Navigation – Plan du site

AccueilNuméros21Dossier coordonné par Olivier Cha...Le Père Lhande, jésuite-reporter ...

Dossier coordonné par Olivier Chatelan

Le Père Lhande, jésuite-reporter de la banlieue

Father Lhande, Jesuit-reporter from the suburbs
Corinne Bonafoux
p. 147-168

Résumés

Dans les années 1920, en pleine extension de la banlieue parisienne et émergence du mythe de la banlieue rouge, un jésuite, le P. Lhande parcourut la « zone », les fortifications, les grands lotissements, et en tira une série d'ouvrages aux titres choc Le Christ dans la banlieue, La Croix sur les Fortifs ou Le Dieu qui bouge. La découverte d’un nouveau type d’espace urbain, du dénuement des banlieusards, de leur indifférence religieuse rencontrait une question que l’Église affrontait depuis plusieurs décennies : la question sociale et l’indifférence religieuse du monde ouvrier. Les ouvrages du P. Lhande relèvent tout à la fois de la description - habitat, conditions de vie, mentalités des habitants - où observation précise et imaginaire se mêlent, et du récit dont les héros sont des curés, missionnaires dans une « Chine » aux portes de Paris.

Haut de page

Texte intégral

  • 1 Thierry Paquot, Banlieues, une anthologie, Lausanne, Presses polytechniques et universitaires roman (...)

1Un des phénomènes les plus originaux de l’évolution urbaine au xxe siècle fut l’extension rapide des villes à leur périphérie. La banlieue, réalité urbaine, sociale et politique donna rapidement lieu à des représentations plus ou moins mythiques. « L’émergence du thème de la banlieue est une étape historique décisive d’une histoire des représentations urbaines1 ». Dans les années 1920, en pleine extension de la banlieue parisienne et émergence du mythe de la banlieue rouge, un jésuite parcourut la « zone », les fortifications, les grands lotissements, et en tira une série de reportages qu’il publia d’abord dans la revue Études, puis en volumes séparés sous des titres choc, qui connurent une certaine postérité. La découverte d’un nouveau type d’espace urbain, du dénuement des banlieusards, de leur indifférence religieuse rencontrait une question que l’Église affrontait depuis plusieurs décennies : la question sociale et l’indifférence religieuse du monde ouvrier. Les ouvrages du P. Lhande relèvent tout à la fois de la description : habitat, conditions de vie, mentalités des habitants, et du récit dont les héros sont des curés, missionnaires dans une « Chine » aux portes de Paris.

  • 2 Jeanne Moret, Le Père Lhande pionnier du Christ dans la banlieue et à la radio, Paris, Beauchesne, (...)

2Le cas du Père Lhande, malgré la célébrité de son temps, ses succès de librairie, a donné lieu à assez peu d’études2. Aujourd’hui, il n’est certes pas totalement méconnu des historiens du religieux et des historiens de l’urbanisme. Annie Fourcaut écrit :

  • 3 Annie Fourcaut, Emmanuel Bellanger, Mathieu Flonneau, Paris/banlieues, conflits et solidarités : hi (...)

Il contribue à attirer l’attention sur la crise de la croissance urbaine de la banlieue, il participe à l’édification du mythe de la ceinture rouge, il aide à la réussite financière de l’Œuvre des nouvelles paroisses de la région parisienne – fondée par le cardinal Verdier et rapidement appelée « les Chantiers du Cardinal3.

  • 4 Bruno Dumons, « Villes et christianisme dans la France contemporaine. Historiographies et débats », (...)
  • 5 Émile Poulat, « La découverte de la ville par le catholicisme français contemporain », Annales : éc (...)
  • 6 Olivier Chatelan, « Les catholiques et l’urbanisation de la société française », Vingtième siècle. (...)

3Cette relative carence bibliographique est à replacer dans le contexte plus global du manque de dialogue jusqu’à une date récente entre histoire religieuse et histoire urbaine4. Le constat a été fait plusieurs fois que l’histoire religieuse de la ville restait un point aveugle, un peu comme si l’historiographie du religieux accusait le même retard que naguère l’Église dans sa découverte de l’urbain5. L’après Seconde Guerre mondiale est désormais mieux connu6.

  • 7 Les papiers du père Lhande sont consultables aux Archives de la Compagnie de Jésus à Issy-les-Mouli (...)

4L’ambition de cet article est d’analyser le regard porté par Pierre Lhande sur un espace, sur des hommes et sur les moyens d’évangélisation qui lui semblent appropriés. De ce fait, les sources les plus utiles pour nous consistent dans ses articles et ouvrages et dans une moindre mesure dans ses archives qui éclairent davantage ses rapports avec différents acteurs de l’Église parisienne7.

Le Père Lhande, reporter catholique de la banlieue ouvrière

  • 8 Pierre Lhande, « Le Bon Dieu chez les chiffonniers », Études, t. 184, 5 septembre 1925, p. 513-524.

5En 1925, au moment de son premier article sur les banlieues, Pierre Lhande est un jésuite de 48 ans, fraîchement arrivé de province. Il ne peut être question, ici, de présenter son parcours dont on retiendra seulement son attachement profond à sa terre d’origine, le pays basque, auquel il a consacré des travaux de grammaire et des romans, ou encore son long séjour en Espagne après 1901. La tâche qui lui est confiée aux Études, en 1924, porte sur la critique littéraire. Il a déjà publié Autour d’un foyer basque. Récits et idées (1908), L’émigration basque (1910) ou encore des romans Luis (1912) et Mirentchu (1914). Mais un article de 1925 sur la détresse des mal-lotis8 révèle une vocation d’apostolat plus que de critique littéraire.

Les débuts de l’enquête

  • 9 AJ, Papiers Pierre Lhande, L1/1.5., « Pierre Lhande, jubilé ».
  • 10 Sur l’origine de la « vocation » du P. Lhande, voir les premières pages du Christ dans la banlieue  (...)

6Comment le P. Lhande passe-t-il donc de la critique littéraire à l’enquête sur les milieux populaires en banlieue ? S’il parle volontiers de hasard ou de providence, il évoque dans un discours de 1950 qu’il prononce pour son jubilé, le rôle de son supérieur, le Père de Grandmaison9. Il est probable que le Père de Grandmaison lui-même ait été influencé par l’Action populaire qui collabore régulièrement aux Études. Par ailleurs, la première visite de terrain du P. Lhande sur le plateau de Vanves se fait en compagnie du P. Croizier de l’Action populaire qui est aussi un de ses amis de longue date10.

  • 11 Pierre Lhande, « L’Église dans la banlieue, enquête sur la vie catholique dans les milieux ouvriers (...)
  • 12 Annie Fourcaut, Emmanuel Bellanger, Mathieu Flonneau, op. cit., p. 194.

7Six mois plus tard, Pierre Lhande signe un deuxième article, « L’Église dans la banlieue, enquête sur la vie catholique dans les milieux ouvriers autour de Paris », qui se présente comme le départ d’une nouvelle enquête11. Les articles paraissent alors régulièrement puis sont rapidement publiés chez Plon en trois volumes, Le Christ dans la banlieue, Enquête sur la vie religieuse dans les milieux ouvriers de la banlieue de Paris (1927), Le Dieu qui bouge (1930), La Croix sur les fortifs (1931), inaugurant « le genre du reportage missionnaire dans la banlieue12 ».

8Il y a très peu d’écart entre les articles des Études et les textes des trois volumes si ce n’est que ceux-ci ne suivent pas l’ordre chronologique de parution et regroupent les articles selon des unités géographique, sociale (le chapitre « le bon Dieu chez les chiffonniers »), religieuse (les banlieues les moins pourvues) ou encore politique. Le texte est accompagné de photographies légendées et de cartes qui situent les implantations de l’Église en banlieue. Dans Le Dieu qui bouge, le P. Lhande décrit de nouvelles banlieues ou montre des évolutions par rapport aux lieux déjà décrits dans Le Christ dans la banlieue et ajoute trois chapitres qui proposent une analyse des problèmes de la banlieue et de son évangélisation.

