1Ce volume rassemble les actes des XXVII^e Rencontres de Patristique, organisées les 9 et 10 juin 2021. Ce colloque a étudié la figure de Jésus comme paradigme des modèles bibliques employés dans l’enseignement des Pères. Après une introduction des éditeurs, Régis Burnet et Geert van Oyen (« Du Jésus des Écritures au Christ des théologiens. Retour sur une formulation problématique », p. 13-25) retracent un parcours historiographique autour des quatre quêtes du Jésus historique. Ils signalent les limites des quêtes précédentes qui permettent d’engager une quatrième quête et terminent en proposant la vision des Pères pour sortir de l’opposition « jésuologie »-christologie. Les contributions suivantes sont regroupées en deux parties.

2La première s’intéresse à quelques épisodes de la vie de Jésus qui ont permis d’affirmer sa messianité. Régis Courtray (« Jésus, fils unique de Marie ? La réponse de Jérôme dans le Contre Helvidius », p. 31-58) revisite la question des frères de Jésus. Il remet la confrontation entre Helvidius et Jérôme dans son contexte, i. e. la controverse opposant le mariage à la virginité. Marlène Kanaan (« Les rois mages et l’étoile de Bethléem, d’après un manuscrit arabe inédit, l’Aksimaros du Pseudo-Épiphane de Salamine », p. 61-73), présente la version arabe inédite d’un texte daté du v^e siècle. Elle s’intéresse au récit de la visite des mages, assimilés à des rois perses, récit, qui, dans ce texte, est complété par une description de l’étoile de Bethléem avec, en son centre, une femme et un nouveau-né. Frédéric Chapot (« Jésus et la violence. L’expulsion des marchands du Temple dans l’exégèse patristique [Mt 21,12-13 ; Mc 11,15-17 ; Lc 19, 45-46 ; Jn 2,13-17] », p. 77-107) étudie les interprétations de cette péricope à travers trois lectures (antijuive, ecclésiologique et spirituelle). Il s’interroge sur la violence de Jésus, perçue comme une preuve de son autorité, un acte de fidélité au Père ou la justification de son recours en vue de la conversion. Bernard Pouderon (« L’argument de la crucifixion dans la polémique antichrétienne du ii^e siècle (90-170) », p. 111-124) étudie le scandale de la croix, évoqué notamment dans le Dialogue avec Tryphon dans lequel Justin réfute cet argument antichrétien en le plaçant dans le plan de Dieu. Le thème de la crucifixion est repris par Aline Canellis (« Une relecture de la Crucifixion par Maxime de Turin [Sermon 37] », p. 127-146), qui étudie un sermon pascal tissant un jeu de figures entre l’Odyssée et les deux Testaments autour du thème de la croix. Rémi Gounelle (« La descente aux enfers et son fondement scripturaire dans le christianisme antique », p. 149-168) reprend les passages scripturaires et les agrapha employés par les Pères pour étayer ce théologoumène. Marie-Anne Vannier (« L’interprétation patristique de la résurrection du Christ », p. 171-181) aborde la résurrection chez Irénée de Lyon dans sa double dimension, sotériologique (face à la vision éthique juive) et charnelle. Pierre Descotes (« Un mystère de chambre close. Le Sermon 247 d’Augustin d’Hippone », p. 185‑200) s’interroge avec Augustin sur la question des miracles, spécialement sur les apparitions du Christ au Cénacle ; l’évêque d’Hippone montre combien la raison rechigne à accepter le miracle, qui est ainsi le signe révélateur de l’esprit sceptique de son interlocuteur. Colette Pasquet (« La confession de foi de Pierre à Césarée chez Ishodad de Merv », p. 203-211) interroge ce nestorien du ix^e siècle sur la péricope de Mt 16, 13-20 : la confession de foi doit être une réponse de la communauté inclue dans le nom de Pierre, réponse inspirée par l’Esprit Saint.

3La seconde partie étudie les constructions théologiques et polémiques autour de la figure du Christ. Steeve Bélanger (« “Jésus est bien le Christ”. Exemples de relecture apologétique et polémique des Écritures par Justin de Neapolis », p. 217-238) revisite les controverses christologiques du ii^e siècle entre Juifs et chrétiens à travers deux thèmes : la préexistence du Christ et la double parousie. Guillaume Bady (« “Lire ne suffit pas : il faut aussi interpréter”. L’exégèse polémique de Jean 5, 17-19 par Jean Chrysostome », p. 241-268) repose la question « Jésus se disait-il Dieu ? » en détaillant l’argumentation de Jean Chrysostome et en la confrontant avec l’interprétation de Théodore de Mopsueste. Paul Mattei (« La science humaine du Verbe incarné selon saint Ambroise », p. 271-279) expose les thèses de l’évêque de Milan sur l’ignorance du Christ-homme et l’omniscience du Verbe, vis-à-vis des thèses ariennes et apollinaristes. Cette partie se termine avec deux articles portant sur les polémistes païens. D’une part, Jérôme Lagouanère (« Quand un néo-platonicien lit les Évangiles. Le Jésus de Porphyre et sa critique par Augustin », p. 283-305) confronte Porphyre et Augustin autour de l’Incarnation, la divinité du Christ et la Résurrection, rappelant l’importance des thèses païennes dans l’élaboration des affirmations de foi d’Augustin. D’autre part, Gianluca Piscini (« La vie de Jésus chez Celse, Hiéroclès et Julien. Réécritures et critiques », p. 309-328) étudie les biographies païennes du Christ en dégageant leur argumentaire commun. Il conclut en mettant en évidence l’importance de la biographie de Jésus pour la formation de l’identité chrétienne.

4Les contributions sont accompagnées de représentations iconographiques paléochrétiennes commentées. Ces quelques péricopes et polémiques revisitées aident à comprendre l’importance de la controverse autour de la question christologique dans les premiers siècles.