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Secours, assistance, interdépendance : l’Oratoire du Midi, un réseau congréganiste aux xviie et xviiie siècles

François-Xavier Carlotti
p. 109-137

Résumés

L’article étudie l’Oratoire de France en tant que corps structuré : des carrières et recrutements des pères et confrères, à leur participation aux mécanismes du pouvoir et de l’autorité qui les mobilisent dans un esprit démocratique, à l’économie domestique des « maisons », etc. Cette étude privilégie une circonscription administrative – le « troisième département » de l’Oratoire – où la Provence, qui lui donne son nom, se trouve associée au Languedoc, à la Gascogne et à la Guyenne, tout en conservant dans ce Midi français une position hégémonique.
Ce faisant, une réalité insoupçonnée apparaît dans toute sa lumière : des solidarités fortes unissent les quelque trente-cinq maisons méridionales, dont chacune contribue à sa place à l’animation d’un territoire vaste, tout en entretenant avec ses sœurs d’étroites collaborations.

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Entrées d’index

Géographie :

France

Chronologie :

XVIIe-XVIIIe siècles
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Texte intégral

  • 1 Willem Frijhoff, Dominique Julia, « Les Oratoriens de France sous l’Ancien Régime. Premiers résulta (...)
  • 2 François-Xavier Carlotti, Le troisième département de l’Oratoire de Jésus (xviie-xviiie siècle), un (...)

1Institut de prêtres séculiers sans vœux fondé par Pierre de Bérulle en 1611 dans le contexte de la réforme tridentine, l’Oratoire de France est voué à la sanctification du clergé, à l’encadrement des fidèles par la prise en charge de cures, la direction de collèges et de séminaires, ou l’apostolat. Il est connu de façon parcellaire, à travers certaines de ses figures saillantes, les activités de ses membres, notamment dans le champ de l’éducation, ou leur implication dans la querelle janséniste. Mais cette congrégation, en tant que corps structuré, n’a jusqu’ici que peu intéressé les chercheurs, à l’exception notable de Dominique Julia et Willem Frijhoff, auteurs d’une étude fondatrice1. Nous nous inscrivons dans leur sillage, interrogeant, pour en révéler l’être propre, un champ prometteur, l’un des trois « départements » de l’Oratoire (Ill. 1), la « Provence », élargie à l’ensemble du Midi français2.

Fig. 1 « Carte de la France oratorienne dédiée et présentée à Mad. la Baronne de Montberaut, sœur de l’Oratoire, par son humble et très obéissant serviteur [Spitalier] de Seillans, de l’Oratoire, Arras, 1780 »

Fig. 1 « Carte de la France oratorienne dédiée et présentée à Mad. la Baronne de Montberaut, sœur de l’Oratoire, par son humble et très obéissant serviteur [Spitalier] de Seillans, de l’Oratoire, Arras, 1780 »

Archives de l’Oratoire, carton XII.1, les couleurs ont été ajoutées afin de faciliter la lecture © auteur

2Il s’agit d’analyser ici la nature des relations que nouent les unes avec les autres les quelque 35 « maisons » qui le composent (Ill. 2), par ailleurs fermement arrimées à celle de Paris par la volonté du Cardinal, premier Général, et de ses huit successeurs élus à vie par l’Assemblée générale. Le Conseil qu’ils forment avec leurs deux – puis trois – assistants, entretient avec les maisons provinciales un lien étroit, hiérarchisé, maintenu par les visiteurs départementaux et les supérieurs, nommés.

3L’Oratorio romain de Philippe Neri tenait en effet à l’indépendance de ses maisons. Mais les communautés provençales, qui s’en inspirent, formées par Jean-Baptiste Romillon à partir de 1612, se lient entre elles, et à celle d’Aix, leur « mère-matrice », par esprit de protection. Et cet état de dépendance est encore renforcé après l’union d’Aix à Paris (1619), qui impose un changement d’échelle.

  • 3 Bernard Dompnier, « Réseaux de confréries et réseaux de dévotions », Siècles. Cahiers du CHEC, 12, (...)

4Se dessine ainsi une trame complexe, un système réticulaire, dont on se propose de débrouiller l’écheveau. Le terme réseau qui occupe à notre époque de nombreux champs sémiques, a su vaincre les réserves des historiens du religieux3. Il désigne ici une structure interne cohérente qui s’ajoute au lien social, le double, le renforce et conjugue les entreprises particulières en vue d’un intérêt supérieur. Quelles sont donc ces lignes de force structurant les solidarités nécessaires, quand les besoins croissent et se renouvellent sans cesse dans l’Oratoire du Midi ?

5Nous nous proposons d’étudier ces rouages par lesquels l’appareil oratorien assure sa permanence et sa vitalité, à l’occasion de son recrutement tout d’abord, qui suppose une mobilisation générale des structures de l’institut et offre un observatoire privilégié de rapports que la gestion des temporels ou, chose plus inattendue, des charges spirituelles, nous permettront ensuite d’appréhender plus finement.

Fig. 2 L’archipel oratorien méridional (xviie -xviiie s.)

Fig. 2 L’archipel oratorien méridional (xviie -xviiie s.)

© auteur

L’Institution : une charge partagée

6Recruter, former des impétrants, la tâche est essentielle, la responsabilité bien lourde pour les trois maisons d’Institution de l’Oratoire. Si celle de Paris est assurée de la générosité de Nicolas Pinette, trésorier de Gaston d’Orléans et l’un des principaux bienfaiteurs de l’Oratoire, si celle de Lyon se suffit à elle-même en raison du faible nombre des confrères qu’elle accueille, les charges d’Aix, dont la pauvreté est une constante, la rendent dépendante des maisons de Provence et Languedoc, mises en devoir de la soutenir.

7Les statuts des IIIe et Ve assemblées de la congrégation font en effet une obligation aux maisons du département de contribuer, chacune selon ses facultés et revenus, « à la subsistance et soulagement » de l’Institution d’Aix :

  • 4 B.M. Avignon, 8° 1125, Recueil des actes des assemblées générales de la congrégation de l’Oratoire (...)

Comme les maisons d’Institution sont les séminaires de la congrégation, et que les sujets que l’on y instruit à la piété doivent être répandus par les maisons particulières qui ne peuvent être conservées sans ce secours, l’assemblée a ordonné qu’elles assisteront lesd. maisons d’Institution par ordre du R.P. général selon tout leur pouvoir, comme aussi les maisons qui sont dans la pauvreté, mais avec cette différence que celles-ci seront secourues par charité [...] et celles-là par justice4.

  • 5 A.D. Bouches-du-Rhône (désormais A.D. BdR), 40 H 4, p. 61.
  • 6 Archives Nationales (A.N.), MM 582, f. 95 v°, délibération du Conseil, 24 juillet 1676. Hyères doit (...)

8En 1647, François Bourgoing, troisième Général, invite Toulon et Pézenas à secourir Aix, en lui fournissant respectivement 150 et 100 livres-tournois [désormais lt]5. Fidèle à cette intention, le Conseil rappelle régulièrement dans ses délibérations le nécessaire engagement de tous les établissements au service d’un bien commun. Dans les années 1670, Marseille, Grasse, Hyères, Cotignac et N.-D. des Anges (Mimet) sont ainsi sollicitées6.

  • 7 Les Pères de Montpellier s’obligent, le 23 février 1683, à dire 500 messes à la décharge de leurs c (...)

9En 1682, la création d’une Institution est envisagée à Toulouse, dont le financement repose en partie sur la solidarité des maisons de Languedoc7. L’entreprise n’est pas durable, ce qui laisse à Aix toute autorité sur le Midi.

  • 8 A.N., MM 583, p. 147, délibération du Conseil, 29 janvier 1683.
  • 9 A.D. BdR, 40 H 3, p. 247.
  • 10 A.N., MM 586, p. 231, délibération du Conseil, 9 septembre 1697.
  • 11 A.N., MM 588, p. 459, délibération du Conseil, 7 mars 1727.
  • 12 A.D. BdR, 40 H 9, visite du P. Bernard, 6 juin 1751.
  • 13 Ibid., visites des P. Rabbe et Lafouge, 21 juin 1760 et 12 avril 1763.

10En 1683, le visiteur départemental se voit confier le recouvrement des taxes à payer par les maisons pour son soutien, avec le soin de déterminer la quotité à verser par chacune d’elle en fonction de ses facultés8. Ces secours ont duré dans le temps, n’ont jamais fait défaut. De nombreuses pièces l’attestent. Certaines témoignent de la générosité de Cotignac. Le 18 juillet 1660, 1 000 lt sont ainsi prêtées par cette maison à celle d’Aix, prêt bientôt transformé en don par son supérieur9. En 1697, Cotignac secourt à nouveau l’Institution, pour 300 lt, « dans le pressant besoin où elle est réduite »10. En 1727, Paris enjoint de nouveau le visiteur Philippe Cotterel d’exhorter les maisons de Provence à aider l’Institution, obligée de recevoir gratuitement plusieurs postulants11. Et ces efforts se poursuivent au cours du second xviiie siècle. En 1751, la solitude de N.-D. des Anges, dans une certaine aisance, aide sa maison-mère, « fort chargée » : à la sollicitation du Conseil, Jean Perrinet, régisseur de la succursale, renonce à une créance de 1 000 lt sur l’Institution, et Antoine Charrière lui remet 600 lt en linge, et en argent pour restaurer sa façade principale12. En 1757, Montpellier y contribue pour 800 lt. Puis c’est à une « muraille » de la maison et à d’autres réparations que les Pères d’Aix consacrent en 1760 5 000 lt levées cette fois à Cotignac, dette effacée trois ans plus tard avec l’accord de Paris13.

  • 14 Ibid., « Compte général des sommes touchées par le P. directeur de l’Institution, et employées, par (...)
  • 15 Marseille fournit 300 lt, Cotignac 400, Hyères 200, N.-D. des Anges 100, Arles 150, soit au total 1 (...)
  • 16 A.D. BdR, 40 H 9. 396 lt sont reçues le 8 juin 1758 en pur don, 136 lt le 15 juin 1760, 700 lt le 8 (...)

