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« Faire la politique du miracle ». L’abbé Jean-Marie Curicque (diocèse de Metz, 1827-1892), restaurateur de sites religieux et compilateur de prophéties

Hilaire Multon
p. 59-70

Résumés

L’abbé Curicque, curé bâtisseur soucieux de reconquête chrétienne, auteur des Voix prophétiques (1870-1872), est représentatif d’un catholicisme intransigeant hostile à la réconciliation de l’Église et des principes politiques de la modernité. Il est surtout soutenu par de nombreux esprits épris de surnaturel, composant une nébuleuse contre-révolutionnaire espérant une Apocalypse qui révélerait la gloire de Dieu.

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Texte intégral

  • 1 Jean-Marie Mayeur, « Mgr Dupanloup et Louis Veuillot devant les prophéties contemporaines en 1874 » (...)
  • 2 Sur la lecture catholique de Porta Pia (20 septembre 1870) : Pier Giorgio Camaiani, « Castighi di D (...)

1Dans un article pionnier publié en 1972, Jean-Marie Mayeur évoque le climat d’attente eschatologique qui caractérise les lendemains de la défaite face à la Prusse et de la Commune1. Tandis que les notables monarchistes peuplent les bancs de l’Assemblée nationale depuis les élections du 8 février 1871, tandis que se multiplient les visites de courtoisie auprès du comte de Chambord, cet « enfant du miracle » né quelques mois après la mort du duc de Berry, des esprits exaltés projettent leurs fantasmes de restauration dans une littérature prophétique alors florissante. Clercs intransigeants, publicistes légitimistes usent de leur plume pour stigmatiser les « erreurs modernes » et orienter le regard des lecteurs vers le règne régénérateur à venir. La campagne en faveur du Bourbon cristallise pour ainsi dire les attentes déçues des partisans de l’ordre ancien. Les thuriféraires de l’alliance du « Grand Pape » et du « Grand Monarque » y trouvent une nouvelle vigueur, dans un contexte dramatique accentué par l’entrée des soldats piémontais dans Rome le 20 septembre 18702. L’apostasie de la France révolutionnaire et libérale se double du martyre du Pape Pie IX, prisonnier des patriotes italiens dans son palais du Vatican. L’époque est aux Cassandre et aux lamentations des auteurs les plus hostiles au libéralisme et à l’héritage des Lumières.

  • 3 Sur ce conflit et cette ligne de partage : Jean-Louis Ormières, « Les rouges et les blancs », dans (...)
  • 4 Sur le thème du conflit franco-français : Michel Winock, La fièvre hexagonale, Paris, Le Seuil, 198 (...)

2Les Voix prophétiques de l’abbé Jean-Marie Curicque, publiées à cinq reprises entre 1870 et 1872, participent de cette effervescence, portée par une large partie du monde catholique intransigeant. Elles en traduisent la nature profonde, en dessinent l’archéologie. La mobilisation des catholiques autour de la défense du pouvoir temporel, couplée à la campagne légitimiste en faveur de l’exilé de Frohsdorf, fait rejouer la faille culturelle opposant les Blancs aux Rouges depuis la Révolution3. Elle constitue une des nombreuses manifestations des « guerres franco-françaises » qui scandent la période dite contemporaine, marquée par l’affrontement violent de deux blocs politiques4. L’ensemble de l’action pastorale et de l’activité éditoriale de Curicque vise en effet à faire pièce à la France des libre-penseurs, oublieuse du passé monarchique, à cette France qui croit en l’avènement d’une ère de progrès libérée des dévotions archaïques et des croyances désuètes. Son zèle de bâtisseur est tendu vers la volonté de commémorer et de faire justice des grandes œuvres du passé – les Res Gestae des chroniqueurs de la monarchie – oblitérées par le vandalisme révolutionnaire et par l’amnésie des héritiers de 1789. Sa plume, trempée dans la sève imprécatrice, traduit un monde en clair-obscur, marqué par le rejet de l’héritage matériel et culturel de la France révolutionnaire.

Un bâtisseur de mémoire

  • 5 « L’éditeur Palmé vous a fait connaître par son immense publicité […] Aujourd’hui, étourdi par le s (...)
  • 6 Sur Adrien Péladan (1815-1890), originaire du Vigan (Gard), journaliste et publiciste catholique, l (...)

3Né en 1827 à Sierck (Moselle), aux confins du Luxembourg et de la Sarre, Jean-Jules-Marie Curicque nous est connu par l’article déjà signalé de Jean-Marie Mayeur. Au-delà de cette référence appuyée, on ne sait pratiquement rien de cet érudit lorrain, avide de surnaturel, auteur à succès après la publication de ses Voix prophétiques par l’éditeur parisien Victor Palmé (cinq éditions entre 1870 et 1872)5. Une enquête dans ses papiers personnels, placés en dépôt aux Archives départementales de la Moselle, nous a permis de mesurer l’importance de son réseau d’informateurs et les liens étroits qui unissent les zélateurs du surnaturel contemporains du pape Pie IX. Ces catholiques vivant dans l’attente du « grand coup » régénérateur s’écrivent, s’interpellent, se rencontrent, certains d’entre eux jouant un rôle central dans la cartographie du surnaturel, à l’image d’un Curicque ou d’un Adrien Péladan6. A travers le prêtre mosellan, c’est l’imaginaire de ces prêtres élevés dans la foi au « drapeau blanc » et à la France très-chrétienne qu’il nous est permis d’appréhender. L’érudition et le savoir encyclopédique sont au service d’une mythologie politique qui emprunte son vocabulaire et son style à la rhétorique de la contre-révolution. Les signes et prophéties sur lesquels Curicque attire l’attention de son lecteur s’inscrivent dans la continuité des Gesta Dei per Francos, événements propitiatoires annonçant un retournement soudain de l’ordre du monde.

