« Toutefois et quand il aura plû à Dieu donner à son Église la joye de quelque conversion »
Résumés
Fin 1644-début 1645, le synode national des Églises réformées de France à Charenton adopte un formulaire pour le baptême d’adultes convertis au christianisme. Quatre catégories sont visées : païens, juifs, « mahométans » et anabaptistes non-baptisés. Cet article s’intéresse à son contenu, aux probables motifs pour cette décision et au contexte : quelle réalité représente le baptême de ces personnes au sein des Églises réformées ? La question se pose d’autant plus que la réglementation royale restreint en théorie du moins le séjour des musulmans et juifs en France et celui des protestants dans le Nouveau Monde. Dès les premiers synodes, le baptême de « mores » a fait l’objet de débats. Les Églises devaient alors elles-mêmes composer une liturgie si le cas se présentait, avec une constante : l’instruction préalable au baptême, conformément aux Écritures. Le formulaire adopté permet une harmonisation des pratiques. Le texte « quatre-en-un » consiste en plusieurs questions-réponses communes aux quatre catégories, alternées de questions-réponses spécifiques en fonction de la croyance d’origine. Ainsi, avant de confesser la nouvelle confession, le converti doit renier son ancien état et toute doctrine contraire à celle des Églises réformées.
À ce jour, peu de baptêmes de convertis antérieurs à 1644 sont connus pour l’Ouest, espace géographique privilégié de notre étude, et pour Paris. Leur nombre est encore bien inférieur pour les décennies qui suivent, jusqu’à la Révocation. La conception de la liturgie semble française ; un formulaire concernant les mêmes catégories est mentionné pour l’Église wallonne de Rotterdam (Provinces-Unies), fin 1661, soit postérieur à 1644-1645, tandis que la plus ancienne version (wallonne) imprimée connue date de 1673. Les recherches de tels baptêmes et d’éventuels débats à leur sujet sont à poursuivre pour toutes les Églises de l’Ouest, pour les autres provinces synodales, ainsi que pour des Églises francophones hors de France.
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Mots-clés :
baptême, Convertis, Églises réformées, Païens, juifs, Mahométans (musulmans), protestantismeKeywords:
Baptism, Converts, Protestantism, Reformed churches, Pagans, Jews, Mohammedans (Muslims), Anabaptists, Walloon churchesChronologie :
XVIIIe sièclePlan
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- 1 Cet article est la version remaniée du Chapitre 7, p. 558-563, de notre thèse d’Histoire intitulée (...)
- 2 Ces députés sont « les sieurs Jean Bouchereau, sieur de La Marche, pasteur de l’Église de Nantes, e (...)
1Au synode national des Églises réformées de France réuni à Charenton du 26 décembre 1644 au 26 janvier 1645, les députés de la province synodale de Bretagne2 avancent la question du baptême d’adultes convertis au christianisme :
- 3 F. Chevalier, op. cit., p. 70 n. 104 et p. 74, art. 30. Ces délibérations se déroulent les 28 et 2 (...)
Sur la demande de la mesme province [la Bretagne], qu’il plaise à la compagnie dresser quelques formulaires particuliers pour les baptesmes des personnes adultes qui se convertissent du paganisme, mahumetisme et judaïsme à la religion chrestienne, la compagnie ordonne que le reglement couché cy-après sera gardé, toutefois et quand il aura plû à Dieu donner à son Église la joye de quelque conversion3.
- 4 Quick 2, op. cit., p. 447-453 ; Aymon 2, op. cit., p. 654-660 ; F. Chevalier, op. cit., p. 143-149
- 5 Il est plus que courant que les éléments d’un débat synodal soient absents des actes, comme c’est (...)
- 6 La précision « non-baptisés » suggère la validité du baptême des anabaptistes, même si les réformé (...)
- 7 « Sera dressé memoire pour le sinode national de la proposition portée en cette compagnie scavoir (...)
- 8 Ce synode est le premier tenu depuis 1638, le précédent ayant eu lieu en 1637.
- 9 Il s’agit des pasteurs Daniel Jurieu, de Mer, et Jean Taby (ou Tabit) de La Charité, présents à la (...)
2En effet, un « règlement » apparaît joint aux actes du synode, sous le titre Formulaire du baptesme de ceux qui se convertissent à la foy chrestienne d’entre les payens, juifs, mahumetans et des anabaptistes qui n’ont esté baptisez4. Mais sans que les actes l’évoquent et sans motivation autre5, le formulaire adopté se trouve élargi à une autre catégorie de personnes, chrétiennes cette fois-ci, contrairement aux trois autres : les anabaptistes non-baptisés6. Cet élargissement, ferait-il suite au débat du synode provincial de l’Orléanais-Berry de 1638 sur l’utilité de l’établir un formulaire pour le baptême d’anabaptistes non-baptisés7 ? Faute de savoir si le mémoire que ce synode avait décidé de rédiger soit réellement parvenu au synode national de 16448, on peut penser que les deux pasteurs députés de cette province au synode national9 soient intervenus à ce sujet à partir de leurs propres souvenirs des délibérations synodales de 1638.
- 10 Formulaire du baptesme de ceux qui se convertissent à la Foy Chrestienne d’entre les Payens, Juifs (...)
- 11 La Discipline ecclesiastique des Eglises reformees de France. Avec un ample et exact recueil de to (...)
- 12 Isaac d’Huisseau (éd.), La Discipline ecclesiastique des Églises reformees de France ou l’ordre pa (...)
3La publication du texte, imprimée à Paris et en vente à Charenton, est datée de 164510. Dans la Discipline ecclésiastique éditée par Pierre Catalon en 165811, le formulaire a été inséré à la suite de l’article 3 du chapitre XI Du baptesme. En revanche, il clôt ce chapitre dans l’édition d’Isaac d’Huisseau de 1667, à laquelle nous nous référerons dans cet article12.
- 13 Les sources susceptibles de nous renseigner sont en priorité les actes des synodes provinciaux et (...)
- 14 M. Dieleman, op. cit., Carte 3, p. 45, Tableau 30, p. 567.
4Sortant du champ du baptême des petits enfants dans les Églises réformées de France – objet de nos recherches de doctorat, ce formulaire et les baptêmes qui accompagnent les conversions de non-chrétiens au christianisme, ou de chrétiens non baptisés dans la confession réformée, méritent néanmoins que nous nous y intéressions. Les actes du synode ne renseignent ni sur les motivations qui ont amené les députés bretons à faire cette demande de formulaire, ni sur un possible débat à ce sujet, et les questions qu’il suscite sont ainsi nombreuses. Elles portent entre autres sur la pertinence d’un tel formulaire et le contexte de son adoption : la demande provient-elle d’un besoin réel constaté dans la province ? On se l’imagine inspirée par la situation nantaise, ville portuaire et cosmopolite. L’absence de sources concernant la province synodale de Bretagne pour cette période empêche cependant de remonter jusqu’à d’éventuelles difficultés qui se seraient produites dans des Églises locales13. Dans le cas où les ministres des Églises bretonnes ont effectivement administré le baptême à des païens, juifs, mahométans ou anabaptistes, se pose la question de savoir quelle liturgie a été suivie avant l’adoption de ce formulaire spécifique. Les échantillons d’actes de baptêmes des Églises dans les cinq provinces de l’Ouest que nous avons dépouillés14 n’ont révélé aucun baptême correspondant aux catégories de personnes mentionnées : quelle réalité représente alors leur présence ?
- 15 Le sujet est absent des ouvrages suivants : Benjamin Vaurigaud, Essais sur l’histoire des Églises (...)
- 16 M. Dieleman, op. cit., p. 218-224.
- 17 À la fin des années 1590, des « Turcs » avaient été baptisés dans l’Église réformée italienne de l (...)
5Les actes du synode ne permettent pas non plus de connaître le processus d’élaboration du formulaire. On peut envisager que le synode provincial de Bretagne ait proposé lui-même un projet de formulaire15, envoyé sous forme de mémoire à l’ensemble des provinces avant la tenue du synode national, leur permettant une réflexion et préparation au préalable16. Ou a-t-on repris un formulaire déjà existant ailleurs, par exemple à Genève17 ou dans des Églises réformées hors de France ? Enfin, une fois le formulaire adopté, on s’interroge sur son utilisation : par quelles Églises, avec quelle fréquence et pour quelles catégories ?
Les synodes nationaux et le baptême des maures et autres antérieur à 1644-1645
6Avant de regarder de plus près le formulaire et son contenu, arrêtons-nous un instant sur le rapport entre les Églises réformées de France et les catégories de personnes visées. Déjà en 1561, au synode provincial de Normandie à Dieppe :
- 18 Philip Benedict et Nicolas Fornerod, L’organisation et l’action des églises réformées de France (1 (...)
le frere du Havre a proposé s’il estoit licite d’administrer le baptesme à un naigre ayant quelque commencement d’instruction. Pour response a esté dit qu’il le faut plus amplement instruire en la Religion chrestienne à ce qu’il puisse faire confession de foy, puis, ayant un parrain fidelle, pourra estre presenté au baptesme18.
- 19 DE, Chap. XI, art II, p. 314-315.
- 20 Voir pour les détails M. Dieleman, op. cit., Annexe 6, p. 800-812, La discipline de 1581, publiée (...)
- 21 On peut s’interroger pourquoi les « mahométans » ne sont pas mentionnés dans cet article.
- 22 DE, Chap. XI, art. V, p. 316-317, qui contrairement à d’autres versions fait état seulement de sar (...)
- 23 Le terme « sarrasin » désigne au Moyen-Âge les musulmans en général.
- 24 Par le mot « égyptiens » on désigne les bohémiens ou tziganes, catégories de personnes que l’on ne (...)
- 25 Les députés de la Saintonge sont deux pasteurs de La Rochelle et de Taillebourg, et deux anciens d (...)
- 26 Aymon 2, 21-Vitré-1617, Matières générales, art. IV, p. 97 ; DE, Chap. XI, art. III, p. 314-315.
- 27 M. Dieleman, op. cit., Chap. 4, p. 212, n. 2, DE, Chap. XI, art. I, p. 312-313.