11Voici alors plusieurs décennies que le recrutement fait défaut, livrant les bâtiments à l’abandon et au silence. Mais à l’heure où s’accroît le nombre des confrères, l’urgence est à la restauration. Le bâtiment sort de sa torpeur et vibre soudain sous les coups des marteaux, limes et rabots14. L’investissement est à la mesure des travaux entrepris, la facture excède 3000 lt. Pour les acquitter, la machine oratorienne se met en branle : cinq maisons de Provence couvrent ces frais à la hauteur d’un tiers de la somme15. Le Conseil contribue de son côté pour un montant équivalent. Aix règle le solde par la vente du vieux mobilier, l’emprunt et les dons de Pères. Et la générosité de la congrégation ne se limite pas à ces frais : de nouveaux dons lui permettent, dans le même temps, de financer d’autres réparations, dont la seule façon coûte 3 424 lt. Plusieurs subventions sont encore reçues au cours de la décennie suivante16. En définitive, l’Institution d’Aix n’assure jamais sa subsistance, c’est sa réalité permanente et indépassable. Ce constat d’indigence est régulièrement établi tout au long du siècle par les visiteurs, ainsi en 1770 :

  • 17 Ibid., visite du P. Herbault, 4 mai 1770.

[Le revenu de la maison] est si modique qu’elle ne peut se soutenir sans secours et qu’à l’aide d’une sévère économie [...]. Nous devons remercier la Providence qui nous a secourus par la libéralité de quelques maisons et de quelques particuliers17.

  • 18 Ibid., « Déclaration des biens et revenus de la maison en conséquence de la demande faite par lettr (...)
  • 19 B.M. Arles, ms. 167, visite du P. Etienne, 23 juin 1753.
  • 20 Ibid., visite du P. Herbault, 16 juin 1768.
  • 21 Ibid., visite du P. Beaudoux, 1er août 1787.
  • 22 Emile Fassin, Bulletin archéologique d’Arles, 1890, 2e année, n° 8, « Ephémérides », p. 121 ; A.N., (...)

12Même constat en 1775, où ses onze résidents ne disposent que de 1 288 lt pour leur entretien « qui serait impossible si les autres maisons de la congrégation et le régime lui-même ne fournissait à [leurs] besoins18 ». La formation des impétrants constitue également une lourde responsabilité morale et financière pour les Pères d’Arles, chargés au milieu du xviiie siècle d’inculquer des compléments en philosophie et théologie aux jeunes confrères sortant de l’Institution d’Aix, « les uns ne payant qu’une modique pension, les autres n’en payant point »19. Or, évoquant la bibliothèque, quelques années plus tard, le P. Herbault observe que « le Père supérieur l’a augmentée de beaucoup de livres de philosophie et de mathématiques, et de deux globes céleste et terrestre, en faveur des étudiants »20. Bien administré, l’établissement est l’un des plus considérables du département. Sa situation avantageuse n’échappe pas au Conseil qui juge que « le temporel de cette maison mérite attention puisqu’il peut être la ressource de plusieurs établissements nécessaires à l’éducation [des] confrères »21. Et même après la fermeture de sa maison d’études en 1775, dont le transfert est rendu nécessaire par la recrudescence en 1774 des fièvres paludéennes22, Arles continue à soutenir financièrement ses sœurs qui l’accueillent successivement dans leurs murs.

  • 23 A.N., MM 591, p. 434, ordre donné aux sept instituants aixois de rejoindre la classe à Avignon, 2 o (...)
  • 24 A.D. BdR, 40 H 9, visite du P. Segond, 30 mai 1776.
  • 25 B.M. Arles, ms. 167, visite du P. Dye de Gaudry, 12 juillet 1777 : « Le Régime, en transportant par (...)

13Avignon est un havre tout indiqué : la proximité du Rhône, des bâtiments vastes et des revenus confortables sont autant d’atouts. Une subvention arlésienne est du reste prévue. Les étudiants y sont transportés dès l’été 1775, bientôt rejoints par leurs confrères d’Aix et Lyon23. Mais le 23 octobre le projet est brutalement remis en cause : l’Oratoire aurait agi imprudemment et avec précipitation, en l’absence de l’ordinaire, sede vacante. La congrégation ne pensait pas avoir besoin d’une permission de la part de l’autorité ecclésiastique et civile pour fonder un cours d’études intérieures, ouvert à ses seuls membres. Contraints de quitter promptement la ville, les jeunes gens gagnent l’Institution d’Aix, accueillante mais... dépourvue de ressources. Se manifeste alors, une nouvelle fois, la solidarité sans faille de la congrégation tout entière. Une aide d’urgence « tant pour les meubles que pour la dépense alimentaire » lui est allouée par le Conseil24, avant qu’Arles ne soit encore sollicitée25. Ses attentes n’ont pas été déçues, si l’on considère l’importance des sommes fournies par Arles au titre des suppléments de pension des confrères de la classe de philosophie (Ill. 3).

Ill. 3 Subventions arlésiennes pour l’entretien des confrères philosophes et des instituants

Ill. 3 Subventions arlésiennes pour l’entretien des confrères philosophes et des instituants

© auteur

14Pour compléter ce secours, Gabriel-Jean Beaudoux imagine en 1782 une mécanique plus élaborée encore, impliquant les maisons de Tournon et Avignon dans le soutien à l’Institution d’Aix :

  • 26 A.N., S 6776, « Avignon », pièce 5, visite de la maison d’Avignon par le P. Beaudoux, 9‑12 juillet (...)

Vu les arrangements nécessaires pour quelques années, la maison [d’Avignon] ne peut avoir le nombre de prêtres suffisant pour acquitter ses messes de fondation. Cependant la justice exige que les biens de la maison fournissent chaque année à l’acquit de cette charge. Demander la réduction des messes ne serait ni édifiant ni équitable puisque les revenus sont suffisants. Nous proposerons ici un moyen assuré pour l’acquit de 1300 messes, en sorte que du moins les arrérages n’augmenteront plus. 1° Le R.P. supérieur sera tenu de faire acquitter 800 messes chaque année dans notre église, ou du moins à Avignon. 2° La maison de Tournon sera priée de se charger de 500 chaque année. La maison d’Avignon n’étant pas pauvre, il n’est pas juste que ses charges soient acquittées gratuitement. Celle de Tournon étant bien fondée ne voudra point profiter de cette rétribution. Notre maison d’Aix est dans le besoin, et il convient que chaque maison du département concourre à la soulager. Celle de Tournon cèdera donc à Aix la somme de 189 lt 4 s. fixée pour la rétribution de ces 500 messes, et pour ce, la maison d’Avignon cèdera ladite rente de 189 lt 4 s. qu’elle a sur l’Hôtel de ville de Paris et qui sera payée par le Père procureur général à la maison d’Aix tant qu’il n’y aura pas à Avignon assez de prêtres pour acquitter les messes fondées26.

15Cette construction astucieuse vise donc, en dernier lieu, à assurer pour partie l’entretien des étudiants affectés à Aix. Mais ce bel exemple de solidarité, témoignage édifiant de la force des liens fraternels unissant les cellules oratoriennes, est loin de suffire à soulager la maison-mère de sa nouvelle charge. Le Conseil, prenant bientôt conscience de son fardeau, se résout à l’en délivrer. La responsabilité des études complémentaires est finalement confiée à la résidence marseillaise de Sainte-Marthe, définitivement séparée du collège municipal en 1782 après le transfert de ce dernier dans les murs de l’ancien collège jésuite de Saint-Jaume, désormais aux mains de l’Oratoire.

16Institution et perfectionnement mettent ainsi en jeu la force d’un réseau, dont chacun des éléments est nécessaire au fonctionnement de l’ensemble. Les relations qu’ils nouent sont de fait placées sous le signe de l’interdépendance. Mais la responsabilité partagée de la formation des confrères n’est pas le seul facteur de cohésion du corps oratorien : quelle que soit l’époque, nombreux sont en effet les exemples d’intermédiation, de secours ou de simple et humaine fraternité qui en témoignent.

Entraide et fraternité

  • 27 Ibid., lettre du P. de Mayne au P. Sauvaire, 20 novembre 1709 : « C’est par bienveillance pour votr (...)

17La pénurie de liquidités sévissant en Provence et en Languedoc au début du xviiie siècle donne l’occasion de services, quand les prêts, et les taux avantageux auxquels ils sont consentis, apparaissent comme des faveurs27. La contribution des Pères d’Avignon est alors décisive, qui agissent en qualité de procureurs de leurs confrères, mobilisent les capacités financières de leurs amis et formalisent les contrats devant notaire.

18Le 31 juillet 1700, le Montpelliérain Jean Vitalis se rend à Avignon pour emprunter 13 000 lt à constitution de rente auprès de cinq personnes physiques et morales. Il s’agit de financer l’acquisition d’une maison pour la communauté. Cette somme est ensuite replacée à plusieurs reprises et complétée par d’autres emprunts. Voilà qui permet l’achat d’un jardin et de matériaux de construction, ou l’obtention de la bulle d’union à la congrégation du prieuré de Montaubérou. Ces opérations font intervenir les frères-servants des deux maisons, chargés du port des correspondances, les Pères avignonnais Jean Jouet (1701, 1704, 1707), Barthélémy Sinety (1704, 1705) ou Jean-Melchior de Mayne (1709-19), et leurs relations, parmi lesquelles François de Monier, qui prête 9000 lt, et Catherine de Rapahélis, veuve de Thouzon. Cette dernière devient le principal partenaire financier de la maison de Montpellier en se substituant en 1714 et 1719 à plusieurs créanciers.

  • 28 A.D. Ardèche, 21 H 3.

