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Dossier : Hétérotopies urbaines

Variations sur un quartier du centre de São Paulo

Variações sobre um bairro do centro de São Paulo
Variations on a district in central São Paulo
Heitor Frúgoli Junior
Traduction de Emilie Audigier
p. 49-67

Résumés

Cet article vise à présenter les principaux résultats d’une recherche ethnographique développée à partir de plusieurs fronts articulés d’investigations dans le quartier de Luz (centre de São Paulo). Explorant l’usage de la notion d’hétérotopie dans le cadre des études de la ville, il dialogue avec des auteurs comme Michel de Certeau, dont les réflexions font écho aux idées de Foucault sur l’espace et le pouvoir.

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Notes de la rédaction

Article reçu pour publication en mars 2012 ; approuvé en septembre 2012.

Traduit du portugais

Texte intégral

  • 1 Tout au long de cet article, les termes cracolândia (littéralement « terre du crack ») et nóia (abr (...)
  • 2 Problèmes soulevés par divers articles parus dans les journaux Folha de São Paulo et O Estado de Sã (...)

1Au cours du mois de janvier 2012, la presse écrite et la télévision ont largement relaté et commenté les efforts de la police pour éliminer une nouvelle fois les consommateurs de crack des rues du quartier de Luz, connu et stigmatisé depuis des décennies sous le nom de cracolândia1. On a soulevé avec passion de nouveaux thèmes mais aussi de vieilles questions. Pourquoi les pouvoirs publics recourent-ils à des internements forcés malgré l’opposition des professionnels de santé ? La dispersion de la population consommatrice de crack dans d’autres quartiers ne nuit-elle pas à leur prise en charge par les divers organismes locaux, en particulier les ONG ? Les populations locales victimes des contrôles et des nouvelles démolitions ordonnées par la municipalité doivent-elles et peuvent-elles résister ? Quel rôle jouent les activistes s’organisant contre les violences policières au nom de la défense des droits de l’homme ? Le ministère public de l’État de São Paulo enquête-t-il vraiment sur la manière dont sont conduites les opérations policières en cours et sur les pratiques des policiers ? Que disent les reportages journalistiques sur les consommateurs de crack (dont des femmes enceintes) ou sur des familles à la recherche de leurs proches dans les rues de Luz ? Que font exactement les trafiquants de drogue ? Les débats des élections municipales, alors à venir, s’en sont trouvés relancés2.

  • 3 Voir carte page 53.
  • 4 Partido da Social Democracia Brasileira (Parti de la social-démocratie brésilienne).
  • 5 Voir détails en ligne à l’adresse : http://www.novaluzsp.com.br/ (consulté le 28 mars 2012).
  • 6 Vagner Magalhães, « Kassab diz que terá gabinete na Cracolândia », Portal Terra, 23 avril 2009. htt (...)

2La répression policière à Luz s’est inscrite dans une suite d’actions à long terme conduites par les pouvoirs publics dans cette zone. Bénéficiant d’importants équipements urbains (y compris un système complexe de transport), et pourvu d’édifices classés monuments historiques ainsi que de diverses institutions culturelles (certaines d’entre elles ayant été restaurées ou rénovées afin d’augmenter leur fréquentation3), ce quartier du centre de São Paulo s’est développé grâce à l’action des pouvoirs publics, du moins à partir du milieu des années 1980. Parmi ces actions, il faut mentionner le projet Luz Cultural (Frúgoli Jr. 2000 : 72-73 et 103-109), qui a été suivi d’opérations émanant principalement des gouvernements de l’État fédéral liés au PSDB4 articulées avec des programmes d’envergure nationale (Kara-José 2007). Vers le milieu de la dernière décennie, un nouveau projet plus vaste de réhabilitation urbaine, appelé Nova Luz, a été lancé par la municipalité5. Celui-ci a eu finalement pour conséquence une aggravation considérable des conflits et des polémiques, surtout après la promulgation de la loi sur les concessions urbaines, à la mi-2009, qui a donné des pouvoirs spéciaux et nouveaux au secteur privé et a prévu d’exproprier dix-huit pâtés de maisons du centre-ville6.

  • 7 Littéralement « bouche d’ordures » (Ndt).

3Comme d’autres espaces situés au cœur de São Paulo, le quartier de Luz se caractérise depuis longtemps par une forte occupation populaire de la voie publique. À la prostitution féminine (et ultérieurement celle des travestis), s’ajoutent des activités illicites qui s’inscrivent dans un imaginaire lié à ce qu’on appelle la Boca do Lixo7 : une zone géographique incertaine du centre-ville définie par la présence de marginaux et devenue, entre les années 1960 et 1980, le lieu de production et de consommation de films érotiques et pornographiques (Perlongher 1987 : 76-86, Barros & Lopes 2004). On y trouve aussi de nombreux immeubles populaires et de petits commerces ; le négoce informel y prospère. En outre, depuis les années 1990, les mouvements de squatteurs organisent des occupations d’immeubles inhabités. Ce phénomène a entraîné la création d’une zone populaire caractérisée par une utilisation fortement hétérogène de l’espace et par la présence d’une grande diversité d’acteurs sociaux, lesquels ont en commun de rechercher les avantages d’une localisation centrale : proximité d’un actif marché du travail (incluant l’emploi informel), facilité d’accès aux services et aux équipements urbains (Frúgoli Jr. 2006, Kowarick 2007, Aquino 2009, Rizek 2011).

  • 8 Pour une analyse systématique de la réhabilitation et du lexique qui lui est attaché, voir Frúgoli (...)
  • 9 Cette recherche a été conduite depuis 2007, avec le soutien du CNPq (2008-2010) et avec la particip (...)

4Les conflits d’intérêts, l’aggravation des querelles autour du droit d’utilisation de l’espace, ainsi qu’une large couverture médiatique tendent à faire apparaître une réalité polarisée et dichotomique que l’on peut résumer par l’opposition entre Nova Luz et cracolândia, ou encore entre réhabilitation et dégradation8. D’une certaine manière, cette vision laisse dans l’ombre une population davantage attachée au quartier : habitants, commerçants, habitués fréquentant des espaces populaires, etc. C’est à eux que s’intéresse la présente étude qui cherche à reconstituer certains aspects de leurs pratiques, les réseaux de relations locales et les représentations qu’ils construisent9.