7Le synode national de Lyon (1563) insiste lui aussi sur la nécessaire instruction et la confession de foi, préalables au baptême : « il fut dit qu’une fille sauvage non instruite au christianisme, ne doit estre baptisée devant d’estre endoctrinée en la religion chrestienne, & qu’il en apparoisse par sa confession19 ». Cet avis pourrait être à l’origine de l’article III du chapitre XI sur le baptême, inclus dans la Discipline au plus tard en 158120 : « Un payen ou un juif, en quelque aage qu’il soit, ne doit estre baptisé devant que d’estre instruit en la religion chrestienne, & qu’il en apparoisse par sa confession21 ». On lit ici l’importance qu’attachent les réformés à cette instruction préalable au baptême qu’ordonnent les Écritures (Matthieu 28, 19-20). Les synodes de Montauban (1594)22 et Saumur (1596) s’intéressent non pas aux adultes convertis, mais aux conditions nécessaires pour le baptême des enfants des « sarrasins23 » ou « égyptiens24 ». En 1617, à la demande des députés de Saintonge25, le synode de Vitré se penche sur la question de savoir s’il faut baptiser « les mores, & autres infideles ravis en leur pays, & amenez en la chrestienté & baptisez par des prestres, sans prealable instruction és poincts de la religion chrestienne ». Le synode y voit « beaucoup de defaut », mais il est néanmoins d’avis « que telles personnes ne doivent estre rebaptisées, ains qu’il doit estre supplée à ce défaut par bonnes instructions26 ». En se limitant à une instruction complémentaire, sans rebaptiser, le synode reste fidèle au principe de la validité du baptême catholique par des personnes ayant vocation, exprimée à l’article 28 de la confession de foi et à l’article premier du chapitre XI de la Discipline27. L’avis synodal est précédé d’un avertissement à toutes les Églises
- 28 Aymon 2, loc. cit.
de prendre soigneusement garde sur les maures chassés d’Espagne [en 1609], & courans d’Église en Église, pour ne les recevoir trop legerement, & on ne leur donnera aucune attestation qu’après un bon examen de leur vie & croiance : & ceux qui sont déjà reçûs & demeurent dans quelque Église, seront aussi soigneusement examinés, tant pour ce qui concerne leur instruction que sur leur conduite, & quand on leur donnera des temoignages, on y fera mention de leur batême, & du nombre de leurs enfans, en specifiant aussi s’ils ont été batisés, & à quel age, & par quelles marques on pourra reconnoitre que ce sont les mêmes personnes dont il sera fait mention dans lesdits certificats28.
- 29 J. Dakhlia, « Reconstruire la présence musulmane : une tentative historiographique », dans Jocelyn (...)
- 30 Ibid., p. 260.
- 31 Ibid., p. 250 et n. 6.
- 32 Citons, à titre d’exemple, l’Église réformée de Château-du-Loir, pour le 10 avril 1610 : « Me Jean (...)
- 33 En janvier 1661, le consistoire d’Orléans discute ainsi du cas de Salvator Leo, « medecin juif de (...)
8La prudence exprimée pourrait, entre autres, avoir un rapport avec le baptême comme « ressource économique, pouva[n]t se monnayer sur divers plans et notamment sous forme d’aumônes29 », dont on connaît plusieurs exemples « catholiques » : un « Turc, baptisé en passant au Mans », reçoit en 1608 une aumône de 20 sous d’un chapitre30, ou encore « un Turc baptisé » à qui on donne à Angers, en 1630, « une aumône pour l’aider à gagner Paris31 ». Les Églises réformées connaissent elles aussi cette pratique d’aumônes attribuées à des « estrangers passans32 », dont il reste à déterminer si, et avec quelle fréquence, elle a inclus des « Turcs », désignation des musulmans au-delà de la seule Turquie, ou encore des juifs33.
- 34 Nous passons ici sur les motifs autres qu’économiques qui ont pu conduire à des conversions au chr (...)
9Si l’on se fie aux actes, le synode national de 1617 est le dernier qui a traité du baptême d’adultes convertis34 avant l’adoption du formulaire par le synode national de 1644-1645
La présence de païens, juifs, musulmans et anabaptistes
- 35 Édouard Melon, « Baptême de deux Maures, à Caen, en 1565 », Bulletin de la Société de l’Histoire d (...)
- 36 Mickaël Augeron, « De l’islam et du calvinisme à La Rochelle dans la seconde moitié du xvie siècle (...)
- 37 Élizabeth C. Tingle, « The conversion of infidels and heretics: baptism and confessional allegianc (...)
- 38 Jacques Pannier, L’Église réformée de Paris sous Henri IV […], Paris, H. Champion, 1911, Chap. IV, (...)
- 39 [J. Delaborde], op. cit., p. 222.
- 40 Ibid., p. 225. P. de l’Etoile, op. cit., p. 112 : « 1603. Le Dimanche 20 [juillet ? la copie du re (...)
- 41 Ibid., p. 250, « Le Dimanche 26 de ce mois, qui étoit le lendemain de Noël, un Turc âgé de 4 ans o (...)
- 42 [J. Delaborde], op. cit., p. 268-269.
- 43 Ibid., p. 271-272.
- 44 Ibid., p. 272-273.
- 45 Robert Richard et Denis Vatinel, « Le consistoire de l’Eglise réformée du Havre : les laïcs », BSH (...)
10Si, dans un premier temps, païens, mahométans, juifs et anabaptistes semblent échapper à notre regard, on découvre pas à pas leur présence à travers des études anciennes ou plus récentes tant pour l’Ouest, le domaine privilégié de notre étude, que pour Paris. Un premier baptême de deux « Maures » et leur fille apparaît dans les registres de l’Église réformée de Caen pour 156535. Une « petite communauté musulmane » existe à La Rochelle lors de la seconde moitié du xvie siècle36. À Nantes, deux garçons « infidelis et niger » [infidèles et noirs], originaires de la province d’Éthiopie, sont baptisés (en l’Église catholique) en 1553, au sein de familles espagnoles37. L’Église réformée de Paris38 connaît les baptêmes à Ablon d’un « anabaptiste de secte39 » en 1600, d’un « cy-devant juif40 » en 1603, et d’un « personnage […] instruict en erreurs de Mahomet41 » en 1604. À Charenton, sont baptisés un « natif de […] Turquie42 » en 1611, deux hommes « instruits […] en l’erreur et opinion des anabaptistes43 » en 1613, et un « homme […] instruict […] en l’erreur abominable de Mahomet44 » en 1614. Enfin, pour 1619 et 1620, le registre de l’Église réformée du Havre révèle le baptême d’une « sauvagesse de nation », désignation renvoyant probablement à des « païennes » du Nouveau Monde45.
- 46 J. Dakhlia, op. cit., p. 248-256. L’auteure constate que ces dénominations couvrent des réalités b (...)
- 47 Ibid., p. 231-413.
- 48 Ibid., p. 249 et n. 3. La Bruffière est située à une quarantaine de kilomètres au sud-est de Nante (...)
- 49 Ibid., p. 250.
- 50 Ibid., p. 264 et n. 2, village situé à une vingtaine de kilomètres au sud d’Angers.
- 51 Ibid., p. 307 et n. 3.
- 52 Ibid., p. 263.
11Les baptêmes de « mahométans » ou « turcs » ou « mores »46 figurent aussi dans certains inventaires analytiques ou sommaires des archives départementales et communales47, parmi les faits particuliers relevés dans les registres catholiques et réformés. Se dessine ainsi une présence musulmane diffuse, loin de se limiter aux seules villes portuaires ou côtières. Pour les provinces de l’Ouest, citons les baptêmes catholiques d’un « Turc » à La Bruffière en Vendée (1647)48, de Maures à Angers49 et d’un Turc natif de « Thunis » à Notre-Dame-d’Allençon (1655)50, ainsi que le baptême réformé d’un musulman à La Rochelle (1655)51 et, en dehors de l’Ouest, à Montauban (1660)52.
- 53 Sur l’arrivée des deux Indiens à Saumur, voir Didier Poton, « Les ‘Toupinambous’ de Monsieur de Mo (...)
- 54 Jean-Christophe Germain, « Les dernières années (1620-1625) du capitaine flibustier Charles Fleury (...)
- 55 M. L. Cimber et F. Danjou, Archives curieuses de l’Histoire de France depuis Louis XI jusqu’à Loui (...)
12À Saumur, au cours des années 1600, deux Indiens appelés Ibora et Atoupa sont au service de Philippe Duplessis-Mornay, gouverneur de la ville53. Ces deux frères apparaissent dans le testament rédigé par Philippe Duplessis Mornay et son épouse Charlotte d’Arbaleste, le 6 février 1606 à Saumur54. Le couple a l’intention d’instruire l’aîné, Ibora, en vue de son baptême, projet que les deux testateurs confient, dans le cas de leur décès, en priorité à leur gendre et fille55. Les registres saumurois n’ont pas gardé de trace du baptême, si baptême il y a eu.
- 56 Sur l’attitude des pasteurs réformés vis-à-vis du judaïsme, voir par exemple Myriam Yardeni, Hugue (...)
- 57 AD Seine-Maritime, 4 E 03394, Protestants (Quevilly-Temple), 1619-1624, « Le lundy 12 dud mois [d’ (...)
- 58 Philippe Chareyre, « Les conversions au protestantisme à Nîmes aux xvie et xviie s. », Cahiers du (...)
- 59 Élisabeth Labrousse et Antony McKenna, Correspondance de Pierre Bayle, 15 vol. , Oxford, Fondation (...)
13Les preuves de juifs convertis au christianisme selon les Églises réformées56 sont bien moins nombreuses que celles de musulmans. Depuis le baptême d’un juif à Ablon en 1603, déjà cité, un nommé Daniel Ben Alexander est baptisé au temple de l’Église réformée de Rouen à Quevilly, le 12 avril 162157. Quelques décennies plus tard, deux juifs se présentent au consistoire de l’Église réformée de Nîmes pour demander le baptême : l’un en 1654 et l’autre en 166358. Pierre Bayle évoque, lui, dans une lettre de janvier 1678, « un certain Mr Alpron juif converti, qui est habilissime dans toutes les langues orientales et fort profond dans la doctrine du Talmud, savant au reste italicè et hispanicè […]59 ». Le lieu et la date de la conversion de ce personnage, qui a enseigné à l’Académie protestante de Saumur, ne nous sont pas connus.
Une présence interdite, mais tolérée ?
- 60 Sur la position des réformés vis-à-vis des peuples du Nouveau Monde, et des références bibliograph (...)
- 61 Par exemple « Veu mesmement que les Juifz sont soufferts et les Turcz […] » : P. Benedict et N. Fo (...)
- 62 Ordonnance du 22 février 1610, concernant les « morisques » expulsés d’Espagne. L’ordonnance paraî (...)
- 63 Isambert, Decrusy et Taillandier (éd.), Recueil général des anciennes lois depuis l’an 420 jusqu’à (...)
- 64 Ibid, p. 67-68. Le rejet du baptême des petits enfants et la non reconnaissance des magistrats heu (...)
