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Antiquité romaine : le roman fiction vraisemblable ou source scientifique ?

Les Métamorphoses d’Apulée : entre mondes grec et romain, un document pour l’historien ?

Apuleius’ Metamorphoses: A Document for Historians, between Greek and Roman Worlds?
Le Metamorfosi di Apuleio: tra mondi greco e romano, un documento per la Storia?
Anne-Florence Baroni et Marie-Adeline Le Guennec

Résumés

En raison des realia qui en apparence émaillent le texte, la tentation est grande pour l’historien d’admettre les Métamorphoses d’Apulée au nombre des sources de l’histoire de l’Empire romain au iie siècle apr. J.‑C. Cependant, ce « roman » en langue latine emprunte sa trame à un ouvrage grec antérieur et Apulée présente lui‑même son œuvre comme une « fable milésienne ». La difficulté à distinguer dans le récit les apports d’Apulée par rapport à l’original, comme la volonté affichée de divertir le lecteur, invitent à considérer avec prudence les éventuelles informations historiques contenues dans l’œuvre. Toutefois, le texte apuléien peut être confirmé au cas par cas par des sources primaires, comme l’illustrent trois exemples, les scènes d’auberge au livre I et deux cas consécutifs d’abus de pouvoir au livre IX.

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Texte intégral

  • 1 On ne reviendra pas ici sur la question de savoir si l’Antiquité, hellénophone autant que latine, a (...)
  • 2 Apulée, Apologie, 24. La bibliographie sur Apulée et son œuvre est bien entendu innombrable : on en (...)

1Les Métamorphoses d’Apulée constituent, avec le Satiricon de Pétrone, l’un des seuls textes de l’Antiquité romaine qui puissent être considérés comme relevant du genre romanesque, ou à tout le moins de ses prémices1. Également connu sous le titre L’Âne d’or, ce roman, ou, pour échapper à l’accusation d’anachronisme, ce récit en prose à caractère romanesque, a été rédigé en latin dans le courant du iie siècle apr. J.‑C. par L. Apuleius, issu de l’élite municipale de Madaure, petite cité de la province d’Afrique2.

  • 3 Apulée, Métamorphoses, I, 2.
  • 4 Sur la réputation sulfureuse de la Thessalie, et surtout des Thessaliennes, dans l’Antiquité grecqu (...)
  • 5 Apulée, Métamorphoses, II, 1‑2.
  • 6 Ibid., I, 21‑23.
  • 7 Ibid., II, 7‑10, 16‑17.
  • 8 Ibid., III, 15.
  • 9 Ibid., III, 21‑22.
  • 10 Ibid., III, 24‑25.
  • 11 Ibid., III, 25‑26.
  • 12 Ibid., III, 28.
  • 13 Ibid., XI, 13.
  • 14 Ibid., XI, 19‑30.
  • 15 Ibid., I, 5‑21.
  • 16 Ibid., II, 21‑30.
  • 17 Ibid., IX, 5‑7.
  • 18 Voir par exemple, au sein d’une abondante bibliographie, Aspects of Apuleius’ Golden Ass, vol. II :(...)

2Le récit a pour trame principale les (més)aventures du jeune Lucius, fils de bonne famille qui profite d’un voyage d’affaires en Thessalie3, terre de sorcellerie4, pour assouvir sa soif d’aventures et son goût pour l’occulte5. Parvenu à Hypata, Lucius élit domicile chez son hôte, le grigou Milon6, dont il séduit la jeune servante, Photis7. Cette dernière lui apprend que Pamphile, l’épouse de Milon, pratique les arts magiques8. Aiguillonné par la curiosité, Lucius assiste, dissimulé, à la transformation nocturne de Pamphile en grand‑duc et à son envol9. Brûlant de faire de même, il s’enduit d’onguent magique ; hélas, à la suite d’une erreur de mixture, voilà Lucius transformé, non en hibou, mais en âne10. Il n’en conserve pas moins sinon la parole, du moins conscience humaine, et apprend de Photis qu’il lui suffit de manger des roses pour redevenir homme11. Mais alors que Lucius se trouve sur le point de croquer une guirlande de ces fleurs ornant une statue de la déesse Épone, des brigands mettent à sac la maison de Milon et font main basse sur l’écurie12. Et voilà Lucius, l’homme transformé en âne, emporté dans une folle cavale à travers la Grèce, passant de maître en maître et collectionnant les déboires et les rossées en règle : et toujours les roses, prêtes à être dégustées, se dérobent à lui. Cette quête prend fin au livre XI grâce à l’intervention de la déesse Isis, qui présente à Lucius les fleurs si longtemps et vainement cherchées13. Ayant retrouvé forme humaine, Lucius se repent de sa curiosité et de son attirance pour les fausses croyances ; après avoir été initié aux mystères isiaques, il part pour Rome où il se consacre au culte de la déesse et à celui d’Osiris14. De nombreux récits secondaires sont enchâssés dans cette intrigue rocambolesque : les plus célèbres sont sans doute l’histoire du marchand ambulant Aristomène au livre I, qui narre l’assassinat de son camarade Socrate par la sorcière Meroé15, une seconde histoire de sorcière, celle de Télyphron, au livre II16, la fable comique du pauvre cocu17 ou encore, bien sûr, le conte de Cupidon et Psyché, qui occupe à lui seul près de trois livres de l’ouvrage (IV, 28 à VI, 25) et qui constitue sans doute l’héritage le plus fameux des Métamorphoses18.

  • 19 Apulée, Métamorphoses, X, 13‑17.
  • 20 Ibid., IX, 10‑31.
  • 21 Ibid., III, 28–VII, 13.
  • 22 Ibid., VIII, 24–IX, 10.
  • 23 Ibid., IX, 39–X, 13.
  • 24 F. Millar, « The World of the Golden Ass », The Journal of Roman Studies, vol. 71, 1981, p. 63‑75.
  • 25 Cf. les réflexions de Sandra Rae Joshel et Lauren Hackworth Petersen au sujet de l’invisibilité arc (...)
  • 26 X. Colin, « Commerçants itinérants et marchands sédentaires dans l’Occident romain », dans E. Lo Ca (...)
  • 27 M. Flohr, The World of the Fullo: Work, Economy, and Society in Roman Italy, Oxford, Oxford Univers (...)
  • 28 A. Daguet-Gagey, Splendor aedilitatum : l’édilité à Rome (ier s. avant J.‑C. – iiie s. après J.‑C.)(...)
  • 29 Ibid., p. 125 : « On vit, dans la formule ex imperio aedilium curulium, un écho au passage bien con (...)
  • 30 « La seconde [mention] apparaît dans les Métamorphoses d’Apulée, quand l’âne est vendu à deux escla (...)
  • 31 M.‑A. Le Guennec, Aubergistes et clients. L’accueil mercantile dans l’Occident romain (iiie s. av. (...)

3Au cours de ses pérégrinations, Lucius est amené à croiser les personnages les plus variés, souvent issus des milieux populaires des villes, des campagnes et des routes : esclaves cuisiniers19, cruels meuniers20, brigands de grand chemin21, prêtres mendiants de la Dea Syria22, soldats corrompus23, qui sont donnés à voir au lecteur dans leur quotidien familial et professionnel. Les spécialistes de l’Antiquité romaine ont été à bon droit tentés, à la suite de Fergus Millar dans son célèbre article, « The World of the Golden Ass24 », de traiter les Métamorphoses d’Apulée en document pour l’histoire économique et sociale du monde romain — un document d’autant plus précieux qu’il nous ferait entrer dans des sphères de la société pour lesquelles les sources de la pratique manquent parfois : les détails que semble nous fournir le texte, dans ses scènes de genre croquées sur le vif, sont souvent rares, voire uniques. Les historiens utilisent dès lors volontiers les realia empruntés à Apulée pour peupler et animer leurs restitutions des espaces de vie et de travail de la « plèbe ordinaire », que les vestiges archéologiques, pour leur part, nous restituent vidés de leurs occupants et comme figés par l’écoulement du temps25. Ainsi, pour le monde du petit commerce et de l’artisanat, et pour ne citer que quelques travaux récents, le récit des Métamorphoses a pu être mis à profit pour étudier le commerce itinérant26 ; l’industrie de la foulerie27 ; la vente aux enchères d’animaux28 ; la réglementation des marchés29 ; l’activité boulangère30 ; ou encore l’industrie hôtelière31. En outre, à la différence de leurs équivalents chez des auteurs comme Martial, Pétrone ou Juvénal, les saynètes racontées se situent en contexte provincial, et non à Rome ou dans les luxueuses stations balnéaires de Campanie ou du golfe de Tarente, offrant, au moins a priori, un regard sur les élites locales tout comme sur des milieux plus humbles.

  • 32 F. Dupont, Le plaisir et la loi : du Banquet de Platon au Satiricon, Paris, F. Maspero, « Texte à l (...)

4Cette approche réaliste du texte apuléien, sans être aucunement rejetée, demande toutefois à être mise préalablement en perspective, à l’exemple du traitement auquel a été soumis le Satiricon de Pétrone dans les années 197032. La prudence est en effet de mise avant d’adopter une lecture documentaire des Métamorphoses d’Apulée : c’est ce que nous nous proposons de mettre en lumière dans cet article. On s’intéressera d’abord à la genèse de la composition de l’œuvre, qui soulève la question du contexte culturel, grec, romain, africain romanisé ou méditerranéen au sens large, des épisodes relatés dans le texte ; trois exemples nous permettront ensuite d’illustrer le cheminement parsemé d’embûches qu’il faut affronter lorsque, pour aborder ce récit en document pour l’histoire du quotidien dans l’Empire romain au iie siècle apr. J.‑C., on tente de séparer le « bon grain historique » de l’« ivraie romanesque » dans les Métamorphoses. Cette contribution, rapprochée de celle que Marie-Claire Ferriès consacre au Satiricon de Pétrone dans ce même volume, revient ainsi sur les difficultés plus générales auxquelles se heurtent les antiquisants dans leur manipulation des romans et des textes littéraires, fictionnels ou non, notamment lorsque ceux‑ci constituent la source la plus riche d’informations à leur disposition, et non un document dont la véridicité pourrait être scrutée à la lumière de sources plus objectives.

1. Une fable à la grecque ?

  • 33 Gilbert-Charles Picard reconnaît ainsi dans l’histoire du riche propriétaire accapareur (Métamorpho (...)
  • 34 Ainsi Miko Flohr écrivait‑il par exemple au sujet de l’industrie de la foulerie à Pompéi au ier siè (...)

