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Étude

La connaissance des maîtres allemands anciens en France, de Dominique-Vivant Denon à Henri Focillon

Knowledge of the German Old Masters in France, from Dominique-Vivant Denon to Henri Focillon
Isabelle Dubois-Brinkmann et François-René Martin

Résumés

La connaissance des vieux maîtres allemands, ceux qu'on a désignés sous le nom de "Primitifs", depuis la fin du XVIIIe siècle jusqu'au milieu du XXe siècle, est le résultat d'un immense travail collectif, où les historiens de l'art, les conservateurs de musées, les critiques, les écrivains, sont venus apporter leur tribut. La France y a joué un rôle fondamental qui mérite une synthèse qui n'a jamais été véritablement faite. Qu'on la qualifie de fortune, de réception, ou que l'on veuille y chercher des transerts, cette vision française des primitifs allemands est profondément déterminée par l'histoire politique commune des deux nations, faite d'autant de moments d'ouverture que de préjugés dans lesquels entrent des postures nationalistes.

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Texte intégral

  • 1 Une partie de cet article a déjà fait l’objet d’une publication, en langue allemande : Isabelle Dub (...)
  • 2 Giovanni Previtali, La Fortune des Primitifs. De Vasari aux néo-classiques, Paris, Gérard Monfort, (...)
  • 3 Francis Haskell, La Norme et le caprice. Redécouvertes en art. Aspects du goût, de la mode et de la (...)

1Traiter de la réception des maîtres anciens allemands en France pose d’emblée des problèmes de découpage chronologique et de définition des relations entre la France et l’Allemagne informant cette réception1. À quel moment s’instaure en France un intérêt pour les productions artistiques des vieux maîtres allemands, c’est-à-dire des artistes du XVe et du début du XVIe siècle ? S’agit-il, par ailleurs, d’une relation strictement passive, dans laquelle la France n’aurait joué qu’un rôle secondaire dans la connaissance et la vogue pour les artistes relevant de cette période, de Lochner à Dürer ? De quelle manière, enfin, la conjoncture politique força-t-elle le regard français posé sur l’art allemand de cette époque ? Autant de questions essentielles auxquelles il est toutefois bien difficile de répondre. La comparaison avec l’historiographie des Primitifs italiens est à ce titre instructive. Dans sa Fortune des Primitifs, l’historien de l’art italien Giovanni Previtali montrait de quelle manière s’était instaurée la vogue pour les primitifs italiens : l’érudition au XVIIe siècle et plus encore au long du XVIIIe siècle avait stimulé les collectionneurs italiens. L’extraordinaire mouvement de circulation des œuvres d’art provoqué par la Révolution, les sécularisations de couvents, la dispersion de grandes collections n’avait alors fait qu’étendre à l’Europe entière, avec cinquante ans de retard, ce goût déjà formé pour les Primitifs italiens. Dès lors, le collectionnisme international allait porter le mouvement des études étrangères sur ces Primitifs italiens, dans les premières décennies du XIXe siècle2. Un tel schéma faisait du XVIIIe siècle le moment fondateur dans l’historiographie et la réception de ces Primitifs : il nous amenait à voir dans la Storia pittorica dell’Italia (1795-1796) de l’abbé Lanzi la première tentative de systématisation de l’étude de ces peintres – systématisation qui lui permettait d’intégrer d’une part un nombre considérable d’artistes et d’autre part de traduire le sens des œuvres par un discours objectif. Lanzi, donc, et non Karl Friedrich von Rumohr, dont les Italienische Forschungen (1827-1831) ne firent que prolonger, de manière certes magistrale, la somme érudite et critique de l’Italien. En outre, Previtali ne dissociait pas dans son étude les différentes formes d’historiographie rangées sous le terme d’« érudition » et le collectionnisme. Le savant et le collectionneur – quand ils ne formaient pas le même personnage – s’étaient associés de fait dans cette fortune moderne des Primitifs, même si Previtali accordait au premier le mérite d’être parvenu, avant le second, à la compréhension de la valeur de l’art médiéval. Bien différente était la vision que Francis Haskell présentait de la « redécouverte » des Primitifs italiens aussi bien que septentrionaux, au sein du mouvement plus vaste de « redécouverte » des maîtres anciens : si l’impact exercé sur le goût artistique par les guerres révolutionnaires et napoléoniennes était finement caractérisé par l’historien, notamment l’importance des critiques parisiennes de Friedrich Schlegel, il voyait dans les années 1840 le moment clé de la « redécouverte », le goût pour les Primitifs cessant à ce moment d’être porté par quelques érudits et collectionneurs d’une stature exceptionnelle pour passer dans un public plus vaste d’amateurs3. La détermination des ruptures chronologiques tenait ainsi à la notion même de « redécouverte », laquelle impliquait l’existence d’un véritable public d’amateurs.

1. Collections

  • 4 Voir la synthèse sur les confiscations françaises en Allemagne de Bénédicte Savoy, Patrimoine annex (...)
  • 5 B. Savoy, op. cit. note 4, vol. 1, p. 67.
  • 6 Friedrich Schlegel, Descriptions de tableaux, éd. et trad. B. Savoy, Paris, École nationale supérie (...)

2Un bref panorama de la fortune des Primitifs allemands au XIXe siècle et du rôle qu’y joue la France ne nous semble pas inutile. Les historiens français après 1870 héritèrent d’une matière désormais sensible sur laquelle, longtemps, leurs aînés crurent pouvoir exercer librement leur compétence sinon leur jugement. Si l’on s’en tient au domaine des Primitifs allemands, et si l’on se concentre sur les travaux des connaisseurs les plus exigeants, les années 1770-1800 furent déterminantes et inaugurales. C’est à ce moment qu’émerge la figure de Dürer ou qu’une œuvre aussi essentielle que le Retable d’Issenheim se met à attirer les regards. La France, en outre, y joue un rôle qui n’est pas négligeable. Qu’il s’agisse de Christian von Mechel, Karl Heinrich von Heineken ou encore Franz Christian Lersé, tous ces connaisseurs qui jouèrent un rôle essentiel dans la connaissance des maîtres anciens raisonnaient et travaillaient dans un espace cosmopolite au sein duquel la langue et le goût « français » restaient dominants. Il n’en sera plus de même au tournant du siècle. La Révolution et l’Empire, avec son cortège de guerres, de spoliations et de déplacements d’œuvres, est précisément un moment essentiel dans la fortune des Primitifs allemands. Essentiel fut, dans cette période troublée, le rôle de Dominique-Vivant Denon et, en réaction aux spoliations françaises, celui des frères Sulpiz et Melchior Boisserée, amateurs colonais qui possédèrent la première collection de Primitifs allemands. En 1802, ces derniers se rendent à Paris avec leur ami Johannes Bertram et visitent le musée Napoléon en compagnie de Friedrich Schlegel. Depuis mai 1795, il était possible d’y voir des Primitifs flamands saisis en Belgique, notamment le Retable de l’Agneau mystique enlevé à Saint Bavon de Gand et qui eut en France une fortune considérable. En Allemagne, des saisies révolutionnaires sont opérées à Cologne dès octobre 17944, puis à Aix, Bonn, Coblence, mais aucun Primitif n’est alors emporté. La mission de François-Marie Neveu en 1800-1801 s’exerce avant tout à Munich, dans la région de Salzbourg et à Nuremberg. Il est intéressant de noter que les conservateurs du Museum central recommandent alors particulièrement la saisie de tableaux de l’ancienne école allemande, par souci de combler les lacunes d’une collection qui vise l’exhaustivité5. Trois tableaux allemands du XVIe siècle sont ainsi transférés en France, dont la Bataille d’Alexandre d’Altdorfer, saisie à galerie électorale de Munich. C’est à Paris que Friedrich Schlegel découvre cette peinture, dont il fait une œuvre manifeste dans ses Descriptions de tableaux, publiées entre 1803 et 18056.

  • 7 Lettre de Schadow à Böttinger, Berlin, 5 mars 1807, dans : Johann Gottfried Schadow, Kunstwerke und (...)
  • 8 Johann Christian von Mannlich, Histoire de ma vie. Mémoires de Johann Christian von Mannlich (1741- (...)
  • 9 Denon la paya 740 francs. Elle fut exposée en 1807 sous le nom de « M. Schoen » (Martin Schongauer) (...)

3En 1806-1807, la moisson de Vivant Denon, directeur des musées impériaux, en Allemagne du centre et du nord, en Prusse et jusqu’à Dantzig et Varsovie, représente plusieurs milliers d’œuvres d’art ; puis entre juin et octobre 1809, après l’Espagne, c’est aux collections de Vienne qu’il s’attaque. Il aurait aimé saisir les Holbein de Dresde, mais l’Empereur l’en dissuade. Il éprouve bientôt une véritable passion pour l’altdeutsche Malerei, faisant enlever à Berlin une quinzaine de tableaux attribués à Cranach et trois à Dürer. On sait que Denon fréquentait le salon de Schlegel rue de Clichy, et peut-être ont-ils échangé des conversations qui ont sensibilisé le directeur du Muséum à cette peinture dite « germanique ». Le sculpteur Schadow ne manque pas de s’étonner de ce penchant : « Les productions des Maîtres allemands anciens le mettent dans tous ses états7 ». Johann Christian Mannlich, directeur de la galerie de Munich, éprouve la même surprise lors de la visite de Denon en 1809 lorsque celui-ci lui déclare : « Il y a une originalité si pure, une naïveté si touchante, une expression si vraie, une simplicité si riche et une dévotion si profondément sentie dans ces ouvrages, que je les préfère infiniment à la plupart de nos grands maîtres qui s’imitent et empruntent les uns des autres8 ». Fréquents dans l’appréciation des Primitifs italiens, ces topos n’avaient encore que peu été utilisés à cette date pour l’école allemande. À Berlin, Denon acquiert auprès de Schadow une Récolte de la Manne alors attribuée à Martin Schongauer et aujourd’hui donnée au peintre hollandais dénommé le Maître de la Manne9.

  • 10 Statues, bustes, bas-reliefs, bronzes et autres antiquités […] conquis par la Grande Armée, dans le (...)

4L’exposition des œuvres saisies en Allemagne, ouverte au Louvre le 14 octobre 180710, fait prendre conscience au public français autant qu’aux visiteurs étrangers de l’importance du patrimoine présent sur le territoire allemand, même si la part de l’art de ce pays est finalement très faible. En juillet 1814, Denon organise une exposition de Primitifs, notamment de l’école allemande. Outre trois tableaux qu’il est aujourd’hui impossible d’identifier, sont présentées trois œuvres de Théodoric de Prague ainsi que des tableaux de peintres allemands du XVIe siècle, Ulrich Abt et Hans Burkmair, et de l’école flamande : un Gérard David, deux Van der Weyden, un Memling et un Metsys. Au mois d’août, il expose pour la première fois au public la Fontaine de Jouvence de Cranach.

  • 11 Trop vaste est la bibliographie sur ce sujet. On pourra toutefois consulter : Eduard Firmenich-Rich (...)
  • 12 Décrite en particulier par Henri Daniell [Henri Joseph du Commun du Locle], « Cologne et son ancien (...)
  • 13 Voir avant tout Hiltrud Kier, Frank Günter Zehnder (éd.), Lust und Verlust. Kölner Sammler zwischen (...)
  • 14 Voir sur ce sujet I. Dubois, « La réception française des théories de Sulpiz Boisserée », dans U. F (...)

