1Traiter la question des politiques linguistiques, en général, et celle des politiques linguistiques éducatives, en particulier, consiste à examiner les actions ou interventions, explicites ou implicites, du pouvoir politique et administratif dans le domaine des langues et de leur enseignement-apprentissage. Dans ce cadre, il s’agit d’identifier et d’interroger les actions de l’État, de son administration centrale ou locale, ainsi que celles des acteurs sociaux, comme les parents ou les familles, lorsqu’ils expriment leurs choix en matière de langues à faire apprendre à leurs enfants au sein de la famille, à l’école ou dans les institutions privées.
- 1 Du xive au xixe siècles, une toute petite partie du sud de la principauté de Moldavie apparue sur (...)
2Dans cet article, nous utilisons le terme de « Bessarabie roumaine » pour situer la Bessarabie dans le contexte historique où son territoire faisait partie de la Grande Roumanie (décembre 1918-juin 1940). Sans détailler l’histoire et la géographie de la principauté de Moldavie, il convient de mentionner que sa partie orientale a été annexée par l’Empire russe, sous Alexandre Ier, à la suite de la Paix de Bucarest, signée le 28 mai 1812, entre les Empires ottoman et russe. La Moldavie orientale, « soit un territoire de 45 000 kilomètres carrés avec cinq forteresses, 17 villes, 685 villages et une population d’un demi-million d’habitants », devenait ainsi une province russe (Ghervas 2008 : 60). Pour asseoir leur pouvoir, les Russes ont appelé « Bessarabie » tout ce territoire occupé, reprenant ainsi la dénomination d’une toute petite partie de la principauté de Moldavie (Boldur1 1992 : 419).
3Un siècle plus tard, dans le contexte très mouvementé de la Première Guerre mondiale, lorsque le tsar abdique en 1917, un Gouvernement provisoire russe est installé et le mouvement des bolchéviques prend de l’ampleur. Dans la goubernie de Bessarabie se forme une assemblée législative nommée « le Conseil du Pays » [Sfatul Țării]. En janvier 1918, cette assemblée vote à l’unanimité l’indépendance de la « République démocratique de Moldavie » et deux mois plus tard, à la majorité, son union avec le Royaume de Roumanie, sous le roi Ferdinand Ier de Hohenzollern-Sigmaringen, dont la ratification par les grandes puissances s’avéra toutefois difficile. Le territoire des neuf districts de la Bessarabie (Bălţi, Cetatea-Albă/Akkerman, Cahul, Chișinău/Kichinev, Hotin, Ismail, Orhei, Soroca, Tighina/Bender) fait partie de la Grande Roumanie jusqu’à son occupation par les troupes soviétiques le 28 juin 1940.
4Pour une meilleure compréhension de la situation linguistique à partir de 1918, il convient de donner quelques éléments du siècle qui la précède.
5Dans la période comprise entre 1812 et 1918, la situation linguistique en Bessarabie est influencée par le pouvoir central, mais aussi par les initiatives individuelles ou collectives qui tentent de s’opposer aux mesures restrictives concernant l’emploi de la langue roumaine sur son territoire.
6Après une dizaine d’années d’« autonomie administrative et judiciaire », entre 1818 et 1828, sous le règne d’Alexandre Ier, le russe et le roumain (appelé également « moldave » par les autorités russes, en particulier) sont utilisés, selon les cas. À l’école, après l’annexion à l’Empire russe, le roumain est enseigné à côté du russe, au Séminaire théologique créé en 1813 à Chişinău ou dans les écoles primaires paroissiales. Dans les écoles lancastriennes, créées en 1824 dans différentes villes (Chişinău – le centre administratif de la Bessarabie –, Bălţi, Ismail, Thigina, Hotin), l’enseignement se fait en roumain et en russe. Dans certaines écoles – gymnases –, créées en 1828, le roumain est également enseigné.
7Une fois cette autonomie annulée, une loi de 1828 impose l’utilisation du russe uniquement, « une traduction en moldave pouvait être faite, selon les besoins » (Boldur 1992 : 464). Par la suite, en 1836, une loi sur l’emploi de la langue dans l’administration accorde le droit aux « habitants de la Bessarabie » d’utiliser le roumain, en fonction des situations (affaires pénales, civiles, contrats…). Après 1843, des restrictions sur l’emploi du roumain sont introduites à nouveau. Dans le cadre des affaires de justice ou administratives, ces restrictions coûtent cher aux paysans qui ne connaissent pas la langue russe.
8Ultérieurement, sous Alexandre II, l’emploi de la langue roumaine est absolument défendu dans les écoles bessarabiennes vers 1870, malgré le fait que les Moldaves roumains forment une majorité de plus de 70 % de la population (Zasciuc cité par Ciobanu : 39-40), à côté d’autres nationalités présentes en Bessarabie : Ruthènes 13,1 %, Juifs 8,6 %, Bulgares 5,2 %, Allemands 2,6 %, Russes 2,1 % ; Tziganes, Ukrainiens, Arméniens, Grecs, Polonais, Suisses – moins de 1 % (en chiffres, dans un ordre décroissant, cela varie entre 11 000 et 500 personnes).
