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Construire une hiérarchie épiscopale : Flodoard de Reims et la correspondance de l’archevêque Foulques (vers 850-vers 950)

The Construction of an Episcopal Hierarchy: Flodoard of Reims and the Correspondance of Archbishop Foulques (about 850 to about 950)
Edward Roberts
p. 11-26

Résumés

Dans son Historia Remensis ecclesiæ (composée entre 948 et 952), l’historien Flodoard de Reims a résumé et cité des centaines de lettres provenant des archives épiscopales. Cette étude se concentre sur la correspondance entre l’archevêque de Reims Foulques (883-900) et les papes. Flodoard n’a pas simplement copié tout ce qu’il a trouvé dans les archives de l’église dans son Historia : il a soigneusement sélectionné, édité et ordonné les documents afin de raconter une histoire. L’historien a voulu démontrer que Foulques était le prélat prééminent de son temps. Cet article suggère que Flodoard doit être lu en prenant en compte le contexte de la formation d’une nouvelle hiérarchie épiscopale au début du xe siècle. Les différentes façons dont Flodoard dépeint l’autorité de Foulques indiquent que cette hiérarchie fût fluide et en voie de développement. Comme le montrent les lettres de l’archevêque, il a rempli tous les devoirs de « métropolitain », de « vicaire apostolique », de « primat » et de receveur du pallium. Les ambiguïtés de ces rangs épiscopaux ont été exploitées et négociées à plusieurs reprises par les évêques et leurs défenseurs dans le monde des derniers Carolingiens et des Ottoniens.

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Texte intégral

  • 1 Je remercie chaleureusement Marie-Céline Isaïa pour sa traduction et son aide, ainsi que Simon Mac (...)
  • 2 Sur la préservation et transmission des lettres au Moyen Âge en général, voir Giles Constable, Let (...)
  • 3 Flodoard de Reims, Historia Remensis ecclesiæ [désormais : HRE], M. Stratmann (éd.), Hanovre, Hahns (...)
  • 4 À propos du registre de cette correspondance, voir M. Sot (op. cit. n. 3), p. 537-626. L’étude cla (...)
  • 5 Sur le maniement de ses sources par Flodoard, voir les importantes études d’Harald Zimmermann, « Z (...)

1Pour étudier l’utilisation des lettres dans les textes narratifs1, l’Histoire de l’Église de Reims (Historia Remensis ecclesiæ) du chanoine Flodoard (893/894-966) est certainement l’une des sources les plus remarquables du Moyen Âge central2. Composée entre 948 et 952, elle raconte la riche histoire de l’archidiocèse de Reims à travers les biographies de ses évêques et archevêques successifs, depuis la fondation antique de l’Église jusqu’à l’époque contemporaine de l’auteur3. L’Historia Remensis ecclesiæ attire d’ordinaire l’attention parce que Flodoard a fait bon usage des larges ressources des archives épiscopales de Reims : il cite et résume des diplômes, des testaments, des actes synodaux et, par-dessus tout, des lettres. De ce fait, Flodoard a préservé quantité de documents qui auraient sinon été perdus, et l’Historia Remensis ecclesiæ est par conséquent souvent utilisée comme source susceptible d’éclairer l’histoire du royaume franc au haut Moyen Âge. C’est le cas par exemple pour le grand évêque du ixe siècle Hincmar (845-882) : Flodoard a inclus plus de 450 analyses de ses lettres dans son Historia Remensis ecclesiæ4. Cette correspondance a été minutieusement passée au crible, mais l’extraordinaire maîtrise que Flodoard exerce sur l’interprétation de ces documents a été plus rarement commentée. Car il ne s’est pas contenté de reproduire ces documents : il les a presque tous résumés ou cités par morceaux choisis5. Il est donc crucial que nous ne perdions pas de vue que Flodoard ne nous donne qu’une image assez partielle et assez retouchée d’évêques comme Hincmar : Flodoard a agi en éditeur, sélectionnant ce qu’il devait inclure dans son Historia Remensis ecclesiæ et agençant son matériau à sa guise.

  • 6 M. Sot (op. cit. n. 3).
  • 7 Edward Roberts, « Hegemony, Rebellion and History: Flodoard’s Historia Remensis ecclesiæ in Ottoni (...)

2Ajoutons que l’Historia Remensis ecclesiæ a assez peu été envisagée pour ce qu’elle révèle sur le monde de Flodoard et l’Église de Reims au milieu du xe siècle, à l’exception notable du magistral travail de Michel Sot : M. Sot a restitué le riche contexte culturel capable de mettre en lumière la construction par Flodoard d’une topographie sacrée, et de l’identité qui en découle pour ses contemporains de Reims6. Cependant il reste beaucoup à dire sur le rôle majeur de Reims dans le jeu politique qui met aux prises la Francia occidentalis et le royaume ottonien au cours des années 940 et 950. Les contraintes extérieures aussi ont donné à l’œuvre de Flodoard ses contours, et c’est en fonction de ce contexte que nous devons lire l’Historia Remensis ecclesiæ, d’autant plus que Flodoard lui-même était un acteur du jeu politique contemporain. Bien que l’Historia Remensis ecclesiæ ait un propos d’intérêt manifestement local, elle raconte aussi une histoire qui pourrait bien avoir été écrite pour un public beaucoup plus large que ce qu’on croit généralement7.

  • 8 M. Sot (op. cit. n. 3), p. 709-719.

3Dans cet article, je cherche à mettre en lumière le travail de Flodoard dans son Historia Remensis ecclesiæ par une étude de l’usage que l’historien fait de la deuxième grande collection de lettres qu’elle contient, celle de Foulques (883-900), successeur d’Hincmar. Je voudrais en particulier mettre l’accent sur une question centrale de l’épiscopat de Foulques, selon les analyses de Flodoard – je crois pouvoir démontrer que la question était toujours brûlante cinquante ans plus tard, quand Flodoard se mit à rédiger l’Historia Remensis ecclesiæ : je parle de la place de l’évêque de Reims au sein de la hiérarchie épiscopale franque. Au cours des ixe et xsiècles, l’importance institutionnelle d’un siège épiscopal pouvait être revendiquée ou affichée par bien des moyens : les archevêques recherchaient l’approbation papale pour être reconnus comme métropolitains, vicaires apostoliques, voire, de plus en plus, primats. Ces privilèges donnaient des avantages qui expliquent pourquoi Flodoard insiste tant sur les relations de son Église avec Rome8. Reims s’est battue à la fin du ixe siècle et durant le xe siècle pour des titres et des rangs – à tour de rôle contre les archevêchés de Sens, Trèves et Mayence – mais la nature précise de ces revendications a rarement été scrutée : que signifiaient en pratique ces titres ? À quoi bon les réclamer ? Je pense que Flodoard, quand il a rapporté la correspondance de Foulques, a donné plus d’importance aux passages relatifs à la hiérarchie épiscopale dans le but de donner plus de force aux revendications de son Église quant à la suprématie, à ce moment du milieu du xe siècle où le point nodal de l’Église franque s’est trouvé déplacé plus à l’est, dans le royaume ottonien. Je voudrais donc explorer d’abord la carrière de Foulques et ses lettres telles qu’elles sont présentées par Flodoard dans son Historia Remensis ecclesiæ ; je pourrai alors envisager le problème de la préséance épiscopale, à la fois telle qu’elle a été délimitée dans la correspondance et telle qu’elle a été contestée durant la vie de Flodoard. Je tenterai pour finir de tirer toutes les conséquences de cette relecture sur notre compréhension du travail de Flodoard comme auteur, et sur la construction de l’autorité épiscopale dans le monde des derniers Carolingiens et des Ottoniens.

Foulques et ses lettres

  • 9 Pour une présentation détaillée, voir Gerhard Schneider, Erzbischof Fulco von Reims (883-900) und (...)
  • 10 Sur le contexte général, voir Olivier Guillot, « Formes, fondements et limites de l’organisation p (...)

4Foulques était un clerc du palais de Charles le Chauve quand il fut désigné abbé de Saint-Bertin en 8779. Il conserva néanmoins sa position à la cour puis succéda à Hincmar comme archevêque de Reims ; il fut consacré en mars 883. Son pontificat vit la désintégration de l’empire et, en 888, la désignation à la tête des royaumes, selon le principe de l’élection, de rois qui n’étaient pas des Carolingiens – et ce, même en Francie occidentale10. Foulques commença par soutenir la candidature au trône de son parent Gui, duc de Spolète, mais les grands de Francie occidentale lui préférèrent le comte Eudes, un Robertien. Foulques s’opposa aux prétentions au trône d’Eudes, d’autant qu’Eudes tenait l’archevêque de Sens pour le premier des évêques de son royaume. Foulques finit par prendre le parti de soutenir le jeune Charles le Simple, un Carolingien, dont il fit un roi concurrent d’Eudes en 893. Un accord permit à Charles de prendre la succession d’Eudes à la mort de ce dernier en 898, mais les troubles couvaient. Foulques exerça à la cour une influence manifestement considérable sur la politique de Charles et finit en 900 par être assassiné sur l’ordre de son ennemi, le comte Baudouin de Flandre. Le jeune Flodoard avait selon toute vraisemblance rejoint l’école cathédrale à peu près à cette époque : le souvenir de cet acte scandaleux aura sans doute pesé assez lourd sur ses premières années rémoises.

  • 11 HRE IV, 1-7 (éd. cit. n. 3), p. 363-398 ; voir le registre dans M. Sot (op. cit. n. 3), p. 157-170.
  • 12 Flodoard ne connaissait en général que les lettres envoyées par Hincmar. Voir Martina Stratmann, « (...)
  • 13 Citation des lettres de Foulques, voir HRE, IV, 5 (éd. cit. n. 3), p. 384-385, 387 ; IV, 6, p. 394 (...)
  • 14 PL, XII, 3-5 (éd. cit. n. 3), col. 823-830 ; P. C. Jacobsen (op. cit. n. 5), p. 193-194 et 266-268.
  • 15 La lettre a été conservée dans un évangéliaire de Winchester du xie siècle, et éditée dans : Counc (...)
  • 16 Thomas Gousset, Les actes de la province ecclésiastique de Reims, I : Reims, Reims, Jacquet, 1842, (...)
  • 17 M. Sot (op. cit. n. 3), p. 657-663 ; voir aussi les commentaires de Martina Stratmann, Hinkmar von (...)

5Les lettres de Foulques ont eu tendance à être occultées par celles de son plus illustre prédécesseur Hincmar. Le dossier est néanmoins considérable avec ses 76 lettres (36 lettres échangées avec des papes, 10 avec des rois et des empereurs, 24 avec des collègues dans l’épiscopat, 6 avec d’autres correspondants) 11. Les seules lettres reçues par Foulques que Flodoard conserve viennent des papes12. La correspondance est agencée selon la chronologie et la catégorie du destinataire (pape, roi, évêque, etc.). Aucune lettre n’est reproduite intégralement – la plupart sont citées par de brèves analyses de 5 à 10 lignes environ ; d’autres comprennent des citations, ou sont transmises sous la forme de plus longs résumés13. Pour son histoire versifiée, le De triumphis Christi, achevée à la fin des années 930, Flodoard avait déjà puisé dans la correspondance de Foulques avec les papes14. Deux lettres de Foulques ont été conservées en dehors de l’œuvre de Flodoard : l’une, que Flodoard ignore à l’évidence, était adressée au roi de Wessex Alfred15 ; l’autre est une lettre au pape Étienne V (885-891), écrite sans doute en 885-886, et constitue l’unique occasion de comparer la retranscription de Flodoard avec la version originale, comme nous allons le voir16. Étant donné que Flodoard a intégré tellement de lettres d’Hincmar conservées dans les archives rémoises, il semble raisonnable de conclure qu’il a aussi utilisé la plupart de ce qu’il y a trouvé de la correspondance de Foulques. Cela ne signifie pas que Flodoard n’a pas fait de tri – il existe au moins 50 lettres d’Hincmar que Flodoard a ignorées ou a choisi de ne pas mentionner17. Surtout, il a certainement effectué un tri au moment de choisir quels passages des lettres il allait résumer dans son Historia Remensis ecclesiæ.