5Lorsque les Boisserée, Bertram et Schlegel avaient découvert en 1802 lors de la visite du Louvre l’existence d’une peinture « allemande » médiévale, découverte qui conditionnera la réhabilitation des Primitifs allemands de manière radicale, ils n’ont pu donc voir en réalité que des œuvres flamandes des XVe et XVIe siècles et allemandes du XVIe siècle. En 1803, un recès d’Empire décrétant la sécularisation des biens ecclésiastiques entraîne dans les territoires sous occupation française la vente des églises et des monastères, ainsi que des œuvres qui y sont conservées. De retour à Cologne au printemps 1804, les Boisserée commencent alors le sauvetage des œuvres et entreprennent des recherches sur la peinture médiévale. Il s’agit de la première collection exclusivement formée de peintures du Moyen Âge et de la Renaissance. D’abord constituée par les retables provenant d’églises de la région colonaise sécularisées ou détruites, elle s’agrandit bientôt grâce aux achats de Melchior en Flandre. Le terme de « peinture allemande ancienne » recouvrira dans leur collection le concept usuel de peinture allemande et flamande jusqu’au XVIe siècle. Les Primitifs flamands seront d’ailleurs les plus admirés par les visiteurs (Van der Weyden, Dirk Bouts). La collection est transférée et ouverte au public à Heidelberg en 1810 et Stuttgart en 181911. Elle sera vendue en 1827 au roi de Bavière. Avec d’autres collections colonaises formées dans les premières décennies du XIXe siècle, les collections Wallraff, Lyversberg, Haxthausen, Kerp, ou encore la collection Weyer12, la collection Boisserée forma ainsi un véritable creuset pour l’histoire de l’art13. En Allemagne comme en France, l’image de l’art des Primitifs allemands sera durablement façonnée par les ensembles formés par les collectionneurs colonais et par les discours qui en naîtront14.

2. Voyages

  • 15 Germaine de Staël, De l’Allemagne, Londres, 1810, cité dans l’éd. 2 t., Paris, Flammarion, 1968, t. (...)
  • 16 G. de Staël, op. cit. note 15, p. 78.
  • 17 Jacques Nicolas Paillot de Montabert, « Dissertation sur les peintures du moyen âge et sur celles q (...)

6C’est l’ouvrage de Mme de Staël, De l’Allemagne, publié pour la première fois en 1810, qui introduit une véritable vogue pour le voyage outre-Rhin. Elle a sans doute été instruite par Friedrich Schlegel qu’« Avant l’époque de la réformation, les Allemands avaient une école de peinture que ne dédaignait pas l’école italienne15 » ; et conditionnée par le Sternbald de Tieck, elle donne de l’Allemagne l’image d’une nation encore médiévale, dont les caractères primitifs n’ont pas été altérés. Si les lignes qu’elle consacre à la peinture médiévale sont réduites, et si elle ne fait qu’emprunter à Schlegel la dichotomie entre absence de style et profondeur du sentiment, elle aura néanmoins une longue fortune dans la littérature artistique française : « Les peintres du quinzième siècle avaient peu de connaissance des moyens de l’art, mais une bonne foi et une modestie touchante se faisaient remarquer dans leurs ouvrages ; on n’y voit pas de prétentions à d’ambitieux effets, l’on n’y sent que cette émotion intime pour laquelle tous les hommes de talent cherchent un langage, afin de ne pas mourir sans avoir fait part de leur âme à leurs contemporains.16 » Une telle réhabilitation était alors nécessaire : il suffit de citer l’opinion que Paillot de Montabert se fait au même moment de Dürer – qui n’aurait fait que « dégrader le goût », restant loin du niveau atteint par les œuvres des Italiens17 –, pour vérifier la force des préjugés continuant à toucher l’histoire de la peinture allemande, y compris celle de sa plus éminente figure. Il reste que dans son ouvrage Germaine de Staël ignore la composante nationaliste du mouvement médiéviste allemand, tel qu’on peut la trouver dans les cercles autour de Joseph Görres que fréquentent les Boisserée. Sa vision idyllique d’une Allemagne médiévale est renforcée dans l’esprit des voyageurs français par la littérature romantique et la peinture des Nazaréens.

Figure 1.

Figure 1.

Mme de Staël, De l’Allemagne, page de couverture, 1810, Paris, rééd. 1813, Londres.

  • 18 Voir A. Monchoux, L’Allemagne devant les lettres françaises, de 1814 à 1835, Toulouse, Fournié, 195 (...)
  • 19 Victor Cousin, « Souvenirs d’Allemagne », Revue des Deux Mondes, août 1866, t. 64, p. 594-619, en p (...)
  • 20 V. Cousin, art. cité note 19.
  • 21 Désiré Raoul-Rochette, « “Sammlung alt-nieder-und oberdeutscher Gemälde der Brüder S.M. Boisserée u (...)
  • 22 Ludovic Vitet, Études sur l’histoire de l’art, Paris, Lévy frères, 1864, t. 3, p. 202.

7Dans les années 1830 et 1840, le nombre de voyageurs français en Allemagne est assez considérable. Il s’agit de lettrés comme Michelet, Cousin, Quinet, Raoul-Rochette, Saint-Marc-Girardin, Saint-René-Taillandier, ou Marmier ou de collaborateurs du Globe, comme Fortoul ou Lerminier18. Les récits de voyage, souvent publiés à titre posthume, ou les journaux intimes conservés montrent que le visiteur français séjournant à Heidelberg, Stuttgart ou Munich et désirant s’intégrer à la société locale rencontrait toujours, un jour ou l’autre, les frères Boisserée. Le philosophe Victor Cousin connaît une véritable conversion après avoir visité leur collection : « Que d’heures agréables et instructives j’ai passées là dans la contemplation de ces toiles précieuses qui me révélaient un art tout nouveau pour moi ! Bien novice encore dans l’histoire des arts en général, j’ignorais entièrement celle de l’art allemand19 ». Les visiteurs peu avertis sur la peinture médiévale reprennent à leur compte les assertions de leurs hôtes, imaginant une origine commune avec l’art italien, à partir d’artistes grecs de Constantinople venus en Europe au Moyen Âge apporter l’art byzantin. Les réflexions de Cousin révèlent combien l’iconographie et la composante religieuse de l’œuvre d’art sont premiers dans son appréciation : « Pour moi qui n’avais pas les connaissances techniques de mon hôte, et que mon goût, d’accord avec mon ignorance, porte à rechercher surtout dans les œuvres d’art leur côté moral, mon tableau de prédilection était une Mort de Marie [Joos van Cleve, Retable de la mort de la Vierge, Munich, Alte Pinakothek]20 ». Désiré Raoul-Rochette a lui aussi le sentiment d’avoir sous les yeux une histoire des peintures allemande et flamande depuis leur origine. Décrire la collection dans ses parties revient à faire l’histoire de la peinture de deux nations : « ces trois hommes [les Boisserée et Bertram] sont parvenus, à force de soins, de travaux et de dépenses, à former une collection de ces peintures, au nombre de trois cent vingt, laquelle présente une histoire à peu près complète de la peinture allemande et flamande, par les monuments mêmes, seul genre de preuve qui puisse tenir lieu de tous les autres ensembles, et satisfaire à la fois l’esprit, le goût et la raison21 ». Le premier Inspecteur général des monuments historiques de la France, Ludovic Vitet, entreprend en 1829 un voyage qui le conduit à Aix, Cologne, Mayence, Darmstadt et Heidelberg, et rend visite à Sulpiz Boisserée à l’Appolinarisberg. Les rapports amicaux qu’il entretint avec Sulpiz témoignent bien de l’aura que le collectionneur allemand avait conservé en France (il passera encore trois mois auprès de lui en 1848 lors d’un voyage à Bonn). Mais s’il réfute catégoriquement en 1845 ses thèses sur l’origine allemande du gothique, il reste conditionné par sa pensée en ce qui concerne la peinture, puisqu’en 1864, il place encore à Cologne le « berceau de la peinture du nord22 ».

  • 23 « Animés d’un sentiment de patriotisme aussi noble que délicat, et craignant de voir passer en des (...)
  • 24 C. Sainte-Foi (Éloi Jourdain), op. cit. note 23, p. 309.
  • 25 Alphonse-François Rio, Épilogue à l’art chrétien, 2 vol., Fribourg, Herder, 1870, vol. 2, p. 245.
  • 26 A.-F. Rio, op. cit. note 25, vol. 2, p. 343.

8À partir de 1828, les Boisserée et Bertram s’étaient installés pendant les mois d’hiver à Munich, ville qui, par les chantiers gigantesques qu’avait entrepris le roi de Bavière, attira de nombreux Français qui en revinrent enthousiastes. Le mouvement catholique autour de Lamennais, Lacordaire, et Feli, entra alors en contact avec les milieux catholiques bavarois. Ce qui caractérise les commentaires de tous ces auteurs est une même propension à réduire l’œuvre médiévale à sa signification religieuse. D’autres considérations interfèrent aussi, comme l’association opérée dans la réception des Nazaréens à Rome, dont les écrivains français rapprochent l’action en faveur d’un retour à l’art chrétien ancien de l’entreprise de réhabilitation des Primitifs allemands menée en parallèle en Allemagne. Éloi Jourdain (1806-1861), théologien, écrivant sous le pseudonyme de Charles Sainte-Foi, séjourne à Munich plusieurs mois jusqu’en 1832 ; chez Görres, il fait la connaissance des frères Boisserée, dont il brosse l’éloge23. Il se rend à Nuremberg où il passe « plusieurs jours, occupés à visiter les églises et autres monuments de cette ville, l’une des plus anciennes et des plus intéressantes de l’Allemagne, soit par son antiquité, soit par les richesses artistiques qu’elle renferme24 ». De son côté, Alphonse-François Rio se rend à Munich en 1830 et c’est encore chez Görres qu’il rencontre Sulpiz Boisserée dont il livre ce témoignage quelque peu distancié : « Boisserée qui avait une vocation très prononcée pour le prosélytisme et qui avait fait jadis deux tentatives malheureuses en ce genre, l’une auprès de Goethe, l’autre auprès de l’impératrice Marie-Louise, ne dédaigna pas de travailler à ma conversion ou plutôt à mon instruction qui, à dire vrai, laisserait beaucoup à désirer25 ». Deux ans plus tard, il y retourne avec Lamennais et Montalembert qui déclare devant la collection Boisserée : « j’ai été enthousiasmé de ce que j’ai vu aujourd’hui de cette admirable école, si profondément catholique, si naïve, si poétique26 ». À Nuremberg où il se rend en décembre 1833, il visite la Moritzkapelle transformée en musée de peinture ancienne et écrit son enthousiasme. Pourtant, tous ces membres du courant mennaisien qui auraient pu jouer un rôle de vecteur de la connaissance des Primitifs allemands en France manquèrent en réalité cette occasion.

  • 27 « Des annonciations du quinzième siècle sur un fond d’or avec les riches ailes multicolores en dess (...)
  • 28 « Là se trouvent à la fois et les vieilles tapisseries, curieuses à voir pour les costumes, charman (...)
  • 29 Théophile Gautier, « Melancholia », 1834, dans Poésies complètes de Théophile Gautier, vol. 2, éd. (...)

9Ce seront d’autres voyageurs qui joueront ce rôle. Mais imparfaitement : chez eux, la figure de Dürer jettera souvent dans l’ombre les maîtres du XVe siècle. Victor Hugo part en août 1839 pour un voyage sur le Rhin ; un an après, il se rend encore à Aix et Cologne puis remonte le fleuve jusqu’à Heidelberg. Il a lu l’ouvrage de Mme de Staël et le Kunst und Alterthum de Goethe, et s’appuie essentiellement sur le guide de voyage de Schreiber. Du Dombild, il ne retient que l’anecdote27. Xavier Marmier, directeur de la Revue germanique, parcourt l’Allemagne dans les années 1830. Comme pour bien d’autres voyageurs français de son temps, Nuremberg est pour lui une Rome du Nord et Dürer un Raphaël septentrional. À Nuremberg précisément, au tournant des années 1833 et 1834, sans doute conditionné par le Sternbald de Tieck, il décrit les œuvres de la chapelle Saint Maurice et de l’église Saint-Laurent, en reprenant les indications de son guide, et ajoutant parfois quelque note personnelle28. En 1834, même si sa recension d’une visite à Schleibheim est courte, elle montre la renommée que possède encore la collection Boisserée sept ans après son achat par le roi de Bavière. Parmi les grands artistes allemands, c’est Dürer qui fascine le plus la génération des écrivains romantiques français. En 1834, Théophile Gautier avait introduit en France la vision spiritualiste de l’art de Dürer forgée par Wackenroder et Tieck. Opposant l’art sensualiste de Raphaël à celui de l’artiste de Nuremberg, Gautier fait l’apologie de l’art humble, naïf et catholique du second, à travers l’œuvre la plus ambitieuse et la moins naïve de Dürer, Melencholia I, dans laquelle il croit deviner un autoportrait : « Toi, le coude au genou, le menton dans la main,/Tu rêves tristement au pauvre sort humain : […]/Tu t’es peint, ô Dürer ! dans ta Mélancolie29. »

Figure 2.

