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Dossier

L’apprentissage du calcul mental en contexte postcolonial : représentations et performances des élèves de l’enseignement primaire en Martinique

Learning mental calculation in a postcolonial context: perceptions and performance of primary school pupils in Martinique
Manuel Philippe Émile Garçon

Résumés

Les études les plus récentes sur les compétences mathématiques des élèves français ont mis en évidence les faibles résultats des jeunes ultramarins. Plusieurs recherches ont suggéré que, dans certains contextes postcoloniaux (comme les territoires de la France d’outre-mer), les faibles performances des élèves dans le domaine des mathématiques sont corrélées avec les représentations mentales négatives associées à ce domaine du savoir, produites par les préjugés et les stéréotypes hérités du passé colonial. En suivant cette hypothèse, cet article présente les résultats d’une étude menée dans un contexte ultramarin, auprès de 2 710 élèves des écoles primaires de l’académie de la Martinique. L’utilisation du Test de repérage des difficultés en Mathématiques, associé à une enquête sur les représentations mentales autour des mathématiques à laquelle ont participé 89 enfants, ont permis de confirmer les faibles performances des élèves martiniquais, tout en dégageant des pistes d’analyse qui permettraient d’imaginer des stratégies didactiques plus contextualisées et efficaces.

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Texte intégral

1. Introduction

« Je considère que l’Afrique est tout simplement le continent central, global, incontournable car c’est ici que se télescopent tous les défis contemporains. C’est en Afrique que se jouera une partie du basculement du monde »
Emmanuel Macron, 28 novembre 2017, Ouagadougou.

1Ces mots forts du Président de la république française ont été le point de départ de l’appel à projet du ministère de la Culture : Africa2020. C’est un projet panafricain et pluridisciplinaire, centré sur l’innovation dans les arts, les sciences, les technologies, l’entrepreneuriat et l’économie. Cette action inédite avait pour but : de favoriser les mobilités, de mettre à l’honneur les femmes dans tous les secteurs d’activité et de cibler en particulier la jeunesse. L’éducation y est présentée comme une question transversale pour le partage et la transmission de savoir. Plusieurs auteurs – notamment au sein du CRREF (unité de recherche « Contextes, Recherches et Ressources en Éducation et Formation » de l’Université des Antilles) (Delcroix, 2019 ; Forissier, 2019 ; Ailincai, Alì et Alby, 2018) – ont montré que la prise en compte des variables de contexte peut contribuer à améliorer les performances des élèves. En suivant cette approche, l’Institut national supérieur du professorat et de l’éducation (INSPE) de l’académie de Martinique, composante de l’Université des Antilles, a répondu à l’appel à projet Africa2020 en proposant la réalisation d’une étude comparative des programmes, des pratiques d’enseignement, des stratégies d’apprentissage du calcul mental en Afrique (en étudiant le cas du Sénégal) et en France d’outre-mer (en étudiant le cas de la Martinique). Pour faciliter le travail de restitution des résultats auprès du grand public, dans la communication institutionnelle et sur la toile, le projet est aussi connu par son intitulé court : Calcul Mental Africa2020.

2Plusieurs questions ont ainsi émergé :

  • Comment enseigne-t-on le calcul mental en Martinique et au Sénégal ? Quelles sont les connaissances, les attitudes et les pratiques locales ?

  • Quelles sont les performances des élèves en Martinique et au Sénégal ?

  • Est-il possible d’améliorer les compétences en calcul mental en utilisant des outils traditionnels (jeu de l’Awélé, boulier classique, boulier chinois, boulier japonais) ?

3Cet article présente les résultats de la première étape de ce programme, qui visait à tester les compétences des élèves des écoles primaires de la Martinique en calcul mental mais aussi à appréhender la construction mentale qu’ils avaient du concept du nombre et de sa représentation chiffrée. Entre les mois de mai et juin 2021, 2 710 élèves de 32 établissements scolaires relevant de l’enseignement public de l’académie de la Martinique ont été testés. La première partie du test a pris la forme d’une dictée de nombres, allant des nombres les plus simples qu’ils puissent connaître aux niveaux les plus complexes. La deuxième partie du test porte sur le domaine de la comparaison de nombres à partir de leur représentation chiffrée ; la troisième partie mesure les performances dans le domaine du calcul des compléments à un nombre donné et enfin la quatrième partie propose une évaluation de la performance (vitesse et précision du calcul) à partir d’une batterie de calculs exigeant l’utilisation des quatre opérations : addition, soustraction, multiplication et division.

4Dans ce texte, nous commencerons par introduire la question de l’enseignement des mathématiques, notamment dans les territoires en contexte post-colonial. Nous présenterons ensuite la démarche de recherche et les performances des élèves de la Martinique. Nous poursuivrons par une discussion des résultats et une réflexion finale autour des opportunités qu’offre la contextualisation didactique pour faciliter l’apprentissage de certaines notions et procédures mathématiques.

2. Cadre conceptuel

5Les mathématiques ont longtemps été considérées comme une matière qui implique l’apprentissage de nombres, de concepts et de contenus supposés universellement reconnus. Dans cette conception, elles consistent en un ensemble d’axiomes, de connaissances, d’algorithmes et de théorèmes. Depuis les travaux de Lev Vygotski (1934) et Jean Piaget (1935), l’approche socio-constructiviste a permis de mettre en valeur le rôle joué par le contexte socio-culturel proximal dans le développement des individus. Les études d’Uri Bronfrenbrenner (1986, 2005) ont prolongé ces premières réflexions, en introduisant la notion d’écosystème d’apprentissage et en y intégrant des niveaux systémiques supérieurs (avec lesquels les individus n’ont pas de contact direct : l’idéologie nationale, l’économie de marché, la globalisation des systèmes d’information, par exemple), capables d’avoir un impact – bien qu’indirect – sur le développement individuel. À partir d’une approche plus anthropologique, Charles Super et Sara Harkness (1986) ont approfondi l’intuition de Bronfenbrenner et mis en évidence l’existence des niches développementales, sortes de micro-contextes de socialisation primaire (comme certaines sub-cultures) qui peuvent intégrer des usages et des pratiques éducatives hétérodoxes par rapport à celles du macrocontexte (le système national, par exemple). Dans le domaine de la psychologie du développement, des recherches montrent que le développement cognitif est tributaire d’une dimension culturelle (contexte socioculturel), qui modèle le contexte d’apprentissage, son idéologie et sa praxéologie éducative (Troadec, 2007). D’autres travaux ont permis de mieux délimiter la portée de cette dernière dimension, en identifiant le rôle joué par la praxéologie didactique et la praxéologie disciplinaire (Chevallard, 1999), la première renvoyant à la façon d’étudier la part du contexte dans les performances des élèves et la seconde à la réalité spécifique de l’enseignement des mathématiques.