  • 18 Cf. pour les lettres : HRE IV, 1-7, p. 363-398 ; pour le reste de l’épiscopat, HRE IV, 8-10 (éd. c (...)
  • 19 HRE III, 1-9 (éd. cit. n. 3), p. 190-205, qui vient avant les 20 chapitres consacrés aux lettres d’ (...)
  • 20 M. Sot (op. cit. n. 3), p. 182-213.
  • 21 Voir Steven Vanderputten, « “Literate Memory” and Social Reassessment in Tenth-Century Monasticism (...)
  • 22 Par exemple Patrick J. Geary, Phantoms of Remembrance: Memory and Oblivion at the End of the First (...)
  • 23 J. L Nelson, « “…sicut olim gens Francorum” » (art. cit. n. 15), p. 139-143, donne des remarques j (...)

6L’un des traits remarquables du dossier constitué par Flodoard à propos de Foulques est qu’il laisse les lettres parler pour toute la carrière de l’évêque, ou presque. Dans l’édition de Martina Stratmann, les lettres de Foulques occupent 35 pages, que Flodoard n’augmente que de 5 pages de son propre récit18. De plus, les lettres ont priorité : Flodoard commence par elles, in medias res, ce qu’il ne fait pas à propos de l’épiscopat d’Hincmar19. Cette disposition donne fortement l’impression que Foulques était un pasteur dynamique, un dirigeant et un conseiller sur le modèle de son prédécesseur20. Du fait de la profusion de résumés de lettres, le chapitre de Flodoard sur Foulques se lit davantage comme un catalogue de références que comme un récit. Cela reflète la tendance de l’historiographie du xe siècle à adopter des formes narratives où le document occupe la première place – les Gesta abbatum Sithiensium écrits par Folcuin de Lobbes vers 962 constituant ici un modèle du genre21. Néanmoins, comme le constatent aujourd’hui les historiens, même des inventaires qui, comme les cartulaires, se présentent comme de simples compilations documentaires, n’étaient pas des registres neutres ; il s’agissait de sélections rigoureuses, qui portaient la trace des stratégies de leurs auteurs et des préoccupations contemporaines22. Si bien que les lettres de Foulques racontent une histoire : nous pouvons retracer ses combats pour qu’un candidat de son choix soit porté au trône ; nous pouvons voir son angoisse face à l’omniprésence des vikings qui harcelèrent la Francie occidentale à la fin du ixe siècle. Et par-dessus tout peut-être, nous pouvons observer les efforts de Foulques pour faire connaître le statut apostolique de Reims et ses prétentions à la primatie23. C’est ce dernier sujet que je veux explorer ici plus en détail.

La papauté et la légitimité épiscopale

  • 24 M. Sot (op. cit. n. 3), p. 559-560.
  • 25 Philippe Depreux, « Saint Remi et la royauté carolingienne », Revue historique, 285, 1991, p. 235- (...)
  • 26 M. Sot (op. cit. n. 3), p. 357-364.

7Les lettres papales représentent presque la moitié du dossier de la correspondance de Foulques ; c’est d’autant plus notable que Flodoard n’a gardé qu’une poignée de lettres échangées entre Hincmar et Rome24. De plus, Flodoard les présente en premier, ce qui souligne l’importance des relations de Foulques avec le siège apostolique. De fait, l’existence d’un lien ancien entre Reims et Rome était fondamentale dans l’Historia Remensis ecclesiæ de Flodoard, même si l’idée n’est pas née avec lui : c’est vers Hincmar qu’il nous faut nous tourner pour voir les premières tentatives pour relever le statut de l’Église de Reims. Hincmar a transformé la réputation du saint patron de son Église, faisant de l’évêque du vie siècle Remi le patron particulier des rois francs et « l’apôtre des Francs », au titre que Remi avait baptisé le premier des Mérovingiens Clovis et, partant, converti les Francs à la « vraie foi »25. Hincmar a donné de l’ampleur à cette tradition, et réussi à renforcer ainsi le prestige spirituel et le pouvoir politique de sa propre fonction dans le royaume de Charles le Chauve. Quant à Flodoard, il a conforté ce récit en prétendant que Reims tirait son nom de sa création par des soldats de Remus. Fuyant Rome à la suite du meurtre de leur chef, ces soldats se seraient pour finir établis en Gaule et auraient fondé une cité qui porterait son nom. Flodoard est aussi capable de citer les Commentaires de César pour prouver que l’ancien peuple des Remi avait été un allié décisif des Romains26.

  • 27 Une esquisse des relations d’Hincmar avec Rome dans Rachel Stone, « Introduction: Hincmar’s World  (...)
  • 28 Cette lettre est principalement transmise par l’HRE II, 17 (éd. cit. n. 3), p. 168-171. Voir Janet (...)
  • 29 Hincmar de Reims, « Opusculum LV capitulorum », cap. 16, dans Die Streitschriften Hinkmars von Reim (...)
  • 30 HRE IV, 1 (éd. cit. n. 3), p. 365-366 : « Sedem vero Remensem notum habeat ab antecessoribus suis p (...)

8Bien qu’en fréquents désaccords avec Rome, Hincmar reconnaissait le rôle important que la papauté pouvait jouer comme garante de la légitimité et du prestige des évêques27. Il est probablement responsable de l’interpolation d’une lettre du pape Hadrien, qui prétendait accorder le pallium – une écharpe de laine blanche portée sur les épaules pour signaler une plus haute autorité dans l’Église – à l’archevêque Tilpin (années 760 ?-793/794) à la demande de Charlemagne28. Foulques aussi connaissait le pouvoir de légitimation de Rome. Il semble avoir été responsable d’une nouvelle étape dans l’élaboration des légendes autour de la fondation de l’Église rémoise, déclarant que le siège de Reims avait été fondé par un disciple de saint Pierre. Le premier évêque de Reims s’appelait Sixte et, selon Hincmar, il s’agissait d’un envoyé en Gaule du pape Sixte II (257-258)29. Mais selon la lettre adressée par Foulques à Étienne V en 885-886, Sixte avait en fait été dépêché par saint Pierre. Comme le résume Flodoard, Foulques rappelait au pape que Reims « avait toujours été tenue en plus haute estime par ses prédécesseurs que toutes les Églises de Gaule parce que le prince des apôtres, saint Pierre, y avait envoyé le bienheureux Sixte pour être son premier évêque et lui avait donné la primatie sur toute la région des Gaules30 ».

  • 31 PL, XII, 4 (éd. cit. n. 3), col. 823-824.
  • 32 M. Sot (op. cit. n. 3), p. 171-174. Voir cependant, sur l’usage moins scrupuleux de la documentati (...)

9Telle est la lettre qui est censée avoir survécu indépendamment de Flodoard, qui en a donné un résumé en vers dans son De triumphis Christi31. Dans l’Historia Remensis ecclesiæ, l’archiviste lui donne la place d’honneur presque au début de son récit de la carrière de Foulques. Un survol de son contenu, comparé à ce qu’en dit Flodoard, est riche d’enseignements. Il faut commencer par souligner que nous ignorons tout de la transmission de cette lettre : Thomas Gousset, qui l’a éditée au xixe siècle, n’a donné aucune information sur le lieu de sa découverte et, pour autant que je le sache, ce lieu n’a pas été identifié. Deuxième observation, il s’agit d’un cas unique dans l’œuvre de Flodoard, puisque son analyse est réellement plus longue que la version originelle de Foulques ; la majorité des analyses de l’historien sont pourtant de brefs résumés, ce qui laisse ouverte la possibilité que la « version originelle » soit en fait le résumé de l’analyse de Flodoard. Le contenu des deux versions reste fondamentalement comparable : Foulques remercie Étienne de se préoccuper des invasions des vikings et s’excuse de ne pas pouvoir venir à Rome du fait de leur présence ininterrompue. Flodoard ajoute alors qu’ils ont assiégé Paris, ce qui nous permet de dater la lettre de l’hiver 885-886. La lettre fait allusion à certains troubles, auxquels le pape serait confronté à Rome, et Foulques remarque qu’il a adopté « son parent » (affinem meum) Gui de Spolète. L’archevêque affirme qu’il aidera le pape de toutes les manières possibles. Il évoque alors, comme nous l’avons dit, la grandeur du siège rémois et les privilèges que les prédécesseurs d’Étienne lui ont accordés, et demande au pape de renouveler ces faveurs. Foulques enjoint ensuite Étienne d’excommunier un certain Bruinifidus qui s’est approprié des biens qui appartiennent à Rampon, frère de Foulques. Flodoard ne précise pas le nom de l’individu, mais ajoute ce détail : Marinus (882-884) et Hadrien (884-885), prédécesseurs d’Étienne, avaient demandé aux archevêques de Sens et de Rouen d’excommunier l’usurpateur, ce qu’ils n’avaient manifestement pas fait. Enfin, Foulques demande à Étienne de faire pression sur l’empereur Charles le Gros pour qu’il restitue des propriétés à Reims. Selon Flodoard cependant, des restitutions avaient déjà été obtenues de Charles, et Foulques demandait au pape d’achever ce qu’il avait commencé. En dépit de ces modifications, Flodoard semble une source d’information fiable : il peut fort bien avoir simplement complété la lettre avec des informations acquises a posteriori. Il transmet fidèlement son sens, et il n’y a pas lieu d’argumenter sérieusement en faveur d’une falsification32.

  • 33 HRE I, 3 (éd. cit. n. 3), p. 66-67. Voir M. Sot (op. cit. n. 3), p. 364-366 et M.-C. Isaïa (op. cit(...)
  • 34 PL, II, 14 (éd. cit. n. 3), col. 629. Plus tôt dans cette œuvre, Flodoard a désigné Sixte comme un (...)
  • 35 Cf. les deux traditions qui revendiquent saint Sixte et saint Sinice à Reims et Soissons dans : Mar (...)

10Néanmoins, le fait que Flodoard ait consacré une place si substantielle à ce document particulier laisse entendre qu’il y voyait quelque chose d’important. Si on suppose que la version originelle est authentique, la lettre apparaît comme la plus ancienne référence à Sixte comme à un disciple de Pierre. En l’occurrence, Flodoard a transmis précisément le sens de l’affirmation de Foulques et, quand il a choisi pour l’Historia Remensis ecclesiæ cette tradition pour son récit de fondation de l’Église, il l’a inscrite dans le marbre33. Il avait sûrement croisé la version de l’histoire due à Hincmar. Et dans son De triumphis Christi, Flodoard a attribué la décision d’envoyer en Gaule Sixte et d’autres évêques au pape Clément (ca. 88-100)34. Ces contradictions peuvent laisser penser à une falsification intentionnelle, mais Flodoard n’était pas seulement dénué de scrupules : il s’était lancé dans un renouvellement créatif de l’imaginaire autour de l’histoire de son Église, et profitait des ambiguïtés ou des décalages qu’il rencontrait dans ses sources. La compétition entre institutions qui avait suivi la dissolution de l’empire carolingien à la fin du ixe siècle semble s’être accrue au fur et à mesure que les évêques et les abbés jouaient des coudes pour s’imposer dans les royaumes post-carolingiens naissants. Une réécriture des traditions, destinée à améliorer les histoires de fondation est l’une des conséquences de ce contexte géopolitique les plus apparentes dans la province de Reims comme ailleurs35. Si bien que Flodoard a privilégié la légende de fondation la plus prestigieuse, qui était aussi celle que la lettre de Foulques documentait et étayait.

La primatie épiscopale

  • 36 Après l’étude classique d’Émile Lesne, La hiérarchie épiscopale. Provinces, métropolitains, primat (...)
  • 37 Isidore définissait un archiepiscopus comme celui qui préside au-dessus des métropolitains, voir I (...)
  • 38 La mise au point classique sur le rôle de Boniface est dans W. Levison (op. cit. n. 7), p. 70-93. (...)
  • 39 La bibliographie est considérable et en constante expansion. L’étude classique est celle de Horst (...)

