L’influence du Vatican et des réseaux catholiques à l’Unesco (1945-1974)
Résumé
Dès la création de l’Unesco en 1945, le Vatican a œuvré pour devenir une force d’influence au sein de cette organisation culturelle internationale. Cet article retrace les moyens et les réseaux utilisés par le Vatican pour exercer son influence sur l’Unesco et montre avec quelle efficacité les services pontificaux ont infléchi dans un sens procatholique plusieurs programmes de l’Unesco, comme le vaste projet éditorial de l’Histoire de l’Humanité.
Plan
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1La question de la position de l’Unesco à l’égard de la religion est toujours restée floue. Bien que cette institution soit officiellement non confessionnelle, dès le début, les représentants de plusieurs religions s’y sont manifestés et se sont efforcés d’y faire passer leurs idées. Ce sont surtout les représentants de l’Église catholique qui y ont réussi. L’histoire des relations entre l’Unesco et le Vatican durant les trente premières années de cette institution (les plus fécondes en projets et en développements intellectuels) est très intéressante. Elle est abordée ici à partir de l’étude des archives de l’Unesco et des archives de certains États membres. Comment le Vatican et les réseaux catholiques ont-ils œuvré pour devenir une force d’influence à l’Unesco ? Il s’agit d’étudier tout d’abord la mise en place de relations officielles entre l’Unesco et le Vatican de 1945 à 1952, puis le renforcement progressif de ces relations de 1953 à 1962, et enfin la période de la direction de l’institution par René Maheu (1962-1974), au cours de laquelle l’Unesco se rapproche encore plus de l’Église.
La mise en place de relations officielles entre l’Unesco et le Vatican (1945-1952)
Un intérêt précoce du Vatican pour l’Unesco
- 1 Maurice Barbier, L’Église catholique et l’Unesco. Vingt-cinq ans de relations, Paris, Centre J.-L. (...)
2Dès la création de l’Unesco, le Vatican exprime son intérêt pour cette nouvelle organisation. Les préoccupations de l’Unesco – éduquer, venir en aide aux plus démunis – rejoignent en effet en partie celles de l’Église catholique. L’intérêt du Vatican pour l’Unesco se mêle dès le début de la peur de la concurrence1, et de la volonté de contrôler l’Unesco afin d’empêcher qu’y triomphe une tendance athée et matérialiste. Des relations officieuses se développent dès les premières années.
- 2 Archives de l’Unesco, dossier biographique de J.E. Rupp.
- 3 Archives diplomatiques des États-Unis, Decimal file, RG59, entry CDF 1945-1949, box 2242 : télégram (...)
3Dès la première conférence générale de l’Unesco en 1946, un observateur officieux, le chanoine Rupp, est envoyé par la nonciature apostolique de Paris pour y assister2. L’année suivante, en 1947, une « Commission sur l’Unesco » est créée au sein des services diplomatiques du Vatican3. À la conférence générale de 1947, le Vatican est représenté en tant qu’organisation internationale non gouvernementale (OING).
- 4 Archives diplomatiques des États-Unis, box 2254 : M.C. Boulad, « Un entretien avec le comte Jacini, (...)
4Alors que le premier directeur général de l’Unesco, Julian Huxley, est résolument athée, rapidement les réseaux catholiques pénètrent l’Unesco. Dès 1948, parmi les délégations à la conférence générale de l’Unesco, plusieurs délégués se disent favorables à une implication plus grande de la religion catholique dans les affaires de l’Unesco. Ainsi, dans une interview, le comte Jacini, président de la délégation italienne, va dans ce sens, soulignant l’importance qu’ont selon lui les enseignements de la Bible pour l’action de l’Unesco4.
- 5 Maurice Quéguiner, Préoccupations catholiques et initiatives de l’Unesco, CCIC, non daté, p. 93-94.
5Dès 1947 est créé le Centre catholique international de coopération avec l’Unesco (CCIC). Les membres du CCIC, notamment Jean Larnaud et Maurice Quéguiner, contribuent beaucoup au rapprochement entre l’Unesco et la religion catholique. Ainsi, dans une brochure du CCIC, Maurice Quéguiner se dit « frappé » par le préambule de l’Acte constitutif de l’Unesco car « nous n’y trouvons aucune mention de Dieu ni de la dépendance de l’homme à son égard. Cette omission qui froisse profondément tous les croyants : chrétiens, juifs, musulmans et hindous, et qui ne satisfait qu’une petite minorité d’athées, est susceptible de mener dans la pratique aux pires errements. Les valeurs, les droits et les devoirs ne sont-ils pas fondés en Dieu et l’ignorer ne conduit-il pas à l’anarchie individuelle, morale et sociale ? ». Dans ce texte, qui s’adresse aux catholiques et en particulier aux missionnaires, Quéguiner exprime sans ambages la position des catholiques à l’égard de l’Unesco : « Il appartient donc aux catholiques de faire en sorte que personne n’use des moyens et du prestige de l’organisation pour faire triompher des mouvements qui leur soient hostiles et que, d’autre part, l’organisation avec laquelle ils collaborent, n’envahisse pas leur propre terrain d’action, mais leur laisse au contraire toute latitude pour donner, de leur côté et par leurs moyens, ce complément chrétien sans lequel toute entreprise est pour les croyants tronquée ». « Dans son inspiration et ses fins, elle [l’Unesco] se rencontre en plusieurs points avec la doctrine chrétienne et se prête à notre égard à une possibilité de collaboration vraiment satisfaisante et fructueuse. »5
- 6 Interview de Jean Larnaud par l’auteur, 4 mars 2004 ; interview de M. Deliance ; Jaime Torres Bodet (...)
6Bien que non croyant lui-même, le deuxième directeur général de l’Unesco, le Mexicain Jaime Torres Bodet, prenant en compte le fait que les croyants sont alors nettement majoritaires dans le monde, manifeste une grande attention aux questions spirituelles et religieuses6.
- 7 Archives diplomatiques des États-Unis, box 2254 : mémo de G.V. Allen sur la conférence générale de (...)
- 8 Archives diplomatiques des États-Unis, box 2254 : rapport confidentiel d’Arthur Compton à G.V. Alle (...)
- 9 Jaime Torres Bodet, Memorias III, op. cit., p. 110 et 53.
7À partir du début du mandat de Jaime Torres Bodet, les liens entre le Vatican et l’Unesco se font de plus en plus étroits. Torres Bodet accède à la demande du Vatican d’être représenté à la conférence générale de 1948 par une délégation officielle, comme État non membre7. Les diplomates américains observent le vif intérêt manifesté par le Vatican pour l’Unesco et l’influence croissante exercée par les diplomates du Vatican sur l’Unesco. Le diplomate américain G.V. Allen affirme dans un mémorandum confidentiel : « Le Vatican promet d’acquérir une influence importante à l’Unesco. »8 Les Américains interprètent cette tendance comme étant liée à l’influence croissante du « clan latin » à l’Unesco. Un des discours prononcés par Torres Bodet, intitulé « L’Unesco, un acte de foi », est considéré comme d’esprit catholique, bien que Torres Bodet se revendique lui-même comme un « libre-penseur », comme un « sceptique irréductible en matière religieuse »9.
- 10 Archives diplomatiques britanniques, FO 371/107247 : Chancery, British Legation to the Holy See, au (...)
8Ce sont avant tout des intérêts stratégiques qui semblent expliquer que l’Unesco, malgré son caractère théoriquement non confessionnel, ait développé des relations étroites avec le Vatican. D’après les explications transmises au gouvernement britannique par un informateur de l’Action catholique, le Saint-Siège aurait promis de mettre à la disposition de l’Unesco l’immense somme d’informations, accumulée depuis de longues années grâce à son réseau de missionnaires, au sujet de régions du monde sous-développées lointaines et isolées. Ces informations constituent une source précieuse pour l’Unesco10.
- 11 « Le Saint-Siège et l’essor des organisations internationales », communication faite par Mgr Bertol (...)
9En octobre 1951, le pape Pie XII incite les catholiques à concourir aux efforts des organisations internationales œuvrant pour la « compréhension mutuelle » et le « respect réciproque »11. Il vise par là de manière implicite l’Unesco.
- 12 Jaime Torres Bodet, Memorias III, op. cit., p. 109-111.
- 13 Archives de l’Unesco, Reg 1632, I : lettre de Domenico Tardini à Torres Bodet, 30 juillet 1952.
- 14 Archives de l’Unesco, Reg 1632, I : lettre de Ange Joseph Roncalli, nonce apostolique de France, à (...)