19À Joyeuse, l’emprunt est un expédient auquel on a recours lorsque la gêne fait place à la détresse, le plus souvent en fin d’année, car le collège est privé de pensionnaires. Le P. de Mayne est ainsi sollicité pour mobiliser l’épargne avignonnaise, et la mettre au service des nécessités de cet établissement isolé. Par son entremise, Mme de Thouzon prête 2 000 lt en décembre 1710, Mme de Payen et le chanoine Chenaux, respectivement 900 et 500 lt en janvier 171728.

  • 29 A.N., MM 587, p. 343, ordre du Conseil, 2 juin 1713.

20En 1713, les Pères desservant la cure de Sainte-Anne d’Arles ont recours, dans les mêmes circonstances, au même intermédiaire29. Sans se limiter aux frères Monier auxquels ils avaient eux aussi fait appel bien des fois depuis 1690, leurs démarches élargies assurent la levée de 12 000 lt auprès de la bourgeoisie et des couvents d’Avignon. Ces contrats au denier 25 permettent de solder des précédents conclus au denier 20. Ils sont eux-mêmes remboursés en 1719, grâce notamment aux avances consenties par le séminaire diocésain, lui-même oratorien.

21Plus encore que ces services rendus, la mobilisation directe des communautés riches en faveur de moins favorisées témoigne de l’existence d’une réelle confraternité.

22Ainsi, N.-D. des Anges a durant presque toute son histoire bénéficié d’une relative aisance financière, qui l’a mise en état de secourir de ses épargnes ses sœurs provençales.

  • 30 A.D. BdR, 41 H 3, p. 142.
  • 31 Ibid., p. 311-312.
  • 32 Ibid., p. 163-164 ; 298-299.
  • 33 Ibid., p. 330.

23Principal bénéficiaire de ses soins, Marseille lui emprunte diverses sommes à sept reprises au moins. Entre 1660 et 1672, un capital de 150 lt est obtenu, peut-être employé à la reconstruction de l’église30, puis, en 1695, 1 000 lt pour partie de l’acquisition d’une maison de campagne. Ce principal remboursé en 1702, la maison se voit confier l’année suivante, et jusqu’en 1707, 1020 lt, puis 1 000 lt en 1709, rendues en 171331. Lors de la peste de 1720, un prêt de 1 500 lt lui est octroyé, réévalué à 1 800 lt, et finalement porté à 3 000 lt en 1725. Entre temps, la rechute de la contagion, en avril 1722, occasionne une nouvelle aide de 2 000 lt32. La même somme est empruntée en 1780 contre la rente de 80 lt33.

  • 34 Ibid., fondation Jean Jaubert (12 juillet 1659), p. 213.
  • 35 A.D. Var, 9 J 26, fonds Gérard Boyer, d’Aups, dossier « Prêtres de l’Oratoire, délibérations (1679- (...)
  • 36 A.D. BdR, 41 H 3, p. 284.
  • 37 Ibid., p. 285, constitutions de rente des 7 juin 1712 et 17 août 1713, 2100 et 3500 lt.
  • 38 A.D. Var, 9 J 26.

24Mais, loin de se réduire à un dialogue exclusif avec leurs voisins du grand port marchand, les libéralités des régisseurs de Notre-Dame, parmi lesquels Joseph Marrot joue un rôle majeur à l’aube du xviiie siècle, innervent toute la Provence. La supériorité du P. Marrot voit en effet se multiplier les flux financiers en direction de maisons désireuses d’emprunter à un taux souvent inférieur à celui du marché les capitaux nécessaires à des réparations urgentes ou constructions indispensables. Après avoir remboursé en 1700 un capital de 1 200 lt34, Aix reçoit en 1709 1 000 lt de sa succursale35. Arles lui emprunte 1 200 lt en 171136. L’année suivante, c’est au tour de Cotignac d’obtenir une aide de 1 000 lt pour réparer une toiture qui menace ruine, tandis que les régents du collège de Toulon se voient accorder un prêt de 2 100 lt pour l’achat d’une maison de campagne et d’une terre voisine37. Marrot rend également possible l’élévation et la couverture du collège de La Ciotat, que la mort brutale de son promoteur laïc avait laissé inachevé. 2 400 lt sont fournies à cet effet en trois contrats (1713-1715)38.

  • 39 A.D. BdR, 41 H 3, p. 34.
  • 40 A.N., MM 588, p. 25-67. Pour la seule année 1715, emprunts autorisés : Ollioules (1000 lt), La Ciot (...)
  • 41 A.D. BdR, 41 H 3, p. 36.
  • 42 Ibid., p. 257.
  • 43 A.C. Arles, GG 69, f. 219 ; A.N., MM 590, p. 220, délibération du Conseil, 11 mars 1748 ; B.M. Arle (...)

25L’emprunteur d’un capital s’oblige naturellement au paiement d’une rente annuelle, puis au remboursement du principal. En 1716, le Père général de La Tour oblige pourtant le régisseur de Notre-Dame à renoncer à 985 lt d’arriérés de rente accumulés au cours des années précédentes par les quatre dernières communautés débitrices39. Sans doute l’inégalité des fortunes lui avait-elle paru trop criante pour lui permettre de continuer à exiger ses créances, d’autant que les collèges du littoral éprouvent alors de « pressants besoins » de trésorerie40. Le 18 novembre 1719, après la mort de Marrot, c’est aux capitaux mêmes, prêtés à Aix, La Ciotat, Toulon et Arles que son successeur est contraint de renoncer à la demande du visiteur Jean de Roquesante, qui exécute en cela les volontés de Paris. De fait, seule Cotignac s’acquitte de son dû le 3 mai 1720, « de sorte que, d’un trait de plume, on enlève à [N.-D. des Anges] 11 200 lt »41. Sont également effacées du même trait deux obligations contractées par Aix vis-à-vis de sa succursale : la remise d’un fonds de 1000 lt à elle légué par Marrot, un autre de 600 lt qu’une testatrice lui avait destiné le 20 avril 171942. En mars 1748, Jean-Baptiste Bernard accepte pourtant, au nom de ses confrères arlésiens, de rendre le capital dû, augmenté de 300 lt d’intérêts, non à N.-D. des Anges qui renonce à sa créance, mais au Général qui consacre cette ressource au soulagement des maisons de Provence les plus pauvres43.

  • 44 A.C. Pertuis, GG 36, recette, 14 juin 1752 : « reçu [...] cent vingt livres en aumône qui nous a mi (...)
  • 45 Ibid., recette d’octobre 1772. Le P. Salvator arrive à Pertuis le 11 septembre 1772. Il y meurt le (...)

26Cette contribution indirecte à la solidarité départementale est encore prolongée dans les années suivantes par d’autres initiatives, dirigées notamment vers Pertuis. Jean Perrinet en est le principal agent, un bref séjour dans cette maison lui ayant permis de constater son dénuement. Régisseur de N.-D. des Anges en 1751, il fait régulièrement l’aumône à ses anciens confrères, les aidant à faire face à leurs besoins les plus urgents44. Et quand le P. Louis Salvator, de Notre-Dame, choisit Pertuis pour sa dernière résidence, la pension annuelle de 300 lt par laquelle il contribue à sa subsistance est payée pour moitié sur la recette de la solitude45.

27Le Conseil aussi manifeste une sollicitude inquiète à l’égard de Pertuis. C’est que cette maison aux ressources structurellement déficitaires ne subsiste alors depuis un demi-siècle que des secours qu’il a su mobiliser pour elle, ou qu’il lui a directement apportés.

28Cette aide est d’abord exceptionnelle. En septembre 1737, 150 lt couvrent les amortissements de deux fondations, l’année suivante la même somme sert à « réparer et augmenter la lingerie », puis en mai 1742 à restaurer une maison de rapport. En janvier 1749, il s’agit à nouveau d’acheter du linge. Les « besoins urgents » de la maison justifient une nouvelle aide de 300 lt en 1750 « pour [la] faire subsister ».

  • 46 En 1780, 42 lt dues à la maison parisienne de St-Honoré par celle de Grasse sont offertes à Pertuis
  • 47 B.M. Arles, ms. 167, visite du P. Rabbe, 27 juin-1er juillet 1759 : « Extrait des registres du Cons (...)

29À partir de 1752, le secours devient plus important et systématique : 100 lt sont versées annuellement, souvent complétées d’une gratification exceptionnelle46. Dans les années 1770, son montant est même porté à 124 lt. Entre temps, l’assemblée de 1758 a invité les maisons les mieux dotées à adresser chaque année leur excès d’épargne au Conseil à fin de redistribution aux communautés déshéritées47.

30Paris encourage aussi la mobilisation provinciale : les dons consentis au cœur du xviiie siècle par N.-D. des Anges ont déjà été évoqués ; d’autres maisons ont agi pareillement, dont les noms fixent les contours d’un Oratoire plus prospère. Parmi elles, le collège de Hyères accorde à Pertuis des aides de 100 et 30 lt en juillet 1758 et mai 1759. Plus significative est, en 1751, sa prise en charge gracieuse des 200 lt de la pension du P. Honoré Auphant, son ancien résident, qui lui avait préféré cinq ans plus tôt une retraite à Pertuis, pension acquittée solidairement par Arles et Cotignac en 1754. De 1761 à 1774, cette dernière consacre également, outre divers dons, 220 lt par an à l’entretien de Jean-Louis Bounaud, son ancien supérieur, qui avait déjà alloué en 1758 150 lt à la résidence des bords de Durance, avant de la choisir pour ses vieux jours. D’autres maisons encore favorisent de leur charité la sauvegarde de leur sœur en détresse : l’Institution de Lyon, dirigée par le provençal Gaspard Boyer, lui accorde une aumône de 120 lt en août 1768, quand le collège de Soissons, administré par Pierre Peyre, ancien régisseur de Pertuis, lui offre 48 lt en février 1778. Le geste est répété l’année suivante, tandis qu’Avignon accorde 100 lt.

  • 48 A.C. Pertuis, GG 34, p. 47.