  • 1 C’est-à-dire l’étude ethnographique des pratiques mathématiques au sein des groupes sociaux : les c (...)

6L’émergence des études en ethnomathématiques1 a contribué à confirmer les travaux fondateurs de Vygotski (1934) et Piaget (1935) en démontrant le rôle joué par la culture locale dans la construction du savoir mathématique (les connaissances théoriques, les habilités de calcul et les compétences d’usage). L’historien des mathématiques et philosophe brésilien, Ubiratàn D’Ambrosio, a contribué à l’essor et à la reconnaissance scientifique de cette discipline qui se consacre à examiner les pratiques mathématiques de groupes culturels historiquement marginalisés. En tant que courant critique, elle s’intéresse à l’étude du rapport entre les mathématiques et la culture et reconnaît les contributions non occidentales à ce domaine. Selon les tenants de ce courant, les mathématiques sont indissociables de la culture des apprenants. Cela va à l’encontre de la supposée universalité que l’on reconnait aux mathématiques formelles que ce soit au niveau des objets mais aussi de la manière dont cette discipline est enseignée dans les écoles à travers le monde. Ainsi, si l’Asie, le Moyen-Orient ou l’Afrique ont contribué de près ou de loin au développement des mathématiques – notamment l’algèbre et le système commun de nombres – les fondements méthodologiques de la discipline, tels qu’ils sont articulés dans les programmes scolaires, demeurent essentiellement occidentaux (Rosa et Orey, 2011).

7La synthèse qui ressort des différents travaux de D’Ambrosio (1980, 1985, 2001, 2006) sur l’ethnomathématique est que la pensée mathématique se développe dans différentes cultures en fonction de problèmes rencontrés dans un contexte culturel donné. En d’autres termes, les différents groupes ont des pratiques – plus ou moins distinctes des mathématiques académiques – qui peuvent être identifiées comme appartenant au domaine mathématique, si l’on considère notamment les aspects quantitatifs, relationnels et spatiaux de leur vie.

8Les initiatives portant sur l’inclusion des connaissances indigènes dans l’enseignement des mathématiques sont nombreuses et illustrent l’adoption de la théorie dans d’autres contextes. À titre d’exemple, on peut citer les jeux traditionnels africains tels que l’Awélé (Chemillier, 2008) et l’Upuca en Afrique du Sud (Feza, 2019) qui sont utilisés, bien que de façon marginale, pour enseigner des concepts tels que la construction des nombres, l’estimation ou le calcul mental. Parallèlement à cette démarche, la question du multilinguisme dans l’enseignement des mathématiques se pose dans tout espace où existe une co-présence de deux ou plusieurs langues et peut être de façon plus préoccupante dans les sociétés post-coloniales (où les parlers locaux sont souvent dévalorisés ou folklorisés). De nombreux chercheurs considèrent que la culture et la langue peuvent avoir un impact considérable sur la façon dont un élève apprend à compter, ce qui revient à soutenir que les pratiques au sein d’une culture affectent les processus d’enseignement-apprentissage : en effet, leurs recherches ont confirmé que les dispositifs basés sur l’enseignement des mathématiques dans les langues autochtones améliorent la compréhension des concepts et des procédures propres à la discipline en présentant les notions de base et les nombres sous plusieurs angles (Iseke-Barnes, 2000 ; Selin, 2000 ; Botes et Mji, 2010 ; Bangura, 2020).

9Les travaux de Marcia et Robert Ascher (1986) ont également montré la nécessité pour les pilotes de l’éducation (en France, le ministre de l’Éducation Nationale, les recteurs des académies, les directeurs académiques des services de l’éducation nationale et les inspecteurs) de prendre en compte ces approches locales et de les valoriser en les intégrant aux programmes et aux didactiques scolaires. Avec ce cadrage institutionnel, les enseignants pourront alors proposer des modalités d’apprentissage plus contextualisées et plus efficaces dans le développement de compétences des élèves. Cette proposition est particulièrement justifiée dans les territoires en situation post-coloniale où les pratiques locales (dont celles liées au savoir mathématique) sont généralement remplacées par celles imposées par les colonisateurs. De nombreuses analyses comparatives confirment que c’est justement dans ces contextes périphériques – qui présentent souvent un niveau relativement bas de développement économique et un manque de reconnaissance des identités culturelles locales – que les compétences mathématiques des élèves sont aussi les plus faibles (Adelman, 2009 ; Halai et al., 2016 ; Chronaki et al., 2019).

10Avec l’émergence des théories postcoloniales à la fin des années 1970, l’enseignement des sciences, la technologie, l’ingénierie et les mathématiques ont fait l’objet d’autres travaux critiques qui visaient à analyser ou à critiquer les implications historiques de l’héritage colonial dans l’économie, la politique, l’éducation, la langue et la culture des pays anciennement colonisés. Concrètement, elle a trouvé ses sources intellectuelles dans l’ouvrage Orientalisme d’Edward Said, publié en 1978. Said s’est interrogé sur la manière dont les orientalistes européens – les historiens, artistes, universitaires – ont dépeint la culture et les traditions arabes et asiatiques comme différentes et inférieures à la culture occidentale (Ashcroft et al., 1995). Il estime en particulier qu’à travers le prisme de l’orientalisme, l’Occident a déformé la réalité de peuples colonisés, ce qui a contribué à perpétuer des stéréotypes sur ces derniers qu’il appelle « Autres » (Said, 1978).

