des banquets15. Ses instructions de nature chorégraphiques structurent la scène (traduit par Van Daele 1928) :

(À la danseuse) La tienne, Bichette, est de ne pas oublier de faire ce que je t’ai dit en chemin (v. 1173-1174) ;

Ainsi, traverse d’abord et reviens sur tes pointes (v. 1175) ;

Allons, mon enfant, tire par en haut ce vêtement-ci (v. 1181) ;

Assieds-toi sur les genoux du Scythe […] (v. 1182) ;

(À la danseuse) Baise-le (v. 1191).

9La réaction exubérante du garde suggère que l’orchestris suit les ordres qui lui sont donnés : il fait l’éloge de sa poitrine (v. 1185) ainsi que de son fessier (v. 1187), ce qui renforce la connotation sexuelle de sa danse et souligne son statut de marchandise disponible : un corps érotisé qu’il peut à la fois regarder et toucher. L’orchestris enlève également ses vêtements (v. 1181-83, v. 1190), ce qui rappelle les tenues légères des danseuses de banquet peintes sur les vases grecs et relie de manière plus étroite encore cette forme de danse à une explicite exhibition sexuelle.

  • 16 Walin 2012 : 105-135. Cf. Cratès, fr. 34, PCG ; Métagénès (ou Aristagoras), 4, PCG ; et Aristopha (...)
  • 17 Sur Alexis, voir Arnott 1996 ; sur les professionnelles du sexe, le statut et la sexualité chez M (...)

10Dans cette scène, la femme joue un rôle à la fois instrumental et transactionnel. L’orchestris ne prononce pas un mot, et ses mouvements sont cadrés et définis par le commentaire d’hommes. Cette scène constitue la représentation la plus substantielle qui nous soit parvenue d’une danseuse de banquet dans la comédie grecque, mais Daniel Walin montre que, dans la Comédie ancienne, les corps des professionnelles intervenant dans les banquets sont systématiquement présentés de cette façon et ainsi réduits au rang d’accessoires, pour le bon plaisir des personnages masculins et des spectateurs16. Alexis, auteur de la Comédie moyenne, a écrit une pièce intitulée L’Orchestris (dont il ne reste plus rien), et des professionnelles du sexe de différentes sortes apparaissent également dans la Comédie nouvelle17. S’il est possible que les orchestrides aient joué un rôle plus complexe dans certaines œuvres de la comédie grecque aujourd’hui disparues, les représentations qui subsistent suggèrent que leur attrait trouve son origine dans leur capacité d’exprimer de manière crue et explicite, leur statut d’objet sexuel.

  • 18 Halperin 1990 ; Gilhuly 2009 : 58-97.

11Dans la philosophie grecque, les danseuses deviennent les symboles des plaisirs grossiers de la chair, par opposition au discours philosophique, genre noble. Par exemple, les musiciennes sont renvoyées au début du Banquet de Platon (176e7-8), et dans le Protagoras (347c-e), Platon insiste sur le fait qu’on ne voit ni danseuse ni musicienne dans les banquets des honnêtes gens et des personnes éduquées qui sont plutôt le cadre d’une conversation bien réglée. Dans sa vision d’un banquet purement philosophique, Platon exclut le plaisir charnel et les performances féminines, établissant de manière explicite une hiérarchie entre le logos de l’homme et le corps des femmes, exclusion qui affleure dans d’autres descriptions littéraires (par exemple la mise en scène par Aristophane de l’orchestris comme un corps muet subordonné à plusieurs niveaux de manipulation par la parole masculine)18.

  • 19 Sur Platon et Xénophon : Wohl 2004 ; Gilhuly 2009 : 99 ; et Hobden 2013 : 214.
  • 20 Olsen 2016 : 183-186. Voir également Hobden 2013 : 219 et Vickers 2016 : 219-230.
  • 21 Sur la danse finale et son lien avec les objectifs de Socrate, voir Wohl 2004 : 352-363 ; Gilhuly (...)

12Le Banquet de Xénophon décrit au contraire la danse comme un stimulant du dialogue philosophique19. Pourtant, lorsque l’orchestris du texte de Xénophon se prépare pour un numéro au cours duquel elle est censée lire et écrire juchée sur une roue en train de tourner, Socrate intervient pour interrompre la performance (Xénophon, Banquet, vii, 2‑3), au moment précis où l’orchestris risque de devenir un agent créatif et un manipulateur du langage (lectrice et écrivaine) – et de dépasser sa position incarnée et instrumentale20. Le dialogue se conclut par une pantomime exécutée par un homme et une femme, tous deux muets et érotisés (Xénophon, Banquet, ix, 2-7). Socrate garde le contrôle discursif sur les questions, les réflexions, et les réponses générées par la danse, même si le spectacle final ne correspond pas tout à fait à sa demande21. Si Platon et Xénophon ne font pas preuve du même degré de tolérance pour la danse, en particulier celle pratiquée par des danseuses, dans leur vision respective des banquets philosophiques masculins, ils se rejoignent dans leur volonté de restreindre la capacité de s’exprimer et d’agir de l’orchestris.

  • 22 Vickers 2016 : 28-35.
  • 23 Après la représentation de la danseuse : « Les Paphlagoniens demandèrent si les femmes combattaie (...)
  • 24 Voir également Lonsdale 1993 : 141-142 ; Ceccarelli 1998 : 20-22 ; Vickers 2016 : 28-50.
  • 25 Goulaki-Voutira 1996, Ceccarelli 1998 : 58-60, 65-67.

