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Bessarion et le monachisme italo-grec : l’Orient en Italie du Sud ?

Le cardinal Bessarion, la regula Sancti Basilii et la réforme des monastères italo-grecs au milieu du xve siècle
Bessarione e il monachesimo italo-greco: l’Oriente nell’Italie meridionale
Bessarione and the Italo-Greek Monasticism: The East in Southern Italy
Annick Peters-Custot

Résumés

Dans l’histoire monastique et culturelle de l’Occident médiéval, la « règle de saint Basile », qui n’était pas considérée comme telle dans l’Orient byzantin, constitue un texte essentiel, mais détourné de son sens et reflet des fantasmes d’un Occident admirateur de l’Orientale lumen du monde byzantin. Dans cette histoire, l’Italie méridionale joua un rôle majeur depuis le début, au ive siècle, jusqu’à la fin, au xve siècle. C’est en effet en Italie méridionale que fut traduit en latin l’Asketikon de saint Basile par Rufin d’Aquilée, c’est également là qu’apparut pour la première fois l’expression de regula sancti Basilii (dans le chapitre conclusif de la règle de saint Benoît, le chapitre 73). À l’autre bout de la chaîne chronologique, on retrouvera l’Italie méridionale, dans la création et le fonctionnement, pour le monachisme grec de l’Italie du Sud, d’une « règle de saint Basile » et d’un « ordre de saint Basile », tous les deux sous le patronage du cardinal Bessarion. L’ancien métropolite de Nicée conçut en effet, à la demande du pape, une règle destinée à être celle de tous les monastères italo-grecs. Notre contribution souhaite présenter la méthodologie de Bessarion pour la composition de sa règle, et notamment les manuscrits dont il disposait pour piocher, au sein de l’Asketikon basilien, le contenu des chapitres de sa propre norme monastique.

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Texte intégral

  • 1 P. McNulty et B. Hamilton, « Orientale lumen et magistra latinitas: Greek Influences on Western Mon (...)
  • 2 La règle de saint Benoît, éd., trad. et commentaire de A. de Vogüé et J. Neufville, 6 vol., Paris, (...)

1Dans l’histoire monastique et culturelle de l’Occident médiéval, la « règle de saint Basile », qui n’était pas nommée ainsi dans l’Orient byzantin, constitue un texte essentiel, mais détourné de son sens et fantasmé par un Occident admirateur de l’Orientale lumen1. Dans cette histoire de réception et d’imaginaire, l’Italie méridionale joua un rôle majeur, depuis le début de cette construction, au ive siècle, jusqu’à son premier terme médiéval, au xve siècle. C’est en effet en Italie méridionale que fut traduit en latin l’Asketikon dit de saint Basile par Rufin d’Aquilée, c’est également là, au Mont-Cassin précisément, qu’apparut pour la première fois l’expression de regula sancti Basilii, dans le chapitre 73 de la règle de saint Benoît, chapitre qui fait office d’épilogue et de justification à la règle2. À l’autre bout de la chronologie, on retrouvera l’Italie méridionale avec le cardinal Bessarion. L’ancien métropolite de Nicée conçut en effet, à la demande du pape, une règle destinée à être celle de tous les monastères italo-grecs, afin de les réformer et d’en unifier les pratiques et les normes. On cherchera ici à montrer combien la règle de Bessarion dévoile, de l’œuvre du célèbre humaniste polyglotte, un aspect négligé et pourtant essentiel de la circulation des manuscrits grecs par l’Italie et la Sicile. Cette dernière permet en effet d’appréhender les relations entre la péninsule italienne et l’Orient non seulement du point de vue des textes littéraires, philosophiques, théologiques et scientifiques — ce qui est un aspect bien connu —, mais aussi d’en voir l’impact sur la normativité monastique, objet elle aussi de vives réflexions et débats dans l’Italie humaniste.

  • 3 À ce sujet on mentionnera la journée d’études qui s’est tenue à l’École française de Rome le 3 nove (...)

2Cette contribution souhaite donc présenter quelques résultats d’une étude en cours sur la réception et le rôle du traité ascétique attribué à Basile de Césarée dans la réforme du monachisme italo-grec au xve siècle, ou du moins ce qu’il en restait, en particulier en Calabre. Ce travail, qui doit aboutir à une édition trilingue cum commentario de la règle de Bessarion, prend place au sein d’un projet plus vaste concernant la réception et la circulation en Occident de l’Asketikon attribué à Basile de Césarée, et la constitution, dans la chrétienté romaine comme dans le monde byzantin, de la figure de Basile comme législateur monastique de l’Orient byzantin3.

Le monachisme italo-grec médiéval : quelques brefs linéaments historiques

  • 4 Voir la carte 1 intitulée « Political Map of Southern Italy at the Beginning of the 11th Century (b (...)
  • 5 Sur ce sujet on se permet de renvoyer à A. Peters-Custot, Les Grecs de l’Italie méridionale post-by (...)
  • 6 Au sujet de la politique ecclésiastique des souverains normands, en général, on renverra à : A. Pet (...)
  • 7 Le souverain Hauteville se conçoit effectivement comme le chef de son Église. Voir S. Fodale, Comes (...)
  • 8 A. Peters-Custot, Les Grecs de l’Italie méridionale, ouvr. cité, p. 542-545.
  • 9 A. Peters-Custot, « … Et saint Basile en Occident », dans S. Excoffon, D.-O. Hurel et A. Peters-Cus (...)
  • 10 Soit le monachisme de l’Empire latin d’Orient et le monachisme italo-grec et siculo-grec.
  • 11 H. Enzensberger, « Der Ordo Sancti Basilii, eine monastische Gliederung der römischen Kirche (12.-1 (...)
  • 12 Au sujet des ordres religieux occidentaux et de leur déploiement médiéval, la bibliographie est pre (...)

3Il est nécessaire de rappeler la situation monastique et religieuse particulière de l’Italie méridionale péninsulaire aux époques médiévale et moderne. Cette région comprend, jusqu’au xiiie siècle inclus, deux régions fortement marquées par la langue, la culture et les pratiques juridiques, anthroponymiques, religieuses et liturgiques « grecques » : la Calabre centro-méridionale et le Salento4. Il existe donc un clergé et un monachisme d’obédience liturgique byzantine en langue grecque bien après l’intégration de l’Italie méridionale dans l’orbite occidentale, suite à la conquête « normande » de l’Italie méridionale et de la Sicile5. L’existence de cette enclave monastique byzantine ne pose aucun problème particulier ni au souverain Hauteville, puis Hohenstaufen, ni au pape, et aucun d’entre eux n’a l’idée de faire disparaître les spécificités liturgiques et disciplinaires des Italo-Grecs. On sait combien l’époque normande fut au contraire une période riche pour les monastères grecs dans l’Italie méridionale. De nombreuses fondations chapeautées par le pouvoir royal devinrent les établissements les plus riches et puissants du royaume (tel le monastère du Saint-Sauveur de Messine) tandis que la création de deux archimandritats, celui du Saint-Sauveur de Messine et celui, de moindre importance, de Saint-Élie de Carbone, atteste l’intérêt des souverains Hauteville dans le contrôle (bienveillant) des monastères italo-grecs6. L’organisation et la gestion des affaires ecclésiastiques et monastiques du royaume de Sicile restent largement sous la seule autorité royale, et la papauté ne parvient que modérément à y mettre son nez7. Or, au début du xiiie siècle, plusieurs faits intéressent, directement ou non, le monachisme italo-grec : d’une part, à la faveur de la minorité du roi de Sicile Frédéric II Hohenstaufen et jusqu’au retour de ce dernier de Germanie (1198-1220), le pape peut enfin affirmer son autorité sur l’Église du royaume de Sicile, autorité qui lui avait été refusée sous le règne des Hauteville (et jusqu’en 1189) par l’écran que les souverains faisaient à l’action pontificale en Calabre et en Sicile, c’est-à-dire dans les zones précisément peuplées de chrétiens byzantins. Or, dans ces années d’intervention pontificale, la priorité est de montrer aux chrétiens byzantins soumis à la juridiction romaine après 1204, depuis la fondation d’un Empire latin de Constantinople, et dans le cadre des discussions sans cesse reprises pour l’Union des Églises, que la chrétienté romaine admet la pluralité des rites, des langues, des organisations ecclésiologiques. Dans ce cadre, le monde italo-grec fait office de vitrine des bonnes intentions pontificales8. D’autre part, en 1215, le concile de Latran IV interdit la rédaction de nouvelles règles religieuses car les règles existantes suffisent : pour les chanoines, celle de saint Augustin, pour les moines, celles de saint Benoît et de saint Basile. La mention de la « règle de saint Basile » dans le canon conciliaire constitue en fait l’aboutissement d’un long processus, dont je ne détaillerai pas les phases, mais qui commence dès la première grande réforme monastique occidentale, celle des Carolingiens, et qui conduisit progressivement le monde occidental à assimiler le monachisme byzantin à la « règle de saint Basile9 ». Enfin, dans le contexte de ce xiiie siècle, la papauté participe à un mouvement général de mise en catégories : il s’agit ici d’intégrer le monachisme byzantin qui est sous sa juridiction10 dans les cases et les catégories qui fonctionnent pour le monachisme occidental. Se développe donc, dans les actes de la chancellerie pontificale, l’habitude de définir les monastères selon la règle à laquelle les moines sont soumis (règle de saint Benoît, « règle de saint Basile »), voire de parler d’ordre : la documentation pontificale commence ainsi, au cours du xiiie siècle, à évoquer « l’ordre de saint Basile » pour dénommer les monastères italo-grecs11. Il s’agit alors d’un simple fait de nomenclature : en effet, il n’existe juridiquement parlant pas d’ordre avant que ne soient créées les structures qui, depuis le xiie siècle, font d’une congrégation de monastères un ordre, à savoir une règle commune, un supérieur général, éventuellement un cardinal protecteur (même si ce n’est pas une règle universelle) et, surtout, un chapitre général12.