Figure 2.

Dürer, Melencolia I, 1514, gravure (impression sur plaque de cuivre), 24,2 cm x 18,8 cm, num 43.106.1, Metropolitan Museum of Art.

  • 30 Sur la fortune de Melencholia I en France, voir plus particulièrement : Folke Nordström, « Baudelai (...)
  • 31 Jules Michelet, « Voyage d’Allemagne », [1842], Revue bleue, vol. 1, no 12, 19 mars 1904, p. 353-35 (...)

10Nombreuses, après Gautier seront les variations poétiques ou graphiques sur la célèbre gravure : Victor Hugo consacre en 1838 un autre poème à la Melancholia ; dans El Desdichado, Gérard de Nerval y fait lui aussi allusion ; François-Nicolas Chifflard illustre la traduction par Baudelaire des Histoires extraordinaires d’Edgar Allan Poe en la plaçant sous le regard mystérieux d’une Mélancolie ; Édouard Manet, enfin, fait le portrait gravé de Baudelaire en y introduisant le motif de la chauve-souris de Melencholia I30. Enfin, parmi les voyageurs français appartenant à cette génération, Jules Michelet transforme Dürer, dont il voit les œuvres à Nuremberg en 1842, en un Christ sécularisé et populaire : « S’il ne fut pas, comme Michel Ange, un Titien de l’art, il en fut un Christ. Il en eût la passion. Le grand penseur dut à cette torture d’échapper à toutes conditions du temps, de trouver les figures éternelles, la Mélancolie, la Madeleine de la passion à Nuremberg31 ». Peut-être à ce moment Holbein le Jeune est-il le seul artiste dans l’univers germanique dont la réputation, en France, puisse être comparée avec celle de Dürer : George Sand place son roman La Mare au diable (1846) sous le signe de son « réalisme » et d’une de ses gravures du cycle de la Danse de la mort.

3. La Kunstgeschichte dans l’historiographie française

  • 32 Sur cette « école de Berlin », voir Gabriele Bickendorf, Der Beginn der Kunstgeschichtsschreibung u (...)
  • 33 Johann David Passavant, Rafael von Urbino und sein Vater Giovanni Santi, Leipzig, 1839-1958.

11Au long du XIXe siècle, d’autres voyageurs français publieront le récit de leur pérégrination. Mais avec les peintres anciens et contemporains, avec la description des villes et des monuments, ils y introduiront une nouvelle figure : la Kunstgeschichte. En Allemagne se font jour à partir des années 1830 de nouvelles tendances érudites avec l’apparition d’historiens qui se consacrent spécifiquement à l’étude de la peinture. Johann David Passavant et Gustav Friedrich Waagen apportent à l’historiographie les premières études rigoureuses sur les Primitifs allemands, qui seront reprises et diffusées dans des manuels comme ceux de Franz Kugler et de Karl Schnaase. C’est de collection en collection, de ville en ville, que Passavant et Waagen parviendront dans les années 1840 à construire une vue d’ensemble inédite de la peinture allemande des XVe et XVIe siècles, fondée sur l’observation directe des œuvres mais aussi sur la collecte des sources archivistiques32. Au-delà des pratiques érudites ou de la technique attributive propres à ces historiens, ils rénovent à ce moment quatre genres d’écriture essentiels pour l’histoire de la discipline : la monographie, le manuel, le catalogue ainsi que le répertoire topographique. En s’obligeant à traiter de manière intensive la vie et l’œuvre d’artistes du passé, comme l’avait fait Passavant dans sa monographie sur Raphaël (1839)33, en s’imposant parallèlement, à une toute autre échelle de travail, de faire entrer dans une narration historique la multiplicité des événements formant l’histoire des principales écoles de peinture nationales, du Moyen Âge jusqu’aux temps modernes, les historiens allemands mettaient au point deux des dispositifs sur lesquels ils parviendront à asseoir leur domination académique. Cet investissement rigoureux de ces genres d’écriture mettra très vite les érudits ou les critiques français dans une situation délicate. Loin des sources, n’ayant guère l’occasion de fréquenter les œuvres que dans l’espace du voyage, ces derniers ne peuvent faire mieux que jouer les médiateurs (au risque du plagiat), à moins de prendre le contre-pied de la méthode historique allemande.

  • 34 Alfred Michiels, Études sur l’Allemagne, contenant une Histoire de la peinture allemande, Paris, 18 (...)
  • 35 Hippolyte Fortoul, De l’art en Allemagne, 2 t., Paris, Labitte, 1842, cité d’après la 2e éd, 3 t., (...)
  • 36 H. Fortoul, op. cit. note 35, vol. 2, p. 176.
  • 37 Louis Viardot, Les Musées d’Allemagne et de Russie. Guide et memento de l’artiste et du voyageur fa (...)

12Ainsi, Alfred Michiels, âgé alors d’à peine plus de vingt ans, voyage longuement en 1835 en Allemagne et publie en 1838 plusieurs articles dans l’Artiste sur la peinture allemande qu’il reprendra en volume, mélangé avec des études sur la littérature allemande34. Pour l’essentiel, il se contente de traduire le texte du Handbuch de Kugler, sans en saisir toutes les nuances, et en supprimant au passage les développements qui rattachent la peinture flamande à l’ère germanique, rejetant alors un élément essentiel de la vision du développement de la peinture des Primitifs telles que la formulaient Sulpiz Boisserée ou Waagen. Plus originaux seront les écrits d’Hippolyte Fortoul en 1842 et de Louis Viardot en 1844 qui se servent de notes prises pendant leur voyage ou d’après les catalogues des musées visités. Fortoul est le premier à tenter d’esquisser en français une histoire générale de la peinture allemande, et à tenter de renverser le mépris français pour l’art de cette nation. Les Primitifs y occupent naturellement une place notable. Armé de la connaissance des travaux des frères Schlegel et Boisserée, de Passavant, Nagler, Kugler, Waagen ou encore de Schnaase, Fortoul reste cependant assez évasif sur ses sources35. Critiquant la classification des maîtres anciens adoptée par les frères Boisserée, divulguée notamment en France par Raoul-Rochette, il se coule dans celle que Kugler met en œuvre dans son Handbuch der Geschichte der Malerei. Pour autant, il persiste à faire de Jan Van Eyck un héritier direct des peintres colonais : « Est-ce donc de l’école de Cologne et de meister Wilhelm, vivant comme lui à la fin du XIVe siècle, qu’Hubert Van Eyck reçut l’initiation ? Trouva-t-il ensuite à Bruges, l’une des cités les plus riches de ce siècle, une autre école où le byzantinisme inclinait déjà vers une imitation plus expresse de la nature ? J’admettrais volontiers ces deux hypothèses qui permettent de faire encore une part immense à son génie36 ». Moins ambitieuse est l’entreprise de Louis Viardot, qui rédige en 1844 un ouvrage sur les musées en Allemagne. Mais il n’en remet pas moins fermement en cause la classification héritée des frères Boisserrée, qui mêlait flamands et allemands37.

  • 38 W.[illiam] Burger, (William Thoré-Bürger), Trésors d’art exposés à Manchester en 1857 et provenant (...)
  • 39 William Bürger, (A. Thoré), « Un tour en Allemagne. Coup d’œil sur les musées de Brunswick, de Berl (...)
  • 40 W. Bürger, art. cité note 39, p. 616.

13Sans doute Théophile Thoré est-il à ce moment le connaisseur français le plus informé des travaux des historiens de l’art allemands et surtout le plus à même de s’en affranchir. Lecteur très attentif de Passavant et de Waagen, avec lesquels il entretint des rapports étroits, Thoré n’hésite pas à proposer son propre catalogue de l’exposition de Manchester, Art Treasures Exhibition, en 1857, à laquelle les deux historiens de l’art allemands avaient apporté leur caution. Ainsi discute-t-il les attributions de quelques œuvres à « deux artistes absolument inconnus en France, le Maître de la Passion Lyversberg et Grünewald d’Aschaffenbourg38 ». C’est après avoir lu les Nachrichten von dem Leben und den Werken Kölnischer Künstler de J. Merlo (Cologne, 1850), que Thoré examine en 1861 les peintures de la Cathédrale et du musée de Cologne39. Issue du mouvement romantique, l’idée du primat de l’école colonaise au Moyen Âge reste encore vivace chez un esprit aussi critique que Thoré. Cette école est toujours présentée suivant le schéma organique classique depuis la Renaissance : une phase d’essor, à laquelle succède apogée, puis dégénérescence. Le seul peintre dont le nom ait été rapproché d’une œuvre, Stephan Lochner, auteur du célèbre Dombild de la cathédrale de Cologne, constitue le point de référence et le climax qui prouve la maturité du style de cette école avant l’irruption de l’influence flamande. L’ensemble des œuvres que leur style situe à une date antérieure à Lochner est attribué à un seul peintre : Maître Wilhelm, ou placé sous son influence. Ce nom fut découvert à l’époque romantique dans la chronique de Limbourg de l’année 1380 et l’ensemble de la production colonaise du XIVe siècle lui fut alors imputée. Citant le Dombild dans son récit de voyage, Thoré révèle qu’il est toujours une station inévitable du pèlerinage touristique : « Si pressé qu’on soit en passant à Cologne, il faut cependant aller contempler le Dombild, pour se remettre bien dans l’œil le type de la peinture allemande à son origine et pour se réconforter dans l’appréciation des maîtres postérieurs à meister Stephan. Comme d’ailleurs se dispenser du pèlerinage à la cathédrale ? C’est, je crois bien, de tous les monuments de l’Europe celui dont l’intérieur produit le plus d’effet sur l’imagination40 ».

Figure 3.

Figure 3.

Anonyme, Art treasure exhibition, photographie, 1857.

  • 41 L. Tieck, Sternbald ou le peintre voyageur, revu et corrigé par Mme la baronne Isabelle de Montolie (...)
  • 42 Athanase Raczinsky, Histoire de l’art moderne en Allemagne, 3 vol., Paris, Renouard, 1836-1841.
  • 43 Gustav W. Waagen, Manuel de l’Histoire de la peinture. Écoles allemande, flamande et hollandaise, 3 (...)
  • 44 Sulpiz Boisserée, « Lettre de M. S. Boisserée, correspondant, sur les anciennes écoles de peinture (...)
  • 45 L’apport de l’érudition allemande n’avait pas échappé à Paul Durrieu, La Légende et l’histoire de J (...)

14Dans les années 1840-1870, on le voit, les Français ne purent guère faire mieux que jouer les médiateurs des recherches menées par les érudits allemands sur leurs maîtres anciens. La traduction joua par ailleurs un rôle non négligeable dans la diffusion de ces travaux : une version française du Franz Sternbald de Tieck est publiée dès 182341 ; le diplomate allemand Athanase Raczinsky n’hésite pas, quant à lui, à publier en français, avant même de songer à une édition allemande, son Histoire de l’art moderne en Allemagne, qui contient un long développement sur le retour aux maîtres anciens porté par les frères Boisserée et les nazaréens42 ; enfin, l’Histoire de la peinture de Waagen, est traduite en 186243. Cette présence tient sans doute autant à l’existence d’un public français soucieux de s’informer des derniers travaux sur la peinture allemande, qu’aux rapports complexes entretenus par les historiens allemands avec la France, et ce, depuis le début du XIXe siècle. Si les Français ne furent souvent que des médiateurs dans la connaissance de l’art des Primitifs allemands, les érudits allemands jouèrent à l’inverse, il faut le souligner, un rôle déterminant dans la construction d’une école autonome des Primitifs français. C’est Sulpiz Boisserée qui, dans une lettre adressée en 1840 au Comité historique des arts et monuments, dont il est le correspondant, énonce un véritable programme d’étude de l’« ancienne peinture française44 ». Devant le Couronnement de la Vierge et la Pietà de Villeneuve-les-Avignon, il avance le nom de Fouquet. Il est vrai que Passavant et Waagen avaient déjà donné de la consistance à l’individualité stylistique de l’artiste en rapprochant les Heures d’Étienne Chevalier du portrait peint du même Étienne Chevalier, alors en possession du Francfortois Georges Brentano, et en les rapprochant avec les miniatures du Flavius Josèphe ou encore le Portrait de Jouvenel des Ursins45. C’est ainsi que, jusqu’à la grande exposition des Primitifs français de 1904, les savants allemands sauront faire entendre leur voix dans ce domaine.

