Le glaive et la chair : le pouvoir et son incarnation au temps des derniers Valois
Résumés
Au xvie siècle, pouvait-on concevoir la monarchie autrement qu’incarnée ? Servir le roi, c’était servir un prince auquel on était lié personnellement, et non une institution abstraite. Le monarque devait apparaître comme un compagnon pour la noblesse militaire. Henri II représentait le modèle du roi chevalier. Contrairement à son père, Charles IX ne faisait pas la guerre, mais il épuisait son corps dans d’interminables chasses. Henri III a tenu dans sa jeunesse le rôle de chef de guerre. Devenu roi, il a cherché à mener une politique conjuguant les effets de la guerre et de la paix. Le corps du prince s’imposait comme une Imago Mundi concentrant les vertus et les vices des hommes. Corps et âme devaient être contrôlés et purifiés simultanément. Était-ce possible pour un roi sacré ?
Plan
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- 1 Jean-Louis Fournel, « “Brutalisation” de la guerre et barbarie », Jean-Louis Fournel et Jean-Claude (...)
1La théorie des deux corps du roi établie par Ernst Kantorowicz à partir de l’examen des pratiques funéraires des rois d’Angleterre du bas Moyen Âge a fourni un cadre heuristique très fécond pour les historiens du pouvoir de la première modernité. La dichotomie entre la dignité immatérielle qui ne meurt jamais et la dimension incarnée de l’autorité, périssable et labile, paraît s’imposer comme allant de soi quand on se penche sur les institutions de l’ancienne monarchie. Pour autant, les hommes du xvie siècle ne concevaient guère la monarchie autrement qu’incarnée. Servir le roi, c’était servir un prince auquel on était lié personnellement, et non une institution abstraite. Cette dimension éminemment personnelle des relations de pouvoir explique qu’on n’avait guère de scrupule à manifester son mécontentement ou son incompréhension à l’égard d’un souverain qui ne correspondait pas aux attentes placées en lui. Cependant, depuis la fin du xve siècle, la monarchie s’était engagée dans un processus d’exaltation conjuguée de la dimension religieuse du pouvoir et de la fonction guerrière du souverain. L’idéal chevaleresque s’imposait comme un horizon moral et esthétique naturel. Charles VIII, Louis XII, François Ier et Henri II ont pris la tête de leurs armées en Italie ou sur les frontières de leur royaume. La guerre de la Renaissance était particulièrement violente et les villes d’Italie ont fait l’amère expérience de la brutalité extrême avec laquelle se comportaient les conquérants1. Le caractère fondamentalement incarné de l’autorité se révéla d’une façon éclatante à la mort d’Henri II.
« Dieu le conduisit par la main »
- 2 Lettres de Charles VIII, roi de France, éd. P. Pélicier, Paris, 1898-1905, 5 vol., t. IV, p. 11 (Ch (...)
2À partir de la fin du xve siècle, le roi de France a fait l’objet d’un phénomène de sacralisation spectaculaire. Son office fut présenté comme une charge au caractère sacré de plus en plus affirmé. Charles VIII a été présenté comme un prince promis à des exploits exceptionnels et engagé par de fortes obligations religieuses. À partir de 1494, il s’intitula roi de Jérusalem et il envisagea de s’embarquer pour la Terre Sainte après avoir conquis le royaume de Naples. À la veille de la campagne, le jeune prince ne craignait pas de déclarer qu’il entreprenait ce voyage « pour aller plus avant et faire quelque grant service à Dieu, à l’Église et à l’exaltacion de la foy catholique2 ». Alors qu’il était peu impressionnant physiquement, le roi sembla métamorphosé par l’esprit de guerre le jour de la bataille de Fornoue, comme Philippe de Commynes l’a rapporté. Il apparaissait comme le guerrier de Dieu, guidé par la Providence, dont la venue avait été annoncée par Jérôme Savonarole :
- 3 Philippe de Commynes, Mémoires, éd. J. Blanchard, Genève, Droz, 2007, 2 vol., t. I, p. 634.
Et sembloit que cest homme jeune fust tout aultre que sa nature ne portoit, ne sa taille ne sa complexion : car il est fort craintif à parler encores au jour d’uy (aussi avoit esté nourry en grande craincte) et petite personne. Et ce cheval le monstroit grant, et avoit le visaige bon et bonne couleur, et la parolle audacieuse et saige. Et sembloit bien, et m’en souvient, que frere Jheronime m’avoit dit vray que Dieu le conduisit par la main et qu’il auroit de l’afaire ou chemin, mais que l’honneur luy en demourerait3.
- 4 Nicole Hochner, Louis XII. Les dérèglements de l'image royale (1498-1515), Seyssel, Champ Vallon, 2 (...)
3Louis XII reprit à son compte l’ambition hiérosolymitaine de son prédécesseur, et il arma même une petite flotte pour combattre les Turcs. L’ancien duc d’Orléans se voulait avant tout un roi de justice exemplaire et un parfait chrétien. C’est dans cet esprit que l’assemblée de notables réunie à Tours en mai 1506 donna au monarque le surnom de Père du Peuple, qui s’inspirait du titre de Pater Patriæ des anciens Romains que les Italiens avaient exhumé. Bien des années plus tard, au temps des guerres de Religion, on regrettait encore le règne de ce monarque idéal, soucieux du bien-être de ses sujets et modeste dans ses exigences fiscales. Mais si le titre de Père du Peuple pouvait sous-tendre « l’idée d’une responsabilité du pouvoir par rapport à l’intérêt public4 », il attribuait surtout au monarque une puissance supérieure qui le distinguait radicalement de ses sujets. À l’occasion de l’entrée de Louis XII à Paris après son sacre, en 1498, avait d’ailleurs été gravée une médaille sur laquelle figurait le portrait qu’accompagnait une inscription latine précisant qu’il s’agissait de l’effigie sacrée (Sacra Effigies) du Divin Louis XII (Divi Ludovici Duodecimi), Roi Très-Chrétien des Francs (Francorum Regis Christianissimi). Reprenant à son compte l’usage institué par les Sforza de Milan, Louis XII fut le premier roi de France à se faire représenter sur des pièces de monnaie. Il fit ainsi frapper à Milan des « testons » d’argent sur l’avers desquelles il apparaissait en buste, de profil, coiffé d’un chaperon couronné, avec l’inscription « Ludovicus D[ei] G[ratia] Francor[um] Rex », tandis que sur le revers était visible saint Ambroise, le patron de Milan, à cheval, un fouet à la main, avec l’inscription « Mediolani Dux ». Cet usage fut importé en France en 1514, où l’on frappa des testons dont l’avers portait le buste du roi à la mode milanaise, et le revers l’écu royal couronné avec l’inscription « Christus Vicit Christus Regnat Christus Irat » (« Le Christ vainc, le Christ règne, le Christ commande »). Sous François Ier, les émissions de testons se multiplièrent, et l’on connaît plusieurs dizaines de versions différentes du portrait royal sur ces pièces d’argent. C’est sous ce règne que la couronne fermée à l’impériale fit son apparition sur les représentations du souverain, comme on peut le voir sur certaines pièces.
- 5 Sur la monarchie de la Renaissance comme système dialogique, voir J. Russell Major, From Renaissanc (...)
- 6 Rebecca A. Boone, War, Domination, and the Monarchy of France : Claude de Seyssel and the Language (...)
4Le pouvoir du prince de la Renaissance reposait sur son aptitude à composer avec ses sujets les plus puissants, à commencer par les grands seigneurs, mais aussi avec les Bonnes Villes et les assemblées des pays d’États, dont il était dépendant sur le plan financier5. Cette dimension dialogique du fonctionnement de l’autorité n’était pas véritablement théorisée, mais c’est bien à elle que les théoriciens de la monarchie faisaient implicitement référence quand ils insistaient sur le devoir qu’avait le prince de prendre conseil et de respecter les fondements coutumiers de la monarchie. À l’avènement de François Ier, Claude de Seyssel rappela ainsi au jeune souverain qu’il devait savoir de lui-même modérer son autorité pour la rendre supportable et juste6.
