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Comptes rendus

Kazutomo Karasawa (éd. et trad.), The Old English Metricall Calendar (Menologium)

Bernardo Santano Morano
Traduction de Philippe Paquant
p. 84-86
Référence(s) :

Kazutomo Karasawa (éd. et trad.), The Old English Metricall Calendar (Menologium), Cambridge, D.S. Brewer (Anglo-Norman Texts, 12), 2015.

Texte intégral

1Le « Calendrier métrique anglo-saxon » ou Menologium, comme il est traditionnellement connu, est un poème anonyme de 231 vers en allitération conservé dans le manuscrit Cotton Tiberio B.i. de la British Library. Cette œuvre n’a pas bénéficié de l’attention critique que mérite un texte de cette nature, car les études qui se sont intéressées à son analyse sont peu nombreuses. La nouvelle monographie de Kazutomo Karasawa, auteur au demeurant d’une édition soignée du poème et d’une élégante version en prose et en anglais moderne, vient remédier d’une manière exemplaire cette longue carence d’études sur le Menologium. En effet, depuis la première publication par George Hickes (1703), le texte a été édité à 17 reprises, au cours des xixe et xxs., mais cela ne veut pas dire que les nombreuses questions textuelles et les interprétations que pose le poème ont été résolues. K. Karasawa souligne qu’il demeure encore un large champ d’études à mener sur la nature de cette œuvre et ses sources, ainsi que sur d’autres textes analogues, en plus des aspects relatifs à la structure et au contenu du poème.

2Le manuscrit Cotton Tiberius B.i est un beau codex dont le contenu, grâce aux magnifiques services de la British Library, peut être consulté sur internet avec des images de haute qualité. Le volume rassemble une série de textes parmi lesquels on trouve une version en anglo-saxon de l’œuvre de Paulus Orosius (375-418), Historiarum Adversum Paganos Libri VII ; le Menologium, objet de l’étude de K. Karasawa ; le poème de genre gnomique connu sous l’appellation « Maximes » (Maxims II), enfin la « version C » ou « Chronique de Abingdon II » de la Chronique anglo-saxonne.

3L’analyse de K. Karasawa porte sur l’édition et la traduction du « Calendrier métrique anglo-saxon » (Menologium), un texte qui renvoie d’évidents échos de l’Hymne de Caedmon (Caedmon’s Hymn) et de la poésie chrétienne épique ; mais avant cela l’A. réalise une étude détaillée de plusieurs questions dont celle de l’usage du terme Menologium en tant que partie du titre. Cet aspect est de taille puisqu’il a suscité une controverse parmi les critiques. K. Karasawa résout correctement la question non seulement parce qu’il suit la tradition, mais aussi parce qu’il existe des raisons sémantiques qui justifient de le garder ainsi.

4L’histoire de l’édition du poème est étudiée de manière exhaustive puisqu’elle se penche sur toutes les publications depuis la première de G. Hickes, déjà citée. K. Karasawa décrit les aspects les plus notables de ces éditions, aussi bien celles publiées que les inédites, et leurs traductions en anglais moderne et même une en italien. La version de ce texte ayant le plus d’autorité était jusqu’à présent celle de E. V. K. Dobbie, de 1942 ; cependant, à partir d’aujourd’hui, l’édition de référence sera sans aucun doute celle de K. Karasawa.

5Il s’ensuit une description détaillée du contenu et des caractéristiques du manuscrit et l’A. attire l’attention sur le fait qu’aussi bien les « Maximes » que le « Calendrier métrique » (Menologium) semblent agir comme une sorte de préface au texte de la Chronique anglo-saxonne qui vient après.

6En ce qui concerne les sources du poème, K. Karasawa signale qu’« il n’y a pas de preuve qui justifie que le Menologium soit une traduction, une versification, une paraphrase, un résumé ou une réélaboration d’une autre œuvre » (p. 15). Tout semble indiquer qu’il s’agit d’une œuvre de création, même s’il est évident que son auteur anonyme a consulté d’autres compositions de semblable nature liturgique. Ces textes analogues seraient une série de calendriers métriques latins, tels ceux de York, Hampson, Winchcombe, Ramsey et le Livre d’Heures de Pembroke. De la même façon, les calendriers métriques en vieil irlandais se distinguent, tout comme celui composé en anglo-saxon, pour être les seuls textes en vers sur ce thème conservés en langues vernaculaires du haut Moyen Âge (p. 21). Enfin, le dénommé Menologium en prose (transmis à travers deux versions) est, pour K. Karasawa, le texte le plus proche du Menologium en vers et celui-ci considère que les deux ont pu être fondés sur un même patron ou modèle.