Figure 4.

Figure 4.

Jean Fouquet, Étienne Chevalier avec saint Étienne, Vers 1454-1456, Huile sur bois, Hauteur : 0,93 m, Largeur : 0,85 m, Allemagne, Berlin, Gemäldegalerie (SMPK).

© BPK, Berlin, Dist. GrandPalaisRmn/Jörg P. Anders

  • 46 Charles Blanc, « Albert Durer », [1875], dans Id., Paul Mantz, Auguste Demmin, Histoire des peintre (...)

15Ces progrès accomplis par la génération des Passavant, Waagen et Schnaase, les Français en prendront connaissance dans les années 1870 en lisant les différentes monographies formant L’Histoire des peintres de toutes les écoles, dirigée par Charles Blanc. L’École allemande y occupe une place notable. Charles Blanc s’adjuge deux des notices les plus importantes : celle de Holbein le Jeune et surtout celle relative à Dürer. Il en fait un artiste littéralement visionnaire dans un développement qui annonce quasiment les analyses d’un Focillon : « Son clair-obscur a aussi une apparence fantastique ; l’ombre et la lumière s’y jouent, comme dans une de ces visions puissantes dont il était tourmenté durant le sommeil. Enfin, chaque élément de ses œuvres, où est si fortement empreint le génie de l’Allemagne, trahit l’homme du Nord, qui composant sa vie de prose naïve et de vague poésie, aime à s’élever du monde réel dans le royaume des songes46 ». En dehors de ces deux « phares », c’est Auguste Demmin qui se charge de rédiger une quinzaine de monographies des artistes allemands des XVe et début du XVIe siècle, du mythique « Wilhelm de Herle » à Hans Baldung Grien, de Martin Schongauer à Mathias Grünewald. Né à Berlin en 1823 mais ayant fait sa carrière à Paris où il acquiert la nationalité française, Demmin voulait croire qu’il était le plus à même de cumuler les bénéfices des démarches historiques propres à chacune des deux nations, incarnées d’un côté par Viardot et surtout Thoré-Burger, et de l’autre par Waagen :

  • 47 A. Demmin, Souvenirs de voyage et causeries d’un collectionneur ou Guide artistique pour l’Allemagn (...)

16« M. Burger esquisse et brosse largement, à la manière de son peintre favori, tandis que le critique de Berlin [Waagen] finit parfois ses tableaux avec la patience des anciens maîtres allemands et néerlandais : – ses fonds sont en hachures comme les tableaux d’Albrecht Dürer. Chez l’un c’est la pratique de l’homme positif et la chaleur passionnée pour les préférés, qui atteint parfois la partialité, suite inévitable de ses recherches spéciales ; – chez l’autre, c’est l’étude d’analyse du savant, c’est l’éclectisme pour l’art en général qui décrit, et l’impartialité la plus absolue, mais un peu froide, qui tient la plume. Il est difficile de dire qui de ces critiques est dans le vrai47. »

4. Politique

  • 48 Voir à ce titre nos développements : F.-R. Martin, « L’histoire de l’art des vaincus. L’Alsace dans (...)
  • 49 Émile Galichon, « Martin Schöngauer. Peintre et graveur du XVe siècle », Gazette des Beaux-Arts, II (...)
  • 50 É. Galichon, « Albert Durer : sa vie et ses oeuvres », Gazette des Beaux-Arts, vol. 8/1, 1860, p. 5 (...)
  • 51 Ernest Chesneau, Les Nations rivales dans l’art, Paris, 1868 ; Id., « Albert Durer », Revue des Deu (...)
  • 52 Émile Michel, « Les Musées d’Allemagne. Le Musée de Cologne », L’Art, 1882, t. 31, p. 275.
  • 53 É. Michel, op. cit. note 52, p. 278.

17Comment et dans quelle mesure la vision que les Français se faisaient de l’art des Primitifs allemands et surtout de l’érudition allemande fut-elle affectée par la défaite de 1870 et l’Annexion de l’Alsace-Lorraine ? Il n’est guère facile de répondre à cette question48. Bien avant 1870, la critique française avait construit la plupart des stéréotypes qui allaient nourrir le ressentiment des vaincus. Il suffit pour s’en rendre compte de lire les deux études qu’Émile Galichon consacre à Schongauer et Dürer, dix ans avant le conflit. Du premier, l’historien français, au demeurant spécialiste des estampes, reconnaît que pour l’apprécier pleinement, il convient de faire un effort pour « surmonter la première impression toujours peu favorable que produisent [ses] figures maigres et décharnées49 ». Le second, en dépit de son imagination, de son génie de « visionnaire », n’est jamais parvenu à échapper à ce tropisme de la laideur ou de la vulgarité : « Mais veut-il traduire les songes les plus étranges de son imagination, il ne peut les rendre que sous formes réelles jusqu’à la vulgarité, avec un calme et une persistance qui étonnent ces nations latines […] qui, mieux partagées, surent trouver des formes élevées pour peindre les habitants d’un monde supérieur50. » Un autre critique, Ernest Chesneau, qui s’était fait en 1868 le théoricien de la rivalité des nations dans l’art, accentue quelques années plus tard cette vision en faisant de Dürer un artiste irréductiblement « gothique », c’est-à-dire ancré dans le Moyen Âge et ses superstitions51. (Il est vrai qu’entre-temps, les Allemands avaient célébré en 1871 l’anniversaire de la naissance de Dürer en tentant d’en faire « le plus allemand des artistes allemands ».) La permanence des mythes esthétiques véhiculés par les jugements français au long du XIXe siècle est donc remarquable : les mêmes critères semblent fonder le jugement porté sur l’art d’un Menzel ou d’un Dürer, et l’on reproche pareillement aux primitifs rhénans et aux Nazaréens leur « intentionnisme » doublé d’une défaillance technique. Dans un pays marqué par une absence de tradition artistique, l’artiste allemand est issu d’une génération spontanée qui scelle son originalité comme ses défauts. Amoureux du détail, il peut pratiquer un réalisme où la laideur devient preuve d’authenticité. Mais le plus souvent, il montre un penchant philosophique où le primat du message et de l’idée inhibe le développement des facultés techniques. Dans le traditionnel clivage Italia/Germania, les critères de jugement de l’art allemand sont définis en contrepoint de ceux de l’art latin : au premier, on reproche ainsi le manque de grâce et de goût pour la beauté, mais en lui reconnaissant une profondeur de sentiment et une sincérité qu’on n’ose retrancher toutefois à l’art italien. Longtemps devait ainsi perdurer l’esthétique normative de l’époque classique qui faisait intervenir les critères du goût et du beau. À la peinture de la fin du XVe siècle, on reproche toujours la laideur des types, l’outrance des gestes (« ces intentions vulgaires et pesamment appuyées sont tout à fait choquantes52 ») et la surcharge des ornements (« le goût réprouve ces entassements de détails multipliés53 »).

  • 54 Sur les tensions entre la démarche empirique de Woltmann et sa dimension politique : Pascal Griener (...)
  • 55 Charles Gérard, Les Artistes de l’Alsace pendant le Moyen Âge, 2 vol., Paris, Berger-Levrault, 1872 (...)
  • 56 Sur la présence des Primitifs dans le musée de Strasbourg : Tanja Baensch, « Wilhelm von Bode et l’ (...)
  • 57 Charles Goutzwiller, Le Musée de Colmar. Martin Schongauer et son école. Notes sur l’art ancien en (...)
  • 58 C. Goutzwiller, « Le Retable des Antonites d’Issenheim au musée de Colmar. Guido Guersi le moine ar (...)
  • 59 André Girodie, Martin Schongauer et l’art du Haut-Rhin au XVe siècle, Paris, Plon, [1911]. Voir F.- (...)
  • 60 Maurice Barrès, « La Vierge de Colmar », La Patrie française, 7 août 1902, repris partiellement sou (...)

18Cela étant, le conflit de 1870 modifie sensiblement la manière dont les historiens français perçoivent l’art alsacien, et de manière non moins profonde leur conception de la science historique des œuvres d’art. Face à une Université allemande qui pouvait donner un surcroît de légitimité à l’Annexion en insistant sur l’appartenance stylistique de l’art alsacien à la sphère germanique – la Geschichte der deutschen Kunst im Elsass (Leipzig, 1876) d’Alfred Woltmann en est sans doute l’exemple le plus explicite54 –, les érudits français, le plus souvent alsaciens d’origine, tenteront de répliquer, parfois même sur le terrain difficile du style. Dès 1870, Eugène Müntz, issu d’une vieille famille alsacienne, porte le combat intellectuel dans le domaine de l’art. La question des Primitifs, qui l’intéressait vivement, devient alors le lieu de vives discussions, dont l’enjeu est politique. Collecteur infatigable des mentions relatives aux artistes, le Colmarien Charles Gérard affirme dans son grand livre sur Les Artistes de l’Alsace pendant le Moyen Âge, que ces derniers relèvent du « domaine naturel » de la France55. Très révélatrice du conflit entre la France et l’Allemagne est l’histoire des musées durant cette période et la place qui y est réservée aux Primitifs. Alors qu’à Strasbourg, Hubert Janischek, Professeur à l’Université de Strasbourg, puis Wilhelm von Bode dessinent les contours d’une collection plurielle, où les œuvres allemandes voisinent avec celles des Flamands ou des Italiens, le musée d’Unterlinden de Colmar, avec sa collection de Primitifs, devient un lieu essentiel de l’identité alsacienne, objet d’interminables disputes érudites56. Ainsi, pendant près de trente ans, l’un des dirigeants de la Société Schongauer, chargé de la gestion du musée colmarien, Charles Goutzwiller, ami du peintre Jean-Jacques Henner, tente de soustraire aux Allemands les deux grandes figures d’Unterlinden : en enracinant tout d’abord Schongauer à Colmar (pour Goutzwiller comme pour d’autres érudits alsaciens, la naissance à Colmar du Beau Martin ne fait guère de doute, en dépit des vives discussions sur le sujet) ; et en faisant ressortir les liens stylistiques qui le rattachent à l’art flamand et notamment à Roger van der Weyden, ce qui revient, pour des lecteurs de Delaborde ou de Courajod, à le détacher de la sphère stylistique allemande57. Quant aux peintures du Retable d’Issenheim, finalement concédées à Mathias Grünewald en 1873 par Woltmann, Goutzwiller finira par défendre l’idée qu’elles sont en réalité l’œuvre du précepteur des Antonins d’Issenheim, le « moine-artiste » Guido Guersi58. Enlever à l’Allemagne Schongauer et les panneaux peints du Retable d’Issenheim permettait de requalifier la généalogie culturelle de l’Alsace à travers un de ses éléments essentiels. D’autres érudits viendront tenter à leur tour de dissoudre la « germanité » de ces œuvres : Émile Reiber, qui échafaude dans un ouvrage patriotique une généalogie fantaisiste de l’art alsacien dans laquelle Grünewald devient un disciple passif de l’Alsacien Schongauer, ou encore André Girodie, qui réorganise autour d’un Schongauer imprégné de culture bourguignonne et flamande le milieu des artistes rhénans au XVe siècle59. En 1902, Maurice Barrès viendra apporter sa caution aux nationalistes alsaciens en faisant de la Vierge au buisson de roses une « femme de Colmar », c’est-à-dire l’expression d’un type ethnique préservé de toute contamination allemande60.

