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Les Femmes du Mur (Jérusalem, 2016-1880)

Women of the Wall (Jerusalem, 2016-1880)
Valérie Pouzol
p. 253-263

Résumés

En janvier 2016, le gouvernement israélien présentait un projet d’aménagement d’un espace cultuel où hommes et femmes juifs pourraient prier ensemble dans une zone excentrée du Mur des Lamentations, zone non régie par les autorités orthodoxes. Ce « compromis » du Mur censé mettre fin au long combat d’un groupe de féministes juives religieuses désireuses de pouvoir prier publiquement au Mur (les Femmes du Mur), permettait également de reconnaître territorialement et symboliquement l’existence et l’influence d’un judaïsme libéral en quête d’affirmation dans le pays. Ce sont en effet les autorités juives orthodoxes qui sont en charge, depuis la création de l’État et surtout depuis la conquête de Jérusalem, en 1967, de l’administration du Mur et de sa partition genrée. Dans cet espace réaménagé comme une synagogue orthodoxe, femmes et hommes ne prient pas ensemble (installation et construction d’une Mehitza) et la prière des femmes est reléguée à une prière privée, seuls les hommes étant habilités à conduire une prière publique.

L’examen et la confrontation d’une photographie des années 1880 et d’un texte des renseignements français de 1928, permettent de comprendre comment une géographie genrée du Mur s’est patiemment construite le long de lignes aux enjeux clairement nationalistes et politiques. L’installation et la construction de frontières entre les sexes renvoient dans ce haut lieu religieux et nationaliste à la question des frontières au sens large et, par là même, à la question du conflit israélo-palestinien.

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Texte intégral

  • 1 Yaïr Ettinger, « Compromise creates two Western Walls for two People », Haaretz, 31 janvier 2016.

1Le dimanche 31 janvier 2016, le gouvernement israélien annonçait qu’il autorisait l’aménagement d’un espace de prière mixte dans une partie excentrée du Kotel (Mur occidental du temple de Jérusalem). Sans remettre en cause l’actuelle séparation entre hommes et femmes dans ce lieu, ce « compromis » prévoyait l’aménagement et l’agrandissement d’un troisième espace où Juifs et Juives, libéraux et orthodoxes pourraient prier ensemble1. La presse internationale a salué cette décision comme une victoire historique pour le droit des femmes à l’égalité dans le domaine de la pratique religieuse ainsi qu’une victoire de la mixité. Pourtant, replacées dans une chronologie de longue durée à l’aide des deux documents ici présentés, les choses sont nettement plus nuancées. Le Kotel a une histoire et, au cours du temps, l’enjeu d’un réaménagement « féministe » du Mur a revêtu d’autres dimensions, religieuses, politiques et même géopolitiques.

La construction d’une géographie sacrée

  • 2 Shakdiel 2002.
  • 3 En droit islamique, le Waqf est une donation faite à perpétuité par un particulier à une œuvre à (...)
  • 4 Laurens 2002.
  • 5 Horowitz 2013.

2Leah Shakdiel, féministe orthodoxe israélienne, suggère qu’il convient d’interroger l’histoire et la géographie du Kotel en tant que lieu saint, pour comprendre comment ont été fixées les règles genrées de son fonctionnement, et réalisés les aménagements adéquats2. Pour elle, cette géographie sacrée s’est patiemment construite et il faut en reconstituer les étapes pour mieux s’y opposer. Le Mur occidental est vénéré par les Juifs en tant que dernier vestige du second Temple dont il était autrefois une partie de la paroi extérieure. Néanmoins la coutume d’y aller prier avec vénération, pour les Juifs, ne semble remonter qu’au Moyen-Âge. L’ensemble des soubassements du Mur, ainsi que l’esplanade des mosquées appartenait alors à un Waqf3 musulman dont l’acte de fondation interdisait formellement toute aliénation des biens4. Les autorités du Waqf ont autorisé les Juifs à y prier mais leur ont interdit d’y apporter des objets et du mobilier, afin d’éviter que le lieu ne soit transformé durablement en synagogue. Au xixe siècle, dans la Palestine ottomane, les premières photographies de Jérusalem révèlent une imposante muraille donnant sur une petite rue étroite où hommes et femmes juifs prient le vendredi et lors des grandes fêtes, sans séparation5.