  • 13 Camille Canteux, op. cit., p. 82.
  • 14 Il loge rue Monsieur le Prince dans le 5ème arrondissement de Paris.
  • 15 Dans sa préface au second volume, Le Dieu qui bouge, il énumère 52 villes dans lesquelles il a donn (...)
  • 16 D’après un récit biographique : AJ, « Papiers Lhande », L 1/1.

9Le Père Lhande a certes investi beaucoup d’énergie à parcourir les banlieues, ses écrits témoignent de l’étendue de ses investigations. Il a visité une grande diversité de communes mais un repérage minutieux fait apparaître qu’il a plus souvent investi la proche banlieue et des municipalités de gauche13, ce qui peut s’expliquer par le fait que le P. Lhande fait aussi de l’évangélisation des banlieues une arme contre le communisme. Pour autant, il est évident que le P. Lhande est extérieur au monde qu’il décrit, extérieur de par ses origines sociales, de par son lieu de résidence14, de par sa formation durant de longues années, de par sa pratique de prédicateur auprès des milieux aisés parisiens, prédication qu’il poursuit par ailleurs pour récolter des fonds15. Ses débuts sont d’ailleurs assez ubuesques puisqu’il visite « la zone » dans une Panhard qu’une riche bienfaitrice met à sa disposition ainsi qu’un chauffeur16.

Le Christ dans la banlieue : un jalon ou un tournant ?

  • 17 Jacques-Olivier Boudon, Paris, capitale religieuse sous le Second Empire, Paris, Cerf, 2001.
  • 18 Ibid., p. 250-255.

10Ce n’est certes pas le père Lhande qui invente le terme « banlieue », pas plus qu’il n’est le découvreur de l’irréligion des masses ouvrières. Jacques-Olivier Boudon dans son étude sur Paris capitale religieuse sous le Second Empire s’interrogeait déjà sur « l’invention de la banlieue17 » et montre bien qu’au tournant des années 1850, « l’Église prend conscience que la banlieue forme une entité à part entière, avec sa spécificité propre ». Le terme « banlieue » est utilisé dans l’enquête pastorale de 1854. De même, l’irréligion de ces espaces et de ces populations est connue avec un taux de pascalisants inférieur à 8 % mais avec un taux quasiment nul pour les hommes que Jacques-Olivier Boudon situe à moins de 1 %18.

  • 19 Émile Poulat, op. cit. ; voir aussi Pierre Pierrard, L’Église et les ouvriers en France (1840-1940)(...)

11Lorsque Pierre Lhande entreprend la tournée des banlieues, l’Église a pris conscience depuis plusieurs décennies d’une question ouvrière et de la nécessité d’équiper en lieux de culte les espaces de banlieues mais les réalisations en ce domaine restent modestes. Dans un article pionnier, Émile Poulat considérait que « le développement des grandes villes modernes a été caractérisé par le double retard jamais comblé entre d’une part la gravité des problèmes posés et la conscience qu’en avaient ceux dont la charge était de les résoudre ». Dans le cadre du catholicisme, ce retard se traduit par l’insuffisance de constructions d’églises : seulement cinq auxquelles il faut adjoindre vingt chapelles pour la période qui va de 1878 à 1905, « en pleine période de transformation du prolétariat parisien19 ». Pierre Lhande connaît ses prédécesseurs sur ce chemin, notamment Albert de Mun et ses Cercles catholiques d’ouvriers ou encore l’Œuvre des chapelles de secours, créée en 1901 par Mgr Fages et dirigée ensuite par Mgrs Lapalme, Roland-Gosselin et Crépin. Il les cite à plusieurs reprises. Pierre Lhande s’insère donc dans une période charnière, qui marque peut-être un acmé dans l’expression d’une prise de conscience d’un milieu social spécifique sur un espace particulier, prise de conscience qui s’accompagne d’un sentiment « d’euphorie » devant l’ampleur de la tâche.

12Le Père Lhande n’est donc pas, dans les milieux catholiques, le découvreur de la banlieue mais il est sans doute le premier à lier intimement la perception d’un espace urbain décrit avec précision avec des conditions de vie, des mentalités, un déracinement. En outre, il se révèle pour la banlieue un magnifique propagandiste grâce à ses écrits, ses conférences, ses émissions radiophoniques.

13Les années durant lesquelles Pierre Lhande écrit ses articles dans Études marquent sans doute un moment de rencontre entre deux perceptions assez divergentes. À la fin des années 1920, l’Action catholique générale, l’apostolat dans le cadre de la paroisse, le quadrillage par les œuvres continuent leur développement tandis qu’émerge à peine, chez les jeunes, une Action catholique spécialisée qui fait le choix d’un apostolat par milieu social. Ce double mouvement est illustré par la création de la JOC en 1927 et par celle de l’Œuvre des Chantiers du cardinal en 1931. Ce n’est qu’après la Seconde Guerre mondiale que se développe l’expérience des prêtres ouvriers, condamnée en 1954, tandis qu’en 1957 la Mission ouvrière est créée au niveau national et diocésain.

« La grande Chine parisienne », entre description réaliste et imaginaire : les diversités d’un espace

  • 20 Pierre Lhande, Le Christ dans la banlieue, Paris, librairie Plon, 1927, p. 153-154.
  • 21 Ibid., p. 195.
  • 22 Courrier du Rosaire, 1899, cité par F. Veuillot, Apostolat social. Les œuvres du Rosaire au faubour (...)

14La banlieue constitue une nouvelle Chine, « petit coin de Chine20 » près d’Asnières, ou « grande Chine parisienne21 ». Cette référence à la Chine pour évoquer la densité de population qui ceinture Paris n’est pas une invention du Père Lhande, on la trouve dès la fin du xixe siècle : « II faut enfin s’occuper de cette Chine qui entoure Paris, et qui compte près de 2 000 000 d’habitants22 ». Il est vrai que les jésuites ont entretenu un lien particulier avec la Chine du xvie au xxe siècles et que celle-ci a constitué un élément fort de l’imaginaire missionnaire.

  • 23 Annie Fourcaut, Bobigny la rouge, Paris, Éditions ouvrières, 1986.

15L’extrême proximité géographique de la banlieue contraste avec son extrême éloignement en termes de vie sociale, culturelle et religieuse qui en fait un proche lointain, un exotisme de proximité. Les textes du P. Lhande ressortissent à la fois d’une description précise mais trahissent aussi, au gré des métaphores, un imaginaire foisonnant, contribuant avec d’autres à forger un mythe banlieusard23.

  • 24 Pierre Lhande, Le Christ dans la banlieue, op. cit. p. 143.
  • 25 De temps à autre, il cite des chiffres : Drancy est passée de 450 habitants en 1870 à 5 000 en 1914 (...)
  • 26 Pierre Lhande, Le Dieu qui bouge, Paris, Librairie Plon, 1930, p. 79-93.
  • 27 Ibid., p. 196.

16Si le P. Lhande est sensible aux lieux, à la topographie, au logement, il s’attache aussi aux hommes, aux habitants et surtout aux curés dont il fait les héros d’une nouvelle Légende dorée. Il aime raconter des histoires, comme il l’avoue une fois de façon explicite : « Et c’est l’histoire de l’une d’entre elles – une merveilleuse histoire – que je voudrais raconter aujourd’hui. Il y avait une fois etc.24 ». Dès le premier chapitre du Christ dans la banlieue, le P. Lhande décrit et analyse les spécificités mais aussi la diversité de la banlieue. Il note tout d’abord l’ampleur et la rapidité de l’extension des banlieues25, croissance que l’on ne peut comparer, selon lui, qu’à celle des grandes villes industrielles modernes comme Liverpool, Manchester ou Hambourg. Il revient sur ce phénomène qu’il nomme « villes champignons » dans Le Dieu qui bouge26. Le P. Lhande perçoit bien que la croissance très rapide de la population dans ces espaces provient à la fois d’un mouvement de refoulement de la capitale vers la périphérie, même s’il n’emploie jamais ce terme, et d’une arrivée de provinciaux directement dans les banlieues. Il a lu Jean Brunhes et sa Géographie humaine, cite après lui le rôle de la houille mais la ville, même sans ressources en charbon, attire car elle est le « palais enchanté », le « paradis défendu27 ». Le P. Lhande est donc sensible aux multiples relations et flux qui relient Paris et ses banlieues.