  • 13 A. Peters-Custot, Les Grecs de l’Italie méridionale, ouvr. cité, p. 569-575.
  • 14 Ibid., p. 585-587.

4Autour du milieu du xve siècle, la conjonction de plusieurs éléments, une fois de plus, apporte au monachisme italo-grec des changements notables. Premièrement, le monachisme traditionnel, en Occident, pâlit considérablement, souffrant de la combinaison de plusieurs facteurs sclérosants bien connus. Le souci de réforme général du monachisme paraît de plus en plus urgent et la papauté s’en saisit. À cette situation générale s’ajoutent, pour le cas du monachisme italo-grec, des facteurs aggravants de déclin : les troubles issus de l’état de guerre permanent entre maisons d’Anjou et d’Aragon, entre la fin du xiiie et le début du xive siècle, plongent de nombreux monastères de Calabre, de quelque obédience qu’ils soient, dans un état de quasi ruine13. Par ailleurs, les spécificités du monachisme italo-grec sont largement liées à la pratique d’une liturgie en langue grecque, dont la connaissance s’amenuise au sein de la population locale. Les communautés grecques de Calabre et de Pouille ont été séparées de l’Empire byzantin à la fin du xie siècle : deux ou trois cents ans plus tard, il n’est pas anormal que le grec soit de moins en moins connu. Le processus d’acculturation s’achève moins au profit du latin que de celui des dialectes italiens14.

  • 15 C’est-à-dire au moment même où la chancellerie pontificale commence tout juste à parler de « règle  (...)
  • 16 A. Guillou et M.-H. Laurent, Le « Liber Visitationis » d’Athanase Chalkéopoulos (1457-1458). Contri (...)

5Naît toutefois, dès lors, un dilemme qui sera permanent : faut-il sauver la langue grecque pour sauver le rite grec (et donc former à marche forcée des moines, désormais « italiens », à la langue et au rite grec) ? Ou faut-il sacrifier la langue sur l’autel du salut de la liturgie, renoncer au grec, traduire en latin (voire en langue vulgaire) les livres liturgiques, et créer un monachisme byzantin occidental de langue latine ? Quelle que soit l’option choisie, l’urgence est de réformer les monastères. C’est ainsi qu’on connaît l’existence, dans le second Moyen Âge, de trois visites de monastères italo-grecs, qu’on commence à appeler « basiliens » : une première visite ordonnée, dès 1221, par le pape Honorius III15 ; une visite commandée par Urbain V en 1370 et une visite ordonnée par Martin V en 1419. De toutes ces visites, aucun compte rendu ne nous a été transmis16.

Bessarion et l’« Ordre de saint Basile »

  • 17 Là encore la bibliographie sur le cardinal Bessarion est infinie et sans cesse renouvelée. Outre la (...)
  • 18 Les détails qui suivent sont largement tributaires de l’introduction au livre de Guillou et Laurent (...)
  • 19 Il est probablement prévu de constituer ces régions comme les trois provinces de l’ordre nouveau-né
  • 20 On trouvera une réédition de ce court texte dans Guillou et Laurent, Le « Liber Visitationis » d’At (...)
  • 21 Ibid., p. xxxvii et note 5.

6Au xve siècle, les tentatives d’union des Églises sont relancées, notamment au concile de Florence en 1439. Face aux réticences des milieux ecclésiastiques orientaux, le monachisme italo-grec peut constituer une excellente vitrine de ce que la papauté réalise avec les monastères d’origine byzantine qu’elle administre depuis plusieurs siècles. C’est précisément le concile de Florence de 1439 qui met en lumière une personnalité clef de cette époque : le cardinal Bessarion17. L’ancien métropolite de Nicée, acquis à la cause de l’union des Églises, et qui en fut un des protagonistes les plus actifs au concile de Florence, s’empare, une fois devenu cardinal au titre des Saints-Apôtres, la même année (le 18 décembre) et à la demande du pape Eugène IV, de la cause du monachisme italo-grec exsangue, auquel il a mission de donner une nouvelle vie18. À une date inconnue, Bessarion devient par nomination d’Eugène IV cardinal protecteur des monastères de « l’ordre de saint Basile ». Dès novembre 1446, il convoque un chapitre général de l’ordre, le premier connu, à Rome, qui réunit les archimandrites et higoumènes de Sicile, Calabre et Pouille19. On connaît, dans une traduction italienne, le texte des prescriptions rédigées à cette occasion et qui furent approuvées par le pape Eugène IV20. Visiblement, un second chapitre, provincial celui-là, se tint plus tard, et avant 1457, à Castrovillari (province de Cosenza), mais on n’en a pas gardé les décisions — on sait seulement que les articles étaient au nombre de 2221. Enfin, et ce sera l’objet plus précis de notre contribution, Bessarion a conçu, dans le respect de la grande méthodologie pontificale de la réforme, une règle destinée à être celle de tous les monastères italo-grecs.

  • 22 Les exigences linguistiques chutent progressivement, ce dont témoigne l’évolution du texte. Cette d (...)

7C’est le compte rendu de la visite générale des monastères italo-grecs qui suivit ces chapitres, et qui eut lieu en 1457-1458, qui nous donne accès à de nombreux éléments de compréhension, à la fois de l’état du monachisme italo-grec au milieu du xve siècle, et des tentatives de réforme. Le tableau général est franchement pitoyable, et le détailler constitue une mission déprimante. Le procès-verbal de cette visite énonce et répète inlassablement les mêmes constats de pauvreté économique, de misère spirituelle, de débandade disciplinaire, et d’ignorance intellectuelle, sans parler du laisser-aller moral. Plus que jamais au xve siècle, le Christ s’était « arrêté à Eboli ». Toutefois, cette visite de 1457-1458 et son procès-verbal apportent aussi à l’historien des informations de premier plan sur les mesures apportées pour redresser le monachisme italo-grec. Dressé par les deux visiteurs, Macaire, l’archimandrite de Saint-Barthélemy de Trigona, et Athanase Chalkéopoulos, celui de Sainte-Marie du Patir de Rossano, le compte rendu livre, chemin faisant, des précisions très précieuses : à chaque visite, les envoyés de Bessarion dressent un tableau ordonné de la situation selon un formulaire conçu en amont (abbé, moines, comportement moral, liste des biens) et concluent par des prescriptions qui, à l’exception des cas extrêmes (déposition d’un higoumène immoral), se résument à rappeler l’obligation d’obéissance à la règle de l’Ordre et font référence aux textes fondamentaux : les actes du chapitre général de Rome (qui s’est tenu onze années plus tôt), ceux du chapitre provincial de Castrovillari, et enfin, je cite, la regulam abreviatam a domino cardinali Niceno in greco sermone et vulgari latino. Remarquons que la précision de la langue dans laquelle on peut consulter cette règle abrégée disparaît ensuite du procès-verbal : partis plein d’enthousiasme, les visiteurs ont dû constater à quel point le grec était ignoré, et qu’il était donc complètement inutile de prescrire la lecture de la règle abrégée en grec22 — ce qui justifie le bilinguisme presque originel de la règle de Bessarion, on le verra.

La règle de Bessarion pour le monachisme italo‑grec

  • 23 L’appellation de « cardinal de Nicée » est issue de la « contraction » de deux fonctions successive (...)
  • 24 Le compte rendu de la visite de 1457 donne une bonne idée de la langue vernaculaire pratiquée dans (...)
  • 25 La visite de 1457 n’évoque jamais, dans les bibliothèques des monastères visités, la présence d’un (...)
  • 26 Guillou et Laurent, Le « Liber Visitationis » d’Athanase Chalkéopoulos, ouvr. cité, p. 287, l. 11-1 (...)
  • 27 Ibid., p. 288, l. 1-4 : « Item statuimo et ordinamo che all’hora quando mangiano li monaci, ad hora (...)