5Si les aptitudes morales jouaient un rôle déterminant dans l’orientation du monarque sur la voie du bon ffiervernement, les qualités physiques étaient loin d’être négligeables dans le portrait du prince idéal. La discipline du corps prolongeait le travail de maîtrise de l’âme, et l’apparence physique jouait un rôle important dans l’affirmation de l’autorité. François Ier a pu être célébré comme un monarque exemplaire parce qu’il incarnait parfaitement les valeurs chevaleresques, et que sa prestance aristocratique flattait l’image que la noblesse avait d’elle-même. Les pourpoints brodés, les colliers d’or, les armes de prix, tout contribuait à affirmer la supériorité d’un prince qui se devait d’apparaître comme un être d’exception.
- 7 Philippe Hamon, « Une monarchie de la Renaissance ? 1515-1559 », Joël Cornette (dir.), La Monarchie (...)
- 8 Anne-Marie Lecoq, François Ier imaginaire. Symbolique et politique à l’aube de la Renaissance franç (...)
- 9 Omar Carlier et Raphaëlle Nollez-Goldbach (dir.), Le corps du leader. Construction et représentatio (...)
6Comme l’a montré Philippe Hamon, la Renaissance a connu une exaltation nouvelle de la personne du souverain : « L’identification entre roi régnant et monarchie, voire entre roi et couronne progresse : dans tous les domaines, le corps physique du roi est mis en avant7. » C’est surtout à partir de François Ier que la dimension surnaturelle de la puissance royale fut exaltée8. Plus que jamais, le corps du prince possédait une « puissance démonstrative9 » qui exprimait les fondements de son autorité. Dans son Institution du prince, composée dans les premières années du règne de François Ier, Guillaume Budé offre la description d’un monarque idéal qui s’accorde bien avec l’apparence du souverain qui a été transmise par les témoignages contemporains :
- 10 Guillaume Budé, L’Institution du Prince, éd. C. Bontems, dans Le Prince dans la France des xvie et (...)
Aussi grande santé et bonne composition et habitude de corps, avec singulière dextérité de membres et agilité, pour facilement, deuement et décentement exercer l’office de Roy ; stature belle et au vray dire héroicque, et maintien avenant de tout le corps, grace et majesté de face et pareillement de visaige, ensemble natifve et diserte facilité de langaige, lesquelles choses font les princes plus vénérables à ceulx qui gectent leur vue sur eulx. C’est assavoir à tout le monde, car le bon et le mauvais des roys ne se peult cacher, mesmement des roys de France, pource que toutes gens ont désir de les bien congnoistre, et à ceste cause les regardent par grant attention10.
- 11 Lawrence M. Bryant, The King and the City in the Parisian Royal Entry Ceremony : Politics, Ritual a (...)
7Prince christique, héros chevaleresque, demi-dieu surhumain, le vainqueur de Marignan incarnait les valeurs aristocratiques de son temps. Son fils, Henri II suivit cette voie, et il fut célébré à son tour non seulement comme un conquérant victorieux, mais aussi comme un roi de paix capable d’imposer l’obéissance à ses sujets par la force de son éloquence, comme le signifiait la statue de l’Hercule gaulois figurant sur l’un des arcs de triomphe érigés à l’occasion de l’entrée triomphale à Paris en 154911.
Les armes du Très-Chrétien
- 12 Denis Crouzet, La Nuit de la Saint-Barthélemy. Un rêve perdu de la Renaissance, Paris, Fayard, 1994
- 13 « Relation de Jean Michiel après son ambassade de 1561 », in Niccolò Tommaseo (éd.), Relations des (...)
8Contrairement à ses prédécesseurs, François II mourut trop vite pour avoir le temps de faire ses preuves comme homme d’armes. Son frère, Charles IX, épuisait son corps maladif dans d’interminable chasses à défaut de faire la guerre. Cet exercice permettait d’exprimer la violence constitutive de l’identité nobiliaire, et les bêtes sauvages pouvaient apparaître comme une forme incarnée des passions dévastatrices que le prince avait le devoir de combattre12. Le roi était décrit comme un prince fragile physiquement, mais passionné par les armes et la chose guerrière13.
- 14 Michel François et alii (éd.), Lettres de Henri III, Paris, 1959-2006, 6 vol. parus, t. I, p. 105-1 (...)
- 15 Ibid., t. I, p. 135 (Henri à Tavanes, Tonnay-Boutonne, 14 décembre 1569).
9À la différence de ses frères, Henri III a tenu dans sa jeunesse le rôle de chef de guerre. À défaut de s’imposer comme un véritable stratège, le jeune prince a supporté la vie rude des camps, et il n’a pas manqué de suivre ses troupes lors des opérations. Il conduisit ainsi les armées royales à la victoire en 1569, avant de commander les forces qui mirent le siège devant La Rochelle en 1573. Au cours de ses campagnes, le jeune prince agissait en véritable chef de guerre, mettant lui-même les troupes en ordre de bataille, n’hésitant pas à prendre leur tête pour marcher sur l’ennemi et à demeurer en selle toute la journée, comme il ne manquait pas de le faire savoir à son frère Charles IX14. À l’issue de la campagne victorieuse de Moncontour, le jeune chevalier ne cachait pas qu’il désirait à présent que la paix soit rapidement négociée car il se sentait épuisé : « tout le monde est sy las de la guerre qu’il n’est possible de plus15. »
- 16 Ibid., t. I, p. 115 (Henri à Jacques d’Humières, Amboise, 11 août 1569) (BnF Ms Fr 3178, fol. 156).
10S’il souhaitait tenir du mieux possible son rôle de lieutenant général du roi, à la tête de ses armées, Henri était-il pour autant animé par une idéologie de croisade qui l’aurait amené à voir dans ses adversaires des hérétiques qu’il fallait exterminer ? Il parle des réformés en armes en employant en général le terme d’« ennemis », ou parfois ceux de « rebelles » ou de « huguenotz », jamais celui d’hérétiques. Cela ne l’empêche pas cependant de considérer que son combat est juste et que Dieu l’approuve. En revanche, le sentiment d’avoir un rôle exemplaire à tenir a toujours été présent dans son esprit. Il proclamait vouloir être le premier à se mettre en campagne « pour monstrer le chemyn et servir d’exemple aux autres à une si saincte et urgente necessité16 ». À l’issue de la bataille de Jarnac, Henri se sentait certainement animé par une forme d’exaltation. Il ne doutait pas que ses armes avaient été guidées par Dieu, comme il le fit savoir au duc d’Urbino :
- 17 Ibid., t. I, p. 87-88 (Henri au duc d’Urbino, Jarnac, 13 mars 1569).
Mon cousin, après avoir longtemps poursuivy l’armée du prince de Condé et des autres chefs de la nouvelle religion, l’estant venu chercher pour la combattre depuis ung des boutz de ce royaume jusques à l’autre, il a plu à Dieu par sa saincte grace favoriser tant la sainte religion catholicque, apostolicque et romaine, et la justice de la cause du Roy, mon très honoré seigneur et frère, allencontre de ses subjects rebelles, que j’ay rompu leur armée, et icelle chassée devant la mienne au galop plus de deux grands lieues ; y ayant esté tué ledict prince de Condé, et grand nombre de gentilshommes et chefs de guerre, et prins plusieurs prisonniers d’importance17.
- 18 Ibid., t. I, p. 89 (Henri à Catherine de Médicis, Segonzac, 17 mars 1569).
11La disparition de Condé apparaissait certainement comme le juste châtiment d’un criminel de lèse-majesté qui avait osé non seulement désobéir à son souverain légitime, mais même le menacer. Sa mort avait un caractère providentiel, comme Henri le déclara à sa mère, faisant référence à « la grande et heureuse victoire que Dieu vous a donnée et de la mort du prince de Condé18 ». À son frère le roi, il affirmait que la victoire témoignait de la protection que Dieu lui accordait :
- 19 Ibid., t. I, p. 90 (Henri à Charles IX, Segonzac, 17 mars 1569).
