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AccueilNuméros30Politiques sociales, législation ...Les politiques de l’éternité

Politiques sociales, législation et cohésion nationale

Les politiques de l’éternité

Réflexions sur les fondements idéologiques de la « Grande Roumanie »
The Politics of Eternity. Reflections on the Ideological Foundations of “Greater Romania”
Raluca Alexandrescu
p. 143-155

Résumés

Le présent texte propose deux possibles manières de lire et d’interpréter la pensée politique qui nourrit le concept de la « Grande Roumanie », réunies sous le concept englobant de « politiques de l’éternité ». Il s’agit, en premier lieu, d’une réaction de refus du modèle occidental importé ou du moins de son discours : le progrès, la diversité, les modes occidentales en général ne sont que des réverbérations d’une pathologie de l’errance moderne qu’il faut soigner par le retour aux sources. C’est dans ce sens que le texte présent propose une lecture portant sur la naturalisation de la modernité (synonyme jusqu’alors de l’Occident) et de son adaptation aux rythmes de l’éternité paysanne. En second lieu, « l’éternité » est fixée à travers une jonction idéologique, qui laisse souvent de côté les clivages traditionnelles gauche-droite. Pas suffisamment structurant pour le système des partis politiques qui préparent le moment 1918, ce clivage est remplacé par un discours unificateur sur la permanence de la roumanité dans ses différentes déclinaisons. La langue, les discours, les politiques publiques, la gouvernance sont orientés d’une manière stratégique vers un objectif unifiant. Le processus d'occidentalisation devient à la fois source de modernité – dans la compréhension constitutionnelle et démocratique du processus – et d'anti-modernité – dans le refus du temps accéléré qui est le propre de la modernité mais qui entraîne une contrariété s’appuyant sur son opposé : l’immobilisme de l’éternité, que l’on ira chercher dans une tradition souvent recomposée de toute pièce.

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Texte intégral

 

  • 1 Déclaration de Marcel Ciolacu, président du Parti social-démocrate, vendredi le 17 mars 2023 (nou (...)

Menons nos vies comme nous l’entendons. Nous sommes l’un des pays les plus sûrs au monde et l’un sinon le pays le plus tolérant au monde. Je crois aux valeurs européennes […] mais nous avons notre diversité à nous. Nous devons défendre notre unité par la diversité. […] Et intervenons vite, car ils (les Roumains, n.n.) défendent leur niveau de vie et leur mode de vie. Le monde change de toute façon. Nous ne pouvons pas modifier les valeurs. Nous n’avons pas ce droit. Nous perdons notre identité nationale. Ce n’est pas un hasard si l’Église et l’Armée sont en tête des sondages. Ce sont les deux piliers1.

Ces phrases font partie d’une déclaration à la presse du président du Parti social-démocrate roumain en mars 2023 à l’occasion d’un débat suscité par une pétition des représentants de l’Église orthodoxe roumaine, de concert avec treize autres cultes2. Le but de l’initiative était de demander au ministère de l’Éducation nationale d’introduire la religion comme discipline optionnelle à l’examen du baccalauréat. La question est en débat, mais le thème révèle, une fois de plus, des continuités avec un certain profil de la modernité roumaine déjà présent dans la pensée politique à l’aube du xxe siècle, hypothèse que le texte présent va tenter d’illustrer.

Considérations sur la méthode et hypothèses préliminaires

1Il n’est pas dans notre intention de dresser un parallèle entre les personnages politiques et les acteurs du système contemporain et ceux du jeune État roumain des années 1890-1900, mais plutôt d’essayer de savoir si la thématique exceptionnaliste, traditionaliste, nationaliste mise en évidence dans la citation ci-dessus se retrouve, d’une manière ou d’une autre, dans la pensée politique qui précède et prépare le discours et, pourquoi pas, la fable politique (dans le sens défini par Reverzy 2012 :10) tissée autour de l’Union de 1918. Les méthodes propres à l’histoire de la pensée politique en facilitent l’approche.