8Qu’est-ce que cette « règle » que les visiteurs citent systématiquement, comme étant une règle abrégée due au cardinal de Nicée, c’est-à-dire Bessarion23 ? Il s’agit d’un texte rédigé, comme les visiteurs l’expliquent, en grec, en latin et en vernaculaire (italien)24, et qui constitue, avec les actes des chapitres généraux et provinciaux, l’arme principale de la réforme fondée sur l’uniformisation des pratiques : il est à noter que, lorsque les visiteurs relèvent dans leurs inventaires des rares bibliothèques monastiques un peu fournies, la regula S. Basilii, cela ne leur fait ni chaud ni froid : ce n’est pas la « règle de saint Basile » qui est la codification unificatrice des monastères de « l’ordre de saint Basile », mais la règle abrégée de Bessarion, dont aucune précision dans le compte rendu de la visite de 1457 ne permet d’établir un lien avec la regula S. Basilii. L’unité de l’ordre passe donc moins par Basile de Césarée que par Bessarion qui pallie, par une codification de son cru, l’absence de réglementation interne des monastères italo-grecs25. L’Asketikon attribué à Basile de Césarée est donc absent, dans sa version grecque comme dans sa version latine, issue de la traduction de Rufin d’Aquilée en 397, avant comme après la réforme, ce que confirment les prescriptions rédigées suite à la tenue du premier chapitre général de l’ordre en 1446 : le premier décret énonce l’obligation de s’en tenir à la religione de saint Basile26, et le chapitre 6 cite la regula S. Basilii à propos des repas27 : mais ce sont les seules occurrences de saint Basile dans ces décrets.

  • 28 Ibid., p. 30, l. 37.
  • 29 Le manuscrit Bibl. univers. grec. 113.
  • 30 Ce manuscrit, autrefois catalogué sous la cote Bibl. Nacional grec. 105, est désormais référencé so (...)
  • 31 On dispose également d’une version espagnole tardive et qui n’a rien à voir avec Bessarion, et qui (...)
  • 32 Cette publication est probablement liée à la fondation de la congrégation basilienne, qu’elle suit (...)
  • 33 De toutes les bibliothèques italiennes et françaises qui possèdent un exemplaire recensé de l’éditi (...)

9La composition de cette règle abrégée est antérieure à la visite de 1457, mais de peu : les visiteurs ne s’étonnent pas de son absence dans les monastères. Par ailleurs, ils en parlent comme d’une règle abrégée rédigée en grec et en vulgare latino (et à une seule reprise, in greco colloquio et latino sermone28). De fait, on ne possède que deux manuscrits de la règle de Bessarion, celui de Messine (manuscrit trilingue grec/latin/italien du xve siècle, issu de l’abbaye de Grottaferrata puis transféré au Saint-Sauveur de Messine en 164029) ; celui, plus tardif, de Madrid, qui comprend uniquement la version grecque30. Le manuscrit de Messine atteste que les versions latine et italienne ont été réalisées de manière quasi contemporaine au texte grec, ce que confirme le procès verbal de la visite de 145731. L’édition de ce texte, faite à Rome en 1578 chez Francesco Zanetti, sous le titre Σύντομος ἐκλογὴ τῶν ἀσκητικῶν διατάξεων τοῦ ἐν ἀγίουϛ πατρὸϛ ἡμῶν Βασιλείου, comprend la version grecque et la version italienne32. Ce ne fut pas un succès de librairie : je n’ai retrouvé, dans les bibliothèques publiques de France et d’Italie, qu’un exemplaire de l’édition originelle gréco-italienne, conservé à la Bibliothèque vaticane33. Il convenait donc de décrypter avec quelle méthode Bessarion avait rédigé sa règle abrégée, et à quelles sources il avait puisé. Sur ce point, l’investigation a apporté des résultats clairs et définitifs : Bessarion a exclusivement puisé dans les écrits ascétiques attribués à Basile de Césarée.

  • 34 J. Gribomont, Histoire du texte des Ascétiques de saint Basile, Louvain, Presses universitaires de (...)

10Il faut toutefois bien comprendre au préalable ce qu’on désigne par Asketikon, ou texte des Ascétiques de saint Basile, et qui sont bien connus grâce aux travaux de deux spécialistes de ces textes, Jean Gribomont et Paul Jonathan Fedwick34, désormais renouvelés par le travail doctoral encore inédit d’Arnaud Perrot, comme on le verra.

L’Asketikon dit de Basile de Césarée et ses versions

  • 35 On distingue Petites Règles et Grandes Règles, on ajoute des éléments aux règles anciennes, on ajou (...)

11Ce qu’on appelle Asketikon est un recueil très hétérogène composé de plusieurs textes et traités écrits par Basile ou attribués à Basile — la part des textes considérés comme apocryphes est désormais fort importante — et ce avant même que Basile soit évêque de Césarée, puis quand il l’est devenu. Ainsi, l’Asketikon est un texte composite très ample, issu de plusieurs couches de rédaction successives, dont certaines sont postérieures à Basile, et qui comprend des pièces dont la paternité basilienne, on l’a dit, est douteuse. Par ailleurs, l’Asketikon est présent en deux versions, l’une, longue et très touffue, appelée Grand Asketikon, conservée dans sa version originale grecque et l’autre, restreinte à une série de questions/réponses, dont la version originelle grecque a disparu, et qui n’est connue que dans une version syriaque et dans la traduction latine qu’en fit Rufin, un disciple de Jérôme, vers 397. Jusqu’à une date très récente, l’opinion courante concernant les étapes de composition de cet amalgame textuel qu’est l’Asketikon suivait la restitution qu’en avait proposée Jean Gribomont : Basile aurait rédigé d’abord un traité de règles de la vie chrétienne, appelé Morales, puis le Petit Asketikon issu de ses tournées de visites pastorales et des réponses qu’il donnait aux questions des communautés ascétiques alors rencontrées (Basile n’est pas encore évêque de Césarée, nous sommes donc avant 370). Enfin, troisième étape, une fois devenu évêque de Césarée (en 370), Basile (ou un membre de son entourage) augmente le catalogue de préceptes de diverses pièces, et certaines sont ajoutées encore ultérieurement35 : le résultat, c’est ce qu’on nomme le Grand Asketikon grec. Le Petit Asketikon, étouffé par les recensions augmentées ultérieures, celles du Grand Asketikon, disparaît dans sa version grecque, probablement assez rapidement (dès le début du ve siècle) et on n’en a plus aucun témoin. Mais le Petit Asketikon avait été traduit en syriaque et en latin. La traduction latine a été réalisée assez rapidement, vers 397, par Rufin d’Aquilée.

  • 36 Ce qu’exprime en particulier le préambule de Rufin à sa traduction latine du Petit Asketikon grec : (...)
  • 37 On a déjà mentionné le chapitre 73 de la règle de saint Benoît. Dans sa préface aux Institutions cé (...)
  • 38 Je renvoie à la contribution d’Olivier Delouis à la journée d’études De Basile aux Basiliens (cf su (...)

12La soutenance de la thèse d’Arnaud Perrot, le 12 décembre 2016, a quelque peu bouleversé cet ordre admis. Sa thèse, intitulée Le Législateur incertain. Recherches sur la contribution ascétique de Basile de Césarée, et réalisée sous la direction d’Olivier Munnich, présente une version tout autre, qui retire presque toute paternité à Basile dans la rédaction des différentes pièces de l’Asketikon, essentiellement pour des raisons de divergences théologiques entre ces textes et ceux dont l’attribution à Basile de Césarée est certaine ; et qui renverse l’ordre de composition entre Grand et Petit Asketikon : M. Perrot estime que la version latine et la version syriaque sont les traductions d’une version grecque abrégée du Grand Asketikon, ce qui fait du Petit Asketikon une version seconde et forcément postérieure du Grand Asketikon. Cette relecture change toutefois peu notre propos, et ne modifie en rien les conditions de la réception par l’Occident latin de l’Asketikon, au sens où, pour le traducteur en latin, Rufin, le texte qu’il traduit est évidemment et intégralement de saint Basile36, ce que relaie ensuite toute la tradition occidentale, Jean Cassien ou Benoît de Nursie en tête37. Si, dans le monde byzantin, Basile devient tardivement une figure de la législation monastique, il est toutefois définitivement considéré comme tel à l’époque méso-byzantine38, jusqu’à la fin du Moyen Âge, et c’est avec ce statut que son œuvre de normalisation ascétique (qu’elle soit de lui ou non) est retravaillée au xve siècle par le cardinal Bessarion.

13Ainsi, l’Occident médiéval connaît essentiellement ce texte dans une version latine courte. Quant au Grand Asketikon en grec, composé, on l’a dit, de Grandes et Petites Règles et de pièces ascétiques très diverses, dont des sermons, des traités, etc., il en existe plusieurs versions (recension stoudite, dite S, recension vulgate, dite V — que Feldwick appelle « recension pontique », etc.). Une unique version du Grand Asketikon grec circule en Occident au haut Moyen Âge : on la trouve exclusivement dans des manuscrits italo-grecs des ixe-xie siècles, Gribomont l’appelle la « recension Nil » (pour la placer sous le patronage symbolique de Nil de Rossano) : ce n’est pas une vraie « circulation », car ce texte grec ne sort pas du milieu monastique italo-grec avant le xve siècle. Toutefois cette recension n’est pas figée puisqu’à l’époque normande se crée une version nouvelle de la recension « Nil », propre aux milieux monastiques grecs du royaume de Sicile des Hauteville, appelée (par Gribomont) recension « Na ».

