Texte intégral
- 1 Medina-Nicolas, L., Le dilemme des frontières en Amérique centrale : marges symboliques ou espaces (...)
1L’Isthme centraméricain est l’une des régions du monde le plus morcelé politiquement, divisé en sept États séparés par dix frontières terrestres. Après l’indépendance de l’Amérique centrale vis-à-vis de la couronne espagnole en 1821, les nouvelles frontières étatiques ont dû être précisées. Dans tout l’isthme, les frontières ont été investies d’une forte valeur symbolique. Les processus de constructions territoriales nationales se sont appuyés sur cette linéarisation et les nouveaux gouvernements centraméricains ont instrumentalisé la défense des frontières nationales, permettant d’affirmer l’appartenance à une nation imaginée1.
- 2 Granados, C., « Fronteras Centroamericanas: Espacios de encuentros y desencuentos », UIFC (Unidad d (...)
- 3 Girot, P., « The interoceanic canal and boundaries in Central America. the case of the San Juan Riv (...)
2Le Costa Rica est peut-être le pays qui a développé le plus précocement une identité nationale et il n’est pas anodin que ce soit aussi le premier à avoir connu un conflit limitrophe avec le Nicaragua pour la région du Guanacaste (1813-1824). Suite à ce différend, c’est aussi le premier pays à avoir établi un traité frontalier avec le Nicaragua (Traité Cañas-Jerez) en 18582. En outre, de nombreux acteurs exogènes, notamment les États-Unis, sont intervenus pour influencer les négociations pour la délimitation des frontières centraméricaines afin que les traités répondent à leurs intérêts géopolitiques et économiques (canal interocéanique, plantations bananières, entre autres). Le tracé de la frontière Costa Rica-Nicaragua, arbitré en fonction du projet de construction d’un canal interocéanique, en est l’illustration3.
- 4 Medina, L., « Les frontières de l’isthme centraméricain, des marges symboliques à des espaces en co (...)
- 5 León Araya, A., Desarrollo geográfico desigual en Costa Rica. El ajuste estructural visto desde la (...)
3Cet article analyse l’histoire récente de la frontière Costa Rica-Nicaragua, en particulier celle de la frange nord du Costa Rica, en insistant sur la manière dont cette région longtemps marginale a connu une nouvelle valorisation qui vont au-delà des tensions persistantes4. En effet, deux processus territoriaux concomitants à la fois économiques et politiques recomposent aujourd’hui les paysages et la gestion de cette frontière. Le premier est l’introduction de la monoculture d’ananas qui a progressivement remplacé la production de céréales5 et a intégré cette région frontalière au marché mondial. Le deuxième est la conversion en frontière refuge, suite à la crise politique au Nicaragua, comme en témoigne la mise en place du côté costaricien de programmes soutenus par la coopération internationale pour accueillir les réfugiés politiques.
4Dans une première partie, nous présentons notre positionnement théorique pour aborder l’objet frontière ainsi que le contexte frontalier entre le Costa Rica et le Nicaragua. Dans une deuxième partie, nous montrons comment cette frontière a été perçue comme un territoire d’opportunité pour des investissements productifs avec un important avantage comparatif qui a permis l’expansion sans contrôle de la culture de l’ananas. Enfin, dans un troisième temps, nous analysons la manière dont cette frontière est touchée par la crise politique nicaraguayenne depuis 2018, qui produit un nouveau flux migratoire cette fois-ci d’étudiants, de paysans et de militants politiques qui fuient le régime d’Ortega-Murillo.
5Cet article est le résultat de recherches approfondies sur les dynamiques de coopération et de conflit, et sur les problématiques de gestion de l’environnement dans les régions frontalières d’Amérique centrale. Le processus d’avancée des activités extractives dans ces régions, en particulier dans la partie nord du Costa Rica, a été observé depuis 2019 dans le cadre d’un projet de recherche conjointe entre l’Université du Costa Rica et l’Institut de recherche sociale de l’Université nationale du Mexique (UNAM). Démarré avant le début de la pandémie de la Covid-19, le travail a consisté en des observations participantes, une importante enquête de terrain (plus de 40 entretiens auprès d’experts, de travailleurs agricoles, de représentants d’organisations non gouvernementales de droits humains, ainsi que de migrants) et une révision documentaire et hémérographique détaillée (principaux journaux costariciens et nicaraguayens).