2Dans les années 1890-1900, le processus de construction de la rhétorique nationale roumaine est en plein essor et suit un clivage commun dans la région, sur le modèle The West and The Rest (Laurens 2022). La tension anciens-modernes, qui avait d’une certaine manière structuré la première étape de la modernisation se retrouve après l’Union de 1859, dans une nouvelle étape, comprise dans ce qu’on appelle « les antimodernes » (Compagnon 2005, Burleigh 2007) ou, avec d’autres points de référence, « les politiques de l’éternité » (Snyder 2018), syntagme qui paraît encore plus approprié dans les projections discursives des acteurs politiques roumains de la fin du xixe siècle jusqu’à la Grande Guerre.

3À cela se rajoute la tension entre le volontarisme de l’acculturation des générations précédentes et les hésitations ultérieures du libéralisme qui prend la direction contraire de l’obsession traditionnaliste. Le processus d’occidentalisation devient à la fois source de modernité – dans la compréhension constitutionnelle et démocratique du processus – et d’anti-modernité – dans le refus du temps accéléré (Rosa 2022) qui est le propre de la modernité mais qui entraîne une contrariété s’appuyant sur son opposé : l’immobilisme de l’éternité, que l’on ira chercher dans une tradition souvent recomposée de toutes pièces.

4L’« occidentalisation » de l’Europe du Sud-Est qui s’opère durant la première moitié du xixe siècle porte également les racines de l’anti-occidentalisation (Sternhell 2010, Folschweiller 2017). Discuter de « l’Orient », de ses marges territoriales, mais surtout symboliques, façonne tout un débat culturel et politique. D’où la remarquable fluidité et versatilité du concept et les passions suscitées par son cadrage.

5Dans ce texte nous nous interrogeons principalement sur le jeu de convergence-divergence dans le passage à la « Modernité occidentale » (Jaeghere 2021) tenant des deux côtés du fil : la nécessité de construire et aussi de préserver ce qui est identifié comme « la culture et l’identité nationale roumaine » (Alexandrescu, Grancea, Maier, Stanciu 2021) d’une part et l’urgence de ce qu’on appelle déjà, comme dans bien d’autres parties de l’Europe du sud-est, « le retard » par rapport à la civilisation occidentale (Hollifield, Héran 2022 : 219-221). L’histoire, la science politique, la philosophie politique contribuent dans une perspective globale à interroger les dynamiques de la modernisation dans le Sud-Est européen dans un ensemble qui se forge également à partir d’un certain mode de pensée politique diffusé sur des étendues géographique et chronologique encore plus importantes (Snyder 2018).

6Lorsqu’il s’agit d’analyser les principaux processus de transformation en cours au sein de la pensée politique moderne roumaine, il devient impératif d’aborder et de questionner l’aspect et les formes que le récit politique a construits autour de la transformation politique réelle en cours (Mihalache 2019, Sabău 2021, Ploscaru 2022). Cette démarche interprétative s’opère aussi à travers une lecture qui mobilise les infinies tractations dans le rapport entre « l’Occident et les autres » ; ou, en d’autres termes, l’accélération d’une énième phase de la question orientale dans le contexte d’un nouveau rapport de force et de la montée du nouvel impérialisme (Laurens 2022 : 98-105). Mais cela implique un contour et des délimitations des rythmes de la modernité que la littérature sur la modernisation dans son cadre théorique met en rapport avec la transformation de la perception du temps, de l’histoire et de l’organisation politique des sociétés (Recwitz, Rosa 2021 ; Latour, Weibel 2020).

7Les perturbations du régime politique influencent à cette époque, dans un certain sens, la dynamique des structures sociales. Il s’agit en fait d’un enjeu plus large pour le processus dit d’acculturation qui s’opère au cours du xixe siècle entre occidentalisation et orientalisme, en abordant aussi le thème de la perception et de la traduction du Temps à travers la construction de l’individu en tant qu’acteur politique (Todorova 2011, Madelain 2019, Mazurel 2021). Après l’union des deux Principautés roumaines, la modernisation connaît plusieurs formules, y compris la résistance à la théorie du retard qui avait été dominante dans la narration révolutionnaire (Platon 1997).