14La présence de ces « étrangers » s’explique, au moins pour partie, par des expéditions militaires, des relations marchandes, des missions religieuses, des explorations de terres nouvelles suivies de leur colonisation60, ou encore par des expulsions pour motifs religieux. Les adultes, pour la plupart des personnes seules, âgés entre vingt et trente ans, viennent de tous horizons : le Nord (les anabaptistes), le Sud et les pays méditerranéens (les musulmans), le Sud et l’Est (les juifs), et l’outre-Atlantique (les païens). Leur présence, souvent tolérée depuis longtemps61, se voit plus strictement encadrée par la réglementation royale à partir de la première moitié du xviie siècle. Dès 1610, à la suite de l’expulsion des musulmans d’Espagne de 1609, Henri IV donne libre passage à ceux qui voudront se rendre aux ports pour le levant ou en « Barbarie ». Mais pour rester en sécurité dans le royaume, ils doivent faire profession de la religion catholique apostolique et romaine62, ce qui exclut a priori une conversion vers le christianisme réformé. De même, une déclaration royale du 23 avril 161563 rappelle l’interdiction de séjour de juifs dans le royaume et ordonne que ceux qui s’y trouvent seront tenus de se retirer hors du pays au terme d’un mois après la publication. Il est également interdit à tous les sujets de Sa Majesté « de les y recevoir, assister, ny converser avec eux, ledit temps passé. » Les anabaptistes ne semblent pas avoir fait l’objet d’une réglementation spécifique, mais en mai 1615, ils sont cités dans une requête au Roi, où le parlement de Paris lui demande d’« avoir agréable qu’il soit fait recherche de nouvelles sectes et gens infames qui se sont coulés à Paris […], depuis peu d’années, comme anabaptistes, juifs, magiciens et empoisonneurs64 ».
- 65 Lettres patentes & declaration du Roy par lesquelles sa Majesté veut que tous Maurisques, Juifs & (...)
- 66 Jean-Pierre Poussou, « Les étrangers à Bordeaux à l’époque moderne », Annales de Bretagne et des p (...)
- 67 Julien Léonard, « Une tolérance à géométrie variable : catholiques et protestants, chrétiens et ju (...)
- 68 Claude Toczé, avec la collaboration d’Annie Lambert, Les Juifs en Bretagne (ve-xxe siècles), Renne (...)
- 69 Esther Benbassa, Histoire des Juifs de France, [Paris], Éd. Seuil, 1997, p. 73-118, Chap. 4, Une h (...)
15Enfin, quatre ans plus tard, suite au constat que certains visés par les précédentes déclarations sont restés dans le royaume malgré les interdits, les lettres patentes et déclaration de 161965 rappellent que « le roy veut que tous les Maurisques, Juifs et autres faisant profession d’autre religion que de la Chrestienne, leurs femmes, enfans & familles qui sont à présent dans son Royaume, ayent à sortir & se retirer hors d’iceluy, dans un mois apres la publication faicte », car après ce délai ils seront recherchés et « punis suivant la rigueur de nos ordonnances ». Mais la réalité, en particulier concernant les juifs, est autre : dans plusieurs villes de France ils ont un statut de tolérés (Bordeaux66), voire même de protégés (Metz67) pour leur contribution économique et financière. Des juifs sont également signalés pour Bayonne et environs, Nantes68, Rouen, Lyon, sans oublier certaines régions non-rattachées à la couronne de France, comme le Comtat Venaissin et Avignon, mais peu à Paris, ville leur étant en principe interdite69.
- 70 Isambert, Decrusy et Taillandier (éd.), op. cit., t. XVI, p. 216, n° 158, Déclaration pour la form (...)
- 71 Marc-André Bédard, Les Protestants en Nouvelle-France, mémoire de maîtrise en Histoire, Université (...)
16Ces déclarations restrictives pourraient expliquer l’essentiel de la répartition chronologique des baptêmes de musulmans et juifs cités plus haut, bien que cet ensemble n’ait pas vocation à être exhaustif. Quant aux conversions et baptêmes des années 1650, il reste à vérifier s’ils correspondent à une période de relâchement des efforts de persécution de ces personnes interdites de séjour dans le royaume. En dehors de la France, il y a potentiellement d’autres non-chrétiens à baptiser dans les terres outre-Atlantique, dans la Nouvelle-France. Cependant, la charte de la Fondation des Cent-Associés de 1627, par Richelieu, confirmée par la déclaration royale de mai 162870, exclut la présence de non-catholiques (et donc de protestants) dans ces régions. Et bien que le séjour de certains soit toléré pour des raisons économiques et pour des durées limitées71, il n’est pas question d’y établir une Église réformée et de chercher à convertir. Ainsi, eu égard à cette réglementation, on chercherait un facteur expliquant la demande de formulaire des députés bretons au synode de 1644. Peut-on envisager que le synode, suite à la mort de Richelieu en 1642, ait eu l’espoir d’un assouplissement de la réglementation, leur permettant de fonder des Églises en Nouvelle-France, de convertir des personnes jusqu’à les baptiser ?
- 72 Philippe Legendre, Histoire de la persécution faite à l’Église de Rouen sur la fin du dernier sièc (...)
- 73 Léon Pilatte (éd.), Édits, Déclarations et Arrests concernans la Religion P. Reformée, 1662-1751, (...)
17Vingt ans après le baptême d’un « Turc de nation » en 1660 à Montauban, Pierre Thomas Banicq, « jeune Maure du Sénégal, […] âgé de quatorze ans, serviteur de Pierre Bar de Londres », aurait été baptisé en 1681 au temple de Quevilly72. De tels baptêmes sont bientôt interdits par la Déclaration du Roy, du 25 janvier 1683, portant que les Mahometans et Idolâtres qui voudront se faire Chrétiens, ne pourront être instruits que dans la Religion Catholique73. La Déclaration fait état des bons résultats obtenus en matière de conversion de réformés, qui, rentrés dans le sein de l’Église (catholique), trouveront « le salut que nous souhaitons avec tant d’ardeur de leur procurer ». On souhaite qu’il en soit de même pour ces personnes-là :
- 74 Ibid., p. 131.
Et comme nous sommes informez que dans le nombre considerable de Gens de toutes nations et Réligions qui abordent dans nôtre Royaume, il y en a eu quelques-uns par le passé, qui, étant tombez entre les mains de ceux de ladite R.P.R., ont été par eux instruits dans leur fausse doctrine ; Nous avons estimé nécessaire d’y pourvoir à l’avenir, et d’empêcher qu’on ne puisse abuser de leur ignorance, pour les engager dans une Réligion contraire à leur salut74.
- 75 AN TT 243/7, Dieppe, n° 9-10, f° 753-756, ici f° 754-755, pièce sans date, « envoyé par M. Rouvill (...)
18Par cette nouvelle déclaration, il est désormais non seulement interdit d’instruire les « mahométans et idolâtres » autrement que dans le catholicisme, mais aussi de les accueillir dans les temples ou assemblées, sous la peine d’une amende, de la privation des ministres de leur ministère dans le royaume, et l’interdiction de l’exercice dans les temples et autres lieux où ils ont été reçus. C’est à ce titre, semble-t-il, qu’à Dieppe un certain De Landes est condamné « pour avoir ausy instruit Madelaine Crestin, naigresse, sa servente, dans ladicte R.P.R. et avoir fait baptize[r] ycelle et menee plusieurs fois au temple ». La femme « sera mise en la maison des nouvelles catholiques […] pour y estre instruite des misteres es ladicte catholique75. »
- 76 Isambert, Decrusy et Taillandier, op. cit., t. XIX, 1672-1686, n° 1150, p. 494-495 : Code noir de (...)
19En mars 1685, le Code noir, « touchant la police des isles de l’Amerique », ordonne dans l’article 2 que « tous les esclaves qui seront dans nos îles seront baptisés et instruits dans la religion catholique, apostolique et romaine76 ». Ainsi, entre sa mise en place fin 1644-début 1645 et les interdictions de 1683 et 1685 qui sont suivies de la Révocation, le formulaire du baptême d’adultes convertis n’a pu servir qu’une quarantaine d’années.tion, le formulaire du baptême d’adultes convertis n’a pu servir qu’une quarantaine d’années.
Le déroulement des baptêmes de convertis antérieur à 1645
- 77 La transcription des actes est donnée dans M. Dieleman, op. cit., p. 545, Tableau 28. Baptêmes réf (...)
- 78 Il s’agit essentiellement des cinq provinces synodales de l’Ouest et de l’Église de Paris.
- 79 Sa pérégrination est à l’image de celles mentionnées dans Natalia Muchnik, « Du judaïsme au cathol (...)
- 80 Ces ministres sont Samuel de Lecherpiere, sieur de la Rivière, Jean Maximilien de Baux de L’Angle (...)
20À partir du corpus restreint de onze actes et relevés de baptêmes d’adultes convertis antérieurs à l’adoption du formulaire spécifique77, regardons ce qu’ils nous apprennent sur la « liturgie » de ces baptêmes. Étant donné ce faible nombre et un espace géographique limité78, ces éléments ne peuvent être qu’indicatifs, d’autant que la plupart des actes ou relevés sont rédigés de manière succincte. Ainsi, ceux du baptême des deux païennes au Havre (1620, 1621) ne contiennent aucun élément liturgique, de même que les actes de baptême de deux juifs (1603, 1621). En revanche, l’ouvrage publié suite au baptême du juif Daniel Ben Alexander en avril 1621, donne en guise de confession la pérégrination et le long parcours qui l’ont conduit à demander le baptême79. Cette confession est suivie d’une catéchèse avec les différents éléments du « formulaire », entre autres la demande s’il souhaite le baptême, et la vérification de ses croyances, notamment s’il croit que Jésus Christ est le fils de Dieu et le Messie promis en l’Ancien Testament. Ensuite, Ben Alexander doit réciter le symbole des apôtres comme confession de foi de l’Église chrétienne, et promettre de rester ferme dans la foi. Suit alors la renonciation de la religion des juifs et de toutes leurs cérémonies. L’ouvrage dans lequel Ben Alexander s’adresse « aux juifs espars », ainsi qu’à « [ses] chers père, mere, freres, sœurs, amis & aliez de la race d’Israël selon la chair […] » pour leur faire part de ses anciennes erreurs (qui restent les leurs), est signé des trois ministres de l’Église réformée de Rouen80. Le baptême proprement dit n’est pas relaté.
- 81 La Forme d’administrer le baptesme, à la fin de la deuxième page, dans La Forme des prieres eccles (...)
21L’acte du premier baptême de musulmans connu dans l’Ouest, en 1565, décrit en détail son déroulement au sein de l’assemblée. Il s’agit d’un jeune couple et de leur fille de « demy an ». Après les reproches du ministre de leur ancien état à eux et de leurs semblables, le ministre leur donne à entendre la grâce du Seigneur de leur avoir fait connaître l’Évangile. Le couple est interrogé sur « les principaulx poinctz de nostre foy et religion chrestienne, comme les articles de nostre foy, des commandementz de Dieu, de l’oraison du Seigneur et des sacrementz », dont chacun à son tour rend raison à haute voix. Ils protestent ensuite de « vivre et mourir à la sainte foy et religion chrestienne. » Après une prière de l’assemblée, le couple est présenté au baptême. Quant à la fille, « [elle] a esté baptisee en la forme et manière des autrez petitz enfantz », c’est-à-dire selon le formulaire habituel81. Les autres actes de baptêmes de musulmans font état d’une catéchèse et profession de foi en face de l’Église (1598) ou de l’abjuration des erreurs des « mahométans » et de la profession ou confession publique de la foi et religion chrétienne dans lesquelles le concerné promet de vivre et de mourir (1604, 1611, 1614).