[…] par où il est aysé à congnoistre que Dieu est protecteur de son Eglise et de la justice de vostre cause et qu’il vous a reservé assez de gens de bien en vostre Royaulme pour abaisser l’orgueil de voz ennemis et reduire voz subiectz rebelles en vostre obéissance19.
12En revanche, il faisait savoir aux protestants qu’il ne les affrontait pas pour des motifs religieux. C’est ce qu’il écrivit au jeune Henri de Navarre :
- 20 Ibid., t. I, p. 95 (Henri à Henri de Navarre, Aulnay, 25 mars 1569).
[…] et seroys bien d’advis que vous mesmes prinssiez volunté de […] retourner trouver le roy, mondict seigneur et frere, lequel je m’asseure, attendu sa bonté et vostre jeune aage, vous embrassera, ne vous laissant plus abuzer à ceulx qui vous meinent où vous ne pouvez faire que contre Sa Majesté et vostre debvoir, n’estant plus en ce faict question de la religion, car les actions passées jusques à ceste heure en font bonne et claire preuve20.
- 21 Hector de La Ferrière et alii (éd.), Lettres de Catherine de Médicis, Paris, 1880-1943, 12 vol., t. (...)
- 22 BnF Ms Fr 3951, fol. 151 v° (Charles IX à Schomberg, 13 septembre 1572), cité par Arlette Jouanna, (...)
13À ce moment, Charles IX entendait être considéré comme un monarque absolu, c’est-à-dire universellement obéi. Catherine de Médicis elle-même était particulièrement soucieuse avant tout de voir ses fils capables de « commander absolument21 ». Au lendemain de la Saint-Barthélemy, le roi justifia la mise à mort de l’amiral de Coligny en affirmant que le chef militaire du parti huguenot avait acquis une telle puissance que lui-même ne pouvait plus se dire « Roy absolut22 ». Quelques mois plus tard, au moment du siège de La Rochelle, Charles IX faisait part à son frère Henri de sa volonté d’être obéi absolument :
- 23 BnF Ms Fr 15557, fol. 103 (Charles IX au duc d’Anjou, s.l., 3 avril 1573).
C’est le couronnement de l’œuvre, l’establissement certain et entier de mon auctorité et d’un repos perpetuel en mon Royaume, et la perfection de tout ce que vous avez si bien et heureusement acheminé pour me tirer de la subgection en laquelle j’ay jusques icy esté reduit, et me fere regner Roy absolut en cedit Royaume, comme ont faict mes predecesseurs23.
- 24 Edmond Cabié (éd.), Guerres de Religion dans le Sud-Ouest de la France et principalement dans le Qu (...)
- 25 Discours et recueil du siege de La Rochelle en l’année 1573, Lyon, J. Saugrin, fol. 10 v°.
- 26 Histoire du siège de La Rochelle en 1573 [trad. fr. de : Philippi Caurianae De obsidione Rupellae c (...)
14Les exploits belliqueux des princes n’étaient pas sans risque. Pendant le siège de La Rochelle, de nombreux membres de l’entourage d’Henri furent blessés, voire tués. Le jeune lieutenant général lui-même descendit dans la tranchée à plusieurs reprises. On pouvait ainsi légitimement craindre pour la vie même du lieutenant général et de son frère cadet, François. Le seigneur responsable de ce dernier, Jean de Saint-Sulpice, ne manqua d’ailleurs pas d’écrire à son épouse que les tranchées n’étaient point « lieux de fils de roi24 ». Le 14 juin 1573, Henri n’hésita pas à se tenir à découvert devant l’une des portes de la ville pour négocier avec les assiégés. S’en retournant vers son coup, il essuya des tirs d’arquebuse qui blessa deux gentilshommes de sa suite. S’il faut en croire un occasionnel publié à l’issue du siège, une balle lui déchira la fraise et l’autre lui glissa sur la main25. Un autre récit assure que le prince se trouva pris sous le tir de deux canons alors qu’il inspectait les retranchements avec son jeune frère et le roi de Navarre, et qu’il fut touché à la tête, à la main gauche et à la cuisse26.
- 27 Blaise de Vigenère, Les Chroniques et Annales de Poloigne, Paris, J. Richer, 1573, « Epistre ».
- 28 Ibid., p. 484.
15Cette réputation de grand soldat permit à Henri d’être choisi comme roi par les magnats polonais. Ceux-ci avaient en effet besoin d’un monarque capable de les défendre d’une part contre Ivan le Terrible, et d’autre part contre le sultan ottoman. C’est d’ailleurs comme un chef de guerre exemplaire qu’Henri fut fêté lors de son accession au trône de Pologne. Dans la chronique polonaise qu’il publia au lendemain de l’élection, Vigenère célèbre ainsi le « très magnanime et invincible courage » du jeune homme qui avait combattu pour le bien de « la Republique chrestienne27 ». Pour mieux rehausser l’éclat de son héros, il n’hésite pas à présenter son prédécesseur, Sigismond II Auguste, comme un monarque trop « addonné à son plaisir, c’est à dire au repos28 ».
- 29 Denis Crouzet, Le Haut Cœur de Catherine de Médicis. Une raison politique aux temps de la Saint-Bar (...)
- 30 Edmond Bonnaffé, Inventaire des meubles de Catherine de Médicis en 1589. Mobilier, tableaux, objets (...)
16Pour les hommes de la Renaissance, le prince idéal devait faire respecter sa loi en se déplaçant sans cesse. Machiavel avait déjà souligné cette dimension essentielle de l’autorité. Ce gouvernement péripatéticien était bien un gouvernement du corps, et la maîtrise de l’espace s’imposait comme une dimension essentielle du pouvoir. Il fallait fuir l’inaction, qui risque toujours de dégénérer en paresse. Le prince devait rester constamment sur le qui-vive. Convaincue que « la passivité, dans son mode d’appréhension de l’histoire, ne peut que déboucher sur l’échec29 », Catherine de Médicis a certainement transmis cette conception du pouvoir à ses fils. C’est bien pour cette raison qu’elle a fait voyager la cour de Charles IX, au lendemain de la première guerre de Religion, lui faisant accomplir un exceptionnel tour de France qui dura deux ans. Cet intérêt pour l’espace l’amena également à accumuler de nombreuses cartes, dans son hôtel parisien bâti près de l’église Saint-Eustache30.
17Le dernier Valois ne prit plus la tête de ses armes, après son accession à la couronne de France en 1574. Il fallut des circonstances dramatiques pour qu’il accepte de remonter à cheval, d’abord en 1587, mais il n’eut pas à combattre, puis en 1589, quand il marcha sur Paris. Entre-temps, le souverain avait fait le choix d’une politique de tolérance et de réformation. D’une certaine façon, le règne d’Henri III commença véritablement en 1577 avec l’édit de Poitiers qui mettait fin à la sixième guerre civile et réinstaurait le régime de tolérance limité établi par l’édit de pacification de 1563.
« Ramener l’ancien âge d’or »
- 31 Montaigne, Essais, éd. Villey-Saulnier, Paris, PUF, 2004, II, 19 (« De la liberté de conscience »), (...)