31Ces libéralités sont plus souvent encore transmises par l’intermédiaire du visiteur, chargé d’animer les solidarités départementales. Mais les flux ainsi suscités sont impossibles à retracer faute d’en connaître toujours le point d’émission, et l’on se contentera d’en signaler l’intensité. Ainsi Balthazar Rabbe mobilise-t-il 151 lt pour Pertuis en 1760. Il participe même de ses deniers, à l’instar de l’Arlésien Jean-Baptiste Bernard, qui abandonne à la communauté son indemnité de visite en mai 1750 et lui marque l’année suivante son attachement par plusieurs gratifications, pour plus de 100 lt. En 1753, il destine enfin à sa subsistance, ainsi qu’à celle de la maison de La Ciotat, le remboursement des 700 lt qu’il avait avancées en 1751 et 1752 pour servir au parachèvement de la chapelle de l’Oratoire d’Avignon. Il obtient en outre de sa sœur, Mme de La Lauzière, une contribution annuelle de 150 lt à la sauvegarde de la maison de Pertuis (1752-1767)48.

32En définitive, l’aide financière de la congrégation forme dans les années du second xviiie siècle une part non négligeable de la recette de Pertuis, près de 20 % entre 1748 et 1780. Ce secours prend même un caractère décisif lorsque les ressources d’un temporel déjà maigre viennent à faire défaut, ainsi de 1755 à 1765. Sur lui encore repose le relèvement espéré de l’établissement dans les dernières années de l’Ancien Régime, quand le Conseil prend à sa charge la promesse portée par les innovations agronomiques et les investissements immobiliers du P. Jean-Claude Wouliod (1782-1789), en leur consacrant 360 lt en trois ans.

  • 49 A.D. Ardèche, 21 H 8, reconnaissance de dette à l’endroit de la procure générale de l’Oratoire, réd (...)
  • 50 Ibid., 21 H 6, p. 20.

33Joyeuse est frappée dans le même contexte par la même pénurie. Le collège qu’elle régit est contraint de fermer ses portes par deux fois, de 1770 à 1777, et définitivement en 1781, la privant de la manne que constituent les mois des pensionnaires. Il lui faut à nouveau recourir à des secours : plusieurs centaines de livres lui sont consenties en pur don par Avignon (1774), Cotignac (1777) ou Paris (1777, 1779), et davantage encore par des prêts, émanant surtout du Conseil ; en août 1774, 1 200 lt pallient le sévère manque à gagner causé par la suspension des activités d’enseignement. Après leur cessation, les « avances » de Paris se multiplient à mesure que diminuent les ressources, pour un total de 7 206 lt49, sans y comprendre les 1 082 lt apportées en 1786 par l’opulent collège de Tournon50. Considérable, le montant de ce capital dépasse nettement ce que la maison perçoit de recettes en une année. Et en mars 1789 le P. Maisonneuve, son supérieur, reçoit du Conseil 600 lt supplémentaires.

34D’autres liens de coopération plus discrets et d’une fraternité simple peuvent exister entre les membres des communautés. En voici pour finir deux courts exemples.

  • 51 Ibid., 21 H 1, 1er livre-journal des recettes et dépenses de la maison de Joyeuse, 1625‑1648.

35De 1629 à 1641, le P. Antoine Bourdin régit la maison de Joyeuse. Ce Lyonnais entretient des liens privilégiés avec sa ville natale et regarde vers le Rhône. Le fleuve favorise les voyages, les relations avec les oratoriens de la capitale des Gaules, leurs confrères de Mâcon et Chalon, les échanges de marchandises et de capitaux dont le port fluvial de Pont-Saint-Esprit constitue la porte, et la résidence de Bourg-Saint-Andéol un autre pôle privilégié.51. Au milieu du siècle, le P. Bourdin poursuivant sa carrière à Rome, Joyeuse se tourne délibérément vers le Midi. Le Rhône reste le vecteur essentiel de ses rencontres avec Avignon, Arles et les autres maisons de Provence. Par lui remontent vers le Vivarais les provisions de Carême (soles marinées, anguilles salées, anchois) et d’autres mets d’exception (citrons, oranges), colis spécialement préparés à l’intention de Joyeuse par les communautés littorales. Signalons en outre une correspondance régulière à visée juridique avec Toulouse, capitale du Languedoc et siège de son Parlement. Les Pères affectés au service de la paroisse de la Dalbade se chargent en effet de suivre les affaires des autres maisons de la province évoquées devant la Cour.

  • 52 A.D. Hérault, G 4389.
  • 53 Ibid., lettre du P. de Mayne au P. Sauvaire, 24 octobre [1711 ?].

36Un même lien étroit, et presque d’affection aussi, peut être surpris à la lecture de la correspondance échangée, au début du xviiie siècle, par Jean-Melchior de Mayne, supérieur d’Avignon, et Honoré Sauvaire, en charge du temporel de Montpellier. Elle a pour principal objet la gestion du prieuré de Montézargues, situé dans la paroisse languedocienne de Tavel, sur la rive droite du Rhône donc, mais dans le diocèse d’Avignon. Uni à Montpellier, ce bénéfice est de ce fait pris en charge par les oratoriens d’Avignon. L’action du P. de Mayne pour le compte de son confrère se lit au fil de reliques épistolaires, pièces de pauvre apparence mais pleines d’enseignement52. Il ne laisse rien au hasard, fait preuve d’un zèle à toute épreuve dans sa recherche permanente du meilleur candidat à la rente, assure la relation avec les voisins (les chartreux de Villeneuve), se rend sur le terrain pour éclairer de la façon la plus précise son correspondant, auquel il rend compte de sa visite53, observe, conseille, s’implique, « bataille » contre les mauvais payeurs, contient les créanciers « sans cesse à [ses] trousses ». Et ce, sans jamais outrepasser ses droits, lui qui n’agit que par délégation. Une réelle confiance relie ces deux Pères : l’intérêt de l’un est celui de l’autre, mais dans un respect absolu des prérogatives de chacun.

  • 54 Ibid., 7 décembre 1709.
  • 55 Ibid., s.d.
  • 56 Ibid., s.d.
  • 57 Ibid., 1er juin 1714.

37Si la gestion des biens et des hommes tient la plus grande place dans cet échange, transparaît au détour d’une phrase le signe de rapports familiers tissés entre les maisons et les hommes qui en ont la charge, dans une solidarité de fait : « Mandez-moi ce que vous souhaitez, et si vous agréez que j’agisse comme je le ferai si j’agissais immédiatement pour notre maison »54. Les requêtes les plus diverses sont encore formulées : « Si vous faisiez un voyage ici, vous devriez demander à M. de Montpellier une lettre pour notre archevêque pour être traités un peu plus doucement »55, « Je vous prie de me mander si on trouve dans votre ville un livre intitulé [...] et de me faire savoir ce qu’on le vend »56, ou encore « Je vous prie de me faire acheter par le frère de Noyer six livres d’avoine grue de Castres, de la plus fraîche et de la meilleure »57. Dans sa lettre du 9 août 1714, l’Avignonnais donne les résultats des députations d’Aix et Cotignac pour la prochaine assemblée. Les relations se distendent ensuite quelque peu, puis le tropisme avignonnais cesse tout à fait, un frère de Montpellier, se chargeant de la mise en valeur du prieuré où il réside en 1716-1717.

38Si Montpellier a beaucoup reçu, à différentes occasions, elle peut aussi se trouver en situation d’offrir à ses sœurs le secours dont elles ont besoin. C’est ce que manifeste précisément son implication active dans la vaste entreprise consistant à répartir au sein du département de Provence les messes excédentaires confiées aux sacristies de l’Oratoire.

Entraide et spiritualité

  • 58 B.M. Arles, ms. 167, visite du P. Beaudoux, 18-22 mai 1788.

39Communautés de prêtres, toutes les maisons de l’Oratoire se sont vu régulièrement confier des messes, fondées ou casuelles, dont le nombre peut fortement varier de l’une à l’autre, selon les fonctions qu’elles remplissent. Les honorer s’impose de tout temps pour elles comme une impérieuse nécessité morale, et même un « acte de justice »58, exigeant la tenue d’une comptabilité rigoureuse en même temps que subtile. Des changements incessants dans les modes de calcul – rectifications, suspensions momentanées de fondations grevées de taxes, ou adjonctions de nouvelles obligations – compliquent grandement la tâche du chercheur, encore entravée par nombre d’erreurs de calcul ou d’écriture, et l’état plus que lacunaire de la documentation. Celle-ci tient pour l’essentiel en quelques cahiers de sacristie, livres ou actes isolés de visites. La difficulté paraît insurmontable pour qui voudrait dresser un état précis et exhaustif des fondations acquittées par les oratoriens méridionaux entre 1620 et la fin de l’Ancien Régime. Telle n’est pas notre intention, mais plutôt de mettre en lumière le réseau spirituel né des échanges obituaires intervenus entre les maisons.

  • 59 A.C. Condom, 25.626 B, livre des visites de la maison de l’Oratoire de Condom (1631‑1747), p. 433, (...)

40Les oratoriens éprouvent en effet une difficulté chronique à exécuter les volontés des fondateurs. C’est ici que la notion de réseau prend toute sa valeur : « toutes nos maisons sont des membres d’un même corps, ainsi rien de plus juste que de s’entresoulager »59. Et c’est naturellement la responsabilité du Père général que de veiller à organiser la solidarité entre des maisons plus ou moins chargées. La première intervention connue, le 30 octobre 1649, est le fait de François Bourgoing qui codifie les échanges entre les établissements tout en conservant sur eux un contrôle étroit :

  • 60 A.N., MM 576, f. 19.

Nos Pères de la maison de ... sont priés de célébrer autant de messes qu’ils pourront après les charges de leur maison acquittées pour la décharge de la congrégation, et les appliquer aux intentions de notre R.P.G. Le Père supérieur de ladite maison mandera combien ils en peuvent acquitter, et de trois en trois mois de celles qui auront été dites afin d’en tenir compte comme aussi si par ci devant il en aurait fait dire et combien60.