11Il reste cependant quelque chose d’inhabituel dans cette lettre : Foulques utilise le terme primatus, qui dans cette acception n’indique pas simplement que Sixte ait été « le plus élevé » ou « le premier » évêque, mais souligne plutôt qu’il avait reçu un statut épiscopal privilégié. Sous Pépin et Charlemagne, une nouvelle hiérarchie épiscopale avait été agencée, notamment autour d’une réappropriation de l’ancien ordre métropolitain36. Le missionnaire anglo-saxon Boniface avait joué un rôle décisif dans cette réorganisation et cherché à mettre en place un nouveau rang dans l’épiscopat, l’archiépiscopat pour un archevêque (archiepiscopus), en vue d’une systématisation de l’échelon provincial. Isidore de Séville connaissait ce titre, régulièrement utilisé en Orient où l’épiscopat était resté plus hiérarchisé. En Occident il semble avoir été employé pour la première fois en Angleterre par Théodore de Cantorbéry (669-690). Selon ce modèle, l’archevêque recevait sa fonction directement du pape, ce que symbolisait la réception du pallium37. Boniface a introduit le titre en Francie, mais la nouvelle structure avec archevêque ne s’est pas imposée au détriment du système antérieur – un métropolitain entouré de suffragants – d’où une situation problématique qu’il fallut du temps pour mettre au point38. Durant le ixe siècle, un nouvel ordre épiscopal commença à prendre forme : la distinction entre archiepiscopus et metropolitanus fut progressivement atténuée. À peu près au même moment, probablement au cours des années 830, les faux connus comme pseudo-isidoriens, c’est-à-dire une vaste collection de canons et de décrétales non authentiques, commencèrent à être fabriqués39. L’autonomie des évêques était au centre des préoccupations des faussaires et de leurs inventions ; ils fabriquèrent leur propre échelon épiscopal, le « primat » (primas) ou « primat-patriarche » (primas vel patriarcha) à partir de la Notitia Galliarum, une liste des provinces de l’Empire romain qui datait de l’Antiquité tardive. Il s’agissait manifestement d’un rang supérieur à celui d’archevêque, si bien que le primat exerçait théoriquement son autorité sur plusieurs provinces ecclésiastiques.

  • 40 HRE, III, 21 (éd. cit. n. 3), p. 271. Flodoard est la seule source à faire connaître la revendicati (...)
  • 41 Chronica minora saec. IV. V. VI. VII : Notitia Galliarum, T. Mommsen (éd.), Berlin (MGH, Auctores A (...)
  • 42 Le récit classique est celui d’Eugen Ewig, Sankt Bonifatius. Gedenkgabe zum zwölfhundertsten Todes (...)
  • 43 Il est possible que Charlemagne ait dédaigné Reims parce que c’est là qu’a été inhumé son frère et (...)
  • 44 Annales de Saint-Bertin, F. Grat, J. Vielliard et S. Clémencet (éd. et trad.), Paris, Klincksieck, (...)

12Selon une lettre d’Hincmar résumée par Flodoard, l’archevêque Theutgaud de Trèves fut le premier à recourir au nouveau concept de primatie vers 852 ou 85340. Theutgaud plaida en faveur de la prééminence de son siège archiépiscopal dans l’Église franque, au titre que la province ecclésiastique de Trèves avait été la province romaine de Belgica Prima, tandis que celle de Reims n’avait été que celle de Belgica Secunda – ces deux entités avaient été créées vers 300 à partir d’une division de la grande province de Gallia Belgica41. Les noms romains étaient uniquement descriptifs, mais Theutgaud et les faux isidoriens les firent passer pour une hiérarchie épiscopale. Naturellement, le collègue de Theutgaud, Hincmar de Reims, s’opposa à cette vision, bien qu’avec un certain retard. Le statut épiscopal de Reims au viiie et au début du ixe siècle est sujet à caution : le récit convenu veut que Charles Martel ait déposé l’évêque Rigobert en 717-718 et installé l’abominable Milon, un laïc et soi-disant « double-évêque » de Reims et de Trèves. Pendant que Milon remplissait son office, Boniface tenta de faire désigner un certain Abel comme nouvel archevêque (de Reims ?) en 744, mais sans effet – Abel pourrait bien n’avoir été qu’un chorévêque, jusqu’à ce qu’il disparaisse des sources historiques après 747. Tilpin prit la succession de Milon, sans doute au début des années 760, et fut reconnu comme métropolitain en 779. Les sources, transmises pour la plupart par Hincmar et Flodoard, sont très problématiques (nous avons déjà mentionné l’interpolation de l’octroi du pallium à Tilpin42). Charlemagne ignora Reims pour l’essentiel, mais l’Église retrouva sa prééminence sous le règne de Louis le Pieux, alors que l’archevêque Ebbon la dirigeait. Ce fut un désastre pour finir – l’histoire est bien connue43. Une vacance de dix ans suivit l’expulsion d’Ebbon, jusqu’à ce qu’Hincmar entreprenne son projet de reconstruction après sa désignation en 845. Hincmar finit par renchérir sur les revendications de Theutgaud ; il fonda l’autorité de Reims sur des bases plus fermes en 869, peu d’années après le décès de Theutgaud, par le fameux couronnement de Charles le Chauve comme roi de Lotharingie à Metz – c’est-à-dire dans l’archidiocèse de Trèves. C’est au cours de cette cérémonie fameuse qu’on usa, paraît-il, du même chrême que celui que saint Remi avait utilisé pour le baptême de Clovis au vie siècle. Pour Hincmar, le droit de couronner le roi allait de pair avec la prééminence épiscopale44.

  • 45 Sur le développement de ces vicaires, voir A. Thacker (art. cit. n. 37), p. 49-55.
  • 46 HRE IV, 1 (éd. cit. n. 3), p. 365-366 : « Ormisda quoque papa sancto Remigio vices suas in Galliaru (...)
  • 47 Passiones vitaeque sanctorum aevi merovingici et antiquuiorum aliquot, I, B. Krusch (éd.), Hanovre (...)
  • 48 HRE I, 15 (éd. cit. n. 3), p. 93.
  • 49 HRE IV, 1 (éd. cit. n. 3), p. 366. Voir M. Sot (op. cit. n. 3), p. 158. Au début du xe siècle, les (...)

13Cependant, la déclaration de Foulques sur la primatie est plus originale, parce qu’il n’a pas tenu compte de la Notitia Galliarum. Foulques revendiquait essentiellement d’être vicaire pontifical – une gratification qui lui donnait un premier rang honorifique en tant que représentant du pape dans une province ou une région. Cet honneur remonte à l’Antiquité tardive, quand le titre impliquait parfois le statut métropolitain, mais il a consisté à d’autres moments à devoir assumer une mission limitée, comme la convocation d’un concile pour traiter d’un problème précis45. Foulques, dans la même lettre à Étienne, va plus loin et montre qu’il était bien occupé à obtenir la reconnaissance par le pape du statut apostolique de Reims. Pour le dire avec les mots de Flodoard, « Le pape Hormisdas aussi a fait de saint Remi son vicaire en Gaule. Il [Foulques] lui [Étienne] rappelle toutes ces choses, de peur que le siège de Reims ne puisse être déshonoré de son temps, ajoutant aussi que tous les privilèges qu’il [Foulques] avait demandés à ses prédécesseurs Marin et Hadrien, il les avait obtenus46 ». Flodoard relaie ici à nouveau, avec une précision foncière, la justification donnée par Foulques, même s’il omet de renvoyer aux vikings comme responsables de ses angoisses, un détail présent dans la version d’origine. Le privilège par lequel Hormisdas a accordé le vicariat est probablement une invention d’Hincmar ; c’est en tout cas dans sa Vita Remigii qu’il apparaît pour la première fois47. Flodoard a cité ce document ailleurs dans l’Historia Remensis ecclesiæ48. On ne peut pas dire si la lettre interpolée était connue d’Étienne – c’est peu vraisemblable ; de toute façon, il répondit essentiellement par la négative dans une lettre que Flodoard conserve. Le pape écrivit en 886 que Foulques aurait à venir à Rome en personne pour évoquer le privilège49. L’arrière-plan que Flodoard choisit de ne pas mentionner ici est que ce privilège n’était pas près de venir, dans la mesure où il venait d’être octroyé à l’archevêque de Sens.

Foulques et l’Église de Reims à la fin du ixe siècle

  • 50 Annales de Saint-Bertin (éd. cit. n. 44), p. 200-202. Voir Wilfried Hartmann, Die Synoden der Karo (...)
  • 51 Augustin Fliche, « La primatie des Gaules depuis l’époque carolingienne jusqu’à la fin de la quere (...)
  • 52 Annales de Saint-Bertin (éd. cit. n. 44), p. 218-219 ; s.a. 879, p. 238-239.
  • 53 Sur la compétition entre les sièges de Reims et de Sens, Shane Bobrycki, « The Royal Consecration (...)

14Dans les dix dernières années d’Hincmar, l’Église de Reims fut confrontée à une terrible remise en question de sa place de capitale spirituelle de Francie occidentale. Alors qu’Hincmar avait été le principal conseiller de Charles le Chauve pendant l’essentiel de son règne, il fut remplacé par l’archevêque Anségise de Sens (871-883). En 876, le pape Jean VIII fit d’Anségise un primat et son vicaire apostolique en Gallia et Germania à la demande du roi Charles50. C’est apparemment la première occurrence du primatus dans le vocabulaire papal51. Ce privilège semble avoir été de plus en plus associé avec le droit de couronner le roi : le couronnement de Charles le Chauve à Metz en 869, tel qu’Hincmar le mit en scène, constitua de fait une réponse énergique à Theutgaud et à l’affirmation de son autorité primatiale une décennie plus tôt. Tandis qu’Hincmar sacrait Louis le Bègue à Compiègne en 877, Anségise couronnait les fils de Louis, Louis III et Carloman, en 87952. Les allégeances politiques eurent aussi leur part cependant : quand Eudes fut élu roi en 888, il fut sacré par l’archevêque Gautier de Sens (887-923) à Compiègne – d’autant que Foulques avait apporté son soutien à Gui de Spolète. Plus tard la même année, alors que Foulques avait accepté à contrecœur le roi Eudes, il procéda lui-même au couronnement à Reims de son propre candidat. Il paraît raisonnable de supposer par conséquent que les archevêques de Sens Évrard (884-887) puis Gautier conservèrent la primatie et le titre de vicaire durant les années 880 et 890, ce qui fournit une importante contextualisation aux lettres de Foulques53.

  • 54 HRE IV, 1 (éd. cit. n. 3), p. 367-369. Voir G. Schneider (op. cit. n. 28), p. 82-89 ; Rudolf Pokor (...)
  • 55 Eric Knibbs, Ansgar, Rimbert and the Forged Foundations of Hamburg-Bremen, Farnham, Ashgate (Churc (...)
  • 56 HRE IV, 1 (éd. cit., n. 3), p. 369-370 ; G. Schneider (op. cit. n. 28), p. 72-82 et p. 192 ; M. So (...)
  • 57 E. Knibbs (op. cit. n. 55), p. 213-214.
  • 58 Sur la situation à Rome et les liens de Gui avec la papauté, voir Giuseppe Sergi, « The Kingdom of (...)
  • 59 P. Depreux, « Imbuendis ad fidem » (art. cit. n. 25), p. 126 ; M.-C. Isaïa (op. cit. n. 25), p. 40 (...)

15Seulement, comme Flodoard entend le démontrer, Foulques pouvait mettre en avant de bonnes raisons d’être primat. Une lettre échangée entre Étienne et Foulques en 889-890 révèle que le pape avait demandé à l’archevêque d’intervenir dans un conflit entre l’archevêque Aurélien de Lyon, et le clergé et le peuple de Langres. Pour le dire brièvement, un diacre de Langres nommé Teutbold avait été choisi par la communauté locale pour être son nouvel évêque, mais Aurélien avait refusé de lui conférer la consécration en dépit du vœu du pape. Étienne donna l’ordre à Foulques d’agir en métropolitain et de procéder à la place d’Aurélien à l’intronisation de Teutbold54. De la même façon, en 891, Étienne demanda à Foulques d’intervenir dans un conflit entre les Églises de Cologne et de Hambourg. Flodoard utilise à nouveau les lettres comme sources sur l’épisode. Les détails du conflit sont très obscurs et problématiques, du fait de la débauche de faux documents à laquelle il donna lieu, mais, pour l’essentiel, l’archevêché de Cologne revendiquait des droits métropolitains sur l’Église de Brême55. L’évêché de Hambourg de son côté – peut-être était-ce un archevêché – disait être uni au siège de Brême depuis le milieu du ixe siècle. Le pape Étienne donna des instructions à Foulques pour qu’il réunisse en son nom (vice) un synode à Worms, y mette un terme au débat, puis vienne à Rome en personne discuter de cette affaire et d’autres avec lui. Étienne cependant mourut en septembre 891 et son successeur Formose (891-896) prit d’autres dispositions. Foulques écrivit au nouveau pape pour lui remettre en mémoire les desseins d’Étienne, mais Formose décida qu’il valait mieux confier la question à l’archevêque de Mayence56. Il est possible que Formose ait considéré l’archevêque de Reims comme partial dans la mesure où l’archevêque Ebbon avait été au cours des années 820 le fer de lance de la première mission vers le Danemark57. Il est plus vraisemblable cependant que Foulques a tiré parti de ses alliances familiales avec Gui, qu’Étienne avait adopté58. Voici qui pourrait bien expliquer la contradiction apparente entre la situation compliquée de Foulques à l’intérieur de sa province et son implication dans des conflits très lointains entre évêques. Dans tous les cas, Foulques (ou Flodoard ?) se fondait sur une tradition missionnaire rémoise comme sur un moyen de conforter encore son autorité apostolique59.