7Par rapport à la structure du poème, K. Karasawa relève que la plupart des éditeurs, à l’exception de Dobbie, ont ignoré le fait que le manuscrit était divisé en quatre parties, un point de la plus haute importance pour son interprétation. D’autres parties de l’étude analysent en détail les entrées liturgiques (les fêtes et autres genres de célébrations religieuses), ainsi que celles des computs (solstices, équinoxes, le début des saisons, etc.) qui se trouvent dans le poème. De la même manière, l’étude s’attarde sur les relations entre le Menologium en prose et en vers, que l’A. a déjà traitées dans le chapitre sur les textes analogues. K. Karasawa perçoit la finalité de l’œuvre comme un instrument précis de données liturgiques similaire à celui de l’année naturelle, et met en évidence le fait que « la plupart des événements dont les dates sont indiquées avec une référence à une fête fixe ou un jour clef du comput annuel dans le texte C de la Chronique anglo-saxonne se retrouvent datés dans le texte du Menologium » (p. 53). De même, comme il sied à une étude modèle, l’analyse des aspects linguistiques du texte s’avère pertinente et démontre que le texte possède à l’évidence les caractéristiques du saxon occidental classique (West Saxon).

8L’étude décrit amplement les particularités prosodiques d’un texte qui suit, pour l’essentiel, les principes de la tradition de l’allitération anglo-saxonne, même si l’on détecte aussi quelques cas sporadiques de rime. Les derniers aspects étudiés avant de présenter l’édition concernent la date et le lieu de composition du texte. S’appuyant essentiellement sur des critères linguistiques, K. Karasawa considère que le poème fut composé dans le sud de l’Angleterre entre la moitié et la fin du xs., dans tous les cas avant 1016 (p. 71).

9L’édition bilingue (anglo-saxon/anglais moderne) présente un texte très soigné avec des notes textuelles qui expliquent à la fois les corrections qui sont introduites et les observations des autres critiques sur des points conflictuels. Le résultat est que K. Karasawa établit une édition du poème qui, aujourd’hui, semble définitive. Le texte est également accompagné d’autres notes explicatives, pratiquement à chaque vers, qui éclaircissent d’innombrables détails de nature linguistique, historique, culturelle, mais aussi de type critique. De plus, le glossaire final contribue significativement à la richesse des données qu’apporte cette édition.

10Le volume est complété par neuf appendices qui incluent une édition et une traduction du Menologium en prose par K. Karasawa, avec les commentaires correspondants ; une édition du texte latin du « Calendrier métrique de York » avec sa traduction en anglais moderne et les notes textuelles correspondantes ; une édition du texte en vieil irlandais du « Calendrier des saints de Adamnan » (Félire Adamnáin) avec sa version en anglais moderne basée sur l’édition et la traduction de M. E. Byrne (1904), un texte qui, par ailleurs, est difficile d’accès ; l’A. inclut une édition de Enlaith betha, un autre poème en vieil irlandais qui raconte le cycle annuel des oiseaux et des animaux, avec la traduction correspondante en anglais moderne (le texte en vieil irlandais et la traduction proviennent de l’édition de R. I. Best et H. J. Lawlor de 1931, mais les commentaires de la traduction sont de K. Karasawa). Les appendices suivants contiennent des listes détaillées des calendriers anglo-saxons, les festivités ecclésiastiques fixes, les veillées, les solstices et les équinoxes. Enfin, le dernier appendice est une minutieuse étude sur l’usage des noms latins et anglo-saxons des mois. C’est ainsi que s’achève ce qui est, selon moi, une analyse foisonnante de données qui transforment cette étude de K. Karasawa en une œuvre aussi limpide que brillante par la clarté d’exposition de son propos et ses conclusions. Il s’agit sans doute d’une œuvre définitive et une référence obligée pour les études de toute sorte qui voudront approfondir le sujet.

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Pour citer cet article

Référence papier

Bernardo Santano Morano, « Kazutomo Karasawa (éd. et trad.), The Old English Metricall Calendar (Menologium) »Cahiers de civilisation médiévale, 241 | 2018, 84-86.

Référence électronique

Bernardo Santano Morano, « Kazutomo Karasawa (éd. et trad.), The Old English Metricall Calendar (Menologium) »Cahiers de civilisation médiévale [En ligne], 241 | 2018, mis en ligne le 01 mars 2018, consulté le 22 janvier 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/ccm/5277 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/ccm.5277

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Auteur

Bernardo Santano Morano

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