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Haut de pageAxelle Chassagnette, Savoir géographique et cartographie…
Axelle Chassagnette, Savoir géographique et cartographie dans l’espace germanique protestant, 1520-1620, Genève, Droz, Coll. Travaux d’humanisme et Renaissance, 2017, 624 p.
La Renaissance européenne est marquée par les voyages de découverte et l’élargissement de la connaissance du monde. Au même moment, la réception humaniste de quelques textes antiques (notamment de Ptolémée et de Strasbon) familiarise les milieux lettrés avec un nouveau mot : géographie. Autour de ce terme, des connaissances et des pratiques qu’il désigne, se construit un nouveau savoir, bientôt une nouvelle discipline. L’espace germanique, en particulier protestant, joue un rôle important dans son élaboration conceptuelle et dans sa mise en œuvre au xvie siècle. Cet ouvrage cherche à éclairer les contextes intellectuels, sociaux et politiques, ainsi que les modalités pratiques de la naissance de la discipline géographique dans le Saint Empire. Il interroge également la nature des relations entre religion, confession et savoirs, à la faveur d’une ample connaissance de toutes les sources possibles.
Olivier Christin et Yves Krumenacker (dir.), Les protestants à l’époque moderne…
Olivier Christin et Yves Krumenacker (dir.), Les protestants à l’époque moderne. Une approche anthropologique, Rennes, Presses Universitaires Rennes, Coll. Histoire, 2017, 616 p.
L’histoire du protestantisme, en France comme ailleurs, s’est longtemps construite à partir de « grands récits » ou de concepts plus ou moins étendus, qu’il n’est pas inutile de réinterroger à la lumière des perspectives de recherche ouvertes dans les dernières années, qu’il s’agisse de l’histoire du corps et de ses usages, de l’histoire des imaginaires et des états de conscience altérés, de l’histoire des choses ordinaires... Cependant, interroger, critiquer ne signifie évidemment pas congédier ces concepts et ces récits une fois pour toutes et sans autre forme de procès, car beaucoup d’entre eux sont encore en usage et ils rendent toujours les services que l’on peut en attendre : mise en ordre des données éparpillées fournies par les sources, création de comparables par-delà les situations locales et les variations lexicales, ouverture de perspectives de longue durée, etc.
Pour dépasser ces « grands récits » et répondre aux nouveaux questionnements, depuis plusieurs années, voire dizaines d’années, des recherches se sont donc développées en histoire du protestantisme à partir d’un questionnement anthropologique. On a ainsi mené des travaux sur la mort et les cimetières, sur la Cène, sur le mariage et la sexualité, les images, le chant et la lecture, etc. Mais d’une part, il s’agit la plupart du temps de recherches dispersées, sans qu’aucune véritable synthèse ne soit effectuée ; d’autre part, ces études sont en grande partie l’œuvre de chercheurs allemands ou anglo-saxons, et n’ont que rarement atteint le monde francophone, à quelques exceptions notables près. Il n’y a par exemple rien en français sur la notion de « réformation culturelle » (Kulturreformation), pourtant opératoire en Allemagne ou en Suisse et les réflexions sur les cultures confessionnelles sont très peu connues des chercheurs français
L’heure semble donc venue de construire un cadre théorique permettant une première synthèse des travaux en ce domaine et d’affiner les outils conceptuels permettant de progresser dans ce nouveau champ disciplinaire, en mettant en relation des méthodes historiques jusqu’alors très cloisonnées entre pays et en produisant un certain nombre d’études de cas afin d’illustrer la capacité des concepts élaborés à penser la réalité sociale.
Pour éviter d’embrasser un champ d’études trop vaste risquant de produire des généralités ou des rapprochements peu pertinents, nous avons décidé de nous limiter à l’Europe continentale, plus précisément aux pays francophones, au Saint-Empire, à la Hongrie, à la Transylvanie et aux Pays-Bas (Provinces-Unies), sans nous interdire cependant des rapprochements avec l’Angleterre, l’Écosse ou même les colonies anglaises d’Amérique ; nous aurons ainsi des cas de figure très différents, du territoire monoconfessionnel à la pluralité confessionnelle sur le même territoire. Toutes les variantes du courant réformé sont ainsi envisagées, avec cependant une attention parti- culière pour les réformes issues de Luther et de Calvin.