18À partir de 1560, Catherine de Médicis et ses fils ont dû réagir à plusieurs soulèvements aristocratiques et confessionnels. La reine mère était une catholique scrupuleuse, mais peu versée en théologie. Elle souscrivait certainement à la déclaration suivante, due à la plume de Montaigne : « En ce debat par lequel la France est à present agitée de guerres civiles, le meilleur et le plus sain party est sans doute celuy qui maintient et la religion et la police ancienne du pays31. » Catherine s’est vue projetée brutalement sur la scène politique au lendemain de la disparition tragique de son époux en 1559. Après avoir délaissé dans un premier temps les rênes du gouvernement au duc François de Guise et à son frère le cardinal de Lorraine, elle prit conscience du caractère critique de la situation dans laquelle se trouvait le royaume et décida d’assumer la régence à l’avènement de Charles IX, en décembre 1560. Au cours des mois qui suivirent, elle n’eut de cesse de chercher la voie de l’apaisement. Le travail entrepris par le chancelier Michel de L’Hospital est bien connu. La liberté de conscience fut reconnue de facto en juillet 1561, quand on renonça aux perquisitions chez les particuliers pour la poursuite des hérétiques. On tenta ensuite de parvenir à une via media dogmatique, lors du colloque de Poissy, mais cette entreprise se révéla impossible. La reine et son ministre décidèrent alors de limiter les interventions de l’autorité royale à la sphère civile. C’est dans cet esprit qu’ils se rallièrent à l’idée que seul l’accord aux réformés de l’exercice public de leur culte, de jour et hors des villes closes, pourrait apaiser les esprits des huguenots. Catherine de Médicis proclamait que le monarque n’avait pas à se prononcer en matière de dogme, et que son office ne concernait que la sphère civile. Mais cette position n’était pas aisée à tenir. La guerre éclata justement parce que la reine avait fait le choix de la tolérance.
- 32 Archives nationales, X1A 8627, fol. 333-337 (registres du parlement de Paris, 28 septembre 1568) ; (...)
19À l’issue d’une année d’affrontements, Catherine et ses conseillers finirent par publier un édit établissant une tolérance limitée. La position de la reine et de ses fils allait être désormais de maintenir ce principe de cohabitation pacifique mais les prises d’armes de Condé la poussèrent à se séparer du chancelier Michel de L’Hospital et à renoncer au principe de tolérance. Tel était l’objet de l’édit de Saint-Maur de septembre 156832. Ce texte exceptionnel comporte un long préambule exprimant la position de la reine et de son fils Charles IX. C’est toute une histoire de la politique royale qui est ici exprimée. On y rappelle en effet que François Ier et Henri II, agissant en « protecteurs de la Sainte Église », ont cherché à « conserver l’union et réprimer la division de religion ». La mort tragique d’Henri II est présentée comme l’événement déclencheur des troubles. Elle a en effet amené « certains des grands » à diviser le royaume, non par zèle religieux mais par « ambition de gouverner ». Dépouillés de toute motivation confessionnelle, les troubles sont ainsi réduits à une lutte de factions aristocratiques. Les ministres protestants sont présentés comme des boutefeux qui soufflent sur les braises du mécontentement nobiliaire pour précipiter le royaume dans la confusion. Le roi François II est décrit comme un monarque d’une « très grande bonté à lui naturelle à l’exemple du Père céleste », qui aurait mis en œuvre une politique de clémence. Cependant les « grands obstinés » poursuivirent leurs menées « sous prétexte de religion ». La mort de François II renforça les tensions, et certains grands seigneurs choisirent ce moment dramatique pour prendre sous leur protection la « nouvelle opinion ». Le jeune Charles IX apparaît comme un prince soucieux à la fois de s’inscrire dans la continuité de l’histoire de la monarchie en professant la foi de ses prédécesseurs et en respectant les usages de l’Église. Les troubles provoqués par « lesdits protecteurs de la nouvelle opinion » empêchèrent l’application de l’édit de juillet 1561, par lequel le jeune roi avait rappelé que seul le culte catholique pouvait être exercé publiquement, et c’est pourquoi il se vit contraint de concéder l’édit de tolérance de janvier 1562. Le préambule de l’édit de Saint-Maur souligne bien que l’édit de Janvier n’avait qu’une valeur provisoire, et que Catherine de Médicis l’avait octroyé « contre son opinion », par pure nécessité politique. Il s’agissait d’une mesure d’urgence temporaire, prise dans le contexte d’un rapport de forces défavorable, en attendant que Charles IX, ayant grandi, puisse rendre ses « sujets plus obéissants ». Les huguenots sont jugés responsables des explosions de violence qui suivirent la publication de l’édit de Janvier. Le roi, au contraire, est présenté comme un prince clément et prêt à la conciliation. C’est dans cet esprit qu’il accorda l’édit de pacification d’Amboise en mars 1563, « esperant que la bonté divine, par le moyen de nostre majorité, les reduirait en celle de son Eglise durant le repos public ». Néanmoins, les rebelles reprirent les armes quatre ans plus tard et ils tentèrent même de s’emparer du roi et de sa famille lors de la surprise de Meaux. Bien qu’un nouvel édit de pacification leur ait été accordé l’année suivante, ils prirent les armes une troisième fois, et c’est pourquoi le nouvel édit, qui était présenté comme irrévocable, revenait sur la politique de conciliation. Une seule religion était désormais autorisée, mais il était précisé que la mesure concernait seulement l’exercice du culte, non la liberté de conscience. L’intolérance ne touchait donc que la dimension publique de la religion, car les consciences étaient dans la main de Dieu, « esperant que ci-après, par inspiration divine et par le bon et grand soin que nous aurons à tenir la main que tous evesques et pasteurs de l’Eglise de notredict royaume s’emploient et fassent leur devoir, nosdicts sujets de ladicte pretendue religion pourront retourner et se reunir avec nous et nos autres sujets à l’union de la Sainte Eglise catholique. » Les protestants qui déposeraient les armes obtiendraient l’amnistie.
20Tous les édits royaux, qu’ils imposent la tolérance ou qu’ils la suppriment, relevaient de la même logique. Il s’agissait de conserver l’autorité du monarque dans la sphère publique. Par ailleurs, l’attachement du souverain à l’Église catholique était réaffirmé dans tous les édits. La politique de pacification fut néanmoins remise en vigueur en 1570, puis en 1573, mais les troubles recommencèrent l’année suivante. C’est dans ce contexte qu’Henri III parvint au pouvoir.
- 33 Tragedia del S. Cl. Cornelio Frangipani al Christianissimo et Invitissimo Henrico III Re di Francia (...)
21Le dernier Valois se trouvait en Pologne, quand il apprit la disparition de son frère Charles IX. Il s’enfuit aussitôt pour rejoindre la France, traversant l’Autriche et l’Italie du nord. Ce trajet donna lieu à des festivités remarquables. Les entrées triomphales et les spectacles fonctionnaient à l’époque comme une forme de discours politique. Lors de son passage à Venise, en juillet 1574, Henri III assista au Palazzo Ducale à la représentation d’un spectacle musical qui se présentait comme une sorte de leçon de gouvernement. Dieux et déesses l’invitèrent à se comporter comme un prince exemplaire. Mars et Pallas rivalisèrent pour s’imposer comme le principal inspirateur du monarque. Mars chantait la guerre tandis que Pallas en appelait à la paix. Réconciliés par Mercure, les deux divinités proposèrent un modèle de gouvernement reposant sur l’équilibre afin de « ramener l’ancien âge d’or33 ». Mais au moment où ce spectacle était représenté, le royaume de France subissait de nouveau les affres de la guerre civile.
« Les cœurs des Rois sont en la main de Dieu »
22Henri III chercha à mener une politique conjuguant les effets de la guerre et de la paix. Lui-même cherchait à faire de sa personne un lieu de conjugaison des forces contraires qui animaient les âmes de ses sujets. Le corps du prince s’imposait en effet comme une Imago Mundi concentrant les forces et les vertus, mais aussi les vices des hommes. Le souverain avait le sentiment qu’il devait apparaître comme une figure exemplaire pour l’ensemble de son peuple, et qu’il concentrait sur sa personne les péchés de ses sujets.
- 34 Nicolas Le Roux, La Faveur du roi. Mignons et courtisans au temps des derniers Valois (vers 1547-ve (...)
- 35 Jean de La Taille, Le Blason des pierres précieuses contenant leurs vertuz et proprietez, Paris, L. (...)