10Le gouvernement italien encourage le rapprochement entre l’Unesco et le Vatican. Ainsi, au printemps 1950, lors de la visite de Torres Bodet à Rome, De Gasperi et le comte Sforza insistent vivement pour qu’il aille rendre visite au pape Pie XII. Cette rencontre, qui se produit, resserre les liens entre les deux institutions. Si le pape fait l’éloge des objectifs définis par l’Unesco, il se montre sceptique quant à leurs possibilités de réalisation et se prévaut de l’ancienneté et de l’expérience de l’Église, millénaire, par rapport au jeune âge et à l’inexpérience de l’Unesco pour réclamer une sorte de position de guide spirituel du Vatican sur l’Unesco12. Des tractations confidentielles au plus haut niveau entre l’Unesco et le Vatican aboutissent en juillet 1952 à l’officialisation des relations entre les deux institutions : le Saint-Siège est désormais représenté par des observateurs officiels à la conférence générale. C’est le nonce apostolique de France, Ange Joseph Roncalli, qui est nommé observateur permanent du Saint-Siège auprès de l’Unesco. Le fait qu’il était sur le point de devenir le futur pape Jean XXIII a joué un rôle déterminant sur l’avenir des relations entre le Vatican et l’Unesco13. Une correspondance lie dès lors les deux observateurs, Mgr Roncalli et son adjoint Mgr Pedroni, avec le secrétariat de l’Unesco. Torres Bodet entretient des relations « cordiales » et même « amicales » avec Roncalli ; réciproquement, celui-ci exprime à Torres Bodet sa « sympathie » pour l’Unesco, qu’il considère comme une « Église laïque »14.
11Ainsi, entre 1948 et 1952, une évolution nette est accomplie, aboutissant à l’officialisation et au resserrement des relations entre l’Unesco et l’Église.
Les conséquences de ce rapprochement sur l’action de l’Unesco
- 15 Archives de l’Unesco, 329.18 A 53 CIPSH, VI : lettre de M.A. de Franz à G. de Lacharrière, 29 oct. (...)
12En 1947, l’Unesco lance le projet de superviser la rédaction d’une étude sur le nazisme et le fascisme, dans le contexte de la volonté de dénazification et de « rééducation » des peuples de l’ex-Axe. Mais, alors que l’étude était initialement conçue comme devant se faire dans un esprit de parfaite impartialité et objectivité, l’impératif de prudence politique amène l’Unesco à faire pression sur les chercheurs pour peser sur l’orientation et le contenu de leurs écrits. L’Unesco censure même certaines contributions, jugées dangereuses sur le plan politique ; ainsi, la contribution de l’historien italien G. La Piana, qui analyse avec objectivité l’attitude de passivité et de complicité du Vatican à l’égard du fascisme, est jugée inacceptable : elle est censurée15.
- 16 Archives de l’Unesco, SCHM 18 : rapport sur les réunions du 25 et du 27 octobre 1948, p. 2.
- 17 Unesco and catholic collaboration, op. cit., p. 60 ; G. Archibald, Les États-Unis et l’Unesco, 1944 (...)
- 18 Archives de l’Unesco, SCHM 10 : lettre confidentielle de G. Métraux au ministre allemand Burckhardt (...)
- 19 Archives diplomatiques britanniques, FO 371/101440 : mémorandum confidentiel de J. Somers Cocks à P (...)
- 20 Archives de l’Unesco, SCHM 53 : France catholique, 13 juin 1952 ; SCHM 8 : commentaires de G.N. Cla (...)
- 21 Unesco and catholic collaboration, op. cit., p. 38-46 : « Unesco-programs and the problem of cathol (...)
- 22 Archives de l’Unesco, SCHM 17 : lettre de Huxley à Armando Cortesao, 31 juill. 1950.
- 23 Archives de l’Unesco, SCHM 9 : lettre de Berrêdo Carneiro au DG, 21 janv. 1952.
13Par ailleurs, un autre programme de l’Unesco, la rédaction de l’Histoire de l’Humanité, est aussi révélatrice de cette évolution : initialement, elle est entamée dans un esprit laïque et positiviste ; mais dès 1948, il est décidé d’accorder une place dans cet ouvrage aux « idées métaphysiques et religieuses », considérées comme « des faits dont le rôle dans l’histoire des cultures a été essentiel »16. L’orientation de l’ouvrage devient de plus en plus proreligieuse, sous l’influence croissante de la campagne menée par d’importants groupes de pression catholiques, notamment américains, qui reprochent au projet d’être dirigé par des athées (Julian Huxley, Joseph Needham, Ralph Turner notamment sont les cibles visées)17. Alarmée par toutes ces critiques, l’Unesco fait beaucoup d’efforts d’apaisement auprès de ces milieux18, notamment auprès du Vatican19. La nomination de plusieurs catholiques comme membres correspondants de la commission internationale pour la rédaction de l’histoire de l’Humanité contribue à apaiser les craintes20. L’Unesco s’efforce d’amener des historiens catholiques américains à participer au projet, pour diminuer l’hostilité de l’opinion catholique21. L’intellectuel catholique français Jacques Maritain est contacté par Julian Huxley pour participer à la rédaction de l’ouvrage22. En 1952, le Brésilien Paulo de Berrêdo Carneiro, coordinateur du projet, se fait explicitement rassurant pour les croyants : « La part qui, depuis deux mille ans, revient au christianisme et à l’Église catholique en particulier, dans ce devenir historique, est si grande et si belle que rien ne saurait ni la défigurer ni l’amoindrir. Comment pourrait-on concevoir qu’une commission composée d’hommes mûris au service de la science, des arts, de l’humanité, serait capable d’une pareille hérésie ? […] Que les catholiques se rassurent : la grande ombre de Bossuet sera toujours présente aux débats des historiens convoqués par l’Unesco. »23
- 24 Institut Luigi Sturzo, archives privées de V. Veronese, carton 34 : « L’Unesco vue par un catholiqu (...)
- 25 Tzentzenhuaro commence à vivre ; bilan d’une année d’éducation de base, Paris, Unesco, 1953, p. 12 (...)
- 26 M. Quéguiner, éducation de base…, op. cit., p. 61-62 ; archives de l’Unesco, 6C/PRG/30, 3 juill. 19 (...)
14Le rapprochement entre l’Unesco et le Vatican se traduit aussi dans les projets lancés par l’Unesco sur le terrain. Ainsi, le Centre régional d’éducation de base pour l’Amérique latine (CREFAL), créé par l’Unesco à Patzcuaro au Mexique en 1951, est considéré comme l’héritier d’une entreprise missionnaire du xvie siècle, qui s’était développée au même endroit, à Patzcuaro : en 1531, un prêtre, le père Vasco de Quirogua, s’était installé parmi les Indiens tarasques de Patzcuaro et y avait lancé une campagne intensive d’éducation24. Plusieurs articles et publications de l’Unesco mettent en parallèle cette ancienne entreprise missionnaire et celle lancée par l’Unesco au même endroit quatre siècles plus tard, présentant le CREFAL comme s’inscrivant dans la filiation de cette action missionnaire25. En outre, une radio éducative, radio Sutatenza, animée en Colombie, soutenue par l’Unesco, est menée par deux prêtres, le père Salcedo et le père Rodriguez26.
- 27 Maurice Quéguiner, éducation de base…, op. cit., p. 13.
15Alors que l’Unesco prône l’« éducation de base », condensé de l’éducation traditionnelle occidentale à l’intention des peuples « sous-développés », le missionnaire catholique Maurice Quéguiner, figure importante du CCIC, reprend à son compte cette notion, et définit l’éducation de base à l’intention des missionnaires catholiques, en ajoutant, par rapport à la définition de l’Unesco, la dimension religieuse, spirituelle, « une mystique de vie »27.
- 28 Mgr. Bertoli, « Le Saint-Siège et l’essor des organisations internationales », 15 nov. 1960, doc. c (...)
- 29 Unesco and catholic collaboration, op. cit.
16Parallèlement au resserrement des liens entre l’Unesco et le Vatican, les relations deviennent plus étroites entre l’Unesco et les organisations internationales catholiques (OIC). Coordonnées entre elles depuis 1927 par la mise en place d’un comité réunissant leurs présidents, elles se dotent en 1951 d’une structure plus développée, la Conférence des OIC28. Ainsi fédérées, elles constituent un groupe relativement puissant, qui devient un interlocuteur de poids pour l’Unesco. C’est non seulement en Europe et en Amérique latine, mais aussi aux États-Unis que les OIC manifestent un vif intérêt pour l’Unesco. Ainsi, en 1953, la puissante Commission catholique sur les affaires intellectuelles et culturelles (CCICA) choisit comme thème pour sa réunion annuelle « La collaboration entre l’Unesco et les catholiques »29.
17Le développement de liens étroits entre le Vatican et l’Unesco apparaît ainsi patent dès les premières années.
Le renforcement de l’influence catholique à l’Unesco (1953-1962)
- 30 Archives diplomatiques britanniques, FO 371/107247 : lettre de Roberts à Winston Churchill, 1er jui (...)
- 31 Archives diplomatiques britanniques, FO 371/107247 : lettre confid. de Roberts, British Legation to (...)
18En 1953, Giuseppe Sensi, important membre des services diplomatiques du Vatican, succède à Roncalli comme observateur permanent du Saint-Siège à l’Unesco. Sa nomination confirme aux yeux des États membres l’intérêt porté par le Vatican à l’Unesco30. En 1953, l’archevêque Montini (le futur pape Paul VI) déclare que le Saint-Siège accorde « un véritable intérêt » à l’Unesco, et estime que cette organisation a un rôle important à jouer dans le monde31. Ainsi, à l’Unesco, la période qui s’ouvre en 1953, sous la direction du chrétien américain Luther Evans, s’annonce propice à un renforcement des relations entre cette institution et le Vatican.