9Malgré l’interdiction du roumain, les instituteurs enseignent dans cette langue. La politique impériale de russification rencontre, donc, une certaine résistance au sein de l’école en Bessarabie. Selon Ciobanu, « le grand nombre de manuels didactiques imprimés pendant la domination russe prouve la ténacité avec laquelle les Roumains bessarabiens ont su protéger leur école nationale » (1941 : 56).
10La révolution russe de 1905, qui fut une première attaque d’envergure contre le régime impérial, remet à l’ordre du jour la question de la langue roumaine.
11Il est important de rappeler ici les actions de maintien de la langue roumaine dans et par l’Église, en parallèle aux offices célébrés en roumain, en dépit des mesures restrictives imposées par le Saint-Synode russe. Sous l’évêque métropolitain moldave Gabriel Banulesco-Bodoni et son successeur, « la typographie diocésaine de Chişinău a imprimé en roumain presque tous les livres rituels et les livres les plus importants des Saintes Écritures, jusqu’à la Bible », la plupart étant des reproductions de livres publiés dans les principautés roumaines (idem : 57).
12En 1913, un rapport signale que, depuis 1906, « le gouvernement russe a donné la permission de célébrer le service divin en langue moldave et d’enseigner dans les écoles primaires en langue roumaine » (Nouzille 2004 : 169).
13Le glissement du terme « moldave » vers celui de « roumain » dans une seule et même phrase peut être observé dans plusieurs sources bibliographiques déjà mentionnées. Les auteurs font référence à la même langue. Les manuels publiés en roumain avant 1918 utilisent, selon le cas, l’alphabet cyrillique ou l’alphabet latin. Le manuel Le cours primaire de langue roumaine d’Ioan Doncev, publié en 1865 à Chişinău, contient des textes en roumain et russe et un alphabet appelé de « transition », adapté au contexte de la Bessarabie. L’auteur y élabore sa méthode d’enseignement du roumain écrit en caractères latins, en passant par l’alphabet cyrillique et par la langue russe. Les livres publiés en roumain au sein de l’Église de Bessarabie utilisent, dans la plupart des cas, l’alphabet cyrillique et les titres de ces livres font référence à la langue « moldave ».
- 2 Un zemstvo (en russe Земство, dérivé de zemlia qui signifie « terre ») est un type d’assemblée pr (...)
14Dans le contexte des événements de la révolution russe de 1917 et celui de la Première Guerre mondiale, « le Congrès des instituteurs du 25-28 mai 1917 vote une motion suivant laquelle, à partir du 1er septembre 1917, toutes les écoles des villages moldaves ou peuplés majoritairement par des Moldaves, devront se transformer en écoles roumaines » (Ciobanu 1941 : 87). Ce document est admis également par d’autres organisations révolutionnaires, ainsi que par les Zemstvos2. Le Congrès décide également de nationaliser les écoles primaires des villes et certains lycées. Au cours de l’été de 1917, à l’aide des Zemstvos, des cours de langue, d’histoire et de géographie roumaines sont organisés pour les instituteurs, auxquels participent plus de 800 d’entre eux. En dépit de l’anarchie qui règne en Russie pendant l’hiver de 1917-1918, les écoles primaires des villages moldaves fonctionnent presque régulièrement et l’enseignement y est donné en roumain.
15Après plus d’un siècle d’appartenance à l’Empire russe, lorsque la monarchie des tsars prend fin et qu’un Gouvernement provisoire russe est installé, la Bessarabie saisit l’occasion pour faire un changement politique majeur et revenir aux origines roumaines. Le rôle déterminant est joué par le « Conseil du Pays », très représentatif car formé de militaires, paysans, artisans, ouvriers, salariés, représentants de comités locaux et de syndicats, soit 138 députés au total ; une assemblée multilingue et multiethnique : « 103 Moldaves, 13 Ukrainiens, 7 Russes, 6 Israélites, 5 Bulgares et Gagaouzes, 2 Allemands, 1 Polonais et 1 Arménien » (idem : 129).
16Trois grandes étapes constituent la « Grande Union » (Marea Unire, en roumain) et créent la Grande Roumanie le 1er décembre 1918 : le 27 mars 1918 c’est l’union de la Bessarabie (9 districts) avec la Roumanie, le 28 novembre c’est celle de la Bucovine et, en troisième lieu, c’est celle de la Transylvanie et de trois autres régions (Banat, Crişana et Maramureş).
17Dans l’intervalle des deux premières étapes de l’Union, du 27 mars au 27 novembre 1918, la Bessarabie a un statut de province autonome au sein de la Roumanie. Le roi de Roumanie, Ferdinand Ier, nomme le général Arthur Voitoiano « commissaire général de Bessarabie » en juin 1918.