23Henri III pouvait considérer l’enveloppe charnelle comme le miroir de l’âme, qui par son maintien peut révéler la rectitude morale de la personne. Mais le corps était aussi l’écran qui empêche l’âme de participer pleinement à la félicité des créatures glorieuses qui triomphent dans l’éternité. À la cour, le maintien du corps apparaissait comme une forme nécessaire d’adaptation à la complexité des relations de pouvoir qui s’y exerçaient. Henri III a été particulièrement sensible à l’apparence extérieure de ses proches. Fameuse est l’anecdote, rapportée par le biographe du duc d’Épernon, selon laquelle il se serait emporté contre son favori parce que celui-ci était entré dans sa chambre avec le pourpoint mal boutonné34. Les bijoux, les perles, les diamants portés sur le bonnet, ou encore les boucles de corail affirmaient le statut social tout en exprimant un idéal de pureté morale. La perle jouait un rôle exemplaire à ce propos. Le corail était réputé pour ses vertus magiques : il était censé changer de couleur au contact de la peau d’une personne ayant été empoisonnée, comme Jean de La Taille le note dans son traité sur les vertus des pierres précieuses35.
- 36 Jean Dorigny, La Vie du père Emond Auger, Avignon, 1828 ; Paul Deslandres, « Le Père Emond Auger, c (...)
- 37 Emond Auger, Le Pédagogue d’armes, pour instruire un prince chrétien à bien entreprendre et heureus (...)
- 38 Ibid., p. 15.
- 39 Ibid., p. 119.
- 40 [Père] Henri Fouqueray, Histoire de la compagnie de Jésus en France, des origines à la suppression (...)
24Corps et âme devaient être contrôlés et purifiés simultanément. Henri III a été précocement marqué par l’imaginaire pénitentiel. Il a été encouragé par le jésuite Emond Auger, qu’il a rencontré en 1568, lorsque celui-ci se rendit à la cour à la demande du cardinal de Lorraine pour prêcher le carême36. Le futur souverain a très certainement été impressionné par le religieux, auquel il demanda de l’accompagner à la guerre. C’est à ce moment qu’il composa un petit traité dédié au roi Charles IX, dans lequel il invitait les princes catholiques à réaliser la « bonne guerre » contre les hérétiques37. Il y soutenait notamment que le prince ne doit jamais composer avec l’ennemi si cela menace la pureté de la religion, et il soulignait que la religion constituait le « cyment » de l’ État38. Auger se faisait par ailleurs l’apologiste de la puissance royale, et il assurait que dans la monarchie française, « toutes choses se gouvernent au clin d’œil d’un seul Roy39 ». Le jour de la bataille de Jarnac, Henri se confessa auprès du Père Auger, avant de communier lors de la messe que celui-ci célébra devant les chefs de l’armée royale. Le jésuite assure qu’il aida ensuite le duc à mettre son armure, et que durant la rencontre il se tint à ses côtés40.
- 41 Emond Auger, Les Statuts de la Congrégation des pénitens de l’Annonciation de Nostre Dame, Paris, J (...)
- 42 Emond Auger, Metanoeologie. Sur le suget de l’Archicongregation des Penitens de l’Annonciation de n (...)
25Auger quitta l’armée après la bataille de Moncontour, mais Henri put l’entendre de nouveau lorsqu’il revint à la cour pour prêcher le carême de 1571. Il réclama de nouveau son assistance spirituelle lors du siège de La Rochelle en 1573, et à son retour de Pologne, celui qui était désormais roi de France le retrouva à Lyon en septembre 1574. Auger a probablement été consulté lors de la fondation de l’ordre du Saint-Esprit, en décembre 1578, et Henri III fit de nouveau appel à lui quand il décida d’instituer une compagnie de pénitents à Paris. C’est en effet Auger qui rédigea les statuts de la compagnie des pénitents blancs de l’Annonciation Notre-Dame fondée en mars 158341. La troupe réalisa plusieurs processions spectaculaires dans les rues de la capitale et elle accompagna également le souverain dans ses pèlerinages aux grands sanctuaires mariaux de Cléry, près d’Orléans, et de Chartres en mars 1584. Les pénitents blancs arboraient la discipline à la ceinture, mais ils n’en faisaient pas usage en public. L’instrument devait leur rappeler les souffrances du Christ. Cependant, certains membres de la compagnie semblent bien avoir pratiqué cet exercice en secret. Auger encourageait l’usage de la discipline auquel saint Louis avait recours secrètement chaque vendredi, comme il le rappelait dans son discours sur la pénitence, car de cette façon, le chrétien apprend à mourir au monde et purifier son corps des « passions brutales et désirs qui salissent et tachent la beauté et pureté de nos ames42 ».
- 43 Ibid., « Epistre ».
26Auger, qui tenait le rôle de directeur de conscience du souverain rédigea un long traité intitulé Metanoeologie, par lequel il appelait les catholiques à la conversion. Dans cet ouvrage adressé à Henri III, le jésuite soutenait que si chez « chaque homme privé, l’ame et le corps s’entrecommandent et s’entreservent à tour pour fortifier leur commun estre », dans les royaumes « où le droit divin et l’humain lient le tout, le Prince doit conspirer avec le gouvernement des consciences43 ». À ses yeux, il ne faisait aucun doute que les sphères civile et spirituelle se conjoignaient, et que la stabilité de l’État royal dépendait de l’étroite association de la « police » et de la religion. S’inspirant du livre des Proverbes, il rappelait aussi que « les cœurs des Rois sont en la main de Dieu, et de lui descend leur sagesse » (Prov 21, 1), ou encore que « comme la hauteur du Ciel, et la profondité de la terre, nous est incogneue, aussi sont les cœurs des Rois » (Prov 25, 3). Il se félicitait que le roi ait décidé de quitter régulièrement les distractions de la cour pour se retirer « à part avec Dieu » :
- 44 Ibid.
Ce qui fait, Sire, à le dire sans fard, que par ces desseins de vostre Magesté, de s’escarter (après avoir longuement reveu et rangé les affaires de vostre estat) ès lieux par vous choisis, avec la compagnie saisie d’une pareille amour du Crucifix, pour vous y r’allier avec Dieu, nettoier vostre ame, reprendre aleine, rehumer le doux air de devotion, rafraichir vostre esprit, par ces saintes façons de vie solitaire et comme reguliere, jouissant d’une bien occupée oisiveté, à fin de r’entrer, au partir de là, au maniement de ce grand Roiaume, et aux provisions, et du public, et des particuliers, selon ce qu’un bon pere doit à ses propres enfans, sans oublier l’un pour l’autre (comme Dieu vous y a obligé) raclant le tout aux vanités pour le faire servir son quartier aux honnestes recreations, vous dressés un gouvernement très excellent, où la contemplative Marie, et l’active Marthe commandent à tour, et avec le tems vous ferés (assisté de la perseverante grace d’en-hault) paroistre au monde, que, et les Princes peuvent chrestiennement philosopher, et tels Philosophes après, doivent aussi commander44.
- 45 Ibid., p. 161 et suiv.
- 46 Isabelle Haquet, L’Énigme Henri III. Ce que nous révèlent les images, Nanterre, Presses universitai (...)
27Pour Auger, comme pour nombre d’autres ecclésiastiques, le souverain devait apparaître comme un être exemplaire, pratiquant les vertus chrétiennes à leur plus haut degré. Auger prônait un mépris du monde fondé sur la vertu de tempérance. Considérant que le sac du pénitent, sans couture à l’image de la tunique du Christ, était l’habit qui plaisait le mieux à Dieu, il préconisait la modestie dans l’apparence vestimentaire45. Suivant cette injonction, Henri III renonça à ses pourpoints chatoyants pour se vêtir de noir. Les représentations du monarque témoignent de l’évolution de sa sensibilité. Les portraits en pourpoint noir, avec le col blanc rabattu à l’italienne, le cordon bleu céleste du Saint-Esprit et le bonnet à aigrette, se sont imposés au début des années 1580. Ce modèle iconographique a été établi par Jean Decourt, qui a succédé à François Clouet comme peintre du roi en 1572, et non par François Quesnel, à qui l’on attribue nombre de portraits du roi, qui ne s’imposa comme l’un des principaux peintres de la cour que sous le règne suivant46.
Portrait d’Henri III in Les Decades qui se trouvent de Tite Live, mises en langue françoise. La premiere, par Blaise de Vigenere […], Paris, J. du Puys, 1583
- 47 Ibid.