Luther Evans, un protestant pratiquant
- 32 Archives de l’Unesco, 2 XC/Résolutions et comptes rendus, 7e séance plénière, 4 juillet 1953, p. 11 (...)
- 33 Archives diplomatiques des États-Unis, box 1558 : lettre de Russell Forrest Egner, the Religious Ge (...)
- 34 Columbia University : Oral History Research Office, interview de Luther Evans, octobre 1966, par Th (...)
19Luther Evans, directeur général de l’Unesco de 1953 à 1958, protestant pratiquant, est le premier directeur de cette organisation à exprimer explicitement sa foi religieuse dans le cadre de ses fonctions : dans son premier discours à ce poste, il en appelle à « Dieu tout-puissant » pour l’aider à accomplir sa tâche32. Plus tard, il déclare que l’Unesco a un grand rôle à jouer pour « résoudre le problème spirituel du monde »33. Par ces affirmations, il contribue à poursuivre le rapprochement entre l’Unesco et les institutions religieuses. En outre, en 1953, il rencontre le pape dans le cadre de ses fonctions et a une longue conversation avec lui34.
- 35 Archives de l’Unesco, RP/3/49, 17 avril 1953 : Études, « Unesco et éducation de base » par Maurice (...)
20Parallèlement, les hommes du CCIC, Jean Larnaud et Maurice Quéguiner, intensifient pendant cette période leurs efforts pour faire évoluer l’Unesco vers une coloration catholique plus marquée encore. Ainsi, en 1953, dans Études, l’organe des Jésuites, Quéguiner incite les catholiques à exercer « une vigilance constante » pour que l’Unesco conserve son « attitude de neutralité ouverte et bienveillante » sur les questions religieuses, et à veiller à ce que « personne n’use des moyens et du prestige de l’organisation pour faire triompher des mouvements hostiles » au catholicisme. Il souligne que, « dans le domaine des réalisations pratiques, la collaboration des missionnaires et des organisations catholiques avec l’Unesco peut être des plus fécondes ». Il appelle les catholiques à prendre une part active à l’Unesco, « organisation qui appartient aux catholiques autant qu’à quiconque […] et qui est financée par les taxes qu’ils payent comme tous les autres » ; il s’agit pour les catholiques non pas de « monopoliser » l’Unesco à leur seul profit, mais de lui apporter « leur contribution propre »35.
- 36 Archives de l’Unesco, 372 (8) MP01 A 22, I : mémoire de R. Maheu, sans titre, p. 37.
21Durant ces années, l’observateur du Saint-Siège joue un rôle croissant à la conférence générale de l’Unesco. Ainsi, en 1956, René Maheu, haut fonctionnaire à l’Unesco, estime : « il y a lieu de se féliciter des déclarations favorables que l’observateur du Saint-Siège a faites à la conférence de l’Unesco », et « qui ont été très remarquées ». En revanche, revenant d’un voyage au Pérou, il y observe que la hiérarchie locale de l’Église y est « sensiblement plus réticente » que le pape à l’égard de l’Unesco, et que notamment au Pérou, les Jésuites, « dont l’influence, aux racines plusieurs fois séculaires, demeure considérable », sont hostiles à l’Unesco, qu’ils considèrent comme une concurrente36. On note donc un certain fossé entre l’attitude du Vatican et celle des Églises locales dans les différents États membres.
- 37 Jaime Torres Bodet, Memorias III, op. cit., p. 213.
- 38 Archives de l’Unesco, Educ/28/1947, p. 6 ; Educ./20/1947, 17 avril 1947, p. 3.
- 39 Archives de l’Unesco, 375 (86) A 63 VP : Patricio S. Sanchez, 15 mai 1949, « Viani. Rapport sur le (...)
- 40 Rapports du Congrès américain, vol. 102, 84e congrès, 2e session, 3 janv.-27 juill. 1956 : articles (...)
- 41 Alfred Métraux, Itinéraires I, (1935-1953) carnets de notes et journaux de voyage, introduction et (...)
- 42 Educ./6/1947, 13 mars 1947, p. 9.
- 43 Cl. Auroi, « Métraux et les Andes », Bulletin de la société suisse des américanistes, n° 66-67, 200 (...)
22À travers les programmes éducatifs de l’Unesco, notamment ceux d’éducation de base sur le terrain, on observe une proximité croissante de l’Unesco avec les principes du catholicisme37. L’Unesco insiste de plus en plus sur le but de « développement spirituel et moral » de l’éducation de base38. Il y a souvent une bonne entente entre l’Unesco et l’église dans les projets d’éducation de base menés sur le terrain39 ; en même temps il y a une concurrence entre les deux instances40. Les relations de coopération teintée de concurrence et de méfiance entre l’Unesco et le père Maurice Quéguiner, membre actif du CCIC, sont représentatives de cette ambiguïté41. L’Unesco elle-même emploie le terme de « missionnaires de l’éducation de base »42, terme du registre religieux. De même, l’ethnologue Alfred Métraux, fonctionnaire de l’Unesco, affirme en 1955 : « Il nous faut des missionnaires laïcs, mais qui soient très près des missionnaires religieux » 43.
23Le catholique Vittorino Veronese porté à la tête de l’Unesco
- 44 Archives de l’Unesco, 125 EX/SR.1-28, p. 13 ; 10 C/NOM/29 : notice biographique de Veronese.
- 45 Courrier de l’Unesco, mai 1959, p. 25 : extrait de la conférence « La jeunesse face au monde d’aujo (...)
24L’année 1958 constitue une date importante dans l’histoire du rapprochement entre l’Église et l’Unesco. Il s’agit de l’élection au poste de directeur général de l’institution de l’Italien Vittorino Veronese. Ce dernier, catholique, est très proche du Vatican. Il a travaillé dans la banque italienne, et notamment pour des banques du Vatican. Il a aussi participé activement à des réseaux catholiques italiens (étant lié très tôt à la Federazione Universitaria Cattolica Italiana, la FUCI, puis devenant en 1943 secrétaire général du Mouvement catholique des diplômés universitaires, puis au lendemain de la guerre, président de l’Action catholique italienne). Vittorino Veronese s’est lié à l’Unesco dès l’adhésion de son pays à cette institution en 194844. Socialement et politiquement conservateur, Veronese voit la solution des problèmes de l’humanité dans l’attachement aux valeurs et aux structures sociales traditionnelles, comme la famille et la religion45.
- 46 Archives privées de Veronese, carton 25 : lettre de Ramon Sugranyes de Franch, président de Pax Rom (...)
- 47 Archives diplomatiques des États-Unis, box 1566 : lettre confid. de Robert McBride à F.W. Jandrey, (...)
- 48 J. Sewell, Unesco and World Politics, Princeton University Press, 1975, p. 192-194, cité dans G. Ar (...)
25Le choix de Veronese pour prendre la tête de l’Unesco est favorisé par l’intense campagne en sa faveur menée de manière confidentielle par l’association Pax Romana46 et par le Vatican47 parmi les États membres, et par la faveur dont il jouit en tant que catholique dans les États d’Amérique latine, très catholiques48.
- 49 L’Unità, 23 novembre 1958, cité dans la lettre de Gaston Palewski au ministre, du 26 novembre 1958 (...)
26Mais l’élection de Veronese à la tête de l’Unesco ne reçoit pas que des approbations. La presse communiste italienne dénonce son élection, parce qu’il est un homme de finances et à cause de son engagement catholique marqué, et estime qu’il n’a aucun titre à occuper ce poste. Ainsi pour le quotidien communiste L’Unità, Veronese « n’a à son actif aucune œuvre de quelque genre que ce soit et ne s’est jamais consacré à la moindre activité culturelle. Il a passé toute son existence dans les milieux politiques et financiers liés au Vatican ». Cette élection est selon ce journal « l’expression de la pire intolérance idéologique et de la politique impérialiste la plus réactionnaire »49.
- 50 Extrait d’un psaume ; cité dans F. Valderrama, Histoire de l’Unesco, Paris, Unesco, 1995, p. 126.
- 51 Unesco and catholic collaboration,.., p. 19-34 : « Unesco. Its Achievements and Projects », par C.J (...)
27Catholique pratiquant, Veronese exprime clairement sa foi religieuse dans le cadre de ses fonctions à la tête de l’Unesco. Dans l’un de ses premiers discours, il déclare : « Vers Toi, mon Dieu, j’élève mon âme ; en Toi, je mets ma confiance ; Toi, dont les sentiers sont amour, justice et vérité »50. Il contribue pendant son mandat à stimuler la coopération entre les organisations chrétiennes américaines et l’Unesco51.
- 52 Archives du CCIC, doc. CCIC, « Aperçu sur la iie conférence générale de l’Unesco, 14 nov.-15 déc. 1 (...)
28En 1960, à l’ouverture de la conférence générale de l’Unesco, est même célébrée une messe, par Mgr Bertoli, observateur du Saint-Siège auprès de l’Unesco, à l’église Saint-Francois-Xavier. Le CCIC observe avec satisfaction que « de nombreux représentants des États membres et des organisations internationales y participèrent ainsi que le directeur général entouré de ses collaborateurs ». À cette conférence, treize « organisations internationales catholiques » sont représentées52.