Paris-banlieue

  • 28 Pierre Lhande, Le Christ dans la banlieue, p. 6.
  • 29 Ibid., p. 7.
  • 30 Idem.

17« Tout ce que le Paris central, déjà congestionné, refoule – ouvriers, vagabonds, bohèmes, parasites, étrangers ou provinciaux – s’entasse précipitamment dans le désordre28 ». Le P. Lhande explique ce mouvement par « l’accaparement des grands immeubles par le commerce ou l’industrie », « la cherté croissante des loyers29 ». Il est sensible à ce mouvement quotidien qui fait que la capitale « happe » le jour ce qu’elle « dégorge » le soir. « Alors, c’est l’exode vers la banlieue. C’est l’assaut aux tramways, surtout aux longs trains […] [qui] vont déverser hors les murs leur cargaison humaine30 ».

  • 31 Ibid., p. 21.

18Les descriptions de la banlieue impriment un négatif discret de la capitale. La comparaison n’est pas le propos premier du P. Lhande mais elle apparaît de façon intermittente et plus ou moins explicitement. Pour le P. Lhande, il existe une coupure entre ces deux espaces : « Ici, un monde finit et là un autre commence31 ». Plus loin dans Le Christ dans la banlieue il précise la nature de cette coupure :

  • 32 Ibid., p. 159-160.

Le trait qui frappe le plus profondément le visiteur égaré dans la banlieue parisienne est, à coup sûr, le brusque passage du spectacle de la quasi-opulence à celui de la misère. Ici, la chaussée lisse, bleuâtre soigneusement lavée, […] le glissement silencieux des taxis […], là, brusquement, le terrain vague, les roulottes de nuit, les baraques sordides, le peuple grouillant des marmots. Au premier abord cette pensée obsédante : entre ces deux mondes si proches l’un de l’autre, quelle barrière ! Quelles castes divisées ! Quelles rives sans ponts ! Égoïsme brutal du riche ! Délaissement désolé du pauvre ! Paradis du vainqueur de la vie ! Enfer du damné de la terre !32

19C’est à ce contraste que le P. Lhande consacre un chapitre sous le titre « Les voisins proches ». Le P. Lhande fustige rarement les riches dans son ouvrage et c’est surtout de façon implicite qu’apparaît l’idée qu’ils doivent se racheter pour cette richesse en aidant les pauvres.

La zone, la banlieue rouge et celle des grands lotissements

  • 33 La publication sur la banlieue verte est plus tardive, en 1939, chez Bloud & Gay.
  • 34 Pierre Lhande, Le Christ dans la banlieue, p. 7.

20Le P. Lhande distingue quatre types de banlieue : la zone, les beaux quartiers suburbains, la ceinture rouge et la banlieue verte33. Mais c’est essentiellement à la zone et à la ceinture rouge qu’il consacre le plus d’enquêtes et de descriptions. « Deux zones suburbaines se sont ainsi formées dans des conditions plus ou moins précaires : l’une, par la tolérance des autorités, au pied même des murs ; l’autre, par l’imprévoyance des pouvoirs publics, en arrière, sur une largeur de deux à dix et quinze kilomètres34 ». Il s’agit bien de deux cercles concentriques qui entourent Paris, ils ne dessinent pas un espace ordonné mais un « chaos de grappes d’agglomérations sans nom qui stupéfient l’étranger quand, de la fenêtre du wagon qui l’amène pour la première fois à Paris, il surveille les abords de la cité ». Intéressante notation car pour qui arrive de l’extérieur, la banlieue est première, c’est le visage de la cité.

21Dans sa description d’Achères, le P. Lhande insiste sur la « gadoue » et l’importance des terrains d’épandage de Paris. Il attribue même à cette atmosphère un certain pessimisme :

  • 35 AJ, L6/2.2, Pierre Lhande, « Achères et la banlieue verte », conférence du 12 février 1938.

Que le terrain – ou les effluves de Bobigny – tout comme celui d’Achères soit favorable à une certaine inquiétude d’esprit, la théorie des milieux, chère à Hyppolite Taine, est là pour nous en convaincre. À vivre le front baissé sur les pestilences qui viennent de la terre on ne saurait se flatter d’échapper complètement à une atmosphère ambiante de pessimisme et de sourde irritation35.

  • 36 Pierre Lhande, Le Christ dans la banlieue, p. 21.

22Les descriptions du P. Lhande s’éloignent parfois de la méthode d’observation et renvoient à un imaginaire missionnaire et colonial débridé, notamment dans l’évocation d’un « long village indien courant à l’infini sur la route d’Orléans. On dirait la brousse au sortir de la cité, l’Orient nu et poussiéreux à deux pas du boulevard36 ». Le lecteur ne peut être que saisi par ces images fortes et contradictoires, comment concilier l’image de brousse et celle d’Orient poussiéreux ?

  • 37 Zone très isolée du Moyen Atlas que la France mit trois ans à réduire entre 1923 et 1926.
  • 38 Pierre Lhande, Le Christ dans la banlieue, p. 183.
  • 39 Ibid., p. 193.

23C’est pour la banlieue la plus lointaine que le P. Lhande évoque la « tâche de Taza37 », expression mise à la mode par les opérations marocaines mais qui avait déjà été utilisée par le commandant Besnard qui désignait ainsi « les cinq ou six communes qui s’étendent au nord de Saint-Denis et que leur éloignement joint à la lenteur des communications rend presque inaccessibles38 ». Passé Pierrefitte, c’est au « cœur de la tâche de Taza » que Lhande arrive dans deux lotissements séparés par une voie : « c’est le Maroc, au-delà c’est l’Avenir39 ».

24Il faudrait entreprendre des recherches de grande ampleur sur les écrits concernant les banlieues pour tenter de dater l’apparition des comparaisons avec la Chine ou avec les colonies. Dans Le Courrier du Rosaire déjà cité, la comparaison avec les Noirs d’Afrique est explicite : « On trouve bien le moyen d’évangéliser les Noirs de l’Afrique. Il me semble qu’avec un peu de bonne volonté, on pourrait arriver au même résultat pour les habitants de Paris… ».

La grande diversité des habitants de banlieue

  • 40 Ibid., p. 6.

25Le P. Lhande ne décrit pas les banlieues des classes moyennes même s’il n’ignore pas leur existence. « Sans doute, tous, dans ce peuple de refoulés, ne sont pas des indigents, des sans-foyer. Beaucoup préfèrent la tranquillité […]. Ceux-là, ouvriers, vendeurs, chefs de bureaux (sic), gens de profession libérale ont réussi à acheter, ou du moins à louer, au-delà des fortifications, une maisonnette avec un petit jardin qui ne manquent pas d’élégance40. » Mais de ceux-là et de cette banlieue-là, avec « des semis de villas toutes neuves », le P. Lhande ne parlera plus. Car face à des « privilégiés », il y a la foule des petites gens auxquels il va attribuer, tour à tour, toute une série de noms et de qualificatifs. Dans la zone, il distingue deux types de populations, les bandits et les chiffonniers.