4Curicque est ordonné prêtre le 14 juin 1851. Vicaire à Kunzing, à Buding, puis à Flastroff, il est finalement nommé curé à Haute-Kontz, dans la haute vallée de la Moselle, en novembre 1866. Bâtisseur infatigable, il s’attache à redonner faste et grandeur à des édifices cultuels souvent indigents. Lorsqu’il devient vicaire à Flastroff, voici comment il décrit la chapelle qui lui échoit :

  • 7 ADM, Papiers de l’abbé Jean-Marie Curicque, 19 J 162.

« Elle semblait n’être qu’une construction de passage, pas de traces de style ni aux portes ni aux fenêtres ; les murs en étaient très mal conditionnés, et quoique l’édifice d’après le millésime de la porte d’entrée, ne parut remonter qu’au milieu du dernier siècle, une brèche s’ouvrit d’elle-même au printemps de 1862. Il y avait péril en la demeure ; les dernières hésitations pour la reconstruction d’une église devaient disparaître »7.

  • 8 L’intérêt de l’abbé Curicque pour l’ordre des Chartreux n’est pas démenti par la troisième édition (...)

5Afin de bâtir un lieu de culte plus conforme aux attentes des fidèles, l’abbé Curicque sollicite plusieurs bienfaiteurs et engage ses propres économies. Par la suite il demande un secours à la commune, qu’il n’obtient que tardivement. Érigé en chapelle vicariale à l’occasion de son arrivée, le village de Flastroff a l’honneur de recevoir l’évêque de Metz, le 2 juillet 1865, Mgr Dupont des Loges, à l’occasion de la tournée de confirmation. Nommé curé de Haute-Kontz, l’abbé revient pour ainsi dire dans le pays qui l’a vu naître et grandir. Le paysage qui se déploie devant ses yeux est celui qui a bercé son enfance. Au premier plan s’étend Rettel et son abbaye bénédictine, habitée plus tard par les disciples de saint Bruno8. Son énergie est alors employée à relever la chartreuse, disparue avec la déchristianisation révolutionnaire et à faire revivre la vie monastique. Dans un même processus d’idéalisation, le pasteur enveloppe le berceau de son enfance et la Moselle des âges chrétiens. Il multiplie les voyages, fait connaître ses plans et devient auteur afin d’acquérir quelques restes des anciennes constructions conventuelles.

  • 9 ADM, Papiers de l’abbé Jean-Marie Curicque, 19 J 164, « Affaires du rétablissement du couvent de Re (...)
  • 10 Prosper Guéranger (1805-1875), admirateur de Lamennais, collaborateur de L’Avenir, se fait dès 1830 (...)

6Dans un premier temps, une petite colonie de filles pieuses trouve asile dans la partie habitable de l’édifice. Après les avoir enrôlées sous la bannière des Tertiaires de saint Dominique, Curicque pense leur assigner le rôle charitable de maîtresses d’orphelinat. L’intervention du Père Kempf et des dominicains de Luxembourg contribue à éloigner le fondateur. Quelques mois avant sa mort, le Père Kempf apporte à cinq postulantes l’habit de l’ordre en même temps qu’il pourvoie à la nomination d’un aumônier9. L’idéal romantique de la refondation monastique, de la relance du culte sous l’égide d’un personnage doué de charisme – à l’image d’un Rancé pour la Trappe ou d’un Dom Guéranger pour les Bénédictins10 – s’efface devant l’institutionnalisation de la présence religieuse. Soucieux de resacraliser un espace détruit par la violence révolutionnaire, Curicque s’inscrit pleinement dans le projet intransigeant consistant à « refaire la société chrétienne » et à retisser les fils du temps. Il traduit dans un cadre paroissial et dans un environnement culturel spécifique – celui de la Lorraine de langue allemande – le projet de reconquête des terres chrétiennes porté par les catholiques temporalisti dans la péninsule italienne.

  • 11 Fondé à la fin du XIIe siècle, approuvé par le pape Innocent III, l’ordre de la Sainte-Trinité pour (...)

7À l’image du trinitaire Calixte de la Providence reconstruisant le couvent de Cerfroid (Aisne) en 1865 – sur le lieu même où est fondé l’ordre par saint Jean de Matha et saint Félix de Valois - il aspire à rendre au culte des lieux marqués du sceau de la foi chrétienne11. Son abnégation et son énergie montrent que l’idéal de reconquête – Alphonse Dupront parlerait du « mythe de croisade » - qui traverse le catholicisme du XIXe siècle passe aussi par l’érection et la rénovation des lieux de culte. Cette tension le conduit à épouser la carrière d’historiographe et d’érudit local, qui lui ouvre les portes d’un réseau élargi de correspondants.

Un publiciste intransigeant

  • 12 Fille du duc Robert de Bavière, épouse du duc de Lorraine Charles II le Hardi (1364-1431), la princ (...)
  • 13 Il collabore à une Histoire des pèlerinages de la sainte Vierge, dans laquelle il insère une notice (...)
  • 14 Sylvain Milbach, Prêtres, historiens et pèlerinages du diocèse de Dijon (1860-1914), Editions unive (...)