Une orientation catholique de plus en plus nette sous Veronese
- 53 Interview de J. Larnaud par Chloé Maurel ; M.-L. Paronetto Valier, article cité.
- 54 Mgr Bertoli, « Le Saint-Siège et l’essor des organisations internationales », 15 nov. 1960.
- 55 Interview de Larnaud.
- 56 Archives privées de Veronese, carton 22 : lettre de félicitation de la nonciature apostolique en Fr (...)
- 57 X 07.83 Veronese, II : Images, 6 fév. 1960, p. 3 à 6 : « Vittorino Veronese s’est fait le chantre d (...)
29Une fois élu, Veronese oriente nettement l’Unesco vers un rapprochement avec le Saint-Siège et avec les mouvements catholiques53. Ce rapprochement est facilité par l’attitude très favorable à l’Unesco du pape Pie XII, qui en 1957, dans un discours devant l’Union mondiale des organisations féminines catholiques, présente l’engagement des catholiques dans les organisations internationales comme relevant du « grand devoir missionnaire des chrétiens ». En outre, la même année, dans l’encyclique Fidei Donum, consacrée aux missions, il souligne « le rôle efficace que peuvent jouer des militants laïcs » en agissant dans le cadre de mouvements internationaux54. Son successeur, Jean XXIII, qui a été le premier observateur permanent du Vatican auprès de l’Unesco, est également très favorable au resserrement des liens de l’Église avec l’Unesco. Le nouvel observateur permanent du Vatican est Mgr Benelli, qui s’affirme comme « un grand apôtre de l’Unesco »55. La nonciature apostolique félicite chaleureusement Veronese pour son élection56. Le magazine français Images, évoquant la visite de Veronese en égypte en 1960, la présente comme un « pèlerinage »57.
- 58 Archives de l’Unesco, RP, 16 nov. 1955 : l’Osservatore Romano (Vatican, 20 oct. 1955).
- 59 Archives privées de Veronese, carton 22 : lettre de Jean Larnaud à Veronese, non datée, au lendemai (...)
- 60 Archives privées de Veronese, carton 22 : lettre de Veronese à André Ruszkowski (Office catholique (...)
- 61 Archives privées de Veronese, carton 22 : lettre de Mgr Carlo Bayer, secrétaire général de Caritas (...)
- 62 Archives privées de Veronese, carton 25 : lette de Ramon Sugranyes de Franch, président de Pax Roma (...)
- 63 Archives privées de Veronese, carton 22.
- 64 Ibid., lettre de J.M. Domenach, au nom de la revue Esprit, félicitant Veronese pour son élection, 5 (...)
- 65 Ibid., 25 nov. 58 : lettre de félicitation du rédacteur en chef de La Croix, le révérend père Wenge (...)
- 66 Ibid., lettre d’A. Vanistendael, secrétaire général de la Confédération internationale des syndicat (...)
- 67 Ibid., lettre de Jean Larnaud à Veronese, non datée, au lendemain de son élection ; Veronese, carto (...)
- 68 Veronese carton 22 : lettre d’André Ruszkowski à Veronese, 23 nov. 1958.
- 69 Ibid., lettre de Carlo Bayer à Veronese, 28 nov. 1958.
- 70 Ibid., lettre de J. Larnaud à Veronese, lettre citée.
- 71 Lettre de J. Larnaud à Veronese, lettre citée.
- 72 Archives privées de Veronese, carton 22 : lettre de Veronese à André Ruszkowski, Rome, 19 décembre (...)
30Sous la double impulsion de Veronese et du Vatican, l’Unesco accueille dès lors chaleureusement les ecclésiastiques, ainsi que les laïcs représentants d’organisations internationales catholiques (OIC)58. De nombreuses associations, organisations, revues, syndicats, de tendance catholique, développent des relations très cordiales et suivies avec l’Unesco : le CCIC59, l’Office catholique international du cinéma60, l’association Caritas Internationalis61, l’association Pax Romana62, l’Union internationale de la presse catholique, le Bureau international catholique de l’enfance, l’Agence catholique internationale d’information63, la revue Esprit64, le journal La Croix65, la Confédération internationale des syndicats chrétiens66, etc. Des liens fondés sur le partage d’une même spiritualité chrétienne se tissent entre Veronese et les dirigeants et acteurs de ces groupements. Ceux-ci lui expriment leur « fierté »67, leur « joie », leur « orgueil », de voir à la tête de l’Unesco Veronese, « apôtre laïc, entièrement consacré à promouvoir la collaboration internationale dans un esprit authentiquement chrétien »68, à « donner à l’Unesco cette empreinte qui provient de [leur] foi chrétienne »69. Pour le Vatican comme pour les OIC, en effet, l’élection de Veronese est propre « à faire oublier toutes les difficultés passées et estomper […] bien des ombres présentes », ainsi que l’exprime Jean Larnaud70. L’Unesco s’engage dans plusieurs projets éducatifs en collaboration explicite avec l’Église ou avec des mouvements catholiques. Les cercles catholiques avec lesquels l’Unesco se lie s’efforcent d’agir de manière efficace et discrète afin d’imposer des orientations chrétiennes à l’organisation. « Notre action doit être infiniment discrète. J’ai toujours considéré, à tort ou à raison, que ce devait être une de nos qualités dominantes à l’Unesco »71, écrit Jean Larnaud, directeur du CCIC, à Veronese. Ce dernier est lui aussi conscient de la nécessité d’« agir avec la plus grande prudence » afin de faire triompher les conceptions catholiques ; cette prudence se justifie par la conscience de « la méfiance que ces idées inspirent aux délégués des États de conceptions matérialistes »72.
- 73 Ex : Le Mois à l’Unesco, déc. 1959, p. 33 : « Les catholiques et les objectifs de l’Unesco », p. 41 (...)
- 74 Le Mois à l’Unesco, n° 22, mai-juin 1960, p. 52-53 : « La JOC internationale à l’Unesco ».
- 75 Ex. : n° 4, vol. I d’août 1959 du bulletin Orient-Occident, qui contient tout un paragraphe sur les (...)
- 76 Archives du CCIC, doc. CCIC, aperçu sur la iie conférence générale de l’Unesco, 14 nov.-15 déc. 196 (...)
31Sous le mandat de Veronese, l’influence catholique croît à l’Unesco. Le CCIC publie une revue mensuelle, Le Mois à l’Unesco, qui contient dans chaque numéro une rubrique intitulée « Les catholiques et les objectifs de l’Unesco », évoquant les contributions apportées par Pax Romana, par radio Vatican, par des OIC, aux actions de l’Unesco73. En 1960, Veronese reçoit les représentants de la JOC internationale, et ils décident ensemble de renforcer la coopération entre celle-ci et l’Unesco74. En outre, dans ses revues et publications, l’Unesco accorde au cours de cette période une place de plus en plus importante à la religion75. Et les programmes de l’Unesco sont de plus en plus infléchis dans un sens catholique. Ainsi, en 1960, lors des négociations pour l’élaboration d’une convention pour lutter contre la discrimination dans l’enseignement, des groupes de pression catholiques s’efforcent d’orienter cette convention dans un sens prochrétien. Ainsi, le père de Le Court participe activement à l’élaboration de cette convention ; le CCIC se réjouit qu’avec cette convention, « le droit des parents de faire assurer l’éducation religieuse et morale de leurs enfants est formellement affirmé »76.
- 77 Archives diplomatiques des États-Unis, Decimal file, RG59, entry CDF 1960-1963 , box 823 : lettre d (...)
32Veronese ne reste pas longtemps en poste ; dès 1960, affaibli et dépassé, il cède à plusieurs reprises l’intérim provisoire de ses fonctions à René Maheu ; puis, en octobre 1961, il démissionne, désignant Maheu comme directeur général par intérim, conformément au souhait des États-Unis77.
L’Unesco de René Maheu : un athée qui rapproche l’Unesco de l’Église catholique
- 78 Interview de Jean Larnaud par Chloé Maurel.
- 79 Jean Maheu, « Son fils et sa petite-fille se souviennent », Journée d’hommage à René Maheu, Cahier (...)
33Dans les années 1960, un rapprochement croissant s’opère entre l’Unesco et l’Église, dû à la fois aux efforts du nouveau directeur général, le Français René Maheu, du Saint-Siège, et de la communauté catholique. René Maheu est, de toute la période étudiée, le directeur général le plus engagé dans le rapprochement des catholiques avec l’Unesco78. D’athée, il est devenu agnostique, adhérant à « l’eschatologisme participatif chrétien » de Teilhard de Chardin79.
- 80 Archives de l’Unesco, 12 C/INF/12, 16 nov. 1962, p. 5.
- 81 Archives de l’Unesco, RP 23 janvier 1963 : article du Père Russo, La Croix, 27 décembre 1962.