5Il s’agit de partir de contributions spécifiquement anthropologiques et ethnographiques pour penser un espace fortement exposé aux médias (au point qu’il donne l’impression d’être connu de tous). Il s’agit également de se situer dans un ensemble considérable de savoirs et d’actions liés à ce contexte (dans les domaines de l’architecture et de l’urbanisme, de la santé publique, de la politique, des droits de l’homme, etc.), qu’il conviendra de différencier et de hiérarchiser en fonction des découpages analytiques et des pratiques d’intervention. Dans cet article, nous aborderons également d’un point de vue anthropologique le concept de quartier, en prenant en compte l’analyse effectuée par des regards pluriels et en faisant jouer la distinction entre enquête et intervention (Cordeiro & Costa 1999, Mayol 1980, Authier et al 2006).

  • 10 Voir comment s’effectue cette approche par exemple dans l’étude historiographique de Guimarães (197 (...)
  • 11 On peut citer sans prétendre être exhaustif les travaux de Silva (2000), Kara-José (2007) et Moreir (...)

6L’approche contextualisée de la thématique du quartier s’est beaucoup complexifiée. Luz, compte tenu des réseaux de relation et de sociabilité qui peuvent y être repérés, doit être considéré comme en relevant. C’est ce qui a été fait dans plusieurs études, y compris celle-ci10. D’un autre côté, il est nécessaire d’aborder cette zone comme un secteur ou une région de la ville11 : en effet, en se centrant sur cette thématique, on est amené à parcourir des espaces plus vastes, ce qui est le cas également dans notre enquête. Il faut également prendre en considération le fait qu’il n’y a pas de délimitation officielle précise du quartier de Luz (d’un point de vue générique, celui-ci devrait faire partie du district de Bom Retiro, nom d’un quartier limitrophe). En outre, il faut considérer le rôle joué par différents projets d’intervention publique du fait de leur capacité à nommer (et donc à instituer) le territoire selon des modes diversifiés et juxtaposés. Ils visent à l’amélioration des institutions culturelles et des édifices classés monuments historiques, ou encore à la réhabilitation de l’habitat (Carvalho & Schicchi 2007). Ils renforcent la tension bipolaire évoquée plus haut, du fait, en particulier, d’un projet municipal délimitant une aire urbaine en vue d’une intervention de grande envergure (Nova Luz). Bénéfique pour cette zone, il aggrave en même temps sa stigmatisation (cracolândia). Les différents acteurs sociaux y opérant d’une manière ou d’une autre tendent à adopter ces représentations, ou d’autres déjà existantes, quand ils n’en créent pas de nouvelles. Notre perspective anthropologique a pour objectif principal la compréhension des pratiques et des représentations de ces personnes en n’oubliant pas que les résidents, les visiteurs ou les passants du quartier central de Luz se mêlent largement à eux (Frúgoli Jr. & Spaggiari 2011 : 554, Frúgoli Jr. 2000). Dans les pages qui suivent, au-delà de la polarisation évoquée (bien que parfois l’accentuation de certaines tensions puisse recréer des champs fortement antagonistes), on s’intéressera à la manière dont les espaces étudiés se prêtent à des usages, des interactions et des représentations situationnelles.

  • 12 « [...] tout se rattache aux pratiques urbaines qui s’insinuent à l’intérieur même des procédés dis (...)

7Ces remarques nous amènent à adopter une perspective analytique qui ne prétend pas être plus ample ou plus complète que les autres, et qui n’entend pas non plus résoudre isolément certaines questions. Cette approche cherche au contraire à mettre en évidence certaines spécificités, notamment celles que l’on peut reconstituer à partir du travail ethnographique centré sur la rue ou sur les pratiques spatiales des acteurs, suceptible de faire surgir une série de thèmes transversaux (Frúgoli Jr. 2007 et 2009, Frehse 2009). Le lien, entre autres, avec les travaux de Michel de Certeau (1994) n’est pas fortuit : il s’agit d’aborder des questions qui se rattachent à la capillarité du pouvoir et à sa spatialité, en prenant en compte les contributions de Foucault (1975) mais en cherchant aussi à repérer des procédés tactiques déployés sur une très petite échelle. Ces pratiques disséminées (au-delà des résistances et des inerties) sont marquées par des discours silencieux qui doivent être révélés par l’enquête. Il ne s’agit pourtant pas de nier les positions défendues par Foucault mais de les incorporer de manière critique dans une étude précise des aspects révélateurs de l’action humaine (Ortner 2006). Ainsi, nous accorderons une attention spéciale aux articulations entre les pratiques spatiales (la plus élémentaire étant le simple fait de marcher dans la ville) et les récits qu’on en fait, en cherchant à mettre en évidence la multiplicité des modes d’appropriation de l’espace pratiqué (Certeau 1980, Dosse 2004)12.

8Parallèlement, je serai attentif à la condition du citadin conçu comme sujet occupant des espaces urbains, se déplaçant dans différents territoires et établissant des relations de proximité et de distance avec d’autres citadins dans des contextes spécifiques et situés (Simmel 2005 et 1971, Joseph 2005, Agier 2009). Cette figure englobe celle du passant et du citoyen, dont l’étude analytique (dans le cas de ce dernier) souligne les dimensions politiques significatives. Cependant, une prise en compte lacunaire du caractère « situé » et relationnel de l’expérience urbaine comporte le risque d’une réduction de l’analyse à l’individu moderne, atomisé et idéalisé par la philosophie politique contractualiste (Joseph 2005).

  • 13 Pour une lecture plus détaillée de chaque axe de recherche de la présente étude, voir Ponto Urbe, r (...)

9Le cadre de la réflexion étant posé, et ses limites indiquées, je présenterai synthétiquement les résultats les plus significatifs de cette étude. Ils ont été obtenus en suivant différents axes de recherche ethnographiques qui, dialoguant entre eux, nous ont aidés : 1- dans le développement diachronique de l’enquête (en nous permettant de définir et de modifier notre centre d’intérêt tout le long du travail) ; 2- dans le développement synchronique de celle-ci, notamment en approfondissant la connexion entre acteurs et contextes étudiés simultanément, en particulier dans le minutieux travail de relevé territorial des réseaux de relation13.

La territorialité itinérante de cracolândia et les opérations menées par divers organismes

  • 14 La carte présentée dans cet article indique seulement la plus forte concentration de consommateurs (...)
  • 15 Pour une première étude plus systématique à ce sujet, voir Mingardi & Goulart (2001).
  • 16 Le terme nóia dérive de paranóia, en référence à l’état mental qui découle d’une consommation régul (...)
  • 17 Cette approche (Frúgoli Jr. & Spaggiari 2011) s’inspire partiellement de Bourgois (2003), bien que (...)
  • 18 D’après des articles parus dans la Folha de São Paulo dès 2000.