26Globalement, la lecture des écrits du P. Lhande montre que si sa position est surplombante, elle n’est pas dénuée d’un profond intérêt et d’une réelle empathie. Dans les dernières pages du Dieu qui bouge, il établit un parallèle entre le peuple et la grande bourgeoisie, et qui n’est pas vraiment à l’avantage de cette dernière :

  • 41 Pierre Lhande, Le Dieu qui bouge, p. 234.

Le peuple français, lui, malgré ses tares individuelles, est plus sain qu’on ne le croit. S’il a fauté, sa faute n’a pas ruiné des familles entières. S’il a volé, ce n’est pas dans la poche des petits commerçants. S’il n’a pu – souvent à cause de ses conditions anormales de vie – et même s’il n’a pas voulu avoir un foyer établi dans l’ordre de la loi de Dieu, il n’a pas rempli de ses scandales les chroniques des journaux41.

  • 42 Ibid., p. 64.

27Sur un plan religieux, le P. Lhande distingue divers types de populations. Les chiffonniers n’éprouvent pas d’hostilité vis-à-vis du curé et il est relativement facile d’entrer en contact avec eux. Les populations des grands lotissements sont indifférentes, celle des banlieues rouges souvent hostiles. Bobigny, symbole même de la « banlieue rouge », a vu sa population croître de façon exponentielle. Au départ elle est surtout formée de maraîchers puis elle a recueilli « ce que Paris lui a envoyé, ce sont d’abord, par milliers et milliers, ses pauvres hères, ses indésirables, ses Turcs, ses Serbes, ses Tchécoslovaques, ses Arabes, puis, plus tard, […] ses ouvriers, ses cheminots, ses petits employés ». Là, la population semble totalement indifférente, sur un total de 15 000 à 18 000 habitants il n’y a pas plus de 150 « catholiques pratiquant peu ou prou42 ».

  • 43 Ibid., p. 28.

28Enfin, le P. Lhande distingue diverses générations : « La première génération [originaire des provinces de l’Ouest] savait donc quelque chose du Bon Dieu, mais la seconde beaucoup moins ; la troisième n’en sait plus rien43 ».

29Pourtant globalement, le phénomène de migrations des campagnes vers les grandes banlieues industrielles est analysée comme une chance par le P. Lhande qui établit un parallèle entre cet afflux vers les villes et les déplacements des populations au Moyen Âge.

  • 44 Ibid., p. 194.

C’est ainsi que la conversion en masse de nos ancêtres s’est opérée à la faveur de phénomènes ethniques et sociaux presque identiques à ceux qui font aujourd’hui affluer vers nos villes les habitants des campagnes […]. De nouveau, le peuple de nos campagnes, retombé en partie dans le paganisme et hors d’atteinte de nos trop rares ouvriers, envahit à grands flots les abords de ce qui représente le monastère de jadis : la grande ville, la Cité44.

30Cette analyse paraît assez originale et ne présente pas les campagnes comme des régions systématiquement chrétiennes. D’autre part, le P. Lhande considère que les élites sociales et religieuses de Paris sont une chance pour évangéliser la banlieue.

Prêcher par l’exemple, par les actes… et par la parole

  • 45 Ibid., p. 88.

31Les curés de banlieue doivent conquérir des masses qui sont hostiles ou indifférentes pour la plupart. Ils doivent œuvrer à une évangélisation qui renvoie à l’imaginaire missionnaire des lointains. « Autrefois, quand on avait le zèle des âmes, on partait pour la Chine. Aujourd’hui, on prend le tram aux portes de Paris45 ».

  • 46 Pierre Lhande, Le Dieu qui bouge, p. 16.
  • 47 Ibid., p. 15.
  • 48 Ibid., p. 187.
  • 49 Ibid p. 158.

32La pénétration religieuse de la banlieue suppose de nombreuses stratégies mais elles sont toutes subordonnées, aux yeux du jésuite, à la qualité de la personnalité du curé de banlieue. « Cet homme, il le faut, avant tout, capable de sacrifice et d’initiative, intelligent, actif, ingénieux, discret46 ». Ces prêtres, tous volontaires, doivent avoir une mentalité de « défricheurs47 », le goût de l’action et le « sens populaire ». Le P. Lhande en fait les héros d’une geste héroïque, ces prêtres utilisent tout l’argent récolté à construire pour les autres en négligeant complétement le confort de leur presbytère. Le P. Lhande a pris en photographie le presbytère de la Courneuve, délabré, moisi. « Ce triste presbytère évoque un souvenir – Ars48 ». Les descriptions du prêtre de banlieue montrent qu’il vit pauvrement, son presbytère est très sommaire, et enfin souvent le prêtre est présenté comme travaillant de ses mains à l’édification de l’église, de la salle de patronage ou de catéchisme. À titre d’exemple, on peut évoquer le curé des Moulineaux : « armé d’une pioche et d’une pelle, il travaille à niveler les abords de sa pauvre chapelle. Quand la nuit est tombée, on le voit poursuivre son labeur à la lumière d’une petite chandelle fichée au coffre d’une brouette ; et ses paroissiens de murmurer le mot qui a fait fortune : "ça, pour sûr qu’on n’a pas un curé fainéant49 !" ». Il y a donc dans la vie de ces curés dans la pauvreté et le don total, des reflets de sainteté. Même si le P. Lhande ne le théorise pas, il s’agit bien de montrer une méthode d’apostolat qui tient à se faire pareil à celui que l’on veut convertir, conversion du semblable par le semblable, mot d’ordre de l’Action catholique spécialisée mais qui rejoint l’exigence pour un prédicateur d’être aussi un témoin. Cette figure de curé défricheur dans les banlieues athées inspire une pièce de théâtre à Grégoire Leclos en 1931 sous le titre Notre Dame de la Mouise, porté à l’écran par Robert Péguy en 1941.

  • 50 Pierre Lhande, Le Christ dans la banlieue, p. 17.

33Si les curés de banlieue sont issus de diverses régions et de milieux sociaux variés, Pierre Lhande note une particularité dans leur recrutement. L’archevêque de Paris a souvent fait appel à des curés expérimentés issus « des plus belles paroisses de Paris, écoles d’activité et d’expérience, centre de relations indispensables pour réunir les ressources qui, là-bas, manqueront totalement50 ». Une étude prosopographique de ces curés de banlieue serait utile pour mieux connaître leur formation. Combien ont des liens avec l’Action populaire et l’Institut d’études sociales ? Combien sont liés aux Semaines sociales ?

34L’objectif prioritaire du « défricheur » du curé de banlieue est de conquérir les enfants et la jeunesse.

Un objectif prioritaire : la conquête de la jeunesse

  • 51 Ibid., p. 34.
  • 52 Ibid., p. 32.
  • 53 Ibid., p. 33.

35Cette stratégie résulte d’un constat, l’impossibilité d’évangéliser vraiment la génération des adultes. « La prodigieuse ignorance, la routine, les préjugés qui régnaient chez les parents rendaient leur christianisation parfaite à peu près impossible51 ». Le P. Lhande note que « le seul vestige survivant de préoccupation chrétienne concerne les mourants et les morts52 ». C’est donc par les sacrements que commencent bien des curés pour apprivoiser cette population : l’extrême onction et le baptême étant les plus populaires. « Le baptême, avec son cérémonial gracieux, fut de même accueilli avec faveur. C’est l’occasion d’une petite fête mi-religieuse et mi-profane53 ». Et après avoir fait baptiser leurs enfants, les chiffonniers en viennent aussi « à l’idée du mariage à l’église ».

  • 54 Ibid., p. 34.

Il leur faut un cérémonial court, bien compréhensible, exprès pour eux. Généralement, ils réclament la musique – entendez l’harmonium. Voici la petite liturgie qu’ils affectionnent le plus : chant du Veni Creator, cérémonie du mariage, quête (ils y tiennent absolument) pendant que l’harmonium joue, chant du Magnificat54.