5Comme nous en faisions la remarque plus haut, de multiples travaux ayant trait à l’histoire sociale, économique ou politique du monde romain à l’époque impériale convoquent les Métamorphoses comme source ; ce faisant, ils considèrent le monde de Lucius comme le reflet, fidèle ou déformant, mais en tous cas vraisemblable, de l’environnement plus ou moins direct d’Apulée : que ce soit l’Afrique proconsulaire du iie siècle apr. J.‑C., patrie de l’auteur33, ou l’Empire romain en général — c’est-à-dire non seulement la Grèce dans laquelle s’ancre le récit, mais aussi, voire seulement, les provinces occidentales et l’Italie romaine34.

  • 35 Apulée, Métamorphoses, I, 1, 6. Sur cet énigmatique prologue, voir les différentes contributions ré (...)
  • 36 Voir M. Dubuisson, « Graecus, Graeculus, Graecari : l’emploi péjoratif du nom des Grecs en latin », (...)
  • 37 Cf. Varron, De la langue latine, X, 70.
  • 38 N. Fick, « Ville et campagne dans les Métamorphoses d’Apulée », Revue belge de philologie et d’hist (...)
  • 39 Contra par exemple J. Colin, « Apulée en Thessalie : fiction ou vérité ? (Métam., II, 21 sq. ; II,  (...)
  • 40 Notamment au droit romain : citons par exemple le clin d’œil malicieux à la lex Iulia de adulteriis (...)

6Le Prologue des Métamorphoses se conclut pourtant sur ces mots : Fabulam Graecanicam incipimus. Lector intende : laetaberis (« Nous commençons un conte à la mode grecque. Lecteur, concentre‑toi. Tu vas bien t’amuser ! »)35. Mais Graecanica n’est pas Graeca puisque l’adjectif, qui revêt souvent une inflexion péjorative36, désigne en latin un phénomène ou un mot transposé du grec37 : une histoire « à la sauce grecque ». N. Fick a par exemple pu montrer que d’un point de vue géographique, la Thessalie d’Apulée relève davantage des clichés antiques relatifs à la Grèce du Nord que de véritables réalités repérables sur le terrain38. Mais cette interprétation, pour autant que l’on y souscrive39, vaut‑elle pour tout le récit, dont l’arrière-plan grec ne serait qu’un décor de carton-pâte, et dont les personnages et actions pourraient être inspirées de l’expérience ou de la culture personnelles de l’auteur ? La plupart des études qui convoquent le texte pour faire l’histoire des réalités romaines au Haut-Empire répondent, au moins implicitement, par l’affirmative en pointant notamment les références typiquement romaines dont le texte fourmille40. On pourrait donc être tenté de glisser rapidement sur cette question du cadre géographique grec, qui ne serait qu’une convenance littéraire et qui n’aurait qu’une incidence minime sur la portée historique du récit. Toutefois, un extrait de la Bibliothèque de Photius, érudit et patriarche byzantin du ixe siècle, invite à aborder de front la question de la « grécité » des Métamorphoses : du fait des origines complexes de ce récit telles que nous les relate Photius, son lien à la Grèce, ou à tout le moins la Méditerranée hellénophone, pourrait être plus marqué, et l’auctorialité d’Apulée plus restreinte, qu’il n’y paraît de prime abord :

Ἀνεγνώσθη Λουκίου Πατρέως μεταμορφώσεων λόγοι διάφοροι. Ἔστι δὲ τὴν φράσιν σαφής τε καὶ καθαρὸς καὶ φίλος γλυκύτητος· φεύγων δὲ τὴν ἐν λόγοις καινοτομίαν, εἰς ὑπερβολὴν διώκει τὴν ἐν τοῖς διηγήμασι τερατείαν, καὶ ὡς ἄν τις εἴποι, ἄλλος ἐστὶ Λουκιανός.

Οἱ δέ γε πρῶτοι αὐτοῦ δύο λόγοι μόνον οὐ μετεγράφησαν Λουκίῳ ἐκ τοῦ Λουκιανοῦ λόγου ὃς ἐπιγέγραπται «Λοῦκις ἢ Ὄνος» ἢ ἐκ τῶν Λουκίου λόγων Λουκιανῷ. Ἔοικε δὲ μᾶλλον ὁ Λουκιανὸς μεταγράφοντι, ὅσον εἰκάζειν· τίς γὰρ χρόνῳ πρεσβύτερος, οὔπω ἔχομεν γνῶναι. Καὶ γὰρ ὥσπερ ἀπὸ πλάτους τῶν Λουκίου λόγων ὁ Λουκιανὸς ἀπολεπτύνας καὶ περιελὼν ὅσα μὴ ἐδόκει αὐτῷ πρὸς τὸν οἰκεῖον χρήσιμα σκοπόν, αὐταῖς τε λέξεσι καὶ συντάξεσιν εἰς ἕνα τὰ λοιπὰ συναρμόσας λόγον, «Λοῦκις ἢ Ὄνος» ἐπέγραψε τὸ ἐκεῖθεν ὑποσυληθέν.

  • 41 « Lu les Métamorphoses de Lucius de Patrae, ouvrage en plusieurs livres. Sa langue est claire, pure (...)

Γέμει δὲ ὁ ἑκατέρου λόγος πλασμάτων μὲν μυθικῶν, ἀρρητοποιΐας δὲ αἰσχρᾶς. Πλὴν ὁ μὲν Λουκιανὸς σκώπτων καὶ διασύρων τὴν Ἑλληνικὴν δεισιδαιμονίαν, ὥσπερ κἀν τοῖς ἄλλοις, καὶ τοῦτον συνέταττεν. Ὁ δὲ Λούκιος σπουδάζων τε καὶ πιστὰς νομίζων τὰς ἐξ ἀνθρώπων εἰς ἀλλήλους μεταμορφώσεις τάς τε ἐξ ἀλόγων εἰς ἀνθρώπους καὶ ἀνάπαλιν καὶ τὸν ἄλλον τῶν παλαιῶν μύθων ὕθλον καὶ φλήναφον, γραφῇ παρεδίδου ταῦτα καὶ συνύφαινεν41.

  • 42 H. J. Mason, « Greek and Latin Versions of the Ass-Story », dans W. Haase et H. Temporini (éds), Au (...)
  • 43 Pseudo-Lucien, Onos, 56.
  • 44 « Mon père est […] ; mon nom est Lucius, celui de mon frère Gaius […] Notre patrie est Patrae, en A (...)
  • 45 B. E. Perry, The Metamorphoses Ascribed to Lucius of Patrae, Its Content, Nature and Authorship, La (...)
  • 46 H. van Thiel (éd.), Abenteuer eines Esels, oder, Die Verwandlungen des Lukios. Der griechische Esel (...)
  • 47 E. Cocchia, Romanzo e realtà nella vita e nell’attività letteraria di Lucio Apuleio, Catane, F. Bat (...)
  • 48 Pour un bilan plus détaillé des hypothèses en présence, voir H. J. Mason, « Greek and Latin Version (...)

7Selon Photius, le ou les récits originels des Métamorphoses, dont Apulée se serait inspiré pour sa propre composition, auraient donc vu le jour dans un contexte hellénophone, et même résolument oriental, puisque l’érudit en assigne une des versions à Lucien de Samosate, rhéteur du iie siècle apr. J.‑C. originaire de la province romaine de Syrie. De fait, on trouve bien dans les manuscrits de cet auteur un bref Λουκίος ἢ Ὄνος en un livre : l’attribution à Lucien se révèle néanmoins fautive42. La trame générale du récit ainsi désigné est similaire à celle des Métamorphoses d’Apulée. Font toutefois défaut les histoires secondaires et la fin en est différente : à l’épiphanie isiaque, l’Onos préfère en effet la pantalonnade bouffonne, lorsque Lucius, redevenu homme, est chassé par la matrone chez qui il avait trouvé refuge, faute de pouvoir lui rendre ses hommages avec la même vigueur que lorsqu’il était âne43. Pour autant, la notice de Photius invite à exclure que du Pseudo-Lucien et d’Apulée, l’un ait pu influencer directement l’autre. Les deux récits seraient en fait inspirés d’une troisième œuvre, de langue grecque, intitulée Metamorphoseis et aujourd’hui perdue, dont le Pseudo-Lucien aurait fait l’épitomé, le résumé, en en changeant le titre pour celui d’Onos. Toujours selon Photius, ces Métamorphoses grecques seraient l’œuvre d’un certain Lucius de Patrae, dont on n’aurait par ailleurs conservé aucune trace dans la tradition littéraire. Cette attribution doit être accueillie avec circonspection, dans la mesure où l’on apprend au paragraphe 55 de l’Onos que Lucius de Patrae n’est autre que le narrateur du récit : κἀγώ Πατὴρ μέν ἔφην […] ἔστι μοι Λούκιος τῷ δὲ ἀδελφῷ τᾡ ἐμῷ Γάϊος [...] πατρὶς δὲ ἡμῖν Πάτραι τῆς Ἀρχαΐας44. Il y a donc tout lieu de croire que l’assignation des Métamorphoses grecques à Lucius soit due à une confusion de Photius entre l’auteur de l’œuvre originelle et ce narrateur, à moins de supposer que l’érudit byzantin ne donne au texte une portée autobiographique, ce que ses commentaires sur la dimension fantaisiste et mythologique du récit semblent écarter. De nombreuses hypothèses ont dès lors pu être formulées quant à l’identité réelle de cet auteur des Metamorphoseis perdues, de Lucien de Samosate45 au rhéteur Hadrien de Tyr46, voire, plus étonnamment sans doute, à Apulée lui‑même47. Ce débat n’a pas obtenu de solution pleinement satisfaisante48 et ne nous occupera pas davantage ici.

  • 49 K. Bürger, De Lucio Patrensi, sive de Ratione inter Asinum Q. F. Lucianeum Apuleique Metamorphoses (...)
  • 50 Voir l’essai de Simon Swain, qui, empruntant aux catégories d’analyse de Jean Genette, parle à ce s (...)
  • 51 A. Mazzarino, La Milesia e Apuleio, Turin, Chiantore, 1950, p. 134.
  • 52 E. Fraenkel, Plautinisches im Plautus, Berlin, Weidmannsche Buchhandlung, « Philologische Untersuch (...)