18Par l’ordonnance du 22 juillet 1918, le commissaire Voitoiano complète celle du directeur de l’Intérieur n° 1918 qui se réfère à l’emploi des langues, élargit son domaine d’application et renforce son caractère exécutoire. En effet, si toutes les informations publiques affichées dans les rues de Chişinău et dans les autres localités de Bessarabie, ainsi que les programmes des festivités, des théâtres, des cinémas et d’autres spectacles doivent être imprimés soit en langue roumaine, soit parallèlement en roumain et en russe, par l’ordonnance de Voitoiano cette mesure s’étend considérablement. Elle concerne également les enseignes des industriels, des commerçants, des sociétés privées, des professions libérales, des militaires et des fonctionnaires civils, ainsi que les plaques indiquant les noms des rues et les annonces ayant trait aux différentes réunions philanthropiques, politiques, commerciales, de bienfaisance ou autres.
19Il est important d’observer dans le texte de l’ordonnance de Voitoiano le caractère obligatoire à l’égard de l’utilisation du roumain et le caractère optionnel – « seulement en cas de nécessité » – pour l’emploi d’une autre « langue étrangère ». S’agirait-il ici d’un nouveau statut pour la langue russe, utilisée jusqu’alors sur le territoire de la province après l’annexion par l’Empire russe en 1812 ? De même, le mécanisme de mise en œuvre des nouvelles mesures précise qu’un délai de deux mois est accordé pour l’exécution de l’ordre ; « ceux qui ne se seront pas soumis aux ordres du présent règlement seront passibles, conformément au Code pénal russe [encore en vigueur], d’emprisonnement ou d’une amende de 6 000 lei ». Les militaires et les fonctionnaires civils doivent veiller à l’exécution de l’ordonnance et ceux d’entre eux qui manqueront au devoir qui leur incombe seront soumis à des mesures disciplinaires ; les autorités administratives et de police sont chargées de la mise en exécution de la présente ordonnance. C’est une mesure forte qui réhabilite et renforce le statut et la fonction de la langue roumaine sur le territoire de la Bessarabie immédiatement après l’Union avec la Roumanie et qui prépare le terrain pour les transformations ultérieures liées aux politiques linguistiques et éducatives.
- 3 De 1918 à 1940, la Grande Roumanie a connu le règne du roi Ferdinand Ier (le neveu du roi de Roum (...)
- 4 Il est intéressant de constater que la reine Marie, fille du duc d’Édimbourg, Alfred, et petite f (...)
20Partie intégrante de la Grande Roumanie3, la Bessarabie garde cependant, pendant les premières années, des particularités régionales et le transfert des compétences des organes de l’administration locale se fait graduellement vers des institutions provisoires, jusqu’à l’adoption de la loi administrative de 1925 qui prévoit la création d’un système unique. Le roi Ferdinand Ier et son épouse, la reine Marie4, sont des fervents promoteurs de la modernisation de la Bessarabie, à travers des décrets et des lois qui ont été adoptées par la suite, y compris dans le domaine de l’enseignement.
- 5 Monitorul Oficial [Le Journal Officiel], n° 252, 8/21 février 1919, p. 5136, cité par l’historien (...)
21La « loi pour l’organisation et le fonctionnement de l’enseignement primaire et normal » de 1919, par laquelle, notamment, l’enseignement primaire devient obligatoire et gratuit pour tous, favorise la croissance du nombre d’écoles, d’élèves et d’enseignants en Bessarabie. L’enseignement du roumain est rendu obligatoire dans les écoles. Au vu du manque de matériel scolaire et didactique, par un décret du roi Ferdinand Ier, des fonds importants sont alloués du budget de l’année 1918-1919 du ministère des Cultes et de l’Instruction afin d’acheter des manuels scolaires, des livres littéraires et scientifiques, ainsi que des fournitures scolaires pour les besoins des écoles de Bessarabie5.
- 6 Dans sa contribution à la Revue d’histoire de la Moldavie (n° 4, octobre-décembre 2018), Valentin (...)
- 7 Albertro Basciani, auteur du livre L’union difficile. La Bessarabie et la Grande Roumanie, 1918-1 (...)
22L’historien A. Boldur6 parle d’une « révolution culturelle » qui s’est produite en Bessarabie après 1918. Avant l’Union avec la Roumanie7, il n’y avait « aucune école primaire roumaine » (il s’agit de l’enseignement officiel en langue roumaine), mais il existait « 1 084 écoles primaires russes » (1992 : 508). Son tableau présente les progrès déjà enregistrés pour l’année scolaire 1920-1921 : 1 747 écoles, 136 172 élèves et 2 746 enseignants.
- 8 A. Sîrbu est mon professeur d’histoire de l’école secondaire de mon village natal Baimaclia, dist (...)