8La transition qui s’opère dans ce contexte permet en effet l’accession aux postes les plus importants d’un groupe distinct et nouveau, composé par les boyards de deuxième et troisième catégories et la nouvelle classe de fonctionnaires qui sont le produit du vaste mouvement de migration étudiante à l’origine de la formation des élites technocratiques dans le Sud-Est européen (Siupiur 2009 ; Petrescu 2021 ; Pál, Popovici, Sora 2022). Le contexte leur est favorable, car le régime politique qui se met en place a besoin d’un rafraîchissement symbolique et pratique de ses élites. Le va-et-vient de la nouvelle élite, qui évolue du rural à l’urbain, rejoignant les différentes fonctions de l’administration, devient non seulement une source de progrès pour la fragile bourgeoisie de la seconde moitié du xixe siècle, mais aussi un petit vivier de recrutement d’une nouvelle élite politique (Pál, Popovici, Sora 2022 : 18-21).

9Le regard vers l’Occident se traduit alors par l’attitude ambivalente dominante qui conjugue la critique de l’état actuel des institutions et les propositions d’un glissement cohérent vers le modèle occidental (Sipiur 2004 : 21-24). Dans ce contexte, deux possibles hypostases se présentent, qui changent de profil pendant les années 1890-1900 et qui dessinent, d’une certaine manière, les directions du régime politique de l’éternité dans l’État roumain agrandi d’après 1918. Il s’agit d’une naturalisation de l’Occident dans la fabrique autochtoniste, traditionnaliste et agrarienne, d’une part, et d’un renforcement des politiques de l’éternité à l’intersection idéologique entre la gauche et la droite, d’autre part. Nous allons les aborder avec quelques exemples tirés de la production discursive des voix représentatives de chaque direction.

La naturalisation de l’Occident et la fabrique de l’éternité

10Des théories devenues classiques (Sternhell 2010) proposent une lecture de ce processus à travers « la coexistence conflictuelle de deux modernités » : la première, sortie de l’universalisme des Lumières et développée ensuite par Tocqueville et Mill dans la théorie de la démocratie comme espace privilégié de l’épanouissement de l’individu et la seconde, qui résulte des anti-Lumières, de ce courant de pensée qui proposerait à la place de l’individualisme et de l’universalisme le particularisme et le communautarisme : « la modernité éclairée est celle du libéralisme qui mène à la démocratie, l’autre […] prend les contours de la droite révolutionnaire, nationaliste, communautarienne » (Sternhell 2010 :15).

11Les années 1890-1900 marquent pour le jeune État roumain un changement de priorités dans le processus de modernisation institutionnelle mais aussi dans l’élaboration d’une pensée qui puisse servir de fondement narratif au projet politique. Ce changement se traduit par une diversification du problème national, qui déplace l’attention vers la Transylvanie, surtout après la dissolution en Transylvanie du Parti national roumain, en 1894, par le gouvernement hongrois (Hitchins 2014 :145). L’union, la « roumanité » deviennent des discours qui peuvent faire gagner des élections. Dans la même période, en 1891, est fondée à Bucarest la Ligue pour l’unité culturelle de tous les Roumains, qui réunit des étudiants bucarestois tels que S. Mehedinți, P. P. Negulescu, mais dans les rangs desquels sont plus tard actifs beaucoup d’intellectuels roumains : Al. D. Xenopol, I. L. Caragiale, B. Delavrancea, G. Coșbuc, Al. Tocilescu, G. Murnu, Al. Vlahuță, etc. Ces sociétés proposent généralement un contenu idéologique fortement nationaliste, bien que bâti sur les lignes d’argumentation propres à la modernité démocratique (Sandu 2008 : 163-174, Alexandrescu 2015). D’autres, comme Nicolae Iorga, que l’on va utiliser comme exemple, font passer les formes occidentales acquises à la source par un processus inverse de « roumanisation », qui devient par la suite un des outils de prédilection de la fabrique mythologisante de l’histoire nationaliste de la Roumanie d’après 1918.

12Trois grandes questions contribuent au nouveau parcours discursif. La première consiste en un rapport toujours dilemmatique avec la génération matricielle de 1848, qui est soit reconnue en tant que fondatrice, soit condamnée pour son rôle inefficace dans le processus d’acculturation. La deuxième est engendrée par le problème encore présent du vécu de cette acculturation dans la nouvelle phase politique et institutionnelle des deux dernières décennies avant la guerre. Comment faut-il s’y rapporter ? – ont l’air de se demander surtout les grands favorisés de l’occidentalisation. La troisième est conditionnée en fait par la réponse donnée à la deuxième : si la solution de l’originalité coûte-que-coûte est la réponse préférée, alors le problème est celui de la constitution d’une réflexion politique autonome, « originelle », qui puisse capter les ressources négligées, oubliées ou mises à l’écart par l’ancienne mode occidentalisante.