  • 55 Pierre Lhande, Le Dieu qui bouge, p. 208.
  • 56 Ibid., p. 209.
  • 57 Ibid., p. 212.

36Vis-à-vis des adultes, il n’est guère possible d’aller plus loin. Le P. Lhande note dans Le Dieu qui bouge : « la plupart de ces immigrés adultes se présentent en effet dans des conditions de moralité et de mentalité telles qu’il est bien difficile de les transformer complètement. Ils appartiennent à une génération entièrement laïcisée55 ». C’est donc vers la jeunesse que les prêtres tournent surtout leurs efforts et ils commencent dès le plus jeune âge. Le P. Lhande tirant les leçons de ses nombreuses visites dans les banlieues en conclut que l’œuvre « qui paraît avoir donné les effets les plus rapides et les plus consolants, c’est la garderie ou la pouponnière56 ». Le P. Lhande analyse finement que la garde des tout-petits ne suppose pas une mobilisation de moyens très importants et surtout permet un contact très fréquent avec les parents qui accompagnent forcément tous les déplacements de leurs enfants. Et que les soins maternels dont les enfants sont l’objet créent une ambiance propice aux confidences, à la sympathie. La christianisation de fond passe par la formation des jeunes. Partout les curés ouvrent des patronages puis toute « une série d’œuvres secondaires […] les cercles d’études, les cours du soir, l’enseignement professionnel57… ».

  • 58 Pierre Lhande, Le Christ dans la banlieue, p. 34-35.

En prenant de bonne heure les enfants […] en tâchant d’éveiller puis de former chez eux le sens moral ; surtout en les munissant des ressources de l’eucharistie, en les enrôlant dans les patronages, on pourrait, sans doute, faire d’eux des chrétiens. Après tout, ils étaient à prendre. À part quelques timides essais des protestants et un embryon de Jeunesse communiste, aucune organisation n’avait tenté de capturer ces lapins sauvages58.

  • 59 Ibid., p. 220.

37Mais le P. Lhande estime que deux parmi ces œuvres donnent des résultats exceptionnels : le scoutisme et la JOC. C’est ainsi que le P. Lhande prête au curé du Blanc-Mesnil ces propos : « C’est par les enfants et par les œuvres que j’aurai le pays ». Ce curé, l’abbé Boulard, a ouvert une cantine scolaire où il accueille des enfants de toutes les origines. Les méthodes d’apostolat donnant la primeur aux actions sociales et au patronage semblent largement répandues et représentent une certaine unité dans les principes. Pierre Lhande en livre peut-être une des clefs d’explication en évoquant « l’influence de l’Action populaire sur la formation et l’éducation sociales des prêtres de banlieue »59.

  • 60 Ibid., p. 101.

Tous [les prêtres], ils ont compris que, dans cette volte-face complète du problème religieux, il s’agissait moins de repeindre les portes de l’église ou recrépir le clocher que de fonder des œuvres de jeunesse, former une élite, consolider un noyau » et si la banlieue cache une activité religieuse intense « elle est au "patro", au cercle d’études, à l’école, au dispensaire, à la consultation60.

  • 61 Idem.

38Ces « patro » que Lhande appelle les « usines spirituelles de la banlieue61 ».

Une prédication bien discrète

  • 62 Les souvenirs de l’abbé Tronson ont été rassemblés par son vicaire : Pierre Dufourd, Un Sillon dans (...)

39Dans ce que le P. Lhande présente comme le « code du défricheur », c’est-à-dire du curé de banlieue, il énumère les principes de conquête et les pratiques de pénétration. La conquête tient en trois principes généraux : connaître son peuple et être connu de lui, organiser avec méthode les œuvres, exercer une « bonté sacerdotale indéfectible ». La pénétration suppose la vie en communauté du clergé, la centralité du Saint-Sacrement – notamment grâce aux chants qui ménagent une part aux fidèles et à des « cérémonies qui empoignent l’âme des fidèles » – et le développement de l’apostolat individuel. Cette méthode reprise du curé des Moulineaux, l’abbé Tronson, ne mentionne jamais le rôle de la prédication62.

40Malgré des milliers de pages consacrées à la description de l’évangélisation des banlieues, le P. Lhande n’évoque quasiment jamais la prédication. Il décrit parfois la parole des prêtres mais il s’agit d’une parole hors magistère. Parlant de deux frères, curés de Drancy et de Bobigny :

  • 63 Pierre Lhande, Le Christ dans la banlieue, p. 77.

À Bobigny, le doux a charmé les tigres ; à Drancy, le fort a conquis la place. Nous ignorons comment prêche le doux, mais voici comment parle le fort – du moins du haut d’une estrade, dans une vaste salle de fêtes, bondée à craquer de communistes bons enfants, c’est-à-dire ses fidèles : "vous les cathos, vous entendez ? Je ne veux pas que vous envoyiez vos enfants au patronage laïque. Je vous préviens, ils n’y apprendront qu’à être grossiers. Faites passer un examen de politesse et de bonnes mœurs à cent enfants du patro laïque et à cent enfants de mon patro. Les miens auront le prix, haut la main63".

41Il ne s’agit ici évidemment pas d’un prêche à l’église mais dans une salle des fêtes. Le langage direct du prêtre attaque sans détour le patronage laïque. Le P. Lhande rapporte presque toujours des paroles qui visent à nouer un dialogue quotidien et banal. Le curé du Pré-saint-Gervais, près de Bagnolet, décrit son activité ainsi :

  • 64 Ibid., p. 116.

Je consacre chaque jour au moins deux heures à visiter ma paroisse : j’en connais les moindres recoins. Le soir, en montant mes quatre étages, je suis rompu […]. Le but de ces courses ? Causer, causer et causer, c’est-à-dire combattre des préjugés tels que ceux-ci : le curé ne va que chez les riches, le curé est un homme d’argent64

42L’abbé D., curé de Notre-Dame-de-la-Salette

  • 65 Ibid., p. 12.

se promène bravement chez les communistes. Son style, le voici. Aux hommes : "Eh ! Adieu ! Vieux ! Ҫa fait tout de même plaisir de te revoir ! Alors ? Ҫa va chez toi ? […] Aux femmes qui cousent à la fenêtre : "Bonjour, la mère ! Ce que ça en use, hein !, des fonds de culotte, ces marmots65".

  • 66 Ibid., p. 129.

43Comment expliquer le relatif silence du P. Lhande au sujet de la prédication ? La première explication pourrait tenir au fait que le P. Lhande visite les lieux, parle avec le curé et les habitants mais n’assiste vraisemblablement pas à la messe du dimanche, lui-même étant alors occupé ailleurs. Mais cela signifie aussi que ni le curé ni ses paroissiens n’évoquent jamais ce chapitre. Or le P. Lhande est lui-même un orateur et un prédicateur très conscient du pouvoir de la parole. Il nous semble qu’il y a une autre explication à ce silence et que celui-ci traduit l’inexistence d’une prédication spécifique dans les banlieues ouvrières. Il semble même que la prédication ait mauvaise presse dans ce milieu-là. Les ouvriers s’étonnent et se réjouissent tout à la fois, « le prêtre ne nous a même pas fait de sermons » car les curés ont la mauvaise réputation d’être des « bourreurs de crâne » qui tâchent de remplir leur église pour faire donner à la quête. La meilleure prédication semble alors de ne pas prêcher. Le curé de Suresnes confie que ses paroissiens préfèrent la musique aux sermons : « Les sermons… Hum ! … il faut que ce soit très beau et, ma foi, on ne peut pas leur payer du Janvier ou Sanson tous les jours ! Alors, en avant la musique ! La belle musique ! J’ai deux cents voix, hommes et femmes parfaitement exercées66 ».

44Le témoignage du curé de Suresnes paraît un peu surprenant, il prête à ses paroissiens de grandes exigences en termes de qualité de sermons que seuls les plus grands prédicateurs dominicains du temps, les dominicains Janvier et Sanson, seraient à même de satisfaire.