Le volume s’organise en cinq grandes parties, consacrées à la culture matérielle, à l’espace, au temps, au langage et au corps. Chaque partie s’ouvre sur un rapport introductif présentant l’état de la question, avant que différents auteurs n’approfondissent tel ou tel aspect du sujet. En ouverture, un anthropologue des religions, L. Obadia, fera droit à la dimension comparatiste de l’anthropologie en se demandant dans quelle mesure le protestantisme peut être un modèle pour des phénomènes religieux qui se développent en dehors du christianisme.
Sylvio De Franceschi et Bernard Hours (dir.), Droits antiromains xvie-xixe siècles...
Sylvio De Franceschi et Bernard Hours (dir.), Droits antiromains xvie-xixe siècles. Juridictionalisme catholique et romanité ecclésiale, Lyon, LARHRA, Coll. Chrétiens et Sociétés Documents et Mémoires N°33, 2017, 276 p
Au fil des différentes sessions d’un cycle de journées d’études consacrées par le Laboratoire de recherche historique Rhône-Alpes à l’antiromanisme catholique – Antiromanisme doctrinal et romanité ecclésiale dans le catholicisme posttridentin, Anti-infaillibilisme catholique et romanité ecclésiale aux temps posttridentins, Antiromanisme et critique dans l’historiographie catholique (xvie-xxe siècles) –, le constat s’est imposé d’une présence massive de la culture juridique dans le discours porté par les tenants d’un catholicisme antiromain, qu’ils soient juristes ou non. Le fait n’a rien d’étonnant dans la mesure où l’ecclésiologie catholique s’est toujours placée à l’intersection du droit et de la théologie. Nombre d’auteurs qui ont illustré la tradition de l’antiromanisme catholique et juridictionaliste étaient à la fois juristes et théologiens compétents – ainsi de Paolo Sarpi ou de Marc’Antonio De Dominis, ainsi des grands noms qui ont illustré le fébronianisme et le joséphisme.
Ce volume qui rassemble les communications de la cinquième session du cycle propose d’aborder frontalement la question des rapports entretenus entre le droit et l’opposition catholique à la romanité ecclésiale en évoquant les grandes figures de la tradition du catholicisme antiromain qui ont fait au droit une grande place dans leur argumentation, en relevant le rôle des canonistes catholiques qui ont pu faire parfois le choix de s’opposer aux prétentions romaines et en étudiant les grands thèmes où se mêlent étroitement arguments juridico-canoniques et hostilité catholique aux revendications du Saint-Siège – ainsi du conciliarisme, des compétences de l’autorité civile en matières ecclésiastiques, de l’infaillibilité pontificale ou encore du mariage et des empêchements dirimants.
Esther Deloche, Le diocèse d’Annecy de la Séparation à Vatican II...
Esther Deloche, Le diocèse d’Annecy de la Séparation à Vatican II, 1905-1962, Académie salésienne, Coll. Mémoires et documents, 687 p.
Dans cet extrait de sa thèse, l’historienne dessine la vie du diocèse d’Annecy et de ses personnalités ecclésiastiques et laïques marquantes de la première moitié du xxe siècle. Cette étude de sociologie religieuse retrace l’évolution de la société bouleversée par les conflits mondiaux, le dynamisme de l’Église, l’impact de l’urbanisation et l’essor de l’industrie et du tourisme dans la région.
Après la Séparation, le clergé est libéré de toutes contraintes par rapport à l’État pour la gestion et la nomination de son personnel, mais en même temps il doit faire face à un certain nombre de crises en son sein. C’est un temps de mission et de remise en question qui met en évidence le fait que les interrogations apparues au Concile sont le fruit d’une longue maturation dans les esprits. C’est pourquoi le livre s’interroge sur la façon dont le diocèse a réagi face à ces différents événements et comment en un demi-siècle, il réussit à conserver son dynamisme, allant même jusqu’à devancer ses voisins savoyards ? Est-ce à cause des personnalités de ses évêques et des prêtres ? Est-ce à cause de la stature de certains laïcs engagés ? Est-ce le fruit d’une tradition ancienne de fidélité de la Savoie du Nord par rapport au reste du duché ?