11Les rapports entre culture et apprentissage des mathématiques, ainsi que les réalités socio-culturelles des élèves, font ainsi partie des thèmes de prédilection des tenants du courant postcolonial. Les compétences en mathématiques sont décrites comme une porte d’entrée vers la réussite dans la vie. Malheureusement, une grande majorité d’élèves n’atteignent pas la réussite scolaire en mathématiques. C’est le cas d’un grand nombre d’élèves appartenant à des groupes qui, en raison de réalités historiques et socio-économiques, ont généralement été marginalisés dans le domaine des mathématiques. On peut donc établir que l’une des raisons évoquées pour expliquer les faibles résultats de ces élèves est que les mathématiques sont souvent enseignées d’une manière déconnectée de leur environnement socio-culturel, ce qui ne leur permet pas d’établir un lien avec la matière (Harding, 1998 ; Martin, 2000).

12Des études menées en France d’outre-mer et en Afrique francophone démontrent que les faibles performances des élèves dans le domaine des science, technologie, ingénierie et mathématiques (les STEM, acronyme de science, technology, engineering, and mathematics) sont en partie liées aux représentations mentales négatives associées au savoir mathématique, lesquelles découlent de la persistance des préjugés et stéréotypes hérités du passé colonial (Traoré et Bednarz, 2009 ; Alì, 2020 ; Tiendrebeogo et Tamura, 2022). Ces attitudes imprègnent le contexte local d’apprentissage, en contribuant à diffuser des conceptions éducatives chez les enseignants (dans le contexte domestique et scolaire) qui peuvent dévaloriser certaines disciplines (dont les mathématiques) par rapport à d’autres. Dans ces pays et territoires, les mathématiques, au même titre que l’anthropologie et la géographie, ont été déployées comme un outil des empires coloniaux par excellence (en vertu de leur supposée universalité ou de leur rôle politique pour la géographie par exemple) et fer de lance, avec la religion, de l’œuvre colonisatrice. Le savoir mathématique pouvait garantir un poste et des fonctions (et donc des privilèges) au sein de l’administration coloniale et, pour la population non scolarisée, il constituait un domaine presque magique, du fait de son inintelligibilité (Bosch, Chevallard et Gascón, 2006). Ces idées ont survécu à la période coloniale et persistent, encore aujourd’hui, en générant des représentations mentales qui se concrétisent par des attitudes négatives envers les mathématiques, partagées par de nombreux acteurs de la communauté éducative (les élèves, leurs parents, les enseignants et le personnel d’éducation).

13Ces réflexions, loin d’être exhaustives, ont servi de cadre théorique au projet Calcul Mental Africa2020 « Former à enseigner à calculer mentalement : perspective comparée Sénégal-Martinique et construction d’une formation d’enseignants ». L’objectif principal du projet était de déterminer les mécanismes mentaux et les artefacts culturels relatifs à ce type de calcul par rapport à l’environnement socioculturel. On s’est alors proposé de réaliser une analyse comparée de deux contextes post-coloniaux, assujettis dans le passé à une même puissance impériale (la France) mais qui ont vécu un parcours de décolonisation différent : le Sénégal (pays autonome et indépendant de la France depuis 1960) et la Martinique (collectivité territoriale d’outre-mer, départementalisée et rattachée administrativement à la France depuis 1946). L’objectif secondaire du projet visait à développer et proposer des moyens d’améliorer les résultats des élèves en calcul mental à partir d’un travail participatif intégrant des équipes franco-sénégalaises pour construire des outils pédagogiques adaptés aux besoins et aux cultures locales.

14Les résultats obtenus nous permettent de préciser le niveau objectivement mesurable des élèves martiniquais dans le domaine du calcul mental mais aussi de mieux comprendre le rôle du contexte dans la construction du savoir mathématique.

15En France, l’attention accordée, dans le cadre des politiques éducatives, à l’apprentissage des automatismes de calcul est plutôt récente. Par exemple, ce n’est qu’en avril 2018 que le ministère de l’Éducation nationale a indiqué pour la première fois que le sens du nombre et des opérations ainsi que le développement des automatismes de calcul « sont recommandés dès les premières années de l’école primaire [c’est-à-dire, l’école maternelle] » (MENJS, 2018). En effet, depuis les premières années 2000, plusieurs études avaient déjà montré que cette période de la scolarité des jeunes enfants est primordiale pour le développement des habiletés mathématiques sous-jacentes au calcul mental comme le comptage, la connaissance des faits numériques et les connaissances procédurales (Von Aster, 2000 ; Butterworth, 2005). C’est donc au niveau primaire (maternelle et élémentaire) que se joue la construction des compétences mathématiques nécessaires à la réussite académique et professionnelle des élèves (Duncan et al., 2007 ; Aunio et Niemivirta, 2010 ; Mejias et al., 2019), ce qui constitue un enjeu à la fois politique et social.