Bessarion et l’Asketikon

14Grâce au legs que Bessarion fit de sa bibliothèque personnelle à la Marcienne de Venise, il est possible de connaître quels sont les manuscrits dont il disposait pour réaliser son travail de compilation normative. Rappelons que Bessarion fut successivement higoumène du monastère de Saint-Basile de Constantinople, puis abbé commendataire du Saint-Sauveur de Messine : il eut donc toutes les occasions de rencontrer, voire de posséder différentes versions, byzantines ou italo-grecques, de l’Asketikon de saint Basile.

  • 39 Bibliothèque de la Marcienne, fondo antico, nos 62, 63, 64, 65. J’ai pu consulter ces manuscrits gr (...)
  • 40 Ce qui ne signifie pas que seul le manuscrit Na soit d’origine italo-grecque : s’il existe une corr (...)
  • 41 J’ai démontré quels étaient les manuscrits utilisés par Bessarion pour composer sa règle abrégée da (...)

15Bessarion possédait quatre manuscrits de l’Asketikon grec39, dans deux versions de l’Asketikon de Basile : trois manuscrits de la recension « vulgate » (Fedwick l’appelle « pontique »), et un manuscrit italo-grec de la recension « Nil abrégé » propre à l’Italie méridionale sous la domination normande40 : c’est surtout ce manuscrit qu’il utilisa pour composer sa règle abrégée, ainsi que le manuscrit composite acheté en 1210 par un prêtre de la métropole de Nicée41 (rappelons que Bessarion fut métropolite de Nicée à partir de 1437). Ce qui est évident, c’est que Bessarion, voulant rédiger sa règle en grec, s’est servi des versions grecques de l’Asketikon pour appliquer la méthode réformatrice des papes dont le centralisme est parfaitement étranger aux mentalités byzantines.

16Considérons justement la construction normative de Bessarion : si son unique source est le Grand Asketikon grec, attribué à Basile, la sélection des fragments et leur réorganisation attestent-elles une « bénédictinisation » ou conservent-elles la conception que l’évêque de Césarée (ou d’autres auteurs) a laissé transparaître dans le traité ascétique composite original ? L’éklogè de Bessarion, explicitement définie comme telle dans le titre de sa règle, a-t-elle donné naissance à une chimère ou à un texte cohérent ? Deux aspects sont à considérer de manière conjointe : d’une part, la recomposition à partir de l’œuvre ascétique basilienne, donc ce qu’on pourrait définir comme la « basilianité » de cette éklogè ; d’autre part, dans le contexte dans lequel écrit Bessarion, celui des réformes monastiques occidentales prenant pour appui la règle de saint Benoît, la relation entre la reconstruction normative que le cardinal opère, et le modèle entre tous en Occident, à savoir la règle bénédictine : donc ce qu’on pourrait nommer la « bénédictinité » de cette éklogè — en grec, « choix », « sélection ».

L’éklogè basilienne de Bessarion : recomposition, fidélité et trahison

Une construction textuelle composite

  • 42 Voir la table des chapitres en annexe de cet article.

17La règle de Bessarion se compose d’un prologue, suivi de 23 chapitres de tailles très diverses, munis chacun d’un titre qui est de Bessarion42. Suivent les épitimies (pénitentiels) et un rituel de prise d’habit dont il faudra éclairer l’origine. La composition s’apparente donc à un corps dont le squelette est de Bessarion, mais dont tous les organes ont été prélevés dans l’Asketikon et greffés sur ce squelette. À part le préambule et les titres des chapitres, rien n’est du calame de Bessarion : ce dernier s’est borné à juxtaposer, en les organisant, des extraits de Basile.

  • 43 C’est le premier sermon de Basile sur la renonciation à la vie séculière et la perfection spirituel (...)

18Le résultat est composite aussi à la lecture : Bessarion ayant prélevé ses extraits de divers genres de textes ascétiques tirés de ce grand fourre-tout qu’est l’Asketikon, des modes d’énonciation différents se succèdent, parfois au sein d’un même chapitre : par exemple, le chapitre 7 sur la vie ascétique, fort long et important, fait se succéder un extrait du 4e discours ascétique, puis un extrait de ce que Gribomont appelle le « discours 1143 », un autre extrait du 4e discours ascétique, les Petites Règles 298, 120, 85, deux extraits des Constitutions monastiques dites « W », enfin les Petites Règles 188 et 189. Chaque extrait a son propre mode d’énonciation : d’abord un discours général maniant la 3e personne, puis, pour le discours 11, un passage au « tu », qui désigne un moine avec lequel Basile dialogue, ensuite un retour à la 3e personne, puis les Petites Règles avec leur système énonciatif propre en questions-réponses, enfin, avec les Constitutions W, le passage au « nous ». On sent la distance avec la continuité formelle de la règle bénédictine : la règle de Bessarion n’a aucune uniformité énonciative et conserve une présentation « fourre-tout » qui était aussi celle du Grand Asketikon, mais en plus marquée encore ici. Du point de vue de la méthodologie, Bessarion montre ainsi qu’il ne se permettait pas de manipuler les textes sources. Pourtant, il les manipule par la sélection, la recomposition, voire la taille.

19En effet, comme Bessarion a coupé à l’intérieur des règles citées, et des sermons, il a prioritairement supprimé des développements qui n’ont pas d’intérêt pratique direct, afin de formuler une règle de comportement : ses chapitres excluent toutes les questions philosophiques envisagées par Basile : ce qu’est la tristesse, comment se convertir et devenir comme des enfants, qui sont les pauvres en esprit, quelle est la mesure de l’amour de Dieu. Il faut dire que ces considérations s’adressent à tout chrétien, et non uniquement au moine. De la même manière, Bessarion a retiré des développements philosophiques autour de la médecine, pour ne retenir que les usages pratiques de cette science.

  • 44 Surtout dans son traité destiné Aux jeunes gens sur la manière de tirer profit des lettres helléniq (...)
  • 45 Cet élément rappelle la valorisation, par Benoît, dans son chapitre 73, de la règle de saint Basile (...)

20Le résultat constitue un texte court et pragmatique, à la fois très bien structuré, mais composite dans les modes d’énonciation, pratique mais sec, sans élan, sans la force théologique et philosophique qui était celle d’un grand chrétien du ive siècle qui, comme d’autres, défendit la culture grecque compatible avec le christianisme44. Cette éklogè est une pure norme de comportement, non de spiritualité ou d’état d’esprit45.

Bessarion versus Benoît : un modèle formel occidental pour un texte grec

  • 46 Ainsi, le chapitre 6 de la règle de Bessarion sur la réception des nouveaux moines et l’éducation d (...)

21Le mode d’organisation des extraits en chapitres apparente le texte à la règle bénédictine, mais en version nettement plus brève (23 chapitres au lieu de 73). Cet aspect est encore plus visible lorsqu’on compare les thèmes traités par la règle de Bessarion, dans l’ordre des chapitres, avec les équivalents de la règle de saint Benoît : on s’aperçoit en effet que chacune des normes, celle de Benoît comme celle de Bessarion, commence par un prologue, suivi d’un chapitre sur les différentes sortes de moines, un second chapitre sur le supérieur du monastère, un troisième sur son conseil. Par la suite, l’organisation des chapitres diverge, bien des thèmes évoqués dans un chapitre spécifique chez Bessarion sont dispersés entre plusieurs chapitres chez Benoît46, certains chapitres de Bessarion ne trouvent pas de correspondant chez Benoît. Il convient de relever que l’essentiel des thèmes traités par Benoît se retrouve chez Bessarion, dans un ordre différent, peut-être moins rigoureux. Il manque chez Benoît des aspects présents chez Bessarion, notamment les questions liées à la pratique de la charité entre moines (chapitre 21 de la règle de Bessarion). Mais il y a aussi des convergences dissimulées : ainsi, Benoît consacre un chapitre au fait que le moine ne doit rien posséder en propre : rien de tel chez Bessarion, sauf que cet interdit apparaît au gré des chapitres, dissimulé derrière des titres généraux. Toujours est-il que, dans l’organisation, la similitude entre la composition de Bessarion et la règle de Benoît est assez frappante et tranche avec le bric-à-brac appelé Grand Asketikon. Si le squelette de ce corps est de Bessarion, et les organes, de Basile, il est recouvert d’une peau bien bénédictine.

Bessarion versus Basile : des principes conservés

22Malgré ses remaniements formels, qui traduisent des modifications profondes des textes sources du moins dans leur esprit, on peut observer que Bessarion a maintenu des caractères divergents par rapport à la règle de saint Benoît. Si les thèmes et l’organisation se retrouvent, ce qui laisse penser que Bessarion s’est servi en partie de la règle de saint Benoît pour construire le « squelette » de sa règle, les contenus sont souvent très divergents, notamment sur les points qui font la spécificité du monachisme bénédictin. Sans aller trop dans les détails, on relèvera quatre divergences fondamentales.

