Le Livre des Marchans d’Antoine Marcourt. Une satire anticléricale au service de la Réforme, édition critique du texte (1533-1544), introduction et notes par Geneviève Gross, Paris, Honoré Champion, Textes littéraires de la Renaissance, 2016, 261 p.
Texte intégral
1En 1533 paraît à Neuchâtel, sous le patronage de Pantagruel, une violente satire anticléricale comparant le clergé à des commerçants malhonnêtes, le Livre des Marchans. Treize fois réédité, avec des compléments, au xvie siècle, dont neuf fois du vivant de son auteur, il fait partie des pamphlets les plus importants du siècle des Réformes. L’édition critique ici présentée propose le texte originel, de 1533, et celui de 1544, le plus connu. Disons tout de suite qu’il s’agit d’une véritable édition critique, avec abondance de notes expliquant tous les aspects de l’ouvrage, avec les variantes des différentes éditions, la pagination d’origine, la bibliographie matérielle. Une longue introduction permet de mieux connaître le livre, son auteur, et les enjeux qu’il représente.
2L’auteur, Antoine Marcourt, est un des premiers prédicateurs réformés, actif dès 1530 à Neuchâtel, d’où il propage la Réforme dans toute la région. Il est aussi pasteur à Morat et remplace Farel et Calvin à Genève de 1538 à 1540. Il joue donc un rôle clé dans l’espace suisse romand, tout en s’opposant à Calvin, sa théologie étant plus zwinglienne. En 1533, en publiant le Livre des Marchans, il participe au renversement de l’institution ecclésiale en place – la même démarche que celle qui dicte les célèbres Placards contre la messe de 1534. En revanche, la réédition de 1544 se situe dans un autre contexte, celui d’une Réforme dominée par Calvin. La critique est amplifiée, les exemples de fraude et de duplicité du clergé catholique se multiplient, l’appel à la justice temporelle et aux princes est plus forte ; en revanche, les divergences entre réformateurs sont tues, ce qui permet l’incorporation du Livre des Marchans dans la polémique calviniste ; l’essentiel est ici de détourner les lecteurs de l’Église romaine.
3La publication de ce texte permet de mieux connaître une des satires anticléricales les plus importantes du xvie siècle, tout en comprenant mieux les stratégies et les mécanismes politiques des réformateurs. L’introduction éclaire la personnalité de Marcourt, un de ces réformateurs anti-calvinistes laissés un peu dans l’ombre par la victoire du pasteur de Genève, et rappelle l’importance de Neuchâtel dans les toutes premières années de propagation d’une réforme francophone. Mais le Livre des Marchans est aussi un texte littérairement savoureux qui s’offre aux lecteurs et un bon témoignage des capacités satiriques de la langue française de la première moitié du xvie siècle.
Pour citer cet article
Référence papier
Yves Krumenacker, « Le Livre des Marchans d’Antoine Marcourt. Une satire anticléricale au service de la Réforme, édition critique du texte (1533-1544), introduction et notes par Geneviève Gross, Paris, Honoré Champion, Textes littéraires de la Renaissance, 2016, 261 p. », Chrétiens et sociétés, 23 | -1, 220-221.
Référence électronique
Yves Krumenacker, « Le Livre des Marchans d’Antoine Marcourt. Une satire anticléricale au service de la Réforme, édition critique du texte (1533-1544), introduction et notes par Geneviève Gross, Paris, Honoré Champion, Textes littéraires de la Renaissance, 2016, 261 p. », Chrétiens et sociétés [En ligne], 23 | 2016, mis en ligne le 09 février 2017, consulté le 18 février 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/chretienssocietes/4144 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/chretienssocietes.4144
Haut de pageDroits d’auteur
Le texte seul est utilisable sous licence CC BY-NC-ND 4.0. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.
Haut de page