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Comptes rendus

Gábor Sarbak et Lorenz Weinrich, éd. — Sicardi Cremonensis episcopi « Mitralis de officiis »

Sophie Delmas
p. 94-95
Référence(s) :

Gábor Sarbak, Lorenz Weinrich et Sicard de Crémone, Sicardi Cremonensis episcopi « Mitralis de officiis », Turnhout, Brepols, 2008, LXIV-850 pp. (Corpus christianorum. Continuatio mediaevalis, 228).

Texte intégral

1Après avoir publié dans la même collection le Rationale de Guillaume Durant (éd. A. Davril et T. M. Thibodeau, 1995-2003), les éditions Brepols continuent à faire paraître des ouvrages essentiels pour la compréhension de la liturgie médiévale. C’est le cas du Mitrale de Sicard de Crémone, dont l’édition latine, parue en 2008, est précédée d’une longue introduction de L. Weinrich.

2Nous savons peu de choses sur Sicard. Issu d’une famille de Crémone, en Lombardie, il devient évêque en 1185, ce qui permet de situer sa date de naissance autour de 1155. Cet épiscopat vient couronner des études de droit canon à Bologne, et peut-être à Paris et à Mayence. Sicard est aussi l’auteur d’une Chronique pour laquelle nous disposons d’une édition ancienne dans les MGH (dans Annales et chronica italica aevi suevici, éd. O. Holder-Egger, Hanovre, 1903, p. 22-181 [Scriptores, 31]) qui donne de précieux renseignements biographiques. Il s’engage dans de nombreuses affaires politiques, que ce soit entre le pape et l’empereur, ou entre sa ville et les Lombards. Il participe également à la croisade ; il est ainsi à Constantinople en 1204. À son retour, en 1206, il est étroitement mêlé au conflit entre Otton IV et Frédéric II et prend parti pour le premier. En 1208, le pape Innocent III le nomme visitator et provisor et s’efforce, en vain, de le convaincre de prendre à nouveau la croix. Quelques années plus tard, il tombe malade et meurt le 8 juin 1215, comme en témoigne le nécrologe de Crémone.

3Sicard de Crémone laisse derrière lui de nombreux ouvrages. Une œuvre de jeunesse, le Liber Mythologie, évoqué dans sa Chronique, est aujourd’hui perdu, à l’instar de sa Vie de saint Homebon et de ses disputes théologiques. Entre 1179 et 1181, il rédige une Summa decretorum ou Summa canonum, un manuel de droit canon, encore inédit. Il est également l’auteur de la Chronique déjà évoquée, qui commence avec la Création du monde et s’achève en 1202 ; comme chez Augustin et Isidore, l’histoire du monde y est divisée en six âges. Le Mitralis de officiis ecclesiasticis est sans conteste son ouvrage le plus important et le plus renommé. L’édition latine n’avait jamais été revue depuis celle proposée dans la Patrologie latine de Migne (PL 213).

4La datation du Mitralis peut être proposée seulement à partir du texte même. La carrière de Sicard (il a rédigé cet ouvrage en tant qu’évêque), l’exploitation de sources presque contemporaines (comme Jean Beleth), sa connaissance de la liturgie orientale, l’utilisation du Mitralis par Oderigo en 1215 permettent de situer la rédaction de l’œuvre en 1205 (au plus tard).

5Les sources de Sicard sont variées. À la Bible (et sans doute le Missel et le Pontifical) s’ajoutent les Pères de l’Église (Augustin, Grégoire, Bède, Jérôme), des auteurs carolingiens et de nombreux quidam qui correspondent parfois à Jean Beleth. Il fait du reste de nombreux emprunts aux auteurs liturgistes des xiie et xiiie s., non seulement à Jean Beleth mais aussi au Gemma anime d’Honorius Augustodunensis, au Liber de divinis officiis de Rupert de Deutz.