Marion Deschamp, Mythologies Luthériennes...
Marion Deschamp, Mythologies Luthériennes. Les Vies de Luther par lui-même, Melanchthon et Taillepied, Lyon, Presses Universitaires de Lyon, Coll. Faits de religion, 204 p.
Le jubilé des 500 ans de la Réforme protestante suscite une pléiade de célébrations mémorielles, qui semblent avant tout l’occasion de fêter son héros fondateur. Martin Luther est régulièrement acclamé comme le chantre de la liberté de conscience ou l’inventeur de l’individu, voire de la démocratie moderne. Or cette image consensuelle et fantasmée n’a pas toujours été dominante dans les imaginaires collectifs. L’invention de traditions et de politiques mémorielles autour de Luther plonge ses racines dans la bataille du souvenir qui débuta à sa mort, en 1546, et qui se joua en mots et en images.
Ce livre se propose de faire redécouvrir au lecteur les premiers portraits littéraires du Père de la Réforme, esquissés des deux côtés de la barrière confessionnelle, mais aussi de restituer l’image qu’il s’employa à façonner de lui-même pour la postérité. Le petit texte autobiographique écrit par Luther en 1545, un an avant sa mort, consacré au récit des origines de sa révolte contre Rome, la Vie de Luther par Melanchthon (1546), le principal ordonnateur de la mémoire du Réformateur dans le monde protestant, enfin la Vie écrite par Noël Taillepied (1577), polémiste franciscain et premier biographe français de Luther, permettent d’entrer dans la fabrique des mythologies luthériennes. Ces trois textes fondateurs, présentés et édités par Marion Deschamp, sont précédés d’une étude sur l’invention de cultures confessionnelles du souvenir et complétés par un corpus iconographique commenté.
Bruno Dumons et Christian Sorrel (dir.), Gouverner l’Église au xxe siècle...
Bruno Dumons et Frédéric Gugelot (dir.), Catholicisme et identité. Regards croisés sur le catholicisme français contemporain (1980-2017), Paris, Karthala, Coll. Signes des Temps, 2017, 332 p.
« Je suis catholique », affirme le vainqueur d’une élection primaire en vue des présidentielles de 2017, qui fait de lui le candidat de sa famille politique. Depuis une dizaine d’années, un temps de réaffirmation catholique se dessine qui s’exprime tant dans le champ politique, que sociétal, culturel que théologique. C’est ce mouvement que cet ouvrage tente de cerner.
Le catholicisme en France connaît en effet des évolutions majeures depuis les années 1980. Des tensions parcourent l’Église au-delà des différences entre les choix d’identité et/ou d’ouverture. Alors que ceux qui revendiquent d’être à la « gauche du Christ » semblent vieillir et disparaître, d’autres courants s’affirment qui se veulent plus authentiquement catholiques : seraient-ils installés à la droite du Père ? À ceux que l’inquiétude évangélique étreint, aux chrétiens critiques répondrait un catholicisme confessionnel, assumé, loin de l’enfouissement des années 1950-1960, « décomplexé ». Ils mettent au coeur de leur foi et de leurs pratiques la défense et la restauration des valeurs chrétiennes et de la famille. Ils défendent des choix de vie en contraste avec des évolutions contemporaines, s’appuient sur des groupes élitaires, des revues, des militances renouvelées.
Jean-Dominique Durand et Claude Prudhomme (dir.), Le monde du catholicisme
Jean-Dominique Durand et Claude Prudhomme (dir.), Le monde du catholicisme, Paris, Robert Laffont, Coll. Bouquins, 2017, 1456 p.