22Pour les anabaptistes, le premier des deux actes (1600) mentionne, sans autre précision, que le concerné a « rendu raison de sa foy », avant d’être baptisé. L’acte de baptême de deux frères en 1613, plus détaillé, cite l’intervention de Dieu pour leur faire rendre compte des erreurs antérieures et de ce qui est « la vraye et pure vérité de la religion preschée et enseignée aux Églises reformées de France ». Après l’abjuration de leur « doctrine erronée », « ainsi que de toute autre hérésie et doctrine contraire à la Parole de Dieu », ils en font profession publique en face de l’Église, protestant d’y vivre et mourir.
23Quand l’acte fait état d’un baptême en la religion chrétienne, dans plusieurs cas il est bien précisé, comme pour les deux frères anabaptistes, qu’il s’agit de la confession réformée : « la foy et religion chrestienne, de laquelle font confession toutes les Églises reformées de France » (1604) ; « la vraye religion chrestienne selon la reformation des Églises de France » (1611) ; « la vraye doctrine chrestienne comme elle est enseignée aux Églises réformées de ce royaume » (1614). Toutefois, la différence entre la confession réformée et la catholique n’est pas explicitée dans les actes.
Le formulaire adopté par le synode national de 1644-1645
- 82 DE, Chap. XI, à la suite de l’art. XIX, p. 332-345. C’est également le cas pour les versions publi (...)
24Au lieu de prévoir quatre formulaires distincts, un pour chacun des catégories de convertis, tout est regroupé par des questions à lire ou à laisser de côté. Dans l’édition de 1667 de la Discipline ecclésiastique82, des typographies différentes distinguent les questions qui concernent tous les convertis, d’autres questions qui ne concernent que ceux et celles selon leur origine : païen (pas de Dieu), juifs (Écritures en partie, un Dieu, ne reconnaissent pas Jésus, ni le Nouveau Testament, donc non chrétiens), « mahométans » (un Dieu, pas de Bible, non chrétiens) et anabaptistes (chrétiens, pas de baptême d’enfants, non reconnaissance des magistrats). Ce tout-en-un rend la lecture du formulaire malaisée. Le ministre qui voulait s’en servir avait intérêt de bien marquer à l’avance les passages à lire correspondant à l’ancienne religion ou confession de la personne à baptiser (Ill. 1).
Païens | Juifs | Mahométans | Anabaptistes | |
1 | 3 demandes qui les concernent tous | |||
2 | 1 demande particulière | - | - | - |
3 | 1 demande qui les concerne tous | |||
4 | 3 demandes particulières | 5 demandes particulières | 6 demandes particulières | - |
5 | Demande à tous de réciter le sommaire de sa foi (le Symbole des apôtres) | |||
6 | 4 demandes particulières | |||
7 | 3 demandes qui les concernent tous | |||
8 | Institution (partie du formulaire « ordinaire », partie spécifique pour les convertis) | |||
9 | 3 demandes qui les concernent tous | |||
10 | Prière (en grande partie spécifique) qui se termine par le Notre Père | |||
11 | Le ministre s’adresse à ceux qui présentent le catéchumène au baptêmea pour les promesses de leur part « devant Dieu et devant cette sainte assemblée, de continuer de plus en plus à le fortifier en la foi et l’exhorter à toutes les bonnes œuvres ». | |||
12 | Le ministre s’adresse ensuite au catéchumène qui attend à genoux que le baptême lui soit administré, et en lui versant de l’eau sur la tête, il lui dira : « Veusb les témoignages de votre foi, N. Je vous baptise au nom du Père, du Fils, et du Saint Esprit. Amen » | |||
a. DE, Formulaire du baptesme, p. 332-345 et F. Chevalier, op. cit., p. 149 : « à ceux qui présentent le catéchumène » ; Aymon 2, p. 660 : « au parrein et marreine » ; Quick 2, p. 452 : « sureties ». b. Nous suivons ici le Formulaire, p. 22, ainsi que Quick 2, p. 453 et Aymon 2, p. 660. |
Tableau 1. Composition du formulaire du baptême de convertis,
d’après la Discipline ecclésiastique de 1667
1. Par les trois premières demandes, les catéchumènes ont à renier leur état antérieur et à renoncer au diable, aux vanités et pompes, à toutes les affections et convoitises de la chair.
2. Le païen, sans Dieu ou au contraire avec de multiples dieux, doit reconnaître qu’il n’y a qu’un seul Dieu qui a créé ciel et terre, et qui soutient toutes choses par sa Parole.
3. Tous doivent dire leur croyance en la Trinité de Dieu : le Père, le Fils, et le Saint-Esprit.
4. Le païen doit a) croire que Dieu se manifeste par ses œuvres et par son conseil, compris dans l’Ancien et le Nouveau Testament ; b) croire en la divinité des saintes Ecritures, contenant les règles de la croyance et des mœurs ; c) protester de résister au diable que l’on a adoré jusqu’à présent.
Le juif, monothéiste, reconnaissant l’Ancien Testament, ne croyant pas que Jésus est le Messie, et ne reconnaissant ainsi pas le Nouveau Testament, doit a) admettre la rébellion des juifs et demander pour cela pardon à Dieu ; b) croire que la volonté de Dieu se présente aussi dans le Nouveau Testament ; c) croire en la mort et résurrection ; d) croire que Jésus est l’accomplissement de la Loi, le vrai agneau de Dieu qui ôte le péché du monde ; e) croire superflue l’observation des cérémonies de la Loi.
- 83 Nous soulignons.
Le mahométan, monothéiste, ne reconnaissant pas la Bible ni Jésus, doit a) croire « que les Ecritures du Viel et Nouveau Testament sont inspirés de Dieu » ; b) croire que Jésus est Dieu et homme ; c) croire que Jésus est mort pour nos péchés et non pas les siens (qu’il n’a pas)83 ; d) croire qu’il est mort pour notre salut ; e) croire que Mahomet a été un imposteur et le Coran « un ramas sacrilège de songes plein d’absurdités » et f) que l’Église chrétienne est l’unique par laquelle Dieu a manifesté « son bon plaisir » pour le salut des hommes et que Jésus est le grand prophète promis aux fidèles de l’Ancien Testament [et non pas Mahomet].
5. Ensuite, tout converti, sans distinction et y compris l’anabaptiste, doit réciter le Symbole des Apôtres.
6. Suivent alors quatre demandes particulières dans le cas où le converti est anabaptiste, donc chrétien, mais ne reconnaissant pas le baptême des petits enfants, ni l’autorité des magistrats. Ainsi, il doit a) croire que Jésus est vrai Dieu et vrai homme ; b) croire que le baptême des petits enfants est fondé en l’Écriture sainte et la pratique perpétuelle de l’Église ; c) renoncer à l’erreur de ceux qui rejettent le baptême des petits enfants ; d) croire que l’établissement des magistrats est une ordonnance de Dieu à laquelle il faut obéir.
Par ces questions spécifiques pour chaque catégorie, il s’agit d’une part de s’assurer que la personne qui demande le baptême renie ses croyances anciennes qui ne concordent pas avec la confession réformée, et d’autre part, qu’elle a adopté les nouvelles en conformité avec cette confession.
7. Les trois brèves demandes suivantes concernent la signification et le nombre des sacrements, et celle du désir d’être « instruit de la nature et usage du baptême que vous demandez à l’Église », qui amène à la partie institution (ou enseignement) du baptême du formulaire.
- 84 « En Jésus il n’y a maintenant ni Juif ni Grec » etc., que l’on trouve dans le TOB, 1996, p. 1714 (...)
8. Cette institution reprend pour une grande partie celle du formulaire pour le baptême des enfants ; seule la seconde partie, qui traite plus particulièrement du baptême des enfants, est remplacée par des références aux textes bibliques de Colossiens 3, 1184 et à Matthieu 28, 19-20 sur l’enseignement et le baptême.
9. De l’institution, on passe encore à des demandes au catéchumène : s’il désire être « participant [de la grâce] par le baptême » ; s’il déteste « toutes les erreurs contraires à la saincte doctrine enseignée en nos Églises » ; s’il proteste de « vivre et mourir en la foy du seigneur Jesus confessée par vous cy dessus ».
- 85 « […] sceau de ton alliance, gage de la remission de nos pechez, & symbole de nostre entrée en ta (...)
10. La prière se différencie aussi de celle du formulaire pour les enfants, en évoquant entre autres le courage que Jésus-Christ a inspiré au catéchumène « de faire aujourd’huy confession de ta tres sainte foi », et en rappelant ce que c’est le baptême85. Elle se termine par le Notre Père.
11. Ensuite, le ministre demande à ceux qui présentent le catéchumène de promettre « de continuer à le fortifier en la foy, & l’exhorter à toutes bonnes œuvres ».
- 86 L’agenouillement domestique et privé dans les familles étant admis à titre « d’humilité et de repe (...)
12. Enfin, le catéchumène se met à genoux pour recevoir le baptême86, par l’eau que le ministre lui verse sur la tête en disant « Veus les tesmoignages de votre Foy, N. je vous baptise au nom du Père, du Fils et du Saint esprit. Amen ».
25Sans surprise, on trouve dans ce formulaire des éléments déjà présents dans certains actes de baptêmes antérieurs, tels que l’abjuration de l’ancienne croyance et la confession de la nouvelle. Mais s’il y a quelques similitudes avec par exemple le récit de la confession du juif Daniel Ben Alexander, il n’y a guère de ressemblances textuelles ; il ne semble pas à l’origine du formulaire.
- 87 AD Tarn-et-Garonne, État civil, Montauban, Consistoire de Montauban, B 1659-1663, du 29 février 16 (...)
- 88 La mention ne relève pas des éléments à renseigner obligatoirement dans l’acte. Voir M. Dieleman, (...)
26L’unique baptême connu à ce jour qui fait référence au formulaire spécifique date de 1655, soit une décennie après son adoption. Le scribe du consistoire de La Rochelle a pris soin de noter, entre parenthèses, que Mustapha, « fils de Caralé », a été baptisé « suivant l’ordre des synodes nationnaux » (Ill. 2). Le scribe a-t-il ainsi voulu souligner ce qui était encore une nouveauté ? Il a aussi pu s’y référer pour s’éviter de préciser le déroulement de la liturgie dans l’acte. En revanche, une telle référence est absente de l’acte de baptême de « Amet Maroque, Turc de nation, natif du royaume de Maroc », baptisé en 1660 en l’Église réformée de Montauban87. Le formulaire n’a-t-il pas été employé, ou son usage, quinze ans après son adoption, va-t-il désormais de soi ? On peut aussi penser que le rédacteur de l’acte s’est simplement limité à transcrire les données habituelles contenues dans le billet à remettre avant le baptême88.
- 89 AD Charente-Maritime, La Rochelle, I 176-180, registre pastoral BM 1649-1667, f° 26. Nous souligno (...)
Ill. 2. Acte du baptême de Mustapha, fils de Caralé, du mardi 2 mars 165589.
