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I. Le Moyen Âge fait-il vendre?

Dessine-moi un dragon : une créature imaginaire pour raconter le Moyen Âge ?

Lucie Herbreteau

Résumé

Cet article s’applique à étudier les ouvrages de littérature jeunesse présentant des dragons comme personnages principaux, en se concentrant sur la tranche d’âge 3-6 ans, afin de savoir si le dragon, créature imaginaire par excellence, permet de découvrir le Moyen Âge, période historique bien réelle. L’article fait d’abord un état des lieux de la présence du dragon dans la littérature jeunesse, en s’intéressant plus particulièrement à la tranche 3-6 ans. Une deuxième partie se concentre sur la manière dont un enfant peut apprendre le Moyen Âge par la figure du dragon et des autres personnages gravitant autour de lui. Enfin, une troisième partie démontre comment le dragon offre surtout au jeune lecteur une première approche de la littérature médiévale. Dans la veine du médiévalisme, cet article analyse l’héritage littéraire médiéval, sa réutilisation et sa transmission dans la littérature jeunesse contemporaine.

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Texte intégral

1Sur la première page du livre Peppa Pig visite un château fort, Peppa et son petit frère sont tout excités à l’idée de visiter un château médiéval avec leurs parents. Alors que Peppa espère rencontrer des chevaliers, son petit frère George, lui, annonce qu’il voudrait voir un dragon. De prime abord, cette remarque du jeune porcelet pourrait surprendre, d’autant plus qu’elle intervient avant même le début de la visite du château. Pourtant, cela semble presque évident pour les enfants Pig, personnages extrêmement populaires auprès des 3-6 ans, d’associer Moyen Âge, chevaliers et dragons. Pour un adulte, le dragon est une créature fabuleuse, fruit de l’imagination d’artistes, animal fantasque et fantastique qui se trouve principalement dans les œuvres de fantasy. Pour un enfant en revanche, et surtout un jeune enfant, chez qui la frontière entre réel et imaginaire est floue, voire inexistante, le dragon est souvent un animal comme les autres. Quoi de plus normal, donc, que de lui attribuer un contexte : les vaches paissent dans les champs, les lions vivent dans la savane, et les dragons habitent les châteaux forts médiévaux. Mais cela soulève un énorme paradoxe : si la vache et le lion existent et servent, entre autres, à illustrer les paysages de la campagne ou de la savane africaine, comment une créature imaginaire telle que le dragon peut-elle être associée de manière presque automatique à une période historique bien réelle comme le Moyen Âge? Par extension, le dragon peut-il devenir un moyen de découvrir le Moyen Âge, et ainsi un argument de vente pour des parents soucieux de lier lecture et apprentissage ? Cet article tentera de répondre à cette question, tout d’abord en faisant un état des lieux de la présence du dragon dans la littérature jeunesse. Dans un second temps, en étudiant la part d’historicité apportée par les œuvres étudiées, nous chercherons à découvrir quel Moyen Âge y est représenté et s’il peut être source d’apprentissage. Enfin, nous aborderons ces œuvres sous un angle plus littéraire en nous intéressant à la manière dont le dragon semble être une porte ouverte sur la littérature médiévale.

Le dragon : une créature appréciée dans la littérature jeunesse

  • 1 Base de données WorldCat, filtres de recherche : mot-clé « dragon » ; langue « française » ; public (...)
  • 2 Site internet FNAC, filtres de recherche : mot-clé « dragon » ; rayon « album 3-6 ans ». Recherche (...)
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  • 4 Site internet Librairies Indépendantes, filtres de recherche : mot-clé « dragon » ; rayon « jeuness (...)

2Tout d’abord, il ne fait aucun doute que le dragon occupe une place de choix dans le panorama de la littérature jeunesse. La base de données WorldCat recense, uniquement sur ces dix dernières années, 3 472 ouvrages jeunesse publiés en français avec le mot « dragon1 ». Une recherche sur le site de la Fnac, dans la catégorie littérature jeunesse, album 3-6 ans avec le mot clé « dragon » donne 618 titres2, et la même recherche sur Amazon nous propose plus de 2000 résultats, uniquement pour les titres en français3. Enfin, le site Librairies Indépendantes suggère 213 titres sur des critères similaires4. Un large balayage des maisons d’édition ayant une collection jeunesse (Gallimard, Auzou, Seuil, Flammarion, Bayard, Milan, École des Loisirs, etc.) donne toujours au moins un résultat avec le même mot-clé, généralement une petite dizaine par maison d’édition. Qui plus est, ces recherches se font uniquement sur le titre, et non sur l’intégralité de l’histoire, elles omettent donc les ouvrages comptant un dragon, mais dont le nom ne figure pas dans le titre.

3Parmi ces nombreux ouvrages jeunesse, on distingue quatre types de dragons :

  • un dragon sans ancrage historique, évoluant dans un univers atemporel, servant généralement à dresser un parallèle avec l’enfant qui grandit (par exemple, Le Dragon fier de lui, de Christophe Boncens aux éditions Beluga) ;

  • un dragon de type asiatique, évoluant dans un monde évoquant la Chine ou le Japon, qui sert davantage à partager une culture étrangère (par exemple, Petit Dragon, de Christoph Niemann aux éditions Gallimard) ;

  • un dragon dans un contexte contemporain, entouré de repères très modernes comme les nouvelles technologies, mettant en relief les frontières entre réel et imaginaire ou passé et présent (par exemple, Les Dragons, ça n’existe pas, de Jack Kent aux éditions Mijade) ;

  • et enfin, un dragon dans un contexte médiéval ou médiévalisant, cette fois-ci entouré de marqueurs bien médiévaux (par exemple, Le Chevalier Chaussure, de Charlotte Meriaux aux éditions Milan).

4L’analyse des résultats donnés par le site de la Fnac, cités ci-dessus, montre que ces deux dernières catégories représentent environ les trois quarts des occurrences, avec un nombre légèrement plus important de dragons médiévaux (39%) que de dragons contemporains (30%). Au regard de ces résultats, il semble clair que le dragon, et surtout le dragon médiéval, fait vendre.

  • 5 Les ouvrages constituant le corpus sont présentés en bibliographie à la fin de cet article.

5Pour cette étude, un corpus de dix-huit albums de diverses maisons d’édition a été constitué, additionné d’un exemplaire du magazine Les Belles Histoires5. Ces textes ont été rédigés en français ou sont des traductions françaises d'œuvres en anglais, et sont tous adressés aux 3-6 ans. Ils ont également tous été publiés dans les années 2010-2020, sauf La Princesse et le dragon qui date de 1980, mais l’édition française utilisée pour cette étude date de 2020, et Ne dérangez pas les dragons !, dont la première édition date de 1988, mais réédité en 2019. Ces ouvrages présentent tous un dragon comme protagoniste ou occupant une place essentielle dans l’histoire, le tout dans un contexte médiéval ou médiévalisant, et, pour un cas, un contexte historiographique médiéval.

  • 6 Bruno Dubuc, « Le développement cognitif selon Piaget », Le Cerveau à tous les niveaux, blog financ (...)
  • 7 « Le développement du cerveau de 3 à 5 ans », Naître et Grandir, site de la fondation Lucie et Andr (...)
  • 8 Jeanne Guillaume, « Âges et périodes sensibles Montessori », Guide Montessori. [en ligne] https://g (...)