8Si les identifications de ce mystérieux auteur ont pu varier, la plupart des critiques, depuis l’étude fondatrice de Karl Bürger49, s’accordent en revanche à faire des Metamorphoseis la source d’inspiration d’Apulée50. Toute la question est alors de savoir ce que contenaient ces Métamorphoses originelles, et ce qui peut a contrario être imputé, dans la version latine, à la verve créatrice d’Apulée, voire à la transposition en littérature du monde de l’auteur africain ; chercher, pour reprendre les mots d’Antonio Mazzarino, l’Apuleianità di Apuleio51, à la manière du Plautinisches im Plautus d’Eduard Fraenkel52. À terme, cette enquête visant à distinguer les traits originaux de l’œuvre des remaniements apuléiens et à identifier, sur cette base, les influences culturelles, grecques, orientales, occidentales, africaines ou autres du récit, contribuerait à valider ou au contraire à réfuter son usage comme source pour l’histoire de ces différents espaces. Tout autant que celle de son auteur et de son contexte de production, la recherche du noyau originel des Métamorphoses présente toutefois bien des incertitudes.

2. À la recherche de l’« Apuleianità » des Métamorphoses

  • 53 Apulée, Les Métamorphoses, D. S. Robertson et P. Vallette (éds), ouvr. cité, p. ix.
  • 54 « en me frappant avec ce fouet fait d’une chaîne d’osselets » (Apulée, Métamorphoses, VIII, 30, 2).

9Dans cette perspective, les seuls passages pour lesquels on peut raisonner avec suffisamment d’assurance sont ceux de l’Onos du Pseudo-Lucien qui présentent, pour citer P. Vallette dans son édition des Métamorphoses d’Apulée, « de menues incohérences, des trous, qui peuvent échapper à la simple lecture, mais qui se dénoncent, par le rapprochement avec Apulée, comme provenant de suppressions dont l’auteur a omis, par inadvertance, de faire disparaître la trace53 ». À travers ces lacunes, on pourrait donc entrevoir les passages des Metamorphoseis qui donnaient leur sens au texte résumé à grands traits par l’Onos et qui figuraient donc bien dans la version initiale. Ainsi par exemple, au paragraphe 38 de l’Onos, des prêtres frappent Lucius « avec ce fouet composé d’osselets », ἐκείνῃ τῇ ἐκ τῶν ἀστραγάλων μάστιγι. Le problème, c’est qu’il n’a jamais été question de fouet auparavant dans le récit. En revanche, Apulée, narrant le même incident, écrit à l’identique « me […] flagro illo pecuinis ossibus catenato uerberantes54 », mais lui nous a appris en VIII, 28, 2 que les sectateurs de la Dea Syria portent des fouets de ce type, dont ils usent pour se flageller. Il est donc probable que le détail ait appartenu au texte d’origine et ait été éliminé par l’auteur de l’Onos mais conservé par Apulée, sans devoir être attribué au Madaurien.

  • 55 Voir par exemple la liste d’ajouts d’Apulée proposée par O. Sers, qui assigne au Madaurien l’essent (...)

10En procédant de la sorte à l’échelle de l’ensemble de l’épitomé, les résultats restent toutefois bien maigres, car les différences de ce type se révèlent peu nombreuses55. Cette enquête est d’autant plus difficile que même lorsque le texte d’Apulée est proche de celui de l’Onos, et donc, par déduction, de celui des Metamorphoseis, il ne lui est jamais aveuglément fidèle et n’en constitue pas la traduction littérale. Qu’en est‑il en outre du statut des récits enchâssés, dont l’Onos est complètement privé ? Étaient‑ils aussi absents des Metamorphoseis (et dans ce cas, ont‑ils été forgés par Apulée) ? ou ont‑ils simplement été éliminés de son résumé par le Pseudo-Lucien, qui n’aurait conservé, dans l’unique livre de son épitomé, que l’intrigue principale de la trame du roman ?

  • 56 C’est l’hypothèse défendue par Jennifer Hall, selon qui les Metamorphoseis comprenaient bien plus d (...)
  • 57 « at ego tibi sermone isto Milesio uarias fabulas conseram » ; « mais moi, à la manière milésienne, (...)
  • 58 Voir A. Mazzarino, La Milesia e Apuleio, ouvr. cité.
  • 59 Voir G. C. Fiske, Lucilius and Horace: A Study in the Classical Theory of Imitation, Madison, Unive (...)

11Pour répondre de manière satisfaisante à ces questions, il faudrait bien entendu pouvoir évaluer le rapport de l’épitomé au texte originel. L’avis qui fait autorité aujourd’hui est celui selon lequel les Métamorphoses grecques devaient représenter environ le double de l’abrégé et se limiter, de ce fait, à l’histoire centrale de l’âne, ce qui aboutirait à attribuer au seul Apulée les épisodes secondaires des Métamorphoses latines dont l’Onos est privé. Mais les raisonnements in absentia sont toujours sujets à caution. En outre, selon certains spécialistes, il reste possible qu’Apulée ait également emprunté la trame des récits enchâssés à des sources grecques ou latines, comme il l’a fait pour la narration principale56. Par l’intermédiaire du narrateur du prologue, Apulée présente du reste lui‑même son œuvre comme une « fable milésienne57 ». À l’exemple des Μιλησιακά d’Aristide de Milet (iie siècle av. J.‑C.), cette notion renvoie à des récits ou recueils de nouvelles de composition libre et de provenances variées, souvent à caractère folklorique, auxquels seule la présence d’un même personnage du début à la fin de l’action conférait une unité narrative58. La revendication apuléienne introduit donc un facteur d’incertitude supplémentaire qui interdit de fixer l’origine des récits enchâssés comme de l’intrigue principale du texte apuléien. En somme, tout ou presque pourrait être considéré comme apuléien dans l’Âne d’or, comme tout ou presque pourrait ne pas l’être, à l’exception sans doute du dénouement de l’histoire principale ; cette conclusion en demi-teinte s’inscrit dans la perspective plus générale de la tradition de réélaboration libre de modèles grecs par les auteurs latins, dans un savant équilibre entre inspiration et uariatio59.

  • 60 En son temps, Louis Robert avait mené une tentative de ce type à propos de l’œuvre de Lucien, dont (...)

12Estimer le degré d’« apuléianité » des Métamorphoses et identifier, sur cette base, d’éventuelles réalités historiques ou géographiques précises auxquelles pourrait se référer le récit est une entreprise délicate. Il ne faut pour autant pas renoncer à tirer parti de ce récit riche en apparents realia dans une perspective d’histoire romaine, locale ou générale, mais à condition de procéder avec réserve et méthode, et en gardant à l’esprit que l’ancrage contextuel du récit n’est jamais garanti. C’est un truisme de dire qu’à la base de ces tentatives s’impose le croisement documentaire, mais un croisement où c’est bien le texte d’Apulée qui est corroboré par des sources primaires60, et non où, à l’inverse, ce sont les riches descriptions littéraires des Métamorphoses qui sont convoquées pour éclairer des documents moins diserts. Pour illustrer la manière dont les Métamorphoses peuvent intégrer un raisonnement historique en résonance avec d’autres sources, on évoquera à présent trois exemples, la « scène d’auberge » du livre I, et notamment le portrait qui y est fait d’une aubergiste sorcière, et deux récits consécutifs d’abus de pouvoir dans les campagnes au livre IX.

2.1. Auberges et aubergistes dans les Métamorphoses d’Apulée (livre I)

  • 61 Apulée, Métamorphoses, I, 5 – I, 20.

13Comme le Satiricon de Pétrone, l’autre grand récit romanesque de langue latine, le récit d’Apulée comporte de nombreuses « scènes d’auberge », qui sont riches en indications de toutes sortes, par exemple sur l’organisation matérielle de ces établissements, leur personnel, leur clientèle ou leur mode de gestion. Intéressons‑nous ici en particulier à la narration enchâssée d’Aristomène au livre I, qui ne figure pas dans l’Onos et dont on pourrait par conséquent penser qu’elle est l’invention d’Apulée, et, partant, qu’elle « témoigne » des conditions du séjour hôtelier que l’auteur a pu observer lors de ses voyages. Dans cette histoire, Aristomène, colporteur de fromages et autres provisions, raconte à Lucius, qu’il a croisé en chemin, une aventure survenue à Hypata ; dans cette ville de Thessalie, il était tombé par hasard sur un ancien camarade, Socrate, que tout le monde tenait pour mort et qu’il retrouve en réalité bien vivant, mais dans un état misérable. Il le ramène à son auberge, le réconforte et Socrate finit par lui conter sa triste mésaventure : dévalisé par des brigands, il a été recueilli par une aubergiste (caupona) du nom de Meroé, qui en fait bientôt son amant et le réduit à une condition proche de la servitude. Socrate réussit à s’enfuir, avant de croiser la route d’Aristomène. Mais il se trouve que Meroé, outre le métier d’aubergiste, pratique la sorcellerie. Ivre de vengeance, elle s’introduit de nuit dans la chambre que partagent les deux camarades et remplace le cœur de son ancien amant par une éponge ; tant et si bien que le lendemain, celui‑ci connaît une fin terrible lorsque assoiffé, il tente de boire l’eau d’une rivière61. Le monde de l’auberge est donc très présent dans ce récit : le passage suivant semble par exemple susceptible de nous renseigner sur la configuration des chambres d’hôtel, sur leurs systèmes de fermetures, sur le rôle des portiers, ainsi que sur les conditions de voyage sur des routes infestées de brigands :

  • 62 « Je prends ma besace, et la clé enclenchée, tire le pêne ; mais ces honnêtes et fidèles battants q (...)

Sumo sarcinulam meam, subdita claui pessulos reduco ; at illae probae et fideles ianuae, quae sua sponte reseratae nocte fuerant, uix tandem et aegerrime tunc clauis suae crebra immissione patefiunt. Et « Heus tu, ubi es ? » inquam ; « Valuas stabuli absolue, antelucio uolo ire. » Ianitor pone stabuli ostium humi cubitans etiam nunc semisomnus : « Quid ? Tu » inquit « ignoras latronibus infestari uias, qui hoc noctis iter incipis ? » […] Ad haec ille marcidus et semisopitus in alterum latus reuolutus : « Vnde autem » inquit « scio an conuectore illo tuo cum quo sero deuorteras, iugulato fugae mandes praesidium62 ? »

  • 63 Voir par exemple A. Buonopane, « Inter vias latrones sum passus (CIL, VIII, 2728, 18122): morire lu (...)
  • 64 Voir ainsi le cas des établissements pompéiens dans I, 1, 6.7.8.9 et VI, 9, 1.14, qui présentent de (...)
  • 65 Cf. par exemple pour des éléments de comparaisons en contexte grec : A. Glazebrook et B. Tsakirgis (...)