10Les consommateurs de crack se sont installés dans les rues de Luz14 depuis le début des années 1990 (Uchôa, 1996)15. Cette présence a contribué à stigmatiser cette zone sous le nom de cracolândia, expression très fréquemment rencontrée dans la presse écrite. Cependant, au cours de notre étude, nous avons constaté qu’il était encore plus souvent fait allusion aux consommateurs, les nóias16. En d’autres termes, l’accent est mis sur les personnes plutôt que sur un territoire spécifique (Frúgoli Jr. & Spaggiari 2011)17. Bien que cette zone soit laissée à l’abandon, elle est la cible d’un ensemble d’actions menées par divers types d’organismes. Ceux-ci s’adressent aux consommateurs de crack ainsi qu’à d’autres groupes vulnérables qui, eux-aussi, en font parfois usage : les SDF (dont les enfants des rues), les femmes et les travestis pratiquant la prostitution, les ramasseurs de matériaux recyclables, etc. É de Lei (C’est la loi) est une des associations avec lesquelles nous avons eu un dialogue suivi au cours de l’enquête. Elle intervient auprès des drogués afin de tenter de réduire les risques liés à la consommation de crack, en menant des actions dans les rues du secteur de Luz et dans un centre d’aide (la fréquence des interventions est ici plus faible que dans le premier cas). En accompagnant le travail d’assistance de cet organisme, il a non seulement été possible d’observer de près de nombreuses situations impliquant ces consommateurs, mais aussi de cartographier un champ de médiations mettant en jeux des policiers, des vigiles, des commerçants, des habitants, des passants et des acteurs liés aux organismes publics, aux ONG, aux églises ainsi qu’au trafic de drogue. Ces observations nous ont progressivement permis d’appréhender l’ensemble des relations (entre consommateurs, mais aussi entre ceux-ci et les autres sujets impliqués) comme une modalité de territorialité itinérante (Perlongher 1987) centrée sur la zone de Luz, avec des occupations flexibles de l’espace (Arantes 1999) en fonction des types d’interventions auxquels les consommateurs sont soumis. Pendant les périodes de répression systématique, ces derniers occupent d’autres espaces de la ville (principalement dans le centre) de manière plus permanente, pratique adoptée à des échelles diverses au moins depuis 200018.

11Comme évoqué plus haut, nous avons également suivi des actions conduites par d’autres organismes établissant des relations avec des acteurs sociaux vulnérables de cette zone. Il convient ici de les mentionner de manière synthétique : le GMEL (Groupe femme, éthique et libération) et la Pastoral da Mulher Marginalizada (Pastorale de la femme marginalisée) liée à l’Église catholique. Ces organismes interviennent dans les rues voisines de celles où travaillent des professionnelles du sexe. La question de la consommation de crack y est devenue un sujet de préoccupation croissante, soit parce que la drogue est consommée et vendue par les plus âgées (en raison de la diminution progressive des clients), soit parce qu’elle est consommée par les plus jeunes, qui, pour se la procurer, baissent le prix de la passe (ou acceptent d’avoir des relations sexuelles sans préservatif), ce qui suscite des conflits avec les prostituées plus expérimentées (Silva 2000 : 54-63). La territorialité de la prostitution, qui se projette largement sur les espaces publics de cette zone (comme la gare de Luz ou le parc de Luz), ne coïncide assurément pas avec celle du crack (bien qu’il puisse y avoir des juxtapositions). On note également la présence dans ce même lieu d’organismes liés à la mouvance évangélique, comme la CENA (Communauté évangélique Nova Aurora) dont les activités (alimentation, hébergement, sports, alphabétisation, etc.) s’exercent dans les dépendances de l’association et s’adressent à un large éventail de personnes : enfants des rues, prostituées, SDF, travestis et consommateurs de drogues. Ces opérations d’assistance, d’aide à la réadaptation et à la réinsertion, sont toutes assorties de tentatives affichées de conversion religieuse. Plus récemment, l’Église baptiste a également réalisé des campagnes analogues où la conversion s’adresse plus spécifiquement aux consommateurs de crack. Ces actions visant à réadapter les individus par le travail se concentrent dans un espace appelé Cristolândia. On trouve dans cette zone un ensemble d’organismes qui se différencient par leur structure, leur façon de lever des fonds, les services qu’ils proposent, leurs finalités et les modalités d’intervention de leurs agents tant dans des lieux de vie que dans la rue. Ce dernier type d’activité intéresse plus directement notre enquête. D’une part, il éclaire les divers usages de l’espace par des sujets vulnérables (pour qui la consommation de crack est une pratique courante, quoique non exclusive), d’autre part, il met en évidence des aspects importants de l’interaction entre les membres de ces organismes et leur public cible, interaction qui passe notamment par des tentatives de création de liens durables de réciprocité, à travers la conversation, les conseils et les dons d’objets ou de brochures d’information. Les trajets récurrents effectués par les membres de ces associations permettent de reconstituer toute une territorialité de l’utilisation de l’espace.

12Sans prétendre ici analyser en profondeur la nature et la diversité de ces interventions, il est important de souligner que les pouvoirs publics ont récemment développé dans cette zone des opérations portant principalement sur les questions de santé, même si celles-ci s’inscrivent dans le cadre de politiques municipales plus amples qui reposent aussi sur la répression, le contrôle fiscal et administratif. Ceci nuit à l’efficacité des actions d’aide aux consommateurs de crack. En effet, ces derniers se voient, de ce fait, obligés de quitter le quartier et de circuler sans cesse dans la ville, ce qui empêche d’établir avec eux un dialogue régulier et donc de nouer des relations de confiance.

Réseaux de relations entre les habitants de Luz

13Notre enquête a permis de suivre et d’identifier un faisceau de pratiques à partir des interventions réalisées par les organismes opérant dans la zone de Luz. En revanche, la recherche sur la typologie des habitants et leur utilisation de l’espace a donné des résultats plus modestes. En effet, nous avons eu affaire à un ensemble assez hétérogène (et en général précaire) d’individus et, de plus, nous avons été confrontés à des situations déstabilisantes. La forte variation constatée dans les représentations concernant cracolândia, selon la localisation spatiale considérée, se retrouve (même si les logiques sont différentes) dans la façon dont les résidents nomment le quartier (Luz, mais également Santa Ifigênia, Campos Elíseos, Bom Retiro, Centro ou même cracolândia).