- 9 Monitorul Oficial, n° 117, 17/30 août 1918, p. 1838-1840 » dans Enciu, op. cit.
23Deux ans plus tard, en 1923-1924, on compte environ 300 écoles de plus : 2 041 écoles, 203 627 élèves et 2 041 enseignants. L’exemple d’un village du sud de la Bessarabie, Baimaclia, confirme la même tendance : le nombre d’écoles est passé de deux à six – deux écoles primaires roumaines (de garçons et de filles), deux écoles allemandes et deux écoles israélites ; « on remarque ainsi que le système d’enseignement roumain dans le village était favorable aux nationalités qui y cohabitaient » (Sîrbu8 2016 : 230). Comme le montre cet exemple, un autre décret royal en vue de la modernisation de l’enseignement roumain fut celui du 14 août 1918 sur la création des gymnases pour les Ukrainiens, les Juifs, les Russes, les Bulgares, les Allemands et les autres minorités de Bessarabie. Son texte fait référence aux principes de base de l’organisation du système d’enseignement. Premièrement, chaque nationalité qui habite en Bessarabie a le droit d’instruire les enfants dans la langue nationale ; le programme scolaire de l’étude de la langue nationale est établi par une commission scolaire de la nationalité respective, selon les principes établis par le directorat et le ministère de l’Instruction publique. Deuxièmement, les parents sont libres du choix de l’école pour leurs enfants. Le troisième principe se réfère au contenu de l’enseignement : a) la partie fondamentale, qui contient des matières comme le roumain, l’histoire des Roumains, la géographie de la Roumanie, enseignées en roumain, selon les programmes scolaires élaborés par l’État roumain ; b) les matières, qui correspondent au type de l’école ; c) la langue de la nationalité respective9.
24Avec une ouverture pour les minorités, qui déjà porte ses fruits sur le terrain de l’enseignement, il n’est pas difficile pour la Roumanie de prendre des engagements par le traité de Paris du 9 décembre 1919 qui établit des règles relatives à l’usage des langues, aux garanties juridiques, à l’enseignement et aux affaires religieuses des minorités. En effet, la Roumanie s’engage à ne publier aucune ordonnance qui renferme une restriction de la liberté d’employer une langue étrangère, soit dans la vie privée, dans le commerce, dans la religion, la presse et dans les publications de toute sorte, soit dans les discussions publiques. Selon Rommenhoeller, on accorde « des facilités raisonnables aux sujets roumains » parlant une autre langue que le roumain, afin qu’ils puissent faire usage de leur langue en justice, oralement ou par écrit (1926 : 94). Le même auteur précise que « la question des minorités est devenue très importante », car « parmi les 16 800 000 habitants de la Grande Roumanie, 5 000 000 appartenaient à des nationalités étrangères, soit environ 30 % de la population » (idem : 70).
- 10 « La Constitution roumaine du 28 mars 1923 » dans Chronique constitutionnelle étrangère (Roumanie (...)
25Ultérieurement, la nouvelle Constitution de la Grande Roumanie du 28 mars 192310, inspirée dans ses 138 articles des constitutions des États de l’Europe centrale et occidentale, traduit les engagements pris par la Roumanie par le traité de Paris, mentionné ci-dessus (ibid. : 31). Au sujet de l’enseignement, le texte stipule que « les Roumains, sans distinction d’origine ethnique, de langue ou de religion, jouissent de la liberté de l’enseignement » (art. 5). L’enseignement est « libre dans les conditions établies par les lois spéciales et tant qu’il ne sera pas contraire aux bonnes mœurs ou à l’ordre public » (art. 24). Selon l’article 126 de la Constitution, le roumain est « la langue officielle de l’État Roumain ».
26En Bessarabie, ce cadre légal a créé le terrain propice à l’ouverture des écoles avec l’enseignement en russe, yiddish, bulgare, allemand et ukrainien, à la création de plus de vingt écoles confessionnelles et à l’ouverture d’écoles privées, si elles disposaient d’un local (ex., le lycée privé de la princesse Natalia Dadiani à Chişinău, en partie financé par le boïar Stourdza). Certaines minorités préfèrent tout de même envoyer leurs enfants dans les écoles où l’enseignement se fait dans la langue officielle de l’État, le roumain, jugé nécessaire pour la suite de leur éducation.