14Le choix d’une lecture réaliste est ici d’autant plus légitime que d’autres sources, plus « documentaires » pour leur part, épigraphiques63 ou archéologiques64, viennent corroborer les détails concrets présents dans le passage. Néanmoins, il n’y a rien ici qui puisse être attribué à un contexte géographique spécifique, dans la mesure où ces caractéristiques se retrouvent en réalité tout autour du bassin méditerranéen antique et apparaissent de toute éternité65.

  • 66 Ainsi par exemple Philostrate, Vie d’Apollonios de Tyane, IV, 39 ; Achille Tatius, Leucippé et Clit (...)

15Un élément toutefois apparaît plus original : la profession d’aubergiste de la sorcière Meroé. En effet, si l’on considère le récit d’Aristomène, on se rend compte que cette identité professionnelle n’est aucunement indispensable à la logique de la narration. Or le motif de l’aubergiste sorcière est absent de nos sources littéraires de langue grecque, et notamment des romans d’époque impériale — pourtant riches en scènes hôtelières, à l’instar de la Vie d’Apollonios de Tyane de Philostrate d’Athènes ou de Leucippé et Clitophon d’Achille Tatius66. En revanche, il trouve un parallèle dans la documentation de langue latine. Augustin, au ive siècle apr. J.‑C., relaie en effet une rumeur selon laquelle, dans les régions d’Italie du Nord qu’il traverse en 386‑387 apr. J.‑C., les mulieres stabulariae truffaient leurs mets de poisons magiques pour métamorphoser leurs clients de passage en bêtes de somme et les contraindre à travailler pour elles. L’évêque d’Hippone fait d’ailleurs le lien entre ce qui semble bien être un élément de culture populaire locale et l’intrigue des Métamorphoses :

  • 67 « Alors que nous nous trouvions en Italie, il nous arrivait de temps à autre d’entendre des histoir (...)

Nam et nos cum essemus in Italia audiebamus talia de quadam regione illarum partium, ubi stabularias mulieres inbutas his malis artibus in caseo dare solere dicebant quibus uellent seu possent uiatoribus, unde in iumenta ilico uerterentur et necessaria quaeque portarent postque perfuncta opera iterum ad se redirent ; nec tamen in eis mentem fieri bestialem, sed rationalem humanamque seruari, sicut Apuleius in libris, quos asini aurei titulo inscripsit, sibi ipsi accidisse, ut accepto ueneno humano animo permanente asinus fieret, aut indicauit aut finxit67.

16Cet écho à des traditions populaires, sans équivalent attesté en contexte grec, pourrait donc être une création originale d’Apulée. On n’en raisonne pas moins sur un nombre très restreint de sources et la prudence demeure donc de mise.

2.2. Rapports de pouvoir dans les campagnes (livre IX)

  • 68 Apulée, Apologie, 56‑73. Pour la date, B. E. Thomasson, Fasti africani. Senatorische und ritterlich (...)
  • 69 H. Pavis d’Escurac, « Pour une étude sociale de l’Apologie d’Apulée », Antiquités africaines, t. 8, (...)
  • 70 Apulée, Apologie, 55 ; Florides, XVII, 4 ; cf. P. Vallette, « Introduction », dans Apulée, Apologie (...)

17La même prudence s’impose devant les scènes de la vie rurale composées par l’auteur des Métamorphoses. Il est d’autant plus tentant de voir dans cette œuvre une source potentielle pour l’histoire des campagnes au iie siècle apr. J.‑C. qu’Apulée nous a laissé dans un autre texte un témoignage précieux sur le monde rural de son époque. Traduit en justice pour magie après son mariage avec Pudentilla, mère d’un ancien condisciple et riche propriétaire d’Oea, en Tripolitaine, Apulée assure lui‑même sa défense lors du procès, vers 158/15968 : son Apologie est une mine d’informations sur l’organisation et la gestion d’une grande fortune foncière en Afrique69. Les parallèles entre les quelques éléments biographiques livrés par Apulée lui‑même dans ses discours (son prénom, son passé d’étudiant en Grèce où il a été initié à différents cultes, ou encore d’orateur ayant séjourné à Rome)70 et le Lucius des Métamorphoses ont pu contribuer à renforcer l’opinion selon laquelle les aventures de l’âne s’étaient nourries de l’expérience de leur auteur.

  • 71 Supra n. 33.
  • 72 On trouve cependant chez Lucien le thème du voisin accapareur et celui des conflits de bornage : Na (...)

18Pourtant, dans ce domaine comme dans d’autres, lorsque l’on confronte les aventures de l’âne à la documentation relative à la vie dans les campagnes du Haut-Empire, force est de constater que les effets de réel dans les Métamorphoses reposent sur une culture commune à l’ensemble du bassin méditerranéen : il est souvent difficile de distinguer l’apport d’une région spécifique, Grèce ou Afrique, comme on a parfois tenté de le faire71. Deux épisodes consécutifs du livre IX, dans lequel l’âne Lucius appartient à un pauvre maraîcher, témoignent plutôt d’un jeu entre matière littéraire et utilisation de détails qui peuvent sembler véridiques : la juxtaposition entre réalité et fiction y participe à la construction et à l’agrément du récit. Le premier épisode, le récit enchâssé du petit propriétaire spolié par le riche, ne se trouve pas dans l’Onos72 ; le second, l’histoire du maraîcher et du soldat, a visiblement été retravaillé par Apulée.

  • 73 Apulée, Métamorphoses, IX, 33‑38.
  • 74 Ibid., IX, 35.
  • 75 Ibid.

19Dans le premier épisode73, le pauvre maraîcher rend service à un propriétaire voisin qui, en remerciement, l’invite à dîner. Le repas est interrompu par l’annonce de la mort des trois fils du propriétaire. S’ensuit le récit des événements qui ont conduit à la tragédie. Les trois frères ont été tués lors d’une confrontation entre un pauvre propriétaire de leurs amis et un riche qui tentait de façon inique de s’approprier le domaine du pauvre, après avoir volé ses bêtes et saccagé ses récoltes. Afin de s’emparer de l’ensemble de la terre de son voisin, le riche provoque une enquête de bornage sans fondement juridique (finium inanis quaestio)74. Le pauvre paysan, déjà dépossédé d’une partie de ses biens par le riche, tente de conserver au moins la terre de ses pères pour y être enterré ; il demande donc à des amis — dont font partie les trois frères — de venir l’assister lors de l’établissement des limites du domaine (demonstratio finium)75.

  • 76 Ibid. Les liens familiaux figurent en bonne place dans ce qu’il est convenu d’appeler « l’autorepré (...)
  • 77 Notamment dans l’Occident romain : ainsi P.‑A. Février, « Villes et campagnes des Gaules sous l’Emp (...)

20Outre la supériorité sociale induite par le prestige de la famille76, deux des phénomènes auxquels le récit fait allusion sont par ailleurs bien attestés à l’époque impériale dans le monde romain : la sépulture sur les propriétés rurales et les conflits de limite de propriété. L’habitude des propriétaires de se faire enterrer sur leurs domaines est une pratique bien étudiée pour les élites77 ; les tombes des moyens et petits propriétaires sont également attestées par des stèles funéraires simples. La concentration de tombes d’une même famille sur plusieurs générations hors des nécropoles, en zone rurale, permet parfois de localiser des exploitations antiques. Si pour les plus riches, la construction d’un mausolée sur ses terres peut s’expliquer par une volonté de représentation, de mise en scène de la famille, de la carrière ou de l’ascension sociale d’un individu, le texte d’Apulée, en s’intéressant aux petits paysans qui ne possèdent qu’un lopin tout juste suffisant à leur survie, souligne la dimension culturelle, affective, mais aussi religieuse de cette pratique.

  • 78 G. P. Burton, « The Resolution of Territorial Disputes in the Provinces of the Roman Empire », Chir (...)
  • 79 Apulée, Métamorphoses, IX, 36, 1.
  • 80 Ainsi Agennius Urbicus, Controverses sur les terres. Corpus Agrimensorum Romanorum VI, O. Behrends (...)
  • 81 Ibid., 84‑86, 103, 113‑114.
  • 82 Ibid., 86, 88, 125‑126.
  • 83 Ibid., 92.
  • 84 Supra n. 33.

21La question du bornage des terres a quant à elle laissé une documentation inégale dans l’Empire. Si des bornes de domaines de tout type (entre cités, entre cité et tribus, entre tribus et propriétaires privés, entre cité et propriétaire, ou entre propriétaires) sont parvenues jusqu’à nous, la résolution des conflits entre particuliers est relativement peu connue — à la différence, par exemple, des litiges entre communautés, dont le règlement par les autorités romaines est archivé et peut donner lieu à un affichage78. Or, dans le cas présenté par les Métamorphoses, la demonstratio finium, l’établissement des limites, se fait sans intervention des autorités, romaines ou locales : ce sont les « amis » qui sont convoqués pour trancher le différend ; dans la suite du récit, les assistants à la demonstratio finium sont appelés citoyens (ciues) et médiateurs (mediatores)79. Or une source bien moins truculente que les Métamorphoses, le corpus des arpenteurs romains, permet de penser que la scène n’est pas dépourvue de fondement historique. Dans le traité consacré aux Controverses sur les terres — datant peut‑être du ive siècle apr. J.‑C., mais reposant au moins en partie sur des documents du Haut-Empire80, Agennius Urbicus évoque avec une certaine insistance les cas de litiges provoqués par des voisins avides et sans scrupule sur les questions de bornage81. Selon cet auteur, les différends entre possessores sont tranchés non par les autorités, mais par un accord mutuel ou par des juges tirés au sort, qui selon Agennius Urbicus ne se distinguent pas toujours par leur compétence82. Lorsque les preuves « gromatiques » manquent et que les bornes ont disparu, seul l’exposé rhétorique des arguments des parties en présence peut permettre d’arriver à une solution83. Ainsi, même si le conflit entre riche et pauvre ou le bornage des terres sont des motifs littéraires relativement fréquents à l’époque d’Apulée84, la mise en œuvre de ces thèmes dans les Métamorphoses, avec la présence des mediatores et des amis qui se chargent d’exposer les plaintes, fait intervenir une procédure d’arbitrage tout à fait attestée en droit romain.