28L’imaginaire pénitentiel du monarque est révélé par un étonnant portrait, gravé en 1581, qui a été a été intégré à un paysage allégorique réalisé pour orner la traduction des Décades de Tite-Live fournie par Blaise de Vigenère en 158347. Le palmier et l’olivier signifient la victoire et la paix. Le triangle divin entouré de la couronne d’épines abrite le mot « coelo » fait allusion à la Passion, la troisième couronne, celle qui attend le roi au ciel, est assimilée à la couronne d’épines. Il est possible de voir dans le mystique Guillaume Postel (1510-1581) l’un des grands diffuseurs du prophétisme joachimite, l’inspirateur possible de cette iconographie qui célébrerait le roi comme le souverain du troisième Âge, celui de l’Esprit. Jamais Postel ne parut à la cour d’Henri III, mais son disciple Guy Le Fèvre de La Boderie a pu diffuser ses conceptions, de même que Vigenère. De fait, Henri III semble avoir été fasciné par le principe du Logos, et le lambda arboré par le monarque en serait l’initiale, plutôt que celle de la reine Louise.
- 48 BnF Ms Fr 3963 fol. 1 v° (« Livre des status de la compaignie des confreres de la Mort »).
29À partir de l’été de 1584, le roi commença à se retirer régulièrement dans l’oratoire de Vincennes, et au moment de la crise ligueuse du printemps suivant il établit une nouvelle compagnie, la compagnie des Confrères de la Mort. Les statuts de cette nouvelle association pénitentielle, datés du 10 mai 1585, stipulaient que les vingt et uns confrères choisis par le roi devraient se réunir au Louvre, dans la chapelle de la Mort et Passion de Notre seigneur Jésus-Christ, chaque vendredi vers vingt-et-une heures, pour célébrer l’office de la Passion. Leur habit serait une robe d’étamine noire tombant à terre, avec de larges manches et un capuchon pointu rabattu bas sur le visage durant le service. On célébrerait l’office de la Passion, puis la litanie de la Passion, un confrère prêtre ferait ensuite l’exhortation puis la prière à la Vierge, et à la fin su service, le luminaire serait éteint pendant que l’on réciterait un Pater, un Ave et le Credo. Le Miserere et le de Profundis seraient ensuite dits alternativement par le supérieur et les confrères. C’est pendant la récitation de ces psaumes, dans le noir, que la discipline pourra être donnée par les confrères agenouillés, pour « matter la chair48 ». On dirait enfin un Pater, un Ave, et les trois prières Confiteor, Misereatur et Indulgentiam, par lesquelles le fidèle reconnaît sa condition pécheresse et s’en remet à la miséricorde divine, et enfin le Salve Regina. Le lendemain matin, les confrères assisteraient, alternativement, à une messe basse célébrer par un confrère prêtre, par un capucin ou par un minime, avant de faire leurs Pâques. Le nom des confrères resterait secret. En cas de faute, le confrère fautif paierait une amende d’un teston et restera une demie heure à genoux devant l’autel, sans carreau sous les genoux.
30Outre le roi Henri III, seize personnages signèrent ces statuts. Parmi les confrères figuraient des proches du roi, comme le cardinal de Vendôme, Charles de Bourbon (fils du premier prince de Condé), ou les trois frères Henri de Batarnay du Bouchage, Antoine-Scipion de Joyeuse et le cardinal François de Joyeuse. D’autres gentilshommes de la cour étaient également présents, comme le comte de Sancerre et François de Chabannes, mais on notait aussi la présence du financier Claude Marcel ou du marchand Justinien Panse, qui avait créé à Lyon la compagnie de pénitents blancs qui avait servi de modèle à la compagnie instituée par le roi à Paris.
- 49 René de Lucinge, Lettres sur les débuts de la Ligue, 1585, éd. A. Dufour, Genève, Droz, 1964, p. 19 (...)
31Henri III manifestait par ailleurs une dévotion eucharistique qui surprenait nombre de ses contemporains. Alors que la plupart des courtisans ne communiaient qu’à Pâques, comme l’immense majorité des catholiques, le roi commença à communier plus fréquemment à partir de 1582, souvent après avoir effectué une retraite. En 1585, année de la crise ligueuse, il alla jusqu’à communier trois fois au cours d’une semaine passée à l’oratoire de Vincennes, ce qui ne manqua pas de stupéfier les observateurs49.
32La confession et la communion, d’une part, les mortifications, d’autre part, devaient purifier l’âme du monarque et discipliner son corps. Ces pratiques visaient non seulement à faire du souverain à chrétien exemplaire, mais également à apaiser le courroux divin. Depuis son avènement, Henri avait le sentiment que la naissance d’un héritier était indispensable à l’établissement de son autorité et à l’apaisement des conflits qui déchiraient le royaume. C’est dans son corps même qu’il se sentait marqué par la colère divine.
33Le monarque se sentait convaincu d’entretenir une relation particulière avec le Tout-Puissant, et d’incarner une figure de médiateur entre le monde terrestre et l’au-delà. Cette tentative de captation par le prince des mystères sacrés parut d’ailleurs inacceptable à nombre de catholiques, sans parler des protestants. De sa relation privilégiée avec le Seigneur, le monarque tenait la conviction que ses actions ne pouvaient être soumises à la critique ou au commentaire de ses sujets. Nouveau Salomon, il se voyait comme un être de raison et de sagesse, et comme un législateur et en juge apte à faire régner une justice parfaitement équitable. C’est pourquoi son militantisme religieux ne le poussait pas à prôner la violence contre les huguenots. Il est possible que le spectre de la Saint-Barthélemy, dont il avait été l’un des acteurs majeurs, l’ait hanté, ou du moins qu’il ait pris conscience, à l’issue des massacres, que l’extermination des réformés n’était ni possible ni souhaitable. Quand, sous la pression des ligueurs, il révoqua ses édits de tolérance, en juillet 1585, il souligna bien que cette décision ne devait pas s’accompagner de manifestations de violences à l’égard des huguenots. Ceux-ci avaient six mois pour se convertir ou pour quitter le royaume, et le roi désavoua les officiers qui, dans certaines villes, avaient entamé une politique répressive.
34Henri III garda le Père Auger à ses côtés aussi longtemps qu’il put, mais les supérieurs du jésuite se montraient hostiles aux spectaculaires démonstrations de piété du souverain. La vie de moine n’était pas faite pour les rois. Finalement, Auger fut autorisé à quitter Paris en juin 1587, sur l’instante demande de son Général, Claudio Acquaviva, qui cherchait à éviter que les représentants de la Compagnie ne s’impliquassent trop dans les affaires intérieures des États. Auger lui fit aussitôt part de son soulagement :
- 50 Père Henri Fouqueray, Histoire de la compagnie de Jésus en France, op. cit., t. II, p. 159-160 (Aug (...)
[…] mon séjour de trois ans à la cour a été pour moi un enfer. Si j’avais pu en sortir plus tôt sans préjudicier à votre autorité et au bien de la Compagnie, Dieu sait, quoi qu’on puisse dire, avec quel bonheur j’aurais saisi l’occasion ; mais il fallait adoucir le maître dont on parvient sans trop de peine, avec le temps, à gagner le cœur50.
- 51 AM Lyon, BB 122, fol. 77 v° (délibérations consulaires du 20 mars 1589).
35Après avoir réorganisé le collège jésuite de Dole, Auger séjourna à Lyon, où il prêcha en faveur de la Ligue. Le consulat lyonnais considérait d’ailleurs le jésuite avec suspicion, et il trouvait même que ses exhortations enflammées et son activité de confesseur apportaient « beaucoup de mauvais offices à la cause de la saincte Union des catholicques51 ». Aussi lui interdirent-ils de pratiquer le sacrement de la confession et d’écrire des lettres. Finalement, Auger se rendit en Italie, et c’est à Côme qu’il mourut en 1591.