  • 6 Bartlet 1844.

3Attardons-nous sur la photographie réalisée par Félix Bonfils, photographe français dans les années 1880. Son atelier familial ouvert à Beyrouth en 1867, produisit une importante documentation photographique sur l’ensemble du Moyen-Orient, essentiellement sous forme de portraits et de vues à destination des voyageurs et des artistes. Au premier plan plusieurs femmes sont en prière, le front reposant sur les parements de l’édifice. Elles portent des robes traditionnelles et ont toutes la tête recouverte de longs voiles. Certaines sont entièrement drapées dans des habits blancs qui contrastent avec les vêtements sombres des hommes qui prient le long de l’édifice au second plan. Quelques hommes et femmes sont également assis par terre. Ce document iconographique confirme les différentes observations et descriptions déjà effectuées et parfois illustrées par des missionnaires et des voyageurs6 qui, dès la première moitié du xixe siècle, décrivent de manière concordante, ce temps fort du vendredi où hommes et femmes juifs se retrouvent au pied du mur pour prier. Dans leurs récits, il n’est pas question de division spatiale entre hommes et femmes mais plutôt d’une opposition performative entre des hommes plutôt statiques, assis par terre en train d’étudier et des femmes en mouvement, priant avec d’avantage de ferveur et embrassant l’édifice. Sur la photographie de 1880, les femmes sont particulièrement nombreuses et semblent en effet d’avantage circuler le long de l’édifice.

  • 7 Yishouv en hébreu « implantation » désigne l’ensemble des Juifs présents en Palestine avant la créa (...)
  • 8 Mehitza en hébreu, la « division », renvoie à la séparation opérée dans la synagogue entre l’espace (...)

4Il semblerait que pendant la plus grande partie de l’époque ottomane, les musulmans de Palestine n’aient vu aucun danger dans la venue de pèlerins juifs. Le développement des premières colonies juives en Palestine à la fin du xixe siècle et surtout les tentatives d’Edmond de Rothschild d’acquérir le Mur et ses environs, ont rendu les habitants musulmans du quartier et les autorités religieuses plus méfiantes. C’est surtout avec la montée des tensions intercommunautaires sous le Mandat britannique que le Mur des Lamentations est devenu un enjeu majeur des relations entre Juifs et Arabes, les premiers n’y étant que « tolérés » alors qu’ils revendiquaient de plus en plus leurs droits dans le cadre de l’établissement d’un foyer national juif. L’intérêt grandissant de certains Juifs de Palestine pour l’extension de leurs droits sur le Mur sont à l’origine de graves troubles, comme ceux de 1928 à Jérusalem lors de la célébration de la fête juive du Yom Kippour. Un texte émanant des services de renseignements français de l’époque décrit comment la tentative d’installation par certains Juifs du Yishouv7 d’une Mehitza8 pour séparer la prière des hommes de celles des femmes a déclenché, en 1928, de graves incidents entre les musulmans et les autorités britanniques :

  • 9 Bulletin de renseignements de la fin septembre 1928, ministère des Affaires étrangères, Levant-Pale (...)