  • 85 Apulée, Métamorphoses, IX, 39‑42.

22Le second cas d’abus de pouvoir, cette fois réélaboré par Apulée sur la base des Metamorphoseis originales, suit immédiatement l’histoire du riche accapareur et de la mort des trois frères amis du pauvre propriétaire. Après avoir quitté son hôte en deuil, le maraîcher reprend la route avec l’âne. La mésaventure dont il est alors victime illustre à nouveau la frontière ténue entre création littéraire et réalité historique avec laquelle joue l’auteur des Métamorphoses85. Le pauvre maraîcher est hélé par un légionnaire. Ne parlant pas latin et ne comprenant donc pas la question, il ne répond pas. Le soldat frappe alors le maraîcher de son cep, le blesse, puis annonce en grec que l’âne est réquisitionné pour transporter les bagages du gouverneur. Après de vaines supplications, le maraîcher roue le soldat de coups et s’enfuit avec l’âne. Le récit, commencé comme une scène de comédie, tourne ensuite au tragique : le livre IX se clôt sur l’arrestation du maraîcher et sa condamnation à mort par les magistrats de la cité voisine.

  • 86 F. Millar, « The World of the Golden Ass », art. cité, p. 67, n. 27.
  • 87 Pseudo-Lucien, Onos, 44.
  • 88 Apologie, 98. Deux siècles et demi plus tard, Augustin offre à son tour un témoignage célèbre sur l (...)

23Le fait que le récit apuléien précise que le soldat est un légionnaire (miles e legione), alors qu’il n’y a pas de légion en Achaïe, montre bien que l’exactitude n’est pas le souci premier d’Apulée ; selon Fergus Millar, les références africaines de l’auteur et la présence dans sa province d’origine de la legio III Augusta pourraient en partie expliquer la confusion86. Mais on peut aussi penser que le personnage du soldat, que sa brutalité et son arrogance rattachent au type du miles gloriosus, est un signe de plus qu’Apulée ne cherche pas un ancrage géographique précis, mais un cadre familier à l’ensemble de ses lecteurs. Ceci ne signifie pas pour autant que le récit dans son ensemble soit pure fantaisie littéraire. Ainsi, dans l’Onos87 comme chez Apulée, la violence du soldat est provoquée par le malentendu linguistique : il s’agit certes d’un topos, celui de l’inculture du paysan, mais aussi d’une réalité sociale. Pour l’Afrique, Apulée lui‑même en donne un exemple dans son Apologie : pour achever de discréditer son accusateur, l’oncle de son beau-fils, Apulée fait valoir que le jeune homme ne parle plus que le punique depuis qu’il a quitté la maison maternelle pour celle de son oncle ; il se montre d’ailleurs incapable de répondre correctement en latin au proconsul lorsqu’il est interrogé durant le procès88. Dans l’Onos, le problème de communication seul est à l’origine de la rixe : le soldat prend le silence du maraîcher pour une insulte, frappe le malheureux, qui réplique et l’emporte finalement. Dans le récit apuléien en revanche, le maraîcher rosse le légionnaire pour ne pas être privé de son seul bien, introduisant dans le récit un problème par ailleurs bien documenté : celui des réquisitions illégales dont sont victimes les paysans de la part des militaires.

  • 89 Épictète, Entretiens, IV, i, 79 ; F. Millar, « The World of the Golden Ass », art. cité, p. 67‑68, (...)
  • 90 Requêtes des habitants de Skaptopara (Thrace), à Gordien III, en 238 (CIL, III, 12336 ; SIG3, II, 8 (...)
  • 91 B. Rossignol, « Élites locales et armées », art. cité, p. 352, avec la bibliographie.
  • 92 S. Mitchell, « Requisitioned Transport in the Roman Empire: A New Inscription from Pisidia », The J (...)
  • 93 T. Hauken, Petition and Response, ouvr. cité, p. 217‑243. E. Meyer-Zwiffelhoffer, Πoλιτικῶς ἂρχειν. (...)

24Le problème est suffisamment courant pour être mentionné quelques décennies avant Apulée, exactement de cette manière, mais cette fois en grec, dans un discours d’Épictète qui conseille de livrer l’âne sans résistance pour éviter les coups89. Pour ne citer que quelques exemples, plusieurs inscriptions du iie et du iiie siècles apr. J.‑C. découvertes dans différentes provinces — en majorité dans la partie hellénophone de l’Empire — conservent la trace des plaintes de villageois ou de colons de domaines impériaux, adressées au gouverneur ou à l’empereur, pour supplier les autorités de mettre un terme aux réquisitions abusives de la part des soldats90. La proximité de la route, qui amène les soldats et fait le malheur des riverains, est régulièrement mentionnée dans ces textes91. Les exactions des soldats ont engendré depuis le début de l’Empire de fréquents rappels de la loi par les autorités, que les communautés locales prennent soin de faire afficher, parfois sur la recommandation expresse du gouverneur. La jurisprudence limite notamment les bénéficiaires des réquisitions aux soldats en service et prévoit des indemnités pour le propriétaire ; elle punit également les coupables d’extorsion92. Même s’il est postérieur de plusieurs décennies aux Métamorphoses, le dossier de Takina93, en Phrygie, présente des ressemblances frappantes avec les déboires du maraîcher : les soldats ont pris prétexte du voyage du proconsul pour procéder à des réquisitions illégales ; alerté par la plainte des citoyens de Takina, l’empereur Caracalla confie à son procurateur le soin de fournir une indemnité pour les chariots réquisitionnés et de veiller à ce que les bœufs soient rendus à leur propriétaire en temps voulu. De la même façon, le légionnaire d’Apulée, après avoir bastonné le maraîcher, allègue le service du gouverneur pour s’emparer de l’âne, sans qu’il soit toutefois question de contrepartie pour le propriétaire. L’abus de pouvoir est l’occasion, pour l’auteur du récit, d’une nouvelle allusion au cadre juridique dans lequel les personnages sont censés évoluer. Cette histoire du maraîcher et du soldat, qui a pour but de faire progresser l’intrigue puisqu’elle prépare le nouveau changement de propriétaire de l’âne, prend donc appui sur ce que tous les lecteurs étaient susceptibles de savoir : il est périlleux pour un civil de rencontrer un soldat sur la route et les tournées provinciales du gouverneur sont des moments qui exposent particulièrement aux réquisitions, plus ou moins légales. Somme toute, les Métamorphoses s’ajoutent aux autres sources, aux inscriptions comme au discours d’Épictète, pour donner l’impression que ces pratiques de la soldatesque étaient courantes. Mais le lieu commun est ici détourné pour alimenter le comique de la scène : c’est finalement le soldat qui se trouve obligé de contrefaire le mort pour échapper aux coups, offrant au lecteur un retournement de situation inattendu et réjouissant.

  • 94 Cf. Pétrone, Satiricon, 48. Les auteurs des Groningen Commmentaries soulignent par exemple le paral (...)

25Dans les Métamorphoses, Apulée retravaille pour un public latinophone un récit en grec décrivant une Grèce de fantaisie, où ses apports personnels sont difficiles à distinguer ; l’intertextualité, le mélange entre histoires vraisemblables et fables fantaisistes sont autant d’éléments destinés à accroître le plaisir du lecteur. Le portrait de la sorcière Meroé et le goût pour l’occulte, tout comme les malheurs du pauvre spolié par le riche et le maraîcher victime de la convoitise du soldat, qui trahissent la compassion du narrateur pour le faible victime du fort — un trait récurrent dans les Métamorphoses — relèvent de motifs intemporels94 : ceux‑ci ont davantage pour but de susciter l’émotion du lecteur que de produire un document d’histoire sociale. Néanmoins, au fil du récit, se construit l’image d’une société provinciale archétypale, immédiatement compréhensible pour un public du iie siècle. L’évocation des institutions politiques, impériales et locales, des relations économiques et sociales, des représentations culturelles (comme les stéréotypes ou les traits de folklore) voire les détails sur les maisons, les lieux de vie, concourent à créer un sentiment de familiarité pour le lecteur et un décor dans lequel pourront se dérouler les aventures imaginaires de l’âne Lucius, merveilleuses, comiques ou tragiques. Mais cet effet de réel restait sans doute suffisamment discret et peu contextualisé pour permettre à tout un chacun autour de l’Empire de se reconnaître dans le « monde de Lucius ». En ancrant le récit dans une expérience susceptible d’être partagée par l’ensemble des habitants du monde romain, tout en la parodiant, Apulée offre le reflet, parfois déformé, d’une culture commune à l’auteur et à son public. C’est pourquoi les sources primaires peuvent éclairer le texte des Métamorphoses, ou les Métamorphoses s’ajouter à un corpus de témoignages ; mais il serait en revanche imprudent d’utiliser les Métamorphoses pour combler les vides de la documentation.

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Notes

1 On ne reviendra pas ici sur la question de savoir si l’Antiquité, hellénophone autant que latine, a connu des romans ante litteram, voire des romans « tout court ». Il convient toutefois de rappeler que les Romains n’ont jamais identifié ni codifié une catégorie littéraire romanesque et qu’à la suite de György Lukacs (G. Lukács, La théorie du roman, traduction de J. Clairevoye, Paris, Gonthier, « Bibliothèque Médiations, 4 », 1963), les historiens de la littérature font le plus souvent débuter le roman avec le Don Quichotte de Cervantès. Par conséquent, on retiendra ici la définition a minima que René Martin et Jacques Gaillard donnent de ce que pourrait être l’équivalent, sinon l’ancêtre, du roman dans l’Antiquité, à savoir « une œuvre d’imagination (ce qui le distingue de l’histoire), constituée par un récit (ce qui le distingue du théâtre) correspondant à une lecture d’assez longue durée (ce qui le distingue du conte ou de la nouvelle) et écrit, sinon uniquement, du moins principalement en prose (ce qui le distingue de l’épopée) » (R. Martin et J. Gaillard, Les genres littéraires à Rome, Paris, Scodel, 1990, p. 71). Ces caractéristiques semblent effectivement convenir pour rendre compte du genre littéraire des Métamorphoses d’Apulée : voir les différentes études qui sont consacrées à cette question dans E. P. Cueva et S. N. Byrne (éds), A Companion to the Ancient Novel, Maiden (Mass.) / Oxford / Chichester, Wiley Blackwell, « Blackwell Companions to the Ancient World. Literature and Culture », 2014, notamment la contribution critique de P. James, « Apuleius’ Metamorphoses. A Hybrid Text? », p. 317‑329, avec orientations bibliographiques.