  • 47 Cf. le passage cité supra en note 2, dont la citation se poursuit ainsi : « Mais pour nous qui somm (...)
  • 48 ΣΥΝΤΟΜΟΣ ΕΚΛΟΓΗ ΤΩΝ ΑΣΚΗΤΙΚΩΝ ΔΙΑΤΑΧΕΩΝ ΤΟΥ ΕΝ ΑΓΙΟΙΣ ΠΑΤΡΟΣ ΗΜΩΝ Βασιλείου τῶ μεγάλου, πᾶσι τοῖς τ (...)

23Avant toute chose, le dessein de chacun des législateurs : pour Benoît, il s’agit, comme il l’exprime dans le chapitre 73 de la règle, de formuler une petite règle pour moines médiocres, parce que celle de Basile est trop élitiste et trop difficile47 (n’est-ce pas également cette nécessité de se mettre à la portée de moines médiocres qui poussa le « cardinal de Nicée » à supprimer la complexité du discours ascétique de Basile, pour n’en retenir que les règles de comportement ?). Bessarion, toutefois, exprime surtout dans son prologue la nécessité de réformer un monachisme dont les membres sont des Latins, fils de Latins, devenus incapables de comprendre les traités ascétiques de Basile le Grand48. Signalons, à ce sujet, que la version italienne modifie ce passage et transforme les Latins en Italiens :

  • 49 Ibid., p. 5 de la partie italienne.

Et essendo che molti monaci, massimamente quelli che nelle provincie d’Italia e di Sicilia vivono sotto detto ordine, per l’ignoranza della lingua Greca (essendo per lo più Italiani & figliuoli di Latini), non sanno pur punto legger Greco […]49.

24On peut légitimement se demander, comme me l’a suggéré à raison Georges Sidéris, si l’altération du préambule grec de Bessarion par la traduction italienne — on l’a dit, quasi immédiate — ne signale pas un décalage entre la vision du cardinal Bessarion, qui est la conception byzantine traditionnelle, et qui voit les Italiens comme des « Latins », et la conception occidentale, sinon péninsulaire, consciente d’une « italianité » de ces moines sans doute bien réelle au xve siècle, au moins pour ce qui est de la langue en usage.

25Second point divergent, dans bien des passages, et notamment dans les différentes sortes de moines, la détestation profonde que Basile nourrit à l’égard de l’érémitisme n’a pas de parallèle avec la vision de Benoît, pour qui cette forme monastique constitue le sommet d’une vie ascétique, atteint après des années d’exercice de l’abandon de sa volonté propre. À partir d’un même constat (il faut se départir de sa volonté propre) Basile et Benoît aboutissent en effet à des conclusions opposées, et Bessarion maintient fermement cette divergence (peut-être en contexte de contestation des mouvements solitaires dangereux car non contrôlables).

26La divergence la plus profonde est liée à la position du supérieur ; chef absolu de la communauté bénédictine, il occupe une position fortement nuancée chez Bessarion : le chapitre 3 insiste sur le fait que l’higoumène ne doit rien faire sans prendre conseil, le chapitre 7 expose qu’il est possible à un moine de prendre un directeur spirituel qui ne soit pas son higoumène (impensable chez Benoît), la question de l’obéissance aux choses impossibles est par conséquent traitée différemment chez Bessarion et chez Benoît ; le chapitre 11 de Bessarion est consacré à la correction de l’higoumène pécheur (impensable, là aussi, chez Benoît) ; enfin, l’humilité, qu’exprime l’obéissance absolue à l’abbé, n’est pas considérée de la même manière : pure imitation du Christ que doit donc viser tout chrétien, elle n’est qu’une partie du chapitre 7 de la règle de Bessarion, qui est consacré à la vie ascétique, tandis que Benoît en détaille tous les degrés avec une précision d’horloger dans son propre chapitre 7.

Conclusion

27En bref, parce qu’il n’a puisé que dans les textes attribués à Basile de Césarée et tirés du recueil appelé Grand Asketikon, dans sa version originale grecque, sans jamais les retoucher ou les manipuler, Bessarion a forgé un texte de structure bénédictine, mais qui conserve une bonne partie de l’esprit du cénobitisme « byzantin ». Il conviendrait, pour finaliser ce travail, de creuser les analyses de détail, mais aussi considérer parallèlement les normes monastiques en application à Constantinople au début du xve siècle, pour comparer la « règle » de Bessarion avec ce qui était alors leur degré de proximité avec la normativité monastique occidentale.

28Ce voyage au cœur du xve siècle italo-grec, guidé par un intellectuel byzantin de haut vol, a eu le mérite de proposer une nouvelle image des échanges liés aux circulations de manuscrits : l’acculturation et l’italianisation des moines grecs de Calabre est déjà réalisée, Bessarion l’avoue lui-même dans son préambule. La visite des monastères italo-grecs, en 1457, donne l’image d’un monachisme qui n’est plus, sauf à quelques exceptions près, byzantin que de nom. Et c’est alors qu’un Grec de Trébizonde formule une création d’acculturation volontaire, mêlant des textes grecs issus de la tradition byzantine de l’Italie « normande », celle de la Renaissance grecque du xiie siècle, avec ceux du « cœur » de l’Empire byzantin, pour fonder une codification monastique qui connaîtra un succès bien indépendant de l’Italie du Sud pour laquelle elle avait été rédigée, et qui n’avait guère été marquée par cette tentative de normalisation.

  • 50 Cette version fut successivement publiée à Séville en 1615, puis à Madrid en 1664, 1669, 1736 et 17 (...)
  • 51 Je renverrai là encore à la journée d’études citée supra note 3 (De Basile aux Basiliens), et à la (...)
  • 52 On se permet de renvoyer à nouveau à la journée d’études intitulée De Basile aux Basiliens (voir no (...)

29En effet, on a de cette règle, on l’a dit, en plus des versions grecque, latine et italienne originelles, une version espagnole, publiée à Séville au début du xviie siècle50, et probablement composée lorsque le pape autorisa la fondation d’une branche ibérique de l’ordre de saint Basile, à destination de moines espagnols qui voulaient tenter une nième expérience de semi-anachorétisme, ou d’érémitisme collectif51. À partir de là, la règle de Bessarion pour le monachisme italo-grec servit de codification unificative à l’Ordre basilien, devenu l’instrument d’intégration des monachismes orientaux sous la juridiction pontificale, en Ukraine comme au Liban52. La postérité de ce texte fut donc bien plus importante que ne laissent entendre le faible nombre de manuscrits et l’insuccès de sa diffusion dans les monastères italo-grecs. Une fois de plus, comme au temps de Rufin, c’est dans l’Italie méridionale que le lien entre Orient et Occident avait créé un instrument de la vision occidentale de la chrétienté orientale.

Carte 1. – Political Map of Southern Italy at the Beginning of the 11th Century (before the Norman Conquest).

Carte 1. – Political Map of Southern Italy at the Beginning of the 11th Century (before the Norman Conquest).
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Σύντομος ἐκλογὴ τῶν ἀσκητικῶν διατάξεων τοῦ ἐν ἀγίουϛ πατρὸϛ ἡμῶν Βασιλείου τῶ μεγάλου, πᾶσι τοῖς τὸν ἀκητικὸν Βίον ἑλαμένοις πάνυ ὠφέλιμος / Breue raccolto delle constitutioni monastiche di santo Basilio Magno, molto vtile a tutti quelli che hanno eletto di fare vita monastica, ed. in Roma per Francesco Zanetti, 1578.

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Annexe

Table des chapitres de la règle de Bessarion

PROLOGUE

Chap. 1
 

Des différentes sortes de vie monastique, et de celle qui est la meilleure et la plus sûre

Chap. 2

Quel doit être l’higoumène

Chap. 3

Sur le fait qu’il doit faire toute chose avec le conseil de ses frères

Chap. 4

Comment il doit être sollicité pour la correction de ceux qui ont péché

Chap. 5
 

Comment on doit procéder avec ceux qui ne se sont pas amendés après la troisième admonition

Chap. 6
 
 

Comment et à quel âge on doit recevoir ceux qui, renonçant au siècle, viennent à la vie monastique, et comment on doit admonester et éduquer les jeunes

Chap. 7
 
 

De la vie (politéia) de ceux qui ont renoncé au monde et de l’obéissance due au supérieur ; qu’ils doivent tout voir en commun et rien en propre ; et comment on doit procéder à l’égard des parents selon la chair

Chap. 8

Comment et à quelles heures on doit prier

Chap. 9
 

S’il est permis au moine de quitter le monastère et la communauté, et pour quelles raisons

Chap. 10

Si on doit recevoir ceux qui sont partis d’un autre monastère

Chap. 11

Comment on doit corriger le supérieur soupçonné de péché

Chap. 12
 
 

Qui doivent être ceux qui sont chargés du cellier et des autres offices du monastère ; et quel soin ils doivent avoir envers les biens qui leur sont confiés

Chap. 13

Des frères malades, et s’il est permis de leur porter des soins médicaux

Chap. 14

Des vêtements et de la nourriture qui conviennent aux moines

Chap. 15

Si on doit travailler de ses propres mains, et quel travail faire

Chap. 16

De ceux qui ne se rendent pas ponctuellement à la table des repas

Chap. 17

Des lectures que l’on doit faire à table, et comment on doit les écouter

Chap. 18
 

Du silence qu’on doit observer non seulement pendant la prière mais aussi en toute autre occasion

Chap. 19
 

Qu’il doit y avoir dans le monastère, avec l’higoumène, un moine qui le seconde dans le même lieu

Chap. 20
 

À quels moines on peut permettre des voyages lointains, et comment, au retour, on doit les soumettre à un examen

Chap. 21
 
 

De la charité qui doit exister entre les moines ; et qu’il n’est pas permis, dans les communautés monastiques, de composer des petits groupes (hétairia) de deux ou trois moines

Chap. 22

S’il est permis à tous de faire l’aumône

Chap. 23

Peines (épitimies) contre ceux qui fautent, selon leurs péchés

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Notes

1 P. McNulty et B. Hamilton, « Orientale lumen et magistra latinitas: Greek Influences on Western Monasticism, 900–1100 », dans Le Millénaire du Mont Athos (963-1963), Actes du colloque de Venise (3-6 septembre 1963), Rome, Éditions de Chevetogne, 1963-1964, vol. I, p. 181-216.