L’originalité de ce dictionnaire est d’offrir au lecteur une approche globale du catholicisme depuis ses origines les plus anciennes jusqu’à son influence actuelle à travers tous les continents. Le catholicisme se trouve aujourd’hui dans une situation paradoxale. De plus en plus mal connu dans les pays réputés de tradition chrétienne, au point que toute une part de son vocabulaire n’est plus comprise par beaucoup de nos contemporains, il reste l’objet d’un intérêt constant dans les médias, capable de susciter des passions contraires dans l’opinion publique. En perte d’influence dans une Europe et une Amérique du Nord sécularisées, il a vu son centre de gravité se déplacer vers l’Amérique latine et manifeste un réel dynamisme dans de nouveaux espaces comme l’Afrique subsaharienne, le Pacifique et certains pays d’Asie. Situation inédite qui rend plus que jamais indispensable, pour bien comprendre son rôle et sa place dans l’évolution des sociétés anciennes et contemporaines, une connaissance approfondie de son histoire, à travers ses sources et ses traditions. Fruit de la collaboration de 127 universitaires, théologiens, historiens, exégètes, liturgistes et philosophes, cet ouvrage apporte des informations synthétiques sur les sujets les plus variés : personnages, institutions, statistiques par grandes zones géographiques, lieux, enjeux théologiques, objets et vêtements de la liturgie, événements marquants… Il propose aussi des développements plus amples sur les croyances elles-mêmes et sur les valeurs qui fondent cette religion à la vitalité désormais planétaire.
Étienne Fouilloux, Les Éditions dominicaines du Cerf
Étienne Fouilloux, Les Éditions dominicaines du Cerf, Rennes, Presses universitaires de Rennes Coll. Histoire, 2017, 294 p.
Les Éditions du Cerf comptent dans le paysage éditorial français, et pas seulement dans le domaine de l’édition religieuse. Fondées en 1929 par deux religieux dominicains dans le prolongement du succès de la revue La Vie Spirituelle, elles ont rapidement acquis, par leurs périodiques et par leurs livres, une réputation enviable dans l’aile marchante de l’Église de France : mouvement ecclésiologique (collection « Unam Sanctam » du père Congar) ; mouvement biblique (Bible dite de Jérusalem) ; mouvement patristique (collection « Sources chrétiennes ») ; mouvement liturgique (revue La Maison-Dieu) ; mouvement théologique (collection « Cogitatio Fidei »). Elles ont été ainsi un des vecteurs majeurs en France de l’aggiornamento conciliaire voulu par Jean XXIII. Mais leur histoire n’a pas été un long fleuve tranquille : les Éditions du Cerf ont traversé bien des orages du fait de leurs positions d’ouverture sur les grandes crises du xxe siècle : condamnation par Rome de l’Action française, guerre d’Espagne, Seconde Guerre mondiale, guerre froide ou guerre d’Algérie. C’est ce parcours mouvementé, conjuguant histoire générale et histoire religieuse, que retrace ce livre, rédigé de première main par un universitaire familier de tels événements, avec les archives des provinces dominicaines françaises. Il éclaire tout un pan de l’histoire du catholicisme en France au xxe siècle.
Laurent Gruaz, Les Officiers français des Zouaves pontificaux)...
Laurent Gruaz, Les Officiers français des Zouaves pontificaux Histoire et devenir entre xixe et xxe siècle, Paris, Honoré Champion, Coll. Bibliothèque histoire moderne, 2017, 732 p.
Entre 1860 et 1870, plus de 10 000 volontaires catholiques ont défendu par les armes le pouvoir temporel du Pape Pie IX. Venus d’une trentaine de pays, tous ont répondu à l’appel du Souverain Pontife, menacé dans son intégrité par les troupes du roi de Sardaigne Victor-Emmanuel II de Savoie, désireux de réaliser l’unité italienne. Parmi eux, 3 000 Français se sont engagés pour six mois ou pour dix ans. Près de 150 sont officiers, aumôniers ou médecins. Ce sont eux, ces cadres du régiment, que cet ouvrage se propose d’étudier. Qui sont-ils ? D’où viennent-ils ? Qu’ont-ils fait pendant leurs années au service du Pape et elles ont pu être leurs motivations ?
Antoinette Guise-Castelnuovo, Thérèse de Lisieux et ses miracles…
. Les recompositions du surnaturel (1898-1928), Paris, Karthala, 2017, 524 p.
Thérèse de l’Enfant-Jésus, carmélite de Lisieux (1873-1897), est la sainte catholique la plus populaire du xxe siècle. Sa notoriété fulgurante, fondée sur le succès d’un livre posthume, Histoire d’une âme (1898), sans cesse réédité depuis, doit aussi beaucoup à une réputation de sainte à miracles.