13Xénophon traite également de la question de l’orchestris dans son œuvre historique. Dans l’Anabase, il décrit un banquet auquel participent les soldats de l’armée grecque et leurs ennemis d’autrefois, les Paphlagoniens. Au travers d’une série de danses armées et acrobatiques, les Grecs affirment leur supériorité militaire et culturelle22. La scène se termine par la danse d’une seule orchestris portant une arme, dont la performance se veut une mise en garde dirigée contre ceux qui pourraient défier les Grecs, en suggérant que même les femmes grecques – peut-être même des prostituées grecques ! – seraient capable de battre les Perses23. Certes, le banquet militaire diffère du symposion organisé à Athènes, et la danseuse exécute ici un type de danse spécifique, la pyrrhique, ou danse en armes24. Il semble toutefois que ce type de danse soit également une des formes proposées par les orchestrides dans le contexte des banquets25, et la description que fait Xénophon de cette danseuse souligne, tout comme les autres écrivains cités, son manque de subjectivité et de capacité d’agir. Il précise tout d’abord qu’elle appartient à l’un des Arcadiens (6, 1, 12), en mettant au premier plan son statut d’esclave et en passant sous silence son nom ou son lieu d’origine. Un Mysien s’occupe ensuite de son costume et de ses accessoires (« […] après l’avoir équipée de son mieux et lui avoir mis dans les mains un bouclier léger », 6, 1, 12). En lui donnant un bouclier, il lui dicte également sa chorégraphie, puisqu’elle exécute une pyrrhique. La danseuse ne parle jamais, et Xénophon se limite à une brève description de la chorégraphie qu’elle exécute. Les personnages masculins de l’Anabase semblent exercer un contrôle total sur cette orchestris, et en tant qu’auteur, Xénophon l’utilise pour donner du poids à son argument relatif à la prouesse militaire grecque.

  • 26 McCarren 1998 : 13.

14Néanmoins, le regard masculin de nos sources anciennes sur la performance féminine est nécessairement incomplet, comme le montre l’histoire culturelle plus large des femmes et de la danse. Dans son analyse du ballet français, par exemple, Felicia McCarren étudie la façon dont la « danse [devient] symptomatique des tensions culturelles entourant les femmes, le corps et la relation du corps avec l’esprit » aux xixe et xxe siècles26. Si McCarren identifie des liens entre la pathologie et la performance qui prennent racine dans les idées romantiques sur le langage, la nature et l’expression, certaines des tensions propres à l’époque moderne qu’elle met en lumière font écho aux stratégies manifestes dans les textes grecs anciens. Les auteurs que j’ai cités font de la danseuse qui loue ses services un accessoire, privé de parole, de capacité d’agir et de subjectivité. En transformant son corps en trope littéraire qu’ils seront libres de manipuler, ils font primer la valeur du discours littéraire de l’élite masculine sur le potentiel d’expression des danseuses professionnelles.

  • 27 McCarren 1998 : 167.
  • 28 Noland 2009 : 2.
  • 29 Noland 2009 : 213.

15Mais McCarren note également des points de résistance et de tension dans les sources et les époques qu’elle étudie. Elle observe, par exemple, que la chorégraphie de Loïe Fuller aborde les liens médicaux et culturels forgés entre la danse et l’hystérie, et ce faisant qu’elle « confronte les stéréotypes médicaux du corps hystérique et de la conception culturelle de la féminité qu’il sous-tend, en questionnant sa nature pathologique et en indiquant une autre façon de lire le langage du corps »27. Carrie Noland choisit un autre angle pour aborder la question du pouvoir performatif dans des contextes modernes en avançant que la gestuelle constitue un site vital à la fois pour l’« incarnation » et la « mise à l’épreuve » du « conditionnement culturel », en étudiant comment les stratégies discursives opèrent sur le corps de l’individu28. Elle affirme que le corps ressentant et mouvant – le corps dansant – « possède une agentivité plurielle susceptible d’aider à repenser les paradigmes de la construction et de la résistance, de l’interpellation et de l’identité »29.

16L’impossibilité d’accéder directement à la chorégraphie des orchestrides de la Grèce ancienne et l’absence de récits transmis par les danseuses elles-mêmes sur leurs expériences rendent toute analyse de leur capacité d’agir et de leur subjectivité purement spéculative. Nous sommes dans l’impossibilité de savoir si et comment leur formation et leur chorégraphie confortaient ou, à l’inverse, allaient à l’encontre des stéréotypes présents dans les sources abordées précédemment, ou bien ce qu’elles ressentaient au sujet de leur propre danse. Je souhaite toutefois, dans la seconde partie de cet article, essayer de nuancer notre compréhension des spectacles produits par les danseuses de banquet en interrogeant un texte littéraire du iie siècle, les Dialogues des courtisanes de Lucien.

  • 30 Plutarque, Propos de table ; Athénée de Naucratis, Les Deipnosophistes ; Lucien, Dialogues des co (...)
  • 31 Bozia 2015.

17La littérature grecque de l’époque impériale témoigne d’un vif intérêt pour les professionnelles du sexe et la culture du symposion, pour preuve les nombreux textes consacrés à la représentation des prostituées et/ou des banquets30. Si ces textes pas plus que les œuvres d’art et les sources littéraires abordées jusqu’ici ne donnent la parole à des femmes ayant réellement existé, leurs auteurs s’imaginent le faire de manière saisissante. Par ailleurs, si les historiens ont depuis longtemps établi que les auteurs grecs de l’époque romaine s’inspirent largement de la littérature grecque des époques archaïque, classique et hellénistique, et revendiquent une réelle continuité culturelle entre eux et leurs prédécesseurs, ils reconnaissent aujourd’hui que des auteurs comme Lucien sont également profondément enracinés dans la culture de leur propre époque31. Ici, je montrerai que, même si le dialogue de Lucien renvoie à d’anciens modèles d’interprétation de la danse et du genre, il n’en dessine pas moins un lien entre performance et capacité d’agir qui fait écho à la culture de la danse féminine à l’époque romaine. Par « capacité d’agir », je fais référence spécifiquement à la possibilité pour une artiste de faire ses propres choix et d’articuler ses propres sentiments dans le cadre d’une performance. Je suggère que la description imaginative et provocante que fait Lucien de la capacité d’agir et de la subjectivité d’une danseuse de banquet peut nous inciter à réexaminer les représentations des orchestrides des époques antérieures sous un nouveau jour.

Lucien, Dialogues des courtisanes iii : performance, capacité d’agir et discours

  • 32 Cohen 2015 : 131-154.