Source : AD Charente-Maritime, La Rochelle, I 176-180, registre pastoral BM 1649-1667, f° 26 (extrait) [en ligne]
Discussion
27L’adoption d’un formulaire pour le baptême des païens, juifs, musulmans et anabaptistes par le synode national de Charenton, fin 1644-début 1645, fournit aux Églises réformées de France une liturgie spécifique permettant l’harmonisation des pratiques. Auparavant, en l’absence de règles, chaque consistoire et chaque ministre avaient dû composer comme bon leur semblait, en concertation ou non avec des Églises voisines ou en synode provincial, mais avec comme ligne directrice l’article III de la Discipline, qui dit de baptiser seulement après une instruction et un témoignage sous forme de confession. Les liturgies en cette période avaient alors pu montrer des divergences.
- 90 http://www.kerkrecht.nl/node/1336, commentaire sur l’art. 58 de la discipline ecclésiastique de Do (...)
- 91 Guillaume H.M. Posthumus Meyjes, Hans Bots (éd.), avec la collaboration de Johanna Roelevink, Livr (...)
- 92 Des bateaux pour les Indes étant sur le départ, le synode national de Dordrecht avait dès le début (...)
- 93 La Discipline de l’Eglise françoise de Rotterdam, ou l’Ordre par lequel elle est conduite & gouver (...)
- 94 Le Formulaire du Baptesme, des Personnes âgées, qui n’ont pas receu ce Sacrement en leur enfance (...)
- 95 Rappelons que les Églises réformées néerlandophones ne connaissaient pas un tel formulaire. Voir a (...)
- 96 Avec une attention plus importante pour les non-baptisés et les anabaptistes, le formulaire wallon (...)
28Toutefois, la décision synodale nous surprend, puisqu’il concerne des catégories de personnes qui, selon la réglementation royale des années 1610-1619, sont censées ne pas séjourner dans le royaume (du moins en théorie), sauf à se convertir au catholicisme, en ce qui concerne les musulmans. La répartition chronologique des quelques baptêmes connus pour l’Ouest et pour Paris, peu nombreux à partir des années 1620-1630, semble concorder avec cette réglementation. Un seul acte connu postérieur à 1645 mentionne explicitement le nouveau texte ou « ordre » pour baptiser. Malheureusement, les sources restent muettes sur les motifs pour son adoption et sur son origine. Une conception française reste probable ; à ce jour, rien n’indique une provenance étrangère. Au contraire, la liturgie pourrait avoir été reprise par les Églises wallonnes aux Provinces-Unies dans les années 1660. En effet, F. L. Rutgers, commentateur de textes ecclésiastiques néerlandais, mentionne des formulaires pour le baptême d’anabaptistes, juifs, mahométans (il cite les Indes) et païens pour les Églises wallonnes, avec des questions-réponses particulières pour chacune des catégories, mais sans faire allusion à une origine française90. En novembre 1660, dans une lettre au synode national des Églises wallonnes, écrite depuis le Tobago, le pasteur François Chaillou évoque la question du « baptesme des noirs91 ». Il se réfère alors au synode de Dordrecht de 1618-161992 pour conclure à la possibilité de baptiser, mais sans parler d’un formulaire spécifique existant. Si on n’en trouve pas non plus la trace dans les actes des synodes nationaux wallons du xviie siècle, en revanche, la discipline ecclésiastique imprimée de l’Église wallonne de Rotterdam de 1662 renvoie bien à un « formulaire dressée pour ces occurrences extraordinaires93 ». Dans l’état actuel de nos recherches, le plus ancien formulaire imprimé qui nous soit connu est daté de 167394, soit postérieur à la mention de 1661-1662. Cela nous conduit à considérer le formulaire français comme étant le plus ancien95. Dans l’hypothèse, à vérifier, que ces textes de 1662 et de 1673 soient les mêmes, on observe que les formulaires français et wallon ne sont identiques, ni quant à la forme (formulaires wallons séparés, et non imbriqués les uns dans les autres), ni quant à leur contenu (le formulaire wallon est plus détaillé96). Néanmoins, pour les musulmans, la plupart des questions wallonnes reprennent mot à mot des passages du formulaire français. C’est aussi le cas, mais dans une moindre mesure, pour les questions adressées aux juifs. Le(s) rédacteur(s) wallon(s) ont ainsi dû connaitre ce texte.
- 97 Des baptêmes de musulmans et d’Africains ont également eu lieu dans l’Allemagne luthérienne : cf R (...)
29À ce stade, plusieurs pistes de recherches s’ouvrent : celle des baptêmes de convertis à élargir pour toutes les Églises réformées de l’Ouest de la France, et dans les autres provinces synodales, et cela tant pour la période antérieure que celle postérieure à l’adoption du formulaire. De même, reste à explorer le débat potentiel autour des baptêmes de convertis et un formulaire spécifique dans les délibérations de consistoires et dans les actes de synodes provinciaux. Enfin, on pourra élargir l’étude vers l’emploi du formulaire dans d’autres Églises réformées francophones hors de France97.
Annexe 1
Tableau récapitulatif des baptêmes et demandes de baptême d’adultes convertis au christianisme, dans les Églises réformées de l’Ouest, de Paris et quelques autres lieux, aux xvie-xviie siècles.
Date | Lieu | Baptême | Personnes concernées |
8 juillet 1565 | Caen | Baptême | Deux « mores » et leur fille |
15 mars 1598 | La Rochelle | Baptême | Un « né au pays des nègres » |
23 janvier 1600 | Paris (Ablon) | Baptême | Un anabaptiste, des Pays-Bas |
16 juillet 1603 | Paris (Ablon) | Baptême | Un juif |
26 décembre 1604 | Paris (Ablon) | Baptême | Un « personnage ayant esté instruit ès erreurs de Mahomet » |
7 août 1611 | Paris (Charenton) | Baptême | Un « natif de […] en Turquie » (mahométan) |
18 août 1613 | Paris (Charenton) | Baptême | Deux frères anabaptistes, « natifs de Harlem en Hollande » |
21 septembre 1614 | Paris (Charenton) | Baptême | Un « natif de […] en Barbarie » (mahométan) |
10 septembre 1619 | Le Havre (Sanvic) | Baptême | Une fille « sauvagesse de nation » (païenne) |
16 mars 1620 | Le Havre (Sanvic) | Baptême | Une « sauvagesse de nation, née au pays des sauvages » (païenne) |
12 avril 1621 | Rouen (Quevilly) | Baptême | Un « né juif » |
24 janvier 1654 (en consistoire) | Nîmes | Demande | Un « juif de religion et de naissance, originaire de Venize » |
2 mars 1655 | La Rochelle | Baptême | Un « natif d’A[.]ger » (mahométan) |
29 février 1660 | Montauban | Baptême | Un « Turque de nation, natif du royaume du Maroc » (mahométan) |
14 mars 1663 (en consistoire) |
Nîmes | Demande | « Un juif natif de Vienne en Ustriche » |
Actes non retrouvés |
|||
[...] 1681 | Rouen (Quevilly) | Baptême | Un « jeune Maure du Senegal » |
Années 1680 ? | Dieppe | Baptême | Une « negresse » |
Annexe 2
La composition du formulaire du baptême des Églises wallonnes aux Provinces-Unies
30Ce formulaire, édité seul ou relié avec la Confession de Foy et d’autres formulaires dans un même volume, ouvre par un avertissement, qui donne la marche à suivre pour un baptême de « ceux qui sont avancez en âge ». La première étape est l’instruction par le pasteur, qui ensuite les examine « en particulier ». Après une instruction suffisante, une information sur « la conduite de leur vie par des témoins irréprochables » et une préparation au baptême personnelle par prières et jeûnes, les catéchumènes se présenteront à l’assemblée des fidèles pour être baptisés, « en témoignant leur repentance, et faisant confession de leur foy ». Suivent les différentes étapes de la liturgie :
Invocation du nom de Dieu
Instruction sur le baptême
Prière
Le pasteur s’adresse au catéchumène sur la différence entre un baptême de petits enfants et de ceux « parvenus à l’âge de connaissance » qui, eux, ont à rendre confession de leur foi et à témoigner du regret d’avoir offensé Dieu. Suivent vingt-quatre paires de questions-réponses en guise de confession de foi.
[Avertissement que, cette confession étant « ample », le pasteur est libre de l’abréger et d’en choisir les articles qu’il jugera les plus convenables pour le catéchumène et la consolation des assistants.]
Si le catéchumène a été anabaptiste, juif, mahométan ou païen, cette confession doit être suivie des demandes qui contiennent le rejet des erreurs et superstitions de leurs « fausses religions ». Ce nombre de questions varie beaucoup entre juifs (sept questions-réponses) et musulmans (huit questions-réponses) d’une part, et anabaptistes (treize questions-réponses), et païens et idolâtres (trente-deux questions-réponses) d’autre part. Comme dans le formulaire français, les questions n’attendent que la réponse « oui ».
Ensuite, le catéchumène fléchit les genoux, et le ministre le baptise en versant l’eau sur la tête.
Le baptême est suivi d’une prière et action de grâces spécifique, selon la « religion » d’origine du catéchumène. Sont à signaler par exemple la référence aux chrétiens captifs des « mahométans » dans la prière pour un ancien musulman, et dans celle pour un païen, la demande à Dieu d’envoyer des ministres pour prêcher aux « pauvres peuples », exprimant une volonté d’évangélisation.
Exhortation du nouveau baptisé à la persévérance (un long texte est prévu pour les païens seuls).
Bénédiction du nouveau baptisé, accompagnée d’un texte différent pour chaque catégorie.
Notes
1 Cet article est la version remaniée du Chapitre 7, p. 558-563, de notre thèse d’Histoire intitulée Le baptême dans les Églises réformées de France (vers 1555-1685) : un enjeu confessionnel. L’exemple des provinces synodales de l’Ouest, dir. Didier Boisson, université d’Angers, 2018. https://tel.archives-ouvertes.fr/tel-02367469
2 Ces députés sont « les sieurs Jean Bouchereau, sieur de La Marche, pasteur de l’Église de Nantes, et Samuel de Goullaines, escuyer, sieur de Laudouimere, ancien de l’Église de Vieillevigne ». Françoise Chevalier (éd.), Actes des synodes nationaux des Églises réformées de France, Charenton (1644) et Loudun (1659), Genève, Droz, 2012, p. 43. Selon d’autres sources, le nom du pasteur serait Masche ou Mache, et celui de l’ancien Landovinière ou Laudonnière. Ces divergences reflètent la difficulté de restituer des noms à partir des manuscrits.
3 F. Chevalier, op. cit., p. 70 n. 104 et p. 74, art. 30. Ces délibérations se déroulent les 28 et 29 décembre 1644 et le 3 janvier 1645. Voir aussi Jean Aymon, Tous les synodes nationaux des Églises reformées de France […], 2 vol. La Haye, Charles Delo, 1710, t. 2 (désormais Aymon 2), p. 653, art. IX; John Quick, Synodicon in Gallia Reformata, or the Acts, Decisions, decrees, and Canons of those famous national councils of the Reformed Churches in France, 2 vol., London, T. Parkhurst and J. Robinson, 1692, t. 2 (désormais Quick 2), p. 447, Chap. IX.