- 6 Foucher, M., Fronts et frontières: un tour du monde géopolitique, Fayard, 1991, p. 8
- 7 Velasco-Graciet, H. et Bouquet C., Tropisme des frontières: approche pluridisciplinaire, L’Harmatta (...)
- 8 Gay, J.-C., Les discontinuités spatiales, Economica, 2004, 112 p.
- 9 Amilhat-Szary, A.-L., « Frontières et Conflits », in Tétard, Frank, Géographie des conflits: Capes- (...)
- 10 Rodriguez Echavarria, T. et al., « Frontera, monocultivos y mercado laboral transfronterizo frente (...)
- 11 Cortés, A., « Los imaginarios diferenciados de Nicaragua y Costa Rica sobre el Río San Juan », Pens (...)
6Les études contemporaines sur les frontières les conçoivent comme « l’enveloppe continue d’un ensemble spatial, d’un État »6. Les frontières se posent ainsi comme une forme de discontinuité spatiale qui a comme objectif d’ordonner le monde et de le rendre compréhensible7, ainsi que d’établir un périmètre de contrôle et d’encadrement des populations et des activités économiques et sociales8. Les frontières matérialisent ainsi l’altérité entre un « dedans » et un « dehors », et la séparation entre un « nous » et les « autres », les inconnus, les étrangers, les « différents »9. La frontière entre le Costa Rica et le Nicaragua se caractérise par une grande proximité historique et une interdépendance culturelle et économique. Pourtant, sa présence a été historiquement instrumentalisée par les gouvernements costariciens pour marquer l’altérité et présenter les voisins nicaraguayens comme un danger pour la sécurité du pays10. Ceci s’est matérialisé à de nombreuses reprises par un discours xénophobe et par la mise en place de mesures restrictives à la migration11.
- 12 Rodríguez Echavarría, T., Gouverner l’environnement dans des régions frontalières. Coopération et c (...)
7Notre recherche s’intéresse à cette frontière non pas dans sa dimension linéaire mais dans celle de région frontière, ce qui renvoie plutôt à considérer les dynamiques spatiales, économiques et sociales à l’œuvre sur ce territoire. Nous nous intéressons à la frontière au sens d’une région transnationale structurée par la contiguïté de part et d’autre de la frontière, autour de laquelle s’articulent des acteurs et des activités productives et sociales qui lui sont propres. Dans ces régions frontalières se développent des activités originales qui ne sont pas présentes de la même façon dans le reste du territoire national, comme le passage de la douane, des échanges de différentes natures (flux licites ou illicites comme la contrebande, le trafic de drogue et de personnes), des flux touristiques mais aussi des activités extractives (monocultures, mines, entre autres)12. Les régions frontalières sont ainsi des lieux très spécifiques, à l’identité déterminée par leur proximité avec un autre territoire national et par leur position périphérique, c’est-à-dire leur éloignement des centres de pouvoir. En Amérique centrale, comme souvent ailleurs, elles sont soumises à de fortes contraintes qui pénalisent leur développement comme le manque d’investissement de la part des États, leur éloignement et leur accès rendu difficile par la défaillance des réseaux de transport.
- 13 Girot, P., « Formación y estructuración de una frontera viva: El caso de la región Norte de Costa R (...)
- 14 Girot, P. et Granados, C., « La cooperación transfronteriza y los nuevos paradigmas de la integraci (...)
- 15 Matul, D., « Vecindad, cooperación y confanza mutua: una revisión », Revista Centroamericana de Cie (...)
- 16 Mojica-Mendieta, Francisco, « Imaginarios del desaguadero de la mar dulce: Colonialidad, intersubje (...)
8La frontière qui sépare le Costa Rica et le Nicaragua s’étend sur 309 kilomètres (Carte 1). Il s’agit d’une frontière considérée traditionnellement comme perméable et interdépendante13, sa situation d’éloignement vis-à-vis des centres nationaux ayant favorisé la création d’une dynamique propre autour d’échanges commerciaux et de la circulation constante de personnes de part et d’autre. Les cantons frontaliers costariciens et les municipalités frontalières nicaraguayennes (Carte 2) continuent d’être marqués par la proximité culturelle et familiale, ce que certains auteurs ont décrit comme un lien « ombilical »14 entre « voisinages transfrontaliers »15. Les populations y partagent une identité frontalière et des caractéristiques ethniques communes, une langue, une culture paysanne et une même histoire locale16.