8Enfant de la Lorraine, l’abbé Curicque acquiert une réputation d’érudit local en publiant sous diverses formes la vie de la bienheureuse Marguerite de Bavière, duchesse de Lorraine (1373-1434), décédée dans son village natal. En 1859, il écrit un Essai historique sur la vie de la bienheureuse princesse Marguerite de Bavière, épouse de Charles II, duc de Lorraine, morte à Sierck le 27 août 1434 (Metz, Rousseau-Pallez, 1859, 60 p.), bientôt complété par une Notice historique, publiée chez le même éditeur en 186412. Sous une forme plus condensée, paraît en 1863 un Précis de la bienheureuse Princesse Palatine Marguerite de Bavière, duchesse de Lorraine (Bar-le-Duc, imprimerie L. Guérin, 16 p.). Lu à la séance du 13 janvier 1859 de la Société d’archéologie de la Moselle, le premier texte permet à son auteur d’entrer dans cette société savante créée l’année précédente. Parallèlement, il devient correspondant de la Société historique de Notre-Dame de France, témoignant de son profond attachement au culte marial13. Passionné par l’histoire de sa région, esprit curieux, Curicque est représentatif de la catégorie de clercs dont Sylvain Milbach a défini les contours et dont il a montré l’importance dans la réorganisation des cultes et des dévotions au XIXe siècle14. Leurs connaissances et leurs recherches donnent pour ainsi dire crédit aux fidèles soucieux de reconstruire une sacralité perdue ou enfouie.

  • 15 Cette première édition est édité à 5000 exemplaires. ADM, 19 J 158, Contrat d’édition entre l’abbé (...)
  • 16 Sur Mgr Adolphe Dechamps : E. De Moreau, Adolphe Dechamps, Bruxelles, 1911. De nombreuses référence (...)
  • 17 René Epp, Mgr Raess, évêque de Strasbourg (1842-1887), Griesheim, L’Alsatique de poche, 1979, 187 p (...)
  • 18 Mgr Louis Baunard, Histoire du cardinal Pie, évêque de Poitiers, Poitiers-Paris, Oudin-Poussièlgue, (...)
  • 19 Christian Sorrel, « Joseph-Marie Vibert (1800-1876) » dans Dictionnaire du monde religieux dans la (...)
  • 20 La Bibliothèque Nationale de France dispose d’un exemplaire de la cinquième édition (Voix prophétiq (...)
  • 21 Sur Louise Lateau (1850-1883), la « stigmatisée de Bois d’Haine » (diocèse de Tournai), il existe u (...)
  • 22 Sur cet épisode : Hilaire Multon, « Catholicisme intransigeant et culture prophétique : l’apport de (...)

9Un ouvrage plus ample le fait connaître au public avide de surnaturel et de prophéties. En octobre 1870 paraît la première édition des Voix prophétiques ou signes, apparitions et prédictions recueillis principalement des Annales de l’Eglise touchant les grands événements du XIXe siècle et l’approche de la fin des temps (Luxembourg, Pierre Brück, imprimeur-libraire)15. Cinq éditions se succèdent jusqu’en 1872, sans cesse corrigées et augmentées, afin de répondre à l’attente d’un public dévot en quête des signes des temps. L’éditeur Victor Palmé, par ailleurs éditeur de la Revue du monde catholique, dans laquelle écrivent l’abbé Lecanu, auteur d’un Dictionnaire des prophéties et des miracles dans le cadre de l’encyclopédie Migne (1852-1854) et l’abbé François Cucherat, auteur d’une étude sur la prophétie de Malachie, en tire un grand prestige dans la frange « apocalyptisante » du catholicime intransigeant. La cinquième édition, composée de deux volumes (« Signes et apparitions prophétiques », « Prophéties modernes proprement dites »), enrichie de nombreux appendices, est approuvée par cinq prélats, et non des moindres : Mgr Dechamps16, archevêque de Malines, primat de Belgique, Mgr Raess17, évêque de Strasbourg, Mgr Pie18, évêque de Poitiers, Mgr Vibert19, évêque de Saint-Jean de Maurienne et Mgr Marinelli, évêque de Solie (Grèce)20. Tous sont proches de Rome et se caractérisent par leur intransigeance en matière politique et sociale, à l’exception d’un Dechamps catholique libéral mais fort épris de surnaturel, comme en témoigne sa bienveillance à l’égard de la stigmatisée de Bois d’Haine (Hainaut), Louise Lateau (1850-1883)21. Certains sont sensibles aux « voix prophétiques », à l’instar de Mgr Vibert, mis en difficulté par les prêtres diocésains pour avoir soutenu les élucubrations mystiques d’une certaine Cantianille Bourdois, arrivée dans son diocèse en compagnie d’un prêtre interdit du diocèse de Sens, l’abbé Jean-Charles Thorey, dont l’ouvrage est condamné par le Saint-Office par décret du 2 décembre 186722. Catholique intransigeant, légitimiste convaincu que la « Fleur blanche » de la prophétie d’Orval, « par son dévouement à l’Eglise sera l’instrument sauveur de la société », l’érudit lorrain se distingue néanmoins des autres compilateurs par sa prudence : il proteste de sa soumission à l’Église et déclare ne donner à ses appréciations qu’une « valeur purement humaine et privée », conformément aux décrets d’Urbain VIII du 16 mars 1625. Ses écrits le mettent toutefois en relation avec les esprits les plus épris de surnaturel, vivant dans l’espérance d’un « grand coup » divin renversant l’ordo mundi.

Un homme au cœur d’une nébuleuse éprise de surnaturel

  • 23 L’abbé Curicque dispose du manuscrit de l’ouvrage inédit publié par l’abbé Migorel : La Semaine ou (...)
  • 24 ADM, 19 J 163, Lettre de l’abbé Radiguet, directeur du séminaire de Vire, 14 février 1885.
  • 25 ADM, 19 J 158, Lettres du Père Frédéric de Bray, château de Cauneille (Landes), 8 mai 1875, 28 janv (...)
  • 26 ADM, 19 J 158, Lettres du docteur Antoine Imbert-Gourbeyre, Nice, 2 novembre 1871 et 21 décembre 18 (...)
  • 27 ADM, 19 J 162, Lettre du Père Niels, curé de Bois d’Haine, 1er septembre 1874 ; Lettre du Père Séra (...)
  • 28 Sur ce réseaux de laïcs et d’ecclésiastiques constitué comme contre-pouvoir face à la montée du lib (...)
  • 29 ADM, 19 J 162, Lettre du curé de Rohrbach, 25 avril 1873 ; Lettre d’une religieuse de Sarreguemines (...)