« Après ma mort, je ferai tomber une pluie de roses ». Ce slogan, répété à satiété dans toutes les publications concernant Thérèse, fait écho à la parution, entre 1908 et 1926, d’annales miraculeuses intitulées Pluie de roses qui ont popularisé plus de 3 200 récits de miracles, fine fleur d’un surnaturel contemporain, sélectionné par le carmel de Lisieux à partir de dizaines de milliers de lettres reçues du monde entier. Ces récits, associés à une imagerie aussi séduisante que pieuse ainsi qu’à une diffusion de reliques en quantités quasi industrielles, constituent le substrat de cette étude.
Comment expliquer que cette jeune femme morte inconnue à 24 ans au fond d’un petit carmel normand ait pu devenir, en deux décennies, un recours universel avant même sa canonisation (1925) ? Voilà la question centrale du livre. Cette réflexion en entraîne d’autres: comment une dévotion se développe-t-elle à l’échelle mondiale, de manière aussi imprévue que subite ? Quel sens donner à cet appétit de surnaturel qui s’empare des sociétés catholiques à l’orée du xxe siècle ?
Le succès de Thérèse de Lisieux est lié à une cohérence d’un message porté par une image, cohérence qui s’est construite peu à peu, au contact des nombreux témoignages, récits de miracles, zélateurs, ainsi que des impératifs de son procès de canonisation (1910-1925). Une cohérence cimentée par le surnaturel, lui-même activé par la confiance, elle-même renforcée par la spiritualité thérésienne: telle est la recette.
Replacés au centre de la catholicité moderne, les miracles thérésiens révèlent également à quel point le catholicisme a joué un rôle central dans les mutations et les recompositions de la croyance à l’aube du xxe siècle.
Fabienne Henryot et Philippe Martin (éd.), Les femmes dans le cloître et la lecture...
Fabienne Henryot et Philippe Martin (éd.), Les femmes dans le cloître et la lecture (xviie-xixe siècle), Paris, Beauchesne, Bibliothèque Beauchesne n°46, 2017, 596 p.
L’acte de lire en milieu monastique se situe au croisement de deux éléments : d’une part, un environnement livresque, et d’autre part un accès, permissif ou transgressif, aux livres. Ces deux conditions réunies, se déploient des pratiques variables et inventives d’appropriation des textes. Ce sont et ces conditions, et leur résultat en situation monastique que nous souhaitons mettre ici en évidence, dans le contexte particulier d’un lectorat féminin ayant, après une année de noviciat et au moment de la cérémonie des vœux, accepté de se fondre dans un corps collectif, dont chaque membre n’est plus que la déclinaison d’un idéal de pauvreté, d’obéissance et de chasteté, auquel s’oppose le livre, symbole de richesse, d’émancipation et de dérèglement de l’imagination.
Yves Krumenacker, Luther
Yves Krumenacker, Luther, Paris, Ellipses, 2017, 456 p.
Martin Luther (1483-1546) fait partie des personnages historiques les plus connus, un de ceux dont l’influence sur le cours de la civilisation européenne, voire mondiale, a été considérable. Il a fait l’objet de très nombreux travaux. Mais les historiens ne sont sans doute pas ceux qui se sont le plus intéressés à lui. Luther, en provoquant la Réformation, a en effet inauguré le protestantisme, un courant encore très vivant aujourd’hui. C’est pourquoi les lectures historiques peuvent difficilement se démêler des lectures religieuses de Luther. Ayant provoqué un bouleversement majeur dans la foi des chrétiens d’Occident, il a suscité aussi bien l’admiration que le rejet. Premier Allemand à avoir eu un tel rôle dans l’histoire, il a été récupéré par tous les courants, du xvie siècle à nos jours. Faire une biographie historique de Luther, c’est donc à la fois tenter de retrouver le Luther du xvie siècle aussi bien que tous ceux qui ont été imaginés, reconstitués, brandis ou rejetés, jusqu’à notre époque, en recourant aux textes, aux images et même au cinéma.