Une foule nombreuse se pressait, comme d’habitude ce jour-là, devant le Mur des Lamentations. Un écran ou paravent, qui ne figurait pas à la cérémonie les autres années, avait été apporté pour séparer les hommes des femmes. Les musulmans à qui appartient le terrain adjacent au Mur, s’avisèrent aussitôt que cette innovation d’apparence inoffensive dissimulait une manœuvre qu’il importait de déjouer. Le mufti se rendit chez le gouverneur de la ville et lui expliqua que la présence du paravent constituait une transformation de la ruelle en synagogue, donc une violation du statu quo et une prise de possession du terrain qui deviendrait irrévocable si elle était une fois tolérée. La même manœuvre, ajouta-t-il, avait été tentée il y a deux ans avec des pliants, qui avaient été enlevés aux assistants sur son intervention. Le gouverneur donna l’ordre d’éloigner le paravent, et l’officier anglais de la police chargé du service d’ordre près du Mur invita les assistants de la cérémonie à l’enlever d’eux-mêmes ; ils refusèrent disant qu’ils étaient en train de faire une prière qui ne doit sous aucun prétexte être interrompue. La police procéda donc elle-même à l’opération et il en résulta dans cette ruelle étroite une bousculade difficile à imaginer. La presse hébraïque est aujourd’hui remplie de protestations indignées contre la conduite des autorités9.

  • 10 Zohar 1985.

5Cette note des renseignements, qui décrit combien les Français installés en Syrie et au Liban sont inquiets de l’agitation qui règne en Palestine, peut paraître anecdotique. Elle ne l’est pourtant en rien et l’affaire du « paravent » va se révéler lourde de conséquences politiques en inaugurant un cycle de violences entre Juifs et Musulmans. La période mandataire pendant laquelle s’élaborent les institutions juives pré-étatiques en Palestine est marquée par d’intenses débats internes sur le droit des femmes du Yishouv à participer aux futures assemblées et conseils représentatifs10. Le grand rabbin séfarade Uziel défendait le fait que des femmes puissent être membres à part entière des instances élues contrairement au rabbin Kook qui restait sur des positions conservatrices. Pourtant la tentative d’installer au Mur une séparation entre les sexes a alors largement dépassé la question du débat des futurs droits entre hommes et femmes juifs, pour prendre une dimension nationaliste et politique. L’aménagement de ce lieu par l’introduction d’un paravent ou de sièges revenait à bouleverser le statu quo et à inquiéter une communauté musulmane et son grand Mufti attachés au principe de la propriété inaliénable du lieu. Transformer ce lieu de pèlerinage « toléré » en synagogue a été immédiatement interprété, par les musulmans, comme une tentative d’appropriation du lieu et de provocation. La crise qui en a découlé a été majeure et emblématique.

  • 11 Barnavi 1988 : 33-43.
  • 12 Halperin-Kaddari & Yadgar 2012 : 119-137.
  • 13 Handelman 1990 : 205-208.
  • 14 Stoper-Perez & Goldberg 1989.

6C’est avec la création de l’État d’Israël mais surtout avec la reconquête territoriale de la ville en 1967 par les Israéliens que le Mur a changé de statut. Les religieux ont obtenu dans cette « démocratie à substrat biblique »11 des chasses gardées, comme celle de la gestion du statut personnel (mariage, divorces, conversions)12 et plus concrètement la mainmise sur l’administration des lieux saints et de leurs institutions. De simple lieu de vénération populaire, le Mur a alors été aménagé en « synagogue orthodoxe », en étant confié au ministère des Affaires religieuses. Il est devenu un lieu officiel sacré reconnu et géré par l’État d’Israël et le grand rabbinat. Cette captation du lieu par les autorités orthodoxes s’est accompagnée de l’installation d’une hiérarchie genrée dans le rituel et dans l’aménagement de l’espace. C’est à cette date que le quartier juif de la vieille ville de Jérusalem a été réaménagé, que les constructions musulmanes face au Mur ont été détruites et qu’une vaste esplanade (la « plazza ») a été aménagée. Dans cette reconquête de la ville de Jérusalem réunifiée, le Mur est alors devenu un site investi d’un grand symbolisme religieux et national. On y célèbre de grands événements nationaux et militaires comme l’ouverture de la cérémonie du Souvenir (Yom Ha-Zikaron)13. Eu égard à ce contexte, la lutte des femmes pour un égal accès au Mur ne concerne pas un espace anodin mais un lieu emblématique pour les Juifs d’Israël et de la diaspora : objet de tous les fantasmes, de tous les attachements, haut lieu nationaliste pour les un-e-s ou de détestation pour les autres14.