3. Matériel et Méthodes

16Notre cadre théorique nous a permis de mettre en évidence les difficultés liées à l’apprentissage des bases des mathématiques lorsque la culture des élèves est minorisée par le système éducatif. Notre question de recherche est donc d’évaluer le niveau de compétences des élèves martiniquais en calcul mental et de mieux comprendre leur rapport aux mathématiques. Nous avons choisi de nous consacrer aux performances des élèves des écoles primaires de ce territoire en utilisant le test de repérage de difficultés en mathématiques (TRDM) développé par Sandrine Mejias, Claire Muller et Christine Schiltz (2019). Il s’agit d’un outil construit à partir d’une approche socio-cognitive sous-tendue par d’autres recherches scientifiques (Georges et al., 2021 ; Ghazali et al., 2021 ; Martini et al., 2021). Le TRDM contient des tâches dont la difficulté est adaptée à chaque niveau scolaire : dictée de nombres, comparaison de nombres (entiers, décimaux, fractions), résolution rapide d’opérations écrites (fluence arithmétique). Cette dernière épreuve est chronométrée et réalisée dans un temps contraint (1 minute par opération). Les consignes sont énoncées à l’oral par l’examinateur et, au moment de l’évaluation, un point est attribué pour chaque bonne réponse. Pour faciliter l’étude des corrélations, les scores obtenus par les participants ont été répertoriés de façon anonyme dans un tableur Excel™ en fonction de l’école des participants, de leur niveau scolaire, de leur sexe et de leur examinateur. Les résultats obtenus grâce au déploiement à une large échelle du TRDM nous ont permis d’identifier non seulement les performances moyennes des élèves martiniquais en fonction de certaines variables mais aussi les meilleurs résultats, afin de déterminer le taux d’élèves ayant obtenu les scores maximums dans chaque épreuve.

  • 2 Le corpus de recherche de ce premier volet du projet est librement accessible à partir du DOI : 10. (...)
  • 3 En effet, au moment de la rédaction de cet article, le Service de la Statistique et de la Perspecti (...)

17La population de notre étude est constituée d’élèves de l’enseignement primaire public en Martinique. À la rentrée scolaire 2021-2022 (l’année scolaire concernée par cette recherche), l’enseignement public sur l’île comptait 222 écoles primaires et 29 037 élèves (académie de Martinique, 2021). Notre étude a testé les performances d’un échantillon de cette population : 2 710 élèves issus de 32 établissements (9,3 % de l’effectif global des élèves et 14,4 % des écoles de l’académie)2. Le nombre d’élèves retenu pour cette étude est bien représentatif de l’ensemble des élèves martiniquais inscrits en école élémentaire (2 218 élèves suffisaient pour une marge d’erreur de 2 % avec un niveau de confiance de 95 %). La répartition par genre des élèves de l’île n’étant pas disponible auprès des services statistiques concernés3, nous avons choisi de répartir équitablement notre échantillon entre filles et garçons (cf. Tableau 1).

Tableau 1 : Répartition de l’échantillon par genre

Genre

Effectif

Proportion

Fille

1261

49 %

Garçon

1331

51 %

Total

2710

100 %

18Les 32 écoles dont sont issus les élèves ayant participé à cette étude sont réparties sur 10 circonscriptions scolaires qui couvrent la presque totalité de la superficie de l’île. Nous avons choisi de répartir notre échantillon en respectant la même proportion d’élèves par type d’établissement de scolarisation afin de garantir, là aussi, la représentativité statistique de notre étude. L’académie de Martinique compte en effet 65 écoles en Réseau d’Éducation Prioritaire (REP), regroupant 29 % des élèves de l’enseignement primaire de l’île, 50 écoles en Réseau d’Éducation Prioritaire Renforcée (REP+) accueillant 23 % des élèves et 107 écoles Hors Éducation Prioritaire (HEP) scolarisant 48 % des élèves (Académie de Martinique, 2021). Le tableau 2 résume ces données.

Tableau 2 : Répartition de l’échantillon par type d’établissement

Type d’établissement

Effectif

Proportion par rapport à l’échantillon

Proportion par rapport à la population d’étude

REP

802

31 %

29 %

REP +

512

18 %

23 %

HEP

1341

51 %

48 %

Total

2710

100 %

100 %

19Parallèlement à cette étude principale, nous avons aussi réalisé une enquête complémentaire par questionnaire avec un échantillon réduit de notre population d’étude (89 élèves de l’école primaire). Le questionnaire comportait six questions portant sur les activités mathématiques en milieu familial (afin d’identifier les habitudes et les outils employés par les familles) et sur les attitudes à l’égard des mathématiques et le calcul mental (afin de détecter les représentations mentales des enfants). Bien que l’échantillon constitué pour cette enquête secondaire ne soit pas statistiquement représentatif, l’analyse des réponses des enfants permet d’interpréter les résultats de notre étude principale, notamment pour expliquer certaines tendances et incohérences statistiques. En outre, cette démarche a permis de mieux comprendre la relation qu’entretiennent les élèves martiniquais avec les mathématiques en général et le calcul mental en particulier.

3.1. Les résultats des élèves

20À l’aide du test de repérage de difficultés en mathématiques (TRDM), nous avons avant tout, identifié les compétences moyennes des élèves interrogés dans quatre domaines fondamentaux :

  • la dictée (afin d’évaluer la capacité des élèves à associer correctement un nombre à sa représentation chiffrée) ;

  • la comparaison de quantités (destinée à évaluer la capacité des élèves à identifier deux quantités, à les associer aux nombres correspondants et à positionner correctement ces nombres sur une échelle de grandeurs) ;

  • la résolution des compléments numériques (qui correspond au mécanisme cognitif de base nécessaire pour le calcul mental) ;

  • Le calcul rapide (qui demande à la fois de la vitesse d’exécution et de la précision mais aussi une capacité de contrôle du résultat).

21Les trois premiers domaines constituent la première partie du test consacré à la construction du nombre, tandis que la seconde partie se limite au test de rapidité.

  • 4 Certaines séances de passation du test ont été enregistrées par une équipe rattachée à l’antenne ma (...)
  • 5 Nous nous sommes limités à traduire certaines consignes, la version originale du test ayant été pub (...)

22La passation du TRDM s’est réalisée pendant l’horaire scolaire dans les classes, en présence d’un enseignant et d’un ou plusieurs chercheurs associés au projet4. Chaque élève a été soumis à une batterie de questions adaptées à son âge et niveau scolaire, en suivant les indications et les modalités de passation fournies par les développeurs du TRDM5.