6En outre, cette étude se concentre uniquement sur les 3-6 ans. L’intérêt de ce public est tout d’abord que, du fait que l'enfant ne sache pas ou commence tout juste à lire, les livres sont largement illustrés, ce qui permet une première approche très visuelle du Moyen Âge, ou du moins d’un haut Moyen Âge très graphique, avec ses repères visuels distinctifs – nous y reviendrons. Mais surtout, cette tranche d’âge est significative dans le développement de l’enfant, notamment avec le début de la scolarité. En effet, selon Jean Piaget, cette période correspond au deuxième stade de développement cognitif qui « se caractérise entre autres par l’avènement du langage, l’enfant alors devient capable de penser en terme symbolique, de se représenter des choses à partir de mots ou de symboles6 ». Pendant cette période, l’enfant devient aussi plus conscient du monde qui l’entoure, il développe sa créativité et son imagination, c’est d’ailleurs la période de l'ami imaginaire. Conséquence directe de tout cela, les histoires fascinent l’enfant7. Entre 3 et 5 ans et demi, c’est d’ailleurs la période sensible de la lecture selon Maria Montessori8. Pendant ces périodes, l’enfant peut porter un intérêt très marqué à un sujet, un domaine, et y consacrer la majeure partie de son temps libre. Ainsi, d’une part l’enfant sera en grande demande de lectures et d’histoires, et d’autre part, il choisira ces histoires en fonction des domaines qui le passionnent. Il n’est d’ailleurs pas rare de voir un enfant de cet âge maîtriser les noms de nombreux dinosaures, les marques de tracteurs ou les armes médiévales.

  • 9 Bruno Dubuc, art. cit.,
  • 10 Thanujeni Pathman et Patricia J. Bauer, « La mémoire et le développement précoce du cerveau », dans (...)
  • 11 María Vélez , « Qu'est-ce que la mémoire déclarative? », Nos Pensées, blog de psychologues, 2023. E (...)

7À cet âge, l’enfant fait également la distinction entre passé et futur, bien qu’il reste majoritairement orienté vers le présent et les situations physiques concrètes. Il a des difficultés à concevoir le temps au-delà du hier-aujourd’hui-demain, et à manipuler des concepts, surtout temporels, abstraits9. Parallèlement, cette période est marquée par le développement de la mémoire déclarative, face à la mémoire non déclarative qui comprend les habiletés d’apprentissage (comme savoir faire de la trottinette) et non accessible à la conscience10. La mémoire déclarative, au contraire, garde les souvenirs qui peuvent être suscités consciemment. Elle comprend, d’une part, la mémoire épisodique qui stocke les souvenirs liés aux événements personnels, et d’autre part, la mémoire sémantique qui se réfère aux connaissances de la langue et du monde qui nous entoure, donc une connaissance générique et décontextualisée11. Dans le cadre de notre étude, cette mémoire sémantique qui se développe pendant cette période de l’enfance est liée ici à l’Histoire, et notamment à la découverte du Moyen Âge.

8Par conséquent, l’enfant de 3-6 ans est le destinataire idéal de l’histoire imaginaire, de la création et de l’affabulation, tout en étant capable de comprendre des structures et des enjeux narratifs plus complexes afin d’acquérir des compétences cognitives et des connaissances théoriques plus abstraites. Là où l’enfant plus âgé dirait « ce n’est pas possible, cela n’existe pas », le 3-6 ans accepte l’irrationnel comme étant normal, tout en l’ancrant dans sa propre réalité. Il acquiert petit à petit un cadre encyclopédique authentique dans lequel il entrepose des éléments plus ou moins réels qui se mélangent naturellement. Dans cet environnement à la frontière entre réalité et imaginaire, le dragon se présente comme une créature de choix.

Un dragon pour découvrir le Moyen Âge

9De quelle manière une créature imaginaire peut-elle toutefois permettre de découvrir une période historique bien réelle ? Tout d’abord, seuls deux ouvrages font clairement référence au Moyen Âge. L’album Ne dérangez pas les dragons ! commence ainsi « Il y avait une fois, au Moyen Âge, une famille de dragons qui habitait une grande forêt » (p. 7) et dans Peppa Pig visite un château fort, Peppa et sa famille font la visite historique d’un authentique château du Moyen Âge, bien que la période ne soit pas directement nommée. Néanmoins, cette absence récurrente de mention « Moyen Âge » semble logique du fait que les 3-6 ans n’ont pas connaissance de la temporalité historique, comme précédemment expliqué.

10Nonobstant, les références à cette période y sont claires, même si elles se font à travers des topoï simples et basiques. Et s’il est difficile pour un enfant qui connaît à peine les jours de la semaine de concevoir la réalité d’une époque longue de mille ans et qui s’est terminée il y a plus de cinq siècles, elle peut néanmoins s’appréhender par d’autres moyens que l’étude historique. Notons qu’un apprentissage encyclopédique du Moyen Âge n’est pas l’objectif affiché de ces ouvrages, contrairement aux collections « Mes p’tits docs » chez Milan ou « Connais-tu » chez Larousse Jeunesse par exemple, mais l’intrigue autour du dragon peut rapidement devenir un prétexte pour introduire un Moyen Âge historique, notamment ses spécificités architecturales, vestimentaires, ou sa terminologie. Bien évidemment, cet apport encyclopédique latent présente un intérêt d’une part pour l’enfant qui préférera l’histoire au livre documentaire à proprement parler, et d’autre part pour le parent-acheteur qui y voit un intérêt pédagogique par le divertissement.

  • 12 Catherine Brasselet, « La figure chevaleresque dans la littérature pour la jeunesse : représentatio (...)

11Ainsi, dans les albums jeunesse étudiés, le Moyen Âge se voit accoler des symboles forts que l’enfant va naturellement associer à la période, symboles dont le dragon fait partie. Ce dragon médiéval appartient alors à un tout, une sorte de « kit » médiéval qui comprend également le château fort, le chevalier et la princesse, et si le dragon n’est pas proprement historique, ses acolytes littéraires le sont, donnant au jeune lecteur un avant-goût du Moyen Âge. À la manière des romans médiévaux pour la jeunesse qui « profit[ent] du prétexte narratif pour dispenser un savoir sur une époque12 », il semblerait que les albums du corpus étudié servent également cet objectif.

  • 13 Cécile Boulaire, Le Moyen Âge dans la littérature pour enfants, Rennes, Presses Universitaires de R (...)

12Ce Moyen Âge présenté aux enfants commence bien évidemment par le château fort, qui est, pour Cécile Boulaire « à la fois nécessaire et suffisant13 », nécessaire car c’est un marqueur visuel incontournable de la période —nous y reviendrons—, et suffisant car il parvient, par sa seule représentation, à transporter le lecteur dans une époque bien précise.

  • 14 Gérard Chandès, « Réplicateurs visuels et sonores du monde néo-médiéval », Itinéraires, 3, 2010, pp (...)

13Dans la totalité des œuvres étudiées, le dragon habite ou attaque un château. Hormis dans la série Georges le dragon de Geoffroy de Pennart où le château semble plutôt du XVIIIe ou du XIXe siècle, avec ses larges fenêtres vitrées et sa grande terrasse, et dans La petite reine rouge, où il est davantage d’inspiration orientale, les châteaux présentés sont des archétypes des châteaux forts de la deuxième moitié du Moyen Âge occidental, sans pour autant être d’une grande précision historique. Néanmoins, il n’y a nul besoin de précision architecturale pour le jeune public qui se contentera des éléments saillants du château médiéval : structures en pierre, tours rondes, remparts, herse, etc. Mais c’est surtout le créneau qui se retrouve dans ces châteaux, dès la page de couverture pour la moitié des albums étudiés. Le créneau, comme expliqué par Gérard Chandès, est en effet un puissant réplicateur visuel du Moyen Âge qui suscite, presque immédiatement « chez les non-médiévistes, la référence au monde réel ou légendaire du Moyen Âge14 ». Le créneau, forme simple, aussi facilement reconnaissable que reproductible, s’accorde ainsi tout à fait aux compétences cognitives de l’enfant et permet l’association d’une forme visuelle simple à un concept historique.