  • 60 HRE IV, 1 (éd. cit. n. 3), p. 369 : « Consulit autem eius auctoritatem deposcens, ut sibi scriptis (...)
  • 61 HRE IV, 1 (éd. cit. n. 3), p. 370-371 : « Subnectit etiam de quibusdam episcopis Galliarum, qui sib (...)
  • 62 HRE IV, 2 (éd. cit. n. 3), p. 372-373 : « […] commemorans beatum Remigium genti Francorum Romane se (...)

16Foulques s’enquit régulièrement de la nature de l’autorité du métropolitain et du primat. Dans une lettre à Étienne de 890-891 concernant l’affaire de la consécration de Teutbold, il demanda avec insistance s’il était permis à un suffragant de sacrer un roi ou n’importe quelle autre personne sans en référer au métropolitain, ou d’entreprendre quoi que ce soit malgré l’interdiction formulée par son primat60. En 891-892, il demanda à Formose de ne pas répondre à ces évêques de Gaule qui demandaient le pallium et méprisaient leur métropolitain, et le pressa de ne pas satisfaire des requêtes qui blesseraient l’Église – le contexte de cette demande n’est pas clair61. Ces documents laissent entendre que Foulques, qui cherchait à établir son autorité sur sa province, rencontrait des difficultés, mais Flodoard est en mesure d’arranger la correspondance de telle sorte qu’elle ne laisse aucun doute : Foulques possédait toutes les qualités et tous les droits d’un archevêque, métropolitain, vicaire apostolique et primat. Pour finir, en 892, Foulques reçut de Formose un privilège pour quelques propriétés rémoises qui reconnaissait le statut apostolique de Remi. Formose notait que « saint Remi a été établi apôtre des Francs par l’autorité du siège romain avec la grâce de Dieu »62. Ce n’était pas un privilège explicite de primatie ; mais c’était bien une reconnaissance de l’autorité de l’archevêque de Reims, et un soutien de poids à sa revendication – comme successeur de saint Remi – de couronner les rois francs. De fait, l’année suivante, Foulques sacrait Charles le Simple.

17Le récit construit par Flodoard met en évidence qu’il n’existait pas pour un évêque un moyen unique à la fin du ixe siècle de revendiquer une supériorité. Le vocabulaire vague que les lettres utilisent, et les différents types d’approbation papale possibles, montrent que les questions sur la nature de la hiérarchie épiscopale n’avaient pas toutes été résolues avant la rupture du monopole carolingien sur le trône en 888. La disparition de l’empire pourrait bien plutôt avoir laissé le champ plus libre pour des manœuvres et permis la formulation renouvelée de prérogatives épiscopales. C’est ce que Foulques avoue quand il oppose la tradition comme argument contre la Königsnähe de Gautier de Sens. Comme le montre Flodoard, Foulques fit usage des puissantes ressources dont il disposait pour étayer solidement les droits de son Église, à savoir un évêque fondateur qui avait été le propre disciple de saint Pierre et un saint évêque qui avait conduit le peuple des Francs au salut.

Concurrence épiscopale au xe siècle

18Faisons à présent un bond en avant d’une cinquantaine d’années, pour nous placer au moment où Flodoard composa son Historia Remensis ecclesiæ, qui nous sert de source sur ces lettres. Flodoard n’est pas un chroniqueur de fond de cloître ! Il faut prendre au sérieux sa participation comme acteur des conflits contemporains et comprendre que son implication modèle son œuvre historique. Dans le monde de Flodoard, comme dans celui de Foulques, la compétition entre sièges épiscopaux était courante. C’est particulièrement vrai vers 950, au moment où Flodoard a composé son Historia Remensis ecclesiæ. Flodoard à l’évidence n’a pas réuni son matériau au hasard. Résumant toutes ces lettres, il a fait des choix volontaires, décidé de ce qui devait être extrait et mis en premier. Tous ceux qui ont prélevé dans l’Historia Remensis ecclesiæ des « faits » sur des périodes anciennes de l’histoire rémoise n’ont pas suffisamment tenu compte de ce contrôle exercé par Flodoard sur la documentation.

  • 63 Un récit complet des événements : M. Sot (op. cit. n. 3), p. 245-318 ; Jason Glenn, Politics and H (...)
  • 64 HRE IV, 20 (éd. cit. n. 3), p. 411-412.
  • 65 HRE IV, 28 (éd. cit. n. 3), p. 420.
  • 66 Timothy Reuter, Germany in the Early Middle Ages, c. 800–1056, Londres, Longman, 1991, p. 137-180  (...)

19Entre 931 et 948, l’Église de Reims fut la proie d’un conflit paralysant entre deux archevêques, qui revendiquaient l’un et l’autre le siège63. Flodoard est le témoin-clé de ce conflit, auquel il fut mêlé, comme il le raconte lui-même. À la mort de l’archevêque Séulf (922-925), le puissant comte de Vermandois Herbert II avait fait de son jeune fils Hugues le nouveau titulaire du siège. Flodoard, comme tous les chanoines, avait protesté et Herbert avait confisqué leurs bénéfices en mesure de rétorsion64. En 931, Hugues était chassé par Raoul, roi de Francie occidentale, et remplacée par un moine de Saint-Remi de Reims, Artaud ; mais Artaud lui-même, contraint à renoncer à sa charge en 940, avait à son tour été remplacé par Hugues de Vermandois. Flodoard s’était alors trouvé placé par Herbert en résidence surveillée pendant six mois, de crainte qu’il ne quitte la cité65. En 946, Hugues était à nouveau déposé et Artaud réinstallé par les rois Otton Ier et Louis IV d’Outremer. Une série de quatre conciles mit fin à la controverse en 947-948, notamment lors de l’assemblée décisive d’Ingelheim, à laquelle participèrent Louis, Otton, un légat pontifical, et plus de trente évêques de Francie orientale et de Lotharingie. En vérité, c’est sans doute le dénouement de ce schisme qui décida Flodoard à écrire son Historia Remensis ecclesiæ. L’implication d’Otton et de l’épiscopat de son royaume était révélatrice d’un glissement du centre de gravité politique outre-Rhin : entre le début des années 940 et les années 960, le royaume de Francie occidentale n’était qu’un royaume périphérique gouverné en fonction des intérêts politiques ottoniens, et Otton exerçait une hégémonie bien réelle sur son roi et ses grands66.

  • 67 Die Sachsengeschichte des Widukind von Korvei (Widukindi monachi Corbeiensis Rerum gestarum Saxonic (...)
  • 68 Papsturkunden 896-1046, H. Zimmermann (éd.), Vienne, Österreichischen Akademie der Wissenschaften (...)
  • 69 Ibid., n° 133, I, p. 237-238.
  • 70 Papsturkunden 896-1046, n° 237 (éd. cit. n. 68), I, p. 471-473. Voir Helmut Beumann, Theutonum nova (...)
  • 71 M. Lugge (op. cit. n. 41), p. 129-132 ; B. Schneidmüller (op. cit. n. 41), p. 29-32, 38-41 ; C. Br (...)
  • 72 E. Boshof (art. cit. n. 67) ; Heinrich Büttner, « Die Mainzer Erzbischöfe Friedrich und Wilhelm un (...)
  • 73 Papsturkunden 896-1046, n° 232 (éd. cit. n. 68), I, p. 461-463. Voir l’octroi d’un privilège, peut (...)

20Tandis que l’archevêché de Sens était à la fin du ixe siècle le concurrent de Reims pour la prééminence épiscopale, c’est au xe siècle l’Église ottonienne qui constitue le premier rival dans la compétition. Les archevêques du royaume de l’est – surtout ceux de Mayence – recherchaient et recevaient désormais les titres de vicaires et de primats. De ces titres dépendait, comme dans le royaume de l’Ouest, le droit de sacrer le roi, comme l’illustre le conflit bien connu autour du couronnement d’Otton en 936 : l’archevêque Hildebert de Mayence s’était arrogé cet honneur, mais les archevêques de Cologne et de Trèves le lui avaient contesté67. En 937, Frédéric, successeur d’Hildebert, obtint du pape Léon VII un privilège de confirmation de son statut de vicaire apostolique pour la Germanie68. Le pape Agapet II fit en 955 de Guillaume, successeur de Frédéric, son vicaire et envoyé (missus) en Germania et en Gallia69. L’archevêque Willigis reçut par la suite en 975 du pape Bénoît VII un privilège lui donnant la primatie70. La signification de « Gallia » dans ce contexte a été débattue : fallait-il comprendre « Lotharingia », c’est-à-dire la partie du royaume ottonien situé sur la rive gauche du Rhin, ou l’intégralité du royaume de l’Ouest71 ? Dans la mesure où il n’existe pas d’évêques du royaume de l’Ouest qui aient reçu dans le même moment le titre de primats, il est possible que l’interprétation extensive soit la bonne. Les historiens ont souvent refusé de prendre au sérieux ces privilèges : compte tenu de la fréquence avec laquelle ils pouvaient être attribués à des évêques différents, on doit se demander quelle pouvait bien être leur signification pratique72. Par exemple, l’archevêque de Trèves Thierry semble avoir été nommé primat deux mois avant que Willigis de Mayence ne reçoive son privilège en 975 – il est vrai que l’authenticité du privilège de Trèves a été mise en cause73 ; mais ces efforts planifiés pour fabriquer des privilèges – et ce n’est qu’un exemple parmi les plus connus des très nombreux conflits de préséance dans l’Église ottonienne – laissent eux-mêmes entendre que ces titres conféraient de fait des droits et un prestige bien réels.

  • 74 Les Annales de Flodoard (éd. cit. n. 3), s.a. 948, p. 108 : « mandatum legationis apostolicae, quam (...)
  • 75 La rencontre est racontée dans Les Annales de Flodoard (éd. cit. n. 3), s.a. 947, p. 105 et HRE IV (...)
  • 76 Ernst-Dieter Hehl, « Erzbischof Ruotbert von Trier und der Reimser Streit », dans Deus qui mutat t (...)
  • 77 Concilia Africae, a. 345–a. 525, C. Munier (éd.), (Corpus christianorum, series latina, 149), Turn (...)
  • 78 Voir Die Konzilien Deutschlands und Reichsitaliens, 916-1001, Teil 1: 916-960 , E.-D. Hehl (éd.), (...)
  • 79 E.-D. Hehl (art. cit. n. 76), p. 65-67.