6Quel en est le résultat ? Dès le début de l’ouvrage, Sicard de Crémone propose un prologue dans lequel il explique le plan qu’il va suivre. Pour lui, la liturgie de l’Église est organisée selon un plan divin qui préfigure le Paradis. Elle a été mise en place par le Christ et ses successeurs. Il prévoit alors quatre grandes parties : l’Église (livre i, De ecclesia), l’institution des ministres (livre ii, De personis), les offices (livre iii, de missa) et l’ordre des offices (livre iv, De officiis ecclesie). Un court prologue accompagne également les livres ii à iv. Les livres qui suivent (v à ix) apparaissent comme une partie tout à faire différente de l’ouvrage : ils traitent en effet du temps liturgique, de l’Avent à l’Épiphanie (livre v), du Septuagésime à Pâques (livre vi), de Pâques à Pentecôte (livre vii), des dimanches après Pentecôte (livre viii) et de fêtes des saints de l’Avent à la Nativité (livre ix).

7C’est en 1840-1845 qu’une première transcription du texte latin du Mitralis est proposée par Charles de l’Escalopier, conservateur honoraire de la bibliothèque de l’Arsenal à Paris, à partir du manuscrit Paris, BnF, lat. 725 : c’est ce texte que retient J.-P. Migne, quelques années plus tard, lorsqu’il en propose une editio princeps. Il existe quelques autres manuscrits anciens (notamment du xiiie s.) dont l’A. donne une brève notice, surtout des manuscrits italiens tels ms. Bologne, Bibl. univ. 1190 (2361), mss. Rome, Bibl. vaticane, Vat. lat. 4975, 4974 et 5946, et ms. Florence, Bibl. Laurentiana, Plut. XVII sin. 4. Du Vat. lat. 4974 dépendent des manuscrits parisiens plus tardifs (du xviie s.), mss. Paris, BnF, lat. 725 et Paris, BnF, lat. 10476. Enfin, de la première moitié du xiiie s. datent deux autres manuscrits romains, Bibl. Casanatense 446 et Vat. lat. 1135. Certains de ces manuscrits sont lacunaires, mais restent très importants pour la reconstruction de l’archétype et l’élaboration du stemma (proposée p. xliii).

8Cette brève liste de manuscrits (neuf en tout) a de quoi surprendre, surtout si on la compare avec les quelque deux cents manuscrits contenant le Rationale de Guillaume Durant. Pourtant, le Mitralis a circulé et a été abondamment utilisé, à commencer par Oderigo dans l’Ordo officiorum Senensis ecclesie en 1215, puis par Guillaume Durant lui-même dans le Rationale en 1286. Du reste, plusieurs manuscrits portent des notes de lecteurs. En fait, c’est l’édition de Migne dans la Patrologie latine qui a permis, à partir du xixe s., une large diffusion et une importante utilisation de l’ouvrage de Sicard de Crémone, aussi bien par des théologiens que par des historiens.

9Fidèles à leurs habitudes, les éditions Brepols et le Corpus christianorum proposent une édition latine de qualité, accompagnée de nombreux apparats critiques d’une grande utilité. Aux trois appendices (Versus memorabiles, Glossae marginales et Additamenta) s’ajoutent un index biblique, un index des sources et un index liturgique décomposé en index initiorum, index nominum et surtout index rerum. En outre, une courte bibliographie est proposée à la fin de l’introduction.

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Pour citer cet article

Référence papier

Sophie Delmas, « Gábor Sarbak et Lorenz Weinrich, éd. — Sicardi Cremonensis episcopi « Mitralis de officiis » »Cahiers de civilisation médiévale, 217 | 2012, 94-95.

Référence électronique

Sophie Delmas, « Gábor Sarbak et Lorenz Weinrich, éd. — Sicardi Cremonensis episcopi « Mitralis de officiis » »Cahiers de civilisation médiévale [En ligne], 217 | 2012, mis en ligne le 01 juillet 2024, consulté le 18 janvier 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/ccm/18853 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/128te

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