18Dans ce dialogue, une prostituée nommée Philinna se fait gronder par sa mère pour le comportement qu’elle a eu lors de la soirée précédente. La mère affirme avoir appris de la bouche d’un client de Philinna, Diphile, qu’elle a dansé dans un état d’ivresse lors d’un banquet et a ignoré son client, prêtant plutôt attention à un homme nommé Lamprias (3.1). Philinna raconte sa propre version des faits mais sans parvenir à convaincre sa mère (3.2). Cette dernière conclut en lui conseillant de contenir sa colère et de prendre garde de ne pas perdre son riche client (3.3). La manière dont Lucien traite de la prostitution comme une entreprise familiale impliquant à la fois mère et fille rappelle les pratiques et les perceptions de l’Athènes classique32, et démontre également que la communication entre femmes n’est pas nécessairement subversive – puisque la mère de Philinna énonce un ensemble normatif de préoccupations concernant le travail du sexe et la pratique de la danse de banquet.

19Philinna n’est pas une orchestris. Sa rivale, Thaïs, est identifiée comme une hétaïre (3.2.14), et nous pouvons supposer qu’elle a le même statut. Sa danse, comme nous le verrons, est spontanée. Les remarques de sa mère ne laissent pas de doute sur le fait que Philinna n’a sûrement pas été engagée pour danser, et sa mère se demande si la danse qu’elle a exécutée doit être attribuée à la folie (3.1.3) ou à l’ivresse (3.1.5). Ces commentaires suggèrent qu’une femme du rang de Philinna (vraisemblablement une courtisane de haut rang) ne devrait pas danser, et en expliquant la danse par une perte de contrôle involontaire, la mère de Philinna exclut qu’elle ait pu être intentionnelle ou chargée de sens. Bien que Philinna ne parvienne pas à convaincre sa mère que sa décision de danser se justifie, Lucien consacre l’essentiel de son dialogue au récit de la jeune femme, lui accordant ainsi une autorité descriptive sur sa propre gestuelle et sa signification. Son récit rétablit la danse de banquet en tant que mode de communication entre femmes et champ d’expérience et d’expression d’une subjectivité personnelle.

  • 33 Cf. Aristophane, Les Thesmophories, 1175-1200.
  • 34 Cf. Alcman, 1.57 et 2.70, PMG et Pindare, Paean, 6.17-18.

20Philinna explique que sa rivale, Thaïs, s’est mise à danser la première (3.2.6), et ce après avoir échangé des baisers avec Diphile, pourtant client de Philinna. Puis elle décrit comment Thaïs « a fait voir ses chevilles » (3.2.6), formule qui joue sur la polyvalence de la danse et du mouvement. D’une certaine façon, la description saisissante de Thaïs « exposant » ou « dénudant » (apogumnousa) ses chevilles fait écho à des images d’orchestrides des époques antérieures qui se débarrassaient progressivement de leurs vêtements en dansant33. Pour autant, il semble que Thaïs ne montre que ses chevilles, une partie du corps qui sert souvent de point focal dans la littérature grecque classique pour décrire les jeunes danseuses du chœur34. Le récit que fait Philinna de la chorégraphie de Thaïs évoque deux dimensions – celle du striptease érotique de l’orchestris et celle de la performance timide de la jeune vierge. Elle introduit ainsi de la complexité dans le lien entre signification et mouvement, révélant le rôle important du récit et de la description pour définir le statut de la danseuse et la signification de la performance qu’elle produit.

21En parallèle, la danse elle-même devient un moyen de communication efficace entre femmes à l’intérieur du dialogue. Lorsque Thaïs se lève et commence à montrer ses chevilles, Philinna comprend immédiatement que ce geste chorégraphique est une façon de la narguer et de lui lancer un défi : d’après elle, Thaïs a montré ses jambes « comme si elle était la seule qui eût la jambe bien faite » (3.2.6-7). Dans le récit qu’en fait Philinna, l’érotisme potentiel de la chorégraphie au cours de laquelle Thaïs dévoile ses chevilles et son attrait probable pour un spectateur masculin sont moins importants que le rôle de la danse comme d’une compétition entre femmes. Philinna justifie alors sa propre danse comme une réponse à Thaïs en demandant : « Que fallait-il donc faire ! Souffrir et accréditer cette raillerie ? Laisser Thaïs régner en souveraine dans le festin ? » (3.2.14-16). Elle insiste sur le fait que la danse qu’elle a exécutée était destinée à prouver sa beauté et son talent, ainsi qu’à affirmer sa préséance au sein du banquet. En justifiant ainsi sa performance, Philinna ne fait pas du tout référence à Diphile – le mouvement de danse ayant pour seul objectif de répondre à Thaïs.

22À ce stade du dialogue, la capacité à « régner sur le banquet » semble être la préoccupation essentielle : en tant que travailleuses du sexe, les deux femmes sont en concurrence pour avoir la haute main et l’ascendant dans leur milieu professionnel. Pendant un moment, les hommes participant au banquet ne sont guère plus que des pions dans la rivalité qui se déploie entre Philinna et Thaïs, principalement au travers de la danse et du mouvement. Dans le dernier dialogue entre Philinna et sa mère, il est à nouveau question de Diphile et de Lamprias (3.3), et il devient clair que Thaïs est finalement parvenue à « régner sur le banquet » – son solo de danse est salué par des louanges appuyées de Diphile (3.3.8-11), alors que ce dernier reste indifférent à la performance de Philinna (3.3.19-21). Bien que les efforts de cette dernière se révèlent en grande partie vains, le dialogue est intéressant précisément parce qu’il montre comment la danse peut opérer sur plusieurs registres à la fois.

  • 35 Sur les différents sens de ce verbe, voir Liddell, Scott & Jones 1996 : s.v. « χορηγέω ».