34Ce rapprochement peut se saisir avec netteté sur le plan chronologique. Dans son discours d’entrée en fonction, en novembre 1962, Maheu déclare : « Un de mes prédécesseurs, au moment, comme je le suis, de prêter serment à l’organisation, demanda la permission de la conférence générale d’élever jusqu’à son Dieu une courte prière. Quant à moi, à qui de pareils recours demeurent fermés, et pour qui toute la grâce est dans l’histoire de l’Homme, c’est à une communion de foi dans l’avenir de l’Homme que je vous invite à procéder avec moi »80. En décembre 1962, dans La Croix, le père Russo, conseiller ecclésiastique et membre du CCIC, signe un important article très élogieux sur l’Unesco. Il souligne la nécessité selon lui pour cette organisation de développer des conceptions qui impliquent « une communion plus profonde dans des valeurs spirituelles » et de s’associer plus étroitement avec des organisations internationales catholiques, afin de mieux prendre en considération « toutes les composantes intellectuelles et spirituelles » des peuples81. Cela constitue un geste important de l’Église en direction de l’Unesco.
- 82 Le Monde, 21 août 1963, article cité.
- 83 Archives de l’Unesco, DG/1964.
- 84 Archives privées de Veronese, carton 66 : dossier Maheu : déclaration de M. René Maheu sur la mort (...)
35L’année suivante, en 1963, le pape Jean XXIII, dans l’encyclique Pacem in Terris, affirme une véritable proximité de vues entre l’Église et l’Unesco. Cette encyclique est reçue avec beaucoup de faveur par Maheu82, qui s’affirme « fermement convaincu que l’Unesco est appelée à être une grande force spirituelle »83. En juin 1963, Maheu fait une déclaration à l’occasion de la mort de Jean XXIII, et souligne que celui-ci s’est, en tant qu’observateur permanent du Saint-Siège auprès de l’Unesco, « appliqué à déceler et à montrer, avec autant de probité que de clairvoyance, la solidarité des œuvres qu’une même vocation de paix inspira aux deux institutions différentes certes de nature, mais l’une comme l’autre consacrées à la promotion de l’esprit dans le monde »84.
- 85 « Le Saint-Siège et l’essor des organisations internationales » par Mgr Bertoli, 5 fév. 1961, disco (...)
36Mgr Bertoli, le nonce apostolique en France, œuvre activement à ce rapprochement entre les deux institutions. En 1960, dans un discours intitulé « Le Saint-Siège et l’essor des organisations internationales », il affirme la volonté de l’Église d’œuvrer au développement de l’Unesco. Il y souligne la « singulière coïncidence » entre l’idéal de l’Unesco et celui de l’Église : « Comment l’Église pourrait-elle ne pas adhérer aux fins que nous trouvons inscrites dans les préambules des chartes de ces institutions : bien du genre humain, élévation de l’homme, amélioration matérielle et spirituelle de sa condition, recherche d’une meilleure compréhension mutuelle entre les peuples, collaboration étroite pour de grandes entreprises culturelles, scientifiques, techniques, économiques et sociales ? » Il affirme qu’à côté des raisons « doctrinales », il y a aussi des raisons « pratiques » qui concourent à amener l’Église à collaborer avec les organisations internationales : en effet, l’Église assure « un grand nombre de tâches ayant un aspect temporel, dans l’accomplissement desquelles elle rencontre nécessairement les organisations internationales ». Il affirme que l’Unesco, la FAO et l’OMS, « dont l’expérience est parfois encore assez limitée, semblent pouvoir trouver dans ces contacts [avec les missionnaires catholiques] un enrichissement précieux, bénéficiant de la sagesse séculaire de l’Église et apprenant en même temps à mieux la connaître »85.
- 86 Intervention de Mgr. Benelli au Congrès mondial de Téhéran, p. 17-26, in L’Église et la campagne mo (...)
37Giovanni Benelli, observateur du Saint-Siège auprès de l’Unesco, fait un discours au congrès de Téhéran sur l’élimination de l’analphabétisme organisé par l’Unesco en 1964, soutenant le projet de l’Unesco de lancer une grande campagne d’alphabétisation, et faisant l’éloge de l’idéal de l’Unesco qui consiste à « organiser un monde où la justice règnerait et d’où seraient exclus l’égoïsme, la peur et le besoin, promouvoir une société où la solitude foncière de l’homme serait équilibrée par une communication aussi large que possible des biens matériels et surtout des richesses de l’esprit » ; il souligne « l’heureuse convergence de cet idéal de l’Unesco avec l’idéal même d’une société chrétienne »86.
- 87 Archives de l’Unesco, SCHM 17 : Le Mois à l’Unesco, n° 36, mars-avril 1964.
- 88 Lettre de Paul VI à Maheu, p. 13-16, in L’Église et la campagne mondiale pour l’élimination de l’an (...)
- 89 Archives privées de Veronese, carton 66 : intervention de Mgr Bertoli à la conférence générale de 1 (...)
38En 1964, Paulo de Berrêdo Carneiro, fonctionnaire de l’Unesco, se rend en mission à Rome pour représenter l’Unesco au couronnement du nouveau pape Paul VI. Celui-ci lui remet à cette occasion la Grand Croix de l’Ordre de Saint-Sylvestre87. Le pape Paul VI lui-même soutient le projet de l’Unesco de campagne d’alphabétisation88. En 1964, le nonce Bertoli affirme, à la conférence générale, que c’est « très directement qu’elle [l’Église] entend appuyer l’œuvre de l’Unesco » ; « nous attachons un grand intérêt au travail de l’Unesco ». Mais il affirme la position de l’Église, qui est que l’Unesco ne peut « répondre à elle seule à toutes les aspirations de la personne humaine ». Il souligne aussi « l’expérience séculaire » de l’Église en matière d’alphabétisation, qui fait selon lui de l’Église le guide naturel de l’Unesco dans sa campagne d’alphabétisation89.
- 90 Un film en est tiré. Archives de l’Unesco, film n° 802, 1966.
- 91 Interview de M. Deliance par Chloé Maurel ; Maurice Barbier, L’Église catholique et l’Unesco. Vingt (...)
- 92 Archives de l’Unesco, RP 21 avril 1962 : Le Monde, 29 mars 1967, Le Figaro, 20 avril 1967.
- 93 Archives de l’Unesco, DG 67/2, 19 avril 1967.
- 94 University of Chicago : fonds William Benton, box 394 : mémo confid. de Robert H.B. Wade à Benton, (...)
- 95 Archives de l’Unesco, DG/discours /1967, 19 avril 1967.
39En 1966, des conférences sont organisées à l’Unesco sur le thème « Une rencontre de cultures sous le signe de la coopération et de la paix : le concile œcuménique Vatican II ». Elles sont présidées par Maheu, et Mgr Benelli, observateur permanent du Saint-Siège, y joue un grand rôle. Des conférences y sont prononcées par divers ecclésiastiques et par des personnalités comme René Cassin et Jacques Maritain90. Une grande convergence de vues et une véritable sympathie rapprochent Maheu et le successeur de Jean XXIII, Paul VI. Celui-ci poursuit la politique de rapprochement entre l’Unesco et l’Église : avec le concile Vatican II (1962-1965) et l’encyclique Populorum Progressio (1967), il s’efforce de placer l’Église au cœur du monde, et crée à cette fin des « conseils », sortes de ministères. Le conseil « Justice et Paix », en particulier, consacré à la paix, développe des relations étroites avec l’Unesco91. Paul VI dédicace cette encyclique à l’ONU, à l’Unesco et à la FAO. Cette encyclique reçoit des échos importants dans la presse92. En 1967, Maheu fait un discours pour accueillir et approuver l’encyclique Populorum Progressio93. Celle-ci lui donne l’idée de convoquer une conférence mondiale sur le développement94. Maheu déclare que cette encyclique « trouvera en [l’Unesco] une résonance toute particulière », et qu’elle est « le gage de la coopération active de l’Église à la campagne d’éducation de base et d’alphabétisation fonctionnelle que l’Unesco s’attache à promouvoir à travers le monde ». Il souligne le « profond accord » qu’elle révèle entre les vues du pape et celles de l’Unesco. Il affirme que « la conception humaniste du développement intégral » est commune à l’Unesco et à la papauté. « La conversion de chacun à l’œuvre de salut de tous qu’est le développement, c’est la grande mutation spirituelle qui s’impose à l’humanité contemporaine »95.
- 96 RP, 12 avril 1974 : L’Osservatore Romano, 27 janv. 1974 : « La contribution de l’Unesco à la paix » (...)
40Durant les deux mandats de René Maheu, le CCIC œuvre activement au rapprochement entre Unesco et Église, et à la promotion de l’Unesco parmi les catholiques96.
- 97 Interview de M. Deliance par Chloé Maurel.
- 98 Interviews Larnaud et Deliance par Chloé Maurel.
41Ce rapprochement se saisit aussi sur le terrain. Durant toute cette période, les milieux missionnaires catholiques fournissent un soutien important à l’Unesco. En effet, des relations de collaboration et de complémentarité se tissent entre l’Unesco et les missionnaires dans le cadre des projets d’alphabétisation sur le terrain, les missionnaires tendant souvent à se placer dans la position valorisante de guide par rapport à l’Unesco97. L’attitude de l’Église par rapport à l’Unesco n’est pas exempte d’un sentiment de supériorité. Plusieurs ecclésiastiques comme Mgr Benelli, observateur du Saint-Siège, affirment l’idée d’une nécessaire subordination de l’Unesco à l’Église dans le domaine de la réflexion morale et spirituelle, étant donné que l’Unesco ne possède pas la qualité de transcendance qui est celle de l’église98.