- 17 Prescott, V., « Boundary Disputes », In The Oxford Companion to Politics of the world, Joel Krieger (...)
9Malgré les liens étroits entretenus à l’échelle locale, les relations diplomatiques entre les deux pays sont demeurées tendues depuis l’indépendance. Si l’on se réfère à la typologie des conflits frontaliers de Prescott, on peut distinguer entre le Costa Rica et le Nicaragua des disputes territoriales (lorsqu’un État réclame la possession d’un territoire adjacent) et des disputes de position17 dès l’indépendance. La dispute territoriale la plus importante a concerné le Partido de Nicoya, réclamé par le Nicaragua mais annexé au Costa Rica en 1824. En 1858, un arbitrage des États-Unis, connu comme le Laudo Cleveland, a défini la frontière sur la rive droite du fleuve San Juan, octroyant les eaux du fleuve au Nicaragua pour faciliter la construction d’un éventuel canal interocéanique, mais garantissant la libre navigation des Costariciens sur le fleuve à des fins commerciales. Cependant, des conflits relatifs à la démarcation de la frontière persistent encore pour différents secteurs, en raison de différentes interprétations des traités et accords limitrophes.
- 18 Granados, C. et Jiménez, A., Ambiente, conflicto y cooperación en la cuenca del río San Juan, Proye (...)
- 19 La désignation comme site Ramsar constitue pour les zones humides dans le monde un label de reconna (...)
- 20 Cubero Acevedo, J. et Soto Acosta, W., « Una unidad, dos países: Caracterización socioeconomica y a (...)
- 21 Rodríguez Echavarría, T., Gouverner l’environnement dans des régions frontalières. Coopération et c (...)
- 22 Medina, L., Rodriguez, T., « La frontière entre le Nicaragua et le Costa Rica : ambivalence et comp (...)
10Cette frontière est aussi stratégique du point de vue géopolitique en raison de sa richesse environnementale. Le bassin transfrontalier du fleuve San Juan (42 000 km2) est le principal recevoir d’eau douce et le deuxième plus grand bassin hydrographique de l’Amérique centrale18. Ce bassin constitue ainsi une unité hydro-écologique divisée par la ligne frontalière, dans laquelle se localisent des sites Ramsar19 comme les marécages de Caño Negro et Tortuguero au Costa Rica, et celui de Medio Queso ainsi que des aires protégées comme la grande réserve Indio Maiz au Nicaragua20. La Carte 1 montre ces aires transfrontalières, les postes-frontière et les passages informels tout au long de la frontière. La protection de cette richesse environnementale a motivé de nombreux projets de coopération internationale portés par des organismes comme l’Union Internationale pour la Conservation de la Nature (UICN) et la coopération espagnole (Projet Rio Frio)21. Nonobstant, ces initiatives ont été très affectées par les conflits diplomatiques entre les gouvernements du Costa Rica et du Nicaragua ; elles n’ont pas été réellement menées à terme22.
Carte 1 – Frontière Costa Rica-Nicaragua :
postes-frontière officiels, passages clandestins et aires protégées
Source : SINAC 2023, IGN 2023, OpenstreetMap, GoogleMaps.
- 23 « Quand Google Maps déclenche l'invasion du Costa Rica », Courrier International, publié le 17 nove (...)
- 24 Medina, L., Rodriguez, T., « La frontière entre le Nicaragua et le Costa Rica : ambivalence et comp (...)
11Après une période de stabilité dans les relations diplomatiques au tournant des années 2000, qui a permis la mise en place d’un agenda de coopération binationale pour le développement de la frontière, les conflits autour du fleuve San Juan ont été réactivés à partir de 2005, débouchant sur la présentation par le Costa Rica d’une requête contre le Nicaragua devant la Cour Internationale de Justice (CIJ) de La Haye, accusant ce dernier de violer le traité frontalier. En 2010, le conflit s’est encore renforcé, notamment à la suite du dragage du fleuve par le Nicaragua, près de l’île Calero qui se trouve dans le delta23, ce qui a débouché sur une deuxième requête du Costa Rica devant la CIJ, suivie d’une troisième au sujet de la délimitation de la frontière maritime en 2013, tandis que le Nicaragua en a déposé une contre le Costa Rica en 2011 suite à la construction d’une route frontalière par le gouvernement costaricien24.