23Il est frappant, par exemple, que la réaction de Diphile à la danse exécutée par Thaïs et l’interprétation de Philinna divergent de manière significative. Diphile exalte le sens du rythme de Thaïs (3.2.8) qu’il assimile même à une choreute de haut niveau en louant l’exécution coordonnée et choralisante de sa danse (to kechoregemenon 3.2.8)35. Il apprécie ses « jolies jambes » (3.2.9) – et dispense « mille autres louanges » (3.2.10). Le plaisir que procure à Diphile la danse de Thaïs est aussi bien esthétique que sexuel, ainsi que l’entend la danseuse. Mais il ne remarque pas la façon dont la danse fonctionne également comme un défi lancé à sa rivale. Le récit de cette dernière démontre que les danseuses de banquet peuvent faire deux choses à la fois : exhiber le corps féminin comme un objet érotique à disposition du plaisir masculin, tout en permettant une confrontation de nature concurrentielle entre elles et leurs rivales. Comme je l’ai noté précédemment, la description par Philinna des jambes de Thaïs est déjà ambivalente, avec la double évocation de la pose érotique de l’orchestris et de la sensualité plus subtile des danses des jeunes vierges. Lucien suggère ainsi que le divertissement proposé par les danseuses de banquet ne se limite pas à ce que les hommes en voient.

24Philinna met aussi en avant ses émotions. Elle pleure lorsque Diphile embrasse Thaïs la première fois (3.2.1), s’irrite de l’insulte de Thaïs (3.2.14-16), et prétend qu’elle a ensuite embrassé Lamprias pour « rendre à Diphile ce qu’il [lui] avait fait » (3.3.1). Philinna est en colère d’avoir perdu l’attention de son client et d’être moquée par sa rivale, et met son comportement au banquet sur le compte d’une indignation justifiée. À la fin du dialogue, la mère de Philinna lui rappelle qu’elle peut légitimement éprouver de la colère (3.3.7), mais l’exhorte à moduler ses émotions afin de conserver ses clients (3.3.7-10). Le récit de Philinna suggère que sa décision de danser est motivée à la fois par la colère et la frustration, et par un intérêt commercial (sans doute peu judicieux). La question de ces deux élans concurrents, tout comme celle du statut de sa relation avec Diphile, restent en suspens à la fin du dialogue.

25Dans le dialogue iii des Dialogues des Courtisanes, la danse de banquet existe en partie – mais seulement en partie – afin d’exhiber le corps féminin pour satisfaire les hommes. Elle facilite la rivalité entre les femmes et permet à Philinna d’exprimer ses sentiments de colère et de frustration. Alors que les sources examinées dans la première partie de cet article tendent à réduire la danseuse de banquet à un objet de désir sexuel muet, Lucien fantasme sur ce que des danseuses pourraient dire si elles avaient la possibilité de parler de leurs intentions et de leurs expériences. Le verbe « fantasmer » prend ici tout son sens, Lucien étant bien entendu lui aussi un auteur masculin qui trouve que les prostituées et les danseuses sont « bonnes à penser ». De la même façon, cela conduit à conclure ce point en réfléchissant à la pertinence d’accorder à Lucien un rôle sérieux dans l’histoire culturelle plus large des danseuses de banquet.

  • 36 Bartley 2005: 265-266; Gilhuly 2006 et 2007; Blondell & Boehringer 2014; et Shreve-Price 2014.
  • 37 Sur les femmes, le travail du sexe et les cours hellénistiques, voir Ogden 1999 et Goldhill 2015. (...)
  • 38 Edwards 1997 ; Webb 2002 ; James 2006 ; et Alonso Fernández 2011 : 426-454.
  • 39 Alonso Fernández 2015.

26Lucien s’inspire indéniablement de la littérature grecque antérieure et de la culture athénienne classique tout au long des Dialogues des courtisanes36, mais je cherche à montrer que la description qu’il fait de la capacité d’agir et de la subjectivité liées à la performance est également ancrée dans le contexte de la Rome impériale. La réflexion, menée dans cet article, sur la pratique de la danse rémunérée s’est concentrée sur des sources de la fin de la période archaïque et de la période classique, mais les prostituées et la culture de la performance n’ont pas disparu après le ive siècle. L’existence sociale et les constructions discursives des professionnelles du divertissement et des prostituées évoluent à la période hellénistique, tandis que la culture grecque elle-même se déplace de son centre athénien classique vers les cours des différents royaumes hellénistiques37. La période romaine amène de nouveaux changements dans la culture du spectacle féminin, car les occasions pour les femmes de jouer de la musique, danser ou faire du théâtre en public – en dehors du symposion – augmentent de manière significative par rapport à la période de l’Athènes classique38. Alonso Fernández a réalisé un travail pionnier sur les femmes et la danse dans le monde romain impérial, en démontrant que la performance et l’expérience kinesthésique constituent des vecteurs importants pour l’expression du pouvoir d’agir et du capital social des femmes39. Lucien et ses lecteurs issus de l’élite vivaient et se déplaçaient dans le monde auquel Alonso Fernández donne vie, et nous devons prendre ce contexte au sérieux. La volonté de Lucien de jouer sur le fait que la danse puisse constituer pour des femmes marginalisées un terrain d’expression de leur subjectivité et de leur capacité d’agir socialement pourrait avoir été une tentative d’aborder de manière critique et créative la culture de la performance de son époque.

  • 40 Gilhuly 2006 : 289. Sur la littérature, la culture et l’identité chez Lucien, voir Jones 1986 : 6 (...)
  • 41 Gilhuly 2006 : 274-276.

27Les stratégies descriptives de Lucien sont également liées à la façon dont il façonne son propre personnage d’auteur. Dans une analyse du dialogue V des Dialogues des Courtisanes, qui décrit un rapport sexuel entre deux femmes, Kate Gilhuly affirme que Lucien développe les positions du sujet érotique présentées dans l’imaginaire culturel grec et qu’il faut y voir un commentaire sur sa manière d’appréhender le genre et l’identité culturelle. Occupant la position singulière d’un Syrien écrivant en grec dans l’empire romain, Lucien exploite la forme, le capital culturel, le sexe et le genre afin de « tailler une place au moi barbare »40. Il met à profit son éducation élitiste et sa connaissance de la tradition littéraire grecque pour brouiller et subvertir l’idéalisation du passé athénien très répandue à son époque et dans son milieu intellectuel41. On peut mettre en lien la lecture que fait Lucien de la danse – comme mode d’expression polyvalent, capable de réinscrire le rôle sexuel de la danseuse tout en laissant la place à d’autres formes de signification – avec son intérêt pour l’étude d’identités et de subjectivités alternatives dans le monde romain impérial.