- 99 Archives de l’Unesco, SCHM 9 : mémorandum d’interview d’A. Steinberg, 24 septembre 1952.
- 100 Histoire de l’humanité, Paris, Unesco, 1968, vol. 5, tome 1, p. 436 ; vol. VI, tome 2, p. 1287 et 1 (...)
- 101 Bulletin du Cercle Ernest Renan, n° 140, janv. 1968, p. 7 : « L’Histoire de l’humanité » par M. Mes (...)
42C’est aussi à travers le programme de l’Unesco d’écriture de l’« Histoire de l’humanité » que se ressent la coloration catholique croissante de l’institution. L’ouvrage, Histoire de l’humanité, paru en 1968, laisse apparaître un fort déséquilibre dans la façon dont sont représentées les religions : dans le volume V, sept pages seulement sont consacrées à la religion juive (malgré les démarches faites par le World Jewish Congress depuis le début des années 195099), contre vingt-deux pages à la religion catholique et dix-sept pages à la religion protestante. Quant à la religion musulmane, et aux religions d’Afrique noire et d’Océanie, elles sont très rapidement évoquées, alors que les auteurs décrivent beaucoup plus longuement l’implantation du christianisme par les missionnaires dans ces régions. Le texte est souvent une véritable apologie de la religion chrétienne100, au point qu’il suscite même le rejet de certains cercles chrétiens progressistes : ainsi, en 1968, le Bulletin du Cercle Ernest Renan publie une critique négative sur l’Histoire de l’humanité, critiquant l’esprit catholique dogmatique de l’ouvrage, dans lequel « la résurrection de Jésus est rapportée comme un fait historique indiscutable, de même que la descente du Saint-Esprit ». L’article dénonce : « Comment une histoire qui se présente comme une somme de connaissances et une synthèse de conceptions peut-elle passer sous silence et la position rationaliste et celle des autres religions que le christianisme ? […] Faut-il croire que seul le point de vue chrétien doive prévaloir dans le monde de l’Unesco, où cependant tous les pays et par voie de conséquence toutes les religions et toutes les philosophies sont censées être présentes ? N’aurait-il pas fallu exposer en toute impartialité les conceptions différentes […] ? » Il critique aussi le fait que la sélection bibliographique contienne uniquement des ouvrages d’orientation très catholique101.
- 102 Archives de l’Unesco, film « Voyage de M. Maheu au Vatican », 1972.
- 103 Archives de l’Unesco, DG/72/3, 25 mars 1972, p. 1-2.
- 104 Interview de M. Deliance ; archives de l’Unesco, DG/74/15, 23 nov. 1974, p. 2.
- 105 René Maheu, « Le cardinal Daniélou et l’Unesco », Revue des deux mondes, juillet 1974.
- 106 Interview de J. Larnaud.
43En avril 1972, Maheu rend visite au pape au Vatican et inaugure une exposition sur la Bible dans la bibliothèque du Vatican, dans le cadre de l’Année internationale du livre102. En 1972, un comité de coordination est créé au sein du Vatican pour participer à l’Année internationale du livre par diverses actions (expositions, émissions sur radio Vatican, développement des bibliothèques catholiques…). Maheu se réjouit de cette coopération importante du Saint-Siège à l’Année internationale du livre103. En 1974, Maheu et son successeur Amadou Mahtar M’Bow reçoivent pour l’Unesco le prix Jean XXIII104. Dans un article dans la Revue des deux mondes, en 1974, Maheu rend hommage à l’action menée par le cardinal Daniélou en faveur de l’Unesco105. Tous ces éléments témoignent de l’orientation de plus en plus importante de l’Unesco vers une sensibilité spiritualiste et chrétienne tout au long des années de mandat de Maheu. Enfin, il est à noter que pendant le second mandat de Maheu, le futur pape Jean-Paul II, familiarisé aux actions de l’Unesco par Jean Larnaud qu’il côtoie au sein du Conseil pontifical pour les laïcs, développe un grand intérêt pour l’organisation et se lie avec Maheu. Plus tard, devenu pape, il rendra visite à l’Unesco106.
44Le discours d’adieu de Maheu, en novembre 1974, est marqué par un esprit très spiritualiste, et par des accents quasiment religieux :
- 107 F. Valderrama, op. cit., p. 220-221.
45« Unesco [...] permets-moi de te saluer une dernière fois avec toute ma ferveur en te désignant par les noms qui te conviennent le mieux sous les divers visages où j’ai appris à te connaître. Je te salue Idée – grande idée qui proclame le primat de l’esprit dans le cours des événements. […]. Par-dessus tout, je te salue Promesse – promesse immémoriale de l’Homme aux hommes, que chaque époque répercute à sa manière et qui aujourd’hui s’incarne particulièrement en cette institution et dans cette entreprise dont nous sommes les serviteurs. Message de liberté, de dignité et de paix, je te salue Promesse. »107
- 108 Daphné Josselin et William Wallace, Non-State Actors in World Politics, Palgrave, New York, 2001, 2 (...)
46Ainsi, les années de direction de René Maheu sont celles d’une intense collaboration, d’un rapprochement croissant entre l’Église et l’Unesco108.
- 109 Le Monde, 26 déc. 2002, p. 1 : « Comment le Vatican pèse sur les affaires du monde » ; p. 2 : « Enq (...)
- 110 Actes du viiie Congrès international d’histoire des religions, Rome, avril 1955, Firenze, Sansoni, (...)
- 111 Ex. : Commission internationale d’histoire ecclésiastique comparée, Bibliographie de la Réforme, 14 (...)
- 112 Site internet du CCIC : page http://www.ccic-unesco.org/cadres/fr/index.htm (2008).
47Il est donc remarquable d’observer le poids important exercé par la diplomatie du Vatican sur les affaires de l’Unesco au fil des trente premières années de l’institution. L’ONU et l’Unesco ont été des instruments privilégiés de la politique du Vatican109. Le fait religieux a tenu une place de plus en plus importante dans les thèmes des études intellectuelles réalisées ou subventionnées par l’Unesco, et dans ses programmes sur le terrain. Durant toute la période, l’Unesco a organisé et subventionné de nombreuses études savantes et des conférences sur les religions110, portant essentiellement sur le christianisme111. Le CCIC continue aujourd’hui à « assurer la présence de la pensée catholique à l’Unesco »112. Cela peut poser la question de la compatibilité entre les principes universalistes de l’Unesco et l’orientation de ses programmes autour des valeurs religieuses et notamment catholiques.
Notes
1 Maurice Barbier, L’Église catholique et l’Unesco. Vingt-cinq ans de relations, Paris, Centre J.-L. Lebret, « Foi et développement », 1971, p. 4 ; Daphné Josselin et William Wallace, Non-State Actors in World Politics, Palgrave, New York, 2001, 294 p., chap 3 : « The Catholic Church as a Transnational Actor », par David Ryall (p. 41-58), p. 50.
2 Archives de l’Unesco, dossier biographique de J.E. Rupp.
3 Archives diplomatiques des États-Unis, Decimal file, RG59, entry CDF 1945-1949, box 2242 : télégramme du Vatican, de Graham Parsons, Foreign service officer, au secrétaire d’État, 31 juill. 1947.
4 Archives diplomatiques des États-Unis, box 2254 : M.C. Boulad, « Un entretien avec le comte Jacini, président de la délégation italienne à l’Unesco », La Bourse égyptienne, 2 décembre 1948, p. 1 et 6.
5 Maurice Quéguiner, Préoccupations catholiques et initiatives de l’Unesco, CCIC, non daté, p. 93-94.
6 Interview de Jean Larnaud par l’auteur, 4 mars 2004 ; interview de M. Deliance ; Jaime Torres Bodet, Memorias III, El desierto internacional, Editorial Porrua, Mexico, 1971, p. 111.
7 Archives diplomatiques des États-Unis, box 2254 : mémo de G.V. Allen sur la conférence générale de 1948, p. 18.
8 Archives diplomatiques des États-Unis, box 2254 : rapport confidentiel d’Arthur Compton à G.V. Allen, nov.-déc. 1948, p. 2. Memorandum to the secretary on the Unesco conference at Beirut, nov. 17-dec. 11, 1948, par George V. Allen, président de la délégation américaine, p. 18.
9 Jaime Torres Bodet, Memorias III, op. cit., p. 110 et 53.
10 Archives diplomatiques britanniques, FO 371/107247 : Chancery, British Legation to the Holy See, au Foreign Office, 8 juillet 1953.
11 « Le Saint-Siège et l’essor des organisations internationales », communication faite par Mgr Bertoli, nonce apostolique en France, à l’Académie diplomatique internationale, 15 nov. 1960 (retranscrite dans La Documentation catholique, Paris, 5 fév. 1961).
12 Jaime Torres Bodet, Memorias III, op. cit., p. 109-111.
13 Archives de l’Unesco, Reg 1632, I : lettre de Domenico Tardini à Torres Bodet, 30 juillet 1952.
14 Archives de l’Unesco, Reg 1632, I : lettre de Ange Joseph Roncalli, nonce apostolique de France, à A. de Blonay, 18 juill. 1952 ; Jaime Torres Bodet, Memorias III, op. cit., p. 53-54.