27Parallèlement à l’enseignement public se développe l’enseignement privé et ce sont les communautés religieuses ou nationales, les sociétés culturelles ou les particuliers qui entretiennent ces écoles. Dans la majorité de ces écoles, l’enseignement est fait dans la langue des nationalités respectives. Dans les années 1923-1924, la situation de ces écoles se présente comme suit : « écoles primaires libres, classées suivant la langue dans laquelle l’enseignement est dispensé : allemand 12 ; juif 48 ; français 1 ; polonais 1 ; ukrainien 1 ; au total 63 » (Ciobanu 1941 : 93). En guise d’exemple, une attestation de réussite délivrée en 1929 à Mme Ariadna Abadjer (née en 1911) par le gymnase russe P. Schumacher de Chişinău (après sept années d’études) sous la direction de la baronne allemande Geiking, qui indiquent les langues étudiées : le russe, le roumain, le latin, le français, l’allemand et le grec (Turcan 2014, vol. II : 10). Il est intéressant de noter que dans cette école privée où l’enseignement est dispensé en russe, le latin et deux autres langues d’origine latine – le français et le roumain – sont enseignées, ce qui représente la moitié des langues proposées.
- 11 Annexe 3, extrait des Documents diplomatiques français 1922, t. 1, vol. 7 dans Turcan 2014, vol. (...)
28Le général Le Rond, haut-commissaire français à Oppeln/Opole, en Haute-Silésie, mentionne deux lycées français à « Kichinau » (Chişinău) dans son rapport du 13 juin 1922, adressé au ministre des Affaires étrangères de la République française, Raymond Poincaré (MAE 2007 : 210)11 :
[…] deux lycées français, l’un pour les garçons, l’autre pour les filles, tous deux presque exclusivement fréquentés par les israélites et dont le très grand succès est encore accentué par les défiances des minorités juives et russes à l’égard des institutions d’enseignement roumaines ! […] L’école en français doit être à Kichinau un terrain neutre dont tous auront le bénéfice, les Russes qui y verront leurs sentiments personnels respectés davantage que dans les écoles roumaines, les Roumains ont tout avantage à voir une culture d’influence latine se répandre en Bessarabie […].
Il ressort de ce discours où l’école en français est perçue comme un « terrain neutre » à Chişinău que la situation (socio-)linguistique pouvait être conflictuelle entre les Russes et les Roumains dans la Bessarabie de l’entre-deux-guerres. L’enseignement en langue française est vu ainsi comme avantageux pour les deux parties : une alternative pour les Russes de ne pas apprendre dans la langue dominante et pour les Roumains de diffuser « une culture d’influence latine » dans la Bessarabie occupée pendant plus d’un siècle par l’Empire des tsars.
- 12 Par ailleurs, les Gagaouzes n’apparaissent pas dans ces statistiques. Les Gagaouzes (peuple turco (...)
- 13 Il nous est difficile de savoir si Le Rond et Ciobanu se référaient aux mêmes lycées (de 1922 et (...)
29Quinze ans plus tard, deux lycées français existent toujours à Chişinău, comme l’indique le rapport du ministère de l’Instruction publique roumain : « […] en 1938, il existait en Bessarabie 97 écoles particulières, primaires et secondaires, dont 10 roumaines, 75 juives, 5 allemandes, 4 polonaises, 1 arménienne et 2 russes12. À ces écoles on peut encore ajouter deux lycées français pour sujets roumains »13 (Ciobanu 1941 : 94).
- 14 Monitorul Oficial, n° 154, 2/15 octobre 1918, p. 2628-2630 , dans Enciu, op. cit.
30En septembre 1918, est adoptée la loi sur l’organisation des écoles secondaires et normales (pédagogiques) de Bessarabie. Les premières écoles normales sont créées dans les villes de Soroca, Cetatea-Albă et Chişinău, définies par l’article 8 comme « institutions scolaires pédagogiques secondaires dans le but de former le personnel didactique pour l’enseignement primaire ». La même loi établit le programme de ces écoles normales et fournit des informations sur les langues comme matières scolaires : le roumain, la langue nationale, le français14.
- 15 En 1920, ce lycée rassemble 614 élèves, y compris celles venues de Hotin (région du nord) et de C (...)
31Un exemple représentatif pour l’enseignement des langues est constitué par l’emploi du temps hebdomadaire de la section « école normale » du lycée de filles de l’Éparchie de Chişinău15 (Vnorovschi 1999 : 21-32). Pour l’année scolaire 1931-1932, trois langues sont proposées : le roumain (à raison de trois ou quatre heures par semaine pour toutes les classes, 1re-7e), le latin (une heure hebdomadaire en 3e et 4e uniquement) et la langue française enseignée à toutes les classes (deux ou trois heures, en fonction du niveau). Pour la deuxième section – sur huit classes, pendant l’année scolaire 1934-1935, les langues proposées sont les suivantes : le roumain (de trois à cinq heures par semaine suivant le niveau), le latin (deux, trois ou quatre heures, dès la 3e et jusqu’en 8e), le grec (une ou deux heures en 7e et en 8e), une des langues suivantes – l’allemand, l’italien ou l’anglais (trois heures dès la 5e jusqu’en 8e) et le français. On remarque que la seule langue enseignée à tous les niveaux, à part le roumain, est la langue française, selon la loi du 1918, mais aussi dans la continuité de la tradition instituée dès le xixe siècle en lien avec le statut de cette langue en Europe et dans les principautés roumaines (Turcan 2014, vol. I : 54).