*

  • 42 McCarren 1998 : 167.
  • 43 Noland 2009 : 17.

28La conceptualisation de la danse de banquet chez Lucien rencontre un écho dans les études de l’histoire de la danse et des études culturelles évoquées ci-dessus. McCarren affirme que la chorégraphie de Loïe Fuller génère « une différente façon de lire le langage corporel », et je suggère que l’histoire de Philinna a un effet similaire, en explorant le potentiel polyvalent de la danse dans un espace de banquet fictionnel42. De la même façon, Noland affirme que la gestuelle « produit toujours davantage et autre chose que l’intention de départ », et si Philinna et Thaïs visent par leurs mouvements à attirer un client et à prendre le dessus sur une rivale, le récit de Philinna décrit également la danse comme un site puissant de l’expérience et de l’expression des émotions individuelles43. D’un côté, le statut de prostituée de Philinna assigne à son corps un ensemble donné de significations, de l’autre, le récit qu’elle fait de ses mouvements et de sa gestuelle dépasse ce cadre signifiant. Son discours fait de la danse un instrument de la rivalité professionnelle entre femmes et le lieu d’expression de sa colère et de sa frustration, bien qu’il fasse aussi place au modèle discursif plus traditionnel fondé sur l’objectivation et la marchandisation de la danseuse de banquet. Lucien fait de Philinna la narratrice de ses propres mouvements. Au travers d’elle, il fait de la danse un mode polyvalent d’expérience et d’expression, en se penchant sur ce que cette polyvalence pourrait signifier pour des femmes au statut social modeste ou vulnérable.

  • 44 Par exemple, fig 2. Voir Liventhal 1985, Neils 2007 : 70-74.

29Le récit fictionnel de Lucien sur la subjectivité kinesthésique et le pouvoir chorégraphique des danseuses devrait également nous inviter à examiner les sources plus anciennes sous un nouvel angle. Si j’ai insisté sur l’objectivation des orchestrides dans l’art de la Grèce archaïque et classique, de nombreux vases représentent également des relations entre femmes, indiquant les dimensions éducative, commerciale et interpersonnelle de l’activité de danseuse de banquet44. Dans Le Banquet de Platon, Eryximaque propose que la joueuse de flûte renvoyée du banquet philosophique exclusivement masculin, puisse tout de même jouer pour elle (« qu’elle flûte pour soi » (176e7) ou bien, « à son gré, pour les femmes de la maison ! » (176e7-8). Même s’il ne fait pas directement référence à la danse, le commentaire de Platon laisse entendre que la perforrmance d’une danseuse ou d’une musicienne peut de manière plus large être une source de plaisir personnel ou collectif dans un espace qui échappe à l’objectivation masculine. Lire Lucien nous fait voir ainsi qu’en toute époque, les orchestrides ont certainement expérimenté et exprimé leur propre subjectivité et leur propre capacité d’agir, peut-être tout particulièrement par le biais de la danse et du mouvement, qui constituent la dimension kinesthésique et incarnée de leur existence, celle-là même qui est irrémédiablement absente de nos sources.

Haut de page

Bibliographie

Sources

Les auteurs anciens cités sont consultables dans les titres suivants :

Marchant Edgar Cardew, 1921, Xenophontis Opera Omnia, Oxford, Oxford University Press, 5 vols.

Macleod Malcom D., 1987, Luciani Opera, vol. IV, Oxford, Oxford University Press.

Wilson Nigel G., 2007, Aristophanis Fabulae, vol. II, Oxford, Oxford University Press.

Bibliographie

Alonso Fernández Zoa, 2011, La Danza en época romana : una aproximación filológica y lingüística. PhD Diss., Universidad Complutense de Madrid.

Alonso Fernández Zoa, 2015, « Docta saltatrix: body knowledge, culture, and corporeal discourse in female roman dance », Phoenix, 69, p. 304-333.

Arnott W. Geoffrey, 1996, Alexis: the fragments, Cambridge, Cambridge University Press.

Austin Colin & S. Douglas Olson, 2004, Aristophanes: Thesmophoriazusae, Oxford, Clarendon Press.

Bartley Adam, 2005, « Techniques of composition in Lucian’s Minor Dialogues », Hermes, 3, p. 358-367.

Bierl Anton, 2013, « Maenadism as self-referential chorality in Euripides’ Bacchae », in Renaud Gagné & Marianne Govers Hopman (eds), Choral Mediations in Greek Tragedy, Cambridge, Cambridge University Press, p. 211-226.

Blondell Ruby & Sandra Boehringer, 2014, « Revenge of the Hetairistria: The reception of Plato’s Symposion in Lucian’s Fifth Dialogue of the Courtesans », Arethusa, 47, p. 231-264.

Boner Justin, 2009, The Homeric Hymn to Hermes and Archaic Iambography, Undergraduate thesis, New College, FL.

Bozia Eleni, 2015, Lucian and his Roman Voices: cultural exchanges and conflicts in the Late Roman Empire, New York, Routledge.

Branham R. Bracht, 1989, Unruly Eloquence: Lucian and the Comedy of Traditions, Cambridge, MA, Harvard University Press.

Bundrick Sheramy, 2005, Music and Image in Classical Athens, Cambridge, Cambridge University Press.

Calame Claude, 1977, Les Chœurs de jeunes filles en Grèce archaïque, 2 vols, Rome, Ateneo [trad. en anglais par Derek Collins et Janice Orion, Choruses of Young Women in Ancient Greece: their morphology, religious role, and social functions, Lanham MD, Rowman & Littlefield, 2001 (1re éd. en anglais 1997)].

Ceccarelli, Paola, 1998, La pirrica nell’antichità Greco Romana : Studi sulla danza armata, Pisa & Rome, Istituti Editoriali e Poligrafici Internazionali.