  • 61 A.N., MM 583, p. 19, ordre du Conseil, 15 mars 1680.
  • 62 A.N., S 6796, « Toulouse », pièce 3, « Mémoire instructif concernant la maison de Toulouse », p. 29

41À partir de 1680, les visiteurs se voient officiellement investis d’une charge nouvelle, la supervision des comptes de messes et la gestion des flux, sans que cela ne limite en rien l’autorité éminente du général et de son Conseil en la matière61. Un nouveau formulaire de visite est d’ailleurs adopté l’année suivante, qui oblige à leur rendre compte. Dans le troisième département, c’est Honoré d’Urfé qui s’acquitte le premier d’une charge scrupuleusement remplie après lui par chacun de ses successeurs jusqu’à la Révolution. Le soin vigilant qu’ils apportent à cette comptabilité ne les garde cependant pas de commettre nombre d’erreurs, parfois d’importance. Ainsi Jean-Claude Lafouge omet-il de reporter dans son acte de 1764 les quelque 34 068 messes dont la maison de Toulouse restait chargée trois ans plus tôt au terme de la visite du P. Rabbe !62 L’erreur est humaine, en effet, qui ne doit pas occulter le sens du devoir ni l’infinie patience manifestée par ces hommes de bonne volonté comme d’autorité. Leur expertise paraît la meilleure garantie de l’observance des engagements passés vis-à-vis des fondateurs, tandis que leur position de maillon central dans la structure administrative et hiérarchique de la congrégation fait d’eux le rouage essentiel de la chaîne des obligations réciproques unissant les communautés d’un même département, les supérieurs majeurs aux simples sujets de l’Oratoire.

  • 63 A.N., MM 586, p. 87. Les messes sont ainsi réparties : Riom (1 000), Nantes (1 000), Poligny (530), (...)
  • 64 Ibid., p. 377.

42S’agissant d’exprimer la solidarité du corps oratorien, une opération d’envergure mérite d’être signalée. Elle intervient le 28 septembre 1696, à l’aube du généralat du P. de La Tour, quelques jours après l’assemblée qui avait vu la démission de son prédécesseur, Abel-Louis de Sainte-Marthe. Il s’agit de soulager Rouen, accablée par un passif de 13 245 obits non acquittés. Pas moins de neuf maisons sont mobilisées pour lui venir en aide, et la décharger de 5 400 messes, jointes à 120 autres dont le Conseil délivre Pertuis63. Cette mission est destinée à être exécutée dans le courant de l’année suivante ; les visiteurs sont chargés d’y veiller et d’en dresser un état exact, ensuite présenté à Paris. Mais la volonté des supérieurs majeurs ne semble avoir trouvé qu’une exécution partielle, si l’on en croit les annotations sans date portées en marge de l’acte sur le livre du secrétariat, qui mentionnent en outre le secours dont a besoin la maison des Ardilliers à Saumur, en retard de 2 500 messes. De tout cela, il est encore demandé compte dans un nouvel ordre adressé le 31 janvier 1701 à chacun des visiteurs départementaux64.

43Loin d’être des cas isolés, les situations que nous venons d’évoquer se multiplient tout au long du xviiie siècle, à mesure que le nombre de prêtres diminue au sein des communautés oratoriennes, et qu’augmente celui des fondations, parfois imprudemment acceptées. La tâche est d’autant plus lourde dans les maisons-cures, qui se voient inévitablement surchargées de messes casuelles.

44Quelles solutions s’offrent alors à ces Pères dépassés et néanmoins soucieux de remplir leur devoir ? Trois remèdes ont pour l’essentiel été employés, parfois conjointement.

  • 65 Arch. Oratoire de France, dossier « Aix », pièce 6, compte de messes de fondation, 1er janvier 1778 (...)

45Une première option, à laquelle on ne se résout qu’avec peine, consiste à réduire le nombre des fondations, ce qui nécessite, après avis du visiteur, l’accord de l’ordinaire. Toutes les maisons ont été un jour confrontées à des révisions périodiques du tableau des messes d’obligation au prétexte d’une érosion des capitaux. Aix offre un exemple édifiant : sa sacristie, généreusement chargée entre 1623 et 1750 de services obituaires, exige pour sa gestion quatre interventions d’importance en deux siècles65.

  • 66 A.C. Pertuis, GG 35, p. 94, visite du P. de Sainte-Marthe, 28-30 janvier 1675.
  • 67 A.D. Alpes-Maritimes, H 1431, état de la maison de Grasse dressé par le P. Ballardy, 10 janvier 172 (...)
  • 68 A.D. BdR, 42 H 62, « Livre de nos fondations », compte de 1717.
  • 69 A.N., S. 6796, « Toulouse », pièces 4-5, visites des P. Mancest et Beaudoux, 19-23 juin 1784 ; 18-2 (...)

46Ailleurs, on sollicite des prêtres étrangers à la congrégation, pour leur confier quelques messes à dire, casuelles de préférence, ainsi à Pertuis en 167566 ou à Grasse en 172867. Les communautés religieuses sont parfois mobilisées. En 1716, les carmes d’Arles se voient confier 90 messes68, l’on a recours aux cordeliers à Toulouse dans les dernières années de l’Ancien Régime69. Mais cette solution est onéreuse, insupportable même lorsque, dans le cas d’une fondation, le principal se trouve réduit ou perdu.

47Dernier moyen, pour maisons appauvries ou surchargées de messes : faire appel au réseau oratorien. Celui-ci épouse pour l’essentiel dans la France méridionale, les limites du troisième département, dont tous les établissements sont mobilisés sous l’égide du visiteur (Ill. 4). Des échanges peuvent aussi exister avec des maisons étrangères, ou le Conseil être destinataire d’un excédent de messes, qu’il attribue à sa discrétion.

Fig. 4 Le réseau spirituel méridional (flux de messes identifiés)

Fig. 4 Le réseau spirituel méridional (flux de messes identifiés)

© auteur

  • 70 A.C. Condom, 25.626 B. La rémunération prévue en 1688 laisse place ensuite à des échanges gracieux  (...)
  • 71 A.N., M 229, visite de la maison d’Avignon par le P. Gourreau, 25-30 juillet 1694.
  • 72 A.D. Vaucluse, 55 H 2, p. 65. 15 septembre 1685.
  • 73 A.C. Condom, 25.626 B, p. 260, visite du P. Batarel, 20-27 juillet 1739.
  • 74 Ibid., p. 214.
  • 75 A.C. Pertuis, GG 36, p. 3, recette janvier-février 1727.
  • 76 A.D. BdR, 42 H 62, lettre du P. Amphoux au P. Garidel, 29 décembre 1721.
  • 77 Ibid., « Livre de nos fondations », compte de 1717.
  • 78 A.D. Alpes-Maritimes, H 1431, état de la maison de Grasse dressé par le P. Ballardy, 10 janvier 172 (...)
  • 79 A.N., S 6791, « Ollioules », pièce 3, visite de la maison d’Ollioules par le P. Beaudoux, 19-23 jui (...)
  • 80 Ibid., visite de la maison d’Avignon par le P. Beaudoux, 9-12 juillet 1782.

48Mais en général les flux de proximité prédominent, témoignant du poids des habitudes que créent des voisinages, des relations suivies, et par là une entraide devenue naturelle. On accepte volontiers de soulager une maison amie sans attendre de rétribution, du moins lorsque la modestie du temporel n’exige pas qu’il en soit autrement. Ainsi en va-t-il généralement à Condom70, de même qu’à Avignon en 1694 pour l’avantage d’Aix et Arles71. Ailleurs, des services obituaires viennent parfois compenser un don reçu. Toujours à Avignon, en 1685, c’est pour marquer sa reconnaissance au P. Jean Cabassut qui lui a adressé un exemplaire de deux de ses ouvrages que la communauté se charge gratuitement de 50 messes à la décharge de la sacristie aixoise72. Et la gratitude des Pères de Condom emprunte les mêmes voies en 1739, lorsque Louis Emeric, régisseur de la Dalbade, contribue d’une étoffe au renouvellement des effets de leur maison juste restaurée73. Les messes servent encore de monnaie d’échange, par exemple en 1657 entre les maisons de Condom et de Toulouse, lorsque la première reçoit d’une carmélite un don de 800 lt, que le Conseil lui impose de partager avec la seconde. Les créanciers acceptent alors de voir leur dû converti en 450 messes dites en leur place par leurs confrères74. De même, en 1727, Pertuis obtient de Joseph Guichard, un ancien confrère d’Ollioules devenu son débiteur pour 100 lt, de troquer la somme due contre un annuel de messes à dire à sa décharge75. Dans d’autres cas, enfin, une rétribution est attachée au service rendu. Une lettre de François Amphoux, supérieur de Hyères, adressée le 29 décembre 1721 à Ignace Garidel, économe d’Arles, témoigne de ces échanges tarifés et dont le règlement n’est jamais simple à débrouiller : « Vous pouvez compter sur 200 messes que nous dirons à votre intention. J’écrirai au R.P. Mane [prédécesseur du P. Amphoux, alors supérieur d’Aix] pour les 40 lt. Il m’a payé les 20 lt pour les autres messes que nous avons dites »76. On apprend aussi, cette fois par le cahier de la sacristie, que les Pères de Hyères, déjà sollicités en 1716, avaient refusé de dire 100 messes pour le compte de leurs confrères d’Arles et décliné la rétribution proposée77. Ces derniers avaient alors dû se tourner une nouvelle fois vers Avignon pour faire acquitter leur excédent. De façon plus convaincante encore, les livres du séminaire de Montpellier, dépouillés pour les années 1692-1731, contiennent nombre de mentions relatives à de telles transactions, impliquant en qualité de débitrices les maisons d’Arles, Ollioules, Marseille, Joyeuse, Toulouse, Avignon, Limoges ou Grasse. Cette dernière, dépourvue des quatre prêtres nécessaires au service de ses 1097 messes d’obligation, envisage en 1728 « de faire acquitter un ou deux annuels par [...] une maison qui manque de messes et d’en tirer le meilleur parti qu’on pourrait par rapport à la rétribution »78. À la fin de l’Ancien Régime, Ollioules ne peut, en dépit de confortables revenus, compter sur le secours d’un troisième prêtre pourtant indispensable à l’acquittement de ses 875 fondations. Le visiteur envisage alors de solliciter une autre maison pour lui venir en aide, considérant qu’« il serait dans l’ordre de la justice qu’on lui fit part du temporel dans le cas où elle en aurait besoin »79. Le même principe aurait prévalu l’année suivante pour Avignon surchargée de 1 300 messes, si le prospère collège de Tournon n’avait pas été retenu pour la seconder. Sa bonne santé, en effet, permet un plan à l’architecture plus audacieuse : le visiteur le charge de délivrer Avignon de 500 messes tous les ans, à titre transitoire, assurant ainsi indirectement à l’Institution d’Aix, dont la charge est supportée solidairement par toutes les maisons de « Provence », un revenu suffisant80.