Figure 5.

Figure 5.

Anonyme, Musée d’Unterlinden, Colmar, photographie, carte postale, date inconnue.

5. Méthode

  • 61 Teodor de Wyzewa, « Le mouvement des arts en Allemagne et en Angleterre », dans Gazette des Beaux-A (...)
  • 62 T. de Wyzewa, « Un voyage aux Primitifs allemands », dans La Revue indépendante, vol. 4, 1887, p. 2 (...)
  • 63 T. de Wyzewa, « Le mouvement des arts en Allemagne et en Angleterre », dans Gazette des Beaux-Arts, (...)
  • 64 Joris-Karl Huysmans, Là-Bas, Paris, Gallimard, [1891] 1985 ; Id., Trois Primitifs, Paris, Flammario (...)

19Surdéterminée par la question alsacienne, l’historiographie française des Primitifs allemands est également conditionnée, à la fin du XIXe siècle, par la difficulté de faire front sur son propre terrain à une histoire de l’art allemande à la fois inventive et conquérante. Rares seront les historiens de l’art ou les critiques, en France, à s’aventurer dans ce domaine ou à oser rendre compte des recherches des savants allemands. L’un d’entre eux est Teodor de Wyzewa. Éminence grise du symbolisme, fondateur de la Revue wagnérienne, il rend compte dans les années 1890 des travaux des plus grands historiens de l’art allemands du moment. Ce sont ses fréquents pèlerinages à Bayreuth qui lui permirent de rencontrer un des membres du clan familial du compositeur, Henry Thode, auteur d’un Franz von Assisi und die Anfänge der Kunst der Renaissance in Italien (1885), mais aussi de Die Malerschule von Nürnberg im XIV. und XV. Jahrhundert in ihrer Entwicklung bis auf Dürer (Francfort, 1891), dont le français rend longuement compte dans la Gazette des Beaux-Arts61. En fait, dès 1887, faisant le récit d’un « voyage aux Primitifs allemands », Wyzewa avait tenté de caractériser le style des peintres allemands en recourant aux synesthésies, parlant des « sonores peintures » de Holbein le Vieux à Munich, ou encore, au sujet de Burgkmair, admiré à Augsbourg, de sa « peinture musicale, qui, sans se soucier de reproduire les visions, ordonne les lignes et les couleurs comme les notes d’une symphonie62 ». Très informé des travaux de Wickhoff, Morelli, Scheibler et bien d’autres, Wyzewa disserte également sur la monumentale Geschichte der deutschen Malerei (1889 et 1890) d’Hubert Janitschek. C’est l’occasion pour lui de faire l’apologie de trois artistes longuement étudiés dans sa synthèse par le professeur strasbourgeois : Lucas Cranach, Albrecht Altdorfer et Mathias Grünewald63. De fait, les pages de Wyzewa sur la confrontation à Colmar des peintures de Schongauer et de Grünewald sont à l’origine de la vogue symboliste française pour ce dernier, qui culminera dans les pages admiratives de Verhaeren ou encore celles, quelque peu emphatiques, de Joris-Karl Huysmans dans Là-Bas (1891) puis dans Trois Primitifs (1905)64.

Figure 6.

Figure 6.

Teodor de Wyzewa, « Le mouvement des arts en Allemagne et en Angleterre », Gazette des Beaux-Arts, 5/1891, p. 505.

© Gallica - BnF

  • 65 Charles Ephrussi, « Jacopo de Barbarj. Notes et documents nouveaux », Gazette des Beaux-Arts, 1876, (...)
  • 66 C. Ephrussi, Les Bains de femmes d’Albert Dürer, Paris, D. Jouaust, 1881 ; Id., Albert Dürer et ses (...)
  • 67 Charles Narrey, Albert Durer à Venise et dans les Pays-Bas, autobiographie, lettres, journal de voy (...)
  • 68 Moritz Thausing, Dürer : Geschichte seines Lebens und seiner Kunst, Leipzig, E.A. Seemann, 1876 ; I (...)
  • 69 Paul Mantz, Hans Holbein, Paris, 1979. Voir P. Griener, art. cité note 54, p. 48. 
  • 70 Auguste Marguillier, « Un maître oublié du XVe siècle, Michael Pacher », Gazette des Beaux-Arts, 18 (...)
  • 71 Étienne Bricon, « Maître Francke », Gazette des Beaux-Arts, 1904, t. 31, p. 311-324.
  • 72 Conrad de Mandach, « Konrad Witz et son retable de Genève », Gazette des Beaux-Arts, 1907, t. 38, p (...)

20Autre figure essentielle pour la connaissance de l’art allemand : Charles Ephrussi. Figure cosmopolite, originaire de Russie et ayant passé sa jeunesse à Vienne, mentor de Jules Laforgue et ami de Marcel Proust, Ephrussi s’était lancé dans une carrière d’historien de l’art en publiant en 1876 une étude sur Jacopo de’ Barbari. La question de la présence des formes et des motifs italiens dans l’art de la Renaissance allemande, en particulier chez Dürer, occupe une place importante dans ses recherches ; ses travaux sur le sujet devaient d’ailleurs inspirer Aby Warburg65. Dans l’œuvre d’Ephrussi, la figure de Dürer occupe ainsi une place essentielle : ce sont pas moins de vingt-cinq articles que le critique consacre à son art, refondant certaines de ses publications dans deux ouvrages66. À la suite de Charles Narrey, Ephrussi reprend également le problème des voyages de l’artiste67. Cet intérêt soutenu pour Dürer, et le choix des objets d’étude comme la relation à l’Italie ou le Retable Heller, vaudra à Ephrussi d’être attaqué par le viennois Moritz Thausing, auteur d’une monumentale monographie sur l’artiste, qui lui reprochera d’avoir plagié ses travaux68. Controverse remarquable, la querelle entre Thausing et Ephrussi dévoile combien les auteurs de langue allemande avaient du mal à considérer les travaux des Français, dans ce domaine, autrement qu’une médiation passive – ou purement négative – de leurs propres recherches. Pour citer un autre exemple, l’ouvrage de Paul Mantz sur Holbein, il faut bien le reconnaître, n’ajoute rien de véritablement neuf par rapport à ce que Woltmann avait établi dans sa monographie. Comme l’écrit Pascal Griener, « son but consiste plutôt à susciter par contraste le sentiment d’une science française, moins crédule que celle de sa voisine69 ». La difficulté bien réelle de concurrencer les savants allemands sur cette matière ajoutée aux soupçons de pillage ou de plagiat explique en partie qu’aient persisté de grandes zones d’ombre dans la connaissance française des Primitifs allemands. Ainsi la personnalité de Pacher, connue relativement tôt en Allemagne, fut un cas exemplaire de non-réception en France. Pourtant, l’art du Tyrol, et spécialement les œuvres de Pacher, n’ont pas connu de véritable éclipse de leur réception en Allemagne, même s’ils n’étaient le plus souvent pas attribués à leur véritable auteur (le célèbre Retable de Saint Wolfgang passait ainsi pour une œuvre de Wolgemut). Ce n’est qu’en 1894 qu’est publiée la première étude française sur Michael Pacher, sous la plume d’Auguste Marguillier, dans la Gazette des Beaux-Arts70. Étienne Bricon s’appuie sur les travaux d’Alfred Lichtwark dans son article sur Maître Francke, publié en 190471. Enfin, toujours dans le même organe paraît en 1907 la première recherche de langue française sur Konrad Witz, par Conrad de Mandach72.

  • 73 Louis Réau, « L’art allemand aux XVe et au XVIe siècle », dans André Michel (éd.), Histoire de l’ar (...)
  • 74 L. Réau, Les Primitifs allemands, Paris, Laurens, 1910.
  • 75 Voir à ce sujet L. Réau, « Revues générales. Histoire de l’art. L’art allemand », Revue de synthèse (...)
  • 76 L. Réau, Mathias Grünewald et le retable de Colmar, Nancy-Paris-Strasbourg, Berger-Levrault, éditeu (...)
  • 77 Hans Heinrich Naumann, Das Grünewaldproblem und das neue entdecke Selbstbildnis des 24. Jhg. M. Nit (...)

21Au XXe siècle, les historiens de l’art français rendront toujours compte du progrès des connaissances dans ce domaine, tout en cherchant à imposer des méthodes d’analyse distincte. Le manuel édité en 1907 sous le titre : Histoire de l’art par André Michel, marque une césure dans l’historiographie française, par son étendue et son caractère scientifique. Le chapitre sur la peinture médiévale allemande est rédigé conjointement par Maurice Hamel et André Michel pour la partie allant jusqu’à 1450, et par Louis Réau pour la période postérieure à cette date73. La synthèse que le même Louis Réau publie en 1910, Les Primitifs allemands74, est une autre pièce essentielle dans cette historiographie française qui voulait à ce moment définir une méthode inédite d’analyse, forte de la connaissance des acquis de la Kunstwissenschaft, des théories de Morelli jusqu’au formalisme d’un Wölfflin, mais aussi de la méthode iconographique spécifiquement française, dont les travaux d’Émile Mâle constituaient l’exemple le plus abouti75. Cette tension entre la volonté d’enrichir les connaissances sur les Primitifs allemands sur le terrain empirique et le souci d’opposer aux Allemands d’autres schèmes d’interprétation, nous la retrouverons également après la Première Guerre mondiale. Le Grünewald de Réau (1920) est à ce titre traversé par cette tension : le Français y construit un Grünewald dont les œuvres relèvent par leurs motifs d’une culture transnationale, nécessitant, outre une interprétation iconographique, ce qu’il nomme lui-même une approche d’art comparé76. Apparaît également dans le Grünewald de Réau un espace stylistique rhénan qui devrait autant à l’art bourguignon qu’à l’art allemand. Une telle conviction guidera dans les années 1930 les travaux du conservateur strasbourgeois Hans Haug qui, dans ses acquisitions comme dans ses écrits, fera de l’Alsace une aire culturelle et stylistique spécifique, qui accueillit de multiples influences, françaises, flamandes et allemandes, avant de rayonner dans l’art d’autres nations. Très marqué par les thèses de Hans Heinrich Naumann sur les juvenilia de Grünewald – un Grünewald peintre et graveur qui se serait formé dans l’atelier de Schongauer –, Haug tentera de reconstituer dans les salles du musée de Strasbourg de fragiles généalogies stylistiques reliant les deux artistes, et de valider ces fragiles constructions dans de nombreuses publications77.

Figure 7.

Figure 7.

Photographe anonyme, Louis Réau, vers 1905-1909, Avignon, Archives départementales du Vaucluse, fonds Félix Marie.

  • 78 Henri Focillon, « Albert Dürer », Revue d’Allemagne, avril 1928, p. 481-492, repris dans Maîtres de (...)
  • 79 H. Focillon, « Esthétique et histoire de l’art. Autour de l’an mil, études archéologiques. L’art vi (...)
  • 80 André Chastel, « La Tentation de Saint Antoine ou le songe du mélancolique », Gazette des Beaux-Art (...)
  • 81 Jurgis Baltrusaitis, Réveils et prodiges. Les métamorphoses du gothique, Paris, Flammarion, [1960], (...)
  • 82 Charles Sterling, Les Peintres Primitifs, Paris, Fernand Nathan, 1949. Voir à ce sujet S. Ramond, « (...)