14En outre, certains albums mettent l’accent sur le vocabulaire spécifique au château médiéval afin que l’enfant apprenne à maîtriser ce champ, avec des termes plus précis tels que remparts, donjon, salle d’armes ou chemin de ronde. Dans la collection « J’écris, je lis » des éditions Milan, Le chevalier Chaussure contient d’ailleurs des activités préliminaires à la lecture, notamment la reconnaissance visuelle, la compréhension et l’écriture de termes nouveaux, principalement liés au Moyen Âge, comme « douves » ou « pont-levis » (p. 2 à 8). Une nouvelle fois, bien qu’il ne s’agisse pas du sujet principal, le récit devient prétexte à l’apprentissage.

15Deuxième élément proprement médiéval, le chevalier est présent dans tous les ouvrages étudiés, hormis dans Edmond le dragon et l'incendie, où le héros Loup prend le rôle narratif du chevalier, aidant ses amis et sauvant sa bien-aimée. Dans les autres albums, on retrouve un affrontement, abouti ou non, entre un dragon et un chevalier, et lorsque celui-ci affronte le dragon, il est en armure, muni d’une épée et d’un bouclier et bien souvent sur son cheval. Cette image d’Épinal se retrouve d’ailleurs sur de nombreuses premières et/ou quatrièmes de couverture, notamment dans Sur la piste des dragons et La Quête du Preux Chevalier Philibert.

16Comme pour le château, la précision historique n’est pas forcément de mise, sauf pour quelques exemples, comme le chevalier Philibert qui porte une armure presque complète incluant haubert, gantelets et solerets (La Quête du Preux Chevalier Philibert, p. 5). Dans les autres ouvrages, le jeune lecteur peut tout de même apprendre quelques termes de la terminologie chevaleresque et de combat : armure, lance, tournoi, catapulte. D’autres accessoires et armes sont également présentés, si ce n’est nommés : le fléau d’armes, l’écu, le heaume, le caparaçon. Comme pour le château, ces éléments peuvent tout à fait servir un objectif pédagogique, notamment par le biais d’une explication ultérieure avec le parent-accompagnateur.

  • 15 Georges Martin, « Le premier traité de chevalerie hispanique », e-Spania, 43, 2022, [en ligne] http (...)
  • 16 « Le Livre de l'ordre de chevalerie », Centre de Documentació Ramon Llull, Universitat de Barcelona(...)

17Le chevalier doit se préparer à l’affrontement avec le dragon, en conséquence de quoi plusieurs éléments liés à la chevalerie sont également mentionnés, sans toutefois être expliqués. Ainsi, le jeune Colin vit la cérémonie de l’écuyer grâce à Sir Perceval dans L'Attaque du dragon en slip (p. 9) ; le jeune Chouette est affecté à la garde de nuit, c’est le service qu’il doit rendre au royaume après son apprentissage (Chevalier Chouette, p. 14) ; la guerre est évoquée par Philibert qui se souvient « du sifflement des flèches, du bruit sourd du bélier, du fracas des boulets contre la muraille » (La Quête du Preux Chevalier Philibert, p. 2) ; les livres que Chouette et ses camarades étudient pour préparer leur examen de chevalier, aux titres évocateurs (« Écuyer », « L’esprit de chevalerie », « Intro à la Joute », « Le Guide pratique du chevalier », Chevalier Chouette, p. 10), rappellent les traités de chevalerie, comme celui des Sept parties d’Alphonse X de Castille (1252-1284) et son chapitre intitulé « Des chevaliers et des choses qu’il leur convient de faire »15 ou Le Livre de l'ordre de chevalerie de Raymond Lulle (1274-76)16 ; la croisade est évoquée à la fin de Ne dérangez pas les dragons !, bien qu’elle éveille la curiosité des dragons qui pensent que les chevaliers partent en vacances (p. 25). Si ces éléments ne sont pas proprement explicatifs, ils peuvent susciter chez l’enfant une curiosité envers ces sujets, entraînant une recherche ultérieure plus approfondie.

  • 17 Lire à ce sujet Violeta Mitrovic, « Vers de nouveaux modèles féminins dans la littérature jeunesse  (...)
  • 18 Christiane Connan-Pintado, « Stéréotypes et littérature de jeunesse », Hermès, La Revue, 1, 2019, p (...)
  • 19 Catherine Kikuchi, « Mais qui va garder les enfants ? », blog Actuel Moyen Âge, 2016. [en ligne] ht (...)

18Troisième élément lié au dragon, la princesse, telle que présentée dans les livres jeunesse, est la figure la plus éloignée du Moyen Âge historique. Du fait que les ouvrages modernes accordent une plus grande place aux personnages féminins17, les dames et princesses du corpus étudié, bien que moins nombreuses que les chevaliers, sont toutes des femmes actives, voire guerrières, ne donnant donc qu’une représentation partielle de la condition féminine noble au Moyen Âge. En effet, il s’agit ici de s’éloigner des stéréotypes, notamment de genre, liés au Moyen Âge, pour offir une représentation féminine davantage en accord avec les valeurs et les aspirations de la société actuelle18. On notera cependant qu'une grande partie des princesses du corpus portent le hennin, élément du costume féminin médiéval le plus facile à reconnaître pour un enfant, et que, dans la série Georges le dragon, la princesse Marie gère les affaires du royaume pendant que son mari combat des monstres, illustrant par là le travail féminin, courant au Moyen Âge, mais dénigré par la suite19.

19Quant aux adultes accompagnant la lecture, parent-lecteur et parent-acheteur, ils apprécieront certaines références plus pointues, comme les allusions aux traités de chevalerie déjà cités dans Chevalier Chouette, ou l’album Sur la piste des dragons, dont le titre original Here be Dragons et où la carte détenue par le chevalier (deuxième de couverture et garde avant) nous rappellent invariablement le « Hic sunt dracones » du globe de Hunt-Lenox20. D’autres références pour le parent-lecteur peut-être moins averti seront davantage orientées vers l’humour, ainsi le dragon chez Geoffroy de Pennart s’appelle Georges, comme un pied-de nez au célèbre saint dracoctone, ou le fait de considérer la croisade comme des vacances dans Ne dérangez pas les dragons !.

20Face à ces références historiques néanmoins, les anachronismes, ou plus exactement les prochronismes, sont légion, et aucune œuvre n’y échappe. Certaines recherchent une véritable authenticité historique et les prochronismes sont subtils, comme des volets (Le Chevalier Chaussure, p. 10), une fraise Renaissance (La Petite Reine rouge, p. 10), un sac en papier (La Princesse et le dragon, p. 7) ou une robe de mariée blanche (Le Dragon qui ne savait pas dire non, p. 13). D’autres sont plus évidents, voire frappants, comme un panneau « sens interdit » (Ne dérangez pas les dragons !, p. 20), une fête d’anniversaire pour chevaliers, avec boule à facettes et cotillons (Chut ! Pas un bruit ! Dragon endormi, p. 16-17) ou une boîte à pizza (Chevalier Chouette, p. 33).

21Cependant, plus les anachronismes sont nombreux et évidents, plus les marqueurs du Moyen Âge le sont aussi. Ainsi, L'Attaque du dragon en slip est constellé de ces incohérences historiques : le dragon porte un slip, Colin rédige une lettre avec des Crayola, l’écuyer encourage Sir Perceval avec une main en mousse et un mégaphone, et des ballons de baudruche décorent le château après sa réfection. Face à cela, les créneaux sont omniprésents dans le décor qui est assez vide à l’exception du château, et le héros porte constamment son haubert, voire son heaume. Ainsi, à chaque fois que le doute historique s’insinue, les marqueurs visuels balisent et replacent le récit à la bonne époque.