  • 19 Y compris squatteurs et habitants de taudis.
  • 20 Pour des raisons d’éthique, nous n’indiquerons pas le nom de cet immeuble, ni celui des autres où n (...)

14Tout le long de l’enquête, nous avons cherché à tester les réseaux et les connexions (inévitablement partiels) formés à partir de l’interaction initiale avec un habitant qui nous a reçus dans son appartement (ce qui n’a pas empêché d’établir simultanément d’autres contacts19). À l’époque, celui-ci était syndic d’un immeuble habité en grande partie par des immigrants nordestins, mais aussi des Asiatiques (Coréens et Chinois)20. Il ne considérait pas les nóias comme une réelle menace et il avait d’ailleurs hébergé chez lui pendant une courte période une consommatrice de crack. À cette époque, il voulait entreprendre des travaux de réhabilitation dans son immeuble mais des conflits avec d’autres résidants (un grand nombre d’entre eux avait un commerce informel dans les environs), qui finirent par une agression physique, l’ont amené à abandonner ses fonctions puis à quitter les lieux. Il avait en effet découvert un commerce clandestin de cocaïne dans l’immeuble.

15Nous sommes arrivés dans la deuxième habitation sur la suggestion de la première personne interrogée. Notre contact était également un syndic qui nous a permis d’approcher quelques résidants. Il nous a cependant fallu créer des espaces plus autonomes d’interaction avec ces derniers, car le syndic avait tendance à interférer fortement dans notre relation avec eux, tout en les présentant généralement de manière négative du fait de leur origine nordestine (comme dans l’immeuble précédent). Signalons que nous avons eu de nombreux entretiens avec une dame fabriquant des sucreries et des petits fours sur commande, qui vivait avec son mari et son fils et dont la fille habitait dans un autre appartement du même immeuble. Elle affirmait ne pas connaître le quartier, mais ses déplacements dans cette zone – pour livrer des commandes, aller à l’église, au supermarché, à la boutique de la loterie, chez le boulanger, chez ses amis, etc. – révélaient l’existence d’un réseau de solidarités. Elle avait fréquemment des échanges avec les consommateurs de crack qu’elle connaissait depuis onze ans (depuis qu’elle était venue vivre ici), discutant avec eux et leur donnant parfois un peu d’argent. Elle possédait en outre des informations très précises concernant les gens en situation précaire : nóias, SDF, ouvriers alcooliques, etc. Cet exemple atteste de l’existence de codes d’identification plus larges à partir desquels s’établissent des critères définissant le caractère de proximité ou de distance dans les relations (Simmel, 2005).

16Il faut également signaler qu’au cours de notre enquête, cette résidante a assisté à une réunion avec Andrea Matarazzo (alors maire du quartier de Sé et secrétaire chargée de la coordination des mairies de quartier) qui encourageait les syndics de la zone à rénover les immeubles, faute de quoi la municipalité les exproprierait pour s’en charger elle-même. Des travaux avaient donc commencé mais ils se heurtaient à la résistance d’une partie des locataires qui estimaient que ces améliorations pouvaient amener les propriétaires à augmenter les loyers. Un peintre qui travaillait à la rénovation de la façade a failli se tuer du fait d’une corde qui aurait été délibérément tailladée.

17Quelques mois après, une dame s’est suicidée en se jetant par la fenêtre. Veuve, elle avait un fils drogué qui habitait avec elle de manière intermittente et avec qui elle avait des heurts de plus en plus fréquents. Plusieurs femmes habitant dans l’immeuble (y compris la personne que nous avons régulièrement suivie dans le cadre de notre enquête) ont assisté à la messe du septième jour, mettant alors en évidence un réseau de relations de voisinage. Bien que le quotidien observé ne se réduise pas à cela, il faut admettre qu’une série de conflits violents ont émaillé notre étude. Nous avons commencé à enquêter dans un troisième immeuble où l’interlocutrice mentionnée plus haut avait résidé en tant que locataire. Nous avons fait la connaissance d’un jeune homme qui travaillait à l’administration de cette habitation. Nous avons appris plusieurs semaines plus tard, au cours d’une seconde visite, qu’il avait été tué. Certains indices suggèrent que la victime était impliquée dans l’achat et la vente d’appartements, tirant profit des informations privilégiées auxquelles son travail lui donnait accès. Il en résultait des frictions avec d’autres résidents. Du fait de ces événements, nous avons préféré interrompre l’enquête dans ce lieu.

  • 21 Parmi les divers articles à ce sujet, voir Fioratti & Castro (2009).

18En résumé, bien qu’on ait l’habitude d’entendre dire que de nombreux habitants sont totalement isolés dans leurs maisons ou leurs appartements en raison de la présence de la cracolândia21, il est clair que certains d’entre eux s’approprient le quartier et s’y déplacent, mettant ainsi en œuvre des stratégies spécifiques. Il y a de toute évidence des situations beaucoup plus préoccupantes que la présence des consommateurs de crack, comme, par exemple, les événements et les tensions qui sont survenus dans l’immeuble où nous avons enquêté. Ce sont des homicides, des agressions, des menaces, des pratiques caractérisées par divers degrés d’illégalité, des conflits concernant l’usage des fonds de la copropriété, des pratiques internes de spéculation immobilière, etc. D’autres situations conflictuelles (moins visibles à première vue), qui trouvent leur origine dans les interventions urbaines en cours ou sont amplifiés par celles-ci, mettent en lumière des problématiques allant au- delà des dynamiques de la réhabilitation urbaine. D’une certaine manière, le lieu des conflits se déplace, principalement du point de vue des acteurs locaux quotidiennement impliqués dans ce contexte.

Bars et commerces du secteur

19L’observation de territoires délimités par des bars, restaurants et magasins a constitué un autre axe de recherche. Dans ces cas, l’utilisation des rues configure des territorialités de loisirs populaires. On s’est ainsi attaché à l’espace compris entre le magasin d’instruments de musique Contemporânea et le bar et cafétéria Amarelinho (également connu sous le nom de Zebrinha) situés dans un même pâté de maison de la rue Général Osório à Luz. On a privilégié l’analyse des dynamiques de sociabilité durant la journée du samedi. Le choix d’un tel découpage spatial et temporel se fonde sur le programme des événements qui surviennent ce jour-là et sur la fréquentation particulière qui en découle : concerts de choro le matin, dans la salle Evandro do Bandolim, au fond du magasin Contemporânea ; samba, de l’après-midi jusqu’au soir, dans le bar Amarelinho. Nous avons cherché à inventorier les relations entre habitués, musiciens et propriétaires à travers les contacts qu’ils établissent entre eux.

