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Époque moderne et contemporaine : l’écrivain témoin et interprète de l’événement

Subvertir l’Histoire officielle en collectant les récits du passé à la marge : la démarche militante et contestataire de la romancière italienne contemporaine Laura Pariani

Subverting Official History by Collecting the Stories of a Marginalised Past: The Militant and Dissenting Approach of Contemporary Italian Novelist Laura Pariani
Sovvertire la Storia ufficiale raccogliendo i racconti del passato ai margini: l’approccio attivista ed eversivo della scrittrice italiana contemporanea Laura Pariani
Florence Courriol

Résumés

L’article examine la production de l’écrivaine italienne contemporaine Laura Pariani sous l’angle du fait historique dans lequel elle inscrit minutieusement l’ensemble de ses narrations. Ce faisant, cette étude se propose de montrer que le projet romanesque de L. Pariani est de faire émerger la petite histoire, de faire entendre la parole marginale des oubliés de l’Histoire officielle. Une telle démarche, qui exhume les mémoires orales, propose une figure originale de narratrice-écrivaine : celle d’une archiviste qui est comme investie de la mission d’enregistrement du passé pour mieux recomposer le réel, pour dire une histoire différente.

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Texte intégral

  • 1 Elle est aussi largement traduite à l’étranger, notamment en France où six de ses ouvrages ont déjà (...)
  • 2 Notamment dans ses romans qui racontent l’émigration italienne en Amérique latine, où interviennent (...)

1L’écrivaine italienne Laura Pariani, née en 1951 à Busto Arsizio dans la campagne lombarde, en province de Varese, est l’auteure d’une trentaine d’œuvres de fiction, nouvelles et romans, et s’est imposée dans le paysage littéraire italien actuel1 par son écriture particulière : une langue mêlant d’une part dialecte et italien — quand ce n’est pas une langue tierce qui s’invite dans ses romans2 —, d’autre part les voix et les discours (direct, indirect, indirect libre) de personnages souvent nombreux. Nous verrons qu’une telle construction est vouée, chez Laura Pariani, à dresser le portrait de protagonistes à la marge de la grande Histoire, à décrire les oubliés de l’Histoire officielle, et à se poser en archiviste qui recompose le réel. La question de la place et du choix de l’Histoire dans l’économie de ses romans s’y exprime en effet de manière aiguë, comme un fil rouge qui traverse littéralement l’ensemble de ses écrits. Dès lors, il paraît essentiel d’aborder son œuvre par ce biais‑là et d’en questionner les modalités : quelle(s) Histoire(s) lit‑on, comment nourrissent‑elles le romanesque et à quelles fins ? Nous avons examiné un corpus large de ses œuvres, depuis ses premiers recueils de nouvelles à ses récents romans, en nous concentrant sur quelques‑uns d’entre eux qui font figure d’exemplification.

2Laura Pariani aime à rappeler qu’elle s’est formée au sein des mouvements de contestation italiens et européens propres à la contreculture des années 1970. Par ailleurs, elle a beaucoup voyagé en Amérique du Sud dans le but de se rendre sur les traces de son grand-père émigré en Argentine dans les années 1920 et d’en relater le parcours. On peut donc dire que sans être autobiographiques, ses récits sont étroitement liés temporellement à ces deux éléments historiques et géographiquement à ces deux terres d’attache qui en constituent presque systématiquement la toile de fond. Il en va de même du contenu qui privilégie tantôt la thématique de l’émigration italienne à destination de l’Amérique latine, tantôt celle du monde paysan du Haut-Milanais. Ces deux réalités lui permettent de faire vivre un monde et des personnages qui lui tiennent à cœur, celui des humbles, qui ne figurent pas dans les manuels d’Histoire. Loin d’écrire cependant des romans historiques, où l’Histoire deviendrait l’élément moteur, elle aime plutôt à composer une histoire romanesque, romancée, où les êtres humains ont le rôle central dans la narration, y compris lorsque les événements historiques les écrasent.

1. Une narratrice archiviste : le besoin obsessif d’enregistrer

3Si l’on interroge la place de l’Histoire — du fait passé — dans le projet romanesque de l’auteure, on doit dire d’emblée qu’elle est prépondérante et qu’elle se présente comme un leitmotiv qui lie ses textes entre eux et rend son écriture reconnaissable, comme un véritable projet narratif à l’échelle de toute son œuvre. Cette thématisation omniprésente se décline autour de plusieurs verbes qui sont comme les variantes d’un même thème unificateur : « enregistrer », « évoquer », « raconter », « rappeler / se souvenir ». L’écrivaine ainsi que la narratrice sont en effet comme investies de la mission d’enregistrement du passé. C’est la mémoire des lieux, des temps et des personnes qui intéresse Laura Pariani.