22Il reste à évoquer le cas de Henri Focillon et de ses élèves. En 1928, dans une étude où le texte n’est encombré d’aucune référence infrapaginale aux travaux allemands, Henri Focillon voit en Dürer un artiste spécifiquement allemand, « fils de Faust et d’Hélène », mais dont certaines œuvres laisseraient deviner des accents orientaux78. Un Dürer, en somme, sur lequel étaient projetées les contradictions françaises devant la science allemande. Un Dürer trop allemand, dont l’art, en même temps, était perméable à des influences étrangères, ce que les savants allemands, à en croire Focillon, n’étaient pas prêts à voir. Ce domaine tumultueux des artistes allemands, Focillon le fait resurgir quelques années plus tard dans ses esquisses sur l’art des « visionnaires ». Altdorfer et Grünewald appartiennent à cette famille spirituelle d’artistes qui donnent à l’art de leur génération et de celles qui suivent la « tonalité de leur inquiétude personnelle79 ». Trois des élèves de Focillon prolongeront cette intuition au sujet des visionnaires. André Chastel, tout d’abord, qui, après avoir lu Dürers Melencolia I de Fritz Saxl et Erwin Panofsky, cherchera à établir les voies iconographiques menant à la « tristesse de la Renaissance », celle qu’exprimeraient Luca Signorelli, Laurent de Médicis, mais aussi Lucas Cranach ou Grünewald dans leurs mélancolies ou leurs Tentations de Saint-Antoine80. Plus tard, Jurgis Baltrusaitis intégrera lui aussi les Tentations de Schongauer, Niklaus Manuel Deutsch et Grünewald dans ses « cycles visionnaires »81. Élève lui aussi de Focillon, lecteur attentif également des formalistes viennois, Charles Sterling reprendra l’intuition sur les visionnaires pour analyser, après la Seconde Guerre mondiale, l’« irréalisme » et la « poésie de l’arbitraire » à l’œuvre chez toute une lignée d’artistes allemands, du maître de la Crucifixion de Tegernsee à Grünewald82.

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Notes

1 Une partie de cet article a déjà fait l’objet d’une publication, en langue allemande : Isabelle Dubois et François-René Martin, « Frankreich und die altdeutsche Malerei », Deutsche Kunst – Französische Perspektiven, Quellen und Kommentare zur Kunstkritik, Berlin, Akademie Verlag / Paris, Centre allemand d’histoire de l’art, 2007, p. 153-206. Sur le problème de la réception des maîtres anciens allemands en France, nous nous permettons de renvoyer à nos travaux qui inspirent largement le développement qui suit : I. Dubois, La Fortune critique des Primitifs allemands en France (1800-1914), thèse de doctorat en histoire de l’art sous la dir. de Roland Recht, Université Marc-Bloch de Strasbourg, 4 vol., 2001 ; F.-R. Martin, Grünewald et ses critiques, thèse de doctorat en histoire de l’art sous la dir. de R. Recht, Université Marc-Bloch de Strasbourg 2008. Sur la question des relations entre la France et l’Allemagne et des institutions des transferts, voir tout particulièrement : Pierre Vaisse, « Sur les rapports artistiques franco-allemands au XIXe siècle », Romantisme, 73/1991, p. 93-102 ; Michel Espagne, Les Transferts culturels franco-allemands, Paris, Presses Universitaires de France, 1999 ; Uwe Fleckner, « L’art allemand et son public français. Réception et transferts artistiques au XIXe siècle », dans : Id. et Thomas W. Gaehtgens éd., De Grünewald à Menzel. L’image de l’art allemand en France au XIXe siècle, Paris, Éditions de la Maison des Sciences de l’Homme, 2003, p. 1-14. Nous nous servons également beaucoup de : Jean-Pierre Guillerm, Les Peintures invisibles. L’héritage pictural et les textes en France et en Angleterre 1870-1914, 2 vol., thèse pour le doctorat d’État de l’Université de Lille III, Lille, Presses universitaires de Lille, 1982. Enfin, nous attirons l’attention du lecteur sur la série actuelle d’expositions organisées par l’Institut national d’histoire de l’art, « Peintures germaniques des collections françaises (1370-1550) », 4 mai 2024 - 23 septembre 2024, au musée des Beaux-Arts et d’archéologie de Besançon, au musée Unterlinden de Colmar, et au musée des Beaux-Arts de Dijon.

2 Giovanni Previtali, La Fortune des Primitifs. De Vasari aux néo-classiques, Paris, Gérard Monfort, 1994, préface d’Enrico Castelnuovo (trad. fr. Nadia di Mascio de : La fortuna dei primitivi. Dal Vasari ai neoclassici, Turin, Giulio Einaudi, 1964, 1989), p. 143, 144.

3 Francis Haskell, La Norme et le caprice. Redécouvertes en art. Aspects du goût, de la mode et de la collection en France et en Angleterre, 1789-1914, Paris, Flammarion, 1993 (trad. fr. Robert Fohr de : Rediscoveries in Art. Some Aspects of Taste, Fashion and Collecting in England and France, Oxford, Phaidon, 1976).

4 Voir la synthèse sur les confiscations françaises en Allemagne de Bénédicte Savoy, Patrimoine annexé. Les biens culturels saisis par la France en Allemagne autour de 1800, 2 vol., Paris, MSH, 2003.

5 B. Savoy, op. cit. note 4, vol. 1, p. 67.

6 Friedrich Schlegel, Descriptions de tableaux, éd. et trad. B. Savoy, Paris, École nationale supérieure des Beaux-arts, 2003, p. 198 sq.

7 Lettre de Schadow à Böttinger, Berlin, 5 mars 1807, dans : Johann Gottfried Schadow, Kunstwerke und Kunstansichten. Kommentierte Neuausgabe der Veröffentlichungen von 1849, Götz Eckardt (éd.), 2 t., Berlin, 1987, t. II, p. 484. Cité dans B. Savoy, op. cit. note 4, vol. 1, p. 142.

8 Johann Christian von Mannlich, Histoire de ma vie. Mémoires de Johann Christian von Mannlich (1741-1822), K.-H. Bender, H. Kleber, 2 t., Trèves, 1993, t. 2, p. 520 sq. Cité dans B. Savoy, op. cit. note 4, p. 143.

9 Denon la paya 740 francs. Elle fut exposée en 1807 sous le nom de « M. Schoen » (Martin Schongauer). Voir notice no 248 dans : Dominique-Vivant Denon. L’œil de Napoléon, cat. exp. Paris, Musée du Louvre, Paris, Réunion des musées nationaux, p. 251. L’œuvre fut envoyée en 1876 en dépôt au Musée de la Chartreuse de Douai (Inv. 1979), où était conservé un autre panneau du même polyptyque.

10 Statues, bustes, bas-reliefs, bronzes et autres antiquités […] conquis par la Grande Armée, dans les années 1806 et 1807, premier anniversaire de la bataille d’Iéna, Paris, Dubray, 1807. (voir à ce sujet, l’étude de Monica Preti-Hamard, « L’exposition des “écoles primitives” au Louvre. “La partie historique qui manquait au Musée” », dans : Dominique-Vivant Denon, op. cit. note 9, p. 226-243 ; B. Savoy, op. cit. note 4, vol. 2, p. 144 sq. en particulier).

11 Trop vaste est la bibliographie sur ce sujet. On pourra toutefois consulter : Eduard Firmenich-Richartz, Die Brüder Boisserée. I : Sulpiz und Melchior Boisserée als Kunstsammler. Ein Beitrag zur Geschichte der Romantik, Iena, Eugen Diederichs, 1916 ; Pierre Moisy, Les Séjours en France de Sulpiz Boisserée, Paris, 1956 ; Annemarie Gethmann-Siefert, Otto Pöggeler éds., Kunst als Kulturgut. Die Bildersammlung der Brüder Boisserée – ein Schritt in der Begründung des Museums, Bonn, Bouvier Verlag, 1995. Sur l’association entre la peinture des Primitifs flamands et celle des Primitifs allemands dans l’historiographie allemande après 1800, voir notamment : Suzanne Sulzberger, La Réhabilitation des Primitifs flamands 1802-1867, Bruxelles, Palais des Académies, 2 vol., 1961, vol. 1, p. 44 sq.

12 Décrite en particulier par Henri Daniell [Henri Joseph du Commun du Locle], « Cologne et son ancienne école de peinture », L’Artiste, 1856, t. 56, p. 113-116.

13 Voir avant tout Hiltrud Kier, Frank Günter Zehnder (éd.), Lust und Verlust. Kölner Sammler zwischen Trikolore und Preußenadler, cat. exp. Cologne, Museum der Stadt Köln, Cologne, Wienand Verlag, 1995. Voir également les remarques sur les « individualités esthétiques » qui émergent à ce moment des collections colonaises, chez Nicole Reynaud, « Les maîtres à “noms de convention” », Revue de l’art, 42, 1978, p. 41-52, p. 43-45.

14 Voir sur ce sujet I. Dubois, « La réception française des théories de Sulpiz Boisserée », dans U. Fleckner, T. W. Gaehtgens (éd.), op. cit. note 1, p. 17-37.

15 Germaine de Staël, De l’Allemagne, Londres, 1810, cité dans l’éd. 2 t., Paris, Flammarion, 1968, t. 2, p. 78.

16 G. de Staël, op. cit. note 15, p. 78.

17 Jacques Nicolas Paillot de Montabert, « Dissertation sur les peintures du moyen âge et sur celles qu’on a appelé gothiques », Magasin encyclopédique, vol. 2, 1812, repris dans Id., Paris, éditions Alia, 2002, p. 42.

18 Voir A. Monchoux, L’Allemagne devant les lettres françaises, de 1814 à 1835, Toulouse, Fournié, 1953, p. 248.

19 Victor Cousin, « Souvenirs d’Allemagne », Revue des Deux Mondes, août 1866, t. 64, p. 594-619, en particulier p. 607.

20 V. Cousin, art. cité note 19.

21 Désiré Raoul-Rochette, « “Sammlung alt-nieder-und oberdeutscher Gemälde der Brüder S.M. Boisserée und J. Bertram ; lithographiert – von J.N. Strixner, I-XVIII Lieferungen”, C’est-à-dire Collection de peintures de l’ancienne école allemande, de MM. Boisserée et Bertram, livraisons 1-1 8. Stuttgart et Munich, in fol. », Journal des Savans, 1828, p. 274-287, p. 274.

22 Ludovic Vitet, Études sur l’histoire de l’art, Paris, Lévy frères, 1864, t. 3, p. 202.

23 « Animés d’un sentiment de patriotisme aussi noble que délicat, et craignant de voir passer en des mains étrangères des chefs-d’œuvre de la peinture des quatorzième, quinzième et seizième siècles, ils consacrèrent généreusement leur fortune à l’achat de tous les tableaux qu’ils purent trouver, et dont les commotions politiques avaient singulièrement diminué la valeur », Charles Sainte-Foi (É. Jourdain), Souvenirs de jeunesse, 1828-1835, Paris, Perrin, 1911, p. 248. Voir également : É. Jourdain, « État religieux et intellectuel de l’Allemagne. Bavière », Revue européenne, I/1831, p. 169-184.

24 C. Sainte-Foi (Éloi Jourdain), op. cit. note 23, p. 309.

25 Alphonse-François Rio, Épilogue à l’art chrétien, 2 vol., Fribourg, Herder, 1870, vol. 2, p. 245.

26 A.-F. Rio, op. cit. note 25, vol. 2, p. 343.

27 « Des annonciations du quinzième siècle sur un fond d’or avec les riches ailes multicolores en dessus, blanches en dessous, de leur ange qui regarde et convoite presque la Vierge […] », L’Œuvre complète de Victor Hugo, t. 41, Le Rhin, 2 vol., Paris, Bonnot, 1979, rééd. de l’édition de 1845, p. 150.

28 « Là se trouvent à la fois et les vieilles tapisseries, curieuses à voir pour les costumes, charmantes pour la naïveté du dessin, et les tableaux de l’école byzantine et de l’ancienne école allemande, et les plus admirables peintures sur verre qu’il soit possible de voir », Xavier Marmier, « Souvenirs de voyages, Nuremberg », Nouvelle Revue Germanique, 1833, t. 14, p. 157-178, en particulier p. 165.