13Les textes de l’époque qui touchent le sujet parlent d’un changement de génération, qui essaie de remplacer la génération de 1866, incarnant le pragmatisme de la construction institutionnelle : les jeunes intellectuels formés dans les années 1890-1900 souffrent d’un désenchantement de la construction modernisatrice. Un des exemples les plus frappants dans ce sens est celui de Nicolae Iorga (1871-1940), historien et homme politique d’une influence déterminante dans la construction de la narration nationale au xxe siècle. Ce savant parfaitement francophone et francophile, avec une brillante thèse soutenue à un âge exceptionnellement précoce à Paris dans les années 1890, devient vers le début du xxe siècle le défenseur d’un protectionnisme universitaire nationaliste qui le pousse à soutenir l’élaboration d’une loi qui interdise la reconnaissance des diplômes obtenus à l’étranger :

Non-reconnaissance absolue des diplômes étrangers, car nous avons des professeurs, nous avons des savants, nous avons des écoles qui nous coûtent une fortune et qui ne sont pas faites seulement pour les petites gens et pour les pauvres. (Iorga 1904)

14Après l’effort certain d’élaboration institutionnelle de la génération précédente, le mouvement d’idées commence à subir un malaise indéterminé et diffus. Ce malaise se reflète, au niveau du discours politique, dans un mécontentement par rapport à la manière de mener la politique et la modernisation du pays (Alexandrescu 2022), mais les reproches de cette génération envers les prédécesseurs sont plus vagues, plus généraux, et beaucoup plus chargés idéologiquement aussi. Les critiques dénoncent une politique mal conçue et mal menée, et la solution est un repli sur l’inspiration du génie d’un « peuple de cinq millions (d’âmes) qui récolte du bon blé et élève des bestiaux de qualité supérieure » qui doit avoir « une Académie, et nous l’eûmes » (Iorga 1904 : 17). Les institutions deviennent le couronnement et même l’émanation d’un peuple méritant et performant (Adam 2018) : l’État sera bien construit si l’esprit du peuple est capté dans l’effort de construction institutionnelle.

15Tout échange universitaire ou culturel devient suspect et possible source de « contamination » avec les milieux intellectuels occidentaux. Ce qui est d’autant plus inexplicable si l’on pense aux articles critiques publiés par le grand savant et historien dans L’Indépendance roumaine où il déplore l’état de la bibliothèque de la Faculté d’histoire de Iaşi (Iorga 1899 : 40-42).

16Pour Iorga, le protectionnisme universitaire et académique n’est pas uniquement lié à un nativisme intellectuel, mais aussi à un argumentaire d’opportunité économique, car la création coûteuse d’une Académie, par exemple, doit être ensuite amortie par son usage sans compétition. Nul besoin alors de conférenciers étrangers quand l’Académie roumaine est une réalité institutionnelle.

17C’est d’autant plus bizarre de retrouver dans ce contexte un nouveau culte dédié à la génération de 1848, dont l’apparition a été rendue possible précisément par les études à l’étranger, par l’ouverture vers l’Occident. La haine des étrangers se combine paradoxalement avec un mouvement de récupération mythologique de cette génération de 1848, comme le montre un texte de 1900 de Nicolae Iorga :

Une heureuse génération, s’il en fut, celle des hommes de « quarante-huit », qui eurent, jeunes, tous les rêves qui devraient se réaliser ensuite et qui assistèrent, hommes mûrs et vieillards, à la réalisation de tous leurs rêves de jeunesse ! Une vaillante génération, celle des combattants qui ne se découragèrent jamais et qui virent le succès final de leurs hardis efforts ! Une sainte et pure génération, celle des rêveurs à toute épreuve… (Iorga 1900 : 115)