23Tous domaines confondus, le score total moyen des élèves qui ont participé à notre étude varie de 19 % (pour le niveau CE2) à 27 % (pour le niveau CM2). Il s’agit là d’un premier résultat qui a suscité des interrogations : en effet, les concepteurs du test suggèrent que les scores situés entre 7 % et 30 % sont souvent associés à des difficultés issues d’un manque d’investissement aux activités en mathématiques (à l’école ou à la maison). En revanche, au niveau général mais aussi après une analyse par domaine, notre étude n’a pas révélé de différences significatives entre les performances des filles et celles des garçons.

24La première partie du test a été mieux réussie par les élèves de CP (86 % de bonnes réponses) alors que ceux des niveaux CE1 et CE2 présentent un score moyen variant respectivement entre 54 % et 68 %. Il semblerait, en effet, que le rythme d’acquisition des compétences au niveau de la construction du nombre ne soit pas régulier. Par ailleurs, nous avons aussi observé que les élèves de CE2 ont, d’une part, globalement mieux réussi les exercices de comparaison de nombres que ceux relatifs aux dictées de nombres, et ont obtenu, d’autre part, le moins bon score pour les calculs de compléments à un nombre (à 10, à 100 et à 1000). C’est justement dans le domaine des compléments que les élèves participants à notre étude obtiennent les plus bas scores. Le score moyen des élèves de CM1 est de 38 % de bonnes réponses et celui des élèves de CM2 de 44 %. Cela signifie que l’élève martiniquais moyen sort de l’école primaire et entre au collège avec une maitrise insuffisante des automatismes basiques de calcul.

25En revanche, la seconde partie du test, consacrée aux calculs rapides, est largement mieux réussie par les élèves de CM2 (cf. Tableau 3), avec un score moyen de 91 opérations réalisées en quatre minutes. Le Tableau 4 présente les bonnes réponses obtenues pour chacune des quatre opérations. Pour rappel, les élèves disposaient d’une minute pour chacune des opérations : addition, soustraction, multiplication et division. Comme on pouvait s’y attendre, l’addition est l’opération la mieux maîtrisée dans tous les niveaux. En revanche, les scores obtenus dans les opérations qui demandaient l’utilisation d’une division sont nettement plus bas dans tous les niveaux scolaires (entre le 7 % en CE2 et le 13 % en CM2). S’agissant de l’exercice de calcul rapide, nous avons voulu aussi relever les scores les plus hauts, afin de détecter la présence d’élèves avec des performances exceptionnelles : le plus haut en absolu a été obtenu par un élève de niveau CM1 avec un score de 98 multiplications correctes dans le temps imparti. Pour comparaison, le score le plus haut dans le domaine des divisions a été obtenu par un élève de CM2 qui a réalisé correctement et dans le temps imparti 61 % des opérations. Les élèves de CP n’ont pas été soumis à cette deuxième partie du test.

Tableau 3 : Résultats au test de compétences en calcul mental par niveau

  • 6 Les élèves de CP n’ont pas été soumis au test de calcul rapide.

Moyennes

CP

CE1

CE2

CM1

CM2

PARTIE 1 (construction du nombre)

Nombre moyen de réponses correctes

Dictées de nombres

97 %

84 %

84 %

89 %

87 %

Comparaisons de nombres

88 %

92 %

91 %

84 %

81 %

Compléments à un nombre

79 %

52 %

30 %

38 %

44 %

Sous-total partie 1

86 %

68 %

54 %

58 %

61 %

PARTIE 2 (calcul rapide)6

Nombre moyen de réponses correctes

Additions 1 minute

 

42,5 %

52,5 %

65 %

80 %

Soustractions 1 minute

 

30 %

42,5 %

52,5 %

65 %

Multiplications 1 minute

 

20 %

35 %

40 %

53,5 %

Divisions 1 minute

 

 

17,5 %

20 %

32,5 %

Sous-total partie 2

 

31 %

37 %

44,5 %

58 %

Total batterie

86 %

42,2 %

41,2 %

47,8 %

58,7 %

26On observe des différences notables entre les résultats obtenus par les élèves selon la typologie d’établissement d’inscription. En effet, la première partie du test a été mieux réussie par les écoles situées hors du réseau prioritaire alors que celles situées dans le réseau renforcé (REP +) obtiennent les moins bons scores. En revanche, les écoles situées en REP ont de meilleures performances en calculs rapides comparativement à celles qui sont hors réseau. Les écoles en REP + ont obtenu les moins bons scores dans les deux parties du test (cf. Tableau 4).

Tableau 4 : Résultats au test de compétences en calcul mental par type d’établissement

Scores totaux moyens

HEP

REP

REP +

PARTIE 1 (construction du nombre)

Nombre moyen de réponses correctes

Dictées de nombres

89 %

85 %

80 %

Comparaisons de nombres

89 %

85 %

83 %

Compléments à un nombre

47 %

36 %

28 %

Sous-total partie 1

65 %

65 %

65 %

PARTIE 2 (calcul rapide)

Nombre moyen de réponses correctes

Additions 1 minute

57,5 %

70 %

55 %

Soustractions 1 minute

47,5 %

52,5 %

42,5 %

Multiplications 1 minute

37,5 %

45 %

30 %

Divisions 1 minute

25 %

25 %

15 %

Sous-total partie 2

40 %

47 %

34 %

  • 7 C’est-à-dire l’inégalité de genre qui se génère dans certains contextes par effet de certaines trad (...)
  • 8 Ce qui explique pourquoi cet item de recherche est pris en compte par les études du Programme inter (...)

27Il est important de souligner que, dans le cadre de cette étude, nous n’avons pas décelé de différences significatives entre les performances des filles et celles des garçons. Cette cohérence statistique pourrait s’expliquer en considérant que le gender gap7 dans le domaine des STEM (probablement déjà à l’œuvre dès l’enfance, comme l’ont démontré certains auteurs dont Makarova et al., 2019 et Miller et al., 2018), se renforce et devient visible seulement à partir de l’adolescence8.