  • 81 A.D. Hérault, G 4379, livre des visites de Saint-Denis (1723-1737). L’acte du 13 mars 1725 signale (...)
  • 82 En 1695, Marseille est ainsi chargée de 2695 messes fondées et 1532 casuelles.
  • 83 A.N., M 229, visite de la maison de Toulon par le P. Gourreau, 19 janvier 1696.
  • 84 A.N., S 6782 A, « Joyeuse », visite de la maison de Joyeuse par le P. Beaudoux, 17-20 mai 1781. La (...)
  • 85 A.D. Ardèche, D 67-68.
  • 86 A.N., S 6791, « Pézenas », pièces 4-5, visites de la maison de Pézenas par le P. Beaudoux, 19-23 ju (...)
  • 87 A.N., S 6774, visite de la maison d’Agen par le P. Beaudoux, 12-15 avril 1788.

49L’étude conduit à classer les maisons en deux catégories, selon qu’elles confient des messes ou qu’elles en reçoivent (Ill. 4). Parmi les premières se rangent sans surprise les maisons-cures, dont les fidèles attendent beaucoup, à l’exception notable de Saint-Denis de Montpellier. Il est étonnant en revanche de remarquer que les modestes résidences de La Ciotat, Ollioules et Grasse, aux activités pourtant réduites, présentent également un solde déficitaire. Les unes et les autres ont parfois pu compter sur la solidarité des Pères régissant le sanctuaire de Cotignac ou le séminaire d’Avignon, mais ces établissements sollicitent aussi à l’occasion des secours. L’apport du séminaire de Montpellier est plus décisif : de 1692 à 1731, des milliers de messes sont dites par ses recteurs pour le compte de quelque huit maisons. Leurs confrères de la paroisse de Saint-Denis assurent le même service, entre 1725 et 1733, à la demande de Toulouse, Arles et La Rochelle81. Mais ce sont les collèges, il est vrai peu chargés de fondations, à l’exception de celui de Marseille adossé à une résidence82, qui prennent en charge l’essentiel des messes surnuméraires. Tous participent, à des degrés divers, au soulagement des maisons à vocation strictement spirituelle. À ses 272 messes de fondation, Toulon en ajoute ainsi 83 en 1695 pour la décharge de Marseille83. Dans la dernière décennie de l’Ancien Régime, ces transferts sont plus importants encore. En 1780, le supérieur-curé de Joyeuse, désespérant de venir à bout tout seul de 4 469 messes, en confie 861 à ses confrères de Tournon84, afin qu’elles soient dites avec 200 autres destinées à Vienne et 425 à l’attention de diverses maisons provençales. L’année précédente, il leur en avait déjà remis 500. Les régents de l’école militaire, qui n’étaient chargés d’aucune messe casuelle ou de fondation, en célébrèrent donc 7123 entre novembre 1776 et juin 179085. La sacristie de Pézenas ne compte que 273 fondations, ce qui lui permet de mettre 107 messes en 1787 et 150 en 1788 à la disposition du Général86. Le jeune collège d’Agen reçoit dans le même temps de ce dernier 705 messes à dire, en plus de ses 6 fondations et 221 casuelles87.

50L’exemple de Condom, largement documenté et sur la longue durée, mérite enfin qu’on s’y arrête. La première mention relative à la solidarité spirituelle portée dans ses livres remonte au 14 avril 1679, où le visiteur note avec un bel optimisme :

  • 88 A.C. Condom, 25.626 B, p. 341, visite du P. de La Mirande, 14 avril 1679.

Comme il n’y a en tout que 59 messes d’obligation et qu’on n’en fait presque dire aucune de dévotion, y aiant toujours dans la maison pour le moins trois prêtres, il s’ensuit qu’elle a mille messes ou environ de libres tous les ans dont elle peut assister les autres maisons plus chargées qu’elles n’en peuvent dire88.

  • 89 Ibid., p. 424, visite du P. Camoin, 6-16 avril 1689.

51La consigne est réitérée dix ans plus tard89, mais les Pères de Condom n’ont pas attendu cet avis pour se placer au service de leurs confrères. Leur investissement est observable dès 1683, alors que les messes domestiques ne dépassent pas la centaine et que le nombre des prêtres est toujours de trois. Chacun d’eux se voit alors imposer par le visiteur un quota de cinq messes hebdomadaires, ce qui génère annuellement (pour 50 semaines) un excédent net de 650 messes, tenues à la disposition des autres maisons. Il serait fastidieux de rendre compte ici par le détail de l’utilisation, année après année, de ces offices dans le seul intérêt de la congrégation, et que les inspections annuelles sont l’occasion d’apprécier. On relève ainsi une cinquantaine de mentions témoignant de ce souci. Le Conseil peut se réserver la destination de ces services ; c’est souvent le cas après 1730, signe peut-être d’un effort de centralisation et d’un certain effacement des frontières départementales, dans un contexte où le nombre des prêtres diminue au sein de la congrégation et où les maigres ressources humaines doivent profiter à tous. Mais, dans l’ensemble, les maisons méridionales – Arles, La Ciotat, Aix et Avignon – en bénéficient largement, comme aussi celles de Lyon et Tours, mais plus encore celle de Toulouse à laquelle Condom semble attachée par un lien que la géographie seule ne suffit pas à justifier. Une fois sur deux, c’est elle qui est destinataire des secours prodigués, le flux toulousain dépassant sans doute de beaucoup les 5 000 messes explicitement portées entre 1683 et 1789 sur les actes de visites.

  • 90 A.N., S 6796, « Toulouse », pièce 3, p. 23-24.
  • 91 Le « cahot » régnant dans les comptes de la sacristie et la perte des livres de visites rendent dif (...)
  • 92 Ibid. L’auteur estime à 44504 le nombre des messes en retard en 1774, à 50 000 l’année suivante.
  • 93 Ibid., pièces 4-6, visites de la maison de Toulouse par les P. Mancest et Beaudoux, 19‑23 juin 1784 (...)

52Dans la capitale du Languedoc, les besoins de l’Oratoire sont en effet hors du commun. Ils tiennent à l’ancienneté de la paroisse de la Dalbade, dont la sacristie était déjà dotée, lors de sa prise en charge par la congrégation en 1619, de 56 obits et 3 312 messes fondées depuis deux siècles. Et ce nombre s’accroît encore rapidement dans les décennies suivantes, pour atteindre celui de 6 552 en 1680. Les prêtres – pourtant statutairement au nombre de douze, ce qui fait d’eux la plus importante communauté de l’Oratoire méridional – sont alors impuissants à assumer cette charge. De plus, une bonne moitié des anciennes fondations a subi une perte de valeur, parfois totale. Cet état de fait conduit Mgr de Montpezat à intervenir à l’initiative des Pères. Par son ordonnance du 28 avril 1680, 24 obits seulement ayant conservé un fonds suffisant, il supprime le service des autres, dont le capital est perdu ou diminué, en échange d’une intention associée à certains offices chantés durant l’année liturgique90. À ces 629 services solennisés ne sont dès lors plus adjoints que 1 558 messes basses, la charge de la communauté se trouvant ainsi réduite des deux tiers. Cette réforme soulage la maison de Toulouse, qui bénéficie en outre à cette époque du soutien solide autant que désintéressé des Pères de Condom, on l’a vu, mais aussi de ceux de Montpellier, Pézenas ou Rieux, alors particulièrement nombreux. La situation se tend néanmoins au siècle suivant, le nombre des messes s’étant une nouvelle fois accru91, insensiblement mais exagérément. En Languedoc, l’effectif des prêtres oratoriens se voit réduit d’un tiers environ entre 1702 et 1790, de moitié si l’on compare les quinze dernières années de la période aux quinze premières, les plus fastes. Si Toulouse est relativement épargnée (du fait de son statut de maison curiale ?), ses sœurs sont plus durement touchées. Et cette pénurie ne favorise pas pour autant le recours massif à des prêtres étrangers que limite la modestie des ressources domestiques. Les rétribuer « ferait une brèche trop considérable [au] revenu », ainsi que le souligne l’auteur anonyme du Mémoire instructif concernant la maison de l’Oratoire de Toulouse rédigé en 1776. La situation dont il rend compte est des plus préoccupantes : à 3 064 messes d’obligation s’ajoutent autant de casuelles, et les comptes de la sacristie affichent un solde en déficit... de près de 50 000 messes !92 L’ampleur de ce reliquat, devenu irréductible, constitue dès lors, et jusqu’à la fin de l’Ancien Régime, un vrai défi pour une communauté qui acquitte néanmoins les messes courantes et réduit de moitié le nombre des casuelles, évitant ainsi une nouvelle inflation93.