  • 22 Dont les détails ne font pas l’objet de cet article.

20Le magasin Contemporânea, fondé en 1948, vend des instruments de musique principalement destinés à la pratique de genres typiques de la musique populaire brésilienne. Les concerts de choro se déroulent sur place (dans une pièce de quinze mètres carrés) depuis les années 1960 et réunissent des musiciens et des auditeurs (des deux sexes) en général relativement âgés, dont certains chantent également par intermittence. Cet établissement, selon certaines rumeurs, était susceptible d’être démoli du fait de la mise en œuvre du projet Nova Luz. Le propriétaire, inquiet, abordait fréquemment la question au cours de nos visites. Nous avons pu constater son engagement dans un groupe de commerçants opposés au projet22. Lorsque le concert de choro prend fin, une partie des habitués se déplace pour aller assister au samba du bar Amarelinho. Le samedi, le public du bar est très divers, mais il est principalement composé d’adultes dont la tranche d’âge est moins élevée que ceux qui assistent au concert de choro. Une partie des personnes présentes (y compris des touristes occasionnels) fréquente également les institutions culturelles des environs, ce qui relativise l’idée selon laquelle les visiteurs éviteraient à tout prix cette zone en raison des problèmes qu’on y rencontre.

21À diverses reprises, nous avons pu observer des conflits (parfois physiques) entre des serveurs et certaines personnes perçues comme une « menace » pour le lieu, que ce soit à l’intérieur du bar ou sur le trottoir (des clients attablés sont abordés pour obtenir de l’argent ou de la nourriture). Une de ces altercations impliqua un résident noir, connu des chercheurs, qui dut payer à l’avance sa consommation (pratique non usuelle dans ce bar) et en fut offensé.

  • 23 C’est son père qui est le propriétaire du bar Amarelinho ainsi que de trois autres dans la ville.

22Le groupe qui vient jouer le samedi s’appelle Centro do Samba. Il s’est formé à partir des liens de sociabilité entre les participants des présentations de choro et de samba de ce quartier. Entre 2002 et 2006, les musiciens ont participé au projet « Rua do Samba Paulista » qui s’est tenu là. Bien qu’ils circulent et se produisent dans d’autres bars de la ville, les membres de cette formation ont un certain attachement pour ce lieu tout en reconnaissant que sa localisation peut éloigner les clients. Nous avons pu approcher la directrice de cet établissement23 qui a su y mettre en œuvre une série de stratégies commerciales dont certaines impliquaient les pouvoirs publics. L’endroit a ainsi abrité pendant un temps un atelier animé par l’artiste plastique Maria Bonomi (Ateliê Amarelo) avec le soutien du secrétariat d’État à la Culture ; plus récemment il a servi de cadre à une opération permettant d’offrir des déjeuners aux fonctionnaires de cette même administration. En revanche, la tentative d’y créer une auberge de jeunesse n’a pas abouti en raison des craintes exprimées par les premiers clients quant à la fréquentation nocturne des rues. La patronne a reconnu que les serveurs recevaient l’instruction d’agir de manière musclée contre d’éventuels consommateurs de crack (ou, comme nous l’avons vu, d’autres types de personnes considérées comme génantes). Elle a également reconnu disposer d’un réseau privé de vigiles en civil circulant dans le secteur. Malgré les rumeurs sur la possible destruction du bar, la responsable de l’établissement appuie (bien que de façon conjoncturelle) les interventions liées au projet Nova Luz.

Des réseaux intensifs de relations

23Un autre bar, à proximité, nous a permis de découvrir d’autres aspects importants des réseaux de relations locales, leur densité et leur intensité, ainsi que leur capacité à illustrer et à synthétiser divers thèmes abordés jusqu’ici. Il s’agit d’un établissement curieusement appelé Nova Luz mais qui, malgré cette dénomination ambiguë, n’entretient aucune relation avec le projet mentionné plus haut. Ce lieu est en effet le siège social d’une équipe de foot amateur, dont le nom originel était « Portuguesinha da Luz ». Un jour, elle a perdu un match de tournoi par forfait (les joueurs n’étant pas arrivés à temps sur les lieux) et s’est vue éliminée. Cet événement malencontreux l’a obligé à changer de nom pour participer au tournoi suivant. La Portuguesinha da Luz est devenue « Nova Portuguesinha da Luz » ou « Nova Luz ».

  • 24 L’équipe bénéficie de l’aide d’un habitué de la zone qui habite dans le voisinage et jouait autrefo (...)
  • 25 Une grande partie d’entre eux n’est arrivé à São Paulo que récemment.

24Le gérant de ce bar est également le patron et le régisseur de l’équipe de football qui joue tous les quinze jours dans plusieurs endroits de la ville24. Il assume la plus grande partie des dépenses, notamment la location du terrain. Né dans le Nordeste, il est venu à São Paulo pour essayer de devenir footballeur professionnel, puis il a travaillé comme vigile dans une société privée et, enfin, dans le commerce. Il vit dans le quartier et habite un immeuble – dont il est actuellement syndic-adjoint – à côté du bar. En outre, il participe depuis quelques années à l’un des mouvements sociaux pour l’accès au logement dans le centre-ville. Ses liens avec le Centro et les activistes qui y agissent sont également attestés par la composition de l’équipe Nova Luz. En effet, la majorité des joueurs habite dans ce quartier et un grand nombre d’entre eux participe aux squats d’immeubles (déjà mentionnés) qui y sont organisés, aux côtés des sans domicile fixe et autres occupants illégaux. Une partie de ces derniers, en général des immigrants nordestins25, a aussi sa propre équipe d’amateurs, laquelle constitue en quelque sorte le porte-drapeau de l’un des mouvements d’occupation de la rue Mauá (le Mouvement des sans-toits du Centre, MSTC) et entretient des alliances conjoncturelles avec l’équipe Nova Luz.

  • 26 Environ 3,63 euros (taux du 17 décembre 2012).

25Il arrive parfois que des consommateurs de crack entrent dans ce bar, mais ils en sont immédiatement chassés. Ce type de fréquentation a cependant beaucoup diminué : quelques années auparavant, le propriétaire de cet établissement avait compté, en début de soirée, jusqu’à plus de deux cent usagers de crack des environs. Il se demandait aussi comment ils arrivaient à acheter leur dose – 10 reais chacune26, que plusieurs consommateurs se partagent –, même s’il suspectait des vols de divers types comme l’un des moyens d’y parvenir.