36Bien qu’il ait été très marqué par l’imaginaire pénitentiel, le roi ne renonça pas pour autant à apparaître en roi de guerre, couvert de l’armure et brandissant le glaive que Dieu lui avait confier pour exercer sa justice. On peut ainsi l’admirer sur les vitraux commandés pour Notre-Dame de Cléry. L’église, fameuse pour abriter le tombeau de Louis XI, avait été dévastée par les huguenots en 1562. Sur ces beaux vitraux, réalisés dans les années 1580, le roi apparaît en armure, l’épée au poing, mais il est figuré au milieu des quatre évangélistes, à l’emplacement où la figure du Christ est habituellement visible.
- 52 Lettre de Henri III, op. cit., t. VI, p. 321 (Henri III à Villeroy, fin septembre 1584).
- 53 BnF Ms Fr 3385, fol. 1-6 (Henri III à Villeroy, 12 septembre 1585), cité par Jacqueline Boucher, « (...)
37Le roi n’avait pas renoncé à prendre un jour la tête de ses armées. Dans une lettre très intime écrite au secrétaire d’État Villeroy, le roi évoque la possibilité de mourir un jour au combat : « Je me souviens fort byen aussy de se que je vous ai dict de la mort syl elle advenait des armes, je le fais outre et principallemant pour mon servisse52. » Un an plus tard, il se montrait particulièrement emporté contre les huguenots : « Je scay que l’on dira que je suis trop violant. Je le suis et an ma religion catholique et à sentir ceulx qui me font mal. Mais ancores ne le suis je pas assez et je m’an feusse myeulx trouvé si j’eusse suivy l’aspreté du feu roy mon frere devant sa mort53. » Tout au fond de lui, le roi ne rêvait-il pas d’une extermination complète des hérétiques ?
38L’entreprise pénitentielle d’Henri III constituait une impasse politique. En se dépouillant des attributs de la majesté et meurtrissant son corps, le dernier Valois devenait une sorte de roi nu. Or, plus que jamais, la souveraineté avait besoin d’être ancrée dans la sphère civile et investie d’une dignité éclatante. Le corps du prince n’était pas une simple enveloppe charnelle dont le monarque devait se dépouiller pour nettoyer sa conscience. Les sujets du roi n’attendaient pas d’être gouvernés par un religieux ; ils entendaient être protégés et guidés par un souverain certes pieux, mais surtout juste. Le sacre faisait certainement de lui un être à part, entretenant une relation privilégiée avec Dieu, mais il ne faisait pas pour autant de lui un clerc. C’est un être pleinement humain qui avait le devoir de concevoir un héritier pour pérenniser sa dynastie et assurer la stabilité institutionnelle du royaume. Puisque le corps et l’âme ne pouvaient être séparés, le prince ne devait pas mépriser son enveloppe charnelle, comme Montaigne l’explique dans son essai « de la præsumption » paru en 1580 :
- 54 Montaigne, Essais, Bordeaux, 1580, II, 17, p. 440-441.
Le corps a une bien grand’part à nostre estre, il y tient un grand rang. Ainsi sa structure et composition sont de bien juste consideration. Ceux qui veulent desprendre nos deux pieces principales et les sequestrer l’une de l’autre, ilz ont tort. Au rebours, il les faut rejoindre et ratacher. Il faut ordonner à l’ame non de se tirer à quartier, de s’entretenir à part, de mespriser et abandonner le corps (aussi ne le scauroit elle faire que par quelque singerie contrefaicte), mais de [se] rallier à luy, de l’embrasser, le cherir, luy assister, le contreroller, le conseiller, le redresser et ramener quand il se fourvoie, l’espouser en somme et luy servir de vray mary ; à ce que leurs effects ne paroissent pas divers et contraires, ains accordans et uniformes. Les Chrestiens ont une particuliere instruction de céte liaison, car ils scavent que la justice divine embrasse céte societé et jointure du corps et de l’ame, jusques à rendre le corps capable des recompenses eternelles, et que Dieu regarde agir tout l’homme, et veut que l’homme entier reçoive le chatiement, ou le loier, selon ses demerites54.
- 55 Montaigne, Essais, éd. Villey-Saulnier, op. cit., III, 8 (« « De l’art de conférer » »), p. 930.
39Alors que, dans les premiers chapitres des Essais, Montaigne adoptait la posture du sage stoïcien soucieux de séparer l’âme du corps, il considère à partir de la rédaction de l’Apologie de le Raymond Sebon que le corps ne saurait être méprisé. Ce n’est plus, à ses yeux, la prison ou l’étui de l’âme, mais plutôt son inséparable compagnon, et la conception dualiste de l’existence humaine, inspirée de la philosophie platonicienne, en vient finalement à être contestée par les données de l’expérience, à tel point que la condition humaine finit par lui apparaître comme « merveilleusement corporelle55 ». Et rien, chez Montaigne, ne laisse entendre que le prince ait une nature différente de celle de ses sujets.
Notes
1 Jean-Louis Fournel, « “Brutalisation” de la guerre et barbarie », Jean-Louis Fournel et Jean-Claude Zancarini, La Grammaire de la République. Langages de la politique chez Francesco Guicciardini (1483-1540), Genève, Droz, 2009, p. 375-406.
2 Lettres de Charles VIII, roi de France, éd. P. Pélicier, Paris, 1898-1905, 5 vol., t. IV, p. 11 (Charles VIII à Ludovic le More, Les Montils-lès-Tours, 8 février 1494).
3 Philippe de Commynes, Mémoires, éd. J. Blanchard, Genève, Droz, 2007, 2 vol., t. I, p. 634.
4 Nicole Hochner, Louis XII. Les dérèglements de l'image royale (1498-1515), Seyssel, Champ Vallon, 2006, p. 177.
5 Sur la monarchie de la Renaissance comme système dialogique, voir J. Russell Major, From Renaissance Monarchy to Absolute Monarchy : French Kings, Nobles and Estates, Baltimore-Londres, The Johns Hopkins University Press, 1994.
6 Rebecca A. Boone, War, Domination, and the Monarchy of France : Claude de Seyssel and the Language of Politics in the Renaissance, Leyde, Brill, 2007 ; Christine Eichel-Lojkine (dir.), Claude de Seyssel. Écrire l’histoire, penser le politique en France, à l'aube des temps modernes, Rennes, Presses Universitaires de Rennes, 2010.
7 Philippe Hamon, « Une monarchie de la Renaissance ? 1515-1559 », Joël Cornette (dir.), La Monarchie entre Renaissance et Révolution, 1515-1792, Paris, Éd. du Seuil, 2000, p. 19.
8 Anne-Marie Lecoq, François Ier imaginaire. Symbolique et politique à l’aube de la Renaissance française, Paris, Macula, 1987.
9 Omar Carlier et Raphaëlle Nollez-Goldbach (dir.), Le corps du leader. Construction et représentation dans les pays du Sud, Paris, L’Harmattan, 2008, p. 16.
10 Guillaume Budé, L’Institution du Prince, éd. C. Bontems, dans Le Prince dans la France des xvie et xviie siècles, Paris, PUF, 1965, p. 84.
11 Lawrence M. Bryant, The King and the City in the Parisian Royal Entry Ceremony : Politics, Ritual and Art in the Renaissance, Genève, Droz, 1986 ; id., Ritual, Ceremony and the Changing Monarchy in France, 1350-1789, Aldershot, Ashgate, 2010.
12 Denis Crouzet, La Nuit de la Saint-Barthélemy. Un rêve perdu de la Renaissance, Paris, Fayard, 1994.
13 « Relation de Jean Michiel après son ambassade de 1561 », in Niccolò Tommaseo (éd.), Relations des ambassadeurs vénitiens sur les affaires de France au xvie siècle, Paris, 1838, 2 vol., t. I, p. 419.
14 Michel François et alii (éd.), Lettres de Henri III, Paris, 1959-2006, 6 vol. parus, t. I, p. 105-107 (Henri à Charles IX, La Souterraine, 5 juin 1569).