  • 94 A.D. BdR, 40 H 9, acte de visite du P. Durand de Fuveau, 10-13 juillet 1746.

53À la veille de la Révolution, l’exemple toulousain illustre en fait jusqu’à la démesure la situation générale des maisons du troisième département de l’Oratoire, accablées par des fondations qu’elles ne parviennent plus à honorer. Arles présente ainsi un retard de plus de 21 000 messes en 1790, Pertuis ou Avignon sont respectivement déficitaires de 7350 et 10 224 messes en 1790 et 1781. Les plus nécessiteuses font l’objet de secours répétés de la part d’établissements au solde toujours positif, des collèges notamment, où les confrères instituteurs tendent cependant à remplacer les Pères. Aussi assiste-t-on à un épuisement des forces, en dépit de la bonne volonté partout manifestée. Depuis 1740, Aix est placée dans une situation intenable – plus de 15 000 services de retard en 1746 – par le manque de prêtres, dont le nombre ne dépasse jamais six, au lieu de dix à dix-sept quelques décennies plus tôt. Elle en appelle au Conseil94, qui mobilise à maintes reprises les excédents départementaux pour lui venir en aide, la déchargeant lui-même de 2 000 messes en 1759. La situation des comptes n’en est pas durablement rétablie pour autant, loin s’en faut. Le visiteur en est finalement réduit, ici comme ailleurs, à dresser un état des lieux désespéré devant un déficit devenu structurel, qu’alimentent année après année les charges casuelles et ordinaires auxquelles on ne peut plus faire face.

54L’examen des solidarités fortes unissant les maisons méridionales, dont chacune contribue à sa place à l’animation d’un territoire vaste tout en demeurant avec les autres dans une étroite collaboration, met en lumière une réalité insoupçonnée. Alors que les fortunes inégales créent des relations asymétriques, des flux de toutes natures deviennent vecteurs d’équilibre : échanges économiques, au moyen desquels les communautés nécessiteuses reçoivent assistance de plus aisées, partages, services, entraide spirituelle. Tous ces rapports nourrissent complicité, connivence entre les hommes et les établissements, la partie œuvrant dans l’intérêt du tout. L’Institution, lieu du renouvellement, est au cœur de ce dispositif. Les liens sont constants, parfois discrets, toujours indispensables, et le Conseil en est l’arbitre. Au maillage horizontal vient donc se greffer un autre, vertical celui-là, tout aussi puissant dans sa dimension centralisatrice et hiérarchisée, qui transcende les frontières internes de la congrégation.

55Voilà qui rend compte de la cohésion, de la force de ces liens, et de leur contribution à la vitalité d’un véritable réseau départemental.

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Notes

1 Willem Frijhoff, Dominique Julia, « Les Oratoriens de France sous l’Ancien Régime. Premiers résultats d’une enquête », in Revue d’Histoire de l’Église de France, t. LXV, n° 175, juillet-décembre 1979, p. 225-265.

2 François-Xavier Carlotti, Le troisième département de l’Oratoire de Jésus (xviie-xviiie siècle), un réseau congréganiste dans la France du Midi, thèse soutenue le 14 octobre 2013, Université Lyon 3, sous la direction de Bernard Hours, 1598 p., 3 vol. dactyl. Cette enquête s’inscrit dans un mouvement historiographique qui, depuis plusieurs décennies, favorise les travaux consacrés à l’histoire des congrégations et Ordres religieux, sans que la notion de réseau, toutefois, y soit toujours franchement interrogée ; Isabelle Brian, Messieurs de Sainte-Geneviève. Religieux et curés, de la Contre-Réforme à la Révolution, Paris, Ed. du Cerf, 2001, 552 p. ; Marie-Claude Dinet-Lecomte, Les sœurs hospitalières en France aux xviie et xviiie siècles. La charité en action, Paris, Champion, 2005, 595 p. ; Bernard Dompnier, Enquête au pays des frères des anges. Les Capucins de la province de Lyon aux xviie et xviiie siècles, Saint-Etienne, Publications de l’université, 1993, 338 p. ; Bernard Hours (dir.), Carmes et Carmélites en France du xviie siècle à nos jours, Paris, Ed. du Cerf, 2001, 477 p. ; Frédéric Meyer, Pauvreté et assistance spirituelle. Les Franciscains récollets de la province Saint-François de Lyon, aux xviie et xviiie siècles, Saint-Etienne, CERCOR, 1998, 421 p. ; Benoist Pierre, La bure et le sceptre. La congrégation des Feuillants dans l’affirmation des Etats et des pouvoirs princiers (v. 1560- v. 1660), Paris, Publications de la Sorbonne, 2006, 590 p. ; Claude-Alain Sarre, Vivre sa soumission. L’exemple des Ursulines provençales et comtadines, 1592-1792, Paris, Publisud, 1997, 671 p. ; Jean de Viguerie, Une œuvre d’éducation sous l’Ancien Régime : les pères de la Doctrine chrétienne en France et en Italie (1572-1792), Paris, Publications de la Sorbonne, 1976, 705 p.

3 Bernard Dompnier, « Réseaux de confréries et réseaux de dévotions », Siècles. Cahiers du CHEC, 12, 2000, p. 9-27 ; Claire Lemercier, « Analyse de réseaux et histoire », Revue d’histoire moderne et contemporaine, 2005, 52-2, p. 88-112 ; Grégory Goudot, « Si l’on discutait ? L’historien du religieux et le réseau », Bulletin du CERCOR, n° 35, 2011, p. 85-92 ; « Les milieux dévots en France (vers 1590-vers 1750). Nouvelles recherches, nouvelles approches », journée d’étude organisée par Serge Brunet (CRISES-EA 4424 / Red Columnaria / Institut Universitaire de France), Université Paul-Valéry de Montpellier, 13 octobre 2014, actes à paraître.

4 B.M. Avignon, 8° 1125, Recueil des actes des assemblées générales de la congrégation de l’Oratoire (1634-1687), IIIe assemblée (mai 1638), 13e session.

5 A.D. Bouches-du-Rhône (désormais A.D. BdR), 40 H 4, p. 61.

6 Archives Nationales (A.N.), MM 582, f. 95 v°, délibération du Conseil, 24 juillet 1676. Hyères doit fournir 200 lt, Cotignac 100, N.-D. des Anges 60, Marseille 100 ; Ibid., p. 138, obligation réitérée à ces maisons et imposant le même devoir à Grasse, 10 décembre 1677 ; Ibid., p. 179, le 26 novembre 1678, Grasse reçoit un ordre pour 50 lt, Hyères 200, Cotignac 50, N.-D. des Anges 60, Marseille 60.

7 Les Pères de Montpellier s’obligent, le 23 février 1683, à dire 500 messes à la décharge de leurs confrères toulousains et à leur verser une subvention annuelle de 50 lt pendant trois ans ; ceux de Pézenas s’engagent à en payer 100. Le P. Pierre Pons, décédé à Montpellier le 25 mai 1685, lègue aussi un capital de 2000 lt. A.D. Haute-Garonne, 135 H 101, f. 10, lettre du P. Louis Gardey, supérieur du séminaire de Montpellier, 31 mai 1685.

8 A.N., MM 583, p. 147, délibération du Conseil, 29 janvier 1683.

9 A.D. BdR, 40 H 3, p. 247.

10 A.N., MM 586, p. 231, délibération du Conseil, 9 septembre 1697.

11 A.N., MM 588, p. 459, délibération du Conseil, 7 mars 1727.

12 A.D. BdR, 40 H 9, visite du P. Bernard, 6 juin 1751.

13 Ibid., visites des P. Rabbe et Lafouge, 21 juin 1760 et 12 avril 1763.

14 Ibid., « Compte général des sommes touchées par le P. directeur de l’Institution, et employées, par les ordres du R.P. général et de son Conseil, aux réparations et ameublement des chambres des confrères, depuis le 1er janvier 1759 jusqu’au 24 juin 1760», 27 juin 1760.

15 Marseille fournit 300 lt, Cotignac 400, Hyères 200, N.-D. des Anges 100, Arles 150, soit au total 1150 des 3072 lt recueillies (37,5 %).

16 A.D. BdR, 40 H 9. 396 lt sont reçues le 8 juin 1758 en pur don, 136 lt le 15 juin 1760, 700 lt le 8 mai 1767.

17 Ibid., visite du P. Herbault, 4 mai 1770.

18 Ibid., « Déclaration des biens et revenus de la maison en conséquence de la demande faite par lettre du 8 avril 1775».

19 B.M. Arles, ms. 167, visite du P. Etienne, 23 juin 1753.

20 Ibid., visite du P. Herbault, 16 juin 1768.

21 Ibid., visite du P. Beaudoux, 1er août 1787.

22 Emile Fassin, Bulletin archéologique d’Arles, 1890, 2e année, n° 8, « Ephémérides », p. 121 ; A.N., M 221, 81, « Mémoire relatif à l’établissement d’un séminaire de la congrégation et à sa suppression », 1775.

23 A.N., MM 591, p. 434, ordre donné aux sept instituants aixois de rejoindre la classe à Avignon, 2 octobre 1775 ; Ibid., p. 436, ordre donné à deux confrères lyonnais d’aller étudier à Avignon, 20 octobre 1775.

24 A.D. BdR, 40 H 9, visite du P. Segond, 30 mai 1776.

25 B.M. Arles, ms. 167, visite du P. Dye de Gaudry, 12 juillet 1777 : « Le Régime, en transportant par nécessité l’étude de nos confrères dans notre maison d’Aix, laquelle n’est pas aisée, s’est flatté que [celle d’Arles], délivrée d’une charge si pesante, contribuerait à une œuvre si essentielle à la congrégation. Elle y a déjà contribué en consentant à payer l’intérêt d’une somme de mille écus qui sera empruntée par la maison d’Aix pour la construction et l’ameublement des chambres des confrères. Nous espérons qu’elle ne bornera pas là sa générosité, et que ses secours s’accroîtront par le produit des maisons qu’on vient de construire et par le haussement de ses fermes ».