32Par ailleurs, au lycée de garçons B. P. Hasdeu de Chişinău (qui compte huit classes), nationalisé par décret royal en 1918, l’enseignement est dispensé en roumain et les autres langues proposées sont le latin, l’allemand et, bien évidemment, le français. À l’instar des écoles primaires et des gymnases, le nombre des lycées en Bessarabie augmente beaucoup dans la période de l’entre-deux-guerres, en 1940 il y en a vingt-six au total, dans différentes villes : Chişinău, Bălţi, Cetatea-Albă, Cahul (Scurtu 2012).
- 16 La traduction en français des citations de ce livre, publié en roumain (l’original est en langue (...)
33Quelques années après l’Union, la population d’origine roumaine faisait part de la nécessité de créer des écoles « supérieures » (dont des lycées) dans les zones rurales, en dehors de la ville de Chişinău, à l’instar de celles créées par les minorités (lycée juif russe de Tatarbunar, lycée bulgare de Comrat ou allemand de Tarutino). Cette sollicitation a incité « les chargés de la politique éducative de Bucarest et de Chişinău au transfert des écoles supérieures des centres urbains aux zones rurales »16 (Basciani 2018 : 243). De plus, « afin de limiter l’influence de la culture russe, dans le sud de la Bessarabie en particulier, ont été créées quelques écoles ukrainiennes » (idem), ce qui a également permis aux minorités ukrainiennes « de se réjouir des droits civils plus vastes que ceux qui existaient dans la communauté établie en Bucovine ». Souvent, selon le même auteur qui s’appuie sur les rapports des inspecteurs scolaires (idem : 244), les bonnes intentions se heurtaient des carences et de l’incompétence administrative, dans un contexte économique difficile (des écoles sans mobilier scolaire, manuels ou chauffage en période hivernale et, par conséquent, l’augmentation de l’absentéisme de la part des élèves, mais aussi de certains enseignants, en nombre insuffisant et mal rétribués).
- 17 À ce sujet, l’historien Octavian D. Țîcu donne un « aperçu des politiques soviétiques à l’égard d (...)
34Parallèlement à l’augmentation du nombre d’écoles et à leur répartition plus équitable dans les communes et les villages, une avancée importante dans l’enseignement secondaire en Bessarabie semble être sa « roumanisation complète », commencée en 1918 et terminée en 1922, ainsi que l’augmentation du pourcentage d’élèves et de professeurs roumains dans ces établissements (Ciobanu 1926 : 268). Selon Basciani (2018 : 181), le personnel enseignant roumain rencontrait des difficultés et était confronté à un manque de confiance de la part de leurs collègues ou habitants de Bessarabie, ainsi qu’à une forme de résistance de la part des élèves qui ne comprenaient pas bien la langue roumaine. Le même auteur évoque des rapports de 1922 sur la situation en Bessarabie selon lesquels, dans le domaine de l’enseignement, certaines régions semblaient être à peine touchées par le renforcement du sentiment patriotique et de promotion que l’État faisait à l’égard de l’éducation (2018 : 189). En guise d’exemple, la région de Hotin où deux tiers des écoles primaires étaient russes et non pas roumaines, comme cela aurait dû être le cas ; les gymnases étaient en majorité privés et appartenaient aux minorités, à l’exception de deux d’entre eux. Cette situation favorisait les actions de ceux qui avaient l’objectif d’éloigner la population locale des intérêts nationaux, à l’instar des « agitateurs bolchéviques »17 (idem). Afin de remédier à ces problèmes, il a été proposé d’embaucher cent nouveaux éducateurs qui devaient mettre en place de nouvelles activités extrascolaires, en particulier de nature patriotique : « la roumanisation des écoles des minorités lorsque la population moldave y est majoritaire ou même minoritaire, la création d’écoles professionnelles pour éviter que les Moldaves étudient dans les écoles pour les minorités » (ibidem : 189-190).
35Dans la même période de modernisation de la Bessarabie sont posées les bases de l’enseignement supérieur. En novembre 1926 est créée la Faculté de Théologie à Chişinău, rattachée à l’Université de Iaşi. Jusqu’à cette époque, ceux qui souhaitent continuer leurs études dans le supérieur partaient à Odessa, Iaşi, Bucarest ou à Paris même, car les voyages et les études en France se pratiquaient de plus en plus fréquemment.
- 18 Comme le note plus tard Gala Galaction dans ses Lettres bessarabiennes (ibid. : 138).