18Il faut préciser que la question d’une définition des principes démocratiques n’est pas sujette à des interprétations diverses uniquement dans le cas de la pensée roumaine de cette période. Certes, il y a des conditions favorisantes pour l’espace roumain, par exemple l’obsession linguistique, qui a comme conséquence la construction d’un modèle de la modernité

qui n’est pas vécue en tant que culture de l’expérience, fondée sur la dynamique économique et sur la prévision sociale, mais en tant que culture du discours où le présent, assis sur les valeurs de l’Histoire, est irradié par le modèle démocratique européen. (Barbu 2001 : 264)

Il y a une influence certaine de la philosophie de l’histoire et de la culture venues par la filière allemande et importée dans l’espace culturel roumain soit directement – la génération de Junimea est pétrie de cette culture – soit par l’intermédiaire de certains philosophes et historiens français qui adoptent un discours et une méthode similaires, comme c’est le cas d’Hyppolite Taine.

19L’émergence de cette vision culturelle de l’histoire tombe sur un terrain fertile, rendu déjà perméable par la méthode symboliste introduite par Nicolae Bălcescu ou même par Mihail Kogălniceanu, qui a commencé par la lecture de Guizot mais s’est finalement concentré sur la méthode de Michelet et Quinet, surtout dans sa jeunesse historico-révolutionnaire.

Les politiques de l’éternité comme intersection idéologique

20Assez rapidement, le terrain du discours révolutionnaire change d’aspect. La perception générale de la réalité révolutionnaire se transforme surtout dans la seconde moitié du xixe siècle. L’introduction de la notion de lutte de classes, par exemple, a lentement effacé le rôle de la révolution de la pensée, en soulevant l’objection devenue lieu commun : la majorité agissante, dit-on, ne savait presque rien de ces discours et ne s’en souciait pas. Au niveau de la rationalité agissante et positiviste des années 1890-1900, ceci est plausible même si la période en question subit une transformation symétrique en termes d’influence de la pensée sur l’action (Burrow 2000) : l’influence décisive du scientisme sur les conceptions déterministes et positivistes des systèmes politiques clos est parfaitement visible.

21L’accélérateur de ce processus est aussi la création des partis politiques (Hitchins 2014 :127) et la cristallisation d’un système de partis lié à la fréquence paradoxale des « concepts dynamiques » (Rosa 2010 : 76-79), forgés par le langage politique après la Révolution française et associés aux concepts conservateurs. Le mélange trace déjà une constante de la structure fondamentalement contradictoire qui devient la charpente d’une pensée politique trans-doctrinaire et intersectionnelle, un essentialisme collé à la modernisation. La démocratie dans sa variante moderne est un concept dynamique qui se mélange dans le langage politique roumain de cette époque avec des concepts plus statiques, comme la tradition ou bien la permanence (Rizescu 2013 : 413).

  • 3 La date de naissance officielle de ce mouvement et surtout de son porte-drapeau, la revue homonym (...)

22Ces événements coïncident aussi avec quelques phénomènes de regroupement dans les sociétés, partis et autres groupements socialisants, narodnicisants (agrariens), etc. Il y a, vers 1895, le début du mouvement sămănătorist3. Au cours de la même année, G. Panu (ancien protégé de C. A. Rosetti, ancien révolutionnaire, homme politique d’orientation socialiste) et son Parti radical décident de rejoindre les conservateurs. Trois années plus tard, un groupe de jeunes poporanistes (version adaptée aux besoins locaux des narodnicistes russes), baptisé « les généreux » décide de quitter le Parti socialiste, dont il avait renforcé jusqu’alors les rangs, pour passer au Parti national libéral (Hitchins 2014 : 132). En octobre 1895 prend fin le « long gouvernement conservateur », qui a détenu le pouvoir pendant huit ans, de 1888 après le long gouvernement libéral de douze ans de I. C. Brătianu.

23Les agrariens (sămănătoriști) introduisent en fait dans le discours politique ce mélange entre les concepts dynamiques de type progrès, évolution, et les concepts statiques, comme la tradition, la permanence des structures paysannes. En fait, même la question paysanne peut être lue dans cette perspective de mélange des concepts dynamiques et statiques. C’est ainsi que les antimodernes formulent leur révolte contre la prétention des prétendus modernes de conserver le monopole de la modernité « positiviste, laïque, progressiste ». Le retour à la tradition et aux concepts statiques serait dans ce sens une réaction envers la nouvelle religion de la modernité qui est le progrès.