15 Archives de l’Unesco, 329.18 A 53 CIPSH, VI : lettre de M.A. de Franz à G. de Lacharrière, 29 oct. 1952. Gaetano Salvemini et Giorgio La Piana avaient publié en 1943 à New York What to Do With Italy. Voir Francesco Malgeri, « Sturzo e il Vaticano negli anni del fascismo », in Luigi Sturzo nella storia d’Italia, a cura di Francesco Malgeri, edizione di Storia e Letteratura, Roma, 1973, p. 351.
16 Archives de l’Unesco, SCHM 18 : rapport sur les réunions du 25 et du 27 octobre 1948, p. 2.
17 Unesco and catholic collaboration, op. cit., p. 60 ; G. Archibald, Les États-Unis et l’Unesco, 1944-1963, Paris, Publications de la Sorbonne, 1993, p. 235 ; archives de l’Unesco, SCHM 9 ; Pittsbugh, PA Post-Gazette, 19 déc. 1951 : « Teacher fired by Pitt will edit History. Dr Ralph Turner, ousted here in 1934, gets Unesco post » ; SCHM 53, France catholique, 2 janv. 1952 : « L’Unesco et l’histoire de l’humanité » ; Vers l’avenir, Namur, 12 janv. 1952, et Temps nouveaux, Bruxelles, 12 janv. 1952, intitulent leur article : « L’Unesco fait écrire l’histoire de l’humain par des athées » ; Journal de Charleroi (27 déc. 1951) ; France catholique, 13 juin 1952.
18 Archives de l’Unesco, SCHM 10 : lettre confidentielle de G. Métraux au ministre allemand Burckhardt, 22 oct. 1952 ; SCHM 18 : lettre confidentielle de C. Morazé à P. de Berrêdo Carneiro, 29 sept. 1953, p. 1-2 ; SCHM 9 : plusieurs lettres du père de Bivort de la Saudée, ex. : lettre à Guy Métraux, 9 août 1952 ; SCHM 9 : lettre de Raffaele Pettazzoni à Carneiro, 28 avril 1952.
19 Archives diplomatiques britanniques, FO 371/101440 : mémorandum confidentiel de J. Somers Cocks à Paul Mason, 2 oct. 1952. SCHM 18 : lettre de Carneiro à Turner, 22 janv. 1952.
20 Archives de l’Unesco, SCHM 53 : France catholique, 13 juin 1952 ; SCHM 8 : commentaires de G.N. Clark et de J. Rutherford, 10 fév. 1950.
21 Unesco and catholic collaboration, op. cit., p. 38-46 : « Unesco-programs and the problem of catholic collaboration », par le révérend Frederick G. Hochwalt.
22 Archives de l’Unesco, SCHM 17 : lettre de Huxley à Armando Cortesao, 31 juill. 1950.
23 Archives de l’Unesco, SCHM 9 : lettre de Berrêdo Carneiro au DG, 21 janv. 1952.
24 Institut Luigi Sturzo, archives privées de V. Veronese, carton 34 : « L’Unesco vue par un catholique », par Alba Zizzamia, juin 1953, in The Sign (journal catholique américain).
25 Tzentzenhuaro commence à vivre ; bilan d’une année d’éducation de base, Paris, Unesco, 1953, p. 12 ; Courrier de l’Unesco, fév. 1952, p. 3-4 : « Patzcuaro : huit mois d’une expérience passionnante », par Tibor Mende.
26 M. Quéguiner, éducation de base…, op. cit., p. 61-62 ; archives de l’Unesco, 6C/PRG/30, 3 juill. 1951 ; E. Brunswic, René Ochs, Jean-Claude Pauvert, John Ryan, Unesco, 50 années pour l’éducation, Paris, Unesco, 1997, p. 95 ; Courrier de l’Unesco, fév. 1955, p. 16-26 : « “Los Unescos”. Les experts de l’Unesco », par D. Behrman ; archives diplomatiques des États-Unis, Decimal file, RG59, entry CDF 1955-1959, box 1562 : lettre confidentielle de R. À. Hurwitch au département d’État, 31 oct. 1957 ; archives de l’Unesco, 372/8/MP 01, I : lettre de Tor Gjesdal au DG, 8 février 1957.
27 Maurice Quéguiner, éducation de base…, op. cit., p. 13.
28 Mgr. Bertoli, « Le Saint-Siège et l’essor des organisations internationales », 15 nov. 1960, doc. cit.
29 Unesco and catholic collaboration, op. cit.
30 Archives diplomatiques britanniques, FO 371/107247 : lettre de Roberts à Winston Churchill, 1er juin 1953 ; Chancery, British Legation to the Holy See, au Foreign Office, 8 juillet 1953.
31 Archives diplomatiques britanniques, FO 371/107247 : lettre confid. de Roberts, British Legation to the Holy See, à Alan Dudley, Foreign Office, 6 mai 1953.
32 Archives de l’Unesco, 2 XC/Résolutions et comptes rendus, 7e séance plénière, 4 juillet 1953, p. 110. Cf. G. Archibald, op. cit., p. 158.
33 Archives diplomatiques des États-Unis, box 1558 : lettre de Russell Forrest Egner, the Religious Generations Foundation, 29 septembre 1956, à l’assistant secrétaire d’État, Francis Wilcox.
34 Columbia University : Oral History Research Office, interview de Luther Evans, octobre 1966, par Thomas F. Hogan, p. 679-680.
35 Archives de l’Unesco, RP/3/49, 17 avril 1953 : Études, « Unesco et éducation de base » par Maurice Quéguiner, membre du CCIC.
36 Archives de l’Unesco, 372 (8) MP01 A 22, I : mémoire de R. Maheu, sans titre, p. 37.
37 Jaime Torres Bodet, Memorias III, op. cit., p. 213.
38 Archives de l’Unesco, Educ/28/1947, p. 6 ; Educ./20/1947, 17 avril 1947, p. 3.
39 Archives de l’Unesco, 375 (86) A 63 VP : Patricio S. Sanchez, 15 mai 1949, « Viani. Rapport sur le travail d’éducation de base accompli par le ministère de l’éducation de Colombie pour le projet associé de Viani, avec la collaboration de l’Unesco », p. 3.
40 Rapports du Congrès américain, vol. 102, 84e congrès, 2e session, 3 janv.-27 juill. 1956 : articles and editorials : remarks in House : “missionaries do better job than Unesco”, p. 718.
41 Alfred Métraux, Itinéraires I, (1935-1953) carnets de notes et journaux de voyage, introduction et notes par André-Marcel d’Ans, Paris, Payot, 1978, notice du 7 sept. 1953 ; archives de l’Unesco, RP/3/49, 17 avril 1953 : Études : « Unesco et éducation de base », par Maurice Quéguiner ; cf. aussi interview de Jean Larnaud par Chloé Maurel.
42 Educ./6/1947, 13 mars 1947, p. 9.
43 Cl. Auroi, « Métraux et les Andes », Bulletin de la société suisse des américanistes, n° 66-67, 2002-2003, p. 113-126 ; il cite une lettre d’A. Métraux à J. Rens, 7 sept. 1955.
44 Archives de l’Unesco, 125 EX/SR.1-28, p. 13 ; 10 C/NOM/29 : notice biographique de Veronese.
45 Courrier de l’Unesco, mai 1959, p. 25 : extrait de la conférence « La jeunesse face au monde d’aujourd’hui », par Veronese.
46 Archives privées de Veronese, carton 25 : lettre de Ramon Sugranyes de Franch, président de Pax Romana, à Veronese, 12 sept. 1958 ; lettre de Veronese à Ramon Sugranyes de Franch, 18 oct. 1958.
47 Archives diplomatiques des États-Unis, box 1566 : lettre confid. de Robert McBride à F.W. Jandrey, 21 oct. 1958.
48 J. Sewell, Unesco and World Politics, Princeton University Press, 1975, p. 192-194, cité dans G. Archibald, op. cit., p. 256.
49 L’Unità, 23 novembre 1958, cité dans la lettre de Gaston Palewski au ministre, du 26 novembre 1958 (archives diplomatiques françaises, NUOI carton 836).
50 Extrait d’un psaume ; cité dans F. Valderrama, Histoire de l’Unesco, Paris, Unesco, 1995, p. 126.
51 Unesco and catholic collaboration,.., p. 19-34 : « Unesco. Its Achievements and Projects », par C.J. Nuesse.
52 Archives du CCIC, doc. CCIC, « Aperçu sur la iie conférence générale de l’Unesco, 14 nov.-15 déc. 1960 », p. 1-2.
53 Interview de J. Larnaud par Chloé Maurel ; M.-L. Paronetto Valier, article cité.
54 Mgr Bertoli, « Le Saint-Siège et l’essor des organisations internationales », 15 nov. 1960.
55 Interview de Larnaud.
56 Archives privées de Veronese, carton 22 : lettre de félicitation de la nonciature apostolique en France, 28 novembre 1958.
57 X 07.83 Veronese, II : Images, 6 fév. 1960, p. 3 à 6 : « Vittorino Veronese s’est fait le chantre des monuments de la Nubie », p. 3-4.