10L’ensemble de sa correspondance privée témoigne d’un réseau d’informateurs très fourni, qui lui permet d’enrichir la première édition de son anthologie du surnaturel, parue à Luxembourg en octobre 1870. Il est en relation étroite avec les Pères rédemptoristes, dont on connaît par ailleurs le goût prononcé pour les manifestations du surnaturel. Il connaît également de nombreux dévots et fidèles de Mélanie de La Salette, parmi lesquels l’abbé Migorel, curé de Malétable (Orne, diocèse de Sées)23 et l’abbé Radiguet, directeur du séminaire de Vire (Calvados, diocèse de Bayeux), fervent zélateur du « grand monarque »24. Il entretient une correspondance avec les principaux protagonistes des apparitions de Fontet (Gironde, diocèse de Bordeaux), qui se déroulent entre 1873 et 1875, dont la principale protagoniste, Berguille Bergadieu, est une modeste femme de métayer25. Par le biais du docteur Imbert-Gourbeyre, il est également fort bien documenté au sujet des stigmatisations spectaculaires de Palma Matarelli, humble femme du diocèse d’Oria, dans les Pouilles26. Il montre un grand intérêt pour les phénomènes attribués à la couturière de Bois d’Haine, Louise Lateau27, qui lui donne l’occasion de rencontrer l’évêque de Genève, Mgr Mermillod, le 24 mai 1874, un des piliers de « l’Internationale noire » constituée autour du Comité de Genève suite à la prise de Rome28. En voisin, il se penche avec attention sur les apparitions dans la Lorraine occupée au printemps 1873 ainsi que sur les extases dont Catherine Filljung, jeune fille de Biding (Moselle, diocèse de Metz) se dit l’objet pendant la même période29.

  • 30 Alors que les Voix prophétiques ont été l’objet d’une recension critique d’A. Van Weddingen dans la (...)

11À la lecture des liasses en dépôt aux Archives départementales, c’est un monde épris de surnaturel et de prodiges qui émerge, un monde étranger à toute approche rationaliste du fait religieux, révélateur d’une contre-culture catholique enfouie dans le silence des archives. Construisant ses propres références en fonction d’une relecture mythologique de l’histoire récente, le milieu des prêtres érudits constitue le terreau sur lequel se déploie au niveau local l’inventivité dévotionnelle, qui accompagne l’affirmation du courant « ultramontain » dans la seconde moitié du XIXe siècle. Par ses recherches érudites, le curé de Haute-Kontz vise à légitimer par l’histoire la reconquête pastorale qu’il opère. La Lorraine des dévots et des souverains chrétiens entre en résonance avec ses propres initiatives en matière de culte. La renaissance architecturale est inséparable de la construction d’une mémoire catholique centrée sur la figure emblématique du souverain très-chrétien et insérée dans un territoire marquée par la pérennité de la foi catholique. Ainsi faut-il interpréter ses études consacrées au culte historique de Charlemagne (1885) et à la princesse Marguerite de Bavière, morte à Sierck en 1434. Les personnages sur lesquels se porte son attention nourrissent une plume apologétique fort éloigné de la réserve et la méthode des Bollandistes belges, qui publient alors une analyse critique des prophéties qui font florès dans la France des lendemains de la défaite et de la Commune30. Cela n’empêche pas l’ouvrage d’être abondamment cité et pillé par les autres publicistes intransigeants en quête des signes du Ciel.

  • 31 ADM, 19 J 158. Sur Mgr Dupont des Loges : Abbé Félix Klein, L’évêque de Metz. Vie de Mgr Dupont des (...)
  • 32 « Je veux vous féliciter de votre livre, c’est l’un des plus intéressants qui soient au monde ». AD (...)
  • 33 ADM, 19 J 162, Lettre sur l’extatique Catherine Filljung de Biding (Moselle), 17 juin 1873 ; ADM, 1 (...)
  • 34 ADM, 19 J 158, Lettre du chanoine August Rohling, Münster (Westphalie), 11 décembre 1872. Sur Augus (...)

12Les Voix prophétiques inspirent nombre d’auteurs et constituent le paradigme des anthologies prophétiques alors en vogue. Elles valent à leur auteur d’être mis en retrait par la hiérarchie ecclésiastique. En dépit d’une abondante correspondance entre l’abbé Curicque et Mgr Dupont des Loges, évêque de Metz, ce dernier n’accorde pas son approbation à la publication des deux volumes édités par Victor Palmé31. S’il admire en Curicque le bâtisseur infatigable et le pasteur dévoué à son peuple, il semble plus réticent quant au thuriféraire du surnaturel. En mettant au service de ses projets pastoraux ses talents d’écrivain, Curicque prend le risque de fréquenter des milieux qui sentent le souffre. A l’image d’un Ernest Hello32, versant dans le spiritisme à la fin du siècle, d’une Catherine Filljung33 dont les prédictions reposent sur une hostilité profonde envers l’évêque de Metz, Mgr Dupont des Loges, ou bien encore d’un August Rohling34, partisan du système de la Rénovation à caractère millénariste et auteur de brulôts antisémites à la fin du siècle, ses correspondants frayent avec des marges contestant l’institution. Sans être condamné par le magistère, Curicque construit sa réputation dans des cercles marginaux et contestataires de « l’ecclésiosphère » (Émile Poulat).