3.2. Les attitudes des élèves

28Parmi les élèves testés pour leurs compétences en calcul mental, nous en avons interrogé 86 autour de leur rapport aux mathématiques et au calcul mais aussi autour des habitudes dans le cercle familial (afin de détecter s’ils s’engageaient dans des activités de type mathématiques à la maison). Pour garantir l’homogénéité des données, l’échantillon était composé de trois classes pour chaque niveau scolaire (15 classes au total). Le recueil de données a été réalisé à l’aide d’un questionnaire comportant six questions non genrées, axées sur l’intérêt que portent les élèves aux mathématiques et au calcul mental. Les quatre premières questions étaient fermées tandis que les deux dernières étaient ouvertes (cf. Annexe 1). L’élève pouvait alors laisser libre cours à son expérience et renseigner le questionnaire sans se limiter. Nous avons choisi de ne pas faire mention des noms, prénoms et âge des élèves interrogés. Nous rendons compte ici du rapport de ces élèves aux mathématiques de façon globale, puis aux nombres et aux calculs en particulier. Enfin, nous rendrons compte des pratiques hors de la classe des nombres et du calcul mental. Nous avons choisi de ne pas présenter l’utilisation des jeux utilisant les nombres car les retours des élèves n’étaient pas assez significatifs. En effet, ils ont souvent confondu les jeux avec les devoirs maisons.

29Les réponses obtenues semblent suggérer que les élèves martiniquais ont une conception assez positive des mathématiques. D’ailleurs, près de 93 % des élèves ont affirmé aimer cette discipline (cf. Tableau 5), avec un faible taux d’élèves (7 %) exprimant une opinion négative ou très négative.

Tableau 5 : Les élèves martiniquais et leur rapport aux mathématiques

Aimes-tu les maths ?

Effectif

Pourcentage

Je n’aime pas du tout

4

5 %

Je n’aime pas

2

2 %

J’aime un peu

14

16 %

J’aime bien

14

16 %

J’aime beaucoup

52

61 %

Total

86

100 %

30Aussi, 94 % des élèves interrogés reconnaissent aimer les nombres (en tant que domaine d’activité) et le calcul mental (en tant qu’exercice scolaire). Nous avons identifié trois typologies distinctes (cf. Tableau 6) : les passionnés (58 %), les bons élèves (ceux qui aiment l’exercice en soi : 36 %), et enfin ceux qui n’affectionnent pas les activités liées aux mathématiques (6 %).

Tableau 6 : Répartition des élèves selon leur rapport aux nombres et au calcul mental

Aimes-tu les nombres et le calcul mental ?

Effectif

Pourcentage

Je n’aime pas du tout

3

4 %

Je n’aime pas

2

2 %

J’aime un peu

7

8 %

J’aime bien

24

28 %

J’aime beaucoup

50

58 %

Total

86

100 %

31Les résultats révèlent que 30 % des élèves ayant participé à cette enquête n’utilisent pas du tout les nombres et le calcul mental dans le contexte familial, alors que 69 % des élèves de ce même échantillon disent utiliser les nombres et le calcul mental quand ils sont en famille. Cependant, peu d’entre eux sont vraiment capables d’identifier correctement des activités qui demandent la réalisation de calculs rapides (par exemple, suivre des recettes culinaires ou compter les points d’un jeu de société) et de les différencier des autres jeux ou tâches domestiques qui ne demandent pas nécessairement l’utilisation du calcul (cf. Tableau 7).

Tableau 7 : Utilisation des nombres et du calcul à la maison

Utilises-tu les nombres et le calcul mental à la maison ?

Si oui donne des exemples

Effectif

Pourcentage

Non

26

30 %

Oui

15

18 %

Oui + 1 exemple

20

23 %

Oui + 2 exemples

23

27 %

Oui + 3 exemples

2

2 %

Total

86

100 %

32Contrairement à ce qu’on pourrait imaginer, les rapports des élèves martiniquais aux mathématiques sont largement positifs, en dépit de leur performance générale et d’un contexte domestique qui ne semble pas avoir l’habitude d’intégrer les automatismes de calcul dans l’activité quotidienne. En résumant le point de vue général, un des élèves participant à notre étude nous a indiqué que : « le calcul mental est utile dans nombre de jeux de société tels que : Triomino, Trianglué, Uno, Jeu de l’oie, Jeu de 7 familles, Domino et même au Loto ». Finalement, les résultats obtenus semblent suggérer aussi que la discipline est plus appréciée dans sa dimension opérationnelle (le calcul) que conceptuelle (les mathématiques en tant qu’abstraction).

4. Discussion

33Cette recherche a permis d’exposer succinctement le niveau de compétences mathématiques d’un nombre important d’élèves au sein des écoles élémentaires de la Martinique, en utilisant à une large échelle un outil psychométrique fiable et validé par la communauté scientifique et en se basant sur un échantillon statistiquement représentatif. Avant tout, nous confirmons la facilité d’utilisation et la validité de cet outil, le TRDM, qui pourrait être déployé facilement aussi dans d’autres contextes ultramarins pour faciliter le travail de comparaison. Dans le cadre de notre projet Calcul mental Africa2020, il est envisagé de réaliser une étude comparable, avec des écoles primaires du Sénégal.

34En revanche, d’autres variables sont à prendre en compte pour expliquer certaines différences en termes de résultats. Les résultats obtenus confirment que le type d’établissement de scolarisation (qui reflète, en général, le statut socioéconomique des familles des élèves) détermine en partie les résultats obtenus par les élèves (conformément aux conclusions de Mc Andrew et al., 2008) et que les élèves issus des écoles situées dans des réseaux d’éducation prioritaire renforcée ont le plus de difficultés avec les mathématiques. Dans le futur, il serait souhaitable d’approfondir cet aspect, en essayant de détecter avec plus de précision l’impact de certaines variables comme le capital culturel des familles (Bourdieu, 1979), l’effet établissement (Cousin, 1993) ou l’effet maitre (Bressoux, 2001).

  • 9 Par effet de l’entrée en vigueur, dès la rentrée 2019, des dispositions prévues par la Loi n° 2019- (...)