Coccagna Helene, 2011, « Embodying sympotic pleasure: a visual pun on the body of an Aulētris », in Allison Glazebrook & Madeleine Henry (eds), Greek prostitutes in the ancient Mediterranean, 800 BCE-200 CE, Madison, University of Wisconsin Press, p. 106-121.

Cohen Edward, 2006, « Free and unfree sexual work: an economic Analysis of Athenian prostitution », in Christopher Faraone & Laura McClure (eds), Prostitutes and Courtesans in the Ancient World, Chicago, University of Wisconsin Press, p. 95-124.

Cohen Edward, 2015, Athenian Prostitution: the business of sex, Oxford, Oxford University Press.

Coulon Victor & Hilaire Van Daele (texte établi et traduit), 1928, Aristophane, Tome IV, Les Thesmophories et Les Grenouilles, Paris, Les Belles Lettres.

Davidson James, 1998, Courtesans and Fishcakes: the consuming passions of Classical Athens, Chicago, University of Chicago Press.

Dobrov Gregory, 2010, Brill’s Companion to the Study of Greek Comedy, Leiden, Brill.

Edwards Catherine, 1997, « Unspeakable professions: public performance and prostitution in Ancient Rome », in Judith Hallett & Marilyn Skinner (eds), Roman Sexualities, Princeton, Princeton University Press, p. 66-95.

Faraone Christopher & Laura McClure (eds), 2006, Prostitutes and Courtesans in the Ancient World, Madison, University of Wisconsin Press.

Flower Michael, 1998, Theopompus of Chios: history and rhetoric in the fourth century BC, Oxford, Clarendon Press.

Flower Michael, 2012, Xenophon’s Anabasis, or the Expedition of Cyrus, Oxford, Oxford University Press.

Gilhuly Kate, 2006, « The phallic lesbian: philosophy, comedy, and social inversion in Lucian’s Dialogues of the Courtesans », in Christopher Faraone & Laura McClure (eds), Prostitutes and Courtesans in the Ancient World, Chicago, University of Wisconsin Press, p. 274-294.

Gilhuly Kate, 2007, « Bronze for gold: subjectivity in Lucian’s Dialogues of the Courtesans », American Journal of Philology, 128, p. 59-94.

Gilhuly Kate, 2009, The Feminine Matrix of Sex and Gender in Classical Athens, Cambridge, Cambridge University Press.

Glazebrook Allison, 2011a, « Introduction: why prostitutes? Why Greek? Why now? », in Allison Glazebrook & Madeleine Henry (eds), Greek Prostitutes in the Ancient Mediterranean, 800 BCE-200 CE, Madison, University of Wisconsin Press, p. 3-13.

Glazebrook Allison, 2011b, « Porneion: prostitution in Athenian civic space », in Allison Glazebrook & Madeleine Henry (eds), Greek Prostitutes in the Ancient Mediterranean, 800 BCE – 200 CE, Madison, University of Wisconsin Press, p. 34-59.

Glazebrook Allison, 2015a, « Beyond courtesans and whores: sex and labor in the Greco-Roman world », Helios, 42, p. 1-5.

Glazebrook Allison, 2015b, « A hierarchy of violence? sex slaves, Parthenoi, and rape in Menander’s Epitreponte », Helios, 42, p. 81-101.

Goldhill Simon, 2015, « Is There a History of Prostitution? », in Mark Masterson, Nancy Sorkin Rabinowitz & James Robson (eds), Sex in Antiquity: exploring gender and sexuality in the Ancient World, New York, Routledge, p. 179-197.

Goldman Max, 2015, « Associating the Aulêtris: flute girls and prostitutes in the Classical Greek Symposion », Helios, 42, p. 29-55.

Goulaki-Voutira Alexandra, 1996, « Pyrrhic dance and female pyrrhic dancers », Répertoire International d’Iconographie musicale / Research Center for music Iconography Newsletter, 21, p. 3-12.

Griffith Mark, 2012, Aristophanes’ Frogs, Oxford, Oxford University Press.

Halperin David, 1990, « Why is Diotima a woman? », in David Halperin, John Winkler & Froma Zeitlin (eds), Before Sexuality: the construction of erotic experience in the Ancient World, Princeton, Princeton University Press, p. 257-307.

Henrichs Albert, 1978, « Greek maenadism from Olympias to Messalina », Harvard Studies in Classical Philology, 82, p. 121-160.

Hobden Fiona, 2013, The Symposion in Ancient Greek Society and Thought, Cambridge, Cambridge University Press.

Hughes Alan, 2012, Performing Greek Comedy, Cambridge, Cambridge University Press.

James Sharon, 2006, « A courtesan’s choreography: female liberty and male anxiety at the Roman Dinner Party », in Christopher Faraone & Laura McClure (eds), Prostitutes and Courtesans in the Ancient World, Chicago, University of Wisconsin Press, p. 224-251.

Jones Christopher P., 1986, Culture and Society in Lucian, Cambridge, MA, Harvard University Press.

Kennedy Rebecca Futo, 2015, « Elite citizen women and the origins of the Hetaira in Classical Athens », Helios, 42, p. 61-79.

Kurke Leslie, 1997, « Inventing the ‘Hetaira:’ sex, politics, and discursive conflict in Archaic Greece », Classical Antiquity, 16, p. 106-150.

Kurke Leslie, 1999, Coins, Bodies, Games, and Gold: the politics of meaning in Archaic Greece, Princeton, Princeton University Press.

Lawler Lillian, 1927, « The maenads: a contribution to the study of the dance in Ancient Greece », Memoirs of the American Academy in Rome, 6, p. 69-112.

Lawler Lillian, 1964, The Dance in Ancient Greece, Middletown, CT, Wesleyan University Press.

Liddell, Henry George, Scott Robert & Henry Stuart Jones, 1996 [9e éd. révisée], A Greek-English Lexicon, Oxford, Oxford University Press.

Lissarrague François, 1990, The Aesthetics of the Greek Banquet: images of wine and ritual, Andrew Szegedy-Maszak trans., Princeton, NJ, Princeton University Press.

