Navigation – Plan du site

AccueilNuméros18DossierTravail partagé et cohérence (int...

Dossier

Travail partagé et cohérence (inter)disciplinaire autour de la rencontre avec l’œuvre cinématographique

Collaborative practice and (inter) disciplinary coherence around the encounter with the cinematographic work
Isabelle Claverie

Résumés

Notre communication s’intéresse aux manières dont les acteurs de terrain s’emparent de nouvelles prescriptions en matière de pratiques culturelles et artistiques dans le curriculum scolaire (2013, Parcours d’Education Artistique et Culturelle). Le dispositif retenu « Lycéens et apprentis au cinéma » entraîne la création d’espaces-temps partagés entre enseignants de diverses disciplines et secteurs d’activité (partenariat). Inscrit au sein d’une approche ergonomique et didactique, notre projet consiste à investiguer l’instrumentalisation de ces nouvelles normes en identifiant les contraintes et les perspectives de développement du pouvoir d’agir de ces acteurs de terrain.

Haut de page

Plan

Haut de page

Texte intégral

1. Introduction

1Notre étude s’intéresse à la manière dont les acteurs de terrain s’emparent des dispositions institutionnelles relatives à l’éducation artistique et culturelle dans le curriculum scolaire. Nous souhaitons plus précisément saisir comment se transforme et/ou comment ces acteurs de terrain soumis à de nouvelles injonctions transforment leur activité.

2Composante à part entière de la formation générale des élèves de l’ensemble des systèmes éducatifs occidentaux, l’instauration de telles prescriptions se fixe comme objectif de mettre en cohérence enseignements et actions éducatives (2009, Rapport du réseau Eurydice sur l’éducation artistique et culturelle à l’école en Europe).

1.1. Contexte institutionnel

3Dans le système éducatif français, les fondements du Parcours d’Education Artistique et Culturelle (PEAC) ont été officiellement définis dans une circulaire interministérielle (Ministères de l’Éducation nationale et de la Culture et de la Communication, 2013) préconisant de conjuguer « l’ensemble des connaissances acquises par l’élève » avec « des pratiques expérimentées et des rencontres organisées dans le domaine des arts et de la culture (...) dans une complémentarité entre les temps scolaire, périscolaire et extrascolaire ». L’accent est mis sur la dimension située d’un parcours prenant appui « sur les ressources locales » et privilégiant « la démarche de projet en partenariat avec les acteurs de l’éducation artistique et culturelle ».

4Cette intégration dans les programmes d’une dimension pluridisciplinaire, partenariale et territoriale autour de la rencontre avec l’œuvre découle d’un construit historique établissant des rapports d’interdépendance entre prescriptions passées et présentes – ces dernières étant porteuses d’une mémoire avec laquelle les enseignants ont à composer (Chevallard, 1997).

1.2. Instabilité des prescriptions en matière de rencontre avec l’œuvre

5Une investigation des prescriptions primaires et secondaires (Goigoux, 2007) réglementant la place de la rencontre avec l’œuvre dans la sphère éducative de la période de l’Ancien Régime à la période actuelle a permis d’identifier la présence de courants contradictoires dans le temps d’élaboration de ces normes institutionnelles.

6Les principaux clivages concernent les questions (1) du profil des enseignants en charge de ces rencontres avec l’œuvre : spécialistes des enseignements artistiques ou pas ? (2) de l’exploitation des références artistiques dans les situations d’enseignement, entre construire une opinion ou comprendre les civilisations, (3) des modalités de présentation des œuvres, entre créer les conditions d’une confrontation directe et / ou recourir à des artefacts culturels, (4) de la prise de parole des élèves : donner à entendre une émotion singulière et / ou construire une réflexion collective ? (5) de la coordination entre disciplines, générant des jeux de perméabilités plus ou moins décloisonnés et valorisés, (6) de la nature des relations entre enseignements artistiques et action culturelle, avec la présence dans certains textes relatifs à l’action culturelle d’une forme de résistance à l’encontre d’un temps fort de l’agir enseignant : l’institutionnalisation des savoirs (Loquet, 2007).

7Les tensions repérées affectent dans leur sillage les normes du travail des professionnels de l’éducation. Le caractère multi-adressé de ces textes laisse en effet aux acteurs de terrain la responsabilité de démêler les injonctions institutionnelles en assurant in vivo le rôle de « relais prescriptifs » (Amigues, Félix, Espinassy, Mouton, 2010 : 4).

8La mise en réseau ainsi officialisée de disciplines d’enseignement imbriquées à des structures institutionnelles relevant du champ culturel contribue à élargir les contours du métier.

  • 1 « (...) on notera que l’activité professorale se situe à l’articulation de plusieurs logiques, plus (...)

9En établissant via le recours à une pédagogie de projets des jeux de porosité (cf. Figure 1) entre niveau interne (milieu-classe) et niveau externe (institutions, territoire, établissement), l’activité professorale revêt désormais une dimension multifinalisée (Amigues, 2003)1.

Figure 1 : Les différents jeux de porosité entre niveau interne et externe de l’activité professorale

Figure 1 : Les différents jeux de porosité entre niveau interne et externe de l’activité professorale

10Dans un contexte marqué par une politique de délégation locale (Marx et Réverdy, 2020) et par une mutualisation des pratiques (Gather-Thurler et Maulini, 2014), les (dé)régulations découlant de tels jeux de porosité interrogent un présupposé induit par les textes officiels selon lequel travailler à plusieurs dans un « établissement mobilisé » (Dupriez, 2015 : 78) est un gain d’efficience professionnelle favorisant la réussite des élèves (OCDE, 2015).

1.3. Le travail partagé dans la littérature scientifique

11L’injonction à « faire ensemble » (Rayou et van Zanten, 2018 : 55) va entrainer un infléchissement des principes organisateurs de la « forme curriculaire typique » des programmes d’étude (Forquin, 2008 : 10). Vont être annexés aux enseignements disciplinaires des dispositifs transversaux, voire des « actions non disciplinaires » (Lebeaume, 2019 : 50) s’inscrivant dans la filiation institutionnelle d’une « pédagogie du détour » (B.O.E.N., 1997).

12Ces espaces de travail, sous-tendus par des programmes d’action collective consacrés au soutien scolaire et/ou aux actions culturelles, vont se déployer dans des « zones marginales d’initiative locale » (Lebeaume et Magneron, 2004 : 113) distinctes des systèmes didactiques principaux car reposant sur le croisement de savoirs (inter)disciplinaires et de pratiques sociales de référence (Martinand, 2001).

13S’impliquer dans de tels dispositifs recourant de façon récurrente au travail partagé est l’occasion pour les équipes enseignantes de s’investir dans des pratiques ressenties comme une forme de contre-feu aux routines scolaires (Bouveau et Rochex, 1997). Si la participation à de telles actions s’accompagne de nouveaux rapports de voisinance des pratiques enseignantes « décisifs pour le travail d’enseignement-apprentissage partagé » (Lebeaume et Valtat, 2007 : 1), un certain nombre d’écueils sont dans le même temps identifiés.

14Du point de vue des interactions professionnelles, sont pointés des « conflits de critères » (Félix, Saujat et Combes, 2012 : 1) ainsi que des risques de « confusion identitaire » (Mérini, 2001 : 2) entre les différents protagonistes. Du point de vue des interactions didactiques, certaines études consacrées aux apports du travail partagé montrent que la mise en œuvre collégiale de tels « dispositifs de bienveillance » (Foucart, 2009 : 16), en privilégiant les catégories thématiques aux catégories scolaires, génèrent chez les élèves des « conflits de loyauté » (Tambone, 2014 : 54) les contraignant à assurer seuls certaines « opérations de couture des contextes » (Netter, 2016 : 251).

15Au final, ces dispositifs déployés pour réconcilier les élèves avec la scolarité et/ou combler un présupposé manque socio-culturel semblent créer une forme de mise en abîme des difficultés des élèves tout en amplifiant la charge psychique des enseignants (Dejours, 1980).

1.4. Problématique

16Les différentes réserves émises au sujet de l’opérationnalisation du travail partagé dans le contexte des établissements scolaires (Lessard et Barrère, 2005) concernent tout à la fois les pratiques enseignantes, considérées comme « l’ensemble des pratiques professionnelles de l’enseignant » et les pratiques d’enseignement, renvoyant au « sous-ensemble des pratiques caractérisées par le face-à-face pédagogique » (Marcel, Dupriez, Périsset-Bagnoud et Tardif, 2007 : 8).