  • 3 L. Pariani, Quando Dio ballava il tango, Milan, Rizzoli, 2002.
  • 4 D. Vittoz, « Postface » à sa traduction Quand Dieu dansait le tango, Paris, Flammarion, 2004, p. 33 (...)
  • 5 L. Pariani, Quando Dio ballava il tango, ouvr. cité, p. 20 pour le texte original, p. 21 pour la tr (...)
  • 6 L. Pariani, Quando Dio ballava il tango, ouvr. cité, p. 286 pour le texte original, p. 316 pour la (...)

4Pour ce faire, un cadre narratif est mis en place dans bon nombre de ses livres, qui ressemble à une mise en abyme de la recherche historique, à travers la figure prédominante d’une narratrice qui enregistre, au sens très concret du terme. Ainsi retrouve‑t‑on cette image de la narratrice-chercheuse qui fait des interviews avec son magnétophone : sorte d’alter ego de l’écrivaine, dont elle partage fréquemment le prénom, et dont le but est d’enregistrer des histoires, des mémoires collectives. Cela est très net dans son roman Quando Dio ballava il tango3, publié en 2002, qui se compose de seize chapitres dans lesquels seize femmes d’une même grande famille racontent leurs destins dans l’Argentine de 1898 à nos jours. Cette saga familiale au féminin se lit comme un voyage à travers différentes générations d’émigrés italiens en Argentine, avec comme fil rouge le parcours du personnage de Corazón, au centre du premier et du dernier chapitres, qui vient donc encadrer le récit. « Arrière-petite-fille argentine de Togn, un Lombard émigré en 1898, Corazón découvre l’Italie de ses lointaines racines en 1978 quand, fuyant les persécutions politiques, elle effectue à rebours le chemin d’espoir de son aïeul4. » Elle y rencontre la vieille Venturina, la fille de Togn restée au pays, qui enclenche le récit de plusieurs générations. On apprend à la fin de l’histoire que Corazón, désormais établie en Italie, retourne en 2001 en Argentine pour y recueillir les témoignages de ces vies suspendues entre deux continents. D’emblée le livre Quando Dio ballava il tango place la mémoire au centre du récit, et ce de manière appuyée voire didactique : il nous est indiqué que Corazón accomplit ce voyage vers l’Italie « parce qu’elle a besoin de retourner en arrière, car son voyage est une fuite dans le passé […] et cette ferme dans la vallée du Tessin est la patrie de sa mémoire5 ». Le roman mime ce voyage qui doit réveiller les souvenirs enfouis en chacune des femmes et permettre de reconstruire une mémoire féminine familiale, puisque l’ouvrage se clôt sur le personnage de Corazón venue à « la recherche de matériau filmique en vue d’un documentaire sur la situation des Italo-Argentins6 » avant que les mémoires individuelles ne disparaissent. C’est là un geste final dont le sens est plus qu’explicite et dit bien l’urgence de consigner et conserver dans le temps les témoignages non seulement sonores mais aussi filmiques pour faire œuvre d’archiviste voire d’historienne.

  • 7 L. Pariani, La valle delle donne lupo, Turin, Einaudi, 2011.
  • 8 Ibid., p. 9‑10. En traduction française (de notre fait), cela signifie : « Je m’appelle Laura. Je s (...)
  • 9 Ibid., p. 6. En traduction française (de notre fait), cela signifie : « Fenìsia C. naît en novembre (...)

5Dans le roman intitulé La valle delle donne lupo (2011)7, une fresque qui court sur une très longue partie de l’Italie du xxe siècle — de 1928 à 2007 — et se situe dans un lieu géographique précis, les vallées du Haut-Piémont, on trouve justement, qui va encadrer l’ensemble du roman dès le deuxième chapitre, un dialogue entre une vieille femme et la narratrice-chercheuse qui correspond en tous points (prénom, origine lombarde, profession d’écrivaine, intérêts pour le matériau du passé) à l’autrice Laura Pariani. Le dialogue débute par une présentation de cette dernière : « Io mi chiamo Laura. Sono lombarda […] », pour se poursuivre par les motivations de sa recherche : « Sto raccogliendo materiali per un libro. Di mestiere scrivo […] Mi interessano le tradizioni, le leggende della montagna, le storie di una volta » et, quelques lignes plus loin : « Come le ho accennato, sto ricercando le tradizioni della montagna piemontese: è da un po’ di tempo che giro per la valle facendo interviste col mio registratore8. » En effet, la narratrice-archiviste veut aller à la rencontre de Fenísia, une femme qui vit isolée dans un petit village de montagne. Cette dernière est définie clairement par les villageois et par la narratrice qui reprend à son compte cette appellation, comme « “la memoria” di questi posti ». En fait, le roman débute comme une chronique, un enregistrement de témoignage véridique, où narratrice et autrice se confondent pour laisser ensuite la place à une seconde narratrice, Fenísia, et faire entendre sa voix si longtemps marginalisée. Ainsi, à l’instar de Quando Dio ballava il tango, La valle delle donne lupo thématise la recherche anthropologique et l’intérêt pour le monde rural et les traditions ancestrales. Du point de vue stylistique, deux éléments concourent à restituer l’idée d’un témoignage et d’un enregistrement factuel des histoires racontées par Fenísia : d’une part l’emploi du présent de l’indicatif, dès le tout début du roman : « Fenísia C. nasce nel novembre del 1928 nella casa del custode del cimitero del Paese Piccolo, come la gente della valle chiama l’abitato che sta in cima al pendio, per distinguerlo dal Paese Grande a fondovalle9 » ; d’autre part le fait que

  • 10 E. Paccagnini, « Le donne “balenghe” che fanno paura. Il nuovo romanzo di Laura Pariani », Il Corri (...)