- 25 Aguilar Ramírez, E. A., « Proyecto Calero: una historia de militarización y xenofobia », Revista PR (...)
- 26 Rodriguez Echavarría, T., « Los límites de la cooperación transfronteriza en Centroamérica El caso (...)
12Ces conflits ont amené à l’arrêt des relations diplomatiques entre les deux pays et à la sécurisation de la frontière avec la construction de la route longeant le fleuve San Juan mentionnée plus haut, à laquelle le gouvernement costaricien a donné le nom provocateur de Route 1856, évoquant la date d’une guerre passée entre les deux pays. Ces différents conflits ont favorisé le développement d’un discours belliqueux, le gouvernement du Costa Rica faisant référence à « une invasion militaire »25.
Ce cycle de conflits a eu aussi des impacts importants à l’échelle locale avec une militarisation et une plus grande fermeture de la frontière suite à la mobilisation de l’armée nicaraguayenne et de la Guardia Civil costaricienne (le Costa Rica ayant fait le choix en 1948 de ne pas avoir d’armée). Les dynamiques locales de coopérations transfrontalières ont été affectées et, depuis lors, les échanges culturels, les foires binationales de la santé et les activités de conservation de l’environnement conjointes sont interrompus26.
13Malgré cette mise à distance, la frontière est cependant restée articulée au niveau économique, du fait du développement de la culture de l’ananas. Cette production a connu une forte croissance dans ce territoire aux conditions adéquates.
- 27 Cortés, A., « Los imaginarios diferenciados de Nicaragua y Costa Rica sobre el Río San Juan », Pens (...)
- 28 Rodríguez Echavarría, T., Gouverner l’environnement dans des régions frontalières. Coopération et c (...)
- 29 Araya, A., Desarrollo geográfico desigual en Costa Rica. El ajuste estructural visto desde la Regió (...)
14Dans les imaginaires nationaux respectifs du Nicaragua et du Costa Rica, leur frontière commune représente des réalités différentes. Selon A. Cortés, pour le Nicaragua, le fleuve San Juan a joué un rôle central dans la construction de l’identité nationale et représente la promesse d’un canal toujours espéré qui amènera le développement et le progrès. En revanche, cette frontière n’a pas la même centralité pour le Costa Rica, elle y est perçue plutôt négativement, comme une « zone dangereuse » et « peu intéressante », surtout source de conflits et de migration irrégulière27. Pour l’État costaricien, ce territoire mal intégré et sous-exploité a été longtemps sans intérêt28. Cet argumentaire a justifié un processus de nationalisation et de colonisation porté par l’État au milieu du xixe siècle. Un front pionnier a permis l’avancée de la frontière agricole à travers l’attribution de terres pour la production de céréales et légumineuses (riz, haricots noirs, maïs) pour le marché local et national. Cette stratégie a cherché à faire de ce territoire une région intégrée politiquement, économiquement et culturellement à l’État costaricien29.
- 30 Murray Li, T., « Qu’est-ce que la terre ? Assemblage d’une ressource et investissement mondial », (...)
15Postérieurement, dans les années 1980, l’État costaricien a considéré que la production de céréales n’était pas suffisamment compétitive et que les terres de la région nord étaient sous-utilisées. Par le biais de programmes d’ajustement structurel et de politiques de substitution des importations, l’État a alors cherché à libéraliser l’économie et à attirer des investissements directs étrangers afin de faciliter l’installation d’entreprises de production d’agrumes et d’ananas. Comme l’a montré T. Murray Li, considérer la terre comme une ressource sous-utilisée revient ainsi à nier les pratiques productives traditionnelles (production de céréales et agriculture de subsistance) pour mettre cette terre à disposition des investisseurs30.
- 31 Rodriguez Echavarria, T. et al., « Frontera, monocultivos y mercado laboral transfronterizo frente (...)