22En littérature jeunesse, l’anachronisme sert clairement à rendre une situation étrangère à un jeune public un peu plus familière. Le Moyen Âge, même simplifié, peut aisément dérouter un jeune enfant, alors en intégrant des éléments de son monde dans l’univers médiéval, les auteurs lui permettent de découvrir une période historique éloignée tout en se raccrochant à ce qu’il connaît. Quant aux parents-accompagnateurs et parents-acheteurs, ils apprécieront une nouvelle fois le ton humoristique qu’offre ce décalage patent, qui les raccroche, cette fois-ci, à une réalité plus adulte, comme le protagoniste de Sur la piste des dragons qui traite la princesse de « godiche » (p. 25) ou un chevalier de L'Attaque du dragon en slip qui pleure de douleur après avoir marché sur un Lego. De même, certains éléments du décor sont explicitement destinés au parent-accompagnateur, ainsi le titre du journal « Le Temps Jadis » (p. 2) et la boîte à pizza sur laquelle est inscrit « Délicieuse pizza l’écuyer/Tendre et moelleuse/Livrée dans tout le royaume » (p. 33) dans Chevalier Chouette, ou le livre « L’art de faire la cour aux demoiselles pour chevaliers à court d’idées » exposé dans la boutique au début de Sur la piste des dragons (p. 2).

  • 21 Cécile Boulaire, op.cit., p. 294.

23Par conséquent, les éléments purement médiévaux autour du dragon sont souvent approximatifs, et, bien que dénuée de nombreux clichés, si fréquents dans des œuvres pour jeunes adultes par exemple, la représentation du Moyen Âge dans la littérature jeunesse est assez simple, si ce n'est simpliste. Ainsi que l’écrit Cécile Boulaire, « ce Moyen Âge d’enfance est donc bien lieu commun, dans tous les sens du terme. Parce qu’il est fait de stéréotypes21 ». Mais ces stéréotypes permettent au moins de le reconnaître, surtout pour un jeune lecteur. On distingue ainsi deux strates dans ces ouvrages : l’histoire en elle-même et l’apport encyclopédique implicite, mais également deux types de publics : l’enfant à la recherche du divertissement, et le parent-accompagnateur qui y trouve, d’une part, une deuxième lecture adaptée à l’adulte, et d’autre part, un intérêt pédagogique pour son enfant, motivant par là son achat.

Le dragon, une porte ouverte sur la littérature médiévale

  • 22 Lucie Herbreteau, « La créature nécessaire : évolution du dragon dans la littérature médiévale angl (...)
  • 23 Cette résurgence se caractérise par l’utilisation, consciente ou non, de figures, de motifs, de tex (...)
  • 24 Il s’agit ici plutôt des premier et deuxième types de Moyen Âge évoqués par Umberto Eco : le Moyen (...)

24Ainsi le dragon est le prétexte pour découvrir un Moyen Âge historique, en attaquant un château fort, en assaillant un chevalier, ou en enlevant une princesse. Mais le dragon en lui-même, s’il ne représente pas ce Moyen Âge historique, est une figure emblématique de la littérature médiévale. Présent dans de nombreux récits, et notamment en littérature anglaise, on le trouve dans des bestiaires, des chroniques, et surtout dans des romans courtois et des hagiographies. Ainsi, se construit peu à peu un archétype du dragon puissant et maléfique, incarnation du Diable, dans des textes qui mettent l'emphase sur la perfection morale du dracoctone, le tueur, ou la tueuse, de dragon22. Avec la résurgence de l’imaginaire médiéval depuis la fin du XXe siècle23, il n’est que trop logique que ces archétypes reviennent en littérature, notamment en littérature jeunesse24.

25Tout d’abord, on trouve certaines références explicites aux textes médiévaux dans les livres jeunesse. Les premières lettres de chaque page de Ne dérangez pas les dragons ! sont des lettrines en forme de dragons, référence indéniable aux manuscrits enluminés. Colin est l’écuyer de Sir Perceval et il est fait chevalier par le roi Arthur à la fin de l’histoire où figure une réplique de la Table Ronde de Winchester (L'Attaque du dragon en slip, p. 36-37). Il n’est pas non plus anodin que le dragon chez Geoffroy de Pennart s’appelle Georges, rappelant les nombreuses hagiographies du saint dracoctone le plus connu de l’Angleterre médiévale.

  • 25 Gérard Chandès, art. cit., p. 171

26D’un point de vue stylistique, certains ouvrages veulent donner une touche « médiévale » en faisant usage de termes et expressions vieillies, voire archaïques. Ainsi, le jeune dragon s’adresse à Philibert en l’appelant « Messire » (La Quête du Preux Chevalier Philibert p. 11), Dragaric a « estourbi dix-huit chevaliers » (Ne dérangez pas les dragons ! p. 9) et le chevalier Jules s’adresse à la princesse Marie en ces mots : « Princesse, la honte me submerge. Je veux m’amender ! Sur-le-champ, je cours quérir d’énormes quantités d’arnica pour Georges ! » (La Princesse, le dragon et le chevalier intrépide, p. 7). Mais c’est sans nul doute le chevalier de Sur la piste des dragons qui fait le plus montre d’un style fleuri, presque suranné, avec inversions de négation (« point tu n’en trouveras », p. 6), de nombreux jurons (« Sacrebleu », p. 13 et p. 28, « Saperlipopette », p. 15, « Diantre », p. 22, « Sapristi », p. 27) et l’interjection « Oyez, gente dame ! » (p. 16). Si l’usage de ces expressions ne remonte pas au Moyen Âge, exceptés « diantre » et « oyez » elles confèrent indubitablement un aspect vieilli au récit, une réminiscence d’un autrefois littéraire, à la manière du conteur ou du troubadour médiéval. « Oyez » est d’ailleurs un puissant réplicateur sonore du Moyen Âge25, sa seule évocation ouvrant à l’imaginaire médiéval.

  • 26 On pense notamment aux descriptions suivantes : « Le cruel dragon au cuir chauve vole durant la nui (...)
  • 27 Lucie Herbreteau, De l’animal à la divinité : le dragon dans la littérature médiévale anglaise, ent (...)

27D’un point de vue narratif, dans la littérature médiévale, le dragon est, avant toute chose, l’ennemi du chevalier, fonction que l’on retrouve dans la plupart des albums pour enfants, où un chevalier combat ou cherche à combattre le dragon. Même dans Peppa Pig visite un château fort, qui se déroule à notre époque, la famille Pig doit affronter un robot-dragon géant à la fin de sa visite. Ces dragons n’ont rien à envier à leurs ancêtres, ils sont grands, volent et crachent du feu à l’instar des dragons de l'épopée Beowulf ou des hagiographies de saint Georges et sainte Marguerite26. Ces représentations correspondent à celles que l’on trouve à la fin du Moyen Âge, un dragon d’aspect reptilien ou lacertiforme et aux ailes de chauve-souris. Ces dragons médiévaux sont également dangereux, ils attaquent, voire mangent les humains et retiennent des princesses en otage27. On retrouve l’ensemble de ces caractéristiques plus ou moins fidèlement dans Zébulon le dragon puisque ce sont les compétences que le jeune Zébulon doit acquérir pendant ses cinq années d’école de dragon, à savoir : voler, rugir, cracher du feu, enlever des princesses et combattre des chevaliers.

  • 28 Emanuele Arioli, Ségurant, le chevalier au dragon, Paris, Les Belles Lettres, 2023.