15 Ibid., t. I, p. 135 (Henri à Tavanes, Tonnay-Boutonne, 14 décembre 1569).
16 Ibid., t. I, p. 115 (Henri à Jacques d’Humières, Amboise, 11 août 1569) (BnF Ms Fr 3178, fol. 156).
17 Ibid., t. I, p. 87-88 (Henri au duc d’Urbino, Jarnac, 13 mars 1569).
18 Ibid., t. I, p. 89 (Henri à Catherine de Médicis, Segonzac, 17 mars 1569).
19 Ibid., t. I, p. 90 (Henri à Charles IX, Segonzac, 17 mars 1569).
20 Ibid., t. I, p. 95 (Henri à Henri de Navarre, Aulnay, 25 mars 1569).
21 Hector de La Ferrière et alii (éd.), Lettres de Catherine de Médicis, Paris, 1880-1943, 12 vol., t. V, p. 231 (« Advis donnés au Roy », 2 janvier 1577).
22 BnF Ms Fr 3951, fol. 151 v° (Charles IX à Schomberg, 13 septembre 1572), cité par Arlette Jouanna, Histoire et dictionnaire des guerres de Religion, Paris, Robert Laffont, 1998, p. 199.
23 BnF Ms Fr 15557, fol. 103 (Charles IX au duc d’Anjou, s.l., 3 avril 1573).
24 Edmond Cabié (éd.), Guerres de Religion dans le Sud-Ouest de la France et principalement dans le Quercy, d’après les papiers des seigneurs de Saint-Sulpice de 1561 à 1590, Albi, 1906, p. 223 (Saint-Sulpice à sa femme, devant La Rochelle, 1er mai 1573).
25 Discours et recueil du siege de La Rochelle en l’année 1573, Lyon, J. Saugrin, fol. 10 v°.
26 Histoire du siège de La Rochelle en 1573 [trad. fr. de : Philippi Caurianae De obsidione Rupellae commentarius], La Rochelle, 1856, p. 141-143.
27 Blaise de Vigenère, Les Chroniques et Annales de Poloigne, Paris, J. Richer, 1573, « Epistre ».
28 Ibid., p. 484.
29 Denis Crouzet, Le Haut Cœur de Catherine de Médicis. Une raison politique aux temps de la Saint-Barthélemy, Paris, Albin Michel, 2005, p. 215.
30 Edmond Bonnaffé, Inventaire des meubles de Catherine de Médicis en 1589. Mobilier, tableaux, objets d’art, manuscrits, Paris, 1874, p. 65-66.
31 Montaigne, Essais, éd. Villey-Saulnier, Paris, PUF, 2004, II, 19 (« De la liberté de conscience »), p. 668.
32 Archives nationales, X1A 8627, fol. 333-337 (registres du parlement de Paris, 28 septembre 1568) ; André Stegmann (éd.), Édits des guerres de Religion, Paris, Vrin, 1979, p. 59-66.
33 Tragedia del S. Cl. Cornelio Frangipani al Christianissimo et Invitissimo Henrico III Re di Francia, e di Polonia, recitata nella sala del Gran Consiglio di Venetia, Venise, D. Farri, 1574 ; Le Attioni D’Arrigo Terzo Re di Francia, et Quarto di Polonia, descritte in dialogo, Venise, G. Angelieri, 1574. Voir Florence Alazard, Art vocal, art de gouverner. La musique, le prince et la cité en Italie à la fin du xvie siècle, Paris, Minerve, 2002, p. 169‑174.
34 Nicolas Le Roux, La Faveur du roi. Mignons et courtisans au temps des derniers Valois (vers 1547-vers 1589), Seyssel, Champ Vallon, 2001, p. 272.
35 Jean de La Taille, Le Blason des pierres précieuses contenant leurs vertuz et proprietez, Paris, L. Breyer, 1574, p. 8 v°-9.
36 Jean Dorigny, La Vie du père Emond Auger, Avignon, 1828 ; Paul Deslandres, « Le Père Emond Auger, confesseur de Henri III (1530-1591) », Revue des études historiques, 104e année, 1937, p. 28-38 ; A. Lynn Martin, Henry III and the Jesuit Politicians, Genève, Droz, 1973 ; id., « The Jesuit Edmond Auger and the Saint Bartolomew’s Massacre at Bordeaux : The Final Word », Sixteenth Century Journal, 1987 ; id., The Jesuit Mind : The Mentality of an Elite in Early Modern Europe, Ithaca-Londres, Cornell University Press, 1988 ; id., « Emond Auger », in Hans J. Hillerbrand (dir.), The Oxford Encyclopedia of the Reformation, Oxford, Oxford University Press, 1996, 4 vol., t. I, p. 88 et suiv.
37 Emond Auger, Le Pédagogue d’armes, pour instruire un prince chrétien à bien entreprendre et heureusement achever une bonne guerre, pour estre victorieux de tous les ennemis de son Estat et de l'Église catholique, Paris, J. Nivelle, 1568, p. 9 v°.
38 Ibid., p. 15.
39 Ibid., p. 119.
40 [Père] Henri Fouqueray, Histoire de la compagnie de Jésus en France, des origines à la suppression (1528-1762), Paris, 1910-1925, 5 vol., t. I, p. 624 et p. 661-662 (lettre d’E. Auger, Jarnac, 14 mars 1569).
41 Emond Auger, Les Statuts de la Congrégation des pénitens de l’Annonciation de Nostre Dame, Paris, J. Mettayer, 1583.
42 Emond Auger, Metanoeologie. Sur le suget de l’Archicongregation des Penitens de l’Annonciation de nostre Dame, et de toutes telles autres devotieuses assemblées, en l'Église sainte, Paris, J. Mettayer, 1584, p. 178.
43 Ibid., « Epistre ».
44 Ibid.
45 Ibid., p. 161 et suiv.
46 Isabelle Haquet, L’Énigme Henri III. Ce que nous révèlent les images, Nanterre, Presses universitaires de Paris-Ouest, 2012.
47 Ibid.
48 BnF Ms Fr 3963 fol. 1 v° (« Livre des status de la compaignie des confreres de la Mort »).
49 René de Lucinge, Lettres sur les débuts de la Ligue, 1585, éd. A. Dufour, Genève, Droz, 1964, p. 191 (dépêche du 20 septembre 1585).
50 Père Henri Fouqueray, Histoire de la compagnie de Jésus en France, op. cit., t. II, p. 159-160 (Auger à Acquaviva, Lyon, 30 juin 1587).
51 AM Lyon, BB 122, fol. 77 v° (délibérations consulaires du 20 mars 1589).
52 Lettre de Henri III, op. cit., t. VI, p. 321 (Henri III à Villeroy, fin septembre 1584).
53 BnF Ms Fr 3385, fol. 1-6 (Henri III à Villeroy, 12 septembre 1585), cité par Jacqueline Boucher, « Les lettres de Henri III au secrétaire d’État Villeroy : expression personnelle ou politique ? », L’Épistolaire au XVIe siècle (Cahiers V.L. Saulnier, n° 18), Paris, Éd. rue d’Ulm, 2001, p. 207.
54 Montaigne, Essais, Bordeaux, 1580, II, 17, p. 440-441.
55 Montaigne, Essais, éd. Villey-Saulnier, op. cit., III, 8 (« « De l’art de conférer » »), p. 930.
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Légende | Portrait d’Henri III in Les Decades qui se trouvent de Tite Live, mises en langue françoise. La premiere, par Blaise de Vigenere […], Paris, J. du Puys, 1583 |
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Pour citer cet article
Référence papier
Nicolas Le Roux, « Le glaive et la chair : le pouvoir et son incarnation au temps des derniers Valois », Chrétiens et sociétés, Numéro spécial II | -1, 61-83.
Référence électronique
Nicolas Le Roux, « Le glaive et la chair : le pouvoir et son incarnation au temps des derniers Valois », Chrétiens et sociétés [En ligne], Numéro spécial II | 2013, mis en ligne le 25 février 2015, consulté le 12 décembre 2024. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/chretienssocietes/3453 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/chretienssocietes.3453
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