  • 35 ADM, 19 J 162, Lettre sur l’extatique Catherine Filljung de Biding (Moselle), 17 juin 1873.
  • 36 ADM, 19 J 162, Ibidem.
  • 37 Michel Servant, Veillez et priez car l’Heure du Seigneur est proche. Il est midi moins cinq. Prophé (...)

13C’est sans doute ce qui lui a valu le relatif oubli dans lequel est tombée sa production livresque, traduction de l’ancrage d’une culture contre-révolutionnaire et anti-libérale dans le clergé français du second XIXe siècle. En dépit de son relatif succès éditorial, de ses compétences en matière d’histoire ecclésiastique, Curicque ne fait pas carrière dans son diocèse. Il n’est pas professeur au Grand séminaire de Metz et souffre d’un certain ostracisme de la part de son Ordinaire. Ses principaux soutiens se situent en dehors du cadre diocésain. Ils dessinent les contours d’une « nébuleuse apocalyptique » traversant les frontières diocésaines et nationales. Pour ceux qui composent ce monde enfoui, révélateur des fondements culturels et politiques du catholicisme intransigeant, « il y a un accord étonnant entre les visions et les prophéties de Mélanie de La Salette, d’Anna Maria (Taigi), de Marie Lataste et du curé d’Ars »35. Prêtres, religieux ou laïcs, ces veilleurs de l’Apocalypse vivent dans l’attente d’une « crise formidable », assurés de sa résolution « à la plus grande gloire de Dieu et de la Sainte Vierge »36. Portés par un désir de miracle, ces catholiques aspirent à une inversion de la marche du temps, s’appuyant sur le corpus prophétique légué par la tradition érudite afin de se consoler de la « vallée de larmes » (in hac lacrimarum valle) dans laquelle les a placés l’affirmation conjointe du libéralisme et du socialisme en Europe. Prophètes de l’imprécation, hostiles à la réconciliation de l’Église et des principes politiques de la modernité, ces auteurs intransigeants nourrissent le filon contre-révolutionnaire et entretiennent jusqu’à nos jours une lecture intégraliste et apocalyptique de la situation des catholiques dans le monde sécularisé37.

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Notes

1 Jean-Marie Mayeur, « Mgr Dupanloup et Louis Veuillot devant les prophéties contemporaines en 1874 », Revue d’histoire de la Spiritualité, 48 (1972), p. 193-204. On peut compléter cette analyse par la lecture des deux volumes de Daniel Halévy : La Fin des notables, Paris, Grasset, 1930 et La République des ducs, Paris, Grasset, 1937, réédités en 1995 dans la collection Pluriel (Hachette).

2 Sur la lecture catholique de Porta Pia (20 septembre 1870) : Pier Giorgio Camaiani, « Castighi di Dio e Trionfo della Chiesa. Mentalità e polemiche dei cattolici temporalisti nell’età di Pio IX », Rivista storica italiana 88 (1976), p. 708-744 ; Pier Giorgio Camaiani, « Il diavolo, Roma e la Rivoluzione », Rivista di storia e letteratura religiosa VIII (1972), p. 485-516 ; Antonio Cestaro, « Roma capitale ne La Civiltà cattolica », dans Un secolo da Porta Pia, Naples, 1970, p. 219-247 ; Carlo Maria Fiorentino, La questione romana intorno al 1870. Studi e documenti, Roma, Archivio Guido Izzi, 1997, 344 p. ; Carlo Maria Fiorentino, « Dalle stanze del Vaticano : il Venti Settembre e la protesta della Santa Sede (1870-1871) », Archivum Historiae Pontificiae, 28 (1990), p. 285-333 ; Giacomo Martina, « Al Collegio romano il 20 settembre 1870 : dalla relazione del p. Pietro Ragazzini S.I. » in Archivum Historiae Pontificiae VIII (1970), p. 332-347.

3 Sur ce conflit et cette ligne de partage : Jean-Louis Ormières, « Les rouges et les blancs », dans Les lieux de mémoire (Pierre Nora dir.), Paris, Gallimard, Quarto, vol. III, p. 2395-2432. Éloquent est à cet égard l’ouvrage de l’abbé Henri Torné-Chavigny, Les Blancs et les Rouges, nouvelle lettre du Grand Prophète, Saint-Denis du Pin, chez le commentateur, 1872, 16 p. [BNF Lb57-3716] qui s’inscrit dans la vague d’écrits prophétiques qui fait suite au siège de Paris et à la Commune.

4 Sur le thème du conflit franco-français : Michel Winock, La fièvre hexagonale, Paris, Le Seuil, 1987.

5 « L’éditeur Palmé vous a fait connaître par son immense publicité […] Aujourd’hui, étourdi par le succès, vous ne voyez que vous même, c’est de l’ingratitude ». Archives départementales de la Moselle (ADM), 19 J 158, Lettre de Victor Palmé à l’abbé Curicque, 10 juillet 1873.

6 Sur Adrien Péladan (1815-1890), originaire du Vigan (Gard), journaliste et publiciste catholique, légitimiste convaincu, père du Sâr Péladan, écrivain du courant « décadent » de la fin de siècle : Jean-Claude Drouin, « Un légitimiste mystique au XIXe siècle : Adrien Péladan », dans Jean-Pierre Laurant, Victor Nguyen (éd.), Les Péladan, Lausanne-Paris, Cahiers de l’Herne, 1990, p. 13-19 ; Christophe Beaufils, Joséphin Péladan (1858-1918). Un essai sur la maladie du lyrisme, Grenoble, Jérôme Millon, 1993.

7 ADM, Papiers de l’abbé Jean-Marie Curicque, 19 J 162.

8 L’intérêt de l’abbé Curicque pour l’ordre des Chartreux n’est pas démenti par la troisième édition de ses Voix prophétiques, publiée en 1871. Il y est indiqué que l’ouvrage est achevé à la Chartreuse de l’Immaculée-Conception de Bosserville, le 29 août 1871.