[…] il racconto si sviluppa in diffuse risposte ad essenziali domande passando dal registratore alla pagina attraverso un procedimento trascrittivo che opera una sorta di andirivieni tra prospettiva interna al personaggio e mediazione esterna più o meno poggiante su Fenísia10.

6Ces deux techniques, auxquelles s’ajoute à nouveau la description de la chercheuse Laura qui se déplace avec un magnétophone, contribuent à objectiver les récits de la vieille femme. Laura Pariani se pose même en véritable ethnologue d’une culture paysanne qui, si elle n’est pas tout à fait morte, serait en passe de l’être si la Laura chercheuse de 2006, pendant quelques après-midi, n’enregistrait pas les histoires racontées par Fenísia. Et de même que dans le roman italo-argentin, l’exploration cette fois‑ci de la montagne piémontaise s’accompagne d’un discours sur le féminin, et en particulier sur la douloureuse condition féminine dans ces contrées qui sont comme exclues de l’Histoire et qui excluent et soumettent à leur tour — parfois même de manière radicale — les femmes jugées trop différentes ou trop rebelles, les considérant comme des strie (sorcières) ou des balenghe (extravagantes, fantasques), des donne lupo (femmes loup) précisément dont la société repliée sur elle‑même les affuble. Laura Pariani se place clairement dans une approche militante : préservation de la littérature orale trop souvent mise au ban, engagement féministe.

7Cela naît d’un besoin chez l’écrivaine qu’elle est : pour valider ces différentes strates militantes, Laura Pariani a besoin d’ancrer toutes ses fictions dans le réel, dans la réalité historique. De ce fait, ses narrations proposent une date et un espace circonscrits et précis. C’est le cas dès l’écriture de son premier texte, un recueil de nouvelles intitulé Di corno o d’oro et publié chez Sellerio en 1993. Elle déclare ainsi :

  • 11 L. Pariani, Di corno o d’oro, Palerme, Sellerio, 1993, quatrième de couverture.

Le date, per me, sono essenziali per costruire i miei personaggi, che non vivono dovunque e sempre. Come lettore, io trovo vuoto e piatto un certo modo di raccontare, i cui personaggi potrebbero esistere da qualsiasi parte, a New York come a Milano, in una condizione più teorica che reale. Per me — per me scrittore intendo — non è così. Io devo vedere i miei personaggi in uno spazio e in un tempo precisi, altrimenti non riesco a trovare il loro spessore e la loro voce — e con il termine ‘voce’ non voglio dire solo le loro parole o il loro fraseggiare, ma anche la loro coscienza e il suono dei loro pensieri, che vive ed è immerso in un periodo determinato (la fine dell’Ottocento) e in un ambiente specifico (la valle del Ticino a quell’epoca). Ho un debito verso i luoghi che mi hanno permesso di far esistere i miei personaggi, di vederli muoversi e agire11.

8Du point de vue des temps, une telle inscription se reflète dans la précision des dates que l’on retrouve au fil de ses textes. Dans Di corno o d’oro par exemple, chacune des neuf nouvelles porte un titre puis, en sous‑titre, présente la date précise à laquelle se déroule la fiction. Elles ont même la particularité d’être d’une extrême précision, renseignant le jour et le mois. Dans La valle delle donne lupo, à la construction particulière, les chapitres portent tous leur numéro et, pour les chapitres impairs, qui concentrent les souvenirs de Fenìsia, le temps du passé et de son enfance donc, une date qui leur est accolée : le premier par exemple s’intitule « Uno – 1928‑30 ». Quant aux chapitres pairs, Laura Pariani n’y fait figurer que le numéro, sans date : ce sont les chapitres dont la narration correspond au temps de l’écriture, à la modernité, quand Fenìsia est vieille et que la narratrice Laura, à la recherche de matériau, vient lui parler et l’interviewer.

  • 12 L. Pariani interviewée par F. Panzeri, « Voci di una “mia” Lombardia », interview faite à Laura Par (...)
  • 13 L. Pariani, La Signora dei porci, Milan, Rizzoli, 1999, p. 202 : « ultimi della terra ».
  • 14 G. Sulis, « Dare voce alle vite marginali: plurilinguismo di genere nella narrativa di Laura Parian (...)
  • 15 Ibid., p. 409 : « […] più che la letteratura colta e la consultazione dei dizionari, a irrorare il (...)