17Elles questionnent la nature des processus interactifs activés par l’instauration d’un programme d’action collective dans un territoire multidimensionnel (Chevallard, 1997). Elles interrogent également les effets que de tels jeux de connexions peuvent avoir sur l’activité des acteurs de terrain et nous amènent à poser la problématique suivante : dans quelle mesure la mise en œuvre d’un dispositif d’éducation culturelle croisant le champ et le hors champ des savoirs disciplinaires transforme-t-elle l’objet de l’activité enseignante ?

2. Cadre théorico-méthodologique

2.1. L’analyse ergonomique de l’activité enseignante

18La prise en compte de courants prescriptifs clivants ainsi que de jeux de perméabilités entre la classe et les classes, entre l’agir enseignant et le hors champ de l’établissement ancre notre recherche dans un cadre théorique intégrant dans son périmètre d’étude la multifinalité de l’activité des sujets : l’analyse ergonomique de l’activité enseignante (Amigues, 2003).

19Ce cadre théorique, en plaçant la figure professorale au centre d’un tissu de relations croisant l’histoire de l’institution, du métier, de l’établissement et de l’individu, s’inscrit dans une veine historico-culturelle (Vygotski, 1934/1997).

20Il invite à considérer ce tissu de relations comme composante active d’un milieu de travail défini comme « la solidarité entre deux milieux – l’établissement et la classe – parce que le travail réel de l’enseignant consiste à organiser collectivement un milieu externe à la classe pour pouvoir développer sa propre activité dans la classe » (Amigues, 2009 : 21).

21En s’intéressant à l’impact productif et non reproductif que peuvent avoir les prescriptions sur les acteurs de terrain, l’analyse ergonomique de l’activité enseignante identifie les artefacts prescriptifs – parmi lesquels ceux relatifs à la rencontre avec l’œuvre – comme des organisateurs de l’activité professorale. Cette dernière, débordant le cadre de la tâche prescrite, intègre le réel de l’activité, un réel de l’activité qui immerge les protagonistes au cœur d’une dynamique complexe résultant d’une série de compromis entre contraintes, ressorts sociaux et arbitrages. Composant avec le genre professionnel (Clot et Faïta, 2000), avec le vivant du métier et les conflits vitaux qui l’accompagnent, insufflant des interférences entre le réalisé et le réalisable, l’acté et l’empêché, ce réel de l’activité contribue à transformer le milieu de travail (Clot, 2008) tout en renormalisant les prescriptions.

22Un des enjeux de l’analyse ergonomique de l’activité enseignante – « rendre compte de la façon dont le « métier » procède à des ré-aménagements organisationnels, modifie des milieux de travail pour remplir les obligations prescrites et redéfinies » (Amigues, 2002 : 200) nous amène à considérer que le travail consiste moins à appliquer des prescriptions qu’à tenter de vaincre les difficultés du métier (Wisner, 1995).

2.2. Part et place de la didactique

23Bien que le cadre théorique identifié pour analyser ces nouveaux espaces-temps partagés autour de la rencontre avec l’œuvre relève du champ de l’analyse ergonomique de l’activité, les jeux de perméabilité entre l’activité professorale, définie supra, et l’action didactique, résultat du travail conjoint du professeur et des élèves, partagent un terreau d’étude commun : les « lieux du didactique » (Schubauer-Leoni et Leutenegger, 2002 : 229).

24Ce territoire commun invite à établir une circulation entre problématique d’enseignement et développement professionnel. Il ouvre un espace de réflexion heuristique qui nous engage à composer avec « les compatibilités et les complémentarités des approches didactiques et ergonomiques » (Brière-Guenoun, 2018 : 3) et à spécifier la nature des « zones de recouvrement entre les deux théories » (Venturini, 2012 : 133).

25Si notre orientation s’inscrit bien dans l’analyse ergonomique de l’activité, nous serons amenés dans le temps du traitement des données à faire vivre ce cadre théorique en procédant à une incorporation ciblée des apports de la théorie de l’action didactique conjointe (Sensevy et Mercier, 2007), convoquant plus particulièrement les descripteurs de l’action conjointe (triplet des genèses).

26Nous procéderons de la sorte lorsqu’il paraitra significatif d’analyser les règles du jeu des situations didactiques, ces dernières intégrant les manières dont enseignants et élèves s’installent dans le temps de l’enseignement et de l’apprentissage mais aussi l’ajustement des places respectives de chacun et l’évolution du milieu au fur et à mesure des interactions (Mercier, Schubauer-Leoni et Sensevy, 2002).

27Cette incorporation, bien que « seconde », « n’est en rien secondaire et occupe, dans l’approche ergonomique, un statut de discipline contributive à l’analyse de l’activité » (Grosstephan et Brau-Anthony, 2018 :131).

2.3. Orientation et principes organisateurs de la méthodologie

28La méthodologie retenue vise à confronter les processus individuels et collectifs en jeu dans la construction d’un milieu spécifique traversé par les arrière-plans épistémologiques de chacun (Amigues, Félix, Espinassy et Mouton, 2010). Cette orientation collaborative souligne la nécessité de développer l’activité pour comprendre et transformer le travail enseignant (Félix et Saujat, 2015). Elle emprunte ses fondements aux interventions-recherches qui se particularisent « par leur visée développementale d’un milieu de travail spécifique » (Brière-Guenoun et Espinassy, 2021 : 21). Une telle approche, qui se veut tout à la fois épistémique et compréhensive, est sous-tendue par une préoccupation majeure : proposer à un collectif d’enseignants formant un milieu associé à la recherche, de s’immerger dans un « processus progressif de re-catégorisation de leur activité » (Félix, Amigues et Espinassy, 2014 : 8). Nous avons opté pour la démarche d’autoconfrontations simples et croisées qui utilise l’enregistrement filmique du travail enseignant comme vecteur d’interactions, révélateur de plusieurs « voies et voix possibles » (Amigues, 2003 : 11). Différents temps d’intervention, générant différentes traces collectées à des fins d’analyse ont ainsi été instaurés :

  • des entretiens préalables faisant ressortir les préoccupations et intentionnalités des différents acteurs ;

  • des enregistrements audiovisuels des séances de cours captant les modalités de co-construction des savoirs ;

  • des entretiens de type autoconfrontations reposant sur les enregistrements filmés et visant à mettre au jour ce qui, avec et à côté des disciplines, donne sens à ces pratiques effectives ;

  • une extension du travail d’analyse au collectif professionnel l’enjeu de ce temps de co-analyse étant, en réfractant l’activité des membres du collectif, d’enclencher et de réenclencher du pouvoir d’agir (Clot, Faïta, Fernandez et Scheller, 2000).

29Dans ce dispositif à visée transformative et compréhensive les outils de captation ont un statut d’artefact méthodologique (Faïta, 2007) – un artefact qui permet de garder trace de la pratique effective des enseignants et qui sert de support actif aux différents temps d’analyse indirecte mis en place en permettant des arrêts et des retours déclenchant des réactions plurielles, voire des controverses professionnelles portant sur les styles des actions de chaque protagoniste. L’appareillage technique et discursif retenu, en visant à transformer l’activité d’autrui en ressource pour l’activité de chacun, nous semble renvoyer à un choix méthodologique approprié pour investiguer un milieu de travail défini comme lieu de construction de ressources pour faire, dire et agir ensemble.

2.4. Questions de recherche

30Nous cherchons à identifier quels types de déplacements de l’activité enseignante ordinaire peuvent être identifiés au cœur de ces programmes d’action collective. Dans le prolongement de la problématique énoncée et des apports du cadre théorico-méthodologique retenu, plusieurs questions guident notre recherche. Du point de vue de la conduite de l’étude et de l’agir effectif dans l’histoire de la classe, quelles variations des modalités interactives de construction des objets de savoir les enseignants organisent-ils ? Du point de vue de la dimension développementale de l’activité professorale activée dans ce type de dispositif, existe-t-il un lien de corrélation entre l’agentivité des enseignants œuvrant à la (re)construction des savoirs en classe et l’élargissement de leur pouvoir d’agir ?

31Pour investiguer ces questions de recherche nous prendrons appui sur un dispositif emblématique de ces nouveaux espaces-temps partagés entre acteurs de diverses disciplines : le dispositif Lycéens et apprentis au cinéma (DLAC).