9 ADM, Papiers de l’abbé Jean-Marie Curicque, 19 J 164, « Affaires du rétablissement du couvent de Rettel ».

10 Prosper Guéranger (1805-1875), admirateur de Lamennais, collaborateur de L’Avenir, se fait dès 1830 l’ardent propagateur de la restauration de la liturgie romaine en France, et réinstalle en 1833 une communauté dans les locaux de l’ancienne abbaye de Solesmes. C’est à Rome qu’il fait la profession de la règle de saint Benoît, le 26 juillet 1837, avant de fonder la congrégation de France de l’ordre de Saint Benoît.

11 Fondé à la fin du XIIe siècle, approuvé par le pape Innocent III, l’ordre de la Sainte-Trinité pour la rédemption des captifs s’attache au rachat des esclaves dans le bassin méditerranéen. A la suite de plusieurs scissions, il disparaît de France avec la persécution révolutionnaire. En 1865, le père Calixte de la Providence (1826-1892), trinitaire déchaussé, rachète les ruines du couvent de Cerfroid (Aisne) et essaye d’en faire le centre de l’ordre reconstitué. Il commence à ériger une basilique en l’honneur de Saint Félix de Valois, dont on peut encore observer aujourd’hui les fondations. Pour financer son projet, il multiplie les publications (Guide du pèlerin à Cerfroid, Vies d’Anna Maria Taigi et Elisabetta Canori Mora, tertiaires trinitaires ayant vécu à l’époque de la Restauration), rencontrant plus d’indifférence que de sympathie. Voir Juan Pujana, article « Trinitaires », Dictionnaire de Spiritualité, vol. XV (1990), col. 1259-1287 ; Dom Gazeau, article « Cerfroid », Catholicisme. Hier, aujourd’hui, demain, Paris, Letouzey et Ané, 1954, col. 833 ; Paul Deslandres, L’ordre des Trinitaires pour le rachat des captifs, Toulouse/Paris, Privat/Plon, Nourrit, 1903, p. 478-484 ; Calixte de la Providence, La vénérable Anna Maria Taïgi et la servante de Dieu Elisabeth Canori Mora, tertiaires trinitaires avec une notice sur le Tiers-Ordre de la Très Sainte Trinité, Lourdes, B. Pujo, 1870, 400 p. Cet ouvrage est réédité à trois reprises entre 1870 et 1878 : d’abord par le libraire parisien Victor Sarlit (1872), puis par l’éditeur belge Casterman (1877 et 1878).

12 Fille du duc Robert de Bavière, épouse du duc de Lorraine Charles II le Hardi (1364-1431), la princesse Marguerite de Bavière jouit d’une réputation de femme admirable. Elle supporta avec patience la présence permanente d’Alison Dumay, courtisane célèbre par sa beauté. Influencée par la mystique rhénane et la devotio moderna, elle mena une vie pieuse et retirée, réparant par ses austérités, les fautes et les débauches de son mari. Membre du tiers-ordre franciscain, elle obtient le titre de bienheureuse peu après sa mort. Voir T. de Morembert, « Charles II le Hardi, duc de Lorraine », Dictionnaire de Biographie française, Paris, Letouzey et Ané, t. VIII (1959), col. 565-567 ; Eugène Martin, Marguerite de Bavière, duchesse de Lorraine, 1928.

13 Il collabore à une Histoire des pèlerinages de la sainte Vierge, dans laquelle il insère une notice sur Rustroff, autre bourg situé dans la vallée de la Moselle. Il est également l’auteur d’un Guide des pèlerins concernant Notre-Dame de Rustroff.

14 Sylvain Milbach, Prêtres, historiens et pèlerinages du diocèse de Dijon (1860-1914), Editions universitaires Dijon, 2000, 676 p.

15 Cette première édition est édité à 5000 exemplaires. ADM, 19 J 158, Contrat d’édition entre l’abbé Curicque, curé de Haute-Kontz et Pierre Brück, imprimeur-libraire à Luxembourg, 22 octobre 1870.

16 Sur Mgr Adolphe Dechamps : E. De Moreau, Adolphe Dechamps, Bruxelles, 1911. De nombreuses références dans Vincent Viaene, Belgium and Holy See from Gregory XVI to Pius IX (1831-1859). Catholic revival society and politics in 19th-Century Europe, Institut historique belge de Rome/Leuven University Press, KADOC Studies 26, 2001, 647 p.

17 René Epp, Mgr Raess, évêque de Strasbourg (1842-1887), Griesheim, L’Alsatique de poche, 1979, 187 p. ; Claude Muller, Dieu est catholique et alsacien. La vitalité du diocèse de Strasbourg au XIXe siècle (1802-1914), Atelier national de reproduction des thèses et Société d’histoire de l’Eglise d’Alsace, Lille, 1987, 2 vol.

18 Mgr Louis Baunard, Histoire du cardinal Pie, évêque de Poitiers, Poitiers-Paris, Oudin-Poussièlgue, 1886, 2 tomes ; Etienne Catta, La doctrine politique et sociale du cardinal Pie, Paris, Nouvelles éditions latines, 1959, 374 p.

19 Christian Sorrel, « Joseph-Marie Vibert (1800-1876) » dans Dictionnaire du monde religieux dans la France contemporaine, T. 8 : « La Savoie », Paris, Beauchesne, 1996, p. 409-410 ; Pierre Dompnier, « Polémique sur de prétendues apparitions en Maurienne », dans Vie religieuse en Savoie. Mentalités. Associations. Actes du XXIe Congrès des Sociétés savantes de Savoie, Annecy, 13-14 septembre 1986, Mémoires et Documents publiés par l’Académie Salésienne (Annecy), XCV, 1988, p. 149-159 ; Christian Sorrel, « Figures et illusions du pouvoir : les évêques savoyards sous la Troisième République », dans Elites et pouvoirs locaux. La France du Sud-Est sous la Troisième République (Bruno Dumons, Gilles Pollet dir.), Actes des journées d’études de Lyon, 21-22 mars 1996, Lyon, PUL, 1999, p. 219-234.

