Hiltrud Westermann-Angerhausen, Mittelalterliche Weihrauchfässer von 800 bis 1500
Hiltrud Westermann-Angerhausen, Mittelalterliche Weihrauchfässer von 800 bis 1500, Petersbourg, Michael Imhof Verlag GmbH & Co. KG (Bronzegeräte des Mittelalters, 7), 2014.
Full text
1Le présent catalogue des encensoirs liturgiques en bronze de la période comprise entre l’an 800 et la fin du Moyen Age constitue un événement dans le paysage des publications sur l’art médiéval. Il a été réalisé par Hiltrud Westermann-Angerhausen, ancienne directrice du Musée Schnütgen à Cologne, et vient enrichir la collection allemande consacrée à l’art des objets en bronze du Moyen Âge. Disons le d’emblée, ce volume renouvelle en profondeur notre connaissance des encensoirs liturgiques de la période médiévale et, bien au-delà de ces objets, offre aux médiévistes une vision de vaste ampleur sur ces objets, dépassant largement le cadre strict de l’histoire de l’art.
2Sur les 680 pages du volume, la partie dédiée au catalogue occupe plus de 550 pages, en comptant les très nombreuses illustrations dont on aurait souhaité qu’un plus grand nombre soit en couleurs. Le classement des encensoirs liturgiques dans le catalogue ne suit pas l’ordre alphabétique des lieux de conservation ou bien celui basé sur la chronologie des pièces. H. Westerman-Angerhausen a judicieusement opté pour un classement par catégories typologiques qui, bien qu’elles correspondent pour une grande part à la chronologie et à la géographie de la production des encensoirs, permettent un regard de nature à la fois technique et iconographique sur les pièces. À certains moments, on a l’impression que les différences typologiques prises en compte par l’A. (formes de l’architecture, typologie du décor ornemental, formes de la boule principale de l’encensoir ou bien encore, la typologie des chaînes) entrent un peu trop dans des détails qui, à mes yeux, ne semblent pas agir de façon déterminante dans la définition de la typologie des encensoirs. Cette petite réserve étant faite, on ne peut que louer la richesse et la précision du catalogue où tous les encensoirs produits entre 800 et 1 500 sont désormais répertoriés, décrits, analysés sous tous leurs aspects, donnant ainsi une vision précise de l’évolution de ces objets sur la longue durée du Moyen Âge occidental et à partir d’un regard fructueux sur les aires géographiques de leur production.
3La première partie du livre, comprise dans les 115 premières pages du volume, propose un panorama détaillé de l’histoire des encensoirs liturgiques depuis l’époque carolingienne jusqu’à la fin du Moyen Âge. Mais, plus encore, ces pages, où se déploie la rigueur méthodologique de l’A., basée sur une approche interdisciplinaire de belle allure, offrent au médiéviste un très solide matériau historique, exégétique, archéologique et artistique sur ces objets. En érudite avertie, H. Westermann-Angerhausen introduit le sujet par rapport au regard porté sur la matière « encens » dans l’histoire et les civilisations anciennes, montrant ainsi la parfaite continuité culturelle entre les sociétés non chrétiennes de l’Antiquité et l’usage strictement liturgique de l’encens dans le christianisme. Les pages consacrées à la matière « encens » ainsi qu’à celle dans laquelle la plupart des encensoirs ont été fabriqués – le bronze – ajoutent à l’intérêt de l’approche anthropologique du sujet proposée par H. Westerman-Angerhausen. À propos des inscriptions sur les encensoirs, l’A. s’interroge avec raison sur la part accordée dans ces inscriptions à la notion de signature d’artistes et/ou de commanditaires par rapport à celle de construction de la mémoire des individus. Les chapitres dédiés à l’exploration de l’usage liturgique des encensoirs au Moyen Âge, à leur exégèse théologique ainsi qu’à leur iconographie et leur typologie emportent l’adhésion et ravissent le lecteur, tant par l’érudition dont fait preuve l’A. mais aussi par le fait qu’elle fait de l’étude de ces objets du culte un véritable observatoire de la vie culturelle, sociale, liturgique et politique du Moyen Âge occidental. Dans ces pages, les deux conclusions marquantes concernent en premier lieu l’affirmation selon laquelle les encensoirs liturgiques sont en quelque sorte des reproductions « réelles » en miniature de la Jérusalem Céleste sur terre, activée par l’usage liturgique de l’encens et de la bonne odeur du Christ au moment de la célébration des rituels. En second lieu, H. Westermann-Angerhausen s’emploie avec beaucoup de dextérité à souligner le rôle majeur tenu par l’exégèse liturgique dans la vision offerte sur les encensoirs par le Moyen Âge. Pour cela, elle procède à une exploration, entre autres, du long passage consacré aux encensoirs dans l’essai sur les divers arts écrit au xie s. par le moine Théophile. Dans ce texte, Théophile procède à une description de la fabrication de l’encensoir et de sa finalité pleinement théologique en référence à la Jérusalem Céleste.
4À tous égards, le livre d’H. Westermann-Angerhausen est un modèle, dépassant de beaucoup le genre « catalogue » pour atteindre celui de l’ouvrage de référence, désormais indispensable sur le sujet mais aussi pour tout médiéviste s’intéressant à l’apport des objets liturgiques dans la compréhension de la culture du Moyen Âge occidental.
References
Bibliographical reference
Éric Palazzo, “Hiltrud Westermann-Angerhausen, Mittelalterliche Weihrauchfässer von 800 bis 1500”, Cahiers de civilisation médiévale, 238 | 2017, 214-215.
Electronic reference
Éric Palazzo, “Hiltrud Westermann-Angerhausen, Mittelalterliche Weihrauchfässer von 800 bis 1500”, Cahiers de civilisation médiévale [Online], 238 | 2017, Online since 01 June 2017, connection on 10 December 2024. URL: http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/ccm/6074; DOI: https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/ccm.6074
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