Navigation – Plan du site

AccueilNuméros267Comptes rendusJim Brown, Living opposite to the...

Comptes rendus

Jim Brown, Living opposite to the Hospital of St John. Excavations in medieval Northampton 2014

Elisabeth Lorans
p. 475-476
Référence(s) :

Jim Brown, Living opposite to the Hospital of St John. Excavations in medieval Northampton 2014, Oxford, Archaeopress (Archaeopress Archaeology), 2021

Texte intégral

1Cet ouvrage rend compte d’une importante fouille archéologique conduite en plein centre de la ville de Northampton en 2014 sous la direction de Jim Brown, principal auteur de cette publication qui mobilisa de nombreux contributeurs pour traiter toutes les données livrées par 900 ans d’occupation urbaine, du début du xiie siècle à nos jours. La publication suit une trame communément répandue en archéologie préventive : un premier chapitre introductif, qui présente la ville, l’opération et les sources documentaires ; un deuxième chapitre qui détaille la longue séquence d’occupation observée sur ce terrain d’environ 700 m2 ; un chapitre 3 dédié au mobilier, très divers ; un chapitre 4 à la faune et aux données environnementales ; enfin, un dernier chapitre de synthèse et discussion. Le tout est illustré par de nombreux documents de grande qualité : plans, coupes et photographies soit de documents anciens soit, les plus nombreuses, de structures archéologiques. Le volume se conclut par une bibliographie d’une dizaine de pages.

2Avant de poursuivre l’analyse de l’occupation du sol, rappelons où nous sommes : Northampton, située à une centaine de kilomètres au nord de Londres, une agglomération en fort développement après la conquête normande, avec un nombre élevé de fondations religieuses de tout statut, et qui connut son âge d’or aux xiie et xiiie siècles avant un apparent déclin au xive siècle marqué par une baisse démographique. Les auteurs ont analysé en détail tous les plans de ville disponibles qui montrent que le terrain fouillé se trouvait dans la partie sud-est de la ville médiévale, intra muros, non loin de la porte sud et en face de l’hôpital Saint-Jean, fondé vers 1138-1140 : une information topographique retenue dans le titre de l’ouvrage. La fouille n’a en rien éclairé le burh anglo-saxon, très mal connu – trop mal pour être cartographié ? Le seul plan d’ensemble de la ville médiévale (fig. 1.2, p. 4) révèle une agglomération « normande » typique avec un château en limite occidentale, intégré à un réseau viaire assez dense formant un ensemble ovoïde découpé en îlots de taille moyenne ; à l’extérieur du noyau castral, de vastes parcelles ont accueilli la plupart des couvents mendiants, le prieuré clunisien ainsi que l’hôpital Saint-Jean. C’est dans ce tissu plus lâche qu’est intervenue la fouille, qui a documenté le processus d’urbanisation au Moyen Âge central et au-delà.

3Dès le début de l’intervention, le terrain fut divisé en cinq zones (plots), les trois premières alignées d’est en ouest le long de St John’s Street, les deux autres juste au nord, le long de Fetter Street, perpendiculaire à la précédente et établie, au plus tôt, au xve siècle. Cette division ne correspond pas à une organisation parcellaire stricte en raison de la rareté des constructions au début de l’occupation mais à une approximation, permettant de rendre compte de la répartition des différentes activités identifiées sur le site.

4L’exploitation du sol pour en extraire des matériaux de construction est chose commune dans les villes médiévales ; ici la fouille a révélé cet usage pendant un siècle environ : fosses de prospection, fosses d’exploitation et niveaux de fonctionnement de la carrière (remblais pour niveler le sol, foyers, etc.), le tout pour récupérer une pierre destinée soit aux nombreuses constructions en cours à cette période, soit, pour les matériaux de moindre qualité, aux routes. Les fosses les plus proches de St John’s Street furent utilisées comme dépotoirs après la fin de l’exploitation en carrière.

5La première construction identifiée est un bâtiment à pan de bois, partiellement reconnu, qui a pu avoir un plan en L (plot 3). La mise au jour dans les niveaux d’occupation et d’abandon d’objets et d’ébauches en os et en bois de cerf a conduit à y voir un atelier en usage vers la fin du xiie siècle, avant l’arrêt total de l’extraction de pierre.