35Qui plus est, les résultats de cette première étape du projet Africa2020 semblent montrer que, dans les écoles élémentaires de l’île, le rythme d’acquisition des compétences au niveau de la construction du nombre n’est pas régulier. En effet, il semblerait que le niveau de performances ne s’améliore pas tout au long du cycle 2 : les élèves des classes de CP obtiennent de meilleurs résultats qu’en classe de CE2, un résultat qui peut s’expliquer par le fait que, d’une part, la plupart des élèves au niveau CP ont passé au moins deux années en école maternelle9 et, d’autre part, par le fait que les enseignants de l’école maternelle intègrent (au moins depuis 2018) de plus en plus d’activités mathématiques relatives à la construction du nombre et de sa représentation chiffrée dans leurs séances. Aussi, au regard des résultats des niveaux CE1 et CE2, on peut suggérer aux enseignants de ne pas délaisser les mathématiques pour privilégier le français. Une telle démarche permettrait d’atteindre les objectifs d’apprentissage et les attendus de fin du cycle 2 préconisés dans les programmes scolaires.

36Les résultats obtenus confirment le constat établi par d’autres chercheurs qui ont travaillé sur le contexte antillais, à savoir que les performances moyennes des élèves martiniquais dans les mathématiques sont plutôt décevantes et que la typologie d’établissement scolaire (l’écosystème proche de scolarisation ou, plus simplement, le contexte scolaire) a un impact sur le développement de certaines compétences, notamment dans la construction du nombre et le calcul mental (Arneton, 2010).

  • 10 Il est un exemple : la dénomination associée au nombre 92. En français, on dit quatre-vingt-douze, (...)

37Un troisième volet à considérer est l’obstacle linguistique. En effet, certains auteurs ont formulé l’hypothèse que la maitrise de la langue, mais aussi les spécificités de cette dernière (notamment dans le domaine du champ sémantique et de la nomenclature associés aux mathématiques), peuvent avoir un impact sur l’apprentissage de la numération, puis du calcul (Jarlégan, Fayol et Barouillet, 1996 ; Botes et Mji, 2010 ; Bangura, 2020). Arneton a exploré, dans le cadre de sa thèse de doctorat (2010), le terrain antillais à partir de cette hypothèse. Sa conclusion s’inscrit en porte à faux avec plusieurs études : « quel que soit le niveau scolaire considéré, le type linguistique n’a pas de lien avec les performances scolaires ni en français ni en mathématiques. Les élèves bilingues ne réussissent pas moins bien que les élèves unilingues » (Arneton, 2010 : 339). Toutefois, son travail n’avait pas pris en compte le système de construction linguistique des nombres cardinaux – les entiers naturels – assez particuliers qui sont propres à la langue créole (et qui sont aussi liés au système vigésimal propre à la langue française) ; la construction linguistique des nombres qui demande beaucoup d’entrainement pour être maitrisée, pourrait expliquer les difficultés initiales des élèves qui construisent le nombre à partir de la langue créole10, notamment durant les premières années de scolarisation qui correspondent aux cycles 1 et 2.

38Finalement, en ce qui concerne notre enquête complémentaire, nous pouvons proposer des facteurs explicatifs relatifs au rapport positif des élèves interrogés aux mathématiques et plus précisément au calcul mental en Martinique. On pourrait l’expliquer pour au moins quatre raisons :

  • en Martinique, à l’école primaire (dans les cycles concernés par notre étude), l’enseignement des mathématiques est souvent associé (par les enseignants ou dans les manuels scolaires) à une approche ludique de la discipline (qui est d’ailleurs préconisée par les programmes officiels) et par un travail de représentation des objets. Autrement dit, les notions et les techniques propres à cette discipline enseignée à l’école élémentaire sont probablement plus accessibles pour les enfants et plus intelligibles, car elles s’appuient souvent sur des exercices de manipulation, voire de représentation graphique. Ce n’est qu’au collège qu’elles commencent à devenir plus abstraites, et exigent donc un travail cognitif différent. Malgré l’existence d’un cycle 3, comprenant les classes de cours moyen et la classe de sixième, la nécessaire continuité pédagogique demeure encore difficile à mettre en œuvre ;

  • une relative revalorisation de la discipline s’est effectuée dans la programmation télévisée s’adressant à un public jeune. Pendant la pandémie, par exemple, France Télévision a développé son offre grand public sur la plateforme gratuite Lumni en diffusant des dessins animés à caractère éducatif comme celui consacré au super-héros Math Mathews. De plus, depuis une dizaine d’années, d’autres productions commerciales qui mettent en scène des protagonistes ayant des talents dans le domaine des STEM, ont graduellement gagné la faveur des téléspectateurs (comme c’est le cas des séries Stranger Things ou Big Bang Theory, Weitekamp, 2017) ;

    • 11 Notamment dans le cadre du Plan Mathématiques, un programme académique de grande envergure dont le (...)

    des efforts importants réalisés dans le cadre des différents dispositifs mis en place par l’académie de la Martinique pour améliorer les pratiques d’enseignement des mathématiques11 ;

  • le fait que les élèves apprécient la dimension opérationnelle (le calcul) plutôt que celle conceptuelle (les mathématiques en tant qu’abstraction) a été confirmé par d’autres études (Papp et Theresa, 2017 ; Swacha, 2021). Celle-ci nous invite à imaginer des stratégies didactiques innovantes qui profitent des opportunités offertes par la ludification et l’utilisation de jeux sérieux, jeux d’évasion et d’autres activités similaires pour faciliter l’apprentissage des automatismes en calcul.

5. Conclusion

39Les mathématiques sont au cœur des réformes menées par chaque ministre en charge de l’Éducation nationale depuis 2002. L’enseignement du calcul mental y est toujours présenté comme étant particulièrement important. Les récentes circulaires du ministère de l’Éducation nationale parues le 12 janvier 2023 le confirme. Le renforcement des compétences en calcul mental est y est décrit comme étant « un champ essentiel » nécessitant une « pratique systématique » (MENJS, 2023a). On y dit aussi que : « le calcul mental est déterminant et fait l’objet d’une pratique quotidienne d’au moins 15 minutes à l’école élémentaire » (MENJS, 2023b). Ces injonctions, déjà présentes en 2002, n’ont pas encore eu l’effet escompté : les résultats des élèves français dans ce domaine restent faibles et ce, particulièrement en contexte ultramarin (Guilmois, 2019).