28Le dragon, au Moyen Âge ou dans la littérature jeunesse contemporaine, représente donc avant tout une épreuve pour le chevalier, épreuve qui va mettre en exergue les qualités que celui-ci doit posséder pour être victorieux. Mais pourquoi combattre le dragon? On peine à croire qu’un ouvrage pour un jeune public encourage le recours à la violence et l’agression gratuite, la justification du conflit doit donc être solide. Le chevalier prend d’abord les armes pour défendre son royaume et les plus faibles, tel Ségurant poursuivant le dragon pour protéger les participants du tournoi28.

  • 29 Chrétien de Troyes, Romans, Paris, Librairie Générale Française, 1994.

29Ainsi, Chouette patrouille sur les remparts avant de rencontrer la créature responsable de la disparition de nombreux chevaliers (Chevalier Chouette), l’écuyer Colin veut repousser le dragon en slip qui a détruit le château (L'Attaque du dragon en slip) et le chevalier Chaussure protège le trésor caché dans le château d’un dragon avare (Le Chevalier Chaussure). Chaussure cherche également à défendre son honneur, puisque le dragon se moque de son cheveu sur la langue, ce qui rappelle la place primordiale que tient l’honneur pour le chevalier dans la littérature médiévale et le déshonneur de la honte, comme Lancelot devant monter sur une charrette ou Perceval vengeant la jeune fille giflée par Keu29. D’autres ne défendent pas un château, mais des personnes, comme Jules le chevalier qui se jette d’abord sur Georges le dragon car il pense qu’il est en train d'attaquer une école et ses élèves (La princesse, le dragon et le chevalier intrépide). Le chevalier Tagada veut sauver la princesse Perle capturée par un dragon (Zébulon le dragon), tout comme Elizabeth qui cherche à récupérer le prince Ronald enlevé par le dragon qui a également détruit son château (La Princesse et le dragon).

  • 30 Voir Anne Laskaya et Eve Salisbury (éd.), The Middle English Breton Lays, Kalamazoo, Medieval Insti (...)

30Pour les chevaliers qui ne défendent pas de royaume ni ne délivrent de princesse, combattre le dragon revient à accomplir un fait d’arme prestigieux pour connaître la gloire. Ainsi que l’explique Dragaric dans Ne dérangez pas les dragons ! : « c’était sans compter sur la coutume locale qui exigeait que chaque chevalier se mesure avec un dragon pour prouver sa valeur » (p. 8) et, par conséquent, le dragon est sans cesse dérangé par ces chevaliers, ce qui lui procure une grande fatigue et beaucoup de stress. De même, alors que tout le monde dit que les dragons n’existent pas, le chevalier de Sur la piste des dragons part à l’aventure pour en trouver un et le combattre, puis s’en vanter auprès des autres chevaliers. Enfin, le titre complet du dernier ouvrage, La Quête du Preux Chevalier Philibert parti terrasser un dragon pour noyer son ennui, est assez transparent : Philibert, nostalgique de la guerre où il avait été acclamé par le peuple pour sa bravoure, recherche à nouveau le danger pour « mettre à l’épreuve son courage de chevalier » (p. 4). Combattre un dragon pour connaître la gloire, c’est ce que font également Dégaré ou Bevis of Hampton dans les romances éponymes, ce qui leur apporte une reconnaissance sociale, un titre de chevalier et même une dame ou princesse à épouser30.

  • 31 Gordon Whatley, Anne Thompson et Robert Upchurch (éd.), op.cit. Jacques de Voragine ; La Légende do (...)

31Le troisième personnage médiéval présent dans son rapport au dragon est justement la princesse, puisqu’un certain nombre d’ouvrages reprennent le motif de son enlèvement. Zébulon apprend en quatrième année d’école de dragon comment enlever des princesses (Zébulon le dragon), et lorsque le chevalier de Sur la piste des dragons arrive auprès de la créature, il tombe sur une princesse attachée à un rocher. Suivant scrupuleusement les indications sur sa carte, ainsi que des principes presque académiques de chasse au dragon, il lit : « Une demoiselle en détresse, le plus souvent une princesse, indique la présence d’un dragon... Elle porte un chapeau pointu et tout le tralala... Elle est ligotée... » (p. 16). Il est ici difficile de ne pas faire d’analogie avec le schéma narratif de l’hagiographie de saint Georges : après que les habitants ont donné tous leurs moutons en tribut au dragon qui assiège leur ville, leur roi est contraint de livrer sa propre fille à la créature ; le saint arrive sur ces entrefaites et vainc le dragon, délivrant à la fois la princesse et la ville31.

  • 32 Gordon Whatley, Anne Thompson et Robert Upchurch (éd.), op.cit. Alan Lupack (éd.), Lancelot of the (...)

32Ce combat contre le dragon met donc en relief les valeurs et les qualités du chevalier. Le jeune Chouette répète qu’il veut devenir un « vrai chevalier » (Chevalier Chouette, p. 7, 17, 27, 29, quatrième de couverture) en étant courageux et astucieux. En effet, le courage est clairement démontré par la plupart des chevaliers du corpus jeunesse, et même par certaines princesses, qui partent au combat alors que personne d’autre ne veut défaire le dragon ou que tous les autres chevaliers ont déjà été vaincus. Philibert est un « preux chevalier » dès le titre (La quête du Preux Chevalier Philibert parti terrasser un dragon pour noyer son ennui) et le chevalier de Sur la piste des dragons avance « je suis un preux chevalier et je m'en vais dénicher un dragon » (p. 20). C’est un élément qui se retrouve également dans les textes médiévaux : Tristan ou saint Georges arrivent sur la scène alors que tout espoir est presque perdu, c’est leur intervention quasi inespérée qui dénoue la situation32.

  • 33 Fernand Mossé, Manuel de l’anglais du Moyen Âge, II- Moyen-anglais, Tome Second : Notes et Glossair (...)
  • 34 Graham Drake, Eve Salisbury et Ronald B. Herzman (éd.), op.cit.
  • 35 Snorri Sturluson, L’Edda, Récits de mythologie nordique, François-Xavier Dillmann (trad.), Paris, G (...)
  • 36 Catherine Brasselet, « La figure chevaleresque dans la littérature pour la jeunesse : représentatio (...)

33D’autre part, et plus encore que la force brute, la maîtrise du maniement des armes ou le courage, ces textes mettent en avant l’intelligence et la ruse du héros ou de l’héroïne, la deuxième qualité avancée par Chouette. Ainsi, Colin vainc le dragon par la honte en lui faisant perdre son slip (L'Attaque du dragon en slip, p. 32), Elizabeth joue de l’orgueil du dragon en lui faisant brûler cent forêts puis faire deux fois le tour du monde en volant (La princesse et le dragon, pp. 12-18), et Chouette propose au dragon un repas plus appétissant qu’un chevalier, à savoir de la pizza (Chevalier Chouette, p. 33). À l’inverse, Dragaric et Dragathe se débarrassent des chevaliers en partant en vacances dans un lieu aux antipodes de la Croisade (Ne dérangez pas les dragons !, p. 25) et Jean-Luc le dragon, plutôt que d’attaquer le chevalier Boiteux, sauve son amie la princesse en retrouvant la clé de sa cellule cachée par celui-ci (« Le dragon qui ne savait pas dire non », p. 18). Cette qualité se retrouve régulièrement dans les romans courtois, où le héros est aussi victorieux grâce à son esprit, ce que le moyen-anglais appelle « ginne », qui désigne à la fois l’habileté, l’inventivité, l'ingéniosité ou la ruse33. On le retrouve par exemple dans le romance de King Horn où, grâce à de nombreux stratagèmes et déguisements, le héros parvient à tuer son ennemi et retrouver sa famille34 et c'est ce qui permet à Sigurd, héros légendaire scandinave, de vaincre le dragon Fafnir35. Ces exemples, médiévaux et contemporains montrent parfaitement que, ainsi que l’écrit Catherine Brasselet, « l’enjeu de la représentation du chevalier dans la littérature du Moyen Âge ne change [...] pas radicalement avec un public jeune36. »

  • 37 Lire à ce sujet Karine Perrot, « Banalisation des figures mythiques de l’ogre, du loup et de la sor (...)
  • 38 Lucie Herbreteau, « Ami, ennemi, héros. Redéfinir le dragon médiéval pour les séries jeunesse », (...)