  • 67 Ibid., p. 240.

45Le P. Lhande ne nous fait guère pénétrer dans les églises durant les offices, si ce n’est une fois pour un exercice. Dans une grange destinée à devenir une église, l’abbé de la paroisse demande à son jeune confrère ou peut-être vicaire : « Prêchez un peu, j’écoute – Mes frères… – Plus haut ! Je n’entends pas ! Allez-y ! Le ton de Notre-Dame ! – Éminentissime Seigneur !… – À la bonne heure67 ! »

  • 68 Ibid., p. 256.
  • 69 Ibid., p. 142.

46Le peu de références que le P. Lhande livre sur un type de prédication renvoie à un modèle qui est celui des grands sermons à Notre-Dame à travers les grands noms de Janvier et Sanson ou encore à travers cette référence. Ce modèle est-il celui des prêtres de banlieue ou celui du P. Lhande ? Il est vrai que le P. Lhande a noté que de nombreux prêtres de banlieue venaient des grandes paroisses parisiennes mais cela entre en contradiction avec ses remarques sur le style épistolaire des curés de banlieue : « Ce n’est pas toujours Madame de Sévigné qui a tenu la plume. On est d’un pays où le coutil et la futaine sont mieux achalandés que la guipure et le point d’Alençon68 ». L’abbé Petit, vicaire à Courbevoie, donne une explication prosaïque à une prédication assez rudimentaire : « Moi aussi je parle – à peu près tout le temps – mais, Dame ! Pas un moment pour préparer. Alors, il sort ce qu’il sort, mais c’est toujours avec le cœur69 ».

47Plus que la parole, il semble que ce soit toute la personnalité du prêtre qui compte, selon le chanoine Lanier, vice-official de Paris : il y faut

  • 70 Ibid., p. 137.

l’abnégation totale, le don de soi sans mesure […] la préoccupation surnaturelle primant tout et constituant le levier de l’intense activité extérieure, […] [le] secret enfin, c’est la mise en actions de moyens bien étudiés et exactement appropriés pour la pénétration religieuse d’un tel milieu […] : patronages et séances récréatives, bibliothèque, secrétariat des familles, mutuelles-décès, dispensaires, etc.70

48C’est par les œuvres et par une activité sociale, éducative, culturelle plus que par la prédication que les prêtres des banlieues pensent pouvoir pénétrer le milieu populaire et ouvrier.

Une prédication à propos des banlieues

  • 71 Ibid., p. 141.

49Il y a bien une forme de prédication, tournée non vers les populations des banlieues mais vers les classes aisées de la capitale afin de trouver des fonds permettant de financer les œuvres des banlieues. Prédication qui se fait dans les églises ou les salons de l’aristocratie : « Notre curé est éloquent, ça nous sert, parce qu’il va prêcher pour nous à Paris, tant qu’il peut. Et les Parisiens aiment à donner quand on leur parle bien71 ».

50Bien évidemment, le P. Lhande a joué un rôle majeur et l’on retrouve parfois dans ces ouvrages les accents du prédicateur :

  • 72 Ibid., p. 160.

Ce que vous aurez fait au plus petit d’entre les miens, c’est à moi que vous l’aurez fait… Plus heureux, et de beaucoup serez-vous à donner qu’à posséder […]. Et beaucoup, dans ce grand et beau Paris endormi, semble-t-il, d’un égoïste sommeil […] ont entendu ces paroles. De ces beaux hôtels aux volets bien clos, de ces appartements aux tapis moelleux, sortiront tout à l’heure, pour assister ceux qui souffrent sur l’autre rive, "les passeurs du Bon Dieu : hommes d’œuvres, femmes du monde, jeunes filles"72.

  • 73 Ibid., p. 190.

51La bourgeoisie et l’aristocratie de la capitale forment aussi le lectorat implicite du P. Lhande. Celui-ci s’adresse rarement à son lecteur mais lorsqu’il le fait, il s’adresse toujours à un nanti : « Ah, grand et beau et généreux Paris ! Toi qui alimentes magnifiquement des foules d’œuvres dans les coins les plus reculés de la France et du monde ! Songeras-tu un jour à tes propres besoins [en fait ceux de sa périphérie, de la banlieue73] ? »

  • 74 Radio-Paris donne une causerie d’une demi-heure, le dimanche pour les catholiques, le sermon du dim (...)

52La prédication radiophonique du P. Lhande s’inscrit en partie dans ce cadre74. Dans les causeries comme dans ses prédications de carême, la banlieue occupe une place importante.

La solidarité surnaturelle des riches et des pauvres

  • 75 Radio-Paris donne une causerie d’une demi-heure, le dimanche pour les catholiques, le sermon du dim (...)

53Les sermons du P. Lhande à la radio illustrent de façon explicite ce qui était déjà sous-jacent dans ses articles. Si Paris et ses banlieues ne peuvent se comprendre que comme les deu La prédication radiophonique du P. Lhande s’inscrit en partie dans ce cadre75. Dans les causeries comme dans ses prédications de carême, la banlieue occupe une place importante.x membres d’un même organisme vivant, indispensables l’un à l’autre, Paris et ses banlieues entretiennent aussi des liens surnaturels.

  • 76 Pierre Lhande, Les Pauvres dans l’Évangile, radio-Sermons 1929, Paris, Éditions Spes, 1929, p. 34.

Ce qui me fait choisir pour sujet de ce Carême "les Pauvres dans l’Évangile", c’est à la fois le spectacle, presque quotidien, de la pénurie matérielle qui frappe mes yeux dans les faubourgs et la banlieue de Paris, et aussi celui de la détresse morale, de l’incroyable indigence spirituelle où se débattent tant d’âmes […]. C’est à ces deux classes, si différentes, de pauvres, que je voudrais apporter quelque remède : à la première en intéressant en sa faveur les privilégiés du monde ; à la seconde en lui apportant la lumière, la consolation, le réconfort de la foi, de l’espérance et de la charité76.

  • 77 Ibid., p. 88.
  • 78 Les dates de cette prédication sont adaptées aux besoins et à la durée des émissions radiophoniques (...)
  • 79 Pierre Lhande, Les Pauvres, op. cit., p. 84.
  • 80 Ibid., p. 100.
  • 81 Ibid., p. 101.

54Les paroles du P. Lhande sont saisissantes et expliquent la rareté de ses propos sur la prédication dans les banlieues. Son premier souci vis-à-vis des pauvres est d’abord de les secourir matériellement. La découverte des banlieues lui permet de renouer avec le grand thème classique de la charité et du salut par l’exercice de la charité car selon lui, il serait bien faux de déclarer : « Il n’y a plus de pauvres ! […] Que ceux qui tiennent pareils propos viennent à Paris77… ». C’est donc aux pauvres qu’il consacre sa prédication radiophonique de carême du 3 février au 28 avril 1929 en treize émissions78. Certes les détresses spirituelles ne touchent pas seulement les élites mais aussi « les bas-fonds ». Pour illustrer cette double pauvreté matérielle et spirituelle, Lhande choisit « l’apologue de la drachme perdue79 ». Un autre de ses sermons commente la parabole du mauvais riche et le P. Lhande s’efforce de ne pas heurter ses auditeurs riches qu’il n’assimile pas aux pharisiens de l’époque de Jésus : « Ce sont de bons riches, mais des riches… Ils ont donc leur leçon à prendre dans cet apologue »80. Le P. Lhande leur rappelle que « le superflu, c’est le patrimoine du pauvre81 ».

  • 82 Yves Poncelet, « Un éclairage à l’approche du cent cinquantenaire : l’œuvre du père Lhande (1927-19 (...)