2.5. Focale sur le dispositif Lycéens et apprentis au cinéma

32Fruit d’un partenariat établi à titre expérimental en 1993 avec le Centre national du cinéma et de l’image animée avant d’être généralisé à la rentrée 1998, ce dispositif a comme objectif de « permettre aux élèves d’acquérir, d’enrichir et de diversifier leur culture cinématographique et de développer le plus largement possible leur regard et leur sens critique face à l’image » (Cahier des charges du DLAC, 2006 : 3). Au cours de l’année scolaire, les élèves sont amenés à découvrir dans une salle de cinéma trois œuvres cinématographiques tout en bénéficiant d’un accompagnement pédagogique mené par les enseignants et les partenaires culturels. Chaque projection est accompagnée de documents rédigés par des universitaires, des pédagogues ou des critiques de cinéma qui proposent un éclairage sur les films plutôt qu’un « mode d’emploi pédagogique » selon le site du ministère de l’Éducation nationale, de la Jeunesse et des Sports. Des interventions peuvent être également organisées pour les élèves sous des formes diverses : rencontres avec un professionnel du cinéma, débats autour des films visionnés, ou éventuellement ateliers pratiques. 

33La mise en place de ce type de dispositif nous intéresse doublement. Il s’agit en effet d’un programme d’action collective qui repose sur des modalités de travail élargies (Barrère, 2002), et sa mise en œuvre a généré du côté des partenaires culturels des réactions renvoyant aux clivages précédemment identifiés entre action culturelle et enseignements artistiques. Ces propos de Bernard Nave, ancien président de la Fédération Jean Vigo, sont à cet égard significatifs : « Faire entrer le cinéma dans les cours, élaborer un argumentaire pédagogique contribue, qu’on le veuille ou non, à institutionnaliser le cinéma pour le débarrasser du stigmate qui l’accompagne : celui du plaisir » (Souillés-Debats, 2015 : 100). Ils peuvent être mis en relation avec une déclaration antérieure du ministre de la Culture André Malraux devant le Sénat le 8 décembre 1959 : « La connaissance est à l’Université ; l’amour, peut-être, est à nous ». L’instauration du DLAC prend ainsi place dans une histoire et un contexte institutionnel mouvant traversé par des courants contradictoires opposant « le sensible » au « formalisme scolaire » (Barbier, 2020 : 12).

3. Contexte d’étude et mise en œuvre de la méthodologie

3.1. Description du terrain de recherche

34Nous intervenons dans le territoire du Sud-Gironde suite à une demande du proviseur d’un lycée d’enseignement général : « Comment les enseignants, avec leurs motivations, leurs objectifs liés à une discipline, interagissent entre eux pour arriver à la construction d’un continuum culturel ? ».

35Cette demande prend appui sur un constat établi par le proviseur – à l’échelle de l’établissement, mais aussi du territoire, un certain nombre d’actions culturelles existent, mais elles sont perçues comme manquant de lisibilité car selon ses dires « perlées et non concertées » – et sur une préoccupation des équipes enseignantes qui se demandent comment offrir dans un secteur rural éloigné des ressources institutionnelles des opportunités d’ouverture culturelle aux élèves.

36C’est dans ce contexte qu’une équipe d’enseignants volontaires pour travailler la demande initiale va se constituer, rassemblant 10 professeurs engagés dans le DLAC. Pour cette équipe interdisciplinaire regroupant 6 disciplines (Arts plastiques, Espagnol, Français, Histoire-géographie, Mathématiques, Philosophie), une formation interne à l’analyse filmique a été mise en place avec un partenaire culturel académique, le Pôle régional d’éducation artistique et de formation au cinéma et à l’audiovisuel.

373.2. Recueil des données

38En termes de données relatives au temps de l’action, des séquences d’activité ont été enregistrées sous forme vidéo ou audio sur un empan temporel qui s’est déployé du mois de septembre 2017 au mois de novembre 2018, avec une poursuite ponctuelle de la coopération en aval de cette période, à la demande des enseignants qui le souhaitaient (cf. Figure 2).

Figure 2 : Les différentes étapes de l’intervention-recherche

Figure 2 : Les différentes étapes de l’intervention-recherche

39Pour chacune de ces étapes, des contenus ont été collectés et partagés avec le collectif en fonction d’objectifs inhérents au protocole de recherche (cf. Tableau 1).

Tableau 1 : Récapitulatif des différents temps et enjeux de l’intervention-recherche

Etapes et visées de l’intervention-recherche

Dates

T1. Entretien avec le Proviseur du Lycée

06/09/2017

Formulation d’une demande.

T2. Entretien préalable Collectif élargi (Enseignants + proviseur + partenaire)

03/10/2017

Repérage des motifs d’agir et des intentionnalités didactiques en lien avec le contexte institutionnel. Emergence de « frottements » possibles entre participants.

T3. Situations constitutives du travail enseignant

11/2017

Co-construction de la séquence DLAC par les binômes d’enseignants. Séquence prévue en alternance (Français ; Espagnol / Arts plastiques ; Espagnol) ou en co-intervention (Français ↔ Mathématiques / Espagnol ↔ Histoire-géographie / Philosophie ↔ Philosophie).

T4. Captations vidéos des séances consacrées à « Mercenaire » de S.Wolff (2016)

12/2017

Enregistrement des séquences d’activité de chaque enseignant (Intervention en alternance) ou binômes (Co-intervention) participant au protocole de recherche.

T5. Autoconfrontations simples partant d’une trace vidéo de l’activité

02-03/2018

Enregistrements des commentaires que chaque enseignant, confronté aux images de sa propre activité, adresse à la chercheuse-doctorante (IC).

T6. Autoconfrontations croisées reposant sur une confrontation de traces vidéo de l’activité

05-06/2018

Enregistrements des échanges entre enseignants réunis autour des traces vidéo de leur activité. Emergence d’écarts stylistiques, voire de controverses.

T7. Retour au Collectif

24/09/2018

Exploitation du retour sur les séances filmées comme discutant permettant un possible renouvellement du pouvoir d’agir du collectif en dénouant et renouant différemment, dans un jeu de paroles croisées, les activités propres à chacun.

T8. Remise au travail

08/11/2018

Réinvestissement et remise en circulation de l’activité réflexive du Collectif.

3.3. Modalités d’analyse des données

3.3.1. Niveau macro : unités thématiques et objets de discours

40Pour ce premier temps de traitement, nous avons mis en place un processus de codage du verbatim de l’entretien préalable (Miles et Huberman, 1994). Ce processus nous a permis de caractériser les préoccupations de l’équipe enseignante au seuil de son entrée dans le collectif de travail. La première étape d’analyse a consisté à identifier dans le verbatim les thèmes de discussion afin de les transformer en unités thématiques (cf. Tableau 2).

Tableau 2 : Niveau de condensation des données 1. Repérage des unités thématiques

Tableau 2 : Niveau de condensation des données 1. Repérage des unités thématiques

41Pour la seconde étape, nous avons transposé ces unités thématiques dans un graphique rendant visibles leur ordre d’apparition et le temps de parole consacré à chacune de ces unités (cf. Figure 3).

Figure 3 : Niveau de condensation des données 2. Ventilation des objets du discours

Figure 3 : Niveau de condensation des données 2. Ventilation des objets du discours

42La troisième étape a consisté à reconstituer pour chaque unité thématique le fil des arguments. A été alors appliqué un codage spécifiant la nature des échanges et rendant compte des remarques d’un des protagonistes, des remarques partagées ainsi que des remarques ayant généré de l’étonnement, des désaccords ou des controverses.

43La question du développement des modalités de réalisation de l’activité étant au cœur de nos préoccupations théorico-méthodologiques, nous avons décidé de rapprocher et de travailler en vis-à-vis le verbatim du retour au collectif du 24 Septembre 2018 en recourant aux mêmes modalités de traitement que celles appliquées à l’entretien préalable, à cette différence près : l’exploitation du verbatim de ce retour au collectif est passée par le filtre des unités thématiques repérées lors de la phase d’analyse de l’entretien initial.

44Ce parti pris nous permet de répondre aux questions suivantes : au terme d’un an de travail du collectif, qu’est-il resté des préoccupations premières ? Quels objets de discours nouveaux ont vu le jour ? Quels glissements se sont opérés ? Qu’est-ce qui a bougé, et qui a bougé ? Appliquer un même mode de traitement un an après la mise en œuvre concomitante du DLAC et du protocole de recherche nous a semblé être en effet un moyen fiable pour repérer la présence d’écarts dans les préoccupations des enseignants et identifier l’émergence de marges de manœuvre (Clot et Simonet, 2015) investies par les enseignants pour revisiter leur champ d’action. Les indicateurs retenus se sont concentrés sur la conception des dispositifs, les objets de savoir mis en dialogue et la place des acteurs dans les séances.