2 Apulée, Apologie, 24. La bibliographie sur Apulée et son œuvre est bien entendu innombrable : on en trouvera un premier aperçu dans Apulée, Les Métamorphoses, D. S. Robertson et P. Vallette (éds), Paris, Les Belles Lettres, « Collection des Universités de France », 3 vol., 1940‑1945, ainsi que dans Apulée, Les Métamorphoses ou l’Âne d’or, D. S. Robertson et O. Sers (éds), Paris, Les Belles Lettres, « Classiques en poche, 82 », 2007 ; voir également les différentes livraisons des « colloques de Groningen » sur le roman ancien consacrés à l’Âne d’or (dont certains sont cités dans cet article). Dans cette contribution, nous suivrons le texte établi par D. S. Robertson ; sauf indication contraire, les traductions sont des auteures de cet article.

3 Apulée, Métamorphoses, I, 2.

4 Sur la réputation sulfureuse de la Thessalie, et surtout des Thessaliennes, dans l’Antiquité grecque et romaine, voir J. Cazeaux, « La Thessalie des magiciennes », dans B. Helly (dir.), La Thessalie, Actes de la Table ronde (Lyon, 21‑24 juillet 1975), Lyon, Maison de l’Orient, « Collection de la Maison de l’Orient méditerranéen. Série archéologie, 5 », 1979, p. 265‑275. Pour une approche plus générale de la sorcellerie à l’époque d’Apulée, voir K. A. Fraser, « Roman Antiquity: The Imperial Period », dans D. J. Collins (éd.), The Cambridge History of Magic and Witchcraft in the West: From Antiquity to the Present, Cambridge, Cambridge University Press, 2015, p. 115‑147.

5 Apulée, Métamorphoses, II, 1‑2.

6 Ibid., I, 21‑23.

7 Ibid., II, 7‑10, 16‑17.

8 Ibid., III, 15.

9 Ibid., III, 21‑22.

10 Ibid., III, 24‑25.

11 Ibid., III, 25‑26.

12 Ibid., III, 28.

13 Ibid., XI, 13.

14 Ibid., XI, 19‑30.

15 Ibid., I, 5‑21.

16 Ibid., II, 21‑30.

17 Ibid., IX, 5‑7.

18 Voir par exemple, au sein d’une abondante bibliographie, Aspects of Apuleius’ Golden Ass, vol. II : Cupid and Psyche: A Collection of Original Papers, Groningen, Egbert Forsten, 1998.

19 Apulée, Métamorphoses, X, 13‑17.

20 Ibid., IX, 10‑31.

21 Ibid., III, 28–VII, 13.

22 Ibid., VIII, 24–IX, 10.

23 Ibid., IX, 39–X, 13.

24 F. Millar, « The World of the Golden Ass », The Journal of Roman Studies, vol. 71, 1981, p. 63‑75.

25 Cf. les réflexions de Sandra Rae Joshel et Lauren Hackworth Petersen au sujet de l’invisibilité archéologique des esclaves (S. R. Joshel et L. Hackworth Petersen, The Material Life of Roman Slaves, New York, Cambridge University Press, 2014) ou celles de Robert C. Knapp sur les « invisible Romans » (R. C. Knapp, Invisible Romans, Cambridge (Mass.), Harvard University Press, 2011).

26 X. Colin, « Commerçants itinérants et marchands sédentaires dans l’Occident romain », dans E. Lo Cascio (dir.), Mercati permanenti e mercati periodici nel mondo romano, Atti degli Incontri capresi di storia dell’economia antica (Capri, 13‑15 octobre 1997), Bari, Edipuglia, « Pragmateiai, 2 », 2000, p. 149‑160 ; cf. en particulier p. 157 : « Un passage d’Apulée met en scène un marchand ambulant qui s’approvisionne en miel et fromage pour les distribuer dans les auberges de Thessalie, d’Étolie et de Béotie. »

27 M. Flohr, The World of the Fullo: Work, Economy, and Society in Roman Italy, Oxford, Oxford University Press, « Oxford Studies on the Roman Economy », 2013. Cf. par exemple p. 117‑120 et p. 265, où l’auteur écrit, dans un passage consacré au personnel des ateliers de foulerie romains : « The fullo featuring in Apuleius’ Metamorphoses lived and worked with his wife in a place described as a taberna. It is unclear whether his wife played an important role in the workshop, and we hear nothing of children or servants, but it is clear that the basis of the fullery in this story was a small household. Unfortunately, there is little other textual evidence. »

28 A. Daguet-Gagey, Splendor aedilitatum : l’édilité à Rome (ier s. avant J.‑C. – iiie s. après J.‑C.), Rome, École française de Rome, « Collection de l’École française de Rome, 498 », 2015, p. 612‑614 (cf. p. 612 : « Outre Varron, c’est en réalité chez Apulée que l’on trouve la plus vivante et pittoresque description d’une vente de bétail, aux enchères »).

29 Ibid., p. 125 : « On vit, dans la formule ex imperio aedilium curulium, un écho au passage bien connu d’Apulée, dans les Métamorphoses, où le narrateur rapporte l’incident, qui se produisit sur le marché d’Hypata, en Thessalie. […] Le témoignage d’Apulée parut conforter la lecture donnée de la tablette d’Herculanum. »

30 « La seconde [mention] apparaît dans les Métamorphoses d’Apulée, quand l’âne est vendu à deux esclaves cuisiniers, dont l’un est notamment spécialisé dans la confection de pâtisseries. Pour autant que ces deux mentions permettent d’en juger, le métier de pistor dulciarius ne constitue guère plus qu’une extension des capacités techniques d’un pistor […]. » (N. Monteix, Les lieux de métier : boutiques et ateliers d’Herculanum, Rome, École française de Rome, « BEFAR/Collection du Centre Jean Bérard, 344/34 », 2010, p. 162)

31 M.‑A. Le Guennec, Aubergistes et clients. L’accueil mercantile dans l’Occident romain (iiie s. av. J.‑C. – ive s. apr. J.‑C.), Rome, École française de Rome, « BEFAR, 381 », 2019, passim. De même, Stéphanie Guédon fait un grand usage du texte apuléien pour étudier les realia du voyage en Afrique romaine (S. Guédon, Le voyage dans l’Afrique romaine, Bordeaux, Ausonius, « Scripta Antiqua, 25 », 2010).

32 F. Dupont, Le plaisir et la loi : du Banquet de Platon au Satiricon, Paris, F. Maspero, « Texte à l’appui. Histoire classique », 1977.

33 Gilbert-Charles Picard reconnaît ainsi dans l’histoire du riche propriétaire accapareur (Métamorphoses, IX, 33‑38) des « traits d’actualité inspirés par des conflits sociaux tels que celui du Saltus Burunitanus. La concordance entre textes historiques et juridiques d’une part et le témoignage du romancier d’autre part prouve qu’on peut utiliser celui‑ci pour l’histoire de la crise économique et sociale provoquée en Afrique par la guerre Germanique de 169‑180, qui aboutit à l’accaparement des terres par quelques grands propriétaires » (G.‑C. Picard, « Les préoccupations sociales dans les Métamorphoses d’Apulée », Revue des études latines, t. 37, 1959 [1960], p. 54‑55). Cependant le passage des Métamorphoses sur le riche qui tente par tous les moyens de s’approprier les biens de son voisin n’offre que peu de points communs avec le conflit du saltus Burunitanus, connu par une pétition adressée à l’empereur Commode par les paysans d’un domaine impérial pour dénoncer les abus d’un conductor et d’un procurateur (CIL, VIII, 10570, cf. 14464 [ILS, 6870]) ; voir J. Kolendo, Le colonat en Afrique sous le Haut-Empire, Paris, Les Belles Lettres, « Centre de recherches d’histoire ancienne, 107 », 1991 (1976), p. 35‑37, 59, 63‑73. Un autre exemple de la recherche de l’« africanité » dans les Métamorphoses se trouve chez Emmanuel et Nedjima Plantade, qui, dans « Psyché (d’Apulée) », Encyclopédie berbère, vol. 37, 2015, p. 6588‑6602, identifient de façon documentée dans l’histoire de Psyché et Cupidon (cf. supra n. 18) des gestes cultuels et des éléments de contes berbères (lesquels, toutefois, ont été recueillis au xxe siècle, ce qui rend délicate leur utilisation pour expliquer un texte du iie siècle).

34 Ainsi Miko Flohr écrivait‑il par exemple au sujet de l’industrie de la foulerie à Pompéi au ier siècle apr. J.‑C. : « The integrated situation in the Vesuvian area may nicely fit in with Apuleius’ story about the fuller and his adulterous wife […]. » (M. Flohr, The World of the Fullo, ouvr. cité, p. 272)

35 Apulée, Métamorphoses, I, 1, 6. Sur cet énigmatique prologue, voir les différentes contributions réunies dans A. Kahane et A. Laird (éds), A Companion to the Prologue of Apuleius’ Metamorphoses, Oxford, Oxford University Press, 2001 ; notamment, pour l’identité du narrateur du prologue et son rapport à Apulée, K. Clarke, « Prologue and Provenance: Quis ille? or Unde ille? », p. 101‑110.

36 Voir M. Dubuisson, « Graecus, Graeculus, Graecari : l’emploi péjoratif du nom des Grecs en latin », dans S. Saïd (dir.), Ἑλλήνισμος. Quelques jalons pour une histoire de l’identité grecque, Actes du colloque de Strasbourg (25‑27 octobre 1989), Leyde / New York / Copenhague, etc., Brill, « Travaux du Centre de recherche sur le Proche-Orient et la Grèce antiques », 1991, p. 315‑335.

37 Cf. Varron, De la langue latine, X, 70.

38 N. Fick, « Ville et campagne dans les Métamorphoses d’Apulée », Revue belge de philologie et d’histoire, t. 69, fasc. 1, 1991, p. 110‑130.