La mobilisation des femmes du Mur

  • 15 Sur le problème des femmes et de la prière publique dans le judaïsme, Stoper-Perez 2007 : 172.
  • 16 Premier jour du mois hébraïque.
  • 17 Jour de la nouvelle lune et premier jour du mois dans certains calendriers dont le calendrier juif. (...)
  • 18 Le talith est le châle religieux réservé à la prière juive.

7Décembre 1988. Dans le contexte porteur de la Conférence féministe juive internationale, organisée pour la première fois à Jérusalem, une centaine de femmes religieuses ont décidé de se rendre au Mur des lamentations, dans la section réservée aux femmes, pour prier ensemble publiquement15 et lire la Torah. Parmi elles, de nombreuses Modern Orthodox américaines investies depuis une quinzaine d’années dans la mise en place de groupes de prières de femmes dans leur pays. Fortes de cette première expérience qui a pourtant déclenché de fortes protestations au Mur, certaines des yerosolomitaines, orthodoxes pour la plupart, ont alors décidé de poursuivre l’aventure et d’instaurer chaque mois à l’occasion de Rosh Hodesh16, une prière de femmes collective. À chaque néoménie17, elles ont ainsi commencé à remettre en cause, par leur venue, une hiérarchie genrée construite et diffusée par l’orthodoxie juive entre une hégémonie masculine dans le rituel public (prière publique des hommes) et le statut secondaire de la section des femmes (réservé à la prière privée). Leur démarche, leur présence, le port de talitot18 et de phylactères pour certaines, ont provoqué l’ire et la violence d’orthodoxes et d’ultra-orthodoxes, hommes et femmes confondus. Par leurs actes, elles sont alors entrées en conflit avec le gouvernement israélien et les autorités religieuses orthodoxes gestionnaires de cet espace sacré. Certaines femmes ont été arrêtées et interrogées par la police. Face aux violences subies, elles ont décidé, organisées en association, de poursuivre leur action mensuelle mais également de se lancer dans un activisme judiciaire contre le gouvernement israélien, en utilisant la médiation de la Cour suprême.

  • 19 En hébreu, Neshot-ha-Kotel, en anglais Women of the Wall. Nous utiliserons en français, l’abréviati (...)
  • 20 La Cour suprême est extrêmement active en Israël et entend directement en premier et dernier ress (...)
  • 21 En hébreu Shomreï Sfarad, le parti Shas est un parti politique israélien ultra-orthodoxe, fondé en (...)

8À force de pétitions et de dépôts de plaintes, les FdM19 ont obtenu le 22 mai 2002, ce qui s’apparentait alors à leur première victoire. La Cour suprême20 les a autorisées à cette date, à organiser des groupes de prières et à lire la Torah dans la section féminine principale, et par conséquent orthodoxe, du Mur. Sous la pression des partis religieux ultra-orthodoxes et en particulier du SHAS21, la Cour suprême est pourtant revenue sur sa décision en avril 2003 et a demandé au gouvernement de proposer aux femmes un site alternatif périphérique comme celui de l’Arche de Robinson et du jardin archéologique, zone du Mur non régie par les autorités orthodoxes. S’est alors ouverte, une période de répression d’une dizaine d’années où plusieurs fondatrices et activistes ont été arrêtées, interrogées par la police et soumises à des amendes voire interdites d’accès au Kotel. Le groupe des FdM s’est alors divisé entre des partisanes du compromis « territorial » et de la délocalisation, et des femmes ne souhaitant pas renoncer à leur conquête de l’espace de prière orthodoxe. Dans cette affaire de partition de l’espace et de fragmentation du rituel qui renvoie à des hiérarchies installées et à des rapports de pouvoir, les frontières de genre, les frontières religieuses et les frontières géopolitiques se recoupent et se font inévitablement écho.

Frontières entre les sexes, frontières entre judaïsmes et frontières géopolitiques…

  • 22 De Gasquet 2016.