16C’est dans ce contexte que la culture de l’ananas a été introduite par l’entreprise PINDECO avec le soutien de l’État costaricien, sur la base essentiellement d’une variété génétiquement modifiée appelée Sweet Golden MD-2. La région frontalière a été considérée comme un territoire d’opportunité en raison de sa situation marginale, de l’absence de contrôle de l’État costaricien et de la disponibilité de ressources convoitées telles que l’eau et la terre. L’expansion de la monoculture de l’ananas est liée aussi à la disponibilité de main-d’œuvre nicaraguayenne présente dans la région. Peu qualifiée, sous-payée, elle est souvent en condition migratoire irrégulière, ce qui la rend vulnérable31.
17Actuellement, le Costa Rica est le premier exportateur mondial d’ananas frais, selon le Programme de surveillance du changement d’utilisation des paysages productifs (MOCUPP en anglais) du Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD). En 2019, il a consacré 65 442 hectares à sa culture, dont 44 139 ha dans la zone nord (Carte 2), soit 68 % de la superficie nationale totale.
Carte 2 – Localisation des plantations d’ananas à la frontière Costa Rica-Nicaragua
Source : MOCCUP, IGN 2023, OpenStreetMap, GoogleMaps.
- 32 Gudynas, E., « Extracciones, extractivismos y extrahecciones. Un marco conceptual sobre la apropiac (...)
- 33 Gudynas, E., « Diez tesis urgentes sobre el nuevo extractivismo », Extractivismo, política y socied (...)
- 34 Acosta, A., « Extractivismo y neoextractivismo: dos caras de la misma maldición », Más allá del des (...)
- 35 Bran-Guzmán, E., « Conflictividad socioambiental en Centroamérica. Una década de rearticulación y m (...)
18L’impact important de cette culture sur la frontière nous amène à l’analyser au prisme de la notion d’extractivisme. L’extractivisme est défini comme une activité productive qui prélève de manière intensive de grands volumes de ressources naturelles, dont au moins 50 % sont destinés à l’exportation32. E. Gudynas33 et A. Acosta34 établissent que l’extractivisme ne se limite pas à l’extraction de minéraux ou d’hydrocarbures (pétrole et gaz naturel), mais aussi à l’extractivisme agricole, forestier et même à l’extractivisme de la pêche intensive. Cette notion renvoie en effet à une activité productive et une forme d’accumulation et de pillage avec différents modes d’extraction des ressources du sol et du sous-sol (mines, hydrocarbures, agriculture de plantation, forêts, eau) orientés vers l’exportation de la nature avec peu de transformation et donc une faible valeur ajoutée35. Mais la notion d’extractivisme ne peut être réduite aux seules opérations liées aux matières premières ; elle renvoie aussi à des situations de déséquilibre de pouvoir et est également associée à l’exploitation de la main-d’œuvre et du travail et à la négation de la culture et des connaissances locales.
- 36 Gudynas, E., « Diez tesis urgentes sobre el nuevo extractivismo », Extractivismo, política y socied (...)
- 37 Rodríguez Echavarría, T., Obando, A., Acuña M.-L., « Entender el extractivismo en regiones fronteri (...)
19L’expansion de la production d’ananas s’est faite sans un véritable contrôle de l’État, ou plutôt, celui-ci l’a favorisée en créant les conditions propices à l’établissement progressif d’entreprises transnationales et nationales, comme l’ont montré dans d’autres contextes latino-américains des spécialistes de l’extractivisme36. En outre, cette culture utilise de grandes quantités de pesticides qui ont contaminé le bassin transfrontalier du fleuve San Juan37, ce qui pourrait potentiellement devenir la source de nouveaux conflits frontaliers.
20Par ailleurs, la filière a besoin de la main-d’œuvre nicaraguayenne, elle a ainsi besoin de la porosité et du dynamisme frontalier pour subsister. Or, en 2020, elle a dû faire face à la pandémie de la COVID-19 et à la fermeture des frontières terrestres, la mettant en risque.
- 38 Prunier, Delphine M. et Salazar S., « Fronteras centroamericanas y movilidad en 2020. Una región de (...)
- 39 Rodriguez Echavarria, T. et al., « Frontera, monocultivos y mercado laboral transfronterizo frente (...)