21La nouvelle mise en cause de la primatie de Mayence par l’archevêque de Trèves, Robert, au cours des années 940 le montre mieux encore. Robert fonda significativement ses prétentions à la prééminence sur le fait qu’il était intervenu au cours du conflit rémois : il avait agi comme représentant de l’archevêque Frédéric de Mayence aux conciles de Verdun, de Mouzon et de Trèves – Frédéric avait assisté en personne au concile d’Ingelheim. Selon la version de Flodoard dans ses Annales, « Frédéric de Mayence avait remis [à Robert] la responsabilité de la représentation apostolique devant les rois et les évêques tant de Gallia que de Germania74 ». L’expression « devant les rois » (coram regibus) suggère que l’événement a pris place lors d’un plaid sur la Chiers en 947, où Louis et Otton s’étaient rencontrés75. Robert par conséquent apparaît comme ayant reçu mandat du pape pour régler le conflit rémois76. Deux sources révèlent davantage encore les ambitions de Robert : premièrement, il eut recours, lors des conciles de Mouzon et d’Ingelheim, au 19e canon du concile de Carthage (418) qui stipule qu’un évêque mis en accusation devra être suspendu s’il ne se présente pas au jour convenu pour répondre des charges portées contre lui. Ce canon précise aussi que l’accusé devra comparaître devant les « primats de la province » (ad primates provinciae ipsius) – un mot qui est ici utilisé d’une façon descriptive, « les principales autorités », et non pour qualifier un rang77. Que Robert se soit trouvé chargé de mettre un terme au conflit prouvait par conséquent (selon lui) qu’il était le « primat » de sa provincia. Deuxièmement, Marinus, le légat pontifical présent à Ingelheim, convoqua par lettre Hugues, l’archevêque de Reims déposé, pour qu’il comparaisse devant un concile réuni à Trèves en octobre 948. Dans cette lettre, Marinus fit référence d’une façon peu habituelle aux « évêques de Belgique », Belgicae episcopi, pour désigner sans doute les évêques de Gallia Belgica, c’est-à-dire de cette ancienne province romaine qui avait englobé Reims et Trèves78. La lettre de Marinus a été copiée et conservée à Trèves et nous pouvons soupçonner ici avec quelque raison l’influence de Robert. Robert, comme son prédécesseur Theutgaud un siècle auparavant, se référait à la Notitia Galliarum comme à un argument en faveur de son autorité épiscopale : elle mettait en évidence sa position de métropolitain d’une Belgica Prima qui aurait eu un droit de contrôle sur la Belgica Secunda – donc, sur la province de Reims. Assumer la responsabilité du règlement du schisme rémois était en fait un moyen pour Robert de revendiquer pour Trèves le premier rang dans l’Église ottonienne79.

  • 80 Paul Lehmann, « Nachrichten von der alten Trierer Dombibliothek », dans Id., Erforschung des Mitte (...)
  • 81 Flodoard fait un usage très réfléchi des titres : voir Peter Christian Jacobsen, « Die Titel princ (...)
  • 82 HRE, préface (éd. cit. n. 3), p. 57 ; voir P. C. Jacobsen (op. cit. n. 5), p. 52-53 ; M. Sot (op. (...)
  • 83 E.-D. Hehl (art. cit. n. 76).

22Cependant, les relations entre Reims et Trèves étaient plutôt meilleures au xe siècle qu’elles ne l’avaient été au temps d’Hincmar et Theutgaud. Flodoard y était sans aucun doute pour quelque chose, en tant qu’allié proche de Robert. Ils s’étaient rencontrés au plus tard en 946, quand Robert était venu à Reims avec Otton pour réinstaller Artaud après l’expulsion d’Hugues. Flodoard avait envoyé une copie de son De triumphis Christi à Robert, en une occasion non connue. Le manuscrit est perdu, mais un catalogue du xviie siècle a enregistré l’envoi à Robert, dans une formule qui fait comprendre que les deux hommes avaient déjà entretenu une correspondance80. Robert fait partie des rares personnes à qui Flodoard s’adresse en usant du titre respectueux de « seigneur », domnus81. De plus, tous les manuscrits de l’Historia Remensis ecclesiæ qui subsistent font connaître qu’elle était dédiée à un « évêque R. », qu’on s’accorde à identifier comme Robert82. Robert était à la fin des années 940 l’archichapelain d’Otton en Lotharingie, et l’un de ses plus proches conseillers. Comme le royaume de Francie occidentale se trouvait plus étroitement lié au royaume ottonien, rien d’étonnant à ce que les conciles aient conduit à disculper Artaud, qui était un soutien fidèle de Louis et son archichancelier. En retour, s’appuyer sur Robert était, pour Flodoard comme pour Artaud, la meilleure façon de bénéficier d’une sentence favorable au concile d’Ingelheim de 94883.

  • 84 Les Annales de Flodoard (éd. cit. n. 3), s.a. 948, p. 110 ; cf. MGH, Concilia, 6, p. 157. Voir auss (...)
  • 85 Gabrielle Spiegel, « Genealogy: Form and Function in Medieval Historical Narrative », History and T (...)

23La situation présentait cependant un problème pour Flodoard et son archevêque, qui voulaient naturellement faire valoir les droits de leur propre Église dans leur nouvel ordre ottonien : ils avaient besoin du soutien de Robert de Trèves dans le règlement du conflit interne à l’Église rémoise, mais leur reconnaissance de la prééminence de Trèves sur Reims semblait le prix de ce soutien. Dans ce contexte, affirmer que Reims jouissait de l’autorité apostolique était pour Flodoard s’aventurer en terrain miné. La tradition pouvait être une solution : par un usage habile des documents dont les lettres, il donna du crédit au passé légendaire de son Église et souligna les qualités des évêques de Reims. Il y a d’autres occasions de voir Flodoard travailler en ce sens ; par exemple, quand il manipule subtilement le compte rendu du concile d’Ingelheim dans ses Annales. Flodoard commence sa liste des évêques présents par les quatre archevêques, à savoir Robert de Trèves, Artaud de Reims, Frédéric de Mayence et Wicfrid de Cologne. Les actes du concile montrent pourtant que les archevêques étaient en fait énumérés dans cet ordre : Frédéric, Robert, Wicfrid et Artaud84. Flodoard a donc volontairement modifié la hiérarchie pour laisser croire que Robert avait préséance sur Frédéric, et qu’Artaud venait avant les archevêques ottoniens. Flodoard cependant, dans le contexte du règlement du conflit rémois, n’avait pas toute latitude pour dire ce qu’il pensait des droits de son Église : cela crée une tension dont on peut voir la trace dans toute son œuvre. La primatie de Trèves et la primatie de Reims étaient deux projets radicalement impossibles à concilier, ce qui rend le message véhiculé par Flodoard assez inintelligible. Nous avons tendance à croire que les auteurs composent leurs œuvres dans une perspective unique qui en fait l’unité : mais la réalité n’est pas d’ordinaire si univoque.85

Conclusions

  • 86 Flodoard note l’envoi du pallium à Foulques (HRE IV, 1 [éd. cit. n. 3], p. 363), Séulf (IV, 18, p.  (...)
  • 87 Cf. M. Sot (op. cit. n. 3),p. 741-744.

24Voici donc le cadre dans lequel Flodoard a écrit son Historia Remensis ecclesiæ et compilé ses chapitres sur l’archevêque Foulques. Dans les lettres de Foulques, Flodoard a trouvé un prélat qui avait exercé, comme Hincmar et Remi avant lui, un rôle majeur dans les affaires politiques et spirituelles du monde franc – mais dans une situation très différente de celle à laquelle l’historien et ses collègues rémois étaient confrontés au milieu du xsiècle. Foulques avait obtenu la confirmation du statut apostolique de son siège ; il avait agi en pleine possession de ses droits primatiaux quand il avait réglé les conflits de Lyon et de Cologne ; Flodoard connaissait plutôt une Église de Reims soumise à l’épiscopat de Germanie. Ingelheim avait confirmé aux yeux d’un large public son statut d’Église de second rang. Mis à part l’octroi du pallium, que Flodoard ne manque jamais de noter, il n’y avait plus désormais le moindre privilège papal que l’historien aurait pu relater86. De telles traverses n’en rendaient le passé illustre de l’Église que plus important, puisqu’il pouvait inspirer un futur plus conforme aux gloires révolues. Dans son Historia Remensis ecclesiæ, Flodoard a donc cherché à poser les jalons de la future place de son Église dans un monde en plein changement politique : il souligne que les premiers évêques de Reims remplissaient des fonctions métropolitaines, qu’ils entretenaient des liens immarcescibles avec la papauté, et l’histoire commune de Rome et de Reims87. L’étude approfondie et l’abrégement des lettres, qui sont les premiers instruments de la politique épiscopale, sont un élément fondamental de sa méthode. Elles constituaient des documents solides pour étayer les affirmations de l’Historia Remensis ecclesiæ, mais aussi un corpus à recombiner et réutiliser au fur et à mesure que de nouvelles conceptions de l’autorité épiscopale voyaient le jour.

  • 88 Cf. l’article de Marie-Céline Isaïa dans le second fascicule à paraître, qui insiste sur l’importan (...)

25Flodoard a donc vraisemblablement projeté sur l’épiscopat de Foulques ses préoccupations contemporaines. Il met au premier plan la correspondance avec les papes, ce qui a pour effet d’amoindrir notoirement l’importance des autres sujets principaux de l’épiscopat de Foulques, à savoir ses efforts pour installer durablement un roi qui lui convienne sur le trône à la place d’Eudes, et le réel danger représenté par les vikings. Dans la perspective de Flodoard, c’était le rang supérieur occupé par l’évêque Foulques qui devait être décrit ; et le problème, bien sûr, était qu’il n’avait jamais été nommé primat. Cela n’empêche pas Flodoard d’être clair : sans en avoir le titre, Foulques avait exercé les prérogatives d’un primat. Un flux nourri de lettres permettait à l’historien de décrire avec précision les activités correspondantes88. Le contexte d’écriture de Flodoard, son implication dans les conflits entre sièges, nous obligent à lire son récit avec précaution et à nous demander ce qu’il a choisi de taire : nous ne devons pas moins en conclure que la lutte entre sièges était néanmoins féroce au ixe siècle. La hiérarchie des sièges épiscopaux était structurellement imparfaite dans l’empire carolingien. Il y avait de nombreuses manières de prétendre à un rang, ou de prouver un statut, et elles ne se recoupaient pas entièrement. On peut penser que la fragmentation de l’empire à la fin du ixe siècle a donné aux évêques une plus grande latitude pour revendiquer des positions privilégiées au sein des royaumes post-carolingiens naissants. Des évêques ambitieux comme Foulques saisirent l’opportunité qu’offraient les interprétations durablement ambiguës des titres « métropolitain », « archevêque » ou « vicaire apostolique ». La dissémination régulière des Faux-Isidoriens ajouta au mélange la notion complémentaire de « primat-patriarche ».

26Quelques décennies plus tard, les conflits entre évêques dans le royaume ottonien étaient formulés dans des termes potentiellement identiques : les privilèges, titres et traditions mobilisés dans la Francie occidentale du ixe siècle constituaient des ressources valables où venaient puiser les évêques dans leurs efforts pour rehausser leurs sièges et attirer la faveur royale. Et en même temps, nous avons vu à quel point le sort de Reims dépendait de la politique ottonienne. Les conflits entre primats de cette période, conflits qui regorgent de références aux anciennes Belgica, Gallia et Germania et recourent fréquemment à des traditions valables pour tous les Francs, révèlent que la plus haute légitimité épiscopale ne trouvait pas sa source dans la législation d’un royaume unique, mais dans la capacité à exercer un pouvoir transversal sur le monde franc. Au milieu du xe siècle, la séparation qui devait survenir entre les royaumes de l’est et de l’ouest n’était pas encore d’actualité. Ce n’est pas du fait de l’historien de Reims et de ses contemporains, mais plutôt des historiens d’aujourd’hui et de leur téléologie trompeuse, que l’existence pérenne d’une conscience identitaire franque au milieu du xe siècle a souvent été occultée.

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Notes

1 Je remercie chaleureusement Marie-Céline Isaïa pour sa traduction et son aide, ainsi que Simon MacLean, Fraser McNair, Jinty Nelson, Levi Roach, Francesca Tinti et mes collègues du colloque « Lettres en contexte » pour leurs commentaires. Cet article a été complété avec le soutien financier d’un Leverhulme Trust Early Career Fellowship.

2 Sur la préservation et transmission des lettres au Moyen Âge en général, voir Giles Constable, Letters and Letter Collections, Turnhout, Brepols, 1976 (Typologie des sources du Moyen Âge occidental, 17), p. 55-62 ; Mary Garrison, « “Send More Socks”: On Mentality and the Preservation Context of Medieval Letters », dans New Approaches to Medieval Communication, M. Mostert (éd.), Turnhout, Brepols (Utrecht studies in medieval literacy, 1), 1999, p. 69-99.