9Avec le compromis de 2016, les FdM ont remporté une victoire en demi-teinte et certaines militantes ne cachent pas leur déception. Les femmes ont bien été écartées du centre du Kotel et le judaïsme ultra-orthodoxe reste la seule autorité légitime à gérer le lieu de la prière traditionnelle. L’aménagement d’une partie périphérique du Mur comme zone de prière égalitaire est beaucoup plus une victoire du judaïsme libéral en Israël que celle d’une victoire d’un judaïsme féministe orthodoxe dans le pays. À bien des égards, la lutte engagée par les FdM s’est retrouvée prise dans l’affrontement plus global entre judaïsme libéral (majoritaire aux États-Unis et minoritaire en Israël) et judaïsme orthodoxe22. Sortir du conflit avec les FdM revenait pour le gouvernement israélien à pacifier les relations avec les courants libéraux (Reform) et Conservative (Massorti) et, par là même, à assouplir les relations tendues avec les communautés juives libérales nord-américaines. Si les luttes d’affirmation des FdM ont été quelque peu éclipsées par la mise en concurrence des différents courants du judaïsme, le compromis obtenu pose également problème en termes politiques.

  • 23 Yiftachel 1997.

10Le Mur et son esplanade sont un lieu emblématique du nationalisme israélien, de la proclamation de Jérusalem capitale réunifiée mais également un lieu de célébration religieuse et de pèlerinage pour les Juifs de la diaspora. Le compromis de janvier 2016 prévoie l’extension et l’aménagement d’une portion du Mur faisant la jonction entre la zone de l’Arche de Robinson et le Kotel. Cet espace surmonté d’un pont en bois permettant aux non musulmans d’accéder à l’Esplanade des mosquées est l’enjeu de fortes tensions politiques entre Israéliens et Palestiniens. Le document des renseignements français de 1928 relatant les troubles liés à toute tentative d’aménagement du Mur demeure d’une étonnante actualité, puisque toute modification dans cette zone risque de remettre en cause un équilibre précaire entre Palestiniens et Israéliens. Étendre cet espace et l’aménager reviendrait ainsi à participer à une judaïsation de l’espace23. Dans cet espace sacré, le traçage des frontières entre hommes et femmes, libéraux et orthodoxes, renvoie inexorablement au traçage des frontières nationales et politiques et au conflit avec les Palestiniens.

  • 24 Pouzol 2008.
  • 25 Pouzol 2008.

11Le combat des FdM ne peut donc pas être réduit à une dissension religieuse interne à la société israélienne : elle résonne dans la diaspora juive mais également dans le conflit international entre Israéliens et Palestiniens. C’est indiscutablement pour cette raison que les FdM n’ont pas forcément reçu de soutien de la part des féministes israéliennes séculières dont certaines, très politisées, dénoncent sans appel l’occupation israélienne, le processus de judaïsation de la ville de Jérusalem24 et la trop grande influence des religieux dans le pays. Les FdM n’ont pas fait pas non plus l’unanimité chez certaines orthodoxes féministes sensibles aux questions du conflit. Leah Shakdiel, féministe orthodoxe, elle-même militante pour la paix et opposée à l’occupation des territoires palestiniens, n’a jamais caché son malaise face à cette organisation qu’elle a décidé de ne pas rejoindre en 1988 et dont elle comprend pourtant les revendications. La conférence juive féministe internationale de 1988, événement matriciel de la naissance des FdM, fut également le lieu d’une polémique fondatrice entre féministes juives au sujet du conflit israélo-palestinien. Une conférence parallèle s’était pourtant organisée en « miroir » afin d’évoquer les liens entre oppression des femmes et oppression nationale des Palestiniens25. Cet épisode éminemment politique et clivant dans les luttes de femmes a été gommé de la mémoire et des archives du groupe des FdM, les privant ainsi d’une possibilité historique de fonder un féminisme religieux radical.

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Bibliographie

Barnavi Élie, 1988, Une Histoire moderne d’Israël, Paris, Champs Flammarion.

Bartlet William, 1844, Walks about the City and environs of Jerusalem, London, Arthur Hall and C°.