29 Théophile Gautier, « Melancholia », 1834, dans Poésies complètes de Théophile Gautier, vol. 2, éd. René Jasinski, Paris, Nizet, 1970, p. 83-90, p. 86, 87. Sur la réception de Dürer chez les romantiques français : Ulrich Finke, Französische und englische Dürer-Rezeption im 19. Jahrhundert, Nuremberg, Stadt Nürnberg, Stadtgeschichtliche Museen, 1976 ; J. Bialostocki, Dürer and his Critics, p. 189 sq. ; Gabriele Bleeke-Byrne, « The Influence of Albrecht Dürer », dans French Perceptions of German Art (1800-1850) : Studies in Stereotypes and their Ideological Influence, Ann Arbor, UMI, 1989, p. 43-87 ; James Patty, Dürer in French Letters, Paris, Champion, 1989.

30 Sur la fortune de Melencholia I en France, voir plus particulièrement : Folke Nordström, « Baudelaire and Dürer’s Melencolia I. A Study of a Portrait of Baudelaire by Manet », dans Per Bjurström et al. (éd.), Contributions to the History and Theory of Art, Uppsala, 1967, p. 148-160 ; Jean-Bertrand Barrère, « Victor Hugo et Albert Durer », dans La Gloire de Dürer, Paris, Klincksieck, 1974, p. 174-181 ; U. Finke, « Dürers Melancholie in der französischen und englischen Literatur und Kunst des 19. Jahrhunderts », Zeitschrift des Deutschen Vereins für Kunstwissenschaft, XXX/1976, p. 63-81.

31 Jules Michelet, « Voyage d’Allemagne », [1842], Revue bleue, vol. 1, no 12, 19 mars 1904, p. 353-358, no 13, 26 mars 1904, p. 385-390, no 14, 2 avril 1904, p. 417-421, no 15, 9 avril 1904, p. 449-454, no 16, 16 avril 1904, p. 481-486, no 17, 23 avril 1904, p. 513-519 (la citation figure p. 483-484). Voir par ailleurs : Jean Richer, « Jules Michelet et Albert Durer », dans La Gloire de Dürer, op. cit. note 30, p. 183-203 ; Jean Seznec, « Michelet in Germany. A Journey in Seld-Discovery », dans History and Theory, XVI/1977, p. 1-10 ; William Hauptman, « Baudelaire, Michelet and Dürer’s “Melencolia I”: A Problem of Meaning », dans Studi francesi, 22/1978, p. 106-110 ; F. Haskell, L’Historien et les images, Paris, Gallimard, 1995, p. 341 sq. (trad. fr. Alain Tachet de : History and its Images. Art and the Interpretation of the Past, New Haven-Londres, Yale University Press, 1993) ; T. W. Gaehtgens, « Jules Michelet et l’art allemand », dans Id. et U. Fleckner (éd.), op. cit. note 1, p. 227-244.

32 Sur cette « école de Berlin », voir Gabriele Bickendorf, Der Beginn der Kunstgeschichtsschreibung unter dem Paradigma « Geschichte ». Gustav Friedrich Waagens Frühschrift « Ueber Hubert und Johann van Eyck », Worms, 1985 ; Id., « Des mauristes à l’École de Berlin : vers une conception scientifique de l’histoire de l’art », dans Édouard Pommier (éd.), Histoire de l’histoire de l’art, II. XVIIIe et XIXe siècles, Paris, Klincksieck, Musée du Louvre, 1997, p. 141-175.

33 Johann David Passavant, Rafael von Urbino und sein Vater Giovanni Santi, Leipzig, 1839-1958.

34 Alfred Michiels, Études sur l’Allemagne, contenant une Histoire de la peinture allemande, Paris, 1839, 2 vol., rééd. Paris, W. Coquebert, 1843. Voir la réplique cinglante de F. Kugler, Kleine Schriften und Studien zur Kunstgeschichte, 2 vol., Stuttgart, Ebner und Seubert, 1854, p. 53.

35 Hippolyte Fortoul, De l’art en Allemagne, 2 t., Paris, Labitte, 1842, cité d’après la 2e éd, 3 t., Bruxelles, Wouters, 1844. Voir P. Vaisse, « Hippolyte Fortoul », Revue germanique internationale, 2000, t. 13, p. 141-153.

36 H. Fortoul, op. cit. note 35, vol. 2, p. 176.

37 Louis Viardot, Les Musées d’Allemagne et de Russie. Guide et memento de l’artiste et du voyageur faisant suite aux musées d’Italie, d’Espagne, d’Angleterre et de Belgique, Paris, Paulin, 1844.

38 W.[illiam] Burger, (William Thoré-Bürger), Trésors d’art exposés à Manchester en 1857 et provenant des collections royales, des collections publiques et des collections particulières de la Grande Bretagne, Paris, Vve Jules Renouard, Londres, Barthès et Lowell, 1857, p. 138. Sur les relations de Thoré avec Passavant et Waagen : Frances Suzman Jowell, Thoré-Bürger and the Art of the Past, New York-Londres, Garland Publishing, 1977 ; F. Haskell, « L’essor de l’histoire de l’art en Grande-Bretagne et ses dettes envers l’Europe », dans L’Amateur d’art, Paris, Le Livre de poche, 1997, trad. fr. Pierre-Emmanuel Dauzat, p. 294 sq.

39 William Bürger, (A. Thoré), « Un tour en Allemagne. Coup d’œil sur les musées de Brunswick, de Berlin, de Dresde et de Cassel », Revue germanique, 1861, t. 13, p. 613-626.

40 W. Bürger, art. cité note 39, p. 616.

41 L. Tieck, Sternbald ou le peintre voyageur, revu et corrigé par Mme la baronne Isabelle de Montolieu, 2 vol., Paris, Masson, 1823.

42 Athanase Raczinsky, Histoire de l’art moderne en Allemagne, 3 vol., Paris, Renouard, 1836-1841.

43 Gustav W. Waagen, Manuel de l’Histoire de la peinture. Écoles allemande, flamande et hollandaise, 3 vol., Paris, G. Bossange, Vve Jules Renouard, trad. fr. Hymans et J. Petit, 1863-1864.

44 Sulpiz Boisserée, « Lettre de M. S. Boisserée, correspondant, sur les anciennes écoles de peinture en France », Bulletin archéologique du Comité historique des arts et monuments, 1840-1841, I, no 8, p. 106-111.

45 L’apport de l’érudition allemande n’avait pas échappé à Paul Durrieu, La Légende et l’histoire de Jean Foucquet, Paris, extrait de l’Annuaire-Bulletin de la Société de l’histoire de France, 1907 ; Id., Les Antiquités judaïques et le peintre Jean Foucquet, Paris, Librairie Plon, 1908, p. 79 sq. Plus récemment, voir : A.N.L. Munby, Connoisseurs and Medieval Miniatures, 1750-1850, Oxford, Oxford University Press, 1972, p. 143 ; F.-R. Martin, « Les Primitifs français au XIXe siècle. De l’érudition dispersée aux synthèses conflictuelles », dans Dominique Thiébaut, Philippe Lorentz, F.-R. Martin, (éd.), Primitifs français. Découvertes et redécouvertes, cat. exp., Paris, Musée du Louvre, Réunion des musées nationaux, 2004, p. 47-57.

46 Charles Blanc, « Albert Durer », [1875], dans Id., Paul Mantz, Auguste Demmin, Histoire des peintres de toutes les écoles, École allemande, Paris, Librairie Renouard, Henri Loones, 1883.

47 A. Demmin, Souvenirs de voyage et causeries d’un collectionneur ou Guide artistique pour l’Allemagne, Paris, Vve Renouard, 1864, p. 28.

48 Voir à ce titre nos développements : F.-R. Martin, « L’histoire de l’art des vaincus. L’Alsace dans l’historiographie française de 1870 à 1918 », dans R. Recht, Philippe Sénéchal, Claire Barbillon, F.-R. Martin, (éd.), Histoire de l’histoire de l’art en France au XIXe siècle, Paris, à paraître en 2005.

49 Émile Galichon, « Martin Schöngauer. Peintre et graveur du XVe siècle », Gazette des Beaux-Arts, III/1859, p. 257-265 et 321-335, p. 264.

50 É. Galichon, « Albert Durer : sa vie et ses oeuvres », Gazette des Beaux-Arts, vol. 8/1, 1860, p. 5-29, p. 28.

51 Ernest Chesneau, Les Nations rivales dans l’art, Paris, 1868 ; Id., « Albert Durer », Revue des Deux-Mondes, vol. 4, 1881, p. 878-902.

52 Émile Michel, « Les Musées d’Allemagne. Le Musée de Cologne », L’Art, 1882, t. 31, p. 275.

53 É. Michel, op. cit. note 52, p. 278.

54 Sur les tensions entre la démarche empirique de Woltmann et sa dimension politique : Pascal Griener, « Idéologie “nationale” ou science “positive” ? », Revue de l’art, no 146, 2004, p. 43-50.

55 Charles Gérard, Les Artistes de l’Alsace pendant le Moyen Âge, 2 vol., Paris, Berger-Levrault, 1872-1873, reprint Nogent-le-Roi, Laget, 1977. Voir F.-R. Martin, « Une critique agonistique. Schongauer et Grünewald en France, entre 1840 et 1914 », dans U. Fleckner et T.W. Gaehtgens (éd), De Grünewald à Menzel, op. cit. note 1, p. 57-84.

56 Sur la présence des Primitifs dans le musée de Strasbourg : Tanja Baensch, « Wilhelm von Bode et l’origine des collections du musée des Beaux-Arts », dans Strasbourg 1900. Naissance d’une capitale, Paris-Strasbourg, Somogy, Musées de Strasbourg, 2000, p. 38-43 ; Id., « Un musée entre les frontières. La réception du musée d’art de Strasbourg dans la critique française autour de 1900 », dans U. Fleckner et T.W. Gaehtgens (éd), op. cit. note 1, p. 287-306. Le cas colmarien, entre 1870 et 1918, est étudié par Hendrik Ziegler dans ses contributions dans Sylvie Lecoq-Ramond (éd.), Histoire du musée d’Unterlinden et de ses collections : de la Révolution à la Première Guerre mondiale, Colmar, Société Schongauer Musée d’Unterlinden, 2003, p. 279-349.

57 Charles Goutzwiller, Le Musée de Colmar. Martin Schongauer et son école. Notes sur l’art ancien en Alsace et sur les œuvres d’artistes alsaciens modernes, Colmar-Paris, Eugène Barth, Sandoz et Fischbacher, 1875. Sur la contestation par Goutzwiller des prétentions de la Kunstwissenschaft : S. Lecoq-Ramond, F.-R. Martin, « “Lier le nom du maître à ses œuvres”. Quelques remarques sur une erreur d’attribution de Charles Goutzwiller, érudit colmarien du XIXe siècle », Revue des sciences sociales de la France de l’Est, 1999, no 26, p. 96-102.

58 C. Goutzwiller, « Le Retable des Antonites d’Issenheim au musée de Colmar. Guido Guersi le moine artiste », L’Art, no 526, 15 avril 1886, p. 181-188, no 527, 1er mai 1886, p. 197-202.

59 André Girodie, Martin Schongauer et l’art du Haut-Rhin au XVe siècle, Paris, Plon, [1911]. Voir F.-R. Martin, « “Périégèse” de l’Alsace. André Girodie et les Primitifs du musée de Colmar », Annuaire de la Société d’Histoire et d’Archéologie de Colmar, 2001-2002, p. 133-155.

60 Maurice Barrès, « La Vierge de Colmar », La Patrie française, 7 août 1902, repris partiellement sous le même titre dans la Revue alsacienne illustrée, 1902, p. 115. Voir F.-R. Martin, « “Attribuer l’Alsace”. Maurice Barrès, les nationalistes alsaciens et la Vierge au buisson de roses de Martin Schongauer », dans Bulletin de la Société Schongauer, 1997-2000, p. 202-221.

61 Teodor de Wyzewa, « Le mouvement des arts en Allemagne et en Angleterre », dans Gazette des Beaux-Arts, 5/1891, p. 505-518. Sur la relation de Wyzewa à l’Allemagne, utile est la consultation de : Elga Livermann Duval, Teodor de Wyzewa : critic without a country, Paris-Genève, Minard-Droz, 1961 ; Paul Delsemme, Teodor de Wyzewa et le cosmopolitisme littéraire en France à l’époque du symbolisme, 2 vol., Bruxelles, Presses universitaires de Bruxelles, 1967.