21Avec la pandémie de la COVID-19, les frontières ont été fortement mises en débat partout dans le monde. En mars 2020, le gouvernement costaricien, comme beaucoup de ses homologues, a suivi la recommandation de l’OMS de fermer les frontières aériennes et terrestres pour contenir la propagation du virus. Pendant presque un an, les relations frontalières et la circulation de personnes et marchandises ont été interrompues. Le cordon sanitaire créé visait à réduire la circulation des Nicaraguayens et a été justifié par l’absence de mesures sanitaires prises par le gouvernement nicaraguayen38. De nombreuses dispositions ont été prises comme le renforcement de la surveillance de la frontière nord et un appel a été lancé aux entrepreneurs de la région pour qu’ils prennent des mesures préventives (isoler les personnes présentant des symptômes, éviter les agglomérations, entre autres) envers les Nicaraguayens embauchés pour travailler dans leurs champs39.
- 40 Ibid.
- 41 Ugarte, O., « Costa Rica no sanciona a empresas agrícolas que contraten trabajadores indocumentados (...)
22L’intervention du gouvernement costaricien ne s’est pas seulement concentrée sur les entreprises, mais a également concerné les migrants, dont ceux des communautés transfrontalières de la région. Ce sont eux qui ont été les plus touchés. Par exemple, le gouvernement a restreint les circulations des populations nicaraguayennes qui avaient quotidiennement recours aux écoles et aux centres de santé du côté costaricien40. De plus, l’accès à la santé des migrants en situation irrégulière a été limité par une mesure interdisant le traitement des sans-papiers sans la présence des forces de l’ordre ou des agents de l’immigration. Tout migrant irrégulier se présentant dans les centres de santé devait être traité comme un patient positif et être isolé immédiatement41. En juin 2020, le ministre de la Santé costaricien a établi un lien entre le nombre de cas dans le pays et les activités agricoles et d’emballage dans le nord, et a déclaré une alerte orange pour plusieurs districts frontaliers. Ces actions, au lieu de remettre en cause les activités des entreprises frontalières et les mauvaises conditions de travail, ont plutôt contribué à renforcer la perception des migrants comme un « danger » pour la santé publique et, par conséquent, les discours racistes.
23Malgré le discours officiel, d’après les entretiens réalisés auprès de militants pour les droits humains des migrants, comme Amarú Ruiz, directeur de l’ONG Fondation du Fleuve (communication personnelle, 1er mars 2021), la pandémie n’a pas impliqué un vrai changement dans les relations économiques entre les deux pays puisque la migration saisonnière s’est maintenue. Les travailleurs des champs d’ananas ont réussi à circuler à travers les différents passages informels qui permettent de franchir la frontière (Carte 1), violant avec beaucoup de facilité sa fermeture officielle. Une grande partie de la mobilité des travailleurs s’est faite aussi de façon coordonnée entre les gouvernements du Costa Rica et du Nicaragua, à travers la négociation d’une « Convention Binationale pour réguler le recrutement temporaire des travailleurs nicaraguayens au Costa Rica ». Cette convention a été en vigueur du 6 novembre 2020 au 30 avril 2021 et a eu comme objectif de faciliter les déplacements des travailleurs saisonniers vers les plantations, afin de répondre à la demande de main-d’œuvre pour les récoltes de café, les cultures d’ananas et de palme africaine. Il s’agissait de faire passer des contrôles sanitaires à Rivas (au Nicaragua donc, avant le passage de la frontière) aux personnes migrantes, avant de les conduire de l’autre côté, dans les différentes fincas où elles restaient sous la responsabilité des employeurs. Ce dispositif a mis en évidence la forte dépendance du secteur agroindustriel du Costa Rica à la main-d’œuvre migrante nicaraguayenne.
24En synthèse, si les gouvernements nicaraguayen et costaricien maintiennent historiquement des relations diplomatiques tendues, ils réussissent malgré tout à coopérer dans l’intérêt commun d’assurer la production d’ananas et de fournir un travail aux Nicaraguayens. Un système d’exploitation de la main-d’œuvre nicaraguayenne existe avec le soutien et la complicité des deux gouvernements. Il a perduré sans interruption pendant la crise sanitaire, sans que les autorités mettent en place des contrôles ou des actions qui améliorent les conditions de travail et de vie des travailleurs.