Liventhal Viveca, 1985, « What goes on among the women: the settings of some attic vase paintings of the fifth century BC », Analecta Romana Institute Danici, 14, p. 37-52.

Lonsdale Steven, 1993, Dance and Ritual Play in Greek Religion, Baltimore, Johns Hopkins University Press.

Lynch Kathleen, 2011, The Symposion in Context: pottery from a late archaic house near the Athenian Agora, Princeton, NJ, The American School of Classical Studies at Athens.

McCarren Felicia, 1998, Dance Pathologies: performance, poetics, medicine, Stanford, Stanford University Press.

McClure Laura, 2004, Courtesans at Table: gender and Greek literary culture in Athenaeus, New York, Routledge.

Murray Oswyn (ed.), 1990, Sympotica: a symposion on the symposion, Oxford, Oxford University Press.

Neils Jenifer, 2007, « Looking for the images: representations of girls’ rituals in Ancient Athens », in Maryline Parca & Angeliki Tzanetou (eds), Finding Persephone: women’s rituals in the Ancient Mediterranean, Bloomington, Indiana University Press, p. 55-78.

Noland Carrie, 2009, Agency and Embodiment: performing gestures/producing culture, Cambridge, MA, Harvard University Press.

Oakley John H, 1990, The Phiale Painter, Mainz, Verlag Philipp von Zabern.

Ogden Daniel, 1999, Polygamy, Prostitutes, and Death: the Hellenistic dynasties, London, Duckworth.

Olsen Sarah, 2016, Beyond Choreia Dance in Ancient Greek Literature and Culture, PhD Diss., UC Berkeley.

Porres Caballero Silvia, 2013, « Maenadic ecstasy in Greece: fact or fiction? », in Alberto Bernabé, Miguel Herrero de Jáuregui, Ana Isabel Jiménez San Cristóbal et al. (eds), Redefining Dionysos, Berlin, De Gruyter, p. 159-184.

Schäfer Alfred, 1997, Unterhaltung beim griechischen Symposion, Mainz, von Zabern.

Schmitt-Pantel Pauline, 1992, La Cité au banquet. Histoire des repas publics dans les cités grecques, Rome, Publications de l’École française de Rome.

Shreve-Price Sharada Sue, 2014, Complicated Courtesans: Lucian’s Dialogues of the Courtesans, PhD Diss., University of Iowa.

Swain Simon, 1996, Hellenism and Empire: language, classicism, and power in the Greek World, AD 50-250, Oxford, Oxford Clarendon Press.

Topper Kathryn, 2012, The Imagery of the Athenian Symposion, Cambridge, Cambridge University Press.

Vickers Jonathan, 2016, The Acrobatic Body in Ancient Greek Society, PhD Diss., University of Western Ontario.

Walin Daniel, 2012, Sex, Slaves, and Transgression in Greek Old Comedy, PhD Diss., UC Berkeley.

Webb Ruth, 2002, « Female entertainers in Late Antiquity », in P.E. Easterling & Edith Hall (eds), Greek and Roman Actors: aspects of an ancient profession, Cambridge, Cambridge University Press.

Weçowski Marek, 2014, The Rise of the Greek Aristocratic Banquet, Oxford, Oxford University Press.

Whitmarsh Tim. 2001, Greek Literature and the Roman Empire: the politics of imitation, Oxford, Oxford University Press.

Wohl Victoria, 2004, « Dirty dancing: Xenophon’s Symposion », in Penelope Murray & Peter Wilson (eds), Music and the Muses: the culture of “Mousikē in the Classical Athenian City, Oxford, Oxford University Press, p. 337-363.

Haut de page

Notes

1 Les traductions du grec ancien sont de moi-même, sauf indication contraire. Les abréviations suivent les règles de l’Oxford Classical Dictionary. Je remercie les lecteurs de San Francisco, Amherst et Washington DC pour leurs commentaires sur cet article, et tout particulièrement Zoa Alonso Fernández, Guillaume Beaudin, Elizabeth Claire, Lauren Curtis, Seth Estrin, Virginia Lewis, Anne-Sophie Noel, Violaine Sebillotte Cuchet, Rebecca Sinos, Naomi Weiss, ainsi que les lecteurs anonymes de la revue Clio. FGH.

2 Platon, Les Lois, 813b.

3 Sur le banquet grec : Lissarrague 1990 ; Murray 1990 ; Schmitt-Pantel 1992 ; Schäfer 1997 ; Lynch 2011 ; Topper 2012 ; Hobden 2013 ; et Weçowski 2014.

4 Voir en particulier Goldman 2015 (une étude exemplaire de la joueuse d’aulos), ainsi que Kurke 1997 ; Davidson 1998 : 109-136 ; Cohen 2006 et 2015 ; Glazebrook 2011a et 2011b ; et Kennedy 2015.

5 Anacréon, fragments 458, PMG ; Kurke 1997 : 115 ; McClure 2004 : 120-123 ; Boner 2009. Boner identifie d’autres parallèles : Simonide, fragments 18 et Homère, Hymne homérique III. À Hermès, 25.

6 Les deux objets sont de fabrication attique et associés à des contextes de banquet. Le kylix a été découvert en Italie, et je fais l’hypothèse, suivant en cela des chercheurs comme Bundrick (2005 : 203, note 9) et Topper (2012 : 11-12 et 165, notes 39 et 40), qu’il reflète partiellement au moins l’imaginaire culturel et les pratiques de son lieu d’origine.

7 Bundrick 2005 : 47 ; Griffith 2012 : 144-145.

8 Euripide, Les Bacchantes, est incontournable pour discuter de la représentation et de la réalité du ménadisme dans la Grèce antique (par exemple Bierl 2013) ; pour un aperçu plus général voir Lawler 1927 et 1964 : 74-97 ; Henrichs 1978 ; Porres Caballero 2013.