26D’une manière générale, la référence aux nóias apparaît au cours de conversations entre les joueurs de l’équipe (qui ne sont bien évidemment pas des consommateurs de crack), souvent sur le mode de la plaisanterie. Par exemple, un jeune homme qui demandait un jour pourquoi il n’avait pas été convoqué pour jouer s’est entendu répondre de la part du responsable : « Parce que tu es un nóia », ce qui provoqua l’hilarité générale.

27En 2007, le bar Nova Luz a été à deux doigts d’être détruit, à la suite d’une inspection qui, souvent, précède l’expropriation. Ce ne fut pas le cas car les avocats consultés ont pu prouver que la démarche était illégale. Après cet événement et la démolition de maisons, commerces et immeubles situés aux alentours, la situation s’est améliorée de manière surprenante pour le gérant. Il a en effet conclu un accord avec la municipalité pour répondre à la demande de près de trois cents ouvriers travaillant à la reconstruction de cette zone : son bar, qui peut recevoir environ trente personnes, les a accueilli pour déjeuner. Certains jours, on en compte quatre-vingt, voire davantage). Et il a été envisagé de convier un groupe pour jouer du samba, comme cela se fait dans d’autres lieux des environs.

  • 27 Le parking existe depuis la démolition, réalisée à titre privé, des immeubles construits sur le ter (...)
  • 28 Quartier très connu pour la vente d’articles électroniques.

28Ce genre d’heureux hasard et cette habileté à négocier ne sont pas l’apanage de tous les commerçants de cette zone qui a fait l’objet de plusieurs démolitions en 2007. Mi-2008, nous avons pu établir des contacts avec un certain nombre d’entre eux. Il y en avait un qui était installé là depuis quatorze ans comme gérant de parking sur un terrain qu’il louait27. Sa clientèle était principalement constituée par des personnes travaillant dans les magasins, des clients de Santa Ifigênia28, ainsi que des employés des bureaux du quartier. L’emplacement ayant fait l’objet d’une décision d’expropriation par la municipalité, sans que le propriétaire n’oppose la moindre résistance, le gérant bataillait dur à cette époque pour obtenir une indemnisation de la justice équivalant à la valeur du commerce.

  • 29 Nous avons contacté à la même époque le propriétaire de trois hôtels de ce quartier dont l’un avait (...)

29Une commerçante – originaire du Ceará et résidant à São Paulo depuis vingt-trois ans – avait, quant à elle, perdu sa buvette après avoir été expropriée (un mois après avoir reçu une notification) et, même sans avoir encore reçu de compensation, elle avait ouvert un autre établissement à quelques pâtés de maisons de là ; mais ses affaires ne marchaient pas bien. Il y avait également une femme, originaire d’Alagoas et vivant depuis vingt-six ans à São Paulo, qui avait longtemps habité une maison ancienne située dans la zone de démolition, dont le rez-de-chaussée abritait une toute petite épicerie. Son expropriation et la démolition de son bien ayant entrainé le chômage de son mari, elle fut obligée de travailler comme femme de ménage. Avec l’argent obtenu à titre de dédommagement, le couple essayait d’obtenir un emprunt pour acheter une autre maison dans un lotissement de la banlieue en construction ; en attendant, ils logeaient dans un studio du quartier avec leurs trois enfants. Elle affirmait que d’autres personnes étaient dans le même cas, qu’elles auraient emménagé dans des endroits proches et plus précaires ou dans des pensions, et quelques-unes seraient même retournées dans leur région d’origine29.

30Revenons aux réseaux de relations dans le bar Nova Luz. Leur observation fait surgir un ensemble de questions significatives, surtout lorsqu’on les articule avec d’autres perspectives de recherches. En effet, cet établissement a non seulement échappé à la menace de démolition mais, aujourd’hui, il bénéficie aussi d’accords avec le pouvoir local. Cet exemple incite à ne pas s’en tenir à un dualisme qui ne considérerait que les partisans ou les opposants aux interventions urbaines locales en cours. Une partie des joueurs de l’équipe réside dans les environs (à commencer par le patron) et certains prennent part aux squats d’immeubles inhabités dans cette zone. Les réseaux de relations qui se constituent sont définis en fonction des projets successifs des mouvements de lutte pour le logement, mais ils s’ouvrent également à d’autres connexions. L’homme qui gère ce bar et dirige cette équipe de football dispose sans aucun doute d’une importante capacité relationnelle, notamment grâce aux liens qu’il a noués avec les pouvoirs publics, l’univers du football amateur, les habitants (du fait de son statut de riverain) et les mouvements de lutte pour l’accès au logement. Ce réseau englobe aussi les groupes les plus vulnérables qui transitent dans le secteur. Cet exemple témoigne d’une participation situationnelle à divers univers sociaux territorialement proches. Le contexte quadrillé par les observations ethnographiques (dans le bar lui-même aussi bien que dans les lieux et les situations articulés à celui-ci) révèle ici une situation caractérisée par des configurations relationnelles et des décisions politiques qui ne s’inscrivent pas forcément dans le modèle dualiste, polarisé et isolé qui oriente en général les récits sur cet espace urbain.

Pour (ne pas) conclure

31Cette enquête vise à apporter une contribution à la compréhension anthropologique d’un secteur situé dans une zone centrale de São Paulo ayant été l’objet d’une série de programmes urbains. Les actions et les querelles qui en ont résulté ont considérablement augmenté les thèmes à analyser, en leur conférant une densité et une envergure qui ne se laissent pas facilement appréhender par une analyse fondée seulement sur une observation figée et partielle de certaines interactions, lieux et situations. Il a donc été nécessaire de se limiter à un spectre plus réduit qui pourra être élargi en fonction des développements ultérieurs de la recherche. En outre, les tensions et les conflits en cours impliquent des solutions complexes, auxquelles l’étude ne peut contribuer que de manière incomplète. Des avancées ethnographiques significatives, aussi bien du point de vue de l’observation que de la mise en relation des situations identifiées, ont été obtenues. Toutefois, à diverses reprises, il a fallu interrompre l’enquête du fait des risques encourus, des refus (de la part de personnes ou d’institutions) ou de la difficulté à accompagner certains processus. Ainsi, peut-on dire que le quartier et le secteur de Luz manifestent des dynamiques très amples à propos desquelles l’analyse ne saurait être ni spéculative ni normative.