25Si cette zone frontalière fonctionne de façon transnationale par la filière de l’ananas, elle le fait également par son nouveau rôle de frontière refuge. Depuis 2018, elle resurgit comme objet d’intérêt de la coopération suite à la nécessité d’assister et d’accueillir les milliers de personnes qui fuient le régime autoritaire du président Daniel Ortega au Nicaragua. De nombreux programmes de l’État costaricien et des projets d’organisations internationales tentent de faire face à ces flux croissants.
26La frontière Costa Rica-Nicaragua est redevenue ce qu’elle avait déjà été dans les années 1980, c’est-à-dire un territoire de refuge pour les dissidents du régime du président Daniel Ortega et sa femme et vice-présidente, Rosario Murillo au pouvoir depuis 2006.
27La situation de répression politique connaît sa période la plus critique depuis 2018, engendrant un important déplacement de personnes, en premier lieu vers le Costa Rica voisin. La Direction de Migration du Costa Rica a reçu plus de 88 000 demandes d’asile politique entre 2018 et 2020 (entretien avec le Directeur adjoint du 17 mars 2021). Cette nouvelle vague migratoire est différente de la migration économique classique. Selon les entretiens réalisés, il s’agit de déplacements qui ne se font pas pour des raisons économiques, les personnes concernées étant généralement formées, titulaires de diplômes universitaires, insérées dans le marché du travail ou ayant accès à la terre. Comme affirme un travailleur agricole, « ils (les réfugiés) n’avaient pas besoin de migrer avant, ils avaient une vie. Nous, on a migré parce que nous n’avions pas de travail, nous n’avions rien » (entretien, 2 avril 2021).
28Du côté nicaraguayen, selon un ex-fonctionnaire du Centre Nicaraguayen des Droits Humains (entretien du 2 mars 2021), l’opération frontera segura (frontière sûre) a consisté à augmenter le contrôle et la sécurisation de la frontière pour rendre le passage plus difficile. Passer la frontière est alors devenu très dangereux. Lors de l’entretien, il affirme : « Le gouvernement a recherché les opposants pour les emprisonner à la frontière. En plus, l’armée nous faisait payer pour pouvoir passer ». Pour lui, au Costa Rica, « les ressources et les aides sont focalisées sur les déplacés politiques, les travailleurs des plantations sont relégués » (entretien, 2 mars 2021).
29La frontière Costa Rica-Nicaragua a été fortement impactée par cette crise politique. Elle est devenue un espace de refuge qui a dû être aménagé pour accueillir ce flux de personnes. Du côté costaricien, des camps de réfugiés ont été installés et de nouveaux postes migratoires ont été déployés avec le soutien de l’Agence des Nations Unies pour les Réfugiés (ACNUR), afin de faire face au flux croissant de demandeurs d’asile.
30C’est dans ce contexte que la frontière resurgit comme objet et espace de coopération, mais cette fois autour de la thématique des droits humains. De nombreux projets doivent aider la population réfugiée. Des organisations comme le Centre de Droits des Migrants (CENDEROS), localisé près de la frontière dans la municipalité d’Upala, proposent différents services comme l’aide légale pour les démarches administratives des refuges et des programmes de soutien à des agriculteurs déplacés. D’autres organisations comme Ayuda en Acción (issue de la coopération catalane), l’ACNUR, l’Organisation Internationale des Migrations et le Service Jésuite, sont présentes aussi. De fait, un sujet politique différent surgit : le demandeur d’asile qui cherche à se différencier du migrant économique. Il a une condition migratoire plus privilégiée et est l’objet d’aide de l’État et des ONG internationales, face au migrant qui est oublié par la coopération et source de main-d’œuvre mal payée par le secteur agro-extractiviste.
31Ces initiatives ont été temporairement interrompues pendant la pandémie, mais certaines ont été reprises depuis 2022. Des camps de réfugiés sont toujours en place et des personnes fuient toujours le Nicaragua pour des raisons politiques en 2024, notamment après la fermeture par le gouvernement de plusieurs universités et d’organisations non gouvernementales et de la société civile. Ces actions ont aussi activé des réseaux de coopérations transfrontaliers informels pour faciliter les déplacements des personnes en danger.