9 Kurke 1999 : 209-211 ; Coccagna 2011.

10 Sur les hanches comme point focal dans l’iconographie des orchestrides : Lawler 1964 : 133-134. Sur les représentations graphiques des femmes (y compris des danseuses et des artistes) dans les contextes de banquet : Kurke 1997 : 133-139 ; Schäfer 1997 : 64-65 ; Bundrick 2005 : 92-102 ; Coccagna 2011 ; Topper 2012 : 105-135.

11 Sur cet objet, voir Oakley 1990 : 38 et Bundrick 2005 : 89-90.

12 Neils 2007 : 70-74.

13 Cohen 2015 : 131-154.

14 Goldhill 2015 : 192.

15 Austin & Olson 2004 : 340-341.

16 Walin 2012 : 105-135. Cf. Cratès, fr. 34, PCG ; Métagénès (ou Aristagoras), 4, PCG ; et Aristophane, Les Grenouilles, 519 et 545, Les Acharniens, 1093 et Les Nuées, 996. Il est possible que des femmes aient interprété ces rôles dans les comédies : Hughes 2012 : 211-214 ; Walin 2012 : 119-122.

17 Sur Alexis, voir Arnott 1996 ; sur les professionnelles du sexe, le statut et la sexualité chez Ménandre, voir Glazebrook 2015b et sa bibliographie. Pour un aperçu des différentes formes de comédie grecque, voir Dobrov 2010.

18 Halperin 1990 ; Gilhuly 2009 : 58-97.

19 Sur Platon et Xénophon : Wohl 2004 ; Gilhuly 2009 : 99 ; et Hobden 2013 : 214.

20 Olsen 2016 : 183-186. Voir également Hobden 2013 : 219 et Vickers 2016 : 219-230.

21 Sur la danse finale et son lien avec les objectifs de Socrate, voir Wohl 2004 : 352-363 ; Gilhuly 2009 : 130-139 ; et Hobden 2013 : 220-222.

22 Vickers 2016 : 28-35.

23 Après la représentation de la danseuse : « Les Paphlagoniens demandèrent si les femmes combattaient aussi avec les Grecs. Il leur fut répondu que c’étaient elles qui avaient chassé le Grand Roi de leur camp » (Xénophon, Anabase, 6.1.12). Voir Flower 2012 : 184-186.

24 Voir également Lonsdale 1993 : 141-142 ; Ceccarelli 1998 : 20-22 ; Vickers 2016 : 28-50.

25 Goulaki-Voutira 1996, Ceccarelli 1998 : 58-60, 65-67.

26 McCarren 1998 : 13.

27 McCarren 1998 : 167.

28 Noland 2009 : 2.

29 Noland 2009 : 213.

30 Plutarque, Propos de table ; Athénée de Naucratis, Les Deipnosophistes ; Lucien, Dialogues des courtisanes ; Alciphron, Lettres ; McClure 2004 ; et Gilhuly 2006 et 2007.

31 Bozia 2015.

32 Cohen 2015 : 131-154.

33 Cf. Aristophane, Les Thesmophories, 1175-1200.

34 Cf. Alcman, 1.57 et 2.70, PMG et Pindare, Paean, 6.17-18.

35 Sur les différents sens de ce verbe, voir Liddell, Scott & Jones 1996 : s.v. « χορηγέω ».

36 Bartley 2005: 265-266; Gilhuly 2006 et 2007; Blondell & Boehringer 2014; et Shreve-Price 2014.

37 Sur les femmes, le travail du sexe et les cours hellénistiques, voir Ogden 1999 et Goldhill 2015. Hughes (2012 : 209-210) fait état de preuves de plus en plus nombreuses de femmes se produisant en public en dehors des banquets à partir du ive siècle.

38 Edwards 1997 ; Webb 2002 ; James 2006 ; et Alonso Fernández 2011 : 426-454.

39 Alonso Fernández 2015.

40 Gilhuly 2006 : 289. Sur la littérature, la culture et l’identité chez Lucien, voir Jones 1986 : 6-23 ; Branham 1989 : 28-37, 211-215 ; Swain 1996 : 298-329 ; Whitmarsh 2001 : 247-294 ; Gilhuly 2007 : 83-91 et Bozia 2015 : 9-12, 16-97.

41 Gilhuly 2006 : 274-276.

42 McCarren 1998 : 167.

43 Noland 2009 : 17.

44 Par exemple, fig 2. Voir Liventhal 1985, Neils 2007 : 70-74.

Haut de page

Table des illustrations

Titre Fig. 1. Kylix par Épictète, ca 500 av. J.-C. Londres, British Museum [1843.1103.9]
Crédits © The British Museum
URL http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/clio/docannexe/image/13829/img-1.png
Fichier image/png, 712k
Titre Fig. 2. Phiale par le peintre de la Phiale, ca 430 avant J.-C. Boston, Museum of Fine Arts (97.371).
Crédits © Museum of Fine Arts
URL http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/clio/docannexe/image/13829/img-2.png
Fichier image/png, 867k
Haut de page

Pour citer cet article

Référence papier

Sarah Olsen, « Les danseuses en Grèce antique. Performance, capacité d’agir et divertissement »Clio, 46 | 2017, 19-42.

Référence électronique

Sarah Olsen, « Les danseuses en Grèce antique. Performance, capacité d’agir et divertissement »Clio [En ligne], 46 | 2017, mis en ligne le 01 décembre 2020, consulté le 07 décembre 2024. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/clio/13829 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/clio.13829

Haut de page

Auteur

Sarah Olsen

Olsen Sarah est Visiting Assistant Professor d’études classiques à l’Amherst College. Elle a obtenu un doctorat d’études classiques à l’Université de Californie (Berkeley) en 2016, et a publié des articles sur le roman antique, les relations d’empathie kinesthésique entre le chœur et les spectateurs dans la pensée grecque, le genre et la poésie lyrique, et l’iconographie vasculaire. Ses recherches actuelles portent principalement sur la danse soliste en tant que trope littéraire et pratique culturelle dans la Grèce antique. solsen@amherst.edu

Haut de page

Droits d’auteur

Le texte et les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés), sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.

Haut de page
Rechercher dans OpenEdition Search

Vous allez être redirigé vers OpenEdition Search