55La prédication du P. Lhande trahit deux présupposés : l’un d’ordre théologique – la pauvreté n’est porteuse d’aucune « valeur spirituelle intrinsèque82 », elle est un malheur pour l’humanité ; l’autre d’ordre sociologique, qui conduit le P. Lhande à s’intéresser davantage aux pauvres qu’aux ouvriers. Or les deux groupes ne se recoupent que très partiellement.

  • 83 Pierre Lhande, Les Pauvres, op. cit., p. 106.

56Le P. Lhande prêche pour une réconciliation des classes sociales car « le mal dont nous souffrons dans notre société vient de ce que chacun se barricade dans sa citadelle : le riche dans son hôtel, le pauvre, hélas, dans son taudis. Quand on arrive à se connaître, tous les préjugés tombent »83.

57Les ouvrages du P. Lhande ressortissent à la fois du reportage et du recueil de sermons. Dans les uns comme dans les autres, il se montre très sensible à la grande difficulté des conditions d’existence de populations déracinées, à l’habitat précaire. Il décrit longuement les méthodes d’apostolat dans ces milieux indifférents qui passent avant tout par l’action sociale et éducative.

  • 84 En 1931, Le Christ dans la banlieue est arrivé à la 135ème édition, Le Dieu qui bouge à la 60ème. C (...)
  • 85 Sermons publiés dans L’Évangile par-dessus les toits ou L’Évangile par-dessus les frontières.
  • 86 AJ, L5-5.
  • 87 AJ, L5-1-1.
  • 88 La gestion de ces sommes a été à l’origine d’un certain nombre de tensions. Ledechosky, le Père gén (...)

58L’importance et l’influence de la vision de la banlieue par le P. Lhande se mesure certes au nombre important des rééditions de ses ouvrages84, au succès de ses sermons radio-diffusés qui au travers du thème des pauvres évoquent souvent la banlieue85. Cependant, la réception et l’impact de l’œuvre du P. Lhande ne se mesurent pas seulement à l’aune du tirage de ses livres mais du courrier de ses lecteurs86 ainsi que de leur mobilisation à travers les dons. Une liste ne concernant que les dons supérieurs à mille francs87 entre 1926 et 1939 arrive au total de 2 457 650 francs. L’impact du Christ dans la banlieue a été très fort puisque sur deux seules années en 1928 et 1929, il reçoit près de deux millions de francs88.

  • 89 AJ, L5/1-1.

59Le titre Le Christ dans la banlieue est devenu une sorte de label. À Lyon par exemple, une Œuvre de mission catholique dans l’agglomération lyonnaise s’appelle le Christ dans la banlieue89. En juillet 1932, le chanoine Touzé fonde une revue Christ dans la banlieue, Revue de l’urbanisme religieux du diocèse de Paris. Enfin, il faut évoquer le film de Robert Péguy, tiré du Christ dans la banlieue sous le titre Notre Dame de la Mouise sorti sur les écrans en 1941.

  • 90 Miriam Simon, op. cit., p. 458.

60Le P. Lhande conjugue alors deux qualités précieuses, l’expertise et le charisme. En effet, les trois ouvrages détaillés qu’il a consacrés aux banlieues en font au sein de l’Église un de ses meilleurs connaisseurs et ses talents oratoires démultipliés par les ondes radiophoniques lui donnent un pouvoir de mobilisation important. De ce fait il est pendant quelques années au centre des dispositifs : c’est le rapport rédigé par le P. Lhande que le cardinal Verdier envoie au préfet Renard dans lequel « il formule la demande de sept terrains » en 193090. Le P. Lhande a été largement impliqué dans la préparation et le lancement de l’Œuvre des nouvelles paroisses de la région parisienne opéré par le cardinal Verdier durant l’hiver 1931.

  • 91 Henri Queféllec, Le Jour se lève sur la banlieue, Paris, Grasset, 1962.
  • 92 Henri Godin et Yvan Daniel, La France, Pays de mission, Paris, Ed. du Cerf, 1943, p. 57.

61Cependant si les titres du P. Lhande sont repris et cités par tous ceux qui écrivent ou s’intéressent à la banlieue pendant les années 1940 et 1950 – les abbés Godin et Daniel, l’auteur anonyme de Cinq ans dans la banlieue rouge ou encore Henri Queffelec91 –, tous lui adressent des critiques. Il aurait échoué à pénétrer le milieu ouvrier : « Faisons le bilan : il est magnifique, car la conquête d’une âme vaut toute une vie d’efforts, et des centaines d’âmes ont été touchées… Mais du point de vue de la pénétration du prolétariat, il est presque nul92 ».

62Ce jugement tranché mériterait d’être longuement étayé. Peut-être faut-il rappeler que pour le P. Lhande il s’agissait avant tout de rompre les hostilités, de gagner des sympathies, de faire franchir le seuil de l’église. L’échec de la pénétration du milieu ouvrier dans les banlieues tenait-il surtout à une erreur d’approche, de méthode ? Cette question ne peut trouver réponse que dans une étude de longue durée et doit éviter de tomber trop vite dans le schéma d’une inévitable déchristianisation, les banlieues ouvrières n’étant alors vues que comme un accélérateur et un amplificateur d’un phénomène général, ou à l’opposé dans une interprétation qui part du présupposé de la possibilité d’une réussite de l’évangélisation des banlieues ouvrières, populaires, et qui déduirait des limites de celle-ci les insuffisances de ses promoteurs et de leurs méthodes.

Haut de page

Notes

1 Thierry Paquot, Banlieues, une anthologie, Lausanne, Presses polytechniques et universitaires romandes, 2008, p. 125.

2 Jeanne Moret, Le Père Lhande pionnier du Christ dans la banlieue et à la radio, Paris, Beauchesne, 1964. Le livre ne repose pas vraiment sur une enquête historique même si certaines archives ont été consultées. Voir également Camille Canteux, Le Père Lhande et la banlieue parisienne, mémoire de maîtrise, Université Paris I, 1996. La figure du P. Lhande est aussi évoquée par Miriam Simon, « La construction des lieux de culte sur les anciens bastions de Paris dans l’entre-deux-guerres », Revue d’histoire de l’Église de France, 90, juillet-décembre 2004, p. 453-479.

3 Annie Fourcaut, Emmanuel Bellanger, Mathieu Flonneau, Paris/banlieues, conflits et solidarités : historiographie, anthologie, Grâne, Créaphis, 2007.

4 Bruno Dumons, « Villes et christianisme dans la France contemporaine. Historiographies et débats », Histoire urbaine, 13, 2005, p. 155-166.

5 Émile Poulat, « La découverte de la ville par le catholicisme français contemporain », Annales : économies, sociétés, civilisations, 6, novembre-décembre 1960, p. 1168-1179.

6 Olivier Chatelan, « Les catholiques et l’urbanisation de la société française », Vingtième siècle. Revue d’histoire, 2011, 3, p. 147-158. Cet article donne plusieurs conclusions d’une thèse soutenue sur le sujet en 2009.

7 Les papiers du père Lhande sont consultables aux Archives de la Compagnie de Jésus à Issy-les-Moulineaux, citées dans cet article sous l’abréviation AJ.

8 Pierre Lhande, « Le Bon Dieu chez les chiffonniers », Études, t. 184, 5 septembre 1925, p. 513-524.

9 AJ, Papiers Pierre Lhande, L1/1.5., « Pierre Lhande, jubilé ».

10 Sur l’origine de la « vocation » du P. Lhande, voir les premières pages du Christ dans la banlieue ; Jeanne Moret, op. cit., p. 84-87 ; Paul Droulers, Le Père Desbuquois et l’Action populaire, 1919-1946, Paris, Les Éditions ouvrières, 1981, p. 381.

11 Pierre Lhande, « L’Église dans la banlieue, enquête sur la vie catholique dans les milieux ouvriers autour de Paris », Études, 5 mars 1926, t. 186.