39 Contra par exemple J. Colin, « Apulée en Thessalie : fiction ou vérité ? (Métam., II, 21 sq. ; II, 32 – III, 10 ; X, 6‑12 ; X, 23, 1 sq.) », Latomus, t. 24, fasc. 2, 1965, p. 330‑345, dont le point de vue est résolument opposé à celui représenté par N. Fick, et du reste plus traditionnel au sein des études apuléiennes. L’article s’ouvre significativement sur ces mots : « Dans le présent article, nous nous proposons d’abord de montrer les observations vivantes, en Thessalie, d’Apulée — de l’étudiant et du juriste —, les documents véridiques qui se cachent derrière l’affabulation cocasse des Métamorphoses. Nous voulons ensuite considérer ces témoignages — ce qui provoquera l’étonnement de nos collègues — comme une source précieuse pour la connaissance approfondie du monde hellénique sous l’Empire romain. » (p. 330)

40 Notamment au droit romain : citons par exemple le clin d’œil malicieux à la lex Iulia de adulteriis coercendis, que Jupiter reproche à Cupidon de lui avoir fait enfreindre dans le conte d’Amour et Psyché (Apulée, Métamorphoses, VI, 22). Pour d’autres exemples, cf. O. Sers, « Apulée par lui‑même », dans Apulée, Les Métamorphoses ou l’Âne d’or, D. S. Robertson et O. Sers (éds), ouvr. cité, p. xxvxxvi.

41 « Lu les Métamorphoses de Lucius de Patrae, ouvrage en plusieurs livres. Sa langue est claire, pure et d’une grâce étudiée. Il fuit le néologisme et montre un goût immodéré pour les histoires merveilleuses. C’est comme qui dirait un autre Lucien. Les deux premiers livres, en tout cas, ont été presque littéralement transcrits par Lucius du livre de Lucien intitulé : Lucius ou l’Âne. Ou par Lucien d’après les livres de Lucius. C’est plutôt Lucien qui paraît copier l’autre, à en juger par conjecture (nous ne sommes pas en mesure de décider lequel est le plus ancien en date). Lucien, en effet, a taillé en pleine matière dans l’œuvre de Lucius, il a retranché ce qui ne lui paraissait pas utile à son dessein propre ; puis, gardant les mêmes mots et les mêmes tours de phrase, il a assemblé le reste en un seul livre et a donné le titre de Lucius ou l’Âne à ce qu’il avait ainsi dérobé. L’un et l’autre ouvrage est plein de peintures empruntées à la mythologie et de honteuses obscénités. Mais, tandis que Lucien, dans cet écrit comme dans ses autres œuvres, raille et bafoue les superstitions des Grecs, Lucius ajoute foi sérieusement aux métamorphoses d’hommes en hommes et de bêtes en hommes ou inversement, ainsi qu’à tout l’antique fatras de niaiseries mythologiques, qu’il mettait par écrit et tissait en une trame. » (Photius, Bibliothèque, 129, texte établi par R. Henry, Paris, Les Belles Lettres, « Collection des Universités de France, Série grecque, 142 », 1960 ; trad. P. Vallette dans Apulée, Les Métamorphoses, D.S. Robertson et P. Vallette (éds), ouvr. cité)

42 H. J. Mason, « Greek and Latin Versions of the Ass-Story », dans W. Haase et H. Temporini (éds), Aufstieg und Niedergang der römischen Welt. Teil II: Principat. Band 34.2, Berlin / New York, W. de Gruyter, 1994, p. 1665‑1707, en particulier p. 1677‑1681 avec rappel des hypothèses en présence.

43 Pseudo-Lucien, Onos, 56.

44 « Mon père est […] ; mon nom est Lucius, celui de mon frère Gaius […] Notre patrie est Patrae, en Achaïe. » (Pseudo-Lucien, Onos, 55)

45 B. E. Perry, The Metamorphoses Ascribed to Lucius of Patrae, Its Content, Nature and Authorship, Lancaster, The New Era Printing Company, 1920.

46 H. van Thiel (éd.), Abenteuer eines Esels, oder, Die Verwandlungen des Lukios. Der griechische Eselsroman, Munich, Heimeran Verlag, « Tusculum-Schriften », 1972.

47 E. Cocchia, Romanzo e realtà nella vita e nell’attività letteraria di Lucio Apuleio, Catane, F. Battiato, « Biblioteca di filologia classica, 13 », 1915.

48 Pour un bilan plus détaillé des hypothèses en présence, voir H. J. Mason, « Greek and Latin Versions of the Ass-Story », art. cité, p. 1686‑1692.

49 K. Bürger, De Lucio Patrensi, sive de Ratione inter Asinum Q. F. Lucianeum Apuleique Metamorphoses intercedente, dissertatio inauguralis philologica, quam… defendet Carolus Bürger…, Berlin, Lette-Verein, 1887.

50 Voir l’essai de Simon Swain, qui, empruntant aux catégories d’analyse de Jean Genette, parle à ce sujet d’hypertextualité : par l’imitation consciencieuse et consciente du texte grec, Apulée ferait démonstration de son bilinguisme et de sa maîtrise de codes culturels doubles, grecs et romains, pour des raisons de distinction sociale et de jeu littéraire (S. Swain, « The Hiding Author: Context and Implication », dans A. Kahane et A. Laird (éds), A Companion to the Prologue of Apuleius’ Metamorphoses, ouvr. cité, p. 55‑63).

51 A. Mazzarino, La Milesia e Apuleio, Turin, Chiantore, 1950, p. 134.

52 E. Fraenkel, Plautinisches im Plautus, Berlin, Weidmannsche Buchhandlung, « Philologische Untersuchungen, 28 », 1922.

53 Apulée, Les Métamorphoses, D. S. Robertson et P. Vallette (éds), ouvr. cité, p. ix.

54 « en me frappant avec ce fouet fait d’une chaîne d’osselets » (Apulée, Métamorphoses, VIII, 30, 2).

55 Voir par exemple la liste d’ajouts d’Apulée proposée par O. Sers, qui assigne au Madaurien l’essentiel des sous-récits du roman (O. Sers, « Apulée par lui‑même », art. cité, p. xxiixxiii).

56 C’est l’hypothèse défendue par Jennifer Hall, selon qui les Metamorphoseis comprenaient bien plus de deux livres. De son point de vue, il faudrait comprendre des propos de Photius que seuls les deux premiers de ces livres avaient trait à l’histoire de Lucius, l’homme transformé en âne, et auraient été résumés par l’épitomé ; dans cette perspective, Apulée aurait pu emprunter, sinon tous, du moins certains de ses récits enchâssés, aux livres suivants des Métamorphoses grecques (J. Hall, Lucian’s Satire, New York, Arno Press, « Monographs in Classical Studies », 1981).

57 « at ego tibi sermone isto Milesio uarias fabulas conseram » ; « mais moi, à la manière milésienne, je vais t’enchaîner les contes variés » (Apulée, Métamorphoses, I, 1, 1).

58 Voir A. Mazzarino, La Milesia e Apuleio, ouvr. cité.

59 Voir G. C. Fiske, Lucilius and Horace: A Study in the Classical Theory of Imitation, Madison, University of Wisconsin, « University of Wisconsin Studies in Language and Literature », 1920.

60 En son temps, Louis Robert avait mené une tentative de ce type à propos de l’œuvre de Lucien, dont de nombreuses obscurités avaient pu être dissipées par un croisement rigoureux et détaillé avec les sources primaires (voir L. Robert, « Lucien en son temps », dans Id., À travers l’Asie Mineure. Poètes et prosateurs, monnaies grecques, voyageurs et géographie, Athènes, École française d’Athènes, « BEFAR, 239 », 1980, p. 393‑436, en particulier p. 427‑432 au sujet de l’Histoire vraie qui relève du genre romanesque.

61 Apulée, Métamorphoses, I, 5 – I, 20.

62 « Je prends ma besace, et la clé enclenchée, tire le pêne ; mais ces honnêtes et fidèles battants qui s’étaient déverrouillés de leur propre chef pendant la nuit, ce coup‑ci, c’est avec peine et bon gré mal gré qu’ils s’ouvrent, en y introduisant à plusieurs reprises la clé. ‟Hé toi, où es‑tu donc ?”, dis‑je, ‟Ouvre les portes de l’auberge, je veux partir avant le lever du jour.” Le portier, qui dormait par terre derrière la porte, me dit, encore plongé dans un demi-sommeil : ‟Quoi ? Tu ne sais donc pas que les routes sont infestées de brigands, pour te mettre en route comme ça de nuit ?” […] Lui, tout ensommeillé, sur le point de se rendormir, se retourne de l’autre côté et me dit : ‟Et d’où est‑ce que je sais que ce compagnon de route avec qui tu es descendu à l’hôtel hier au soir, tu ne lui as pas tranché la gorge et que tu ne cherches pas ton salut dans la fuite ?” » (Ibid., I, 14, 6 – 15, 1‑4)

63 Voir par exemple A. Buonopane, « Inter vias latrones sum passus (CIL, VIII, 2728, 18122): morire lungo le strade romane », dans P. Basso et E. Zanini (dir.), Statio amoena. Sostare e vivere lungo le strade romane, Oxford, Archaeopress, 2016, p. 39‑48 ; C. Wolff, Les brigands en Orient sous le Haut-Empire romain, Rome, École française de Rome, « Collection de l’École française de Rome, 308 », 2003.

64 Voir ainsi le cas des établissements pompéiens dans I, 1, 6.7.8.9 et VI, 9, 1.14, qui présentent des systèmes de fermeture proches de celui évoqué par Apulée (M.‑A. Le Guennec, Aubergistes et clients, ouvr. cité, p. 186).

65 Cf. par exemple pour des éléments de comparaisons en contexte grec : A. Glazebrook et B. Tsakirgis (éds), Houses of Ill Repute. The Archaeology of Brothels, Houses, and Taverns in the Greek World, Philadelphie (Penn.), University of Pennsylvania Press, 2016.