4 Quick 2, op. cit., p. 447-453 ; Aymon 2, op. cit., p. 654-660 ; F. Chevalier, op. cit., p. 143-149.
5 Il est plus que courant que les éléments d’un débat synodal soient absents des actes, comme c’est le cas ici.
6 La précision « non-baptisés » suggère la validité du baptême des anabaptistes, même si les réformés réfutent vivement le rejet des anabaptistes du baptême des petits-enfants (considéré comme une « abomination du pape » et non comme « fondée en la parolle de Dieu »), ainsi que le re-baptême par eux procédé sur profession de foi. Voir aussi Jean Calvin, Briefve instruction pour armer tous bons fideles contre les erreurs de la secte commune des anabaptistes (1544), édité par Mirjam van Veen, Genève, Droz, 2007, p. 41-50, « Le premier article du baptesme. » Rappelons que le baptême administré en l’Église catholique est également valide, à condition de la vocation de celui qui baptise, telle que l’entend la doctrine réformée.
7 « Sera dressé memoire pour le sinode national de la proposition portée en cette compagnie scavoir si ce rencontrant quelques fois des anabatistes en nos Eglises qui n’ayants esté baptisez demandent de recevoir en icelles ce lavement de regeneration, il seroit point à propos de dresser un formulaire general que l’on suive en telles occasions. » BnF ms fr 15829, Recueil relatif aux Protestants pendant les xvie et xviie siècles […], Synode provincial de l’Orléanais-Berry à Mer, juin 1638, f° 302-311, ici f° 305r. Je remercie Didier Boisson pour cet extrait.
8 Ce synode est le premier tenu depuis 1638, le précédent ayant eu lieu en 1637.
9 Il s’agit des pasteurs Daniel Jurieu, de Mer, et Jean Taby (ou Tabit) de La Charité, présents à la fois au synode provincial de 1638 et au synode national de 1644-45.
10 Formulaire du baptesme de ceux qui se convertissent à la Foy Chrestienne d’entre les Payens, Juifs, Mahumetans, & des anabaptistes qui n’ont esté baptizez : Dressé au Synode National des Églises reformees de France, assemblé à Charanton l’an 1644, le 26. Decembre, & jours suivans, Se vendent à Charanton, par Samuel Petit, Marchand Libraire demeurant à Paris, dans la Cour du Palais, à la Bible d’Or, 1645, 22 p., in 8° (illustration 1). Il est probable que l’ouvrage ait été disponible rapidement après l’adoption du formulaire, afin que les députés puissent se le procurer avant leur retour dans leurs provinces.
11 La Discipline ecclesiastique des Eglises reformees de France. Avec un ample et exact recueil de tous les Articles, Reglemens, Observations, Decisions, & Arrestez des Synodes Nationaux, qui peuvent servir à son entier éclaircissement […]. Par Pierre Catalon, Orange, chez Edouard Raban, 1658, p. 146-156. Cette édition est basée sur l’état de la discipline en 1644-1645, après le synode national de Charenton.
12 Isaac d’Huisseau (éd.), La Discipline ecclesiastique des Églises reformees de France ou l’ordre par lequel elles sont conduites & gouvernées [...], Genève, et se vendent à Saumur, chez Isaac Desbordes, marchand libraire, 1667 (désormais DE), Chap. XI Du Baptesme, p. 332-345, Formulaire du baptême de ceux qui se convertissent à la foy chrestienne […].
13 Les sources susceptibles de nous renseigner sont en priorité les actes des synodes provinciaux et les délibérations des consistoires, comme on le voit par exemple dans les actes du synode provincial de l’Orléanais-Berry de 1638 (note 6). Cette présence reste à vérifier dans les registres de baptêmes conservés.
14 M. Dieleman, op. cit., Carte 3, p. 45, Tableau 30, p. 567.
15 Le sujet est absent des ouvrages suivants : Benjamin Vaurigaud, Essais sur l’histoire des Églises réformées de Bretagne, 1535-1808, t. 2, Paris, Joël Cherbuliez, 1870, p. 213-214 ; Correspondance de Guillaume Rivet à son frère André. Années 1642-1651, présentée et annotée par Jean Luc Tulot, Saint-Brieuc, 2007, p. 57-60, où Rivet mentionne pourtant ce synode. http://jeanluc.tulot.pagesperso-orange.fr/Grivetarivet03.pdf ; Jean-Yves Carluer, Les protestants bretons : xvie-xxe siècles, thèse d’histoire, université de Rennes 2, 1992, 4 vol. Selon l’auteur, « il est probable que ce désir de formulaire ait été déposé par des délégués des Églises qui comprenaient en leur sein un certain nombre de navigateurs au contact de terres d’islam ou d’Amérique, comme certains Malouins, Nantais ou Croisicais… ». Communication personnelle de J.-Y. Carluer, du 16 avril 2020, dont je le remercie.
16 M. Dieleman, op. cit., p. 218-224.
17 À la fin des années 1590, des « Turcs » avaient été baptisés dans l’Église réformée italienne de la ville. E. William Monter, « Calvinists in turbans », Bibliothèque d’Humanisme et Renaissance, t. 29, 1967/2, p. 443-445. [https://0-www-jstor-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/stable/41609105] Je remercie Pierre-Olivier Léchot pour cette référence.
18 Philip Benedict et Nicolas Fornerod, L’organisation et l’action des églises réformées de France (1557-1563), Synodes provinciaux et autres documents, Genève, Droz, 2012, p. 58-59 et p. 59 n7, Actes du synode de Normandie à Dieppe, le 12 mai 1561.
19 DE, Chap. XI, art II, p. 314-315.
20 Voir pour les détails M. Dieleman, op. cit., Annexe 6, p. 800-812, La discipline de 1581, publiée par Pierre-Victor Palma-Cayet.
21 On peut s’interroger pourquoi les « mahométans » ne sont pas mentionnés dans cet article.
22 DE, Chap. XI, art. V, p. 316-317, qui contrairement à d’autres versions fait état seulement de sarrasins, et non d’égyptiens, auquel le mot « bohémiens » était joint, puis supprimé par le synode national de Charenton (1631).
23 Le terme « sarrasin » désigne au Moyen-Âge les musulmans en général.
24 Par le mot « égyptiens » on désigne les bohémiens ou tziganes, catégories de personnes que l’on ne retrouve pas mentionnées dans le formulaire.
25 Les députés de la Saintonge sont deux pasteurs de La Rochelle et de Taillebourg, et deux anciens de Montignac et de Soubize, Aymon 2, 21-Vitré-1617 (cette désignation donne le rang du synode national, le lieu et l’année), art. VIII, p. 79.
26 Aymon 2, 21-Vitré-1617, Matières générales, art. IV, p. 97 ; DE, Chap. XI, art. III, p. 314-315.
27 M. Dieleman, op. cit., Chap. 4, p. 212, n. 2, DE, Chap. XI, art. I, p. 312-313.
28 Aymon 2, loc. cit.
29 J. Dakhlia, « Reconstruire la présence musulmane : une tentative historiographique », dans Jocelyne Dakhlia et Bernard Vincent, Les Musulmans dans l’histoire de l’Europe, t. I, Une intégration invisible, Paris, Albin Michel, 2011, p. 229-442, ici p. 260.
30 Ibid., p. 260.
31 Ibid., p. 250 et n. 6.
32 Citons, à titre d’exemple, l’Église réformée de Château-du-Loir, pour le 10 avril 1610 : « Me Jean Courtin diacre […] auroit mis es mains de Mrs de Vassan [le ministre] et Goullandiere la somme de six livres pour distribuer aux estrangers passans. » BPF Ms 1606/2, Consistoire de Château-du-Loir, transcription p. 10, photocopie de l’original, f° 4v. Idem, pour les années 1656 à 1659 : L. Froger, « Notes sur les communautés protestantes de Nogent-sur-Loir et de Château-sur-Loir », Les Annales fléchoises et de la vallée du Loir, 1903, t. 1, p. 264-269, ici p. 266.
33 En janvier 1661, le consistoire d’Orléans discute ainsi du cas de Salvator Leo, « medecin juif de naissance et chrestien de profession », qui a montré des attestations de plusieurs Églises réformées, dont celle de Nîmes et qui demande une assistance pour aller à Genève. En 1663, un mahométan baptisé en l’Église française de Londres et de passage à Orléans, sollicite, lui aussi une assistance, afin de se rendre à Avignon. Je remercie Didier Boisson pour la communication de ces cas. BPF Ms 1538/I. Papiers de Paul de Félice. « Registre des Actes du consistoire de l’Église réformée d’Orléans commençant avec l’année mil six cent cinquante huit. Du 1er janvier 1658 au 10 avril 1664 » Copie de la fin du xixe siècle, par P. de Félice sur l’original détruit en 1940. Voir à la date du 31 janvier 1661 et du 19 juillet 1663.
34 Nous passons ici sur les motifs autres qu’économiques qui ont pu conduire à des conversions au christianisme, et plus particulièrement à la confession réformée, minoritaire dans le royaume.
35 Édouard Melon, « Baptême de deux Maures, à Caen, en 1565 », Bulletin de la Société de l’Histoire du Protestantisme Français (BSHPF), t. 11, 1862, p. 237-238. AD Calvados, C 1566, Caen, Protestants, BM 1560-1572, f° LXVr-LXVIv, du 8 juillet 1565.
36 Mickaël Augeron, « De l’islam et du calvinisme à La Rochelle dans la seconde moitié du xvie siècle. Itinéraire d’un Rochelais, Amete, aux prises avec l’Inquisition portugaise », dans Guy Saupin (dir.), Villes atlantiques dans l’Europe occidentale du Moyen Âge au xxe siècle, Rennes, Presses universitaires de Rennes (PUR), 2006. DOI: 10.4000/books.pur.20482
37 Élizabeth C. Tingle, « The conversion of infidels and heretics: baptism and confessional allegiance in Nantes during the early wars of Religion (1550-1570) », French History, 22/3, 2008, p. 255-274. L’auteure donne le nom « Etrixia » (p.255), sans doute la transcription erronée de l’Éthiopie. AD Loire-Atlantique, Paroisse Saint-Nicolas, B 1550-1558, du 15 août 1553. Cette église est située dans le quartier portuaire de La Fosse.
38 Jacques Pannier, L’Église réformée de Paris sous Henri IV […], Paris, H. Champion, 1911, Chap. IV, § 1. Les nouvelles recrues, p. 188-189. Id, L’Église réformée de Paris sous Louis XIII (1610-1621 […]), Paris, Librairie Istra (anc. Champion), 1922, « Chapitre Abjurations de catholiques, musulmans, anabaptistes… », p. 111-112. L’auteur a relevé ces baptêmes dans Pierre de l’Etoile, Journal du règne de Henry IV, roi de France et de Navarre. Tiré d’un manuscrit du tems, t. 3, La Haye, Frères Vaillant, 1741, p. 112 (pour 1603) et 250 (pour 1604) et dans [Jules Delaborde], « Copie de fragments des registres de l’état civil des protestants détruits par l’incendie du Palais de Justice de Paris, en 1871 », BSHPF, t. 21, 1872, p. 218-226 et 262-278.
