Jacques Dalarun. — Robert of Arbrissel. Sex, Sin and Salvation in the Middle Ages
Jacques Dalarun, Robert of Arbrissel. Sex, Sin and Salvation in the Middle Ages, [trad. Bruce L. Venarde, 2e éd.]. Washington, Catholic University of America Press, 2006, xxx-188 pp., 1 carte.
Texte intégral
1En 1986 est paru Robert d’Arbrissel, fondateur de Fontevraud, de J. Dalarun. L’A. y renouvelait en profondeur la biographie d’un prédicateur itinérant et fondateur d’ordre, tenu tout ensemble pour admirable et scandaleux par ses contemporains, en s’appuyant sur un matériau inédit : la fin de la Vita d’André de Fontevraud, absente du manuscrit latin mais conservée à travers sa traduction en moyen français. Cette découverte venait d’être au centre d’une première publication, offrant pour ce texte une édition critique et une enquête historique : L’impossible sainteté : la vie retrouvée de Robert d’Arbrissel (v. 1045-1116), fondateur de Fontevraud, Paris, 1985.
2Dans le volume de l’année suivante, J. Dalarun élargissait son propos. Après un chapitre introductif, présentant les lieux où s’est déroulée la vie de Robert et les sources qui la documentent, cinq chapitres donnaient successivement la parole aux divers auteurs dont le témoignage nous est parvenu à son sujet, pour mieux peindre la richesse d’une personnalité toute en contrastes et la mémoire plurielle qu’en ont conservée ses contemporains : Baudri de Bourgueil, auteur de la première Vita (chap. ii) ; les lettres de l’évêque Marbode de Rennes et de l’abbé Geoffroy de Vendôme mettant en cause le comportement de Robert, notamment envers les femmes (chap. iii) ; des sources fragmentaires, comme le miracle de Rouen, racontant comment Robert se rend au bordel et y convertit une prostituée ; une lettre de direction spirituelle de Robert à la comtesse de Bretagne Ermengarde ; ensuite le miracle de Menat, une nouvelle fois à propos de la place des femmes dans l’Église (chap. iv) ; enfin la seconde Vita attribuée à André de Fontevraud (chap. v-vi).
3Traduit bientôt en allemand, en italien et en portugais, l’ouvrage n’avait pas été publié en anglais : c’est maintenant chose faite, grâce à la traduction de B. Venarde, lui-même spécialiste du monachisme féminin en général, plus spécialement de Fontevraud, et qui a fait paraître il y a quelques années une biographie du fondateur : Robert of Arbrissel : a Medieval Religious Life, Washington, 2003.
4Si l’A. se défend d’avoir révisé le texte de 1986, l’ouvrage bénéficie néanmoins de pièces nouvelles qui le réactualisent, et d’abord, les introduction, notes et biographie du traducteur. Sans bouleverser un texte qui avait sa logique propre et garde toute sa richesse scientifique, ces ajouts procurent au lecteur la quinte essence des travaux parus dans l’intervalle. Ensuite, la « préface nouvelle » de J. Dalarun opère une retractatio et signale les découvertes qui lui paraissent compléter les conclusions auxquelles il était parvenu vingt ans auparavant. Tout d’abord, des fouilles archéologiques, dirigées par D. Prigent sur le site de Fontevraud, ont permis de confirmer plusieurs déclarations des sources écrites, notamment sur le lieu de sépulture de Robert, enjeu de conflits au moment de sa mort (voir la contribution de D. Prigent au volume Robert d’Arbrissel et la vie religieuse dans l’Ouest de la France. Actes du Colloque de Fontevraud, 13-16 décembre 2001, éd. J. Dalarun, Turnhout, 2004). D’autre part, les développements récents dans l’histoire du monachisme confirment la précocité de l’ordre de Fontevraud en matière d’institutionnalisation ; ce point de vue, exprimé par P. Schine Gold, a été ratifié par la découverte, faite récemment par J. Dalarun, des statuts primitifs de Fontevraud. Un passage retrouvé de la Vita prima sur l’enfance de Robert pourrait suggérer – mais le texte est allusif et complexe – que le fondateur de Fontevraud lui-même avait comme son père des fautes charnelles à expier. Enfin la publication du cartulaire de Fontevraud, préparée par J.-M. Bienvenu et portée à son terme par R. Favreau et G. Pon, invite à rendre justice à l’action de l’abbesse Pétronille de Chemillé (1115-1149). Si elle est probablement responsable de la mutilation de la Vita secunda, ce n’est sans doute point par infidélité au fondateur, mais au contraire dans l’espoir illusoire, au moment où le pape Calixte II visitait l’abbaye, que cette vie lissée favoriserait sa canonisation.
5On ne saurait conclure cette recension sans signaler un ouvrage collectif. Paru la même année que cette traduction enrichie, il associe l’A., qui l’a dirigé, et son traducteur B. Venarde à l’édition critique et à la traduction double – française (par cinq auteurs) et anglaise (par B. Venarde) –, des textes primitifs concernant Robert d’Arbrissel : J. Dalarun et al., Les deux vies de Robert d’Arbrissel, fondateur de Fontevraud : légendes, écrits et témoignages. The two Lives of Robert of Arbrissel, Founder of Fontevraud : Legends, Writings and Testimonies, Turnhout, 2005. Ainsi la figure de Robert d’Arbrissel bénéficie-t-elle d’un ensemble de publications qui rendent un digne hommage à son génie religieux, aujourd’hui comme hier aussi déroutant que fascinant.
Pour citer cet article
Référence papier
Dominique Poirel, « Jacques Dalarun. — Robert of Arbrissel. Sex, Sin and Salvation in the Middle Ages », Cahiers de civilisation médiévale, 216 bis | 2011, 456-457.
Référence électronique
Dominique Poirel, « Jacques Dalarun. — Robert of Arbrissel. Sex, Sin and Salvation in the Middle Ages », Cahiers de civilisation médiévale [En ligne], 216 bis | 2011, mis en ligne le 01 juillet 2024, consulté le 24 janvier 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/ccm/18260 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/128sf
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