2 La règle de saint Benoît, éd., trad. et commentaire de A. de Vogüé et J. Neufville, 6 vol., Paris, Cerf, coll. « Sources chrétiennes, 181-186 », 1971-1972, ici « Sources chrétiennes, 182 », p. 673-674 : « Mais pour celui qui se hâte vers la perfection de la vie religieuse, il est des enseignements des saints Pères dont l’observation conduit l’homme jusqu’aux cimes de la perfection. Quelle est en effet la page, quelle est la parole ayant Dieu pour auteur, dans l’Ancien et le Nouveau Testament, qui ne soit une norme parfaitement droite pour la vie humaine ? Quel est le livre des saints Pères catholiques qui ne nous fasse entendre comment courir tout droit jusqu’à ce que nous parvenions à notre créateur ? Et encore les Conférences des Pères et leurs Institutions et leurs Vies, ainsi que la Règle de notre saint Père Basile, que sont-elles d’autre que les instruments des vertus pour les moines de bonne conduite et obéissants ? »

3 À ce sujet on mentionnera la journée d’études qui s’est tenue à l’École française de Rome le 3 novembre 2015, organisée par Olivier Delouis et moi-même, sur le sujet, et qui doit aboutir à la publication, à bref délai, d’un livre de référence : De Basile aux Basiliens. La postérité monastique d’un Père grec en Orient et en Occident (du Moyen Âge à l’époque contemporaine). Le programme est accessible sur <www.efrome.it/fileadmin/res/PDF_Flyers_Affiches_Programmes/Moyen_Age/3Prog_Basile_aux_Basiliens.pdf>.

4 Voir la carte 1 intitulée « Political Map of Southern Italy at the Beginning of the 11th Century (before the Norman Conquest) » [Carte politique de l’Italie du Sud au début du xie siècle (avant la conquête normande)].

5 Sur ce sujet on se permet de renvoyer à A. Peters-Custot, Les Grecs de l’Italie méridionale post-byzantine. Une acculturation en douceur (ixe-xive siècles), Rome, École française de Rome, « Collection de l’École française de Rome, 420 », 2009, ainsi qu’à la synthèse très récente de Jean-Marie Martin, « Évêchés et monastères “grecs” en Italie méridionale au Moyen Âge (viie-xiiie siècle) », Revue Mabillon, vol. 27, 2016, p. 5-22.

6 Au sujet de la politique ecclésiastique des souverains normands, en général, on renverra à : A. Peters-Custot, Bruno en Calabre. Histoire d’une fondation monastique dans l’Italie normande : S. Maria de Turri et S. Stefano del Bosco, Rome, École française de Rome, « Collection de l’École française de Rome, 489 », 2014, notamment p. 44-50.

7 Le souverain Hauteville se conçoit effectivement comme le chef de son Église. Voir S. Fodale, Comes et Legatus Siciliae. Sul privilegio di Urbano II e la pretesa Apostolica Legazia dei Normanni di Sicilia, Palerme, Manfredi Editore, « Università di Palermo. Istituto di Storia medioevale. Studi, 2 », 1970, rééd. dans Id., L’Apostolica Legazia e altri studi su Stato e Chiesa, Messine, Sicania, coll. « Historica », 1991 ; ainsi que A. Peters-Custot, « Cultural Policy and Political Ideology: How Imperial Was the Norman Realm of Sicily? », dans Y. Stouraitis (éd.), Ideologies and Identities in the Medieval Byzantine World, Proceedings of the International Conferene in Vienna (16-17 avril 2015), sous presse.

8 A. Peters-Custot, Les Grecs de l’Italie méridionale, ouvr. cité, p. 542-545.

9 A. Peters-Custot, « … Et saint Basile en Occident », dans S. Excoffon, D.-O. Hurel et A. Peters-Custot (dir.), Interactions, emprunts, confrontations chez les religieux (Antiquité tardive-fin du xixe siècle), Actes du VIIIe colloque international du CERCOR [Célébration du trentenaire] (Saint-Étienne, 24-26 octobre 2012), Saint-Étienne, Presses universitaires de Saint-Étienne, « Travaux du CERCOR », 2015, p. 93-112.

10 Soit le monachisme de l’Empire latin d’Orient et le monachisme italo-grec et siculo-grec.

11 H. Enzensberger, « Der Ordo Sancti Basilii, eine monastische Gliederung der römischen Kirche (12.-16. Jahrhundert) », dans La Chiesa greca in Italia dall’VIII al XVI secolo, Atti del convegno storico interecclesiale (Bari, 30 avril-4 mai 1969), Padoue, « Italia Sacra, studi e documenti di storia ecclesiastica, 22 », 1973, p. 1139-1151 ; plus récemment, A. Peters-Custot, Les Grecs de l’Italie méridionale, ouvr. cité, p. 458-472.

12 Au sujet des ordres religieux occidentaux et de leur déploiement médiéval, la bibliographie est presque infinie. Je renverrai notamment aux travaux dirigés par Gert Melville et le « groupe de Dresde » sur le sujet : G. Melville et F. Cygler, « Nouvelles approches historiographiques des ordres religieux en Allemagne. Le groupe de recherche de Dresde sur les structures institutionnelles des ordres religieux au Moyen Âge », Revue Mabillon, vol. 12, 2001, p. 314-321. On tirera également grand profit de la lecture de C. Caby, « Fondation et naissance des ordres religieux. Remarques pour une étude comparée des ordres religieux au Moyen Âge », dans G. Melville et A. Müller (éd.), Mittelalterliche Orden und Klöster im Vergleich. Methodische Ansätze und Perspektiven, Münster, LIT Verlag, « Vita Regularis. Ordnungen und Deutungen religiosen Lebens im Mittelalter. Abhandlungen, 34 », 2007, p. 115-137 et Ead., « De l’abbaye à l’ordre. Écriture des origines et institutionnalisation des expériences monastiques, xie-xiie siècle », dans C. Caby (dir.), La mémoire des origines dans les institutions médiévales, Mélanges de l’École française de Rome. Moyen Âge, t. 115, no 1, 2003, p. 133-479), p. 235-267. Voir également les abondants travaux de Florent Cygler et notamment F. Cygler, Das Generalkapitel im hohen Mittelalter. Cisterzienser, Prämontratenser, Kartäuser und Cluniazenser, Münster, Hambourg, Londres, LIT Verlag, « Vita Regularis. Abhandlungen, 12 », 2002 ; Id., « Caractères et contenus de la communication au sein des ordres religieux au Moyen Âge : les transferts internes d’informations », dans C. Andenna, K. Herbers et G. Melville (éd.), Die Ordnung der Kommunikation und die Kommunikation der Ordnungen (2 vol.), vol. I : Netzwerke: Klöster und Orden im Europa des 12. und 13. Jahrhunderts, Stuttgart, Franz Steiner Verlag, « Aurora. Schriften der Villa Vigoni, 1/1 », p. 77-90.

13 A. Peters-Custot, Les Grecs de l’Italie méridionale, ouvr. cité, p. 569-575.

14 Ibid., p. 585-587.

15 C’est-à-dire au moment même où la chancellerie pontificale commence tout juste à parler de « règle » et « d’ordre » de saint Basile pour les monastères italo-grecs. On ne connaît cette visite que par la lettre pontificale qui la décide : P. Pressutti (éd.), Regesta Honorii Papae III, 2 vol., Rome, Typographia Vaticana, 1888-1895, vol. 1, p. 547, no 3367, 10 mai 1221. Le pape charge alors l’évêque (grec) de Crotone et l’abbé (grec) de S. Maria di Grottaferrata de visiter les monastères grecs de Terre de Labour, Pouille et Calabre.

16 A. Guillou et M.-H. Laurent, Le « Liber Visitationis » d’Athanase Chalkéopoulos (1457-1458). Contribution à l’histoire du monachisme grec en Italie méridionale, Cité du Vatican, Biblioteca apostolica vaticana, « Studi e testi, 206 », 1960, p. xxxv.