36La loi sur la création de la Faculté à Chişinău, promue par le décret royal publié dans le Journal Officiel le 28 avril 1926, précise que « la Bessarabie a besoin d’un institut supérieur de culture qui aura pour mission non seulement d’être un centre d’études théoriques, mais aussi de rayonnement de la culture roumaine au sein du peuple moldave » (Ciobanu 2007 : 136). Certains professeurs de la Faculté sont des anciens députés du Conseil du Pays qui, en 1918, ont voté l’Union de la Bessarabie avec la Roumanie. Parmi les étudiants, « des ecclésiastiques, parfois plus âgés que certains professeurs, venaient sur les bancs de l’université pour écouter en roumain académique les vérités de notre sainte foi ancestrale » (idem : 138), ce « roumain académique » était reçu avec un grand enthousiasme et apprécié18.
37Les professeurs roumains venus du Vieux Royaume (Vechiul Regat, expression roumaine qui désigne le territoire du Royaume de Roumanie dans l’étendue qui fut la sienne de 1878 à 1913), ont joué le rôle d’« apôtres de la culture » en Bessarabie (Basciani 2018 : 243). Dans les mémoires de l’un d’entre eux, Nichifor Crainic, titulaire de la chaire de théologie mystique, il est fait mention de la difficulté de certains étudiants à comprendre son roumain très soutenu (idem), mais aussi de leurs efforts déterminés par leur désir d’apprendre, ce qui a contribué au renforcement de la mission de rayonnement de la culture roumaine de cette Faculté.
38Après douze années de riche activité, en recherches et publications également, la Faculté de théologie est transférée à Iaşi en juin 1940, à la suite de l’ultimatum soviétique et de l’invasion de la Bessarabie par les troupes de l’URSS.
39En 1933, une deuxième faculté rattachée à l’Université de Iaşi s’installe à Chişinău – la Faculté des sciences agricoles, avec la mission de développer en Bessarabie une « agriculture moderne, capable de fructifier les énormes ressources du sol et la richesse des eaux » (idem : 247). Le retard de Bucarest d’allouer les fonds nécessaires a contribué, selon l’auteur, à un des « échecs de la politique du gouvernement » en Bessarabie à cette époque, mentionné par Pan Halippa dans son discours « journalistique militant » de mars 1935 à l’attention du gouvernement roumain : « Le Ministère de l’Agriculture a alloué 9 millions sur 21 promis. Le Gouvernement montre une attitude d’indifférence à l’égard de cette Faculté qui couvre les besoins vitaux de cette région, […] son comportement compromet le processus de roumanisation de la Bessarabie […] » (ibidem : 248).
- 19 Plusieurs universités populaires ont été créées, mais seule celle de Chişinău a « survécu ».
40Dans le cadre de la même politique linguistique éducative et culturelle après l’Union, il était nécessaire de créer des institutions culturelles dans le but de réduire l’écart existant entre la Bessarabie et les autres régions du Royaume. Ainsi, à l’initiative d’un groupe d’intellectuels, dont Ştefan Ciobanu, Ion Pelivan et Pan Halippa, est créée l’Université populaire de Chişinău19 en février 1918, afin de promouvoir les connaissances de différents domaines de la science, ainsi que les valeurs culturelles roumaines. À l’occasion de l’inauguration de celle-ci, le président de l’Université, Pan Halippa, affirme que « ce sera une institution culturelle pour éveiller et éclairer l’esprit du peuple » après plus d’un siècle de domination russe.
41Pour mettre en œuvre les objectifs de cette institution, des personnalités connues du monde scientifique et culturel roumain y sont invitées pour donner des cours d’histoire, de langue et littérature roumaines, d’économie ou de droit. Onisifor Ghibu participe à la fondation de la bibliothèque de l’Université qui, en 1921, contient plus de 10 800 livres en roumain, 3 000 en russe, 300 en français et 300 en allemand, grâce à la contribution importante de l’Université de Iaşi et de l’Académie Roumaine (Turcan 2014 : 55). Ce fonds documentaire multilingue n’exclut pas la langue russe et valorise le français et l’allemand, à l’instar d’autres institutions culturelles ou d’enseignement de Bessarabie. Le public qui bénéficie de ses cours devient de plus en plus nombreux, de sorte que de nouveaux locaux sont loués. L’Université populaire cesse son activité pour les mêmes raisons que la Faculté de Théologie, après les événements du 28 juin 1940.
42Les bibliothèques populaires se développent en milieu urbain et rural en particulier. Cinquante institutions sont recensées en 1919 (Filipescu, Giurgea 1919 : 337), ainsi que des sociétés culturelles pour la promotion de la langue et de la culture roumaines (B. P. Hașdeu, Luceafărul, Societatea Caselor Naționale qui vise la création d’un centre culturel dans tous les villages « pour tout public souhaitant se nourrir de la culture roumaine » (idem : 333-334). À la suite d’initiatives privées, la Ligue des Femmes Roumaines20, la Ligue culturelle déploient leur activité en Bessarabie.