Chesler Phyllis & Rivka Haut, 2003, Women of the Wall: claiming sacred ground at Judaïsm’s Holy Site, Woodstock, Vermont, Jewish Lights.

de Gasquet Béatrice, 2016, « Quelle mixité devant le Mur de Jérusalem ? » [en ligne http://bdegasquet.free.fr/?p=5].

Halperin-Kaddari Ruth & Yaacov Yadgar, 2012, « Nationalisme, religion et (in)égalité de sexe en Israël au prisme du droit de la famille », Cahiers du Genre, h.s., 3, p. 119-137.

Handelman Don, 1990, Models and Mirrors. Towards an anthropology of public events, New-York/Oxford, Berghan Books.

Horowitz Elliot, 2013, « The Women’s Wall. In calling for desegregation of the Kotel, the modern movement is actually reviving 19th-century traditions » [en ligne http://www.tabletmag.com/jewish-news-and-politics/130878/the-womens-wall].

Laurens Henry, 1998, Le Retour des exilés. La Lutte pour la Palestine de 1869-1997, Paris, Robert Laffont.

, 2002, La Question de Palestine. Une Mission sacrée de civilisation 1922-1947, tome II, Paris, Fayard.

Pouzol Valérie, 2008, Clandestines de la paix : Israéliennes et Palestiniennes contre la guerre, Paris, Éditions Complexe, IHTP-CNRS.

—, 2010, « Entre silence et fracas : émergence et affirmation des luttes féministes dans les communautés juives orthodoxes en Israël (1970-2009) », Le Mouvement social, 231 : « Engagements féminins au Moyen-Orient », p. 29-43.

Shakdiel Leah, 2003, « Women of the Wall: radical feminism as an opportunity for a new discourse in Israel », in Hannah Naveh (ed.), Gender and Israeli Society. Women’s Time (Journal of Israeli History), London & Portland, Vallentine Mitchell, p. 126-163.

Storper-Perez Danielle, 2007, « “Dieu désire nos prières, les rabbins c’est moins sûr…” Évolution de la prière chez les femmes orthodoxes », Pardès, 43 : « Quand les femmes lisent la Bible », p. 171-182.

Storper-Perez Danielle & Harvey Goldberg, 1989, Au pied du Mur de Jérusalem. Approche anthropologique du Mur du Temple, Paris, Éditions Le Cerf.

Weinstock Nathan, 2011, Terre promise, trop promise. Genèse du conflit israélo-palestinien (1882-1948), Paris, Odile Jacob.

Yiftachel Oren, 1997, « Israeli society and Jewish-Palestinian reconciliation: ethnocracy and its territorial contradictions », Middle East Journal, 51/4, p. 505-519.

Zohar Zvi, 1985, « Un grand décisionnaire sépharade défend les droits de la femme (responsum de Rabbi Uziel sur le suffrage féminin, 1920) », Pardès, 2, p. 128-148.

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Annexe

ue aérienne du Mur des Lamentations et du jardin archéologique.

A : zone de prière orthodoxe avec un espace pour les hommes, une cloison de séparation et un espace pour les femmes.
B : zone de prière non-orthodoxe où hommes et femmes peuvent prier sans séparation. Zone qui doit être aménagée et agrandie dans l’actuel jardin archéologique ou Arche de Robinson.

Source : http://www.jta.org/​2016/​01/​31/​news-opinion/​israel-middle-east/​3-maps-that-explain-the-western-wall-compromise, en ligne le 18 juin 2016.

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Notes

1 Yaïr Ettinger, « Compromise creates two Western Walls for two People », Haaretz, 31 janvier 2016.

2 Shakdiel 2002.

3 En droit islamique, le Waqf est une donation faite à perpétuité par un particulier à une œuvre à utilité publique, pieuse ou charitable. Ici, il est question du Waqf d’Abû Madyan, fondation religieuse qui aurait été constituée à l’époque de Saladin au profit de musulmans d’origine marocaine (les « Moghrabis »), Weinstock 2011 : 198.