9Ce choix d’un ancrage historique détermine la construction de l’ensemble de la production de Laura Pariani, et contribue à la grande homogénéité de ses textes. Il n’est pas à considérer comme une contrainte, bien au contraire : il part plutôt, chez l’écrivaine, d’une envie et d’une volonté, d’un vrai besoin d’être au plus près de l’histoire vécue par les petites gens. Et il entraîne une adéquation des langues, des choix stylistiques particulièrement forts qui donnent tout leur sens au projet et le matérialisent. C’est pourquoi Laura Pariani emploie une écriture mêlée, reconnaissable entre toutes, qui revient dans la quasi-totalité de ses œuvres : fondée sur l’utilisation du discours indirect libre d’une part et l’insertion d’éléments dialectaux d’autre part, elle démontre l’intention esthétique véritable au fondement de la poétique de l’autrice, qui sert et justifie tout son discours. Laura Pariani a ainsi recours principalement à la langue de ses souvenirs, c’est-à-dire aux dialectes de son enfance, à savoir le bustocco, variété du lombard occidental parlée à Busto Arsizio dans la province de Varese, mais aussi les parlers du bas Tessin et des vallées du Haut-Piémont. Le dialecte représente également pour l’écrivaine la langue de la mémoire, mais d’une mémoire qui est en train de se perdre, pour deux raisons bien distinctes, à la fois parce que l’italien standard se développe à ses dépens, et parce qu’elle‑même fréquente rarement ce dialecte. Elle le définit comme un dialecte « très archaïque » et explique que son emploi permet de faire revivre de manière plus juste telle ou telle expérience concrète, liée au passé : « Ces langues réveillent en moi des sensations et des voix de personnes désormais lointaines. Elles sont “ma” Lombardie12. » Si Laura Pariani est nourrie de la tradition lombarde, qu’elle a bien sûr lu les poètes lombards et les écrivains mêlant à l’italien le dialecte (Testori, mais aussi Gadda), c’est un chemin personnel et somme toute volontairement marginal qu’elle emprunte. Cela s’explique à la fois par la provenance de son dialecte circonscrit, mais aussi et surtout par ses intentions esthétiques, à savoir l’intérêt qu’elle porte à la marginalité sous toutes ses formes (géographique, ethno-anthropologique). Le dialecte a été mis à la marge par la société italienne standardisée et va se perdre si on ne le défend pas. Il va justement s’agir, dans son projet artistique, de donner enfin voix aux exclus mais également ses lettres de noblesse à un dialecte qui, contrairement au milanais, n’a pas eu de tradition littéraire. Ce dialecte des campagnes du nord de l’Italie dans la deuxième moitié du xixe siècle est marginal à tous égards, c’est celui de ceux que Laura Pariani nomme les « derniers de la terre13 », situés « aux marges de l’espace social et national — par défaut (les micropatries locales)14 ». Non seulement, donc, Laura Pariani ne cherche pas à s’insérer dans la tradition du milanais illustre, mais elle s’intéresse aux dialectes rustiques et à une culture orale qui, là encore, n’a pas eu voix au chapitre dans la littérature : « Ce n’est pas tant la littérature cultivée et la consultation des dictionnaires qui irriguent le texte, que le dialecte parlé qui s’est sédimenté dans la mémoire auditive et réhabilite les voix de l’enfance paysanne, en particulier celles des femmes, des anciens et des enfants15 », écrit la chercheuse Gigliola Sulis sur l’œuvre de Laura Pariani.

2. Quel matériau historique pour la romancière ? Figures et modalités de l’Histoire et de la « petite » histoire

10Dès lors, et si l’on a vu que l’outil linguistique est le dialecte, on peut se demander quel est le matériau historique utilisé pour donner une épaisseur narrative à la fiction romanesque. Il convient en effet de donner quelques précisions et de comprendre comment la romancière trouve et manie de telles sources sur lesquelles elle fonde ensuite ses textes. C’est une déclaration faite à l’occasion de la sortie de Di corno o d’oro qui nous donne matière à réfléchir : « Suggerimenti mi son venuti anche da alcuni documenti d’archivio — certo ai margini della storia ufficiale — come una lettera di licenziamento del Comune di Inveruno per una maestra nubile in stato interessante, relazioni di medici condotti sulla pellagra. » Effectivement, on trouve pour la troisième nouvelle qui compose le recueil, intitulée « La morale della stalla », l’histoire d’une jeune fille atteinte de pellagre et un compte rendu d’internement de cette jeune fille avec description des symptômes. Le pseudo-document, pour être différencié du reste de la narration, est en italique : « Ricovero di Euròsia Scampini, di anni ventidue, nata a…, di condizione miserabile… » Ainsi ces courts textes, tous en italique, scandent‑ils le récit, au rythme des étapes de la maladie enregistrées par les infirmiers et les médecins du Regio Manicomio de Crivelli di Mombello, en 1883, jusqu’à la mort de la jeune fille onze jours après son internement à l’hôpital. On note dans la même nouvelle une variation de registre entre, d’une part, cette langue écrite bureaucratique italienne émanant du corps médical et, de l’autre, la narration conduite par la jeune fille à la première personne, adressée « al sciur dutur » et mêlée de dialecte, narrant son enfance et sa vie. Laura Pariani continue à lister les documents d’archive qui lui ont été utiles pour ces nouvelles et nous signale — ce sont là ses mots — que ce sont des « frammenti, brandelli di storie dimenticate e vaghe, che sillabano immagini e frasi da ripulire, elaborare, ricucire, riempiendone i vuoti. Il bello del lavoro di uno scrittore sta proprio in questo: può riscattare delle vicende che nella realtà sono sempre frantumate e caotiche ».