45Une fois exploité ce premier temps de traitement des données et repérés les récurrences ainsi que les déplacements dans les propos des enseignants, nous avons basculé sur une deuxième phase de travail de façon à affiner la poursuite du traitement des données à un niveau méso.

3.3.2. Niveau méso : focale sur les nœuds de discussion

46Faisant suite à cette première approche, un temps de focalisation nous a amené à centrer notre attention sur les désaccords présents au fil des arguments. Prenant par moments la forme de controverses, ils ont été appréhendés comme des moments-clés autour desquels l’équipe enseignante est entrée en discussion. Ces nœuds de discussion, parce qu’ils ont cristallisé l’attention des participants, font figure d’instants significatifs dans les échanges du collectif et ont donc été analysés en tant que tels. Pour (se) saisir (de) la dynamique des paroles des différents protagonistes, une dynamique véhiculant des effets dialogiques spécifiques – étonnements, silences, insistances, confrontations, oppositions – nous avons été attentive aux mots et phrases ponctuant ces échanges ainsi qu’aux positions énonciatives de chacun. Opérant un déplacement dans cette deuxième phase de traitement de l’échelle de l’unité thématique vers l’échelle de l’unité de l’échange, nous avons procédé, en prenant appui sur la théorie de l’activité langagière (Faïta, 2007), à une analyse du matériau verbal contenu dans ces nœuds de tensions, un matériau verbal nourri des appartenances et de l’histoire du sujet et intégrant dans son usage le « dessein discursif » du locuteur – à savoir l’idée que le sujet « se fait de la compréhension de son propos par autrui, et surtout, des réponses qu’il présuppose » (Faïta, 2011 : 42).

3.3.3. Niveau micro : affiner le grain de l’analyse

47Il nous a semblé opportun – conformément à la présentation de notre cadre théorico-méthodologique – de poursuivre nos investigations jusqu’au cœur des séances de travail, jusque dans ces « lieux du didactique » évoqués afin de (se) rendre compte de la manière dont les préoccupations des sujets s’opérationnalisaient dans l’activité réelle. Nous avons pour cela pris appui sur les traces vidéo des séances filmées et avons procédé à une sélection d’extraits correspondant à des évènements dits remarquables relevés dans le déroulement de la séance (Schubauer-Leoni et Leutenegger, 2002). Ce troisième niveau d’analyse nous a permis, en approchant au plus près des pratiques effectives enseignantes de transmission et d’appropriation des savoirs, de caractériser, par l’entremise du triplet des genèses (Sensevy et Mercier, 2007), les savoirs d’action déployés par les enseignants (Barbier et Galatanu, 2004) et d’établir des jeux de correspondance et de relance entrant en résonance avec les contenus des controverses.

48Au terme de ce temps d’investigation, nous avons pris appui sur le croisement de nos analyses menées au niveau macro, méso, micro pour revenir sur nos questions de recherche et faire émerger dans la présentation des résultats ainsi que dans la conclusion certaines pistes de réflexion. Ces réflexions viennent éclairer les régulations et les tensions à la manœuvre dans les mouvements d’organisation et de réorganisation du milieu de travail et d’étude. Elles contribuent à préciser dans le cadre de cet article la visée compréhensive de notre intervention-recherche et à pointer certains indices du développement professionnel sans toutefois le caractériser dans son ensemble.

4. Résultats

4.1. Premières pistes : les préoccupations déclarées

  • 2 Cf. Figure 3

49Ont été identifiées dans le traitement du premier entretien neuf unités thématiques2 concernant :

  1. l’histoire et les enjeux du DLAC,

  2. les ressources proposées par le DLAC,

  3. les objectifs visés,

  4. la place du DLAC au sein du Lycée,

  5. l’articulation entre le DLAC et les apprentissages liés à la discipline,

  6. les modalités de travail mises en place dans le cadre des séances dédiées à l’analyse filmique,

  7. les difficultés rencontrées lors de l’instauration de ces séances,

  8. la place et le rôle des outils d’analyse dans le temps de l’apprentissage,

  9. la volonté de dépasser la singularité des approches. 

50Parmi ces différentes unités thématiques cernant le champ de réflexion et les préoccupations des enseignants, nous retenons deux temps de discussion ayant concentré un degré d’attention et de tension particulier.

4.1.1. Sortir, ou pas, de la discipline enseignée

51Pour ce qui est de la thématique (#5) articulation entre le DLAC et les apprentissages liés à la discipline, un consensus semble s’installer entre les membres de l’équipe enseignante autour d’un constat : il s’avère bien difficile d’entrer dans ce type de séance qualifiée par l’une des enseignantes de « cours pas tout à fait comme les autres » sans prendre appui sur les contenus disciplinaires :

33 IC Donc, là, c’est une exploitation « disciplinaire » -

34 OT C’est compliqué d’en sortir -

35 NR - c’est - c’est compliqué d’en sortir -

36 FG C’est ce que j’allais dire, c’est que c’est très difficile de faire autrement que par rapport à sa discipline. Enfin, moi je vois par rapport à l’espagnol, quand j’ai regardé Mercenaire, j’ai aussitôt vu les notions qu’on avait dans les programmes et j’ai aussitôt vu tous les liens qu’on pouvait faire avec ces notions.

52Si le point de vue suivant : « l’idée pour laquelle aussi on participe à Lycéens au cinéma, c’est parce qu’on a envie que les élèves s’ouvrent un peu à autre chose » (181 MD) est partagé par l’équipe enseignante, l’ouverture dont il est question reste fortement arrimée aux notions contenues dans chaque programme et se travaille en fonction de « là où on en est dans le programme » (180 JPR). Ce consensus va cependant être troublé par l’émergence d’un autre point de vue, minoritaire dans l’équipe enseignante. Un point de vue qui va donner à entendre une préoccupation autre, tournant le dos aux contenus disciplinaires habituellement convoqués pour se centrer sur l’expérimentation d’une nouvelle ventilation des constituants d’un cours, tant en termes d’intervention que d’organisation temporelle ou spatiale. Une attention toute particulière est accordée au rôle moteur des idées des élèves dans l’activation de l’apprentissage :

38 MB Pour Lycéens au Cinéma, je - je ne travaille pas dans une perspective disciplinaire. Ça ne m’intéresse pas. Moi ce qui m’intéresse c’est - c’est d’abord faire parler les élèves, casser l’image traditionnelle de la classe. Je n’ai pas une compétence en termes de films et de cinéma, une habitude plus grande que les élèves.

53Interrogé sur ses modalités de fonctionnement, ce même enseignant va donner quelques indications éclairant le déroulement de la séance : « La parole passe d’élève en élève - c’est-à-dire qu’ils ont tous obligation de dire quelque chose - et si un élève ne dit rien, et bien - on attend - et il finit par dire quelque chose - » (46 MB). Passé un temps de silence suite à son intervention, une des enseignantes réagit à ses propos en précisant que « ce qui est intéressant avec ce système c’est qu’on découvre un peu les sensibilités de chacun » (47 MD). L’accent mis sur les impressions des élèves pointe une forme de dichotomie entre leur sensibilité d’un côté et les savoirs portés par les notions du programme de l’autre – démarcation faisant écho à la césure précédemment évoquée entre le « sensible » et le « formalisme scolaire ».

4.1.2. Maîtrise des outils d’analyse filmique versus expérience collective du débat

54La thématique (#8) place et rôle des outils d’analyse dans le temps de l’apprentissage va déclencher un dialogue aux accents de controverse entre d’un côté deux enseignantes – de français (VG) et d’espagnol (FG) – et de l’autre le partenaire de la structure culturelle en charge des actions d’éducation à l’image (SG). Une première remarque de l’enseignante d’espagnol (FG) va faire état d’un manque d’expertise professionnelle pour travailler avec les élèves la spécificité du langage cinématographique :

36 FG [...] après moi ce qui me manque, et c’est pour ça aussi que ça m’intéresse, c’est tout ce qui est technique. Comment raccrocher tout ça, toutes ces notions, à l’image ? Comment l’image peut traduire toutes ces idées-là ? Moi c’est ce qui me manque - c’est pour ça que je suis très demandeuse de formation - par rapport à ça. Parce que je suis aussi néophyte qu’une élève en fait - je suis passionnée de cinéma mais je n’ai pas toutes les - tous les outils pour bien déchiffrer ça et le faire passer aux élèves.