40La présente recherche présente ainsi un panorama actualisé et statistiquement représentatif des performances des élèves des écoles élémentaires de la Martinique dans le domaine de la construction du nombre et du calcul mental. Les résultats obtenus montrent que certaines compétences (notamment celles liées aux items « Dictée de nombres » et « Comparaison de nombres ») sont acquises pour la grande majorité des élèves évalués. Par contre, l’item « complément à un nombre » est bien moins réussi avec seulement 49 % de bonnes réponses tous niveaux confondus. L’un des axes prioritaires des prochaines formations académiques devrait donc être autour du calcul mental. L’analyse des questionnaires a permis de relever un rapport très positif des élèves aux mathématiques et au calcul mental. C’est un constat surprenant vis-à-vis des résultats du test de compétences.

41Nous espérons que d’autres études similaires pourront se réaliser dans le futur : le déploiement à large échelle du TRDM dans d’autres académies françaises (et surtout ultramarines) permettrait aux pouvoirs publics de disposer d’un comparatif au niveau national qui faciliterait la détection des inégalités territoriales. Dans la continuité du projet Calcul Mental Africa2020, un travail de comparaison avec le Sénégal est en cours de réalisation afin de mieux situer le rôle joué par la dynamique postcoloniale selon les contextes. C’est dans le cadre de ces études comparées que les effets de contexte devraient expliquer une partie des écarts observés.

42Finalement, nous espérons que cette recherche pourra contribuer au débat sur les performances scolaires des élèves de la France d’Outre-mer et sur la représentation que se font ces mêmes élèves des sciences mathématiques.

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Annexe

Annexe 1 : Questionnaire élève

Quel est ton nom et prénom ? 

Quel est ton âge ? 

Aimes-tu les maths ?

Aimes-tu les nombres et le calcul mental ? 

Utilises-tu les nombres et le calcul mental à la maison à la maison ? Si oui, donne des exemples.

Joues-tu as des jeux qui utilisent les nombres et le calcul mental ? Si oui, donne les noms des jeux ?

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Notes

1 C’est-à-dire l’étude ethnographique des pratiques mathématiques au sein des groupes sociaux : les communautés autochtones tout comme certaines catégories socio-professionnelles au sein des sociétés industrielles.

2 Le corpus de recherche de ce premier volet du projet est librement accessible à partir du DOI : 10.17632/j9yfh482r4.1 (Garçon, 2022).

3 En effet, au moment de la rédaction de cet article, le Service de la Statistique et de la Perspective du Rectorat de la Martinique n’avait pas encore systématisé cette variable dans ses analyses (qui seront ensuite transmises à l’INSEE pour être intégrées au data set statistique national).

4 Certaines séances de passation du test ont été enregistrées par une équipe rattachée à l’antenne martiniquaise du Réseau Canopé, opérateur public du ministère de l’Éducation nationale chargé – à l’époque de l’enquête – de la production et l’édition des ressources pédagogiques et partenaire de notre projet. Ces enregistrements serviront, par la suite, pour le développement de ressources d’étude et didactiques qui seront diffusées en France et au Sénégal.

5 Nous nous sommes limités à traduire certaines consignes, la version originale du test ayant été publiée en langue anglaise.

6 Les élèves de CP n’ont pas été soumis au test de calcul rapide.

7 C’est-à-dire l’inégalité de genre qui se génère dans certains contextes par effet de certaines traditions, normes ou valeurs socioculturelles et qui produit des différences de traitement ou de performance entre hommes et femmes.

8 Ce qui explique pourquoi cet item de recherche est pris en compte par les études du Programme international de suivi des acquis des élèves (PISA), menées par l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), qui visent avant tout les étudiants de l’enseignement secondaire. Dans le cadre des derniers rounds de l’enquête PISA, la France s’est positionnée dans le groupe des Pays les plus inégalitaires (derrière le Venezuela), id est où le taux de garçons qui font mieux que les filles en mathématiques est le plus haut (Stoet et Geary, 2013).

9 Par effet de l’entrée en vigueur, dès la rentrée 2019, des dispositions prévues par la Loi n° 2019-791 du 26 juillet 2019 pour une école de la confiance, qui a modifié l’Article L131-1 du Code de l’éducation en statuant que « L’instruction est obligatoire pour chaque enfant dès l’âge de trois ans ».

10 Il est un exemple : la dénomination associée au nombre 92. En français, on dit quatre-vingt-douze, c’est-à-dire : quatre fois vingt plus douze. En créole, on dit katrèvendis dé, c’est-à-dire quatre fois vingt plus dix plus deux. La modalité commune au français et au créole fait appel au concept de multiplication. Dans les variantes du français parlés en Belgique, en Suisse et au Québec, en revanche, ont dit nonante-deux, qui apparait plus simple à conceptualiser (en ne faisant appel qu’à une addition dans le système décimal).

11 Notamment dans le cadre du Plan Mathématiques, un programme académique de grande envergure dont le premier volet a eu lieu entre 2013 et 2017 (Garçon, 2021). Le second volet du programme, en cours, a débuté en 2018 et se terminera en 2023.

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Pour citer cet article

Référence électronique

Manuel Philippe Émile Garçon, « L’apprentissage du calcul mental en contexte postcolonial : représentations et performances des élèves de l’enseignement primaire en Martinique »Contextes et didactiques [En ligne], 21 | 2023, mis en ligne le , consulté le 15 février 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/ced/4144 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/ced.4144

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Auteur

Manuel Philippe Émile Garçon

INSPE de l’académie de Martinique – Université des Antilles

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Droits d’auteur

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