26 A.N., S 6776, « Avignon », pièce 5, visite de la maison d’Avignon par le P. Beaudoux, 9‑12 juillet 1782.

27 Ibid., lettre du P. de Mayne au P. Sauvaire, 20 novembre 1709 : « C’est par bienveillance pour votre communauté et pour la nôtre qu’on a bien voulu me faire ce plaisir en nous préférant à plusieurs autres qui demandaient [800 lt] à 7 %».

28 A.D. Ardèche, 21 H 3.

29 A.N., MM 587, p. 343, ordre du Conseil, 2 juin 1713.

30 A.D. BdR, 41 H 3, p. 142.

31 Ibid., p. 311-312.

32 Ibid., p. 163-164 ; 298-299.

33 Ibid., p. 330.

34 Ibid., fondation Jean Jaubert (12 juillet 1659), p. 213.

35 A.D. Var, 9 J 26, fonds Gérard Boyer, d’Aups, dossier « Prêtres de l’Oratoire, délibérations (1679-1739)».

36 A.D. BdR, 41 H 3, p. 284.

37 Ibid., p. 285, constitutions de rente des 7 juin 1712 et 17 août 1713, 2100 et 3500 lt.

38 A.D. Var, 9 J 26.

39 A.D. BdR, 41 H 3, p. 34.

40 A.N., MM 588, p. 25-67. Pour la seule année 1715, emprunts autorisés : Ollioules (1000 lt), La Ciotat (2200 lt), Grasse (3600 lt), Cotignac (1000 lt), Toulon (3000 lt).

41 A.D. BdR, 41 H 3, p. 36.

42 Ibid., p. 257.

43 A.C. Arles, GG 69, f. 219 ; A.N., MM 590, p. 220, délibération du Conseil, 11 mars 1748 ; B.M. Arles, ms. 167, visite du P. Etienne, 13-15 juin 1748.

44 A.C. Pertuis, GG 36, recette, 14 juin 1752 : « reçu [...] cent vingt livres en aumône qui nous a mis en état de payer la taille et de faire la provision de bois » ; février 1753 : « reçu [...] 25 lt dont on a acheté un quintal d’huile ». Deux dons de 48 lt sont signalés en septembre 1753 et juillet 1755.

45 Ibid., recette d’octobre 1772. Le P. Salvator arrive à Pertuis le 11 septembre 1772. Il y meurt le 15 septembre 1774.

46 En 1780, 42 lt dues à la maison parisienne de St-Honoré par celle de Grasse sont offertes à Pertuis.

47 B.M. Arles, ms. 167, visite du P. Rabbe, 27 juin-1er juillet 1759 : « Extrait des registres du Conseil et de notre dernière assemblée, 5e résolution ».

48 A.C. Pertuis, GG 34, p. 47.

49 A.D. Ardèche, 21 H 8, reconnaissance de dette à l’endroit de la procure générale de l’Oratoire, rédigée par le P. Joseph Gerbaud, 30 août 1787.

50 Ibid., 21 H 6, p. 20.

51 Ibid., 21 H 1, 1er livre-journal des recettes et dépenses de la maison de Joyeuse, 1625‑1648.

52 A.D. Hérault, G 4389.

53 Ibid., lettre du P. de Mayne au P. Sauvaire, 24 octobre [1711 ?].

54 Ibid., 7 décembre 1709.

55 Ibid., s.d.

56 Ibid., s.d.

57 Ibid., 1er juin 1714.

58 B.M. Arles, ms. 167, visite du P. Beaudoux, 18-22 mai 1788.

59 A.C. Condom, 25.626 B, livre des visites de la maison de l’Oratoire de Condom (1631‑1747), p. 433, visite du P. Christophe Camoin, 22 juin 1690.

60 A.N., MM 576, f. 19.

61 A.N., MM 583, p. 19, ordre du Conseil, 15 mars 1680.

62 A.N., S 6796, « Toulouse », pièce 3, « Mémoire instructif concernant la maison de Toulouse », p. 29.

63 A.N., MM 586, p. 87. Les messes sont ainsi réparties : Riom (1 000), Nantes (1 000), Poligny (530), Vendôme (540), Toulon (510), Provins (500), Le Mans (230), Salins (210), Cotignac (1 000).

64 Ibid., p. 377.

65 Arch. Oratoire de France, dossier « Aix », pièce 6, compte de messes de fondation, 1er janvier 1778 ; A.D. BdR, 40 H 9, visite du P. Lafouge, 30 août-12 septembre 1766.

66 A.C. Pertuis, GG 35, p. 94, visite du P. de Sainte-Marthe, 28-30 janvier 1675.

67 A.D. Alpes-Maritimes, H 1431, état de la maison de Grasse dressé par le P. Ballardy, 10 janvier 1728.

68 A.D. BdR, 42 H 62, « Livre de nos fondations », compte de 1717.

69 A.N., S. 6796, « Toulouse », pièces 4-5, visites des P. Mancest et Beaudoux, 19-23 juin 1784 ; 18-21 octobre 1787. Les cordeliers sont chargés d’un annuel.

70 A.C. Condom, 25.626 B. La rémunération prévue en 1688 laisse place ensuite à des échanges gracieux ; ainsi avec Toulouse en 1690 et diverses maisons en 1710.

71 A.N., M 229, visite de la maison d’Avignon par le P. Gourreau, 25-30 juillet 1694.

72 A.D. Vaucluse, 55 H 2, p. 65. 15 septembre 1685.

73 A.C. Condom, 25.626 B, p. 260, visite du P. Batarel, 20-27 juillet 1739.

74 Ibid., p. 214.

75 A.C. Pertuis, GG 36, p. 3, recette janvier-février 1727.

76 A.D. BdR, 42 H 62, lettre du P. Amphoux au P. Garidel, 29 décembre 1721.

77 Ibid., « Livre de nos fondations », compte de 1717.

78 A.D. Alpes-Maritimes, H 1431, état de la maison de Grasse dressé par le P. Ballardy, 10 janvier 1728.

79 A.N., S 6791, « Ollioules », pièce 3, visite de la maison d’Ollioules par le P. Beaudoux, 19-23 juin 1781.

80 Ibid., visite de la maison d’Avignon par le P. Beaudoux, 9-12 juillet 1782.

81 A.D. Hérault, G 4379, livre des visites de Saint-Denis (1723-1737). L’acte du 13 mars 1725 signale 200 messes dites pour Arles, celui de février 1728 en mentionne 795 pour La Rochelle et 362 pour Toulouse. 400 autres sont recensées en septembre 1730, toujours pour Toulouse, et 640 en juillet 1732 « de nos maisons ». S’agit-il d’Arles et de Toulouse ? La première verse alors 60 lt et 75 lt l’année suivante, pour des messes ; la seconde remet 100 lt à Montpellier en 1732, pour la même raison.

82 En 1695, Marseille est ainsi chargée de 2695 messes fondées et 1532 casuelles.

83 A.N., M 229, visite de la maison de Toulon par le P. Gourreau, 19 janvier 1696.

84 A.N., S 6782 A, « Joyeuse », visite de la maison de Joyeuse par le P. Beaudoux, 17-20 mai 1781. La maison compte alors 230 messes fondées, 134 casuelles et 4105 messes en retard. 674 sont dites à Joyeuse, 861 à Tournon. Le solde (négatif) est de 2934.

85 A.D. Ardèche, D 67-68.

86 A.N., S 6791, « Pézenas », pièces 4-5, visites de la maison de Pézenas par le P. Beaudoux, 19-23 juillet 1787, 4-8 mai 1788.

87 A.N., S 6774, visite de la maison d’Agen par le P. Beaudoux, 12-15 avril 1788.

88 A.C. Condom, 25.626 B, p. 341, visite du P. de La Mirande, 14 avril 1679.

89 Ibid., p. 424, visite du P. Camoin, 6-16 avril 1689.

90 A.N., S 6796, « Toulouse », pièce 3, p. 23-24.

91 Le « cahot » régnant dans les comptes de la sacristie et la perte des livres de visites rendent difficile le suivi des fondations. De réductions en réévaluations, leur nombre aurait varié de 2187 en 1680 à 2291 en 1767 puis 3064 en 1774, pour être fixé à 2238 après 1780.

92 Ibid. L’auteur estime à 44504 le nombre des messes en retard en 1774, à 50 000 l’année suivante.

93 Ibid., pièces 4-6, visites de la maison de Toulouse par les P. Mancest et Beaudoux, 19‑23 juin 1784, 18-21 octobre 1787, 28 mars-27 avril 1788.

94 A.D. BdR, 40 H 9, acte de visite du P. Durand de Fuveau, 10-13 juillet 1746.

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Table des illustrations

Titre Fig. 1 « Carte de la France oratorienne dédiée et présentée à Mad. la Baronne de Montberaut, sœur de l’Oratoire, par son humble et très obéissant serviteur [Spitalier] de Seillans, de l’Oratoire, Arras, 1780 »
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Titre Fig. 2 L’archipel oratorien méridional (xviie -xviiie s.)
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Titre Ill. 3 Subventions arlésiennes pour l’entretien des confrères philosophes et des instituants
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Titre Fig. 4 Le réseau spirituel méridional (flux de messes identifiés)
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Pour citer cet article

Référence papier

François-Xavier Carlotti, « Secours, assistance, interdépendance : l’Oratoire du Midi, un réseau congréganiste aux xviie et xviiie siècles »Chrétiens et sociétés, 22 | -1, 109-137.

Référence électronique

François-Xavier Carlotti, « Secours, assistance, interdépendance : l’Oratoire du Midi, un réseau congréganiste aux xviie et xviiie siècles »Chrétiens et sociétés [En ligne], 22 | 2015, mis en ligne le 08 mars 2016, consulté le 17 février 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/chretienssocietes/3887 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/chretienssocietes.3887

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