11Outre les matériaux écrits que l’écrivaine a pu trouver dans des archives, un matériau plus évanescent, plus complexe à manipuler, intéresse particulièrement Laura Pariani : c’est le matériau oral, celui qu’elle cherche à creuser, à fixer parce qu’il échappe précisément et peut vite se perdre et tomber dans l’oubli. À ce titre, les déclarations de poétique de l’écrivaine sont tout aussi intéressantes que ses œuvres, car elle prend soin d’expliquer ses sources et sa méthode, de même qu’elle le fait dans plusieurs de ses ouvrages, où elle ajoute des « Notes de l’auteure ». Comme cette longue « Note de l’auteure » à La valle delle donne lupo, un paratexte semblable à une postface, où elle explique sa manière de procéder en tant qu’écrivaine archiviste mettant en scène une sorte de narratrice anthropologue :

In questi anni ho seguito con attenzione il lavoro di Cesare Bermani che da una vita raccoglie testimonianze orali. L’ascolto delle sue registrazioni mi ha messo sulla strada di questo romanzo, accendendo dentro di me l’idea dell’intervistatrice e dell’intervistata. O forse dovrei dire: resuscitando, perché negli anni Settanta e Ottanta ho raccolto anch’io varie interviste a donne anziane in alcune zone dell’Alto Piemonte riguardo a canzoni, leggende, detti popolari, aneddoti di quella singolare quotidianità che costituisce la vita montagnina. Il mio interesse di allora nasceva dalla “scoperta” del folcore tipica di quegli anni, ma anche da quella sindrome antiquaria che coglie spesso i giovani quando si trovano di fronte a una cultura destinata a sparire; e forse c’entra anche la passione che ho sempre covato nei confronti degli “ultimi” e delle “frontiere”.

12Et elle explique ainsi la genèse de ce roman :

Nell’ultimo trasloco mi sono capitate tra le mani alcune cassette contenenti quelle vecchie registrazioni, quasi incomprensibili perché rovinate dal tempo. Ho tentato di ritrascrivere ciò che era rimasto. Ma, dato che la lingua delle donne intervistate era un dialetto particolarmente ostico, mi sono ritrovata inevitabilmente a riempire un quadernetto con una serie di traduzioni: “l’intervistata riferisce che…”, “lei ricorda che…”. Da qui nasce la forma dei capitoli pari di questo romanzo dove, per la parte riguardante il pensare e il sentire della Fenìsia, ho sempre usato la terza persona, perché volevo che fosse chiaro che l’intervistatrice interpreta/traduce/tradisce la sua intervistata. Per conservare il “tuorlo” di quelle lontane voci, ho cercato soltanto un periodare che ricostruisse le inflessioni, il timbro, gli ammiccamenti, i tic delle persone anziane che si raccontano. […] Infine, riguardo all’ideazione del protagonista, essenziali sono state le conversazioni con Cesare Bermani, da cui ho tratto in particolare le informazioni sul lavoro delle mondine. Naturalmente la Fenìsia non esiste, ma alla base della sua costruzione stanno le memorie di mia nonna Giovanna, alla quale debbo soprattutto una visione del mondo essenzialmente “orale”.

13Ce qui est intéressant, c’est que la figure tutélaire qu’elle évoque, Cesare Bermani, est un historien, né en 1937, qui a été l’un des premiers en Italie à pratiquer la méthode historiographique de l’histoire orale, parmi les promoteurs de l’Associazione italiana di storia orale, et fondateur de l’Istituto Ernesto De Martino. On a ainsi, qui ponctuent sans cesse le texte, des comptines, des proverbes, des histoires racontées par les anciens, des chansons, des prières (p. 73) et des chants religieux (p. 37), des berceuses, des poèmes (p. 50 et 65), des airs de danse (p. 31), des incantations (p. 43). Il en va de même dans les nouvelles de Di corno o d’oro, dont le matériau de la narration est fait notamment de chansons, qui sont ensuite commentées dans la narration — notons l’exemple significatif d’une chanson que se met à jouer l’un des personnages, figure de l’émigré italien en Argentine, le Carlén. On trouvera ainsi beaucoup de chansons de l’émigration (p. 29 : « Quando sarò in Mérica / Mi farò fare un ritràto / Ma farò fare un ritràto / Vistì da Mericàn… »), de comptines liées à l’enfance des personnages (p. 34), de proverbes et dictons populaires en dialecte (p. 36 : « bocca sarâ non ciàpa mosche »), de fables (la deuxième nouvelle, « Fine del gran bigatto », commence par toute une comptine aux allures de fable qui est en dialecte pur, « La filastrocca del rattén ». Il s’agit d’un long paragraphe sans introduction, le lecteur est plongé dans cette langue étrange, et il n’y a que la police d’orthographe qui est un peu plus petite, pour le différencier du reste de la narration. Puis, comme une sorte d’incise didactique, un commentaire métanarratif : « Lucia si contava la filastrocca del rattén, per non cedere al sonno, dondolandosi sulla banchetta. »).