32Nous avons cherché à aborder ces questions avec un regard attentif aux entre-deux et aux interstices de la polarisation exprimée par le contraste Nova Luz – cracolândia mentionné plus haut. Celle-ci, qui apparaît de manière récurrente dès que cette zone est évoquée, explicite ou éclaircit certains conflits, mais elle tend aussi à laisser dans l’ombre d’autres questions pertinentes ou certains des acteurs constitutifs de ce contexte. Le traitement ethnographique de la notion même de cracolândia a gagné en consistance, révélant une territorialité spécifique, fluctuante ou itinérante, une capacité à migrer vers d’autres zones plus proches ou lointaines, ce qui remet largement en cause les tentatives presque obsessionnelles de vouloir la figer sur son territoire. Nous avons vu également que de nombreux heurts et tensions s’inscrivent dans des dynamiques plus larges que celles des interventions urbaines et de l’opposition à celles-ci. Constater que ces espaces sont occupés par un ensemble de réseaux et de connections permet enfin de relativiser l’idée selon laquelle les univers sociaux sont isolés et en permanente opposition.

  • 30 D’après notre entretien avec les responsables de cette association.
  • 31 Voir les détails en ligne à l’adresse : http://apropriacaodaluz.blogspot.com.br/ (consultaté le 20 (...)
  • 32 Cela a été le cas, en 2010, de la démolition, amplement commentée par les grands journaux, d’un cen (...)

33De toute évidence, ces polarités ne se réduisent pas à un plan rhétorique. Elles sont en effet principalement déterminées par les interventions des pouvoirs publics. C’est le cas de la répression policière récurrente des consommateurs de crack et des auteurs d’autres actes illégaux ou encore de la promulgation de nouvelles lois facilitant les démolitions et la création de nouveaux paysages urbains. Ces polarités contribuent à réaffirmer et à fixer une représentation où les univers sont totalement distingués et opposés. Il ne s’agit pas d’un simple processus de définition de champs en opposition mais d’une redéfinition processuelle de ces derniers, comme dans le cas, non approfondi ici, d’une association locale  : l’Association des commerçants du quartier de Santa Ifigênia. Celle-ci avait d’abord pensé qu’elle pourrait collaborer au projet Nova Luz et en tirer profit, mais elle a très vite constaté que cela pouvait être fortement préjudiciable à ses intérêts. Elle s’y est alors ouvertement opposée30. Certaines associations ont vu parfois le jour à la suite des opérations urbaines comme par exemple Amo a Luz (J’aime Luz )31 composée d’habitants dont la représentativité et la légitimité ont été construites graduellement et a posteriori. Ainsi, il est important de signaler qu’au cours même de l’enquête, des acteurs politiques locaux ont émergé et que les processus urbains en cours ont acquis une meilleure visibilité. Lors des étapes initiales de la recherche, nous avions, par exemple, noté que les habitants et les commerçants, victimes des premières interventions urbaines, avaient dû s’adapter seuls à ces nouvelles situations. Cependant, du fait de l’importance des projets ultérieurs32 ou en raison de l’appréhension suscitée par la loi sur les concessions urbaines déjà mentionnée, des formes d’organisation politique locale ont vu le jour.

  • 33 En ayant à l’esprit la référence simmelienne (2005), il est des rapprochements qui peuvent signifie (...)

34On observe l’existence de différents conflits, plus divers que ne le laisse penser la polarité déjà évoquée. En reprenant un argument déjà avancé plus haut, il est possible de dire que, et ce avant tout du point de vue des acteurs sociaux locaux, le lieu des conflits se déplace. Nos entretiens montrent que le contact avec les consommateurs de crack n’est pas forcément évité à tout prix ; il peut même être alimenté par des échanges incluant des conversations, des dons ou, éventuellement, des relations personnalisées et plus durables33. Il y a, de toute façon, des situations bien plus angoissantes pour les habitants, comme celles créées par les conflits et événements parfois dramatiques qui se produisent dans les immeubles observés.

35Un commentaire final, qui fait écho à la thématique de ce dossier – les hétérotopies urbaines contemporaines – sans prétendre pour autant épuiser les possibilités analytiques de la notion forgée par Foucault (1994), est nécessaire. Il est certain que les frontières délimitent et fondent l’altérité de certains espaces. Cependant, en valorisant la puissance de ces frontières et les impératifs qu’elles génèrent, on a parfois tendance à conforter l’idée de spatialités fixes et fermées. Or, en adoptant un regard plus nuancé, qui valorise les liens et les pratiques sociales créés quotidiennement à travers (ou malgré) ces frontières, cette étude ethnographique montre leur porosité. Même des espaces circonscrits par une vision stigmatisante, comme c’est le cas ici, sont en fait traversés par des relations multiples.

36Ainsi, notre contribution consiste en un regard ethnographique attentif aux sujets et aux processus qui ne sont pas immédiatement visibles et dans lesquels les intérêts et les conflits renvoient souvent à des dimensions distinctes de celles qui sont généralement mentionnées dans ce contexte. Quoiqu’il en soit, nous avons également vu comment plusieurs acteurs font face à ces types de situations sans prendre a priori position politiquement pour ou contre les interventions en cours. Au contraire, leur opinion se construit à partir de l’évaluation des forces et des alliances possibles, ce qui inclut parfois, comme nous le montrons dans plusieurs descriptions ethnographiques, des accords partiels ou conjoncturels avec les pouvoirs publics. Ce phénomène est observable aussi bien sur le plan des décisions politiques cruciales que sur celui du droit à occuper un lieu de manière permanente, et il inclut la manière de s’approprier l’espace urbain et d’interagir avec d’autres acteurs – stigmatisés ou non – dans leur propre quotidien.

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Notes

1 Tout au long de cet article, les termes cracolândia (littéralement « terre du crack ») et nóia (abréviation pour paranóia) qui sont des références populaires aux consommateurs de crack, apparaîtront en italique plutôt qu’entre guillemets, car je me réfère à ces derniers comme catégories analytiques, élaborées par les acteurs selon plusieurs modalités et en fonction du contexte. Quand je renvoie directement aux discours des sujets étudiés, les termes sont entre guillemets.

2 Problèmes soulevés par divers articles parus dans les journaux Folha de São Paulo et O Estado de São Paulo en janvier 2012.

3 Voir carte page 53.

4 Partido da Social Democracia Brasileira (Parti de la social-démocratie brésilienne).

5 Voir détails en ligne à l’adresse : http://www.novaluzsp.com.br/ (consulté le 28 mars 2012).

6 Vagner Magalhães, « Kassab diz que terá gabinete na Cracolândia », Portal Terra, 23 avril 2009. http://noticias.terra.com.br/brasil/politica/kassab-diz-que-tera-gabinete-na-cracolandia,26fc68f40d94b310VgnCLD200000bbcceb0aRCRD.html (consulté le 23 avril 2009).