43Informer le large public à travers la presse en langue roumaine est une mesure qui nécessite des étapes de transition par la publication en roumain écrit en cyrillique de certaines revues ou journaux (ex. Furnica, Cuvânt moldovenesc, Luminătorul), en raison du manque de typographies roumaines et de la « méconnaissance de l’alphabet latin en milieu rural » (Filipescu, Giurgea 334-337). Le journal national Sfatul Țării, publié en roumain (alphabet latin), sort également une version en langue russe à destination des Russes habitant en Bessarabie, dans un contexte où la presse russe cesse presque entièrement son activité sur ce territoire. Ce journal, à l’instar de deux autres, Cuvânt moldovenesc et Ardealul, cesse son activité au début des années 1930 (du xxe siècle).
44Une « initiative remarquable a été le lancement, en 1932, de la revue culturelle Viața Basarabiei [La vie de la Bessarabie], à l’initiative de Pan Halippa, en grande partie et grâce au prestige de ses collaborateurs, A. Boldur, S. Ciobanu, Nicolae Smochină, qui ont révélé « des aspects de la langue et de la culture roumaines ignorés jusque-là ». (Basciani 2018 : 247). De même, la presse locale est en plein essor dans différentes villes de Bessarabie (exemples de journaux : Deșteptarea, Unirea, Frăția românească et Cetatea-Albă).
45Sur le plan culturel également, parmi les « succès de l’administration roumaine en Bessarabie » (1992 : 507-512), Boldur mentionne la création, à Chişinău, d’une école des Beaux-Arts, d’une bibliothèque centrale et d’une station de radio, ainsi que les travaux de construction du Théâtre national. Par ailleurs, l’activité théâtrale en russe bascule vers le roumain, même si elle est encore balbutiante (Filipescu, Giurgea, 1919 : 333). À Chişinău aussi, deux conservatoires sont créés – national (en 1928) et municipal (en 1936).
46Ce ne sont que quelques exemples d’avancements réalisés dans le domaine éducatif et culturel en Bessarabie durant ces vingt-deux ans au sein de la Grande Roumanie (1918-1940), déterminants pour la situation linguistique.
47Les actions menées par les autorités dans le domaine linguistique en Bessarabie dès son union à la Roumanie ont été nombreuses et fortes, tout d’abord pour promouvoir la langue roumaine en tant que langue officielle de l’État roumain. Ce sont des mesures prescriptives, assez explicites, avec un mécanisme de mise en place renforcé, à l’instar de l’ordonnance de Voitoiano (mesures disciplinaires, amendes, etc.). Des lois, des décrets adoptés ultérieurement, la (nouvelle) Constitution de la Grande Roumanie du 28 mars 1923 créent le cadre propice au rayonnement de la langue roumaine, mais aussi au respect des langues des minorités habitant sur le territoire des provinces réunies.
48Les coauteurs du livre sur la Bessarabie déjà cité, publié en 1919, font l’observation suivante : « On reste surpris devant la persévérance avec laquelle ce peuple [de Bessarabie], habitant près des villes – des noyaux russes de russification – ou au milieu d’autres nations – garde ses langue et traditions. » (Filipescu, Giurgea, 1919 : 340). « Je ne parle pas le russe » était une phrase souvent entendue, en signe de résistance à l’occupation russe, mais aussi exprimant un état de fait. En référence au discours d’inauguration de l’Université populaire en 1918 et à son but évoqué par le président de la nouvelle institution, « éveiller l’esprit du peuple » après plus d’un siècle de domination russe commencée en 1812, on pourrait s’interroger si cet esprit s’était-il vraiment endormi.
- 21 À ce sujet, parmi d’autres sources bien documentées existantes, Brasciani explique et interroge l (...)
- 22 « Discours prononcé par M. le Député Stéphan Ciobanu, professeur à l’université, à la séance de l (...)
49L’évolution de la situation politique roumaine et internationale menant à l’ultimatum de Moscou présenté à la Roumanie le 26 juin 194021, et, par conséquent, l’« interruption de la continuité de l’administration roumaine commise par les bolchéviques russes le 28 juin 1940 » constitue, selon plusieurs historiens, « un vrai crime envers les intérêts de la population de Bessarabie » (Boldur 1992 : 512). Dans son discours du 2 juillet 194022, Ciobanu exprime « une protestation véhémente contre la violation cynique de nos droits historiques, ethniques et humains les plus sacrés » (1941 : 133).
- 23 Un mois après l’occupation russe, la République socialiste soviétique de Moldavie (RSSM) est créé (...)
50La « pression idéologique très forte » exercée dès les premiers jours d’occupation par les Soviétiques (Nouzille 2004 : 198), la soviétisation23 et les politiques linguistiques qui ont été mises en place par la suite n’ont tout de même pas réussi à éradiquer la langue roumaine dans cette région. Elle est aujourd’hui la langue officielle de la République de Moldavie, écrite en caractères latins, grâce aux efforts et au combat mené dans ce sens tout au long des décennies qui ont suivi l’occupation.