12 Annie Fourcaut, Emmanuel Bellanger, Mathieu Flonneau, op. cit., p. 194.

13 Camille Canteux, op. cit., p. 82.

14 Il loge rue Monsieur le Prince dans le 5ème arrondissement de Paris.

15 Dans sa préface au second volume, Le Dieu qui bouge, il énumère 52 villes dans lesquelles il a donné des conférences.

16 D’après un récit biographique : AJ, « Papiers Lhande », L 1/1.

17 Jacques-Olivier Boudon, Paris, capitale religieuse sous le Second Empire, Paris, Cerf, 2001.

18 Ibid., p. 250-255.

19 Émile Poulat, op. cit. ; voir aussi Pierre Pierrard, L’Église et les ouvriers en France (1840-1940), Paris, Hachette, 1984.

20 Pierre Lhande, Le Christ dans la banlieue, Paris, librairie Plon, 1927, p. 153-154.

21 Ibid., p. 195.

22 Courrier du Rosaire, 1899, cité par F. Veuillot, Apostolat social. Les œuvres du Rosaire au faubourg de Plaisance, Paris, 1903, p. 34.

23 Annie Fourcaut, Bobigny la rouge, Paris, Éditions ouvrières, 1986.

24 Pierre Lhande, Le Christ dans la banlieue, op. cit. p. 143.

25 De temps à autre, il cite des chiffres : Drancy est passée de 450 habitants en 1870 à 5 000 en 1914 puis 15 448 en 1920 et 28 000 en 1925 (Pierre Lhande, op. cit., p. 75).

26 Pierre Lhande, Le Dieu qui bouge, Paris, Librairie Plon, 1930, p. 79-93.

27 Ibid., p. 196.

28 Pierre Lhande, Le Christ dans la banlieue, p. 6.

29 Ibid., p. 7.

30 Idem.

31 Ibid., p. 21.

32 Ibid., p. 159-160.

33 La publication sur la banlieue verte est plus tardive, en 1939, chez Bloud & Gay.

34 Pierre Lhande, Le Christ dans la banlieue, p. 7.

35 AJ, L6/2.2, Pierre Lhande, « Achères et la banlieue verte », conférence du 12 février 1938.

36 Pierre Lhande, Le Christ dans la banlieue, p. 21.

37 Zone très isolée du Moyen Atlas que la France mit trois ans à réduire entre 1923 et 1926.

38 Pierre Lhande, Le Christ dans la banlieue, p. 183.

39 Ibid., p. 193.

40 Ibid., p. 6.

41 Pierre Lhande, Le Dieu qui bouge, p. 234.

42 Ibid., p. 64.

43 Ibid., p. 28.

44 Ibid., p. 194.

45 Ibid., p. 88.

46 Pierre Lhande, Le Dieu qui bouge, p. 16.

47 Ibid., p. 15.

48 Ibid., p. 187.

49 Ibid p. 158.

50 Pierre Lhande, Le Christ dans la banlieue, p. 17.

51 Ibid., p. 34.

52 Ibid., p. 32.

53 Ibid., p. 33.

54 Ibid., p. 34.

55 Pierre Lhande, Le Dieu qui bouge, p. 208.

56 Ibid., p. 209.

57 Ibid., p. 212.

58 Pierre Lhande, Le Christ dans la banlieue, p. 34-35.

59 Ibid., p. 220.

60 Ibid., p. 101.

61 Idem.

62 Les souvenirs de l’abbé Tronson ont été rassemblés par son vicaire : Pierre Dufourd, Un Sillon dans la terre rouge. Monographie de la paroisse des Moulineaux, Paris, Spes, 1929.

63 Pierre Lhande, Le Christ dans la banlieue, p. 77.

64 Ibid., p. 116.

65 Ibid., p. 12.

66 Ibid., p. 129.

67 Ibid., p. 240.

68 Ibid., p. 256.

69 Ibid., p. 142.

70 Ibid., p. 137.

71 Ibid., p. 141.

72 Ibid., p. 160.

73 Ibid., p. 190.

74 Radio-Paris donne une causerie d’une demi-heure, le dimanche pour les catholiques, le sermon du dimanche à Notre-Dame ainsi que les prédications des six dimanches du carême : Corinne Bonafoux, « Le P. Lhande (1877-1957) : pionnier de la prédication radiophonique », Revue des sciences religieuses, juillet 2004, 78/3, p. 401-416.

75 Radio-Paris donne une causerie d’une demi-heure, le dimanche pour les catholiques, le sermon du dimanche à Notre-Dame ainsi que les prédications des six dimanches du carême : Corinne Bonafoux, « Le P. Lhande (1877-1957) : pionnier de la prédication radiophonique », Revue des sciences religieuses, juillet 2004, 78/3, p. 401-416.

76 Pierre Lhande, Les Pauvres dans l’Évangile, radio-Sermons 1929, Paris, Éditions Spes, 1929, p. 34.

77 Ibid., p. 88.

78 Les dates de cette prédication sont adaptées aux besoins et à la durée des émissions radiophoniques. Les titres de ces prédications : « La drachme perdue », « les miettes de la table », « Les sans-travail », « Le repas sur la montagne, « Les pauvres honteux », « l’obole de la veuve », « L’enfant prodigue », « Les sept paroles du Christ en croix », « Les joies de Pâques », « Les chemins d’Emmaüs », « Les pauvres d’amour », « les pauvres de foi », « le chemin de damas ». Textes intégralement publiés dans Les Pauvres dans l’Évangile, op. cit.

79 Pierre Lhande, Les Pauvres, op. cit., p. 84.

80 Ibid., p. 100.

81 Ibid., p. 101.

82 Yves Poncelet, « Un éclairage à l’approche du cent cinquantenaire : l’œuvre du père Lhande (1927-1934) », Les Catholiques français et l’héritage de 1789, Paris, Beauchesne, 1989, p. 171.

83 Pierre Lhande, Les Pauvres, op. cit., p. 106.

84 En 1931, Le Christ dans la banlieue est arrivé à la 135ème édition, Le Dieu qui bouge à la 60ème. Ces indications demanderaient à être mieux précisées mais elles donnent malgré tout une idée du succès.

85 Sermons publiés dans L’Évangile par-dessus les toits ou L’Évangile par-dessus les frontières.

86 AJ, L5-5.

87 AJ, L5-1-1.

88 La gestion de ces sommes a été à l’origine d’un certain nombre de tensions. Ledechosky, le Père général des jésuites, lui demandant de transférer l’entière gestion au diocèse de Paris tant en 1926 qu’en 1928. Ceci étant, le P. Lhande constate que l’attribution des sommes ne suivait pas les vœux de certains donateurs ou que 100 000 francs avaient disparu avec le sacre de Mgr Gerlier. Sur cette question, cf. Camille Canteux, op. cit., p. 154-158.

89 AJ, L5/1-1.

90 Miriam Simon, op. cit., p. 458.

91 Henri Queféllec, Le Jour se lève sur la banlieue, Paris, Grasset, 1962.

92 Henri Godin et Yvan Daniel, La France, Pays de mission, Paris, Ed. du Cerf, 1943, p. 57.

Haut de page

Pour citer cet article

Référence papier

Corinne Bonafoux, « Le Père Lhande, jésuite-reporter de la banlieue »Chrétiens et sociétés, 21 | -1, 147-168.

Référence électronique

Corinne Bonafoux, « Le Père Lhande, jésuite-reporter de la banlieue »Chrétiens et sociétés [En ligne], 21 | 2014, mis en ligne le 16 juin 2022, consulté le 10 décembre 2024. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/chretienssocietes/3709 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/chretienssocietes.3709

Haut de page

Droits d’auteur

CC-BY-NC-ND-4.0

Le texte seul est utilisable sous licence CC BY-NC-ND 4.0. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.

Haut de page
Rechercher dans OpenEdition Search

Vous allez être redirigé vers OpenEdition Search