20 La Bibliothèque Nationale de France dispose d’un exemplaire de la cinquième édition (Voix prophétiques ou signes, apparitions et prédictions recueillis principalement des Annales de l’Eglise touchant les grands événements du XIXe siècle et l’approche de la fin des temps, Paris, V. Palmé, 1872, 2 vol.) de même que la bibliothèque du Centre d’Anthropologie religieuse Européenne (EHESS, 54 Boulevard Raspail, 75006 Paris). Le Centro Studi Don Bosco de la Pontificia Università Salesiana (Rome) abrite la troisième édition (1871), composée d’un volume unique de 594 p. Éditée conjointement par l’imprimeur Vromant (Bruxelles) et par l’éditeur parisien Victor Palmé, cet ouvrage est publié à 3000 exemplaires. ADM, 19 J 158, Lettre de l’imprimeur F. Vromant, Bruxelles, 26 décembre 1871.

21 Sur Louise Lateau (1850-1883), la « stigmatisée de Bois d’Haine » (diocèse de Tournai), il existe une série d’ouvrages contemporains des faits, soit de nature apologétique, soit de nature médicale : Antoine Imbert-Gourbeyre, Les Stigmatisées, Paris, V. Palmé, 1873, vol. II ; Histoire miraculeuse de Louise Lateau, la stigmatisée et l’extatique du Hainaut, récit par le p. Ubald, Grenoble, imprim. de Prudhomme, 1872, 12 p. [BNF MP-3845] ; Louise Lateau, la stigmatisée de Bois d’Haine (Belgique), Lyon, Josserand, 1878 (2e édition) [BNF 8-M PIECE-257] ; Abbé N. J. Cornet, Louise Lateau et la science allemande, Bruxelles, M. Closson, 1874, 104 p. [BNF 8-M-337] ; Une visite à Louise Lateau, la stigmatisée de Bois d’Haine, le 21 septembre 1881, Avignon, Aubanel frères, 1881, 27 p. [BNF 8-M PIECE-361] ; Louise Lateau, une visite à Bois d’Haine, par M. Raboisson, Paris, «Le Monde », 1876, 35 p. [BNF 8-M PIECE-51] ; A visit to Bois d’Haine, the home of Louise Lateau, by Francis R. Howe, Baltimore, Kelly-Pietand Co, 1878, 269 p. [BNF 8-M PIECE-361] ; Science et miracle. Louise Lateau ou la stigmatisée belge, par le docteur Bourneville, Paris, A. Delahaye, 1875, 70 p. [BNF M-24381] ; Louise Lateau. Réponse à M. le professeur Lefebvre, par le Dr Warlomont, Bruxelles, H. Manceaux, 1875, 68 p. [BNF 8-M-34] ; Louise Lateau. Rapport médical sur la stigmatisée de Bois d’Haine, fait à l’Académie royale de médecine de Belgique au nom d’une commission, par le Dr Warlomont, Bruxelles, C. Mucquardt / Paris, J. P. Baillière et fils, 1875, 195 p. [BNF M-36446]. À ce jour, aucune étude critique sur Louise Lateau n’a vu le jour. Quelques informations dans Joachim Bouflet, Les Stigmatisées, Paris, Cerf, coll. Bref, p. 94-99.

22 Sur cet épisode : Hilaire Multon, « Catholicisme intransigeant et culture prophétique : l’apport des archives du Saint-Office et de l’Index », Revue historique, CCCIV/1 (2002), p. 109-137.

23 L’abbé Curicque dispose du manuscrit de l’ouvrage inédit publié par l’abbé Migorel : La Semaine ou le 3e commandement de Dieu. Trois lettres accompagnent le document (17 mai 1871, 17 janvier 1872, 15 février 1872). L’ouvrage est condamné par la Congrégation de l’Index. ADM, 19 J 162, Lettre de l’abbé Migorel, curé de Malétable, 18 décembre 1874.

24 ADM, 19 J 163, Lettre de l’abbé Radiguet, directeur du séminaire de Vire, 14 février 1885.

25 ADM, 19 J 158, Lettres du Père Frédéric de Bray, château de Cauneille (Landes), 8 mai 1875, 28 janvier 1879, 14 février 1879. Sur cette voyante liée au père Frédéric de Bray, ancien jésuite, restaurateur controversé du culte de Notre-Dame des Anges dans le diocèse de Toulouse sous le Second Empire : Jacques Maître, Mystique et féminité. Essai de psychanalyse socio-historique, Paris, Cerf, 1997, p. 354-359 ; Joachim Bouflet, Faussaires de Dieu, Paris, Presses de la Renaissance, 2000, p. 404-405.

26 ADM, 19 J 158, Lettres du docteur Antoine Imbert-Gourbeyre, Nice, 2 novembre 1871 et 21 décembre 1871 ; Lettres du chanoine Vincenzo De Angelis, 5 mai 1872, 4 août 1872, 1er septembre 1874. Antoine Imbert-Gourbeyre publie en 1873 le récit de son voyage à Oria, dans la partie méridionale des Pouilles. Selon lui, Palma Matarelli présente les phénomènes les plus extraordinaires (lévitations, huiles aromatiques, linges brûlés avec l’inscription des instruments de la Passion, stigmatisations), qu’ils document avec de nombreuses planches illustrées. Le Saint-Office invite le médecin clermontois à retirer son ouvrage de la publication. Antoine Imbert-Gourbeyre, Les Stigmatisées, Paris, V. Palmé, 1873, vol. I : Palma d’Oria. Le chanoine Vincenzo De Angelis est le directeur spirituel de la stigmatisée.