55La réponse du partenaire culturel va relativiser les appréhensions de cette enseignante, considérant que « les outils, ils ne peuvent pas tout faire, les outils » (106 SG) et qu’« il faut surtout aussi se décomplexer par rapport à ça, parce qu’on parle de grammaire du cinéma et tout ça mais c’est beaucoup plus, enfin c’est beaucoup moins codifié que ça, quoi » (109 SG). Les dissensions centrées sur la question de la maîtrise (ou pas) du vocabulaire cinématographique cristallisent une divergence de conception de l’analyse filmique : là où le partenaire culturel met l’accent sur une « découverte du cinéma en tant qu’art mais aussi comme espace de débat, et comme expérience collective » (185 SG), un espace de débat inséparable de « l’histoire de la salle de cinéma » (2 SG), l’enseignante de français pointe la nécessité de montrer aux élèves « qu’au cinéma il y a des moyens très spécifiques et que les réalisateurs vont jouer avec ça, et que, selon les réalisateurs, ça va être différent » (137 VG). Vont alors s’enchaîner des tours de paroles ponctués par de nombreuses marques lexicales de résistances épisodiques entre le partenaire culturel et les deux enseignantes, tours de paroles témoignant d’une forme d’opposition récurrente autour de la question des apports de l’ingénierie technique à l’analyse filmique. Si une tentative de rapprochement se fait jour en fin d’échange autour d’une base d’outillage minimale à exploiter, les nuances lexicales et reprises des propos d’autrui dénotent un (re)positionnement divergent en fonction de l’ancrage professionnel de chacun – enseignantes de français (VG et NR) et partenaire culturel (SG) :

124 SG Au niveau de la technique, certes, c’est intéressant, voilà, d’être un peu à l’aise avec du vocabulaire et tout mais - ça fait pas tout -

125 VG Il faut en rester à un vocabulaire simple, mais nécessaire.

126 NR Il faut quand même un vocabulaire minimal.

127 VG Voilà, il y a un vocabulaire simple mais nécessaire.

4.2. Déplacements et changements de préoccupations : déployer la parole des élèves

56Lors du retour au collectif, un an plus tard, qu’est-il advenu de ces préoccupations ? Certaines unités thématiques ont disparu, d’autres se sont maintenues (cf. Figure 5).

4.2.1. Panorama des déplacements

57De nouveaux objets de discours sont apparus, relatifs au protocole de recherche – retour sur le travail antérieur du collectif (#1), modalités de fonctionnement du retour au collectif (#2), réception et mise en perspective du retour au collectif (#11) – ou en lien avec les situations de travail – conduite de l’apprentissage (#9) et organisation spatiale (#10).

Figure 4 : Comparaison des unités thématiques abordées au cours de l’entretien préalable et du retour au collectif, avec ordre d’apparition et temps de parole dédié

Figure 4 : Comparaison des unités thématiques abordées au cours de l’entretien préalable et du retour au collectif, avec ordre d’apparition et temps de parole dédié

58L’unité thématique dominante – la conduite de l’apprentissage (#9) – a donné lieu à de nombreux échanges consacrés à la part et à la place de la parole des élèves dans le processus d’apprentissage, une parole quasi inexistante lors de l’entretien préalable. Pour saisir la nature de cette nouvelle préoccupation, nous avons effectué un inventaire du mot « parole » sur la totalité des deux verbatims et repéré les connexions lexicales gravitant autour de ce mot. Il est utilisé dans le temps du retour au collectif à 33 reprises par 7 enseignants – contre 3 lors du premier entretien et par 1 seul enseignant, celui-là même qui avait créé la surprise en déclarant ne pas travailler dans une perspective disciplinaire.

  • 3 Cf. Section 2.2.

59Nous pouvons estimer que le retour sur les pratiques professionnelles, marqué par les temps d’autoconfrontations simples et croisées, a amené les enseignants à (s’) interroger (sur) la nature des interactions didactiques mises en œuvre dans ces séances consacrées à l’analyse filmique. Il nous semble opportun ici, comme énoncé précédemment3, de porter notre attention sur les processus spécifiques de co-construction des savoirs en classe afin d’étudier la manière dont les actions du professeur et des élèves se sont co-déterminées au sein des tâches mises à l’étude. L’analyse de ces séances a été réalisée en mobilisant les descripteurs de l’action conjointe pour rendre compte des manières dont (1) les enseignants et leurs élèves s’installent dans le temps de l’enseignement et de l’apprentissage (chronogenèse), dont (2) les places respectives des uns et des autres se répartissent et s’ajustent (topogenèse), et dont (3) le milieu évolue au fur et à mesure des interactions établies (mésogenèse). Nous prendrons appui pour cela sur les séances mises en œuvre par les trois enseignants ayant joué un rôle structurant dans les temps d’étonnement et de controverse de l’entretien préalable (VG, MB et FG).

4.2.2. Analyse de l’action enseignante en contexte : VG, professeure de français

60Pour atteindre son objectif, l’enseignante construit sa séance comme un scénario rythmé par différentes étapes croisant phases de mise en confiance des élèves et phases de mise en perspective des objets de savoir – ces différentes étapes étant pensées comme une succession de paliers nécessaires à franchir pour mettre en mouvement le raisonnement visé. La répartition de la parole, alternant sollicitations de l’enseignante, phases d’ouverture et de fermeture du dialogue, interagit avec la mise en place au tableau de traces écrites venant fixer les réponses des élèves. Le scénario de cours est structuré autour de schémas d’action clairement identifiables, répartis dans le temps et dans l’espace de façon anticipée. Le savoir se construit dans un jeu de questions et réponses autour de l’objet filmique, ponctué par des phases de synthèse au cours desquelles l’enseignante crée des recoupements entre les réponses et remarques des élèves. Ponctuellement des ouvertures sur les contenus du cours de français sont effectuées, et des temps de prise de notes sont aménagés.

4.2.3. Analyse de l’action enseignante en contexte : MB, professeur d’histoire-géographie et FG, professeure d’espagnol

61Les objectifs visés, énoncés au cours d’une réunion de travail préparant leur co-intervention, croisent des intentions distinctes : là où l’enseignante d’espagnol souhaite rattacher le film aux quatre notions du programme, l’enseignant d’histoire-géographie précise que son attention est davantage centrée sur le positionnement enseignant / élèves dans l’espace-classe ainsi que sur les supports de travail à exploiter dans la conduite de l’étude :

12 MB Moi ce qui m’intéresse c’est d’être ensemble, avec la classe. Pas forcément - pas face à la classe, donc, peut-être une disposition qui soit pas une disposition frontale - normale de classe pour que la parole se libère un petit peu plus, et - autre chose - voilà, c’est le fait que la discussion doit s’accompagner de visionnages de séquences, et à certains moments on s’arrête sur des séquences.

62Lors de la séance, l’amorce du cours démarre par un rappel des notions au programme fait par les élèves et relayé au tableau par l’enseignante d’espagnol. Une fois posés ces repères notionnels, la répartition de la parole, plutôt que prendre appui sur un jeu de questions et réponses impulsé par les enseignants, va se dérouter de sa trajectoire habituelle pour partir de ce que disent les élèves au sujet des extraits de film choisis et suivre le flux des interventions. La structure du cours est ainsi rythmée par les temps de projection alternés avec des temps d’échanges entre élèves plutôt qu’entre élèves et enseignants, les enseignants limitant leurs interventions à faire circuler, relancer et développer la parole de chacun.

4.2.4. Analyse de l’action enseignante en contexte : synthèse

63Dans les deux séances analysées, nous sommes en présence de tâches coopératives impliquant enseignants et élèves, avec un objet filmique commun, mais dont la ventilation et la coordination diffèrent. Là où l’intervention des élèves infléchit à la marge le scénario mis en place par l’enseignante (VG) pour dérouler les étapes de l’apprentissage, la participation des élèves oriente le déroulement du cours élaboré par les enseignants (MB et FG) qui se laissent guider par les extraits du film choisis par les élèves. Si dans les deux séances, le savoir, ancré dans le registre des disciplines enseignées est déclaré par les enseignants, énoncé de façon globale ou détaillée puis déployé de façon interactive avec les élèves dans un jeu de questions et réponses structurant l’avancée du travail, les modalités de mise en œuvre du processus de secondarisation (Félix et Poggi, 2018) au travers de ce jeu de questions et réponses diffèrent. Les structures de l’action dans la relation didactique renvoient à des jeux d’équilibre activant les actions de régulation et de dévolution (Brousseau, 1998) selon des niveaux de graduation distincts.