24Ce paysage idéologique intersectionnel s’articule autour de quelques idées directrices, qui ont déjà frayé leur chemin dans la pensée roumaine, à travers Vico et Herder, qui entrent ainsi dans la circulation des idées et qui postulent en réalité une « révolte contre la raison » (Sternhell 2010 : 264). Cette pensée de Herder a ceci de particulier « qu’elle conteste la capacité de la raison à saisir la spécificité d’une époque, d’une situation, d’un peuple » (ibid.). Comme la proposition de Herder est de mettre en doute la possibilité d’établir une philosophie de l’histoire dressée sur le pouvoir de la raison, l’imposition implicite de cette vue dans l’espace intellectuel roumain a tendance à mettre alors entre parenthèses un effort soutenu par certains penseurs de 1848, tels le révolutionnaire et ensuite l’homme politique libéral-modéré et écrivain Ion Ghica, ainsi que les efforts remarquables de la génération d’historiens de Junimea (Hitchins 2014 : 138), qui ont eux aussi entamé une œuvre de construction d’une histoire de la nation roumaine à travers le fil de la raison historique, sans tomber pour cela dans l’historicisme.

25Le discours de la gauche radicale, qui se fait entendre surtout dans les années 1890, est un porteur paradoxal de cette approche. Il s’agit d’un signe de l’intérêt de plus en plus évident de la pensée de gauche pour l’histoire et la manière historicisante de l’envisager mais aussi pour la langue et le langage, que les socialistes ont en vue dans ces années-là. Car ils croient que l’invasion des néologismes, par exemple, est une expression des tendances des classes aisées de modifier le socle originel de la langue. Éloigner celle-ci de ses structures naturelles, telles qu’elles se retrouvent dans le peuple, chez les paysans, est une démarche contraire à l’intérêt de cette classe et des classes pauvres en général (Ornea 1972 : 50). Le retour à la tradition devient ainsi un enjeu idéologique par une voie moins attendue, mais non dépourvue d’histoire en elle-même. Il s’agit de voir où gît l’âme nationale, comment est-ce que l’on peut identifier le spécifique sans lequel on ne peut pas survivre en tant que nation, comme essaie de le montrer Constantin Stere (1865-1936), homme politique, critique littéraire et écrivain (Adam 2018 : 102).

26Par la voie d’un déterminisme linguistique dont l’un des plus inventifs créateurs est, quelques dizaines d’années plutôt, Ernest Renan (Paone 2023), Stere, membre du mouvement des « généreux » qui quittent les socialistes pour rejoindre les libéraux (Hitchins 2014 : 128), est un des avocats les plus connus de l’union de la Bessarabie avec la Roumanie, en utilisant l’argument linguistique pour la défense des Roumains de cette région. Son parcours traduit d’ailleurs le caractère très paradoxal et ambivalent de la méthode linguistique. La préoccupation pour la langue littéraire ne provient pas chez C. Stere d’un souci psychologique comme c’est le cas chez un prédécesseur illustre, B. P. Hasdeu, mais d’une visée idéologique, comme le montre d’ailleurs la question d’ouverture de l’un de ses articles sur le sujet, publié dans le journal Evenimentul literar : « Comment doit être la langue littéraire et qu’est-ce qu’on doit en faire pour qu’elle soit comme il faut ? » (Stere 1894a).

27Conjointement, Stere se prononce contre la théorie de l’autonomie de l’esthétique dans la littérature et l’art et ne perd pas, dans un article de 1894, l’occasion de se prononcer sur les vertus de l’art d’inspiration sociale :

J’ai vu que même dans la peinture et dans la littérature dramatique, l’art a toujours reflété les luttes sociales et politiques, et même plus, il s’en est directement mêlé, et parallèlement à l’avènement du mouvement du peuple ouvrier, il gagne de plus en plus le caractère socialiste et poporaniste. Nous avançons avec la vitesse de la vapeur vers l’art socialiste ; mis à part cette tendance, il ne reste que des éléments de décadence et de désarroi. (Stere 1894b)