Yves Krumenacker, Calvin
Yves Krumenacker, Calvin, Paris, Ellipses, 2017, 456 p.
Austère, sévère, intolérant, ainsi apparaît Calvin à beaucoup de ses détracteurs, qui l’accusent d’avoir brûlé Servet, transformé Genève en dictature, prédestiné la majorité des humains à l’enfer éternel. Mais d’autres célèbrent en lui un théologien génial, un maître de la langue française, le « fondateur d’une civilisation » (É. Léonard), l’un de ceux qui ont le plus contribué à l’avènement du monde moderne. En 2009, un chocolatier suisse a voulu célébrer sa naissance en créant un chocolat qui, sous une couche pralinée classique, contient en son coeur un caramel à la crème suisse pour exprimer la douceur et la tendresse de Calvin dans son action concrète.
Les images de Calvin sont parfaitement contradictoires. L’homme, qui n’a jamais voulu être honoré ni considéré comme un saint, qui a voulu s’effacer totalement derrière la Parole de Dieu, dont on ne sait même pas où il a été exactement inhumé et dont on a peu de portraits, a donné naissance à de nombreux mythes. Aussi est-il nécessaire de dresser un portrait rigoureux du réformateur afin de faire la part de la légende et de comprendre à la fois ce qu’il était et pourquoi il a été compris de manières si différentes. C’est tout l’objet de ce livre.
Jean Le Pottier et Pierre-Jean Souriac (dir.), … l’affaire Bernard de Vabres 1561-1562
Jean Le Pottier et Pierre-Jean Souriac (dir.), Violences religieuses à Grenade et à Toulouse, l’affaire Bernard de Vabres 1561-1562, Toulouse, Les Amis des Archives de la Haute-Garonne, 2017, 498 p.
Grâce aux Amis des Archives de la Haute-Garonne, l’histoire des guerres de Religion en région toulousaine s’enrichit d’un dossier inédit. Acquises par les Archives départementales de la Haute-Garonne en 2013, les deux liasses éditées ici se révèlent l’unique témoignage de la procédure menée par le parlement contre le jeune sénéchal de Toulouse, Bernard de Vabres, baron de Castelnau-d’Estrétefonds, après les tragiques événements de mai 1562 à Toulouse.
« L’affaire Bernard de Vabres » commence en fait à Grenade-sur-Garonne en octobre-novembre 1561, lorsque la population catholique de cette bastide massacre quelques habitants gagnés à la Réforme. Soucieux avant tout du maintien de l’ordre et inspiré par la politique royale d’équilibre entre les confessions qu’affirmera l’édit de Janvier 1562, le sénéchal désarme toute la population et poursuit les émeutiers catholiques. Un syndicat des habitants se forme contre lui, qui fait appel au parlement pour le désavouer.
L’affaire se noue ensuite lors des combats qui opposent catholiques et protestants en mai 1562 à Toulouse. Le sénéchal procède à la levée du ban et de l’arrière-ban au moment même où les protestants s’emparent du Capitole. Très vite suspect aux yeux des meneurs catholiques du parlement qui organisent la défense de la ville désormais inexpiablement coupée en deux, il semble avoir eu une attitude hésitante voire timorée, souhaitant peut-être maintenir une neutralité qui n’était plus de saison. Il est mis en prison dès le jour de la victoire catholique, sauve sans doute de peu sa tête et passe, entre mai et septembre 1562, un périlleux été à devoir répondre aux accusations. C’est une partie du dossier qu’il a alimenté lui-même de ses interrogatoires et des auditions des témoins, parfois annotés de sa main, de ses mémoires en défense et de diverses pièces justificatives, qui est ici publiée.
L’édition de ces textes, témoignage tragique sur la psychologie d’un jeune gentilhomme, victime de l’échec du pouvoir monarchique face à la montée des haines religieuses et civiles, est accompagnée d’une introduction historique de Pierre-Jean Souriac, maître de conférences à l’université Jean Moulin-Lyon 3, d’un riche appareil critique et d’un dictionnaire-index des acteurs des événements qui offre une véritable coupe sociologique sur la vie de la petite cité de Grenade et de la capitale toulousaine à l’orée de presque quarante ans de violences.