64Les composantes gestuelles, proxémiques, spatiales, langagières (Brière-Guenoun, 2017) instaurées par les enseignants sont également investies selon des modalités variables. Lors du retour au collectif, la projection d’extraits filmiques rendant visibles les modalités de travail propres à chacun va générer des réactions, comme en témoigne cette remarque de VG déclenchée à l’issue de la projection d’extraits de la séance de cours de MB et FG :

235 VG En tout cas, moi il y a un truc qui, que je trouve super bien à voir comme ça, c’est la manière dont vous avez fait asseoir les élèves dans la classe. Parce que, en fait, vous les faites asseoir comme ils seraient au cinéma. D’ailleurs, si on, si vous pouviez vous auriez enlevé les tables, je pense.

  • 4 Cf. Section 4.1.2.

65Cette remarque sur l’absence de tables, en référence à la salle de cinéma, loin d’être une remarque anecdotique, renoue avec les propos tenus un an auparavant par le partenaire culturel4 tout en opérant un décentrage des préoccupations initiales.

5. Discussion

66Prenant appui sur l’analyse du corpus ainsi que sur les questions de recherche et le cadre théorico-méthodologique retenus, nous sommes en mesure de discuter ces résultats.

5.1. Du point de vue des pratiques d’enseignement

67L’analyse des enjeux découlant des séquences mises en place autour de l’objet filmique ainsi que des temps de co-analyse de l’activité effective des enseignants proposés par le dispositif de recherche a révélé un déplacement des préoccupations professionnelles. D’une centration sur les objets de savoir, abordés lors des entretiens initiaux comme levier incontournable des séquences dédiées au DLAC, ces préoccupations se sont décentrées vers un objet transversal structurant le travail du collectif tout au long de la recherche : la place et le format des interactions didactiques langagières dans la conduite de l’apprentissage (Bernié, Jaubert et Rebière, 2003). De plus, les réflexions des enseignants autour de cet objet transversal les ont amenés à questionner la nature des schémas d’action en vigueur dans les séances mises en place, et, au cœur de ces schémas d’action, les positions statutaires des protagonistes ainsi que leur rôle institutionnalisé (Linton, 1977) dans le temps des interactions langagières. Ont ainsi émergé de l’analyse des séances filmées des propositions cherchant une alternative aux répartitions des interventions ordinaires enseignants-élèves plaçant l’enseignant en situation de « position haute » (Moussi, 2016 : 61). Un temps conséquent des échanges va se focaliser sur les jeux de positionnement à renormaliser en situation de manière à favoriser la part prise par les élèves dans les conduites discursives.

68Ce questionnement autour du rapport de place interroge les opérations de topogenèse et la répartition des rôles de chacun au sein du contrat didactique (Brousseau, 1986). Il renvoie dans le même temps au positionnement physique des différents protagonistes dans l’espace de la salle de classe. Il semblerait que les modalités de recherche mises en œuvre dans le cadre de ce protocole de recherche aient permis aux enseignants de revisiter les opérations de topogenèse ordinaires, plus précisément les actions spécifiques de régulation et de dévolution unissant de manière ternaire professeur, élèves et objet(s) de savoir (Sensevy, 2001). Par ailleurs, la concentration des remarques précédemment restituées autour d’un détail – la relation de proximité de l’élève à sa table de travail – peut être ici perçue comme un indice ténu (Ginzburg, 1980) donnant accès aux soubassements des manières de penser du collectif dans le temps de ces échanges. Cette désolidarisation de la relation élèves / tables de travail entraine une reconfiguration des postures de travail – la prise de note laissant place à la prise de parole – et ménage un espace de déploiement de la parole des élèves en lien avec les préoccupations du partenaire culturel. Dans les deux cas – salle de cinéma, salle de cours – ce qui est en jeu renvoie à la construction d’un espace discursif et matériel propice au développement de cette expérience du débat, une expérience mettant en relation « des idées, des affects avec des savoirs » (Archat-Tatah, 2013 : 80).

69La mise en place de temps de co-analyse réfractant l’activité des membres du collectif a amené ces derniers à prendre conscience que le fait que les élèves sortent de leur micro-environnement habituel (assis à leur table et utilisant des outils pour écrire) modifiait leur mode d’intervention mais aussi leur mode d’investissement dans les tâches (répondre aux questions de l’enseignant versus dialoguer avec la classe pour réagir au film).

5.2. Du point de vue des pratiques enseignantes

70Si la participation des enseignants au DLAC les a engagés à co-construire un milieu de travail régulé par un infléchissement des pratiques ordinaires, leur participation au protocole de recherche les a amenés à « mettre en chantier des manières de penser collectivement leur travail » (Faïta et Vieira, 2003 : 57) et à co-constituer des problèmes autour de leurs postures professionnelles. Un des problèmes majeurs concerne le repérage dans le travail au quotidien d’une absence de partage autour des expériences menées ou des outils mis en place. Si des temps de formation réunissant l’équipe enseignante ont pu ouvrir la voie à une mutualisation de certaines pistes de travail, cette question de la mutualisation des pratiques et des ressources a occupé une place centrale lors du retour au collectif. Ont ainsi été identifiées des « zones blanches » caractérisées par une absence de partage des pratiques d’enseignement – les propos tenus lors de ce retour au collectif par l’une des enseignantes pointant ce qui pourrait s’apparenter à un déficit d’institutionnalisation du processus collectif :

664 VG On a un questionnement, comment déployer la parole de l’élève. Et si on a trouvé une pratique et on a l’impression qu’elle fonctionne bien - et bien, on l’échange pas, c’est ça qui est dommage.

71Dans le même temps, des mises en perspective d’un travail partagé à inventer sont évoquées et dans le prolongement des réflexions qui ont nourri ces échanges, une phase de remise au travail de l’équipe enseignante a été consacrée à de nouvelles expérimentations de l’analyse filmique ainsi qu’à l’élaboration de ressources diffusables dans l’établissement via son site internet. En termes de ressources, il a été proposé, à la confluence de ce qui pourrait s’apparenter à une zone de développement potentiel (Saussez et Yvon, 2014), d’expérimenter de nouveaux modes d’action à travers la création d’une plate-forme de données en ligne destinée aux enseignants ; d’un espace de partage enseignants et élèves ; de capsules audios diffusées dans une rubrique « Avis d’élèves » ; d’un onglet Cinéma sur le site du lycée ; d’un répertoire de ressources sur le portail du CDI. Un document commun a été soumis à discussion et élaboré sous la forme de fiches de travail rendant compte des manières dont chacun exploite les films afin de laisser une trace du travail accessible à tous, futurs enseignants compris – trace non plus du « continuum culturel » attendu et contenu dans la demande initiale mais d’un continuum professionnel en devenir.

6. Conclusion

72L’investissement de l’équipe enseignante dans un programme d’action collective consacré à l’analyse filmique a entrainé dans son sillage des mouvements de réorganisation du milieu de travail mettant en regard pratiques d’enseignement s’actualisant à travers des interactions en contexte et pratiques enseignantes. L’identification d’un espace de partage des savoirs, savoirs didactiques et savoirs du métier (Brière-Guenoun et Espinassy, 2021), au sein duquel des jeux de perméabilités se déploient conforte notre choix théorique d’établir un dialogue entre approche ergonomique et approche didactique (Brière-Guenoun et Simonet, 2021).

73Les objets de l’activité, les formes du dialogue didactique ainsi que les modalités collectives de réalisation ont été renormalisés dans le temps de la mise en œuvre de séances croisant contenus disciplinaires et pratiques sociales de référence. De nouvelles préoccupations centrées sur la recherche d’un équilibre contribuant, en déconstruisant un type de relations établies, à développer la parole des élèves pour mieux déployer l’analyse ont émergé, tout comme la proposition de s’engager dans la construction de ressources communes. Le parti pris méthodologique retenu, en permettant à chaque enseignant participant au protocole de recherche de devenir observateur mais aussi interprète de son propre travail, a transformé l’activité ordinaire en moyen et instrument de pensée individuel et collectif (Vygotski, 1925/1994). Les expériences de développement ainsi insufflées ont contribué à élargir le contexte d’action des enseignants tout comme le rayon d’action de leur activité (Faïta et Saujat, 2010). Le glissement qui s’est produit, d’une attention centrée sur les outils d’analyse filmique vers la création d’outils contribuant à ressourcer le milieu de travail, a redessiné les contours des marges de manœuvre du collectif (Clot et Simonet, 2015). Notre intervention-recherche montre ainsi l’importance de co-construire des espaces ainsi que des temps de concertation œuvrant à une mutualisation des outils tout en prenant en compte les manières de faire de chacun. Cette dynamique partagée dans le temps de l’intervention relève cependant de jeux d’équilibre fragiles interrogeant, en aval de la clôture du protocole de recherche collaborative, le devenir du pouvoir d’agir d’enseignants engagés dans un programme d’action potentiellement mis à mal par la réforme du lycée. Cette réforme, en instaurant l’éclatement du groupe-classe (Assemblée nationale, 2019), a en effet contribué à générer des angles morts dans la dynamique du travail conjoint du professeur et des élèves et à impacter le travail d’équipes pédagogiques engagées dans des pratiques professionnelles collectives.