17 Là encore la bibliographie sur le cardinal Bessarion est infinie et sans cesse renouvelée. Outre la notice biographique très précieuse réalisée par Lotte Labowsky pour le Dizionario biografico degli Italiani, vol. 9 (1967), désormais accessible en ligne (<www.treccani.it/enciclopedia/bessarione_(Dizionario-Biografico)/>), on mentionnera deux récents colloques : „Inter graecos latinissimus, inter latinos graecissimus“: Bessarion zwischen den Kulturen (Munich, 15-17 juillet, 2011), éd. C. Märtl, C. Kaiser et T. Ricklin, Berlin, Boston, De Gruyter, 2013 ; ainsi que Bessarione e la sua Accademia, Atti del Convegno internazionale di Roma, éd. A. Gutkowski et E. Prinzivalli, Rome, Miscellanea Francescana, « Bessarione, Quaderni, 12 », 2012. Enfin, une récente biographie — dont certains détails sont sujets à débat : G. L. Coluccia, Basilio Bessarione: Lo spirito greco e l’Occidente, Florence, Accademia delle Arti del Disegno, coll. « Monografie, 15 », 2009, et un recueil d’articles d’une grande spécialiste de Bessarion, Concetta Bianca : C. Bianca, Da Bisanzio a Roma: Studi sul cardinale Bessarione, Rome, Roma nel Rinascimento, 1999.

18 Les détails qui suivent sont largement tributaires de l’introduction au livre de Guillou et Laurent, Le « Liber Visitationis » d’Athanase Chalkéopoulos, ouvr. cité, p. xxxvi-xxxvii.

19 Il est probablement prévu de constituer ces régions comme les trois provinces de l’ordre nouveau-né.

20 On trouvera une réédition de ce court texte dans Guillou et Laurent, Le « Liber Visitationis » d’Athanase Chalkéopoulos, ouvr. cité, p. 285-291.

21 Ibid., p. xxxvii et note 5.

22 Les exigences linguistiques chutent progressivement, ce dont témoigne l’évolution du texte. Cette dernière laisse à penser que la rédaction finale du procès-verbal fut élaborée à partir d’un premier jet composé au fur et à mesure de la visite, chaque soir.

23 L’appellation de « cardinal de Nicée » est issue de la « contraction » de deux fonctions successives de Bessarion, d’abord fait métropolite de Nicée en 1437, puis, au 18 décembre 1439, nommé cardinal au titre des Saints-Apôtres.

24 Le compte rendu de la visite de 1457 donne une bonne idée de la langue vernaculaire pratiquée dans la Calabre du milieu du xve siècle, puisque les témoignages oraux des personnes interrogées par les deux visiteurs, en 1457-1458, sont parfois reportés tels quels, c’est-à-dire en calabrais. Certains de ces passages sont particulièrement savoureux, en particulier les vives protestations du frère Joachim du monastère de San Giovanni a Piro, à propos du cardinal Bessarion, qui tenait ce monastère : « À propos des cinq frères du monastère, nous avons perçu leur louable réputation et nous avons trouvé qu’ils agissaient convenablement, à l’exception du frère Joachim qui, de manière intempestive, osa dire du mal de messire le Cardinal, en disant [je reproduis ici le texte en calabrais, afin qu’on en goûte toute la saveur] : “Questi Grechi non se sa si su christiani oy turchi, perchè lo patriarcha de Constantinopoli non pò fare episcopi ne previteri, et non essendu previteri non potù baptizare et non potendu baptizare non ve pò essere nullu veru christianu” ; et il ajouta : “Stamu incappati in manu di questi Grechi, chi su venuto da lo Levante et non sapiamu si su christiani oy turchi, chi ne facu andare sperti, et lo cardinale volce esser electu papa, poy li cardinali dixero: Volimu fare questu papa, chi non sapimu si è christianu” […]. » (Guillou et Laurent, Le « Liber Visitationis » d’Athanase Chalkéopoulos, ouvr. cité, p. 160.) Au-delà de la saute d’humeur éruptive presque comique se révèlent une étonnante méfiance de ces moines « basiliens » calabrais à l’égard des Byzantins, ainsi qu’une bonne connaissance des réalités de la cour papale puisque, effectivement, Bessarion n’est pas passé loin d’un destin pontifical.

25 La visite de 1457 n’évoque jamais, dans les bibliothèques des monastères visités, la présence d’un typikon de fondation.

26 Guillou et Laurent, Le « Liber Visitationis » d’Athanase Chalkéopoulos, ouvr. cité, p. 287, l. 11-14 : « Parimente statuimo et ordinamo et espressamente commandiamo che si dirà l’officio secondo l’uso et costume della nostra religione di Santo Basilio, in quanto stando li monaci nella chiesa, nel choro, con ogni riverenza del Signore et modestia di costumi. » On peut se demander si l’expression de « religione di Santo Basilio », relative aux usages liturgiques, n’est pas une allusion à la liturgie de saint Basile, plus qu’à l’Asketikon basilien.

27 Ibid., p. 288, l. 1-4 : « Item statuimo et ordinamo che all’hora quando mangiano li monaci, ad hora deputata, si leggi per uno di loro della Bibbia o della regula di Santo Basilio, overo leggere di Santi Padri […]. »

28 Ibid., p. 30, l. 37.

29 Le manuscrit Bibl. univers. grec. 113.

30 Ce manuscrit, autrefois catalogué sous la cote Bibl. Nacional grec. 105, est désormais référencé sous la cote Matritensis 4644.

31 On dispose également d’une version espagnole tardive et qui n’a rien à voir avec Bessarion, et qui fut publiée au début du xviie siècle. Voir la conclusion de cette contribution.

32 Cette publication est probablement liée à la fondation de la congrégation basilienne, qu’elle suit de peu (1573). À ce sujet on peut se reporter au toujours très pertinent article de C. Korolevskij, « Basiliens italo-grecs et espagnols », dans Dictionnaire d’histoire et de géographie ecclésiastiques, t. VI, Paris, col. 1180-1236.

33 De toutes les bibliothèques italiennes et françaises qui possèdent un exemplaire recensé de l’édition de la règle de Bessarion, seul un exemplaire, à la Vaticane, comprend la version grecque. Les autres ouvrages ne présentent que la version latine ou bilingue latin/italien.

34 J. Gribomont, Histoire du texte des Ascétiques de saint Basile, Louvain, Presses universitaires de Louvain, coll. « Bibliothèque du Muséon, 32 », 1953 et P. J. Fedwick, Bibliotheca Basiliana Universalis: A Study of the Manuscript Tradition, Translations and Editions of the Works of Basil of Caesarea, vol. III : The Ascetica and Contra Eunomium, Turnhout, Brepols, 1997. Fedwick a contesté ou nuancé certains regroupements de versions, ou certaines dénominations de versions élaborées par Gribomont. Toutefois, ces corrections ne portent pas sur les versions principales détenues par Bessarion ; donc, pour plus de simplicité, je garderai les catégories de Gribomont.

35 On distingue Petites Règles et Grandes Règles, on ajoute des éléments aux règles anciennes, on ajoute de nouvelles règles (les Grandes Règles 24-55), ainsi que de nouvelles Petites Règles. Diverses pièces de statuts très différents s’insèrent également : homélies, discours, prologues, lettres, etc., ainsi que les Constitutions ascétiques (ou Constitutions monastiques). Les recensions diverses de ce grand fourre-tout qu’on appelle Asketikon font varier les choix de textes et/ou leur succession dans les manuscrits, ce qu’ont très bien mis en lumière Gribomont puis Fedwick (cités note 34). Il n’existe donc pas un Asketikon de saint Basile, mais plusieurs, conçus distinctement, et dont certains éléments ne sont pas de Basile le Grand.

36 Ce qu’exprime en particulier le préambule de Rufin à sa traduction latine du Petit Asketikon grec : « […] mais tu as demandé à connaître quelle était là-bas l’observance — qui est la force de l’âme — des serviteurs de Dieu, quelles institutions [instituta] ils suivaient. Et moi […] je t’ai exposé les institutions ([instituta] pour les moines du saint évêque Basile, homme fameux par la foi comme par les œuvres, et par toute la sainteté […]. » (K. Zelzer (éd.), Basilii Regula a Rufino Latine versa, Vienne, Hoelder-Pichler-Tempsky, coll. « Corpus Scriptorum Ecclesiasticorum Latinorum, 86 », 1986, p. 3-4.) Rufin n’a donc aucun doute dans la paternité basilienne des recommandations ascétiques qu’il traduit du grec.

37 On a déjà mentionné le chapitre 73 de la règle de saint Benoît. Dans sa préface aux Institutions cénobitiques, rédigées vers 430, Jean Cassien évoque lui aussi les institutions monastiques de saint Basile (J. Cassien, Institutions cénobitiques, éd. et trad. J.-C. Guy, Paris, Cerf, coll. « Sources chrétiennes, 109 », 2001, préface, p. 26-27).