14Or qui sont les figures dépositaires de cette mémoire et histoire orales ? Ce sont les personnages à la marge de l’Histoire, les oubliés de la grande Histoire. C’est la « petite » histoire que Laura Pariani veut nous raconter, qui n’a rien d’inférieur pour l’écrivaine et doit au contraire plus souvent passer au premier plan grâce au pouvoir de la littérature. Il s’agit, en somme, de l’histoire non officielle, celle qui a souvent été rayée des manuels. Celle aussi qui se situe entre la grande Histoire et les légendes populaires. C’est pourquoi on a régulièrement des protagonistes femmes, on l’a vu, mais aussi des paysans, c’est-à-dire ces figures qui souvent ont représenté la marge. Cette omniprésence du récit entre femmes et de la transmission des mémoires d’une génération à l’autre, depuis les personnages des sorcières dans La Signora dei porci jusqu’à la vieille Fenìsia de La valle delle donne lupo qui confie ses souvenirs à une anthropologue, reflète l’idée que, pour ces personnages à la marge du fait de leur condition féminine,

  • 16 G. Sulis, « Il racconto come militanza: sulle radici femministe dell’opera di Laura Pariani », Cahi (...)

[…] le récit familial, intergénérationnel, de groupe, et qui revêt souvent des valeurs mythiques voire magiques, devant l’âtre ou devant un magnétophone est une ancre de salut dans une réalité impossible à changer. Le partage des histoires, des tranches de vie, même s’il est une consolation illusoire, reste la seule vraie richesse à leur disposition16.

15Tout se passe comme si Laura Pariani retournait l’Histoire, qu’elle allait gratter pour montrer les plaies de l’Histoire en filigrane, comme on ne les raconte pas dans les manuels : elle réévoque ainsi des voix vouées à disparaître. Dans Quando Dio ballava il tango, elle a pour objectif de raconter avant tout la tragédie de l’émigration, sans en omettre aucun aspect négatif, histoires d’abandons, de déchirement, d’absences. Dans La valle delle donne lupo, on a des indices de la période historique douloureuse, la Grande Guerre d’une part, à travers un oncle de la famille de Fenìsia dont le chapeau, sur la photo, « cerca di coprire la lunga cicatrice sulla fronte, ricordo di una brutta ferita della Prima guerra mondiale », mais aussi le fascisme, par l’un des personnages, « Il Vittorio, dirigente locale del Fascio a braccio teso davanti al ritratto labbruto del Duce ». Cette volonté de subvertir l’Histoire officielle implique aussi de la placer à l’arrière-plan : et en effet l’Histoire des grands événements n’est souvent qu’un fond dans les textes de Laura Pariani, fond face auquel les personnages se démènent, et qui ne fait qu’effleurer leurs histoires à eux, vécues dans leur microcosme et leur société historiquement fermés. C’est le cas dans ce même roman La valle delle donne lupo, où la Seconde Guerre mondiale et la Résistance ne constituent qu’un arrière-plan qui ne touche quasiment pas les personnages. De même, il est évident à la lecture de l’œuvre de l’écrivaine lombarde que l’Histoire est explicitement vue de manière incompréhensible par ces pauvres hommes et femmes, et qu’elle leur arrive plutôt par les images et les sensations — et notamment des sons en des langues étrangères inintelligibles. Dans Il Pettine, recueil de nouvelles publié chez Sellerio en 1995, le récit de la première nouvelle, qui donne son titre au recueil, se déroule en 1646, et la famille de paysans qui en est la protagoniste rapproche les grandes tragédies de l’Histoire (ici, en l’occurrence, les guerres entre Français et Espagnols) de ce qu’elle connaît au quotidien. Ainsi dans la description du champ de bataille lit‑on : « A volte si imbatteva in feriti che urlavano la propria morte. Oppure cadaveri come capretti scannati dal beccaio: teste e mani staccate, che gli uccelli si erano ormai appollaiati sui morti e se li mangiavano dentro, tirando fuori le busècche. E sempre ovunque quell’odore agro, ‘me l’üga zèrba’. » De même dans La valle delle donne lupo, la fin de la Seconde Guerre mondiale vue par Fenìsia, au chapitre xvii – 1945‑49, est parlante, puisque le personnage ne retient que ce qui, dans ce fait historique, a modifié son quotidien : « Finita la guerra, è un accavallarsi di novità: presèmpio, le donne partigiane vestite da maschi, in maglione e pantaloni; oppure le gomme da masticare, verdoline in carta d’argento: stanno in bocca per ore e non si consumano mai; le latte di cioccolata in polvere, con la scritta Dono del Popolo Americano […]. »