27 ADM, 19 J 162, Lettre du Père Niels, curé de Bois d’Haine, 1er septembre 1874 ; Lettre du Père Séraphin, passionniste, Tournai, 24 octobre 1874.

28 Sur ce réseaux de laïcs et d’ecclésiastiques constitué comme contre-pouvoir face à la montée du libéralisme et du socialisme : Emiel Lamberts (éd.), The Black International. L’Internationale noire (1870-1878), Bruxelles-Rome, Institut historique belge de Rome, 2002, 515 p. Sur Mgr Gaspard Mermillod (1824-1891) : Charles Comte, Le cardinal Mermillod d’après sa correspondance, Paris/Genève, Bloud et Gay/Jacquemoud, 1924 ; Louis Jeantet, Le cardinal Mermillod, Paris, Lethielleux, 1906 ; Philippe Chenaux, « Le Cardinal Mermillod. Entre la mémoire et l’oubli », Choisir, novembre 1991, p. 6-11.

29 ADM, 19 J 162, Lettre du curé de Rohrbach, 25 avril 1873 ; Lettre d’une religieuse de Sarreguemines, 1er mai 1873. Sur Catherine Filljung (1848-1915) : Dictionnaire de biographie française, t. XIII, col. 1355-1356 ; Jacques Maître, Mystique et féminité. Essai de psychanalyse socio-historique, Paris, Cerf, 1997, p. 379-380. Deux ouvrages apologétiques et un procès à charge sont à signaler : Eugène Ebel, Sœur Catherine. Notes biographiques sur la mystique lorraine Catherine Filljung, religieuse dominicaine, fondatrice de l’orphelinat de Biding (1848-1915), Paris, Téqui, 1929 ; Eugène Ebel, Sœur Catherine. Notes biographiques sur la mystique lorraine Catherine Filljung, véritable mystique, Rouen, imprim. Lecerf, 1935 , Jean Baptiste Pelt (évêque de Metz), La vérité sur Catherine Filljung, fausse mystique, Metz, imprimerie du journal Le Lorrain, 1934.

30 Alors que les Voix prophétiques ont été l’objet d’une recension critique d’A. Van Weddingen dans la Revue catholique de Louvain, d’inspiration catholique libérale, l’abbé Curicque qualifie son contradicteur « d’injuste détracteur » et de « bollandiste ». Il lui reproche par ailleurs de mettre en parallèle sa production avec celle de l’abbé Torné-Chavigny, curé de Saint-Denis du Pin (diocèse de La Rochelle), traducteur et commentateur attitré des prophéties de Nostradamus à partir de la publication d’une nouvelle édition des Centuries en 1859. ADM, Papiers de l’abbé Jean-Marie Curicque, 19 J 162, Lettre de l’abbé Curicque au secrétaire du comité de rédaction de la Revue catholique de Louvain, Haute-Kontz, 6 mai 1872.

31 ADM, 19 J 158. Sur Mgr Dupont des Loges : Abbé Félix Klein, L’évêque de Metz. Vie de Mgr Dupont des Loges (1804-1886), Paris, Bloud et Gay, 1925 (2e édition), 368 p.

32 « Je veux vous féliciter de votre livre, c’est l’un des plus intéressants qui soient au monde ». ADM, 19 J 158, Lettre d’Ernest Hello, s. d.

33 ADM, 19 J 162, Lettre sur l’extatique Catherine Filljung de Biding (Moselle), 17 juin 1873 ; ADM, 19 J 163, Lettre de l’abbé Gronder, Abwiller, 16 juillet 1886 ; Lettre du curé de Biding, 2 février 1888.

34 ADM, 19 J 158, Lettre du chanoine August Rohling, Münster (Westphalie), 11 décembre 1872. Sur August Rohling (1839-1931) : Lexikon füt Theologie und Kirche, t. VIII, Freiburg im Brisgau, Herder, 1936, col. 942 ; Enciclopedia cattolica, Cité du Vatican, t. X, 1953, col. 1090-1091 ; J. Katz, Juifs et Franc-maçons en Europe (1723-1939), Paris, Cerf, coll. Histoire-Judaïsmes, 1995 (version anglaise : Harvard University Press, 1970).

35 ADM, 19 J 162, Lettre sur l’extatique Catherine Filljung de Biding (Moselle), 17 juin 1873.

36 ADM, 19 J 162, Ibidem.

37 Michel Servant, Veillez et priez car l’Heure du Seigneur est proche. Il est midi moins cinq. Prophéties de tous les temps pour notre temps, Saint-Germain en Laye, chez l’auteur, 1972, 3 tomes.

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Pour citer cet article

Référence papier

Hilaire Multon, « « Faire la politique du miracle ». L’abbé Jean-Marie Curicque (diocèse de Metz, 1827-1892), restaurateur de sites religieux et compilateur de prophéties »Chrétiens et sociétés, 12 | 2005, 59-70.

Référence électronique

Hilaire Multon, « « Faire la politique du miracle ». L’abbé Jean-Marie Curicque (diocèse de Metz, 1827-1892), restaurateur de sites religieux et compilateur de prophéties »Chrétiens et sociétés [En ligne], 12 | 2005, mis en ligne le 02 mars 2012, consulté le 08 décembre 2024. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/chretienssocietes/2205 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/chretienssocietes.2205

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Auteur

Hilaire Multon

RESEA – UMR 5190, LARHRA Université Jean Moulin – Lyon III

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