34Tous les éléments du combat médiéval semblent ainsi se retrouver dans le corpus contemporain : le dragon féroce, la princesse enlevée et le valeureux chevalier. Mais si les caractéristiques générales du récit dracoctonique médiéval se retrouvent dans la littérature jeunesse, l’issue en est tout autre, et la morale aux antipodes du prosélytisme médiéval qui prêche la mort du dragon comme affirmation de la puissance de Dieu. Georges et Jules deviennent presque amis (série Georges le dragon), Chouette et les autres chevaliers partagent une pizza avec le dragon (Chevalier Chouette), Zébulon fait office d’ambulance pour la princesse Perle et le chevalier Tagada qui deviennent médecins (Zébulon le dragon) et Philibert coule des jours heureux et paisibles avec le dragon qu’il a élevé (La Quête du Preux Chevalier Philibert). Outre le phénomène de banalisation qui voit la figure mythique du dragon humanisée, parfois dégradée, voire ridiculisée37, il ne s’agit plus de vaincre le dragon, et sa mort ne constitue plus le point final de l’aventure : héros et dragons apprennent désormais à vivre ensemble, à apprécier les différences de chacun et à collaborer pour servir une morale empreinte de tolérance et d’inclusion38.

  • 39 Danielle Quéruel, « Dangers et séductions du rêve médiéval : littérature arthurienne et littérature (...)

35Finalement, plus que la fidélité à une histoire médiévale, c’est le récit, la mémoire qui compte. Il n’est pas tant question ici de faire perdurer l’histoire dans ses détails, mais de la faire voyager à travers le temps, ainsi que l’écrit Danielle Quéruel, « plus que la fidélité aux textes antérieurs, c’est la mémoire des récits [...] qui est ainsi préservée39 ». Et c’est un aspect qui est mis en avant dans certains ouvrages. Chouette se rêve chevalier, et ses faits d’armes inscrits dans les tapisseries du royaume, cet art typique du Moyen Âge (Chevalier Chouette, pp. 6-7). Une double page est ainsi consacrée à une reproduction de tapisserie médiévale avec ses caractéristiques (reconstitution des points de tissage, frises supérieures et inférieures, absence de perspective) et représente, à la manière de la tapisserie de Bayeux, Chouette réalisant divers faits d’armes, dont la capture d’un dragon. De même, lorsque tout le monde pense que Philibert a vaincu le dragon, « longtemps plus tard, le royaume louait encore la bravoure de Philibert. On en fit même des chansons et des tapisseries » (La quête du Preux Chevalier Philibert, p. 32).

  • 40 Nathalie Koble et Mireille Séguy, op.cit., p. 11.
  • 41 Cécile Boulaire, op.cit., p. 194.

36Enfin, quand le chevalier de Sur la piste des dragons se rend compte qu’il n’a trouvé aucun dragon, il se dit : « Finalement, il se pourrait que les autres chevaliers aient raison. Peut-être que les dragons, ça n’existe pas... Je pourrais quand même leur raconter que j’ai vu un dragon. Ils n’ont pas besoin de savoir la vérité » (p. 30). L’italique sur le verbe « raconter » n’est ici pas anodin : les faits, réels ou inventés, passent mais les mots restent. Dans une sorte de mise en abyme, le récit perdure par un autre récit, presque métafictionnel. Il s’agit ici d’une résurgence textuelle, « l’œuvre contemporaine se construisant sur la récriture de textes anciens dont elle contribue en retour à perpétuer la mémoire40 ». Et il importe finalement peu que le héros ait terrassé un dragon ou s’en soit fait un ami, ou soit tout simplement passé à côté sans le trouver, puisque c’est le récit que l’on en fera qui restera dans les mémoires. Le dragon devient passeur d’histoires, prétexte et chenal à la transmission du récit. Ainsi, malgré toutes les altérations que le récit médiéval peut subir, celles-ci « n’affectent pas sa trame propre41 », et sa finalité demeure intacte. Raconter et faire revivre la légende du dragon, du chevalier et de la princesse pour tous et à toutes époques, c’est bien cela le programme de la littérature médiévale.

  • 42 Gilbert Durand, Les Structures anthropologiques de l'imaginaire, Paris, Dunod, 1960.

37Si, selon Gilbert Durand, le dragon est une figure anthropologique universelle42, il semble néanmoins particulièrement se plaire dans le Moyen Âge. Mais peut-il faire découvrir, voire enseigner le Moyen Âge aux 3-6 ans? Au regard de cette étude, on avancera que le dragon peut être une entrée en matière, si ce n’est du Moyen Âge historique, tout du moins du Moyen Âge littéraire. L’apprentissage historique ne peut se défaire ici de certains poncifs, mais ceux-ci servent une certaine transmission littéraire. L’enfant-lecteur appréciera le récit, sans nécessairement se rendre compte de l’apport encyclopédique implicite. Le parent-accompagnateur, prescripteur et acheteur, quant à lui, discernera l’intérêt pédagogique de tels ouvrages qui permettent de découvrir le Moyen Âge par la petite porte de la fiction.

  • 43 Francis Dubost, Aspects fantastiques de la littérature narrative médiévale (XIIe-XIIIe s.), Paris, (...)
  • 44 Gérard Chandès, art. cit., p. 168.
  • 45 Jacques Roubaud, Graal-Fiction, Paris, Gallimard, 1978, p. 13.

38Et c’est justement ce flou entre Histoire et histoire qui rend la littérature jeunesse si proche de la littérature médiévale, puisque le merveilleux médiéval43 qui caractérise cette dernière se retrouve clairement dans le corpus étudié et, in extenso, dans un grand nombre d’ouvrages médiévalisants pour la jeunesse. Ce merveilleux efface les frontières entre réel et imaginaire, entre naturel et surnaturel, ce merveilleux qui dit que si Yvain peut voir un lion se prosterner à ses pieds et le suivre partout, et si le Chevalier Vert peut être décapité par Gauvain et repartir comme si de rien n’était, alors une chouette-chevalier peut partager une pizza avec un dragon et un écuyer qui joue aux Lego peut vaincre un dragon qui porte un slip. « Le Moyen Âge favorise les investissements de l’imaginaire44 » écrit Gérard Chandès, et qui mieux que les enfants sont réceptifs à cet imaginaire ? Et si Jacques Roubaud dit vrai en avançant que « les médiévistes [...] sont, nul ne l’ignore, de grands enfants45 », il n’est que trop logique que les enfants constituent un public, si ce n’est idéal, au moins sensible au récit médiéval, un terreau fertile où la graine de l’aventure merveilleuse peut pleinement s’épanouir et transmettre, à son tour, le récit.

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Bibliographie

Baker, Mark et Astley, Neville, Peppa Pig visite un château fort, Paris, Hachette Jeunesse, 2023.  

Balpe, Anne-Gaëlle et Plangtevin, Guillaume, La Quête du Preux Chevalier Philibert parti terrasser un dragon pour noyer son ennui, Vanves, Gautier-Languereau/Hachette, 2017.