3. Le fait passé, reflet de l’engagement pleinement actuel de l’écrivaine

16Enfin, il faut ici se poser la question de la raison pour laquelle une écrivaine contemporaine comme Laura Pariani regarde tant en arrière. L’hypothèse la plus plausible à cette nécessité vitale du fait historique pour sa prose est qu’elle veut faire œuvre pour une identité collective autre. Il convient d’appeler cette démarche un militantisme par les lettres : Laura Pariani s’empare en effet du fait historique à la marge, qui ne semble avoir aucun rapport avec l’actualité, tant il semble parfois éloigné et reculé, pour en montrer justement et au contraire tous les liens avec la période où elle écrit et où elle a décidé d’aller creuser cette histoire méconnue. Son rôle en tant que romancière est d’aller exhumer ce qui est précisément ignoré. Le matériau historique n’est en rien évasion chez Laura Pariani, et si son œuvre est largement tournée vers des sujets du passé, c’est qu’ils ont toujours un lien avec le présent, quelque chose à nous et à lui dire dans notre époque contemporaine, et ce par le fil rouge de la mémoire. Comme le dit Brigitte Urbani,

Les voyages dans le passé sont aussi une façon d’explorer le présent, comme le confirment ses deux livres Dio non ama i bambini qui décrit les immigrés italiens de Buenos Aires au début du xxe, ceux‑ci anticipant les « extracomunitari » des villes italiennes d’aujourd’hui, et Ghiacciofuoco, un livre du présent, un présent de femmes qui ne sont plus seulement argentines, mais aussi mexicaines, chiliennes, boliviennes, brésiliennes.

17Dans Quando Dio ballava il tango, le personnage de Corazón y apparaît comme un personnage-relais car c’est par elle que les problématiques du passé s’inscrivent dans le présent. Laura Pariani prend soin de montrer les liens qui unissent passé et présent et les problématiques récurrentes autour des processus migratoires. Il s’agit de dire que c’est un problème toujours actuel, qu’il ne faut pas le nier ; au contraire, il faut accepter le déracinement, accepter cette marque de diversité, ce flou identitaire. Et c’est précisément ce chemin qu’accomplit Corazón :

  • 17 L. Pariani, Quando Dio ballava il tango, ouvr. cité, p. 291 pour le texte original, p. 321‑322 pour (...)

Adesso che ha passato gli ultimi ventidue anni nella Cascina Malpensata da cui sono partiti i primi emigranti della sua famiglia, il luogo da dove tutto è cominciato; adesso che ha sperimentato sulla propria pelle cosa si prova a vivere in una terra dove non si è nati, parlando un’altra lingua con un accento mai perfetto, quasi fosse un marchio di diversità: come se, invece di appartenere a due paesi, non si appartenesse a nessuno. Confondendo uno y otro17.

18L’idée est de faire mémoire de tout en subvertissant la grande Histoire et en reportant au centre de l’attention ce qui a trop longtemps été à la marge, en collectant les voix du passé pour mieux recomposer le réel, pour dire une histoire différente, pour redire à sa manière l’Histoire. Une démarche contestataire, où il est question de faire émerger ce que l’on nomme à tort la « petite » histoire, pour mieux dire la société de son temps.

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Bibliographie

Panzeri Fulvio, « Voci di una “mia” Lombardia », interview faite à Laura Pariani, dans F. Panzeri (éd.), Senza rete, Conversazioni sulla “nuova” narrativa italiana, Ancône, peQuod, 1999, p. 235‑242.

Pariani Laura, Di corno o d’oro, Palerme, Sellerio, 1993.

Pariani Laura, Il pettine, Palerme, Sellerio, 1995.

Pariani Laura, La Signora dei porci, Milan, Rizzoli, 1999.

Pariani Laura, Quando Dio ballava il tango, Milan, Rizzoli, 2002.

Pariani Laura, La valle delle donne lupo, Turin, Einaudi, 2011.

Sulis Gigliola, « Dare voce alle vite marginali: plurilinguismo di genere nella narrativa di Laura Pariani », The Italianist, vol. 33, no 3, 2013, p. 405‑426.

Sulis Gigliola, « Il racconto come militanza: sulle radici femministe dell’opera di Laura Pariani », Cahiers d’études italiennes, no 16, 2013, p. 303‑324, <https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/cei.1299>.

Urbani Brigitte, « Tra passato e presente. Scrittura femminile di Laura Pariani », Maschile/femminile nella letteratura italiana degli anni 2000, Narrativa, no 30, 2008, p. 111‑123.

Vittoz Dominique, « Postface » à sa traduction Quand Dieu dansait le tango, Paris, Flammarion, 2004.

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Notes

1 Elle est aussi largement traduite à l’étranger, notamment en France où six de ses ouvrages ont déjà paru.

2 Notamment dans ses romans qui racontent l’émigration italienne en Amérique latine, où interviennent des expressions en castillan.