39 [J. Delaborde], op. cit., p. 222.
40 Ibid., p. 225. P. de l’Etoile, op. cit., p. 112 : « 1603. Le Dimanche 20 [juillet ? la copie du registre donne le 16 juillet], il y eut un Juif baptisé à Ablon, qui étoit âgé de 35 ans ou environ ».
41 Ibid., p. 250, « Le Dimanche 26 de ce mois, qui étoit le lendemain de Noël, un Turc âgé de 4 ans ou environ, fut baptisé & à Ablon, & tenu par M. de Rosni, qui le nomma de son nom Maximilian. Ceux qui y étoient, disent que ledit Turc fit en cette assemblée une fort belle & ample confession de sa foi ».
42 [J. Delaborde], op. cit., p. 268-269.
43 Ibid., p. 271-272.
44 Ibid., p. 272-273.
45 Robert Richard et Denis Vatinel, « Le consistoire de l’Eglise réformée du Havre : les laïcs », BSHPF, t. 128, 1982, p. 283-362, ici p. 316 et 325 n. 398. AD Seine-Maritime, Protestants, Sanvic temple, 4 E 03389, BMS 1600-1625, f° 137v du 10 (et non 11) septembre 1619 et f° 140r, du 16 mars 1620.
46 J. Dakhlia, op. cit., p. 248-256. L’auteure constate que ces dénominations couvrent des réalités bien diverses. Les baptêmes signalés ne sont pas toujours accompagnés de la référence précise des sources.
47 Ibid., p. 231-413.
48 Ibid., p. 249 et n. 3. La Bruffière est située à une quarantaine de kilomètres au sud-est de Nantes.
49 Ibid., p. 250.
50 Ibid., p. 264 et n. 2, village situé à une vingtaine de kilomètres au sud d’Angers.
51 Ibid., p. 307 et n. 3.
52 Ibid., p. 263.
53 Sur l’arrivée des deux Indiens à Saumur, voir Didier Poton, « Les ‘Toupinambous’ de Monsieur de Mornay », Laurent Vidal et Didier Poton (dir.), Du Brésil à l’Atlantique. Essais pour une histoire des échanges culturels internationaux. Mélanges offerts à Guy Martinière, Rennes, PUR, 2014, p. 101-110. [https://0-books-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/pur/26220]
54 Jean-Christophe Germain, « Les dernières années (1620-1625) du capitaine flibustier Charles Fleury », Généalogie et Histoire des Caraïbes. [www.ghcaraibe.org/articles/2014-art05.pdf] Dans ses mémoires, Charlotte d’Arbaleste n’évoque pas ces Indiens : Charlotte Duplessis-Mornay, Les Mémoires de Madame de Mornay, Nadine Kuperty-Tsur (éd.), Paris, Honoré Champion, 2010.
55 M. L. Cimber et F. Danjou, Archives curieuses de l’Histoire de France depuis Louis XI jusqu’à Louis XVIII […], publiées d’après les textes conservés à la Bibliothèque royale, et accompagnées de notices et d’éclaircissemens […], 1ère série, t. 15, Paris, Beauvais, 1837, p. 303-345, « Testament, codicille, dernières actions et mort heureuse de Philippes de Mornay, sieur du Plessis Marly, cy devant Gouverneur de la ville et Chasteau de Saumur ».
56 Sur l’attitude des pasteurs réformés vis-à-vis du judaïsme, voir par exemple Myriam Yardeni, Huguenots et juifs, Paris, Honoré Champion, 2008, en particulier l’introduction et la Partie I, « L’Ère de l’antisémitisme », p. 11-88, qui concerne l’époque jusqu’à la Révocation.
57 AD Seine-Maritime, 4 E 03394, Protestants (Quevilly-Temple), 1619-1624, « Le lundy 12 dud mois [d’avril] se presenta pour recepvoir le St Babtesme Ben Alexander né juif et aagé de vingt à vingt deux ans, aians pour parrains Jeremie [Hualend] et Guillaume Dric ».
58 Philippe Chareyre, « Les conversions au protestantisme à Nîmes aux xvie et xviie s. », Cahiers du Centre de Généalogie protestante, 1990/3, p. 115-132. BnF Ms français 8668, « Libvre des actes du Consistoire de l’esglise refformee de Nismes », 1654-1663, f° 6r-6v (24 janvier 1654) et f° 35v (14 mars 1663).
59 Élisabeth Labrousse et Antony McKenna, Correspondance de Pierre Bayle, 15 vol. , Oxford, Fondation Voltaire, 1999-2017. Édition électronique : http://bayle-correspondance.univ-st-etienne.fr/, Lettre n° 147, du 12 janvier 1678.
http://bayle-correspondance.univ-st-etienne.fr/?Lettre-147-Pierre-Bayle-a-Jacob, et la Lettre n° 163, de Sedan, du 17 décembre 1678, n. 19. http://bayle-correspondance.univ-st-etienne.fr/?Lettre-163-Pierre-Bayle-a-Joseph. Après la fermeture, en 1665, de l’école à Loudun où il enseigne l’hébreu, Alpron s’établit à Saumur.
60 Sur la position des réformés vis-à-vis des peuples du Nouveau Monde, et des références bibliographiques à ce sujet, voir par exemple Frank Lestringant, « Géopolitique de Duplessis-Mornay », Albineana, Cahiers d’Aubigné, 18, 2006, Numéro spécial Philippe Duplessis-Mornay, p. 463-480. Calvin aurait été d’avis de les laisser suivre leur destin (p. 363), suivi en cela par le pasteur genevois Jean de Léry, tandis que d’autres, comme Urbain Chauveton, y voient « un espoir de correction » (p. 464). F. Lestringant se réfère à l’ouvrage De la verité de la religion chrestienne, contre les Athees, Epicuriens, Païens, Juifs, Mahumedistes, & autres infideles, Par Philippes de Mornay, sieur du Plessis-Marly, Paris, éd. revue, 1585 (Anvers, 1581). À ce sujet, voir aussi Pierre-Olivier Léchot, Luther et Mahomet. Le protestantisme d’Europe occidentale devant l’islam, xvie-xviiie siècles, Paris, Éditions du Cerf, 2021.
61 Par exemple « Veu mesmement que les Juifz sont soufferts et les Turcz […] » : P. Benedict et N. Fornerod, L’organisation et l’action, op. cit., 4. Requête présentée aux Roi Charles ix par les députés des Églises réformées aux États généraux d’Orléans, 27 janvier 1561, p. 23.
62 Ordonnance du 22 février 1610, concernant les « morisques » expulsés d’Espagne. L’ordonnance paraît dans une « adjonction » à l’année 1610, de La continuation du Mercure françois, ou, Suitte de l’histoire de l’auguste regence de la Reyne Marie de Medicis […], Paris, Jean & Estienne Richer, 1627, f° 9r-11r.
63 Isambert, Decrusy et Taillandier (éd.), Recueil général des anciennes lois depuis l’an 420 jusqu’à la révolution de 1789, Paris, Belin-Leprieur, 1829, t. XVI, 1610-1643, p. 76, n° 51 : Déclaration du 23 avril 1615 qui expulse les juifs du royaume.
64 Ibid, p. 67-68. Le rejet du baptême des petits enfants et la non reconnaissance des magistrats heurte les dogmes catholiques et réformés. Les catholiques attribuent bien volontiers ces opinions aux réformés, obligés de réfuter ces accusations.
65 Lettres patentes & declaration du Roy par lesquelles sa Majesté veut que tous Maurisques, Juifs & autres faisant profession d’autre religion que de la Chrestienne, leurs femmes, enfans & familles qui sont à present dans son Royaume, ayent à sortir & se retirer hors d’iceluy, dans un mois apres la publication faicte, sur les peines y contenuës, Plessis-lez-Tours, 26 juillet 1619. BPF ms 1566/Vd.
66 Jean-Pierre Poussou, « Les étrangers à Bordeaux à l’époque moderne », Annales de Bretagne et des pays de l’Ouest (ABPO), n° 117, 2010/1, p. 149-164, [https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/abpo.1010]
67 Julien Léonard, « Une tolérance à géométrie variable : catholiques et protestants, chrétiens et juifs, pouvoir royal et francisation. Metz au xviie siècle », ABPO, n° 125, 2018/1, p. 97-109. [https://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/abpo/3777]
68 Claude Toczé, avec la collaboration d’Annie Lambert, Les Juifs en Bretagne (ve-xxe siècles), Rennes, PUR, 2006, Chap. 1 et 2, p. 17-40. DOI : 10.4000/books.pur.43298
69 Esther Benbassa, Histoire des Juifs de France, [Paris], Éd. Seuil, 1997, p. 73-118, Chap. 4, Une histoire régionale : les Juifs du Sud, et Chap. 5, Juifs de l’Est et de Paris.
70 Isambert, Decrusy et Taillandier (éd.), op. cit., t. XVI, p. 216, n° 158, Déclaration pour la formation des colonies aux Indes Occidentales , mai 1628. La fondation des Cent-Associés est dissolue en 1663.
71 Marc-André Bédard, Les Protestants en Nouvelle-France, mémoire de maîtrise en Histoire, Université de Laval, Canada, 1973, p. 25. [http://0-hdl-handle-net.catalogue.libraries.london.ac.uk/20.500.11794/17665] Sur cette présence protestante voir aussi Michaël Augeron et Didier Poton, « La Rochelle, port canadien : le négoce protestant et la Nouvelle-France », dans Philippe Joutard et Thomas Wien (dir.), avec la collaboration de Didier Poton, Mémoires de Nouvelle-France. De France en Nouvelle-France, Rennes, PUR, 2005, p. 107-121.
72 Philippe Legendre, Histoire de la persécution faite à l’Église de Rouen sur la fin du dernier siècle. Précédée d’une Notice historique et bibliographique et suivie d’un Appendice par Émile Lesens, Rouen, De Leon Deshayes, [1874], p. IX-X. Dans le registre de baptêmes du temple de Quevilly (1680-1683) et dans le répertoire (1669-1683), cet acte de baptême reste introuvable.
73 Léon Pilatte (éd.), Édits, Déclarations et Arrests concernans la Religion P. Reformée, 1662-1751, précédés de l’Édit de Nantes, imprimés pour le deuxième centenaire de la révocation de l’édit de Nantes, Paris, Fischbacher, 1885, p. 131-132.
74 Ibid., p. 131.
75 AN TT 243/7, Dieppe, n° 9-10, f° 753-756, ici f° 754-755, pièce sans date, « envoyé par M. Rouville, l[ieutenan]t c[rimine]l de Dieppe » qui semble précéder une sentence du 12 février 1685. Les registres de baptêmes de l’Église réformée de Dieppe n’ont pas survécu au bombardement de 1694.