58 Archives de l’Unesco, RP, 16 nov. 1955 : l’Osservatore Romano (Vatican, 20 oct. 1955).
59 Archives privées de Veronese, carton 22 : lettre de Jean Larnaud à Veronese, non datée, au lendemain de son élection.
60 Archives privées de Veronese, carton 22 : lettre de Veronese à André Ruszkowski (Office catholique international du cinéma), 19 décembre 1958.
61 Archives privées de Veronese, carton 22 : lettre de Mgr Carlo Bayer, secrétaire général de Caritas Internationalis, à Veronese, 28 novembre 1958.
62 Archives privées de Veronese, carton 25 : lette de Ramon Sugranyes de Franch, président de Pax Romana-MIIC (mouvement international des intellectuels catholiques) à Veronese, 12 septembre 1958 ; lettre de Veronese à Ramon Sugranyes de Franch, 18 octobre 1958.
63 Archives privées de Veronese, carton 22.
64 Ibid., lettre de J.M. Domenach, au nom de la revue Esprit, félicitant Veronese pour son élection, 5 décembre 1958.
65 Ibid., 25 nov. 58 : lettre de félicitation du rédacteur en chef de La Croix, le révérend père Wenger.
66 Ibid., lettre d’A. Vanistendael, secrétaire général de la Confédération internationale des syndicats chrétiens, félicitant Veronese, 4 décembre 1958.
67 Ibid., lettre de Jean Larnaud à Veronese, non datée, au lendemain de son élection ; Veronese, carton 23 : lettre de Veronese à G.N. Shuster, 9 août 1961 : « Prions ensemble pour cette noble cause de l’Unesco ».
68 Veronese carton 22 : lettre d’André Ruszkowski à Veronese, 23 nov. 1958.
69 Ibid., lettre de Carlo Bayer à Veronese, 28 nov. 1958.
70 Ibid., lettre de J. Larnaud à Veronese, lettre citée.
71 Lettre de J. Larnaud à Veronese, lettre citée.
72 Archives privées de Veronese, carton 22 : lettre de Veronese à André Ruszkowski, Rome, 19 décembre 1958.
73 Ex : Le Mois à l’Unesco, déc. 1959, p. 33 : « Les catholiques et les objectifs de l’Unesco », p. 41-42 : « Du 2 au 8 janv. prochain, Pax Romana organisera sous les auspices de l’Unesco une réunion concernant l’influence des grandes religions dans la vie actuelle des peuples en Orient et en Occident », à Manille, p. 50.
74 Le Mois à l’Unesco, n° 22, mai-juin 1960, p. 52-53 : « La JOC internationale à l’Unesco ».
75 Ex. : n° 4, vol. I d’août 1959 du bulletin Orient-Occident, qui contient tout un paragraphe sur les religions ; archives de l’Unesco, 3 A 31 Manuals on Cultural Integration of Immigrants, II : doc. « L’intégration culturelle des immigrants », par le RP Fernando Bastos de Avila, SJ, et Manuel Diegos, 26 juill. 1957, 40 p.
76 Archives du CCIC, doc. CCIC, aperçu sur la iie conférence générale de l’Unesco, 14 nov.-15 déc. 1960 », p. 6-7.
77 Archives diplomatiques des États-Unis, Decimal file, RG59, entry CDF 1960-1963 , box 823 : lettre de Dean Rusk à G. Shuster, non daté, 1961, p. 1-2.
78 Interview de Jean Larnaud par Chloé Maurel.
79 Jean Maheu, « Son fils et sa petite-fille se souviennent », Journée d’hommage à René Maheu, Cahier I, l’homme et le directeur général, groupe Miollis, AAFU, Paris, 2002, p. 62-75.
80 Archives de l’Unesco, 12 C/INF/12, 16 nov. 1962, p. 5.
81 Archives de l’Unesco, RP 23 janvier 1963 : article du Père Russo, La Croix, 27 décembre 1962.
82 Le Monde, 21 août 1963, article cité.
83 Archives de l’Unesco, DG/1964.
84 Archives privées de Veronese, carton 66 : dossier Maheu : déclaration de M. René Maheu sur la mort du pape Jean XXIII, Ottawa, 3 juin 1963.
85 « Le Saint-Siège et l’essor des organisations internationales » par Mgr Bertoli, 5 fév. 1961, discours cité.
86 Intervention de Mgr. Benelli au Congrès mondial de Téhéran, p. 17-26, in L’Église et la campagne mondiale pour l’élimination de l’analphabétisme, Paris, CCIC, 1966.
87 Archives de l’Unesco, SCHM 17 : Le Mois à l’Unesco, n° 36, mars-avril 1964.
88 Lettre de Paul VI à Maheu, p. 13-16, in L’Église et la campagne mondiale pour l’élimination de l’analphabétisme, Paris, CCIC, 1966 ; intervention de Mgr Abimaroun, ibid., p. 27-34 ; archives privées de Veronese, carton 66 : lettre du cardinal Amleto Cicognani à Maheu, 4 mars 1964.
89 Archives privées de Veronese, carton 66 : intervention de Mgr Bertoli à la conférence générale de 1964.
90 Un film en est tiré. Archives de l’Unesco, film n° 802, 1966.
91 Interview de M. Deliance par Chloé Maurel ; Maurice Barbier, L’Église catholique et l’Unesco. Vingt-cinq ans de relations, Paris, centre J.-L. Lebret, « Foi et développement », 1971, p. 6, p. 95.
92 Archives de l’Unesco, RP 21 avril 1962 : Le Monde, 29 mars 1967, Le Figaro, 20 avril 1967.
93 Archives de l’Unesco, DG 67/2, 19 avril 1967.
94 University of Chicago : fonds William Benton, box 394 : mémo confid. de Robert H.B. Wade à Benton, 22 mai 1967.
95 Archives de l’Unesco, DG/discours /1967, 19 avril 1967.
96 RP, 12 avril 1974 : L’Osservatore Romano, 27 janv. 1974 : « La contribution de l’Unesco à la paix », par le révérend Francesco Russo, SJ, du CCIC ; L’Église et la campagne mondiale pour l’élimination de l’analphabétisme, publié par les soins de l’observateur permanent du Saint-Siège auprès de l’Unesco, CCIC, 1966, 89 p.
97 Interview de M. Deliance par Chloé Maurel.
98 Interviews Larnaud et Deliance par Chloé Maurel.
99 Archives de l’Unesco, SCHM 9 : mémorandum d’interview d’A. Steinberg, 24 septembre 1952.
100 Histoire de l’humanité, Paris, Unesco, 1968, vol. 5, tome 1, p. 436 ; vol. VI, tome 2, p. 1287 et 1290.
101 Bulletin du Cercle Ernest Renan, n° 140, janv. 1968, p. 7 : « L’Histoire de l’humanité » par M. Messiqua.
102 Archives de l’Unesco, film « Voyage de M. Maheu au Vatican », 1972.
103 Archives de l’Unesco, DG/72/3, 25 mars 1972, p. 1-2.
104 Interview de M. Deliance ; archives de l’Unesco, DG/74/15, 23 nov. 1974, p. 2.
105 René Maheu, « Le cardinal Daniélou et l’Unesco », Revue des deux mondes, juillet 1974.
106 Interview de J. Larnaud.
107 F. Valderrama, op. cit., p. 220-221.
108 Daphné Josselin et William Wallace, Non-State Actors in World Politics, Palgrave, New York, 2001, 294 p., chapitre 3 : « The Catholic Church as a Transnational Actor », par David Ryall (p. 41-58), p. 50 et 55.
109 Le Monde, 26 déc. 2002, p. 1 : « Comment le Vatican pèse sur les affaires du monde » ; p. 2 : « Enquête sur la diplomatie offensive du Vatican de Jean-Paul II », par Henri Tincq.
110 Actes du viiie Congrès international d’histoire des religions, Rome, avril 1955, Firenze, Sansoni, 1956, et C. J. Bleeker, Anthropologie religieuse ; l’homme et sa destinée à la lumière de l’histoire des religions. Études publiées avec l’aide de l’Unesco et sous les auspices du CIPSH, par l’Association internationale pour l’étude de l’histoire des religions, Leiden, E.J. Brill, 1955, 189 p.
111 Ex. : Commission internationale d’histoire ecclésiastique comparée, Bibliographie de la Réforme, 1450-1648, ouvrages parus de 1940 à 1955, Leiden, Brill, vol. I en 1958, vol. II en 1960, vol. III en 1961, vol. IV en 1963, vol. V en 1965, vol. VI en 1967 ; Congrès international pour l’étude de l’Ancien Testament, Strasbourg, 1956, Leiden, Brill, 1957, 258 p.
112 Site internet du CCIC : page http://www.ccic-unesco.org/cadres/fr/index.htm (2008).
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Référence papier
Chloé Maurel, « L’influence du Vatican et des réseaux catholiques à l’Unesco (1945-1974) », Cahiers d’histoire. Revue d’histoire critique, 119 | 2012, 101-120.
Référence électronique
Chloé Maurel, « L’influence du Vatican et des réseaux catholiques à l’Unesco (1945-1974) », Cahiers d’histoire. Revue d’histoire critique [En ligne], 119 | 2012, mis en ligne le 01 janvier 2014, consulté le 13 janvier 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/chrhc/2767 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/chrhc.2767
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