- 42 Robinson, W. I., Transnational conflicts: Central America, social change and globalization, London, (...)
32Au final, les actions de coopération actuelles de défense des droits humains, développées sur cette frontière, ne cherchent pas à améliorer les conditions de travail des migrants économiques dans les plantations d’ananas. Les organisations internationales ont leurs propres agendas, liés aux intérêts des bailleurs de fonds ; elles ne veulent pas créer des tensions avec les États et les acteurs économiques locaux, parce qu’elles dépendent des ressources des États et des bailleurs, et de leur soutien pour exister42. Elles préfèrent adopter une position modérée et dépolitisée qui cherche à faire face à une problématique ponctuelle et conjoncturelle sur la frontière. Cette dynamique crée un système discriminatoire qui promeut la division et génère des tensions entre les travailleurs agricoles et les réfugiés. On observe une nouvelle ségrégation des personnes qui traversent la frontière, créant deux catégories : d’un côté, le demandeur d’asile, formé et militant, et objet des programmes et projets de coopération ; de l’autre, le migrant économique marginalisé, main-d’œuvre exploitée par les entreprises agricoles et qui reste en marge des politiques sociales et de la coopération.
33La région frontalière entre le Costa Rica et le Nicaragua est restée longtemps un espace de circulations peu contrôlées et intenses. Cette intégration transfrontalière n’a jamais été ni formalisée ni le résultat de la volonté des États, mais plutôt la conséquence de l’isolement et de la marginalisation dont a été objet la zone. Si cette frontière reste un objet de tensions diplomatiques entre les gouvernements nicaraguayen et costaricien, ceux-ci ont malgré tout réussi à organiser et à maintenir un système de production agro-exportateur. Ainsi, la région a connu une intégration économique au marché international depuis une vingtaine d’années par la production d’ananas, vouée à l’exportation et soutenue par les États et les capitaux privés. Le nord du Costa Rica est devenu un territoire d’opportunité économique grâce à son isolement et au manque de régulation et surveillance, ainsi qu’aux avantages comparatifs qu’elle présente (différentiels de développement, salaires, migrations Sud-Sud).
34Plus récemment, la frontière a connu une mutation dans ses fonctions politiques. Elle a été impactée par la répression croissante du gouvernement nicaraguayen et est aujourd’hui une zone dangereuse marquée par la présence militaire. En ce début d’année 2024, les deux gouvernements ont investi beaucoup de ressources dans la sécurisation de la zone, et il est regrettable que cet investissement ne se soit pas traduit par des actions concrètes pour promouvoir le développement et améliorer les conditions de vie des habitants de cette région frontalière. Simultanément à l’essor de la production de l’ananas, la frontière vit ainsi une autre valorisation de par sa fonction politique de refuge. Des projets et programmes prônent la défense des droits humains des demandeurs d’asile, ce qui n’est pas sans engendrer un traitement inégalitaire des migrants, entre travailleurs des champs et réfugiés politiques.
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Bibliographie
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Aguilar Ramírez, Esteban Andrés, « Proyecto Calero: una historia de militarización y xenofobia », Revista PRAXIS, n° 71, 2013, p. 45-74.
Amilhat-Szary, Anne-Laure, « Frontières et Conflits », in Tétard, Frank, Géographie des conflits : Capes-Agrégations, Paris, Editions Sedes, 2011, p. 48-68.
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La désignation comme site Ramsar constitue pour les zones humides dans le monde un label de reconnaissance international qui récompense et valorise les actions de gestion durable de ces zones (convention internationale de Ramsar adoptée en 1971).
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Gudynas, E., « Diez tesis urgentes sobre el nuevo extractivismo », Extractivismo, política y sociedad, 2009, p. 187-225 ; Acosta, A., « Extractivismo y neoextractivismo », Más allá del desarrollo, 2011, p. 83-118; Petras et al., Extractive Imperialism in the Americas: Capitalism’s New Frontier ; Bran-Guzmán, « Conflictividad socioambiental en Centroamérica. Una década de rearticulación y movilización social y política », Argumentos 30, n° 83, 2017, p. 43-68.
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Ibid.
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