7 Littéralement « bouche d’ordures » (Ndt).

8 Pour une analyse systématique de la réhabilitation et du lexique qui lui est attaché, voir Frúgoli Jr. (2000) et Peixoto (2009).

9 Cette recherche a été conduite depuis 2007, avec le soutien du CNPq (2008-2010) et avec la participation d’Enrico Spaggiari, Guilhermo A. Aderaldo, Natália H. Fazzioni, Bianca B. Chizzolini, Bruno Puccinelli, Weslei E. Rodrigues, Júlio C. Talhari et Laís Silveira que je remercie pour leurs lectures de ce texte et leurs suggestions. Giancarlo M. C. Machado, Inácio C. D. de Andrade, Isadora Z. da Fonseca, Karina Fasson, Juliana B. Cunha, Marina R. de O. Saraiva, Jessica Sklair, Carlos F. R. Aquino, Daniel de Lucca R. Costa, Marina A. Capusso, Paula S. D. Faria et Fábio C. Julião ont aussi collaboré à ce travail. Tous font ou ont fait partie du groupe d’études d’anthropologie de la ville (GEAC-USP) que je coordonne. Je suis également reconnaissant à toutes les personnes ayant participé à cette étude. Je remercie Emilie Audigier pour la traduction qui a été possible grâce au Programme de pos-graduation d’Anthropologie sociale de l’USP et Marina Frúgoli pour la réalisation de la carte de cet article.

10 Voir comment s’effectue cette approche par exemple dans l’étude historiographique de Guimarães (1977).

11 On peut citer sans prétendre être exhaustif les travaux de Silva (2000), Kara-José (2007) et Moreira (2008).

12 « [...] tout se rattache aux pratiques urbaines qui s’insinuent à l’intérieur même des procédés disciplinaires décrits par Foucault. Certeau définit parfaitement sur ce point un déplacement décisif et explicite par rapport au schéma foucaldien : je voudrais suivre certains de ces procédés – multiformes, résistants, souples et obstinés qui échappent à la disciplinesans être pour autant en dehors du champ où celle-ci s’exerce. Certeau mettait alors en cause en même temps la position de Sirius et une procédure qui amène au dilemme obligeant à choisir entre les conditions de possibilité de l’action et l’étude des pratiques. L’attention au quotidien permet en elle-même de restituer l’espace vécu et l’inquiétante familiarité de la ville. » (Dosse 2004 : 83-84, c’est l’auteur qui souligne)

13 Pour une lecture plus détaillée de chaque axe de recherche de la présente étude, voir Ponto Urbe, revue du centre d’anthropologie urbaine de l’USP (http://www.pontourbe.net/edicao11-dossie-luz).

14 La carte présentée dans cet article indique seulement la plus forte concentration de consommateurs de crack de notre enquête mais, bien évidemment, elle ne signale pas les divers endroits où on peut les trouver comme, par exemple, les places Júlio Prestes et Princesa Isabel, certains endroits de la rue Helvétia et, le soir, l’angle des rues Guaianazes et Gusmões (au sud-ouest de la zone de démolition à l’intérieur du périmètre du projet Nova Luz où, avant 2007, dominaient de telles concentrations).

15 Pour une première étude plus systématique à ce sujet, voir Mingardi & Goulart (2001).

16 Le terme nóia dérive de paranóia, en référence à l’état mental qui découle d’une consommation régulière de crack.

17 Cette approche (Frúgoli Jr. & Spaggiari 2011) s’inspire partiellement de Bourgois (2003), bien que nous adoptions un point de vue ethnographique sur les consommateurs de crack, et non sur les trafiquants.

18 D’après des articles parus dans la Folha de São Paulo dès 2000.

19 Y compris squatteurs et habitants de taudis.

20 Pour des raisons d’éthique, nous n’indiquerons pas le nom de cet immeuble, ni celui des autres où nous avons enquêtés et qui sont évoqués dans cet article.

21 Parmi les divers articles à ce sujet, voir Fioratti & Castro (2009).

22 Dont les détails ne font pas l’objet de cet article.

23 C’est son père qui est le propriétaire du bar Amarelinho ainsi que de trois autres dans la ville.

24 L’équipe bénéficie de l’aide d’un habitué de la zone qui habite dans le voisinage et jouait autrefois avec ce club jusqu’au jour où il s’est sérieusement blessé et a été réduit à s’occuper des maillots et parfois à arbitrer les rencontres.

25 Une grande partie d’entre eux n’est arrivé à São Paulo que récemment.

26 Environ 3,63 euros (taux du 17 décembre 2012).

27 Le parking existe depuis la démolition, réalisée à titre privé, des immeubles construits sur le terrain.

28 Quartier très connu pour la vente d’articles électroniques.

29 Nous avons contacté à la même époque le propriétaire de trois hôtels de ce quartier dont l’un avait déjà été démoli et un autre était menacé de l’être. Cependant, il n’a pas été possible d’établir une interaction plus durable avec cet homme qui se montrait très réservé.

30 D’après notre entretien avec les responsables de cette association.

31 Voir les détails en ligne à l’adresse : http://apropriacaodaluz.blogspot.com.br/ (consultaté le 20 décembre 2012).

32 Cela a été le cas, en 2010, de la démolition, amplement commentée par les grands journaux, d’un centre commercial de magasins de prêt-à-porter (espace qui auparavant avait abrité l’ancienne gare routière de la ville) afin d’y construire un complexe culturel (voir sur la carte la zone de démolition, extérieure au périmètre du projet Nova Luz).

33 En ayant à l’esprit la référence simmelienne (2005), il est des rapprochements qui peuvent signifier des manières d’établir une distance.

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Pour citer cet article

Référence papier

Heitor Frúgoli Junior, « Variations sur un quartier du centre de São Paulo »Brésil(s), 3 | 2013, 49-67.

Référence électronique

Heitor Frúgoli Junior, « Variations sur un quartier du centre de São Paulo »Brésil(s) [En ligne], 3 | 2013, mis en ligne le 06 mai 2013, consulté le 17 mars 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/bresils/414 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/bresils.414

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Auteur

Heitor Frúgoli Junior

Heitor Frúgoli Jr. est professeur au département d’anthropologie de l’Université de São Paulo (USP).

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