3 Flodoard de Reims, Historia Remensis ecclesiæ [désormais : HRE], M. Stratmann (éd.), Hanovre, Hahnsche Buchhandlung (MGH, Scriptores, 36), 1998. L’étude fondamentale sur Flodoard et l’HRE est celle de Michel Sot, Un historien et son Église au xsiècle : Flodoard de Reims, Paris, Fayard, 1993. Les deux autres œuvres majeures de Flodoard sont ses Annales qui couvrent les années 919-966 (Les Annales de Flodoard, P. Lauer (éd.), Paris, Picard [Collection de textes pour servir à l’étude et à l’enseignement de l’histoire, 39], 1905) et une épopée versifiée sur l’histoire du christianisme achevée vers 937 (Patrologie Latine [désormais PL], J.-P. Migne [éd.], Paris, Garnier, 1853, 135, col. 491-885, « De triumphis Christi »).

4 À propos du registre de cette correspondance, voir M. Sot (op. cit. n. 3), p. 537-626. L’étude classique sur Hincmar est celle de Jean Devisse, Hincmar, archevêque de Reims, 845-882, Genève, Droz (Travaux d’histoire ethico-politique, 29), 1975, 3 vol., mais on peut voir désormais les différentes mises au point contenues dans : Hincmar of Rheims: Life and Work, R. Stone et C. West (éd.), Manchester, Manchester University Press, 2015.

5 Sur le maniement de ses sources par Flodoard, voir les importantes études d’Harald Zimmermann, « Zu Flodoards Historiographie und Regestentechnik », dans Festschrift für Helmut Beumann zum 65. Geburtstag, K.-U. Jaschke et R. Wenskus (éd.), Sigmaringen, J. Thorbecke, 1977, p. 200-214 ; Peter Christian Jacobsen, Flodoard von Reims: sein Leben und seine Dichtung ‘De triumphis Christi’, Leiden, Brill (Mittellateinische Studien und Texte, 10), 1978 ; Martina Stratmann, « Die Historia Remensis ecclesiæ: Flodoards Umgang mit seinen Quellen », Filologia Mediolatina, 1, 1994, p. 111-127.

6 M. Sot (op. cit. n. 3).

7 Edward Roberts, « Hegemony, Rebellion and History: Flodoard’s Historia Remensis ecclesiæ in Ottonian Perspective », Journal of Medieval History, 42, 2016, p. 155-176.

8 M. Sot (op. cit. n. 3), p. 709-719.

9 Pour une présentation détaillée, voir Gerhard Schneider, Erzbischof Fulco von Reims (883-900) und das Frankenreich, Munich, Arbeo-Gesellschaft (Münchener Beiträge zur Mediävistik und Renaissance-Forschung, 14), 1973 ; M. Sot (op. cit. n. 3), p. 122-155.

10 Sur le contexte général, voir Olivier Guillot, « Formes, fondements et limites de l’organisation politique en France au xe siècle », Settimane, 38, 1991, p. 57-124 ; Simon MacLean, Kingship and Politics in the Late Ninth Century: Charles the Fat and the End of the Carolingian Empire, Cambridge, Cambridge University Press (Cambridge studies in medieval life and thought, 57), 2003 ; Stuart Airlie, Power and Its Problems in Carolingian Europe, Farnham, Ashgate (Collected studies series, 1010), 2012. Pour un commentaire sur le rôle politique de Foulques, Geoffrey Koziol, The Politics of Memory and Identity in Carolingian Royal Diplomas: The West Frankish Kingdom (840-987), Turnhout, Brepols (Utrecht studies in medieval literacy, 19), 2012, p. 470-479.

11 HRE IV, 1-7 (éd. cit. n. 3), p. 363-398 ; voir le registre dans M. Sot (op. cit. n. 3), p. 157-170.

12 Flodoard ne connaissait en général que les lettres envoyées par Hincmar. Voir Martina Stratmann, « Briefe an Hinkmar von Reims », Deutsches Archiv für Erforschung des Mittelalters, 48, 1992, p. 37-81.

13 Citation des lettres de Foulques, voir HRE, IV, 5 (éd. cit. n. 3), p. 384-385, 387 ; IV, 6, p. 394 et 396.

14 PL, XII, 3-5 (éd. cit. n. 3), col. 823-830 ; P. C. Jacobsen (op. cit. n. 5), p. 193-194 et 266-268.

15 La lettre a été conservée dans un évangéliaire de Winchester du xie siècle, et éditée dans : Councils and Synods with Other Documents Relating to the English Church, I. AD 871–1204, Part 1: 871-1066, D. Whitelock, M. Brett et C. N. L. Brooke (éd.), Oxford, Clarendon Press, 1981, n° 4, p. 6-12. Voir Janet L. Nelson, « ‘A King Across the Sea’: Alfred in Continental Perspective », Transactions of the Royal Historical Society, Fifth Series 36, 1986, p. 45-68 ; Id., « “…sicut olim gens Francorumnunc gens Anglorum”: Fulk’s Letter to Alfred Revisited », dans Alfred the Wise: Studies in Honour of Janet Bately On the Occasion of Her Sixty-Fifth Birthday, J. Roberts, J. L. Nelson et M. Godden (éd.), Cambridge, Brewer, 1997, p. 135-144. Les deux articles ont été reproduits dans Janet L. Nelson, Rulers and Ruling Families in Early Medieval Europe, Aldershot, Ashgate (Collected studies series, 657), 1999, n° I et V.

16 Thomas Gousset, Les actes de la province ecclésiastique de Reims, I : Reims, Reims, Jacquet, 1842, p. 520-524, réimp. dans PL 131, col. 12-13 ; HRE IV, 1 (éd. cit. n. 3), p. 365-366. Pour d’autres traces de lettres de Foulques, voir Rudolf Pokorny, « Zwei Briefformeln von 887 aus der Kanzlei Erzbischof Fulcos von Reims », Deutsches Archiv für Erforschung des Mittelalters, 71, 2015, p. 599-609.

17 M. Sot (op. cit. n. 3), p. 657-663 ; voir aussi les commentaires de Martina Stratmann, Hinkmar von Reims als Verwalter von Bistum und Kirchenprovinz, Sigmaringen, J. Thorbecke (Quellen und Forschungen zum Recht im Mittelalter, 6), 1991, p. 66-67.

18 Cf. pour les lettres : HRE IV, 1-7, p. 363-398 ; pour le reste de l’épiscopat, HRE IV, 8-10 (éd. cit. n. 3), p. 399-403. Voir M. Sot (op. cit. n. 3), p. 156 et p. 177-179.

19 HRE III, 1-9 (éd. cit. n. 3), p. 190-205, qui vient avant les 20 chapitres consacrés aux lettres d’Hincmar.

20 M. Sot (op. cit. n. 3), p. 182-213.

21 Voir Steven Vanderputten, « “Literate Memory” and Social Reassessment in Tenth-Century Monasticism », Mediaevistik, 17, 2004, p. 65-94 et Laurent Morelle, « Diplomatic Culture and History Writing: Folcuin’s Cartulary-Chronicle of Saint-Bertin », dans Representing History, 900-1300: Art, Music, History, R. A. Maxwell (éd.), University Park, The Pennsylvania State University Press, 2010, p. 53-65. Sur les gesta en général, Michel Sot, Gesta episcoporum, gesta abbatum, Turnhout, Brepols (Typologie des sources du Moyen Âge occidental, 37), 1981 ; Theo Riches, « The Function of the Gesta Episcoporum as Archive: Some Reflections on the Codex sancti Gisleni (MS Den Haag KB75 F15) », Jaarboek voor Middeleeuwse Geschiedenis, 10, 2007, p. 7-46 et Id., « The Changing Political Horizons of Gesta episcoporum from the Ninth to Eleventh Centuries », dans Patterns of Episcopal Power: Bishops in Tenth and Eleventh Century Western Europe, L. Körntgen et D. Waßenhoven, Berlin/Boston, De Gruyter (Prinz-Albert-Forschungen, 6), 2011, p. 51-62. Pour des cas comparables du xiie siècle, voir les contributions d’Amélie De Las Heras dans ce fascicule et de Kevin Schmidt dans le prochain numéro à paraître.

22 Par exemple Patrick J. Geary, Phantoms of Remembrance: Memory and Oblivion at the End of the First Millennium, Princeton, Princeton University Press, 1994, p. 81-114.

23 J. L Nelson, « “…sicut olim gens Francorum” » (art. cit. n. 15), p. 139-143, donne des remarques judicieuses sur les thèmes qu’aborde la correspondance de Foulques.

24 M. Sot (op. cit. n. 3), p. 559-560.

25 Philippe Depreux, « Saint Remi et la royauté carolingienne », Revue historique, 285, 1991, p. 235-260 ; Id., « Imbuendis ad fidem prefulgidum surrexit lumen gentibus : la dévotion à saint Remi de Reims aux ixe et xe siècles », Cahiers de civilisation médiévale, 35, 1992, p. 111-129 ; Marie-Céline Isaïa, Remi de Reims : mémoire d’un saint, histoire d’une Église, Paris, Cerf (Histoire religieuse de la France, 35), 2010, p. 417-464.

26 M. Sot (op. cit. n. 3), p. 357-364.

27 Une esquisse des relations d’Hincmar avec Rome dans Rachel Stone, « Introduction: Hincmar’s World », dans Hincmar of Rheims… (op. cit. n. 4), p. 1-43, aux p. 11-16.

28 Cette lettre est principalement transmise par l’HRE II, 17 (éd. cit. n. 3), p. 168-171. Voir Janet L. Nelson, « Carolingian Royal Funerals », dans Rituals of Power: From Late Antiquity to the Early Middle Ages, F. Theuws et J. L. Nelson (éd.), Leyde, Brill (The Transformation of the Roman World, 8), 2000, p. 131-184, aux 151-152, n. 82 ; Olaf Schneider, Erzbischof Hinkmar und die Folgen. Der vierhundertjährige Weg historischer Erinnerungsbilder von Reims nach Trier, Berlin, De Gruyter (Millennium-Studien zu Kultur und Geschichte des ersten jahrtausends, 22), 2010, p. 52-56. Les dates de l’épiscopat de Tilpin ne sont pas certaines. Sur l’octroi du pallium aux évêques de Reims, voir Ludwig Falkenstein, « Zu verlorenen päpstlichen Privilegien und Schreiben: Palliumverleihungen an die Erzbischöfe von Reims (8.-12. Jahrhundert) », dans Eloquentia copiosus. Festschrift für Max Kerner zum 65. Geburtstag, L. Kéry (éd.), Aachen, Thouet, 2006, p. 181-224.

29 Hincmar de Reims, « Opusculum LV capitulorum », cap. 16, dans Die Streitschriften Hinkmars von Reims und Hinkmars von Laon, 869-871, R. Schieffer (éd.), Hanovre, (MGH, Concilia, 4, supp. 2), 2003, p. 191. Comparer à la tradition de Peregrinus, semi-légendaire évêque fondateur du siège d’Auxerre, lui aussi (soi-disant) consacré par le pape Sixte : Constance B. Bouchard, « Episcopal Gesta and the Creation of a Useful Past in Ninth-Century Auxerre », Speculum, 84, 2009, p. 1-35, aux p. 9-11.

30 HRE IV, 1 (éd. cit. n. 3), p. 365-366 : « Sedem vero Remensem notum habeat ab antecessoribus suis potius Gallicanis omnibus ecclesiis semper fuisse honoratam, utpote cum primus apostolorum beatus Petrus primum destinaverit huic urbi sanctum Syxtum episcopum et totius Gallicane regionis dederit ei primatum […] ». Comparer avec la version originale de Foulques : « […] uti condecet Remensem, quem antecessores vestri, prae omnibus Gallicanis pensi habentes, primatu donarunt in Sixto primo totius regionis praesule, a beato Petro apostolorum principe huc destinato […] », T. Gousset (op. cit. n. 16), p. 524.

31 PL, XII, 4 (éd. cit. n. 3), col. 823-824.

32 M. Sot (op. cit. n. 3), p. 171-174. Voir cependant, sur l’usage moins scrupuleux de la documentation dans l’HRE, Edward Roberts, « Flodoard, the Will of St Remigius and the See of Reims in the Tenth Century », Early Medieval Europe, 22, 2014, p. 201-230.