Bourre, Martine, Ne dérangez pas les dragons ! Paris, Flammarion jeunesse, « Les albums du Père Castor », 2019.

De Pennart, Geoffroy, Georges le dragon, Paris, L’école des loisirs, 2011.

De Pennart, Geoffroy, Jules le chevalier agaçant, Paris, L’école des loisirs, 2013.

De Pennart, Geoffroy, La Princesse, le dragon et le chevalier intrépide, Paris, L’école des loisirs, 2008.

De Pennart, Geoffroy, Princesse Selma et les bisous, Paris, L’école des loisirs, 2018.

De Pennart, Geoffroy, Wouiiiin! , Paris, L’école des loisirs, 2020.

Denise, Chistopher, Chevalier Chouette, Paris, Kaléidoscope, 2023.

Donaldson, Julia et Scheffler, Axel, Zébulon le dragon, Paris, Gallimard Jeunesse, 2021.

Fleury, Jérémie, La Petite Reine rouge, Paris, Auzou, 2021.

Lallemand, Oriane, Thuillier, Éléonore et Sess, Edmond le dragon et l'incendie, Paris, Auzou, « Mes lectures de première primaire avec Loup », 2021.

Lloyd , Susannah et Donnelly, Paddy, Sur la piste des dragons, Paris, Kimane, 2021.

Mériaux, Charlotte et Le Tandé, Prisca, Le Chevalier Chaussure, Toulouse, Milan, « J’écris, je lis », 2023.

Munsch, Robert, La princesse et le dragon, Vincennes, Talents Hauts, 2005.

Rothman, Scott et Oswald, Pete, L'Attaque du dragon en slip, Paris, Klimane, 2021.

Schulze, Bianca et Hardy, Samara, Chut ! Pas un bruit ! Dragon endormi, Vanves, Gautier-Languereau/Hachette, 2021.

Zorzin, Sylvain et Lozano, Luciano, « Le dragon qui ne savait pas dire non », Les Belles Histoires, 533, 2017, pp. 3-23.

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Notes

1 Base de données WorldCat, filtres de recherche : mot-clé « dragon » ; langue « française » ; public cible « jeunesse » ; année de publication « de 2015 à 2024 ». Recherche effectuée le 14 avril 2024.

2 Site internet FNAC, filtres de recherche : mot-clé « dragon » ; rayon « album 3-6 ans ». Recherche effectuée le 14 avril 2024.

3 Site internet Amazon, filtres de recherche : mot-clé « dragon » ; catégorie « livre pour enfants » ; âge « 3 à 5 ans » ; langue « français ». Recherche effectuée le 14 avril 2024.

4 Site internet Librairies Indépendantes, filtres de recherche : mot-clé « dragon » ; rayon « jeunesse » puis « livres illustrés + de 3 ans ». Recherche effectuée le 14 avril 2024.

5 Les ouvrages constituant le corpus sont présentés en bibliographie à la fin de cet article.

6 Bruno Dubuc, « Le développement cognitif selon Piaget », Le Cerveau à tous les niveaux, blog financé par l’Institut de Recherche en Santé du Canada., ; [en ligne] https ://lecerveau.mcgill.ca/flash/i/i_09/i_09_p/i_09_p_dev/i_09_p_dev.html (consulté le 15 janvier 2024).

7 « Le développement du cerveau de 3 à 5 ans », Naître et Grandir, site de la fondation Lucie et André Chagnon, [en ligne] https://naitreetgrandir.com/fr/etape/3-5-ans/developpement/naitre-grandir-developpement-cerveau-3-5-ans/ (consulté le 16 janvier 2024).

« Le développement de votre enfant : À quoi vous attendre », Soins de nos enfants, site de la Société Canadienne de Pédiatrie, [en ligne] https://soinsdenosenfants.cps.ca/handouts/behavior-and-development/your_childs_development (consulté le 16 janvier 2024).

8 Jeanne Guillaume, « Âges et périodes sensibles Montessori », Guide Montessori. [en ligne] https://guide-montessori.fr/methode-montessori/periodes-sensibles/#guide-montessori-les-periodes-sensibles (consulté le 20 janvier 2024).

9 Bruno Dubuc, art. cit.,

10 Thanujeni Pathman et Patricia J. Bauer, « La mémoire et le développement précoce du cerveau », dans Tremblay, Boivi, Peters (dir.), Encyclopédie sur le développement des jeunes enfants, 2020. En ligne : https://www.enfant-encyclopedie.com/cerveau/selon-experts/la-memoire-et-le-developpement-precoce-du-cerveau (Consulté le 13 janvier 2024).

11 María Vélez , « Qu'est-ce que la mémoire déclarative? », Nos Pensées, blog de psychologues, 2023. En ligne : https://nospensees.fr/quest-ce-que-la-memoire-declarative/ (Consulté le 19 janvier 2024).

12 Catherine Brasselet, « La figure chevaleresque dans la littérature pour la jeunesse : représentation, évolution, fonction », dans Caroline Cazanave et Yvon Houssais (dir.), Médiévalités enfantines : Du passé défini au passé indéfini, Besançon, Presses universitaires de Franche-Comté, 2011, p. 152.

13 Cécile Boulaire, Le Moyen Âge dans la littérature pour enfants, Rennes, Presses Universitaires de Rennes, 2002, p. 18.

14 Gérard Chandès, « Réplicateurs visuels et sonores du monde néo-médiéval », Itinéraires, 3, 2010, pp. 167-175.

15 Georges Martin, « Le premier traité de chevalerie hispanique », e-Spania, 43, 2022, [en ligne] http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/e-spania/45438 (consulté le 23 janvier 2024).

16 « Le Livre de l'ordre de chevalerie », Centre de Documentació Ramon Llull, Universitat de Barcelona, [en ligne] https://quisestlullus.narpan.net/fr/le-livre-de-lordre-de-chevalerie (consulté le 23 janvier 2024).

17 Lire à ce sujet Violeta Mitrovic, « Vers de nouveaux modèles féminins dans la littérature jeunesse », Voie Livres, 2019, [en ligne] https://www.voielivres.ch/vers-de-nouveaux-modeles-feminins-dans-la-litterature-jeunesse/ (consulté le 23 avril 2024).

Maëla Le Corre, Les personnages féminins et leur parole dans la construction des stéréotypes de genre en littérature jeunesse, Mémoire de Master soutenu en 2018 à l’Université d’Artois. [en ligne] https://dumas.ccsd.cnrs.fr/dumas-02548489 (consulté le 15 avril 2024).

18 Christiane Connan-Pintado, « Stéréotypes et littérature de jeunesse », Hermès, La Revue, 1, 2019, pp. 105-110. [en ligne] https://0-www-cairn-info.catalogue.libraries.london.ac.uk/revue-hermes-la-revue-2019-1-page-105.htm (consulté le 20 juin 2024). Marie Manuelian, Nathalie Magnan-Rahimi, et Lydie Laroque, « La littérature pour la jeunesse et le genre : un corpus face à ses contradictions ? », Le français aujourd'hui, 193, 2, 2016, pp. 45-62. [en ligne] https://0-www-cairn-info.catalogue.libraries.london.ac.uk/revue-le-francais-aujourd-hui-2016-2-page-45.htm (consulté le 15 avril 2024).

19 Catherine Kikuchi, « Mais qui va garder les enfants ? », blog Actuel Moyen Âge, 2016. [en ligne] https://actuelmoyenage.wordpress.com/2016/03/10/mais-qui-va-garder-les-enfants/ (consulté le 26 mars 2024).