6Un bâtiment sur solin fut établi à l’est de l’atelier, en front de rue, probablement dans le dernier quart du xiie siècle. À l’arrière, dans un espace ouvert, se trouvaient des structures liées au séchage et au maltage du grain ; le tout resta en usage « until the second half of the early 13th century » (p. 58) : une formulation curieuse que l’on retrouve ailleurs dans l’ouvrage à propos des mêmes structures (p. 78). La légende du plan des structures en creux dispersées dans les zones 1 et 2 (p. 59) indique qu’elles courent jusqu’au milieu du xiiie siècle. On a donc affaire à une autre activité artisanale – la première de ce type connue à Northampton – qui laissa la place à une fonction résidentielle face à l’hôpital, qui connut lui-même de nouvelles constructions au xive siècle.

7L’occupation domestique médiévale est surtout révélée par les structures annexes : latrines, puits, citernes, fosses diverses qui couvrent presque toute l’étendue de la fouille. Il faut attendre la fin du xve siècle pour observer les murs arasés de plusieurs maisons édifiées le long de St John’s Street ou de Fetter Street : le plan général de la fouille fourni dès l’introduction (p. 31) montre bien la différence entre les structures médiévales, presque toutes en creux, et les vestiges post-médiévaux qui dessinent des habitations de plan rectangulaire témoignant de la stabilité de ce quartier jusqu’à l’époque contemporaine.

8La présence de céramique importée, comme la consommation d’oiseaux ou encore de veau, manifestent un niveau social élevé le long de St John’s Street vers la fin du Moyen Âge, soit qu’il s’agisse des habitants eux-mêmes, soit que ces restes proviennent de l’hôpital. Cette seconde hypothèse est formulée à plusieurs reprises dans l’ouvrage, justifiant sans doute aux yeux de l’auteur le titre retenu, mais les indices d’une influence de la proximité de l’hôpital Saint-Jean sur l’occupation des parcelles fouillées demeurent ténus ; le titre est certainement plus parlant pour les personnes familières avec la topographie de Northampton qu’il ne l’est pour les archéologues qui liront l’ouvrage. Quelques pièces de monnaie et quelques tessons de poterie témoignent d’échanges avec la France.

9La permanence de l’occupation domestique dans les derniers siècles du Moyen Âge et la qualité d’une partie du mobilier détonent par rapport aux signes de déclin livrés par d’autres fouilles et par la documentation textuelle à l’échelle de la ville, qui fut assiégée par les troupes royales en 1264 et perdit ensuite son université.

10Finalement, rien de spectaculaire dans cet ouvrage, mais une grande rigueur d’analyse, qui répond à celle de l’intervention de terrain guidée par des objectifs clairement définis et rappelés en début d’ouvrage : on reconnaît le protocole habituel des équipes archéologiques britanniques et en particulier de celle du Museum of London (MOLA) qui a incorporé en son sein le service archéologique du Northamptonshire pendant l’opération. Il s’agit même d’un ouvrage quelque peu austère en raison de la nature des observations qui relèvent du caractère banal de la vie urbaine : une exploitation du terrain comme carrière de pierre au xiie siècle suivie de constructions ordinaires, à pans de bois ou sur solin, remplissant des fonctions artisanales puis résidentielles ; en bref, des ateliers et des habitations dont surtout les structures annexes, creusées dans les cours et les jardins, en retrait de la rue, ont été identifiées. Rien d’exceptionnel non plus parmi le mobilier recouvré hormis quelques pièces d’échecs, dont l’ébauche d’un roi ou d’une reine. C’est dans cette normalité que réside l’intérêt de cet ouvrage qui donne à voir les résultats solides d’une opération archéologique de qualité dans une ville médiévale d’Europe de l’Ouest comme il en a existé des milliers. Les archéologues français comme du reste de l’Europe confrontés à ce même type d’occupation y trouveront de nombreux points de comparaison.

Haut de page

Pour citer cet article

Référence papier

Elisabeth Lorans, « Jim Brown, Living opposite to the Hospital of St John. Excavations in medieval Northampton 2014 »Cahiers de civilisation médiévale, 267 | 2024, 475-476.

Référence électronique

Elisabeth Lorans, « Jim Brown, Living opposite to the Hospital of St John. Excavations in medieval Northampton 2014 »Cahiers de civilisation médiévale [En ligne], 267 | 2024, mis en ligne le 15 septembre 2024, consulté le 10 octobre 2024. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/ccm/19664 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/12e6y

Haut de page

Auteur

Elisabeth Lorans

Université de Tours, Institut universitaire de France

Haut de page

Droits d’auteur

CC-BY-NC-ND-4.0

Le texte seul est utilisable sous licence CC BY-NC-ND 4.0. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.

Haut de page
Rechercher dans OpenEdition Search

Vous allez être redirigé vers OpenEdition Search