Haut de page

Bibliographie

Amigues, R. (2002). L’enseignement comme travail. Dans P. Bressoux (dir.), Les stratégies de l’enseignant en situation d’interaction (p. 243-262). Paris : Programme École et Sciences Cognitives.

Amigues, R. (2003). Pour une approche ergonomique de l’activité enseignante. Skolê (Hors-série), 1, 5-16.

Amigues, R. (2009). Le travail enseignant : prescriptions et dimensions collectives de l’activité. Les sciences de l’éducation pour l’ère nouvelle, 42, 11-26.

Amigues, R., Félix, C., Espinassy, L. et Mouton, J.-C. (2010). Le travail collectif dans les établissements scolaires : quête ou déni ? Travail et formation en éducation, 7. Disponible en ligne : http://tfe.revues.org/1395. Récupéré le 19 janvier 2018.

Archat-Tatah, C. (2013). Écrire pour devenir un spectateur amateur. Le français aujourd’hui, 3(3), 77-92. Disponible en ligne : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.3917/Ifa.182.0077. Récupéré le 16 avril 2021.

Assemblée nationale (2019). Mission « flash » sur la mise en place de la carte des spécialités dans le cadre de la réforme du lycée. Disponible en ligne : https://www2.assemblee-nationale.fr/content/download/183669/1841320/version/1/file/Communication+de+la+mission+flash+sur+la+carte+des+sp%C3%A9s+au+lyc%C3%A9e+v+finale.pdf. Récupéré le 16 avril 2021.

Barbier, C. (2020). Transmettre des savoirs scolaires plutôt qu’éduquer des spectateurs ? Usages différenciés des films proposés par Lycéens et apprentis au cinéma. Revue française de pédagogie, 3(3), 5-16. Disponible en ligne : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/rfp.9426. Récupéré le 14 avril 2021.

Barbier, J.-M. et Galatanu, O. (2004). Les savoirs d’action : une mise en mots des compétences ? Paris : L’Harmattan.

Barrère, A. (2002). Les enseignants au travail. Routines incertaines. Paris : L’Harmattan.

Bernié, J.-P., Jaubert, M. et Rebière, M. (2003). Construction des connaissances et langage dans les disciplines d’enseignement. Conférence d’ouverture du Colloque international ICAR, Université Lyon 2, INRP, CNRS. Actes sur CD Rom IUFM-Bordeaux2, Bordeaux.

Bouveau, P. et Rochex, J.-P. (1997). Les ZEP, entre école et société. Paris : Hachette-CNDP.

Brière-Guenoun, F. (2018). Éditorial. eJRIEPS, Numéro spécial 1, 3-7. Disponible en ligne : http://elliadd.univ-fcomte.fr/ejrieps/special1. Récupéré le 24 septembre 2020.

Brière-Guenoun, F. (2017). Instruire les gestes didactiques de métier. Quelles perspectives pour la formation des enseignants ? Rennes : Presses Universitaires de Rennes.

Brière-Guenoun, F. et Espinassy, L. (2021). De l’analyse de l’activité aux analyses didactiques : une recherche participative. Mise en œuvre de l’évaluation par compétences en cycle 3 en réseau d’éducation prioritaire. Phronesis, 1(1), 18-36. Disponible en ligne : https://0-www-cairn-info.catalogue.libraries.london.ac.uk/revue-phronesis-2021-1page-18.htm. Récupéré le 12 avril 2021.

Brière-Guenoun, F. et Simonet, P. (2021). Développement professionnel et co-construction de savoirs de métier d’étudiants stagiaires dans l’activité conjointe avec le formateur chercheur : analyses didactique et clinique de l’activité d’auto-confrontation croisée. Éducation & Didactique, 15(1), 47-74.

Brousseau, G. (1986). Fondements et méthodes de la didactique des mathématiques. Recherche en didactique des mathématiques, 2, 33-115.

Brousseau, G. (1998). Théorie des situation didactiques. Grenoble : La pensée sauvage.

Cahier des charges du dispositif Lycéens et apprentis au cinéma (2006). https://ciclic.fr/sites/default/files/fichiers/cahier-des-charges.pdf.

Bulletin officiel de l’Éducation nationale (1997). N°10 du 6 mars 1997, p. 699-700.

Chevallard, Y. (1997). Familière et problématique la figure du professeur. Recherche en didactique des mathématiques, 3, 17-54.

Clot, Y. (2008). Travail et pouvoir d’agir. Paris : Presses Universitaires de France.

Clot, Y. et Faïta, D. (2000). Genres et styles en analyse du travail. Concepts et méthodes. Travailler, 4, 7-42.

Clot, Y., Faïta, D., Fernandez, G. et Scheller, L. (2000). Entretiens en autoconfrontations croisées : une méthode en clinique de l’activité. Perspectives interdisciplinaires sur le travail et la santé, 2-1. Disponible en ligne : https://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/pistes/3833. Récupéré le 03 décembre 2016.

Clot, Y. et Simonet, P. (2015). Pouvoirs d’agir et marges de manœuvre. Le travail humain, 1, 31-52.

Dejours, C. (1980). Travail : usure mentale, Essai de psychopathologie du travail. Paris : Le Centurion.

Dupriez, V. (2015). Décentralisation, gestion locale et travail collectif dans les établissements. Dans V. Dupriez (dir.), Peut-on réformer l’école : Approches organisationnelle et institutionnelle du changement pédagogique (p. 69-84). Louvain-la-Neuve, Belgique : De Boeck Supérieur.

Faïta, D. (2007). L’image animée comme artefact dans le cadre méthodologique d’une analyse clinique de l’activité. Activités,2. Disponible en ligne : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/activites/1660. Récupéré le 25 janvier 2020.

Faïta, D. (2011). Théorie de l’activité langagière. Dans B. Maggi (dir.), Interpréter l’agir : un défi théorique (p. 41-67). Paris : Presses Universitaires de France.

Faïta, D. et Saujat, F. (2010). Développer l’activité des enseignants pour comprendre et transformer leur travail. Dans F. Saussez et F. Yvon (dir.), Analyser l’activité enseignante : des outils méthodologiques et théoriques pour l’intervention et la Formation (p. 41-71). Québec : Presses de l’Université de Laval.

Faïta, D. et Vieira, M. (2003). Réflexions méthodologiques sur l'autoconfrontation croisée. DELTA: documentação de estudos em lingüística teórica e aplicada, 19, 123-154.

Felix, M. et Saujat, F. (2015). L’intervention-recherche en milieu de travail enseignant comme moyen de formation. Dans V. Lussi Borer (dir.), Analyse du travail et formation dans les métiers de l’éducation (p. 199-218). Louvain-la-Neuve, Belgique : De Boeck Supérieur.

Félix, C., Saujat, F. et Combes, C. (2012). Des élèves en difficulté aux dispositifs d’aide : Une nouvelle organisation du travail enseignant. Recherches en Education, 4, 19-30.

Felix, C., Amigues, R. et Espinassy, L. (2014). Observer le travail enseignant. Recherches en Education, 19, 52-62.

Felix, C. et Poggi, M.-P. (2018). Construire un milieu pour l’étude et réduire les inégalités d’apprentissage. Une illustration à partir de deux dispositifs d’aide et d’accompagnement aux élèves. Communication présentée au Colloque ARCD Apports réciproques entre didactique(s) des disciplines et recherches comparatistes en didactique, Bordeaux, France.

Forquin, J.-C. (2008). Sociologie du curriculum. Rennes : Presses Universitaires de Rennes.

Foucart, J. (2009). L’accompagnement : dispositif de bienveillance et construction transactionnelle. Pensée plurielle, 3(3), 13-27.

Gather-Thurler, M. et Maulini, O. (2014). Enseigner, un métier sous contrôle ? Entre autonomie professionnelle et normalisation du travail. Paris : Éditions Sociales Françaises.

Ginzburg, C. (1980). Signes, Traces, Pistes - Racines d’un paradigme de l’indice. Le Débat, 6, 3-44.

Goigoux, R. (2007). Un modèle d’analyse de l’activité des enseignants. Éducation & didactique, 3, 47-69.