20 « Hunt-Lenox Globe », The New York Public Library Digital Collections [en ligne] https://digitalcollections.nypl.org/collections/hunt-lenox-globe#/?tab=about (consulté le 10 janvier 2024).

21 Cécile Boulaire, op.cit., p. 294.

22 Lucie Herbreteau, « La créature nécessaire : évolution du dragon dans la littérature médiévale anglaise », dans Florian Besson, Viviane Griveau-Genest et Julie Pilorget (dir.), Créer: créateurs, créations, créatures au Moyen Âge, Paris, Presses de l’Université Paris-Sorbonne, 2019, pp. 265-281.

23 Cette résurgence se caractérise par l’utilisation, consciente ou non, de figures, de motifs, de textes ou d’images médiévales dans l’espace culturel contemporain. Tout en gardant ses distances avec le Moyen Âge historique, cette résurgence de l’imaginaire médiévale mène souvent à réfléchir sur notre propre époque. Voir Nathalie Koble et Mireille Séguy, « Le Moyen Âge en question », dans Nathalie Koble et Mireille Séguy (dir.), Passé Présent, Le Moyen Âge dans les fictions contemporaines, Paris, Presses de l’École normal supérieure, 2009, pp. 7-24.

24 Il s’agit ici plutôt des premier et deuxième types de Moyen Âge évoqués par Umberto Eco : le Moyen Âge comme manière et prétexte (« maniera e pretesto ») où le Moyen Âge fait office de lieu mythologique dans lequel évoluent des personnages contemporains ; et le Moyen Âge de la révision ironique (« rivisitazione ironica ») qui présente le Moyen Âge comme une époque révolue et irreproductible qui sert davantage à mettre en emphase nos rêves et « ironiser sur ce que nous ne nous sommes plus. » Umberto Eco, « Dieci modi di sognare il Medioevo », Quaderni medievali, 21, juin 1986, pp. 187-200.

25 Gérard Chandès, art. cit., p. 171

26 On pense notamment aux descriptions suivantes : « Le cruel dragon au cuir chauve vole durant la nuit / entouré de feu », dans Beowulf, André Crépin (trad.), Paris, Livre de poche, 2007, p. 182 ; ou encore : « Tout près de la ville / Vivait depuis très longtemps un terrible et odieux dragon. / Il était à la fois laid et immense et si repoussant à voir [...] / Et du souffle de sa gueule il anéantit beaucoup d’hommes », dans Gordon Whatley, Anne Thompson et Robert Upchurch (éd.), Saint's Lives in Middle English Collections, Kalamazoo, Medieval Institute Publications, 2004, p. 91. Notre traduction.

27 Lucie Herbreteau, De l’animal à la divinité : le dragon dans la littérature médiévale anglaise, entre réappropriation mythologique et création d’une nouvelle figure mythique, thèse de doctorat soutenue en 2014 à l’Université d’Angers.

28 Emanuele Arioli, Ségurant, le chevalier au dragon, Paris, Les Belles Lettres, 2023.

29 Chrétien de Troyes, Romans, Paris, Librairie Générale Française, 1994.

30 Voir Anne Laskaya et Eve Salisbury (éd.), The Middle English Breton Lays, Kalamazoo, Medieval Institute Publications, 1995, et Graham Drake, Eve Salisbury et Ronald B. Herzman (éd.), Four Romances of England, Kalamazoo, Medieval Institute Publications, 1997.

31 Gordon Whatley, Anne Thompson et Robert Upchurch (éd.), op.cit. Jacques de Voragine ; La Légende dorée, Teodor de Wyzewa (trad.), Paris, Seuil, 1998.

32 Gordon Whatley, Anne Thompson et Robert Upchurch (éd.), op.cit. Alan Lupack (éd.), Lancelot of the Laik and Sir Tristrem, Kalamazoo, Medieval Institute Publications, 1994.

33 Fernand Mossé, Manuel de l’anglais du Moyen Âge, II- Moyen-anglais, Tome Second : Notes et Glossaire, Paris, Aubier, 1959, p. 127. Middle English Dictionary. University of Michigan [en ligne] https://0-quod-lib-umich-edu.catalogue.libraries.london.ac.uk/m/middle-english-dictionary/dictionary/MED18603/track?counter=1&search_id=56004462 (consulté le 5 janvier 2024).

34 Graham Drake, Eve Salisbury et Ronald B. Herzman (éd.), op.cit.

35 Snorri Sturluson, L’Edda, Récits de mythologie nordique, François-Xavier Dillmann (trad.), Paris, Gallimard, 1991.

36 Catherine Brasselet, « La figure chevaleresque dans la littérature pour la jeunesse : représentation, évolution, fonction », dans Caroline Cazanave et Yvon Houssais (dir.), op.cit., p. 151.

37 Lire à ce sujet Karine Perrot, « Banalisation des figures mythiques de l’ogre, du loup et de la sorcière à partir de quelques albums contemporains », dans Nathalie Prince et Sylvie Servoise (dir.), Les personnages mythiques dans la littérature de jeunesse, Rennes, Presses Universitaires de Rennes, 2015, pp. 185-194.

38 Lucie Herbreteau, « Ami, ennemi, héros. Redéfinir le dragon médiéval pour les séries jeunesse », Médiévales, 78, 2020, [en ligne] http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/medievales/10843 (consulté le 15 mars 2024).

39 Danielle Quéruel, « Dangers et séductions du rêve médiéval : littérature arthurienne et littérature jeunesse », dans Caroline Cazanave et Yvon Houssais (dir.), op.cit., p. 95.

40 Nathalie Koble et Mireille Séguy, op.cit., p. 11.

41 Cécile Boulaire, op.cit., p. 194.

42 Gilbert Durand, Les Structures anthropologiques de l'imaginaire, Paris, Dunod, 1960.

43 Francis Dubost, Aspects fantastiques de la littérature narrative médiévale (XIIe-XIIIe s.), Paris, Honoré Champion, 1991.

44 Gérard Chandès, art. cit., p. 168.

45 Jacques Roubaud, Graal-Fiction, Paris, Gallimard, 1978, p. 13.

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Pour citer cet article

Référence électronique

Lucie Herbreteau, « Dessine-moi un dragon : une créature imaginaire pour raconter le Moyen Âge ? »Belphégor [En ligne], 22-2 | 2024, mis en ligne le 17 décembre 2024, consulté le 16 mars 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/belphegor/6510 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/130vk

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Auteur

Lucie Herbreteau

Chercheuse associée au CIRPaLL de l’Université d’Angers et au CHUS de l’Université Catholique de l’Ouest à Angers

 Lucie Herbretau est docteure en littérature anglaise et anglo-saxonne, chercheuse associée au CIRPaLL (UPRES EA 7457) de l’Université d’Angers, et à l’équipe LEMIC de l’Université Catholique de l’Ouest, et enseignante à l’Institut Catholique de Vendée et à l’Université Catholique de l’Ouest à Angers. Elle a récemment publié : « La femme et le dragon dans la littérature médiévale anglaise : Une question de pouvoir », Loxias, n°54 « Doctoriales XIII », Revues Électroniques de l’Université de Nice, 2016 ; « ‘Mon oncle ! Mon oncle ! Le dragon ! Qu'est-ce qu'on fait ???’ Combattre le dragon dans Kaamelott ou réécrire la dracoctonie médiévale », Kaamelott, un livre d’histoire, Paris: Vendémiaire, 2018 ; « Ami, ennemi, héros : Redéfinir le dragon médiéval pour les séries jeunesse », Médiévales, n°78, « Moyen Âge en séries », 2020 et « De sainte Marguerite à Daenerys : Repenser la relation femme-dragon dans la littérature de fantasy contemporaine », Iris, n°42 « L’imaginaire des dragons », 2022.    

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