4 Laurens 2002.

5 Horowitz 2013.

6 Bartlet 1844.

7 Yishouv en hébreu « implantation » désigne l’ensemble des Juifs présents en Palestine avant la création de l’État.

8 Mehitza en hébreu, la « division », renvoie à la séparation opérée dans la synagogue entre l’espace réservé aux hommes et celui réservé aux femmes.

9 Bulletin de renseignements de la fin septembre 1928, ministère des Affaires étrangères, Levant-Palestine, 1918-1929, XXII, 102 reproduit dans Laurens 1998 : 384.

10 Zohar 1985.

11 Barnavi 1988 : 33-43.

12 Halperin-Kaddari & Yadgar 2012 : 119-137.

13 Handelman 1990 : 205-208.

14 Stoper-Perez & Goldberg 1989.

15 Sur le problème des femmes et de la prière publique dans le judaïsme, Stoper-Perez 2007 : 172.

16 Premier jour du mois hébraïque.

17 Jour de la nouvelle lune et premier jour du mois dans certains calendriers dont le calendrier juif. Il est célébré par des prières rituelles.

18 Le talith est le châle religieux réservé à la prière juive.

19 En hébreu, Neshot-ha-Kotel, en anglais Women of the Wall. Nous utiliserons en français, l’abréviation FdM. http://womenofthewall.org.il/ en ligne le 19 avril 2016.

20 La Cour suprême est extrêmement active en Israël et entend directement en premier et dernier ressort les recours contre l’administration. Elle est de ce fait régulièrement saisie y compris dans des affaires religieuses (question du statut personnel, des conversions au judaïsme). Pouzol 2010.

21 En hébreu Shomreï Sfarad, le parti Shas est un parti politique israélien ultra-orthodoxe, fondé en 1984 et qui représente principalement les Séfarades.

22 De Gasquet 2016.

23 Yiftachel 1997.

24 Pouzol 2008.

25 Pouzol 2008.

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Table des illustrations

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Fichier image/jpeg, 164k
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Fichier image/jpeg, 36k
Légende A : zone de prière orthodoxe avec un espace pour les hommes, une cloison de séparation et un espace pour les femmes.B : zone de prière non-orthodoxe où hommes et femmes peuvent prier sans séparation. Zone qui doit être aménagée et agrandie dans l’actuel jardin archéologique ou Arche de Robinson.
Crédits Source : http://www.jta.org/​2016/​01/​31/​news-opinion/​israel-middle-east/​3-maps-that-explain-the-western-wall-compromise, en ligne le 18 juin 2016.
URL http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/clio/docannexe/image/13323/img-3.png
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Pour citer cet article

Référence papier

Valérie Pouzol, « Les Femmes du Mur (Jérusalem, 2016-1880) »Clio, 44 | 2016, 253-263.

Référence électronique

Valérie Pouzol, « Les Femmes du Mur (Jérusalem, 2016-1880) »Clio [En ligne], 44 | 2016, mis en ligne le 01 décembre 2019, consulté le 09 décembre 2024. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/clio/13323 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/clio.13323

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Auteur

Valérie Pouzol

Maîtresse de conférences en histoire contemporaine à l’Université de Paris 8 et chercheure au LEGS (Laboratoire d’Études de Genre et de Sexualité/Paris 8-CNRS). Elle a publié sur l’histoire du militantisme des femmes israéliennes et palestiniennes contre la guerre, avec un intérêt particulier pour la construction et l’instrumentalisation des identités de genre par les deux nationalismes. Elle est l’auteure d’un ouvrage Clandestines de la paix. Israéliennes et Palestiniennes contre la guerre, Paris, Complexe, IHTP-CNRS, paru en 2008. Dans le cadre d’un programme de recherche international (MOFIP/ mofip.mmsh.univ-aix.fr), elle a mené des recherches sur le militantisme LGBTQ en Israël et en Palestine. Depuis 2011, elle étudie le militantisme féministe dans les communautés juives orthodoxes en Israël en s’attachant à la question de la ségrégation spatiale entre les sexes. v.pouzol@wanadoo.fr

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