38 Je renvoie à la contribution d’Olivier Delouis à la journée d’études De Basile aux Basiliens (cf supra note 3) : « Les moines byzantins sont-ils basiliens ? Entre choses et mots à Byzance (viiie-xve s.) ».

39 Bibliothèque de la Marcienne, fondo antico, nos 62, 63, 64, 65. J’ai pu consulter ces manuscrits grâce aux versions microfilms dont dispose la Biblioteca nazionale de Castro Pretorio, à Rome : le no 62 est, d’après Gribomont (Histoire, ouvr. cité, p. 17), un manuscrit du xiie siècle qui a appartenu à un monastère dédié à saint Jean-Baptiste. Fedwick expose que ce manuscrit a appartenu au monastère de Prodromou-Petra de Constantinople, et au monastère de Mursinos des Akoimètes, au Mont Latros. Ce manuscrit relève de la recension que Gribomont appelle « vulgate », famille « vulgate-séquence », car il comprend un appendice que Gribomont a nommé « séquence » et qui, pour Fedwick, est composé de pièces additionnelles douteuses ou spuria. Ce manuscrit contient toutes les Petites Règles, mais il lui manque la quasi-totalité des Grandes Règles : il ne comprend en effet que les Grandes Règles 13, 14, 17, 18, 23, 25, 39, 40, 41, 42, 44, 45, 47, 54. Le no 63, manuscrit des xie-xiie siècles, comprend deux volumes assemblés : le premier est du xie siècle (fos 1-16), puis suit un texte acéphale du xiie siècle, qui fut lui acheté en 1210 par un prêtre de la métropole de Nicée. Il relève de la recension que Gribomont nomme « vulgate contaminée ». Le second volume (celui qui fut acheté en 1210 pour Nicée) contient notamment les Grandes Règles, seulement deux folios de Petites Règles, et les épitimies (Pénitientiel) 24 et 25. Le no 65, probablement du xie siècle, relève aussi de la recension « vulgate », famille « Vb ». Enfin, le plus intéressant, le no 64 : ce manuscrit, copié en 1112, relève d’un type particulier de la recension « Nil » (la rencension propre à l’Italie méridionale et la Sicile), un type abrégé (on le notera donc Na), qui n’apparaît qu’au xiie siècle (donc dans le royaume Hauteville de Sicile). Cette version comprend un choix de Grandes Règles et de Petites Règles dans un corpus très particulier. C’est un mélange de la recension « Nil », traditionnelle en Italie méridionale, et de la recension « vulgate », qu’on commence à copier également au début du xiie siècle dans les milieux monastiques italo-grecs, au cours de ce qu’on a appelé la « renaissance culturelle grecque » à l’époque des Hauteville, et qui constitue un moment clef pendant lequel les milieux italo-grecs reprennent contact avec la tradition byzantine.

40 Ce qui ne signifie pas que seul le manuscrit Na soit d’origine italo-grecque : s’il existe une corrélation entière entre manuscrits italo-grecs et recension « Nil » entre ixe et xie siècle, en revanche, cette corrélation disparaît au xiie siècle, précisément avec la « renaissance italo-grecque » à l’époque normande. Gribomont a en particulier relevé l’existence d’un manuscrit de la recension vulgate-séquence (pontique), copié en 1131 au Saint-Sauveur de Bordonaro, et transféré ensuite au Saint-Sauveur de Messine, témoin du renouveau de l’influence byzantine en Italie méridionale et en Sicile à l’époque normande. Toutefois, le no 62 paraît d’origine byzantine, et le no 65 est un peu ancien pour être un manuscrit italo-grec de la recension vulgate. Quant au no 63 (deuxième partie), Bessarion a pu se le procurer à Nicée.

41 J’ai démontré quels étaient les manuscrits utilisés par Bessarion pour composer sa règle abrégée dans ma contribution intitulée « Bessarion’s Monastic Rule, the Modalities of the Text’s Redaction, and Its Impact on the Italian-Greek “Basilian” Monasteries » présentée au colloque international Editing, Translating and Interpreting Bessarion’s Literary Heritage, organisé par Sergei Mariev à Venise, les 4 et 5 avril 2014 (publication prochaine).

42 Voir la table des chapitres en annexe de cet article.

43 C’est le premier sermon de Basile sur la renonciation à la vie séculière et la perfection spirituelle.

44 Surtout dans son traité destiné Aux jeunes gens sur la manière de tirer profit des lettres helléniques : on en trouvera une introduction accessible dans M. Sartre, Histoires grecques, Paris, Seuil, 2006, chap. 42, « Du bon usage des lettres helléniques, ou comment être chrétien et cultivé », p. 427-435.

45 Cet élément rappelle la valorisation, par Benoît, dans son chapitre 73, de la règle de saint Basile comme destinée aux moines d’élite, aux experts : peut-être était-ce précisément en raison de la haute tenue des réflexions philosophique de Basile que Benoît tenait l’Asketikon pour une norme d’élite : en lui faisant perdre cette teneur, Bessarion ôtait aux conseils ascétiques basiliens ce pour quoi ils faisaient l’admiration de Benoît. N’est-ce pas pour rapprocher son éklogè de la règle de saint Benoît ?

46 Ainsi, le chapitre 6 de la règle de Bessarion sur la réception des nouveaux moines et l’éducation des jeunes est traité par Benoît dans les chapitres 2, 30, 58 et suivants.

47 Cf. le passage cité supra en note 2, dont la citation se poursuit ainsi : « Mais pour nous qui sommes paresseux, de mauvaise conduite et négligents, il y a de quoi rougir de confusion. Toi donc, qui que tu sois, qui te hâtes vers la patrie céleste, accomplis avec l’aide du Christ cette toute petite règle pour débutants que nous avons fini d’écrire ; et alors seulement tu parviendras, grâce à la protection de Dieu, à ces sommets plus élevés de doctrine et de vertus que nous venons de mentionner. Amen » (La règle de saint Benoît, ouvr. cité, p. 673-674.)

48 ΣΥΝΤΟΜΟΣ ΕΚΛΟΓΗ ΤΩΝ ΑΣΚΗΤΙΚΩΝ ΔΙΑΤΑΧΕΩΝ ΤΟΥ ΕΝ ΑΓΙΟΙΣ ΠΑΤΡΟΣ ΗΜΩΝ Βασιλείου τῶ μεγάλου, πᾶσι τοῖς τὸν ἀσκητικὸν Βίον ἑλαμένοις πάνυ ὠφέλιμος / Breue raccolto delle constitutioni monastiche di santo Basilio Magno, molto vtile a tutti quelli che hanno eletto di fare vita monastica, ed. in Roma per Francesco Zanetti, 1578, p. 3 de la partie grecque — l’édition étant faite de deux cahiers successifs, le premier portant le texte grec, le second le texte latin, avec deux paginations indépendantes : « Comme ceux qui suivent la vie monastique selon ses lois ascétiques [= celles de Basile le Grand] et selon ses canons, surtout ceux qui, dans toute l’Italie et en Sicile, sont dans l’ignorance de la langue grecque, étant pour la plupart Latins et fils de Latins […] » (« τινὲς τῶν τὸν μοναδικὸν βίον ἀνειλημμένων καὶ μάλιστα τῶν ἐν Ἰταλίᾳ πάσῃ καὶ Σικελίᾳ τοῖς ἀσκητικοῖς αὐτοῦ νόμοις τε καὶ κανόσιν ἀκολουθεῖν ᾑρημένων, τῇ τῆς ἑλληνικῆς γλώττης ἀγνοίᾳ, Λατῖνοι αὐτῶν ὄντες οἱ πλείους. καὶ παῖδες Λατίνων […] »). La traduction du grec est mienne.

49 Ibid., p. 5 de la partie italienne.

50 Cette version fut successivement publiée à Séville en 1615, puis à Madrid en 1664, 1669, 1736 et 1749. Voir J. Iriarte, Regiae Bibliothecae Matritensis codices graeci mss, Madrid, E typographia Antonii Perez de Soto, 1769, p. 410-425, ici p. 413.

51 Je renverrai là encore à la journée d’études citée supra note 3 (De Basile aux Basiliens), et à la contribution d’Antoine Roullet : A. Roullet : « Une tradition introuvable : la difficile unification des basiliens espagnols ».

52 On se permet de renvoyer à nouveau à la journée d’études intitulée De Basile aux Basiliens (voir note 3) et aux contributions de Laurent Tatarenko, Sabine Saliba et Aurélien Girard.

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Table des illustrations

Titre Carte 1. – Political Map of Southern Italy at the Beginning of the 11th Century (before the Norman Conquest).
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Pour citer cet article

Référence électronique

Annick Peters-Custot, « Bessarion et le monachisme italo-grec : l’Orient en Italie du Sud ? »Cahiers d’études italiennes [En ligne], 25 | 2017, mis en ligne le 10 octobre 2017, consulté le 10 décembre 2024. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/cei/3616 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/cei.3616

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Auteur

Annick Peters-Custot

Université de Nantes, CRHIA, EA 1163

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Droits d’auteur

Le texte et les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés), sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.

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