33 HRE I, 3 (éd. cit. n. 3), p. 66-67. Voir M. Sot (op. cit. n. 3), p. 364-366 et M.-C. Isaïa (op. cit. n. 25), p. 599-602.

34 PL, II, 14 (éd. cit. n. 3), col. 629. Plus tôt dans cette œuvre, Flodoard a désigné Sixte comme un « disciple des apôtres », discipulus apostolorum (PL, I, 9, col. 609). Cette description apparaît aussi dans une lettre que l’empereur Lothaire a adressée au pape Léon IV en 855. Elle n’est connue que par son analyse dans HRE III, 10 (éd. cit. n. 3), p. 207-208.

35 Cf. les deux traditions qui revendiquent saint Sixte et saint Sinice à Reims et Soissons dans : Marie-Céline Isaïa, « Nous sommes deux sœurs jumelles : Soissons, suffragante de Reims dans l’hagiographie (xie-xiie siècles) », dans La province ecclésiastique de Reims : quelles réalités ? Du Moyen Âge au xixe siècle, journée d’études de l’université de Reims (9 novembre 2009), Reims, Académie nationale de Reims (Travaux de l’Académie nationale de Reims, 178), 2008, p. 337-351. Dans d’autres évêchés, voir par exemple pour Auxerre, C. B. Bouchard (art. cit. n. 29), et pour Vienne, Nathanaël Nimmegeers, Évêques entre Bourgogne et Provence. La province ecclésiastique de Vienne au haut Moyen Âge (ve-xie siècle), Rennes, Presses universitaires de Rennes (Histoire), 2014, p. 157-166. Plus largement, voir P. Geary, (op. cit. n. 22) et Amy G. Remensnyder, Remembering Kings Past: Monastic Foundation Legends in Medieval Southern France, Ithaca, Cornell University Press, 1995.

36 Après l’étude classique d’Émile Lesne, La hiérarchie épiscopale. Provinces, métropolitains, primats en Gaule et Germanie depuis la réforme de saint Boniface jusqu’à la mort d’Hincmar, 742-882, Paris, Picard, 1905, voir Steffen Patzold, « Eine Hierarchie im Wandel: die Ausbildung einer Metropolitanordnung im Frankenreich des 8. und 9. Jahrhunderts », dans Hiérarchie et stratification sociale dans l’Occident médiéval (400-1100), F. Bougard, D. Iogna-Prat et R. Le Jan (dir.), Turnhout, Brepols (Haut Moyen Âge, 8), 2008, p. 161-84 et Daniel Carlo Pangerl, Die Metropolitanverfassung des karolingischen Frankenreiches, Hanovre (MGH, Schriften, 63), 2011.

37 Isidore définissait un archiepiscopus comme celui qui préside au-dessus des métropolitains, voir Isidore de Séville, Etymologiae, VII, 12, W. M. Lindsay (éd.), Oxford, Clarendon Press, 1911, 2 vol., I [sans numéros de page]. Pour l’histoire des premiers archevêques, voir Wilhelm Levison, England and the Continent in the Eighth Century, Oxford, Clarendon Press, 1946, p. 18-22 ; Alan Thacker, « Gallic or Greek? Archbishops in England from Theodore to Ecgberht », dans Frankland: The Franks and the World of the Early Middle Ages. Essays in Honour of Dame Jinty Nelson, P. Fouracre et D. Ganz (éd.), Manchester/New York, Manchester University Press, 2008, p. 44-69, aux p. 45-55 ; Joanna Story, « Bede, Willibrord and the Letters of Pope Honorius I on the Genesis of the Archbishopric of York », The English Historical Review, 127, 2012, p. 783-818.

38 La mise au point classique sur le rôle de Boniface est dans W. Levison (op. cit. n. 7), p. 70-93. Sur le développement progressif du système franc, voir S. Patzold (art. cit. n. 36), et plus largement, sur l’épiscopat carolingien du ixe siècle, son étude fondamentale : Id., Episcopus. Wissen über Bischöfe im Frankreich des späten 8. bis frühen 10. Jahrhunderts, Ostfildern, J. Thorbecke, 2008.

39 La bibliographie est considérable et en constante expansion. L’étude classique est celle de Horst Fuhrmann, Einfluß und Verbreitung der pseudoisidorischen Fälschungen, Stuttgart (MGH, Schriften, 24), 1972-1974, 3 vol. Parmi les contributions les plus récentes, voir Clara Harder, Pseudoisidor und das Papsttum. Funktion und Bedeutung des apostolischen Stuhls in den pseudoisidorischen Fälschungen, Cologne, Böhlau (Papsttum im mittelalterlichen Europa, 2), 2014 ; Fälschung als Mittel der Politik? Pseudoisidor im Licht der neuen Forschung Gedenkschrift für Klaus Zechiel-Eckes, K. Ubl et D. Ziemann (éd.), Wiesbaden, Harrassowitz (MGH, Studien und Texte, 57), 2015 ; Eric Knibbs, « Ebo of Reims, Pseudo-Isidore, and the Date of the False Decretals », Speculum, 92, 2017, p. 144-183.

40 HRE, III, 21 (éd. cit. n. 3), p. 271. Flodoard est la seule source à faire connaître la revendication du primatus par Theutgaud, voir H. Fuhrmann, Einfluß und Verbreitung (op. cit. n. 39), I, p. 197-199 ; O. Schneider (op. cit. n. 28), p. 87-88.

41 Chronica minora saec. IV. V. VI. VII : Notitia Galliarum, T. Mommsen (éd.), Berlin (MGH, Auctores Antiquissimi, 9), 1892, p. 589. Voir Jill Harries, « Church and State in the Notitia Galliarum », The Journal of Roman Studies, 68, 1978, p. 26-43. Sur l’expression Gallia Belgica aux ixe et xe siècles, voir Margret Lugge, “Gallia” und “Francia” im Mittelalter. Untersuchungen über den Zusammenhang zwischen geographisch-historischer Terminologie und politischem Denken vom 6.-15. Jahrhundert, Bonn, L. Röhrscheid Verlag (Bonner historische Forschungen), 1960, p. 101-103 ; Bernd Schneidmüller, Nomen Patriae. Die Entstehung Frankreichs in der politisch-geographischen Terminologie (10.-13. Jahrhundert), Sigmaringen, J. Thorbecke (Nationes, 7), 1987, p. 34-55 ; Carlrichard Brühl, Deutschland-Frankreich. Die Geburt zweier Völker [2e éd.], Cologne, Bohlau, 1995, p. 137-140 et 146-148.

42 Le récit classique est celui d’Eugen Ewig, Sankt Bonifatius. Gedenkgabe zum zwölfhundertsten Todestag, Fulda, Parzeller, 1954, « Milo et eiusmodi similes », p. 412-440. Il faut voir désormais O. Schneider (op. cit. n. 28), p. 29-108. Les sources en faveur d’un statut métropolitain de Reims sont étudiées par D. C. Pangerl (op. cit. n. 36), p. 34-39.

43 Il est possible que Charlemagne ait dédaigné Reims parce que c’est là qu’a été inhumé son frère et rival Carloman selon J. L. Nelson, (art. cit. n. 28), p. 143-145, puis 151-152, n. 82 ; O. Schneider, (op. cit. n. 28), p. 29-65. Pour le rôle d’Ebbon dans la révolte contre Louis en 833, voir S. Patzold, (op. cit. n. 38), p. 185-199, 315-357 ; Mayke de Jong, The Penitential State: Authority and Atonement in the Age of Louis the Pious (814-840), Cambridge/New York, Cambridge University Press, 2009, p. 51-52, 76-79 et 252-259.

44 Annales de Saint-Bertin, F. Grat, J. Vielliard et S. Clémencet (éd. et trad.), Paris, Klincksieck, 1964, p. 158-164. Voir Michel Bur, « Aux origines de la “religion de Reims”. Les sacres carolingiens et post-carolingiens, un ré-examen du dossier (751-1131) », dans Clovis : histoire et mémoire, vol. II : Le baptême de Clovis son écho à travers l’histoire, M. Rouche (éd.), Paris, Presses de l’université de Paris-Sorbonne, 1997, 2 vol., p. 46-72, réimpr. dans Michel Bur, La Champagne médiévale : recueil d’articles, Langres, Guéniot, 2005, p. 667-694. Hincmar utilise aussi les Faux Isidoriens pour contester les ambitions de Trèves à propos de la primatie : voir Steffen Patzold, Gefälschtes Recht aus dem Frühmittelalter. Untersuchungen zur Herstellung und Überlieferung der pseudoisidorischen Dekretalen, Heidelberg, Universitätsverlag Winter (Schriften der Philosophisch-Historischen Klasse der Heidelberger Akademie der Wissenschaften, 55), 2015, p. 60-61.

45 Sur le développement de ces vicaires, voir A. Thacker (art. cit. n. 37), p. 49-55.

46 HRE IV, 1 (éd. cit. n. 3), p. 365-366 : « Ormisda quoque papa sancto Remigio vices suas in Galliarum partibus conmiserit, hoc ideo se conmemorare, ne sedes Remensis suis in diebus sineretur dehonestari, annectens etiam de privilegiis sibi in cunctis, que petiit ab huius predecessoribus Marino et Adriano, concessis ». Comparer avec l’original de Foulques : « […] etiam Hormisdas papa Remigium per omnem Galliam vices suas obire voluit, quae modo adjicienda videntur, ne forsan Remi nostri sub Nortmannorum ruinis, quod Deus avertat, sepulti, etiam pontificum oblivione sepeliantur. Propterea commendata velim quae Marino, et Hadriano supplex proposui privilegia […] », T. Gousset (op. cit. n. 16), p. 524.

47 Passiones vitaeque sanctorum aevi merovingici et antiquuiorum aliquot, I, B. Krusch (éd.), Hanovre (MGH, Scriptores rerum Merovingicarum, 3), 1896, « Hincmar de Reims, Vita S. Remigii », cap. 20, p. 239-349, à la p. 312. Pour ce privilège, voir H. Fuhrmann (op. cit. n. 39), I, p. 116-117 ; M.-C. Isaïa (op. cit. n. 25), p. 440-441, et p. 599-600 ; Id., « The Bishop and the Law, According to Hincmar’s Life of Saint Remigius », dans Hincmar of Rheims… (éd. cit. n. 27), p. 170-189, p. 175-177.

48 HRE I, 15 (éd. cit. n. 3), p. 93.

49 HRE IV, 1 (éd. cit. n. 3), p. 366. Voir M. Sot (op. cit. n. 3), p. 158. Au début du xe siècle, les archevêques de Cantorbéry allaient régulièrement en personne chercher leur pallium à Rome. Il ne s’agit cependant pas d’une obligation. Les métropolitains du continent ne voyaient pas la nécessité d’entreprendre le voyage. Voir Francesca Tinti, « The Archiepiscopal Pallium in Late Anglo-Saxon England », dans England and Rome in the Early Middle Ages: Pilgrimage, Art, and Politics, F. Tinti (éd.), Turnhout, Brepols (Studies in the early Middle Ages, 40) , 2014, p. 307-342.

50 Annales de Saint-Bertin (éd. cit. n. 44), p. 200-202. Voir Wilfried Hartmann, Die Synoden der Karolingerzeit im Frankenreich und in Italien, Paderborn, Schöningh (Konziliengeschichte, Reihe A, Darstellungen), 1989, p. 333-336 ; Janet L. Nelson, Charles the Bald, Londres, Longman (The Medieval World), 1992, p. 241-242. Cf. la lettre d’Hincmar en HRE III, 21 (éd. cit. n. 3), p. 273-274. L’archevêque a aussi composé en 876 un bref traité sur les prérogatives du métropolitain, PL 126, col. 189-210. Voir encore H. Fuhrmann (op. cit. n. 39), I, p. 113-123.

51 Augustin Fliche, « La primatie des Gaules depuis l’époque carolingienne jusqu’à la fin de la querelle des investitures (876-1121) », Revue historique, 173, 1934, p. 329-342.