28Sept ans plus tard, on retrouve des accents similaires dans une préface écrite par N. Iorga au roman Ciocoii vechi și noi, publiée dans la revue Curierul Literar, porte-parole d’un courant théoriquement concurrent, samanatorismul :

Dans une époque où, un peu comme aujourd’hui, on parlait de choses étrangères, avec des sujets étrangers, dans un monde étranger, il (l’auteur, n. n.) a bien voulu nous parler de nous tous dans la langue de tout le monde […]. Donc, ô lecteurs de littérature roumaine décadente, symboliste, ibsenienne et naturaliste, vous avez devant vous un livre sain, honnête, d’un pauvre écrivain simple et sans ambitions… (Iorga 1901)

29Le caractère inaccessible à la raison de l’esprit national, théorisé par Herder, est rappelé dans le propos de C. Stere évoquant la naturalité de l’intelligence de la paysannerie russe, dans un article élogieux à l’adresse de Gleb Uspenski, le narodnik russe :

Dans son écrit La puissance de la terre, Uspenski s’efforce de prouver que certaines formes de vie du paysan russe sont tellement avancées, que le peuple russe pourrait passer à un degré supérieur de civilisation sans que la Russie dût passer par la période capitaliste, traversée déjà par les pays de l’Europe occidentale. (Stere 1893)

En fait, on retrouve, indirectement, chez Stere cette même confiance absolue en la puissance de l’instinct, de la vitalité naturelle. C’est ainsi que le discours de cette génération, sous l’impulsion du modèle narodniciste (mais herderien à l’origine) commence à prendre « la défense de la poésie populaire spontanée contre l’art conscient, de la vitalité contre le raffinement, de l’histoire contre le doute de la raison, de l’État national, ethnique et quasiment biologique » (Sternhell 2010 : 267).

30Un autre cas intéressant dans cette même perspective est celui de Constantin Dobrogeanu-Gherea (1855-1920 ; critique littéraire, essayiste, théoricien et homme politique) un adversaire en maintes occasions de C. Stere, qui ne repousse pas nécessairement les continuités avec l’époque de la modernité révolutionnaire de 1848 – son option idéologique marxiste la lui rend plutôt sympathique – et qui cherche une expression globalisante de l’identité roumaine.

  • 4 Revue du Parti social-démocrate, collaborateurs : I. Păun-Pincio, N. Beldiceanu, Tr. Demetrescu, (...)

31En avril 1893 C. Dobrogeanu-Gherea arrive, après des efforts soutenus, à faire imprimer le premier numéro de la Revue Literatură și Știință (Littérature et Science) une collection d’auteurs initialement assez hétéroclite et qui indique par ailleurs l’intersection idéologique opérée à travers l’option pour les politiques de l’éternité : on y trouve des libéraux, des socialistes, des darwinistes sociaux (Ornea 2006 : 294-300) : Alexandru Vlahuță, Barbu Delavrancea, N. Voinov et Alceu Urechea, dont les convictions racistes et xénophobes trouvent un espace confortable (soixante pages) dans le premier volume, sous un titre révélateur : Ereditatea fiziologică și psihologică. La revue est éphémère, seulement deux numéros, sous forme de deux volumes, dont le second en mars 1894. L’esprit du temps en est néanmoins capté d’une manière exemplaire : une cohésion dans la recherche, sous la forme de différents discours, d’une certaine permanence de l’âme nationale. Ceci ne conduit pas, bien évidemment, à l’effacement total d’une gauche européenne dans la pensée politique roumaine de l’époque. Ces derniers éléments sont visibles par exemple dans la revue Lumea Nouă, publiée par l’activiste socialiste Ion Nădejde4, où sont notamment imprimées les contributions de George Diamandy, qui a édité à Paris une revue socialiste, L’Ère nouvelle (Ornea 1972 : 63). Mais il s’agit plutôt d’exceptions : le ton le plus audible appartient à une entente implicite entre les deux partis dominants qui se partagent le pouvoir politique, d’une part, et les différentes voix des cercles littéraires qui contribuent, chacun à sa façon, à la construction de l’imaginaire d’une « Grande Roumanie » idéale. La construction d’une narration alternative qui propose comme solution universelle « l’union de tous les Roumains » s’opère dans le contexte d’une problématique sociale sous-estimée par les gouvernements de gauche et de droite avant la Première Guerre mondiale (Hitchins 2014 :135-136), comme c’est le cas lors du grand soulèvement paysan de 1907, brutalement réprimé par le gouvernement libéral.