Grosstephan, V. et Brau-Anthony, S. (2018). Analyser l’activité éducative des enseignants d’EPS : les apports des approches ergonomique et didactique. eJRIEPS, Numéro spécial 1, 129-144. Disponible en ligne : http://elliadd.univ-fcomte.fr/ejrieps/special1. Récupéré le 24 septembre 2020.

Lebeaume, J. (2019). Précisions sur la « forme curriculaire » et distinction entre pratiques constitutives et savoirs contributifs. Éducation & didactique, 13(1), 43-59. Disponible en ligne : https://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/pistes/3833. Récupéré le 03 décembre 2016.

Lebeaume, J. et Magneron, N. (2004). Itinéraires de découverte au collège : à la recherche de principes coordinateurs. Revue française de pédagogie, 148, 101-118.

Lebeaume, J. et Valtat, C. (2007). Voisinage des enseignements et voisinance des pratiques enseignantes au collège. Actes du Congrès International AREF 2007, Strasbourg, France. Disponible en ligne : http://aref2007.u-strasb.fr/actes_pdf/AREF2007_ Joel_ LEBEAUME_067.pdf. Récupéré le 08 mars 2020.

Lessard, C. et Barrère, A. (2005). Travailler ensemble ? Des réformes éducatives aux pratiques enseignantes. Recherche et formation pour les professions de l’éducation, 49, 5-15.

Linton, R. (1977). Le fondement culturel de la personnalité. Paris : Dunod.

Loquet, M. (2007). Les techniques didactiques du professeur. Dans C. Amade-Escot (dir.), Le didactique (p. 49-66). Paris : Editions Revue EP.S.

Malraux, A. (1959). Intervention au Sénat, 2e séance du 8 décembre 1959. Disponible en ligne : https://malraux.org/wp-content/uploads/2018/07/81jg_senat_1959dec.pdf. Récupéré le 08 mars 2020.

Marcel, J, Dupriez, V., Périsset-Bagnoud, D. et Tardif, M. (2007). Coordonner, collaborer, coopérer : De nouvelles pratiques enseignantes. Louvain-la-Neuve, Belgique : De Boeck Supérieur.

Martinand, J.-L. (2001). Pratique de référence et problématique de la référence curriculaire. Dans A. Terrisse (dir.), Didactique des disciplines. Les références au savoir (p. 179-224). Bruxelles : De Boeck Université.

Marx, L. et Réverdy, C. (2020). Travailler en partenariat à l’école. Dossier de veille de l’IFÉ, n° 134, Lyon : ENS de Lyon. Disponible en ligne : http://veille-et-analyses.ens-lyon.fr/DA/detailsDossier.php?parent=accueil&dossier=134&lang=fr. Récupéré le 08 mars 2020.

Mercier, A., Schubauer-Leoni, M.-L. et Sensevy, G. (2002). Vers une didactique comparée. Revue française de pédagogie, 141, 5-16.

Mérini, C. (2001). Le partenariat : histoire et essai de définition. Actes de la Journée nationale de l’Observatoire des Zones Prioritaires, 1-6. Disponible en ligne : https://www.ozp.fr/IMG/pdf/merini.pdf. Récupéré le 26 avril 2020.

Miles, A.-M. et Huberman, B.-M. (1994). Analyse des données qualitatives : recueil de nouvelles méthodes. Bruxelles : De Boeck.

Ministères de l’éducation nationale et de la culture et de la communication (2013). Circulaire interministérielle de 2013. Le parcours d’éducation artistique et culturelle. Disponible en ligne : https://www.education.gouv.fr/bo/13/Hebdo18/MENE1311045C.htm. Récupéré le 26 avril 2020.

Moussi, D. (2016). La posture de décentration de l’enseignant au cours des interactions langagières. Recherches en didactique, 21, 57-80.

Netter, J. (2016). Une exposition « clés en main » : la difficile prise en compte des apprentissages dans le partenariat scolaire. Carrefours de l’éducation, 41, 241-255.

OCDE (2015). Résultats du PISA 2015. Vol. II : Politiques et pratiques pour des établissements performants. Paris : OCDE.

Rapport Eurydice (2009). L’éducation artistique et culturelle à l’école en Europe.

Disponible en ligne : https://www.ac-strasbourg.fr/fileadmin/pedagogie/physiquechimie/histoire_des_arts/L_education_artistique_et_culturelle_a_l_ecole_en_Europe.pdf.

Rayou, P. et van Zanten, A. (2018). Chapitre II. Valeurs et politiques. Dans P. Rayou (dir.), Les 100 mots de l’éducation (p. 37-57). Paris : Presses Universitaires de France.

Saussez, F. et Yvon, F. (2014). Problématiser l’usage de la co-analyse de l’activité en formation initiale à l’enseignement. Dans L. Paquay (dir.), Travail réel des enseignants et formation: Quelle référence au travail des enseignants dans les objectifs, les dispositifs et les pratiques ? (p. 113-126). Louvain-la-Neuve, Belgique: De Boeck Supérieur.

Schubauer-Leoni, M.-L. et Leutenegger, F. (2002). Expliquer et comprendre dans une approche clinique / expérimentale du didactique ordinaire. Dans F. Leutenegger et M. Saada-Robert (dir.), Expliquer et comprendre en sciences de l’éducation (p. 227-251). Louvain-la-Neuve, Belgique : De Boeck.

Sensevy, G. (2001). Théories de l’action et action du professeur. Dans J.-M. Baudoin et J. Friedrich (dir.), Théories de l’action et éducation (p. 203-224). Bruxelles : De Boeck.

Sensevy, G. et Mercier, A. (2007). Agir ensemble : l’action didactique conjointe du professeur et des élèves. Rennes : Presses Universitaires de Rennes.

Souillés-Debats, L. (2015). Des ciné-clubs aux dispositifs scolaires du CNC : l’institutionnalisation de l’éducation à l’image en France (1981-1988), Décadrages, 31, 87-103.

Tambone, J. (2014). Enseigner dans un dispositif auxiliaire : le cas du regroupement d’adaptation et de sa relation avec la classe d’origine de l’élève. Les Sciences de l’éducation - Pour l’Ère nouvelle, 47(2), 51-71.

Venturini, P. (2012). Action, activité, « agir » conjoint en didactique : discussion théorique. Éducation & didactique, 6(1), 127-136.

Vygotski, L.-S. (1934/1997). Pensée et langage. Paris, France : La Dispute.

Vygotski, L.-S. (1925/1994). La conscience comme problème de la psychologie du comportement. Société française, 50, 35-47.

Wisner, A. (1995). Réflexions sur l’ergonomie. Toulouse : Octarès.

Haut de page

Notes

1 « (...) on notera que l’activité professorale se situe à l’articulation de plusieurs logiques, plusieurs temporalités et qu’elle met en jeu plusieurs partenaires » (Amigues, 2003 :11).

2 Cf. Figure 3

3 Cf. Section 2.2.

4 Cf. Section 4.1.2.

Haut de page

Table des illustrations

Titre Figure 1 : Les différents jeux de porosité entre niveau interne et externe de l’activité professorale
URL http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/ced/docannexe/image/3039/img-1.png
Fichier image/png, 26k
Titre Figure 2 : Les différentes étapes de l’intervention-recherche
URL http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/ced/docannexe/image/3039/img-2.png
Fichier image/png, 91k
Titre Tableau 2 : Niveau de condensation des données 1. Repérage des unités thématiques
URL http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/ced/docannexe/image/3039/img-3.png
Fichier image/png, 160k
Titre Figure 3 : Niveau de condensation des données 2. Ventilation des objets du discours
URL http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/ced/docannexe/image/3039/img-4.png
Fichier image/png, 80k
Titre Figure 4 : Comparaison des unités thématiques abordées au cours de l’entretien préalable et du retour au collectif, avec ordre d’apparition et temps de parole dédié
URL http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/ced/docannexe/image/3039/img-5.jpg
Fichier image/jpeg, 56k
Haut de page

Pour citer cet article

Référence électronique

Isabelle Claverie, « Travail partagé et cohérence (inter)disciplinaire autour de la rencontre avec l’œuvre cinématographique »Contextes et didactiques [En ligne], 18 | 2021, mis en ligne le 30 décembre 2021, consulté le 12 février 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/ced/3039 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/ced.3039

Haut de page

Auteur

Isabelle Claverie

Aix Marseille Université – Laboratoire ADEF (UR 4671)

Haut de page

Droits d’auteur

CC-BY-NC-4.0

Le texte seul est utilisable sous licence CC BY-NC 4.0. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.

Haut de page
Rechercher dans OpenEdition Search

Vous allez être redirigé vers OpenEdition Search