Monica White, Military Saints in Byzantium and Rus, 900-1200
Monica White, Military Saints in Byzantium and Rus, 900-1200. Cambridge, Cambridge University Press, 2013.
Texte intégral
1M. White offre, avec ce livre, une étude du développement du culte des saints militaires dans les mondes byzantin et russe. Organisé en six chapitres – The pre-history of the military saints, The formation of the martyr-warrior ideal, The collective cult of the military saints, The military saints in early Rus, Boris and Gleb and the warrior-martyr ideal in Rus et, enfin, Military saints under the house of Suzdal – le propos profite de précieuses annexes : une carte de la Russie à la fin de la période pré-mongole, mais aussi un tableau récapitulant les dates des fêtes des principaux saints militaires cités, un rappel des dates de règnes des empereurs romains et byzantins mentionnés, de Dèce à Alexis III Ange, une généalogie simplifiée des Riourikides puis une liste des dédicaces des églises et monastères fondés en Russie entre le xe et le xiiie s. Si le chercheur apprécie l’index détaillé, il ne peut qu’être impressionné par l’ampleur des sources étudiées et l’être d’autant plus que les images analysées ne sont pas mentionnées en tant que telles dans la liste des sources. De fait, l’A., soucieuse d’embrasser son sujet de la manière la plus large qui soit, se penche sur les récits hagiographiques, les chroniques, mais également sur les traités militaires sans négliger les écrits antérieurs au xe si. puisqu’elle revient, pour le plus grand bénéfice du lecteur, sur les réalités plus anciennes, celles des ve-viie s. en particulier. Attentive aux fondations de sanctuaires, aux données anthroponymiques, elle étudie encore les sources iconographiques. Si elle considère ces dernières comme « essentielles à la compréhension du culte » rendu aux saints guerriers, elle écarte cependant de son champ d’analyse icônes, fresques et croix pectorales qui ont un but et un usage « purement dévotionnels » pour conserver, en revanche, sceaux et monnaies qui ont « des fonctions sociales et économiques importantes » (p. 9).
2Évoquant rapidement le rôle militaire de la Vierge et de saint Michel pour se consacrer à l’étude du culte des saints Georges, Démétrius, Théodore et Mercure puis des frères russes Boris et Gleb, M. White caractérise, dans un premier temps, la dévotion aux saints militaires à Byzance. Elle souligne la réunion, progressive, de saints que tout distingue sauf, outre une appartenance à l’armée peu décrite dans les récits hagiographiques les plus anciens, les conditions de leur mort puisqu’ils furent tous martyrisés. Ce dernier aspect est essentiel. Il encourage, à partir du xe s., le rapprochement entre les martyrs militaires et les soldats du monarque qui perdent la vie sur les champs de bataille autant qu’il facilite l’assimilation entre les adversaires de l’Empire et les ennemis de la foi chrétienne et du Christ. Convictions religieuses et revendications plus « identitaires » se rejoignent, conférant à la guerre une dimension sacrée. Convaincus de bénéficier du soutien des saints militaires au cours des combats, empereurs, officiers et courtisans offrent les soldats sanctifiés en exemples aux guerriers à partir de la fin du ixe s. Ils commandent de nouvelles versions de leurs Vitæ pour souligner, tout en relatant l’exécution, l’excellence militaire de ces saints singuliers. Ils encouragent aussi le culte collectif des saints militaires qu’ils élèvent au rang de patrons des armées byzantines.
3L’A. s’intéresse, dans un second temps, à l’épanouissement de la dévotion aux saints militaires en Russie à partir du xe s., sous les Riourikides. Si l’influence byzantine est perceptible dans le décor des sanctuaires qui insiste sur le martyre des soldats, elle est limitée. De fait, l’accent est porté, sur les sceaux et les monnaies en particulier, sur les qualités martiales des guerriers plus que sur leur mise à mort. La dimension collective du culte, essentielle à Byzance, semble aussi s’effacer. L’idéal du martyr-guerrier n’est pas inexistant, mais il profite, sans influence byzantine, à deux figures locales, aux fils de Vladimir Sviatoslavich, exécutés pour leur foi au xe s. : Boris et Gleb. Ces derniers protègent les armées au combat et deviennent également, progressivement, les saints patrons de la dynastie régnante, honorés à Vyshgorod, sur les terres des princes de Kiev, mais aussi dans les diverses églises qui sont alors fondées en leur honneur. Un changement s’opère entre le milieu du xiie s. et les premières années du xiiie s., avec l’affirmation de la principauté de Vladimir Souzdal et de ses descendants. Boris et Gleb sont associés aux autres saints militaires et font désormais, comme les autres et avec eux, l’objet d’un culte qui se caractérise à la fois par son aspect collectif et par l’insistance sur le martyre, première et insigne prouesse de ces soldats remarquables. L’influence de Byzance est sensible, mais l’originalité et l’innovation ne sont pas absentes. M. White signale en effet que la maison de Souzdal se distingue parce qu’elle se place sous la protection des saints militaires, mais recherche également celle de ses propres ancêtres. Désireuse de comparer les réalités byzantines et russes, l’A. relève ainsi les différences, note les points communs et souligne des universaux, tels la volonté des princes de s’assurer du soutien du ciel et celle d’encourager voire de réconforter le guerrier.
Pour citer cet article
Référence papier
Esther Dehoux, « Monica White, Military Saints in Byzantium and Rus, 900-1200 », Cahiers de civilisation médiévale, 238 | 2017, 215-216.
Référence électronique
Esther Dehoux, « Monica White, Military Saints in Byzantium and Rus, 900-1200 », Cahiers de civilisation médiévale [En ligne], 238 | 2017, mis en ligne le 01 juin 2017, consulté le 08 novembre 2024. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/ccm/6076 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/ccm.6076
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