76 Isambert, Decrusy et Taillandier, op. cit., t. XIX, 1672-1686, n° 1150, p. 494-495 : Code noir de mars 1685 : touchant la police des isles de l’Amérique, Art. 2 : « […] Enjoignons aux habitans qui achètent des nègres nouvellement arrivés, d’en avertir, dans huitaine au plus tard, les gouverneur et intendant desdites îles, à peine d’amende arbitraire ; lesquels donneront les ordres nécessaires pour les faire inscrire et baptiser dans le temps convenable. » L’article 1er élargit aux îles l’édit du 23 avril 1615 concernant l’expulsion des juifs.
77 La transcription des actes est donnée dans M. Dieleman, op. cit., p. 545, Tableau 28. Baptêmes réformés et réceptions de musulmans, juifs et anabaptistes, 1565-1660. Un tableau récapitulatif est présenté en Annexe 1.
78 Il s’agit essentiellement des cinq provinces synodales de l’Ouest et de l’Église de Paris.
79 Sa pérégrination est à l’image de celles mentionnées dans Natalia Muchnik, « Du judaïsme au catholicisme : les aléas de la foi au xviie siècle », Revue historique, n° 623, 2002/3, p. 571-609. [https://0-www-cairn-info.catalogue.libraries.london.ac.uk/revue-historique-2002-3-page-571.htm]. Je remercie l’auteure pour cette référence.
80 Ces ministres sont Samuel de Lecherpiere, sieur de la Rivière, Jean Maximilien de Baux de L’Angle et Pierre Érondelle. Cette mise en récit a pu avoir un double objectif. D’une part, les réformés s’appuyant beaucoup sur les textes de l’Ancien Testament, il n’est pas à exclure que la conversion d’un juif serait à leurs yeux une preuve de la primauté du christianisme par rapport au judaïsme. D’autre part, le récit d’une telle conversion mettrait l’accent sur la préférence pour le christianisme réformé par rapport au christianisme de l’Église catholique, dans le contexte de la controverse religieuse, importante dans ces années-là.
En 1654, c’est le consistoire de Nîmes qui demande au pasteur Rossellet de faire imprimer la présentation faite par Alexandre Fort, juif, devant le consistoire et l’action du pasteur lors de son baptême, « pour satisfaire au desir des plus principaux habitans de ceste ville et aux fins que ce baptesme vienne à la cognoissance de ceux qui desirent l’advenement du regne de nostre seigneur Jesus Christ. » La réalisation du projet n’est pas attestée. Aucun titre pouvant correspondre à cette conversion n’a été retrouvé dans les catalogues de la BnF, le CCdF, les bibliothèques de Nîmes, ou le répertoire des ouvrages de controverse de Louis Desgraves (1984-1985).
Pour des récits de conversion de juifs au catholicisme, à Metz en 1642, 1664, 1668 et 1699, voir Julien Léonard, « À propos de récits de conversion de juifs au catholicisme à Metz au xviie siècle », dans Philippe Martin (dir.), Ephemera catholiques. L’imprimé au service de la religion (xvie-xxie siècles), Paris, Beauchesne, 2012, p. 179-205. Je remercie l’auteur pour cette référence.
Le baptême d’un jeune Innu, « sauvage du pays de Canada appellé la nouvelle France », dans la cathédrale d’Angers en 1621, est décrit en détail dans l’acte de baptême. Emma Anderson, « Le destin tragique de Pierre-Anthoine Pastedechouan, jeune Innu en Anjou au xviie siècle », Archives d’Anjou, Mélanges d’histoire et d’archéologie angevines, Angers, n° 11, 2007, p. 69-85, en particulier p. 77-78. AD Maine-et-Loire, Angers, Saint-Maurice, coll. communale, B 1596-1668, f° 223r-v, du 25 avril 1621.
81 La Forme d’administrer le baptesme, à la fin de la deuxième page, dans La Forme des prieres ecclesiastiques, avec la manière d’administrer les sacremens, et celebrer le Mariage, & visitation des malades. […]. Item, la confession de foi des Eglises Françoises, [Genève], Jacob Stoer, 1595. http://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.3931/e-rara-2694
82 DE, Chap. XI, à la suite de l’art. XIX, p. 332-345. C’est également le cas pour les versions publiées dans Aymon 2, p. 654-660, et Quick 2, p. 447-453. Cependant, la typographie distinctive n’est pas appliquée correctement partout.
83 Nous soulignons.
84 « En Jésus il n’y a maintenant ni Juif ni Grec » etc., que l’on trouve dans le TOB, 1996, p. 1714 sous le titre « Du vieil homme à l’homme nouveau ».
85 « […] sceau de ton alliance, gage de la remission de nos pechez, & symbole de nostre entrée en ta Maison par une renaissance spirituelle », DE, p. 343-344.
86 L’agenouillement domestique et privé dans les familles étant admis à titre « d’humilité et de repentance », cette même pratique à titre d’adoration est interdite, ainsi que la génuflexion. Christian Grosse, « Y a-t-il une raison réformée des gestes de piété ? Usages controversés de l’agenouillement (xvie-xviiie siècle) », Olivier Christin et Yves Krumenacker (dir.), Les protestants à l’époque moderne. Une approche anthropologique, Rennes, PUR, 2017, p. 531-549, ici p. 545.
87 AD Tarn-et-Garonne, État civil, Montauban, Consistoire de Montauban, B 1659-1663, du 29 février 1660.
88 La mention ne relève pas des éléments à renseigner obligatoirement dans l’acte. Voir M. Dieleman, op. cit., Chap. 6, p. 400, Tableau 22, Les mentions obligatoires dans les actes de baptêmes selon plusieurs réglementations, 1539-1667.
89 AD Charente-Maritime, La Rochelle, I 176-180, registre pastoral BM 1649-1667, f° 26. Nous soulignons la citation dans l’acte.
90 http://www.kerkrecht.nl/node/1336, commentaire sur l’art. 58 de la discipline ecclésiastique de Dordrecht, 1619, p. 240. Ces formulaires semblent postérieurs à celui adopté par le synode national de 1644.
91 Guillaume H.M. Posthumus Meyjes, Hans Bots (éd.), avec la collaboration de Johanna Roelevink, Livre des Actes des Églises Wallonnes aux Pays-Bas, 1601-1697, Den Haag, Instituut voor Nederlandse geschiedenis, 2005, p. 607-609.
92 Des bateaux pour les Indes étant sur le départ, le synode national de Dordrecht avait dès le début du mois de décembre 1618 délibéré sur les conditions du baptême des (enfants de) païens. Hendrik Jan Olthuis, De doopspraktijk der Gereformeerde kerken in Nederland (1568-1816), Utrecht, Ruys, 1908, p. 86-87. [https://archive.org/details/dedoopspraktijk00olth]
Ce même synode avait retenu un formulaire en cinq questions pour le baptême de « bejaerde », c’est-à-dire de personnes adultes (mais pas forcément vieilles), en plus du formulaire du baptême des enfants. En effet, dans les Provinces-Unies, « à côté des réformés, anabaptistes et catholiques, au début du 17e siècle, beaucoup n’avaient pas encore de rattachements ecclésiaux fixes ». Arie Th. van Deursen, Bavianen en slijkgeuzen, Kerk en kerkvolk ten tijde van Maurits en Oldenbarnevelt. Franeker, Van Wijnen, (1974) 1998 (3e druk), p. 141-144.
[http://www.dbnl.org/tekst/deur002bavi01_01/]
93 La Discipline de l’Eglise françoise de Rotterdam, ou l’Ordre par lequel elle est conduite & gouvernée […], A Rotterdam, Chez Henry Goddaeus, Imprimeur, Anno MDCLXII [1662], 176 p., 8°. Voir p. 85, art. VI : concernant la conversion « des personnes ou âgées, [...] quelque Juif, ou Payen, ou Turc, ou Anabaptiste [...], le Pasteur leur administrera ce sainct Sacrement [du baptême] à la face de l’Eglise, suyvant le formulaire, dressé pour ces occurrences extraordinaires. », Stadsarchief Rotterdam, EWR 143/24. Rédigée par le pasteur Charles de Rochefort à la demande de son Église, la Discipline fut adoptée par le consistoire le 1er décembre 1661 (note manuscrite en début d’ouvrage). Ce pasteur, né en 1604 (à La Rochelle ?), avait fait un séjour dans les Caraïbes. Peut-on considérer l’inclusion de cet article dans la Discipline comme une réponse à l’interrogation de son collègue Chaillou ?
94 Le Formulaire du Baptesme, des Personnes âgées, qui n’ont pas receu ce Sacrement en leur enfance, par la negligence de leurs parens, ou pour avoir esté eslevées parmi les Anabaptistes. Avec la Maniere de l’administrer à ceus, qui se convertissent à la Religion Chrestienne, d’entre les Iuifs, les Mahometans, & les Payens, Rotterdam, chez Arnould Leers, 1673, 47 p., 4°. Un exemplaire, ayant appartenu à l’Église wallonne de Naarden, est signalé dans le Catalogue de la Bibliothèque Wallonne, déposée à Leide, Leide[n], Van der Hoek, 1875, p. 26 (publié par J.T. Bergman). Relié avec la Confession de Foy et d’autres formulaires, il se trouve aujourd’hui aux archives municipales de Naarden (Gemeentearchief Gooise Meren en Huizen), SSAN122 Inventaris Archief Waalse gemeente te Naarden, 6, Liturgie, n° 538/3. www.gooienvechthistorisch.nl Je remercie vivement Ineke Inglot, archiviste, pour la communication de ce texte. La British Library (Londres) conserve aussi un exemplaire de 1673. En 1687, une édition imprimée est parue à Amsterdam, chez Henry et la veuve Théodore Boom (mêmes texte, format et nombre de pages).
95 Rappelons que les Églises réformées néerlandophones ne connaissaient pas un tel formulaire. Voir aussi la note 96.
96 Avec une attention plus importante pour les non-baptisés et les anabaptistes, le formulaire wallon est plus adapté à la situation aux Provinces-Unies. Pour sa composition, voir l’Annexe 2.
97 Des baptêmes de musulmans et d’Africains ont également eu lieu dans l’Allemagne luthérienne : cf Renate Dürr, «Inventing a Lutheran Ritual: Baptisms of Muslims and Africans in Early Modern Germany», dans Ulinka Rublack (éd.), Protestant Empires : Globalizing the Reformations, Cambridge, Cambridge University Press, 2020, p. 196-227.
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Référence papier
Margreet Dieleman, « « Toutefois et quand il aura plû à Dieu donner à son Église la joye de quelque conversion » », Chrétiens et sociétés, 27 | 2020, 31-59.
Référence électronique
Margreet Dieleman, « « Toutefois et quand il aura plû à Dieu donner à son Église la joye de quelque conversion » », Chrétiens et sociétés [En ligne], 27 | 2020, mis en ligne le 19 mars 2021, consulté le 12 décembre 2024. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/chretienssocietes/7748 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/chretienssocietes.7748
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