66 Ainsi par exemple Philostrate, Vie d’Apollonios de Tyane, IV, 39 ; Achille Tatius, Leucippé et Clitophon, VII, 3.

67 « Alors que nous nous trouvions en Italie, il nous arrivait de temps à autre d’entendre des histoires semblables au sujet d’une région de ces contrées, où l’on disait que des femmes qui exerçaient la profession d’aubergiste, versées dans les arts maléfiques, avaient l’habitude de mettre dans du fromage destiné aux voyageurs qu’elles choisissaient ou qui leur tombaient sous la main, des substances destinées à les transformer sur-le-champ en bêtes de somme et à les forcer à porter ce dont elles avaient besoin ; après quoi, leur besogne achevée, ils revenaient à leur état normal ; pourtant leur esprit ne devenait pas animal, mais restait humain, de même qu’Apulée, dans le livre qu’il a intitulé L’Âne d’or, dit avoir lui‑même, de manière véridique ou inventée, été transformé en âne tout en gardant un esprit humain, après avoir bu une potion magique. » (Augustin, La Cité de Dieu, XVIII, 18). Contra N. Moine, « Augustin et Apulée sur la magie des femmes d’auberge », Latomus, t. 34, fasc. 2, 1975, p. 350‑361, selon qui ce passage n’est qu’une transposition inexacte par Augustin des Métamorphoses d’Apulée, les différences entre les deux versions étant dues, selon l’auteure, a une mauvaise remémoration des détails du roman par l’évêque d’Hippone. S’il est évident que la seconde partie du passage fait référence, au prix d’une confusion entre auteur et narrateur, au personnage de Lucius qui, après sa transformation en âne, conserve sa raison humaine, la mention des fromages maléfiques est, pour sa part, inédite.

68 Apulée, Apologie, 56‑73. Pour la date, B. E. Thomasson, Fasti africani. Senatorische und ritterliche Amtsträger in den römischen Provinzen Nordafrikas von Augustus bis Diokletian, Stockholm, Svenska Institutet i Rome, « Skrifter utgivna av Svenska Institutet i Rom, 53 », 1996.

69 H. Pavis d’Escurac, « Pour une étude sociale de l’Apologie d’Apulée », Antiquités africaines, t. 8, 1974, p. 89‑101.

70 Apulée, Apologie, 55 ; Florides, XVII, 4 ; cf. P. Vallette, « Introduction », dans Apulée, Apologie. Florides, P. Valette (éd.), Paris, Les Belles Lettres, « Collection des Universités de France, Série latine, 16 », 1960 (1924), p. x, n. 3.

71 Supra n. 33.

72 On trouve cependant chez Lucien le thème du voisin accapareur et celui des conflits de bornage : Nauigium, 38 ; Icaromenippus, 18 ; Kataplus, 21. G. Anderson, Studies in Lucian’s Comic Fiction, Leyde, Brill, « Mnemosyne. Supplementum, 43 », 1976, p. 64 (cité dans B. L. Hijmans et M. Zimmerman (éds), Apuleius Madaurensis Metamorphoses, Book IX, Groningen, E. Forster, « Groningen Commentaries on Apuleius », 1995, p. 296).

73 Apulée, Métamorphoses, IX, 33‑38.

74 Ibid., IX, 35.

75 Ibid.

76 Ibid. Les liens familiaux figurent en bonne place dans ce qu’il est convenu d’appeler « l’autoreprésentation des élites », que traduisent les inscriptions érigées dans l’espace public, où l’on trouve fréquemment le rappel de la généalogie, des hommages rendus par les membres de la famille à l’un des leurs, notamment à l’occasion de l’obtention d’une fonction municipale, ou l’association des enfants aux évergésies de leurs parents.

77 Notamment dans l’Occident romain : ainsi P.‑A. Février, « Villes et campagnes des Gaules sous l’Empire », Ktèma, no 6, 1981, p. 359‑372. D. Lengrand, « Les notables et leurs propriétés : la formule “in his praediis” dans l’Empire romain », Revue des études anciennes, t. 98, no 1‑2, 1996, p. 109‑131. M. Christol, « Le patrimoine des notables en Gaule méridionale. Apports et limites de l’épigraphie », Histoire et Sociétés rurales, vol. 19, 2003, p. 133‑150. E. Melchor Gil, « Entre la urbs y el fundus: conmemoración funeraria y honorífica de las élites locales hispano-romanas en sus propiedades rústicas », Veleia, no 30, 2013, p. 119‑142.

78 G. P. Burton, « The Resolution of Territorial Disputes in the Provinces of the Roman Empire », Chiron, no 30, 2000, p. 195‑215.

79 Apulée, Métamorphoses, IX, 36, 1.

80 Ainsi Agennius Urbicus, Controverses sur les terres. Corpus Agrimensorum Romanorum VI, O. Behrends et al. (éds), Luxembourg, Office des publications officielles des Communautés européennes, 2005, en particulier p. 199‑203, sur les mesures prises par les Flaviens.

81 Ibid., 84‑86, 103, 113‑114.

82 Ibid., 86, 88, 125‑126.

83 Ibid., 92.

84 Supra n. 33.

85 Apulée, Métamorphoses, IX, 39‑42.

86 F. Millar, « The World of the Golden Ass », art. cité, p. 67, n. 27.

87 Pseudo-Lucien, Onos, 44.

88 Apologie, 98. Deux siècles et demi plus tard, Augustin offre à son tour un témoignage célèbre sur les paysans de Numidie parlant uniquement punique : Augustin, Lettres, CCIX, 3 ; Lettre 20*. S. Lancel, « L’affaire d’Antoninus de Fussala : pays, choses et gens de la Numidie d’Hippone saisis dans la durée d’une enquête épiscopale (Ep., 20*) », dans Les Lettres de saint Augustin découvertes par Johannes Divjak, communications présentées au colloque des 20 et 21 septembre 1982, Paris, Études augustiniennes, « Études augustiniennes. Série Antiquité, 98 », 1983, p. 267‑285. C. Lepelley, « Témoignages de saint Augustin sur l’ampleur et les limites de l’usage de la langue punique dans l’Afrique de son temps », dans C. Briand-Ponsart (dir.), Identités et cultures dans l’Algérie antique, Mont-Saint-Aignan, Publications des Universités de Rouen et du Havre, « PURH, 377 », 2005, p. 127‑153.

89 Épictète, Entretiens, IV, i, 79 ; F. Millar, « The World of the Golden Ass », art. cité, p. 67‑68, n. 26 ; cf. M. Rostovtzeff, The Social and Economic History of the Roman Empire, vol. II, Oxford, Oxford University Press, 1957, chap. viii, n. 37). Cf. également B. Rossignol, « Élites locales et armées : quelques problèmes », dans M. Cébeillac-Gervasoni et L. Lamoine (dir.), Les élites et leurs facettes. Les élites locales dans le monde hellénistique et romain, Rome / Clermont-Ferrand, École française de Rome / Presses universitaires Blaise-Pascal, « Collection de l’École française de Rome/ERGA, 309/3 », 2003, p. 350 avec la bibliographie.

90 Requêtes des habitants de Skaptopara (Thrace), à Gordien III, en 238 (CIL, III, 12336 ; SIG3, II, 888 ; AE, 1994, 1552), d’Aragua (Phrygie), à Philippe l’Arabe (CIL, III, 14191 ; OGIS, II, 519) et de Kavacɪk, en Lydie (TAM, V.1, 419 ; AE, 1964, 231) ; réponse du gouverneur gravée sur le jambage de la porte d’un bâtiment public à Phaina (Syrie) sous Commode, en 185‑187 (CIG, III, 4551 ; OGIS, II, 609 ; IGLS, XV.1, 13) ; lettre d’un tribun militaire après sollicitation du proconsul d’Asie à Kilter en 187‑191, en Phrygie (SEG, XLVIII, 1514 ; MAMA, XI, 134) ; lettres de Pertinax et du proconsul aux magistrats, au conseil et au peuple de Tabala en Lydie, en 193 (SEG, XXXVIII, 1244 ; XLIII, 870 ; AE, 1990, 949) ; décision du proconsul concernant la cité d’Euhippè, en Carie en 211‑213 (SEG, XIII, 492) ; dossier sur les réquisitions illégales opérées par des soldats à Takina, en Phrygie, en 212‑213 (SEG, XXXVII, 1186 ; AE, 1989, 721) ; voir également la requête des habitants de Dagis (Mésie inférieure) au gouverneur, sous Antonin le Pieux, en 159‑160, pour obtenir une réglementation des prestations auxquelles ils sont astreints semblable à celle dont bénéficie la localité voisine (SEG, XIX, 476, cf. AE, 1960, 334 et les références citées par B. Rossignol, « Élites locales et armées », art. cité, p. 352, n. 13). Voir aussi T. Hauken, Petition and Response: An Epigraphic Study of Petitions to Roman Emperors, 181–249, Bergen / Jonsered, Norwegian Institute at Athens / P. Åstrøms förlag, « Monographs from the Norwegian Institute at Athens, 2 », 1998. Pour la documentation papyrologique sur le même sujet, voir par exemple la lettre du préfet d’Égypte Subatianus Aquila en 206 (Papyrus Oxyrhynchus 1100).

91 B. Rossignol, « Élites locales et armées », art. cité, p. 352, avec la bibliographie.

92 S. Mitchell, « Requisitioned Transport in the Roman Empire: A New Inscription from Pisidia », The Journal of Roman Studies, vol. 66, 1976, p. 106‑131.

93 T. Hauken, Petition and Response, ouvr. cité, p. 217‑243. E. Meyer-Zwiffelhoffer, Πoλιτικῶς ἂρχειν. Zum Regierungsstil der senatorischen Statthalter in den kaiserzeitlichen griechischen Provinzen, Stuttgart, F. Steiner, « Historia. Einzelschriften, 165 », 2002, p. 74‑91.

94 Cf. Pétrone, Satiricon, 48. Les auteurs des Groningen Commmentaries soulignent par exemple le parallèle entre l’accapareur d’Apulée et le riche qui empoisonne les abeilles de son voisin pauvre, sujet d’une declamatio du Pseudo-Quintilien (Declamationes maiores, XIII). Cf. B. L. Hijmans et M. Zimmerman (éds), Apuleius Madaurensis Metamorphoses, Book IX, ouvr. cité, p. 297.

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Pour citer cet article

Référence électronique

Anne-Florence Baroni et Marie-Adeline Le Guennec, « Les Métamorphoses d’Apulée : entre mondes grec et romain, un document pour l’historien ? »Cahiers d’études italiennes [En ligne], 35 | 2022, mis en ligne le 30 septembre 2022, consulté le 03 décembre 2024. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/cei/11474 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/cei.11474

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Auteurs

Anne-Florence Baroni

Univ. Paris 1 Panthéon-Sorbonne, ANHIMA
anne-florence.baroni@univ-paris1.fr

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Marie-Adeline Le Guennec

Université du Québec à Montréal
le_guennec.marie-adeline@uqam.ca

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