Daniel Moulinet, La liturgie catholique au xxe siècle…
Daniel Moulinet, La liturgie catholique au xxe siècle - Croire et participer, Paris, Beauchesne, 2017, 330 p.
La question de l’évolution de la liturgie au xxe siècle représente aujourd’hui, dans l’Église catholique, un sujet fréquemment polémique. C’est pourquoi il est nécessaire de l’éclairer par le recours à l’histoire. Celle-ci est souvent réduite à l’évocation d’un « temps court », en regardant seulement le concile Vatican II et les années qui l’ont immédiatement suivi. Il convient, au contraire, d’élargir la perspective, en retraçant l’histoire du mouvement liturgique dans la continuité duquel s’inscrit la réforme conciliaire, sans occulter pour autant la crise des années 1970.
Cette mise en perspective, appuyée sur l’évocation de faits précis, permet ainsi un retour à l’essentiel sur cette question importante.
Christian Sorrel, Parcours religieux dans la Savoie contemporaine
Christian Sorrel, Parcours religieux dans la Savoie contemporaine, Montmélian, La Fontaine de siloé, 2017, 372 p.
Le livre reprend 26 articles rédigés par l’auteur entre 1989 et 2015, tous remaniés pour actualiser les données et assurer une unité. Leur distribution en trois ensembles trace des parcours de réflexion, animés par une même conception, celle d’une histoire religieuse respectueuse de la spécificité de son objet et soucieuse de l’insertion de celui-ci dans les dynamiques globales des sociétés. Le premier est centré sur les « identités » et met en relation les territoires, les pratiques et les représentations. Le second est dédié aux « acteurs » collectifs ou individuels, évêques, prêtres, fidèles, dans leurs engagements quotidiens ou leurs réponses à des situations exceptionnelles. Le troisième se penche sur les « conjonctures » déterminées par l’interaction du politique et du religieux, du Buon Governo sarde aux lendemains de la Seconde Guerre mondiale. Ils ne prétendent pas se substituer à la synthèse d’histoire religieuse de la Savoie contemporaine qui reste à écrire. Mais ils en dessinent quelques lignes de force en écho aux préoccupations des historiens des départements savoyards et du fait religieux dans la France des xixe et xxe siècles.
Christian Sorrel, Olivier Vernier, Marc Ortolani (dir.), États de Savoie, Églises et institutions religieuses...
Christian Sorrel, Olivier Vernier, Marc Ortolani (dir.), États de Savoie, Églises et institutions religieuses des réformes au Risorgimento. Actes du colloque international de Lyon, 17-19 octobre 2013, Nice, Serre Éditeur, 2017, 372 p.
Le colloque « États de Savoie, Églises et institutions religieuses, des réformes au Risorgimento » est la septième rencontre organisée dans le cadre du P.R.I.D.A.E.S. (programme de Recherche sur les Institutions et le Droit des Anciens États de Savoie). Il s’est déroulé à Lyon, en octobre 2013, à l’initiative du laboratoire ERMES (Université Côte d’Azur) et avec le concours du LARHRA (Laboratoire de Recherche Historique Rhône-Alpes, UMR 5190).
Cet ouvrage, réunissant les actes de ce colloque, permet de monter comment, d’une époque à l’autre, les États de Savoie restent des États de l’entre-deux, entre pays de France et péninsule italienne. En raison de cette situation particulière, les hommes et les idées circulent, les influences se croisent, les modèles s’affrontent, les règles canoniques et les normes étatiques entrent en tension.
Les communications rassemblées dans la première partie du volume sous le titre « Principes, débats, conflits » permettent, en suivant des personnalités, ou en décryptant des principes juridiques et des discours, d’analyser les institutions religieuses, avant et après la Révolution. Sous le titre « Minorités, institutions, pratiques », les communications de la seconde partie s’intéressent au statut juridique des minorités confessionnelles, aux congrégations religieuses, aux institutions scolaires ou caritatives et au patrimoine religieux. Le résultat constitue un ensemble stimulant pour les historiens du droit comme pour les historiens du fait religieux, ital.iens et français, invités à ne pas négliger la spécificité des États de Savoie entre France et Italie, tout à la fois cohérents et divers.