52 Annales de Saint-Bertin (éd. cit. n. 44), p. 218-219 ; s.a. 879, p. 238-239.

53 Sur la compétition entre les sièges de Reims et de Sens, Shane Bobrycki, « The Royal Consecration Ordines of the Pontifical of Sens from a New Perspective », Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre, 13, 2009, p. 131-142 ; E. Roberts (art. cit. n. 32), p. 223-225. Le long épiscopat de Gautier reste presque entièrement mystérieux. Sur le manque de sources disponibles, voir Rosamond McKitterick, « The Carolingian Kings and the See of Rheims, 883-987 », dans Ideal and Reality in Frankish and Anglo-Saxon Society: Studies Presented to J. M. Wallace-Hadrill, P. Wormald, D. A. Bullough et R. Collins (éd.), Oxford, Blackwell, 1983, p. 228-249, à la p. 244, réimp. dans Rosamond McKitterick, The Frankish Kings and Culture in the Early Middle Ages, Aldershot, Variorum (Collected studies series, 477), 1995, cap. IV.

54 HRE IV, 1 (éd. cit. n. 3), p. 367-369. Voir G. Schneider (op. cit. n. 28), p. 82-89 ; Rudolf Pokorny, « Ein unerkanntes Brieffragment Argrims von Lyon-Langres aus den Jahren 894/95 und zwei umstrittene Bischofsweihen in der Kirchenprovinz Lyon », Francia, 13, 1985, p. 602-622, ici p. 613-620 ; M. Sot (op. cit. n. 3), p. 158-159.

55 Eric Knibbs, Ansgar, Rimbert and the Forged Foundations of Hamburg-Bremen, Farnham, Ashgate (Church, faith and culture in the medieval West), 2011, p. 211-20.

56 HRE IV, 1 (éd. cit., n. 3), p. 369-370 ; G. Schneider (op. cit. n. 28), p. 72-82 et p. 192 ; M. Sot (op. cit. n. 3), p. 159.

57 E. Knibbs (op. cit. n. 55), p. 213-214.

58 Sur la situation à Rome et les liens de Gui avec la papauté, voir Giuseppe Sergi, « The Kingdom of Italy », dans The New Cambridge Medieval History, III: c. 900-c. 1024, T. Reuter (éd.), Cambridge, Cambridge University Press, 1999, p. 346-371, ici p. 346-348.

59 P. Depreux, « Imbuendis ad fidem » (art. cit. n. 25), p. 126 ; M.-C. Isaïa (op. cit. n. 25), p. 400-403.

60 HRE IV, 1 (éd. cit. n. 3), p. 369 : « Consulit autem eius auctoritatem deposcens, ut sibi scriptis remandet, si liceat coepiscopis suffraganeis suis, qui in eius diocesi consistunt, ordinationem vel regis vel alicuius alterius persone sine sua licentia et conhibentia seu permissione agere vel aliud aliquid inconsulto suo metropolitano aut contra interdicta sui primatis praesumere ». Voir M. Sot, (op. cit. n. 3),  p. 159 et p. 190-191.

61 HRE IV, 1 (éd. cit. n. 3), p. 370-371 : « Subnectit etiam de quibusdam episcopis Galliarum, qui sibi pallium indebite a Romana poscebant sede metropolitanos suos tali spernentes tenore, asserens, quod res eadem, nisi prudenti precauta foret sollicitudine, confusionem non mediocrem generaret ecclesie magnumque caritati dispendium valeret inferre […] ».

62 HRE IV, 2 (éd. cit. n. 3), p. 372-373 : « […] commemorans beatum Remigium genti Francorum Romane sedis auctoritate cum gratia dei apostolum constitutum […] ». Voir G. Schneider (op. cit. n. 28),  p. 193 et M. Sot (op. cit. n. 3), p. 159-160.

63 Un récit complet des événements : M. Sot (op. cit. n. 3), p. 245-318 ; Jason Glenn, Politics and History in the Tenth Century: The Work and World of Richer of Reims, Cambridge, Cambridge University Press (Cambridge studies in medieval life and thought, 60), 2004, p. 215-234.

64 HRE IV, 20 (éd. cit. n. 3), p. 411-412.

65 HRE IV, 28 (éd. cit. n. 3), p. 420.

66 Timothy Reuter, Germany in the Early Middle Ages, c. 800–1056, Londres, Longman, 1991, p. 137-180 ; et, pour la même histoire vue depuis Reims, E. Roberts (art. cit. n. 7).

67 Die Sachsengeschichte des Widukind von Korvei (Widukindi monachi Corbeiensis Rerum gestarum Saxonicarum libri III) P. Hirsch (éd.), Hanovre, (MGH, Scriptores rerum Germanicarum, 60), 1935, II, 1, p. 65-66. Voir Egon Boshof, « Köln, Mainz, Trier – Die Auseinandersetzung um die Spitzenstellung im deutschen Episkopat in ottonisch-salischer Zeit », Jahrbuch des kölnischen Geschichtsvereins, 49, 1978, p. 19-48, ici p. 23.

68 Papsturkunden 896-1046, H. Zimmermann (éd.), Vienne, Österreichischen Akademie der Wissenschaften (Veröffentlichungen der Historischen Kommission, 79), 1984-1989, 3 vol., I, p. 133-134.

69 Ibid., n° 133, I, p. 237-238.

70 Papsturkunden 896-1046, n° 237 (éd. cit. n. 68), I, p. 471-473. Voir Helmut Beumann, Theutonum nova metropolis. Studien zur Geschichte des Erzbistums Magdeburg in ottonischer Zeit, Cologne, Böhlau (Quellen und Forschungen zur Geschichte Sachsen-Anhalts, 1), 2000, p. 29-87.

71 M. Lugge (op. cit. n. 41), p. 129-132 ; B. Schneidmüller (op. cit. n. 41), p. 29-32, 38-41 ; C. Brühl (op. cit. n. 41), p. 130-153 ; Jochen Johrendt, Papsttum und Landeskirchen im Spiegel der päpstlichen Urkunden (896-1046), Hanovre, (MGH, Studien und Texte, 33), 2004, p. 187-192.

72 E. Boshof (art. cit. n. 67) ; Heinrich Büttner, « Die Mainzer Erzbischöfe Friedrich und Wilhelm und das Papsttum des 10. Jahrhunderts », dans Festschrift Johannes Bärmann, L. Petry (éd.), Wiesbaden, Steiner (Geschichtliche Landeskunde, 3), 1966-1967, 2 vol., I, 1-26, rééd. dans Id., Zur frühmittelalterlichen Reichsgeschichte an Rhein, Main und Neckar, Darmstadt, Buchgesselschaft, 1975, p. 275-300 ; et Gerd Tellenbach, The Church in Western Europe from the Tenth to the Early Twelfth Century, T. Reuter (trad.), Cambridge, Cambridge University Press (Cambridge medieval textbooks), 1993, p. 33-34.

73 Papsturkunden 896-1046, n° 232 (éd. cit. n. 68), I, p. 461-463. Voir l’octroi d’un privilège, peut-être interpolé, à Thierry par le pape Jean XIII en janvier 969 (n° 195, p. 384-387) et d’un faux privilège de primat pour l’archevêque Adalbert de Magdebourg quelques mois plus tôt à peine, en octobre 968 (n° 191, p. 376-378). Discussion dans Klaus Krönert, L’exaltation de Trèves : Écriture hagiographique et passé historique de la métropole mosellane, viiie-xie siècle, Ostfildern, J. Thorbecke (Beihefte der Francia, 70), 2010, p. 99-101 ; et O. Schneider (op. cit. n. 28), p. 277-281.

74 Les Annales de Flodoard (éd. cit. n. 3), s.a. 948, p. 108 : « mandatum legationis apostolicae, quam dudum Rotbertus archiepiscopus, deferente Frederico praesule Mogonciacensi, coram regibus et episcopis tam Galliae quam Germaniae ». Remarquer que, quand il rapporte cet épisode dans son HRE, Flodoard ôte toute référence à la Gallia et à la Germania : « […] apostolice legationis mandatum, quod dudum Rotbertus archiepiscopus deferente Frederico Mogonciacensi praesule coram regibus et episcopis susceperat […] », HRE IV, 34 (éd. cit. n. 3), p. 427.

75 La rencontre est racontée dans Les Annales de Flodoard (éd. cit. n. 3), s.a. 947, p. 105 et HRE IV, 33 (éd. cit. n. 3), p. 425-426.

76 Ernst-Dieter Hehl, « Erzbischof Ruotbert von Trier und der Reimser Streit », dans Deus qui mutat tempora: Menschen und Institutionen im Wandel des Mittelalters. Festschrift für Alfons Becker, E.-D. Hehl, H. Siebert et F. Staab (éd.), Sigmaringen, J. Thorbecke, 1987, p. 55-68, aux p. 57-59.

77 Concilia Africae, a. 345–a. 525, C. Munier (éd.), (Corpus christianorum, series latina, 149), Turnhout, Brepols, 1974, p. 140.

78 Voir Die Konzilien Deutschlands und Reichsitaliens, 916-1001, Teil 1: 916-960 , E.-D. Hehl (éd.), Hanovre (MGH Concilia, 6), 1987, p. 169-170, n. 44.

79 E.-D. Hehl (art. cit. n. 76), p. 65-67.

80 Paul Lehmann, « Nachrichten von der alten Trierer Dombibliothek », dans Id., Erforschung des Mittelalters [2e éd.], vol. I., Stuttgart, Hiersemann, 1959, p. 231-253, aux p. 245-246 ; P. C. Jacobsen (op. cit. n. 5), p. 63-64.

81 Flodoard fait un usage très réfléchi des titres : voir Peter Christian Jacobsen, « Die Titel princeps und domnus bei Flodoard von Reims », Mittellateinisches Jahrbuch, 13, 1978, p. 50-72, avec mention de Robert, p. 67-68.

82 HRE, préface (éd. cit. n. 3), p. 57 ; voir P. C. Jacobsen (op. cit. n. 5), p. 52-53 ; M. Sot (op. cit. n. 3), p. 101-103.

83 E.-D. Hehl (art. cit. n. 76).

84 Les Annales de Flodoard (éd. cit. n. 3), s.a. 948, p. 110 ; cf. MGH, Concilia, 6, p. 157. Voir aussi le contraste dans ce passage, que Flodoard a reproduit dans son HRE, entre l’archiepiscopus Robert et le presul Frédéric, supra n. 3.

85 Gabrielle Spiegel, « Genealogy: Form and Function in Medieval Historical Narrative », History and Theory, 22, 1983, p. 43-53, réimpr. dans Id., The Past as Text: The Theory and Practice of Medieval Historiography, Baltimore, Johns Hopkins University Press (Parallax: re-visions of culture and society), 1997, p. 99-110, aux p. 99-101 ; Walter Pohl, « History in Fragments: Montecassino’s Politics of Memory », Early Medieval Europe, 10, 2001, p. 343-374, ici p. 353.

86 Flodoard note l’envoi du pallium à Foulques (HRE IV, 1 [éd. cit. n. 3], p. 363), Séulf (IV, 18, p. 410), Artaud (IV, 24, p. 416) et Hugues (à l’occasion de la deuxième phase de son épiscopat, IV, 29, p. 421). Curieusement, il ne note pas qu’Hervé ait reçu le pallium, mais il est difficile de croire qu’il ne lui fût pas envoyé : voir L. Falkenstein (art. cit. n. 27), p. 191-192.

87 Cf. M. Sot (op. cit. n. 3),p. 741-744.

88 Cf. l’article de Marie-Céline Isaïa dans le second fascicule à paraître, qui insiste sur l’importance irremplaçable des lettres pour les hagiographes qui veulent décrire les agissements de leurs héros.

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Pour citer cet article

Référence papier

Edward Roberts, « Construire une hiérarchie épiscopale : Flodoard de Reims et la correspondance de l’archevêque Foulques (vers 850-vers 950) »Cahiers de civilisation médiévale, 241 | 2018, 11-26.

Référence électronique

Edward Roberts, « Construire une hiérarchie épiscopale : Flodoard de Reims et la correspondance de l’archevêque Foulques (vers 850-vers 950) »Cahiers de civilisation médiévale [En ligne], 241 | 2018, mis en ligne le 01 janvier 2021, consulté le 11 février 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/ccm/1797 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/ccm.1797

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Auteur

Edward Roberts

Université de Kent

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