62 T. de Wyzewa, « Un voyage aux Primitifs allemands », dans La Revue indépendante, vol. 4, 1887, p. 292-323, repris dans L’Art et les mœurs chez les Allemands, Paris, Librairie académique Perrin, 1895, p. 22, 23 pour la citation.

63 T. de Wyzewa, « Le mouvement des arts en Allemagne et en Angleterre », dans Gazette des Beaux-Arts, 3/1890, p. 259-272.

64 Joris-Karl Huysmans, Là-Bas, Paris, Gallimard, [1891] 1985 ; Id., Trois Primitifs, Paris, Flammarion [1905] 1967 ; Helen Trudgian, L’Esthétique de J.-K. Huysmans, Genève, Slatkine, [1934] 1970 ; Charles Maingon, L’Univers artistique de J.-K. Huysmans, Paris, Nizet, 1977 et. Sur cette réception française de l’artiste : F.-R. Martin, « L’invention d’une œuvre. Recherches sur la redécouverte française de Grünewald », dans S. Lecoq-Ramond (éd.), Regards contemporains sur Grünewald, Paris, Adam Biro, 1995, p. 12-54.

65 Charles Ephrussi, « Jacopo de Barbarj. Notes et documents nouveaux », Gazette des Beaux-Arts, 1876, p. 363-382, prolongé dans Quelques remarques à propos de l’influence italienne dans une œuvre d’Albert Dürer, Paris, Jules Claye, 1878. Sur Ephrussi, voir : Hélène Lesueur de Givry, Charles Ephrussi et la Renaissance allemande, mémoire de l’École du Louvre, 2004.

66 C. Ephrussi, Les Bains de femmes d’Albert Dürer, Paris, D. Jouaust, 1881 ; Id., Albert Dürer et ses dessins, Paris, A. Qantin, 1882. Voir à ce sujet, Jules Laforgue, « Albert Durer et ses dessins par M. Ch. Ephrussi », Gazette des Beaux-Arts, juin 1882, p. 608-617.

67 Charles Narrey, Albert Durer à Venise et dans les Pays-Bas, autobiographie, lettres, journal de voyage, papiers divers, Paris, 1866 ; C. Ephrussi, Un Voyage inédit d’Albert Durer, Paris, A. Quantin, 1881.

68 Moritz Thausing, Dürer : Geschichte seines Lebens und seiner Kunst, Leipzig, E.A. Seemann, 1876 ; Id., Albert Dürer : sa vie et ses œuvres, Paris, Librairie de Firmin-Didot, 1878, trad. fr. Gustave Gruyer. C’est plus particulièrement l’ouvrage de C. Ephrussi, Étude sur le triptyque d’Albert Durer, dit le tableau d’autel de Heller (Paris, D. Jouaust, 1877) qui entraîne la violente attaque de M. Thausing, dans la Zeitschrift für bildende Kunst (XII, 1877, p. 283-287). Ephrussi tentera de se justifier dans : « Ueber Jacopo de Barbarj und das Heller’sche Altarbild. Entgegnung an Herrn Prof. Dr. Moriz Thausing », Zeitschrift für bildende Kunst, 1877, XII, p. 339-349.

69 Paul Mantz, Hans Holbein, Paris, 1979. Voir P. Griener, art. cité note 54, p. 48. 

70 Auguste Marguillier, « Un maître oublié du XVe siècle, Michael Pacher », Gazette des Beaux-Arts, 1894, t. 11, p. 327-337, 469-480 et t. 12, p. 42-53 et p. 265-280.

71 Étienne Bricon, « Maître Francke », Gazette des Beaux-Arts, 1904, t. 31, p. 311-324.

72 Conrad de Mandach, « Konrad Witz et son retable de Genève », Gazette des Beaux-Arts, 1907, t. 38, p. 353-384.

73 Louis Réau, « L’art allemand aux XVe et au XVIe siècle », dans André Michel (éd.), Histoire de l’art, vol. V/1 : La Renaissance dans les pays du Nord. Formation de l’art classique moderne, Paris, Armand Colin, 1912. Voir I. Dubois, « Louis Réau, médiateur malgré lui ? “Les Primitifs allemands” (1910) », dans Alexandre Kostka et Françoise Lucbert (éd.), Distanz und Aneignung. Relations artistiques entre la France et l’Allemagne 1870-1945/Kunstbeziehungen zwischen Deutschland und Frankreich 1870-1945, Berlin, Akademie Verlag, 2004, p. 161-176.

74 L. Réau, Les Primitifs allemands, Paris, Laurens, 1910.

75 Voir à ce sujet L. Réau, « Revues générales. Histoire de l’art. L’art allemand », Revue de synthèse historique, 1907, p. 50-86 ; Id., « Un théoricien de l’art : Hans Tietze », Revue de synthèse historique, XXVIII, 1914, p. 45-50. Sur l’opposition des méthodes dans le domaine de l’art médiéval : Wilhelm Schlink, « Enseignement ou illumination ? Les histoires de l’art française et allemande dans leurs rapports à l’iconographie chrétienne », Revue de l’art, no 146, 2004, p. 51-60.

76 L. Réau, Mathias Grünewald et le retable de Colmar, Nancy-Paris-Strasbourg, Berger-Levrault, éditeurs, 1920.

77 Hans Heinrich Naumann, Das Grünewaldproblem und das neue entdecke Selbstbildnis des 24. Jhg. M. Nithart aus dem Jahre 1475, Iena Diederich, 1930, traduit et augmenté dans : Id., Mathis Nithart. Le premier élève de Martin Schongauer, Paris-Strasbourg, Édition des archives alsaciennes d’histoire de l’art, Librairie Istra, 1936. Thèse assez bien accueillie par François-Georges Pariset, « Autour de Grünewald. Le livre de Hans Heinrich Naumann », Archives alsaciennes d’histoire de l’art, 1930, p. 63-100, et surtout par Hans Haug, « L’homme à la cage du musée de Strasbourg œuvre de jeunesse de Matthias Grünewald », Gazette des Beaux-Arts, XII, 1934, p. 190-203 ; Id., Grünewald (Mathis Nithart), Paris, Braun, 1939. Sur Haug historien et directeur de musée : voir Mathilde Arnoux, « La réception de la peinture germanique par les musées français 1871-1981 », Thèse de doctorat en histoire de l’art sous la dir. de Barthélémy Jobert, Université de Paris-Sorbonne, Paris IV, 2003, 2 vol., vol. 1, p. 214 sq.

78 Henri Focillon, « Albert Dürer », Revue d’Allemagne, avril 1928, p. 481-492, repris dans Maîtres de l’estampe. Peintres-graveurs, Paris, Flammarion, [1930] 1969, p. 5-21. Sur Focillon et l’art allemand : Walter Cahn, « L’art allemand et l’art français », dans Relire Focillon, Paris, Énsba, Musée du Louvre, 1998, p. 25-51 ; F.-R. Martin, « Le problème des terreurs de l’historien de l’art. Réminiscences politiques chez Henri Focillon », dans Alice Thomine, Christian Briend (éd.), La Vie des formes. Henri Focillon et les arts, Paris-Lyon, Institut national d’histoire de l’art, Musée des Beaux-Arts de Lyon, 2004, p. 110-121.

79 H. Focillon, « Esthétique et histoire de l’art. Autour de l’an mil, études archéologiques. L’art visionnaire à la fin du Moyen Âge et pendant la Renaissance », Extrait de l’annuaire du Collège de France 1939 ; Id., « L’Irréalisme à la fin du Moyen Âge et à la Renaissance », La Critica d’arte, VIIIe année, fasc. XVII, 1949, repris dans : Focillon : Cahiers pour un temps, Paris, Centre Georges-Pompidou, 1986, p. 171-188.

80 André Chastel, « La Tentation de Saint Antoine ou le songe du mélancolique », Gazette des Beaux-Arts, avril 1936, p. 218-229, repris dans Id., Fables, formes, figures, Paris, Flammarion, 1978, 2 vol., vol. 1, p. 137-148.

81 Jurgis Baltrusaitis, Réveils et prodiges. Les métamorphoses du gothique, Paris, Flammarion, [1960], 1988.

82 Charles Sterling, Les Peintres Primitifs, Paris, Fernand Nathan, 1949. Voir à ce sujet S. Ramond, « L’histoire de l’art au musée. À propos de Charles Sterling à Colmar », dans Philippe Lorentz, Jost Haller : le peintre des chevaliers et l’art en Alsace au XVe siècle, Colmar-Paris, Musée d’Unterlinden, Les Quatre coins Édition, 2001, p. 9-14.

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Table des illustrations

Titre Figure 1.
Légende Mme de Staël, De l’Allemagne, page de couverture, 1810, Paris, rééd. 1813, Londres.
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Fichier image/jpeg, 1,4M
Titre Figure 2.
Légende Dürer, Melencolia I, 1514, gravure (impression sur plaque de cuivre), 24,2 cm x 18,8 cm, num 43.106.1, Metropolitan Museum of Art.
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Fichier image/jpeg, 9,0M
Titre Figure 3.
Légende Anonyme, Art treasure exhibition, photographie, 1857.
URL http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/cel/docannexe/image/33022/img-3.jpg
Fichier image/jpeg, 160k
Titre Figure 4.
Légende Jean Fouquet, Étienne Chevalier avec saint Étienne, Vers 1454-1456, Huile sur bois, Hauteur : 0,93 m, Largeur : 0,85 m, Allemagne, Berlin, Gemäldegalerie (SMPK).
Crédits © BPK, Berlin, Dist. GrandPalaisRmn/Jörg P. Anders
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Fichier image/jpeg, 3,8M
Titre Figure 5.
Légende Anonyme, Musée d’Unterlinden, Colmar, photographie, carte postale, date inconnue.
URL http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/cel/docannexe/image/33022/img-5.jpg
Fichier image/jpeg, 220k
Titre Figure 6.
Légende Teodor de Wyzewa, « Le mouvement des arts en Allemagne et en Angleterre », Gazette des Beaux-Arts, 5/1891, p. 505.
Crédits © Gallica - BnF
URL http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/cel/docannexe/image/33022/img-6.jpg
Fichier image/jpeg, 184k
Titre Figure 7.
Légende Photographe anonyme, Louis Réau, vers 1905-1909, Avignon, Archives départementales du Vaucluse, fonds Félix Marie.
URL http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/cel/docannexe/image/33022/img-7.jpg
Fichier image/jpeg, 515k
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Pour citer cet article

Référence électronique

Isabelle Dubois-Brinkmann et François-René Martin, « La connaissance des maîtres allemands anciens en France, de Dominique-Vivant Denon à Henri Focillon »Les Cahiers de l’École du Louvre [En ligne], 22 | 2024, mis en ligne le 24 juin 2024, consulté le 14 décembre 2024. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/cel/33022 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/11w6t

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Auteurs

Isabelle Dubois-Brinkmann

Isabelle Dubois-Brinkmann est conservatrice en chef du patrimoine et pensionnaire à l’INHA depuis novembre 2019 dans le domaine Histoire des collections, histoire des institutions artistiques et culturelles, économie de l'art.
Elle a publié sur de nombreux sujets correspondant à ces différentes fonctions, mais la peinture allemande du Moyen Âge et de la Renaissance constitue son principal champ d’études.
Isabelle Dubois-Brinkmann has been Chief Curator of Heritage and a Resident at the INHA since November 2019 in the field of History of collections, history of artistic and cultural institutions, Art Economics. She has published on many subjects corresponding to these different functions but German painting of the Middle Ages and the Renaissance is his main field of study.

François-René Martin

François-René Martin est coordinateur de la recherche à l’école du Louvre et professeur à l’École des Beaux-Arts de Paris.
François-René Martin is a research coordinator at the École du Louvre and professor at the École des Beaux-Arts in Paris.

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