32Le présent texte propose deux manières possibles de lire et d’interpréter la pensée politique qui nourrit le concept de la « grande Roumanie », réunis sous la théorie englobante de « politiques de l’éternité ». Il s’agit, en premier lieu, d’une réaction de refus du modèle occidental français importé ou du moins de son discours : le progrès, la diversité, les modes occidentales en général ne sont que des réverbérations d’une pathologie de l’errance moderne qu’il faut soigner par le retour aux sources. C’est dans ce sens que nous indiquons une lecture portant sur la naturalisation de la modernité (synonyme jusqu’alors de l’Occident) et de son adaptation aux rythmes de l’éternité paysanne. Le choix du mot, inspiré par les travaux de l’historien Tymothy Snyder, peut-être doublement justifié, car il devient la clef de voûte d’un modèle culturel qui parle de « l’éternité née au village », à partir d’un vers devenu célèbre du poème « Lâme du village » publié en 1922 par le poète Lucian Blaga.

33En second lieu, l’éternité est fixée à travers une jonction idéologique, qui laisse souvent de côté les clivages traditionnels gauche-droite. Non point suffisamment structurant pour le système des partis politiques qui préparent le moment 1918, ce clivage est remplacé par un discours unificateur sur la permanence de la roumanité dans ses différentes déclinaisons. Les discours, les politiques publiques, la gouvernance sont orientés d’une manière stratégique vers un objectif unificateur.

34L’effort identitaire du modèle politique roumain, arrivé à son apogée géopolitique en 1918, ne se détourne pas au moment de la perte physique de son territoire de référence. Il est porté, dans des avatars différents, à travers les régimes politiques roumains du xxe et du xxie siècles (Soare, Tufiș 2018). La mémoire et l’analyse narrative de cet héritage servent aussi à la compréhension du communisme nationaliste de la Roumanie de Nicolae Ceaușescu (Petrescu C., Petrescu D. 2018 : 166-186), tout aussi bien que, dans des formes diverses, à celle des continuités du nationalisme roumain contemporain et de leurs résurgences apparemment paradoxales dans le champ des partis dits de gauche. La forme contemporaine du récit reconstruit un âge d’or, ou la seule condition d’intégrité de la « grande » Roumanie est suffisante pour la perfection du régime.

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Notes

1 Déclaration de Marcel Ciolacu, président du Parti social-démocrate, vendredi le 17 mars 2023 (nous sommes l’auteur de toutes les traductions) : <https://www.g4media.ro/ciolacu-despre-religia-ca-materie-optionala-la-bacalaureat-religia-aduce-cunoastere-nu-aduce-supunere-religia-deschide-perspective-cu-cat-vom-incerca-sa-impunem-progresismul-de-fapt-vom-incuraja.html>.

2 <https://romania.europalibera.org/a/religie-disciplina-la-alegere-bacalaureat/32319571.html>.

3 La date de naissance officielle de ce mouvement et surtout de son porte-drapeau, la revue homonyme, est le 2 décembre 1901. (Ornea 1971 : 52)

4 Revue du Parti social-démocrate, collaborateurs : I. Păun-Pincio, N. Beldiceanu, Tr. Demetrescu, R. Rion, S. Nădejde, V. G. Morţun. Entre 1895 et 1896, Lumea Nouă a publié aussi un supplément culturel, intitulé Lumea Nouă științifică și literară (Le monde nouveau scientifique et littéraire).

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Pour citer cet article

Référence papier

Raluca Alexandrescu, « Les politiques de l’éternité »reCHERches, 30 | 2023, 143-155.

Référence électronique

Raluca Alexandrescu, « Les politiques de l’éternité »reCHERches [En ligne], 30 | 2023, mis en ligne le 15 juin 2023, consulté le 15 février 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/cher/15205 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/cher.15205

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Auteur

Raluca Alexandrescu

Politologue, maître de conférences à la Faculté de sciences politiques et études européennes de l’Université de Bucarest, membre de l’International Political Science Association (IPSA), et de l’International Society for Cultural History (ISCH).

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