3 L. Pariani, Quando Dio ballava il tango, Milan, Rizzoli, 2002.

4 D. Vittoz, « Postface » à sa traduction Quand Dieu dansait le tango, Paris, Flammarion, 2004, p. 335.

5 L. Pariani, Quando Dio ballava il tango, ouvr. cité, p. 20 pour le texte original, p. 21 pour la traduction, ouvr. cité : « […] proprio perché ha bisogno di tornare indietro, ché il suo viaggio è una fuga nel passato […] e questa cascina nella valle del Ticino è la terra della memoria. »

6 L. Pariani, Quando Dio ballava il tango, ouvr. cité, p. 286 pour le texte original, p. 316 pour la traduction, ouvr. cité : « […] il motivo dichiarato è stato quello di raccogliere materiale filmato per ricavarne un documentario sulla situazione degli italoargentini […]. »

7 L. Pariani, La valle delle donne lupo, Turin, Einaudi, 2011.

8 Ibid., p. 9‑10. En traduction française (de notre fait), cela signifie : « Je m’appelle Laura. Je suis lombarde […] » ; « Je suis en train de recueillir du matériel pour un livre. Mon métier, c’est d’écrire […] Je m’intéresse aux traditions, aux légendes de la montagne, aux histoires du temps jadis » ; « Comme je vous l’ai dit, je suis à la recherche des traditions de la montagne piémontaise : ça fait un petit moment que je me promène dans la vallée en faisant des interviews avec mon magnétophone ».

9 Ibid., p. 6. En traduction française (de notre fait), cela signifie : « Fenìsia C. naît en novembre 1928 dans la maison du gardien du cimetière du Petit Village, comme les gens nomment la petite agglomération rurale qui se trouve au sommet, pour le distinguer du Grand Village au fond de la vallée. »

10 E. Paccagnini, « Le donne “balenghe” che fanno paura. Il nuovo romanzo di Laura Pariani », Il Corriere della sera, 21 octobre 2011.

11 L. Pariani, Di corno o d’oro, Palerme, Sellerio, 1993, quatrième de couverture.

12 L. Pariani interviewée par F. Panzeri, « Voci di una “mia” Lombardia », interview faite à Laura Pariani, dans F. Panzeri (éd.), Senza rete, Conversazioni sulla “nuova” narrativa italiana, Ancône, peQuod, 1999, p. 235‑242, ici p. 238 : « Proprio queste lingue risvegliano in me sensazioni e voci di persone ormai lontane. Sono la “mia” Lombardia. »

13 L. Pariani, La Signora dei porci, Milan, Rizzoli, 1999, p. 202 : « ultimi della terra ».

14 G. Sulis, « Dare voce alle vite marginali: plurilinguismo di genere nella narrativa di Laura Pariani », The Italianist, vol. 33, no 3, 2013, p. 405‑426, ici p. 408 : « La geografia letteraria della Pariani privilegia ciò che è ai margini dello spazio sociale e nazionale — per difetto (le micropatrie locali). »

15 Ibid., p. 409 : « […] più che la letteratura colta e la consultazione dei dizionari, a irrorare il testo è il dialetto parlato, sedimentato nella memoria acustica, recupero delle voci dell’infanzia paesana, in specie di donne, anziani, bambini […]. »

16 G. Sulis, « Il racconto come militanza: sulle radici femministe dell’opera di Laura Pariani », Cahiers d’études italiennes, no 16, 2013, p. 303‑315, ici p. 313 : « Per le donne dalla Pariani il racconto — familiare, intergenerazionale, o di gruppo, spesso con valenze mitiche e perfino magiche, al focolare o davanti a un registratore — è un’ancora di salvezza in una realtà che non si riesce a modificare. La condivisione delle storie di vita, anche se consolazione illusoria, rimane l’unica vera ricchezza a loro disposizione. ».

17 L. Pariani, Quando Dio ballava il tango, ouvr. cité, p. 291 pour le texte original, p. 321‑322 pour la traduction, ouvr. cité : « Elle qui vient de passer les vingt-deux dernières années de sa vie dans la Cascina Malpensata dont sont partis les premiers émigrants de sa famille, l’endroit où tout a commencé ; elle qui a payé de sa personne pour savoir ce qu’on ressent quand il faut vivre dans un pays où on n’est pas né, parler une autre langue avec un accent qui n’est jamais parfait, comme s’il était la marque d’une différence ; comme si, au lieu d’appartenir à deux pays, on n’appartenait à aucun. Confondant uno y otro. »

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Pour citer cet article

Référence électronique

Florence Courriol, « Subvertir l’Histoire officielle en collectant les récits du passé à la marge : la démarche militante et contestataire de la romancière italienne contemporaine Laura Pariani »Cahiers d’études italiennes [En ligne], 35 | 2022, mis en ligne le 30 septembre 2022, consulté le 05 décembre 2024. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/cei/11330 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/cei.11330

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Auteur

Florence Courriol

Docteure en études italiennes rattachée au CAER – Aix-Marseille Université
flocourriol@yahoo.fr

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