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I. Le Moyen Âge fait-il vendre?

Les châteaux des parcs Disney. Le médiévalisme comme mythe entrepreneurial

William Blanc

Résumé

Si le médiévalisme des romantiques – et par la suite de la fantasy – exprime une réaction négative – voire une critique – de la modernité industrielle, il est frappant de constater que celle-ci s’est aussi emparée des tropes du Moyen Âge imaginaire pour développer son propre discours. L’entreprise Disney constitue un exemple parfait de ce type d’appropriation. Le médiévalisme est non seulement au cœur de ses fictions, mais également au centre de ses parcs d’attractions, tous construits autour d’un château. Celui-ci opère comme la réalisation d’un rêve abordable pour tous, celui de l’homme du peuple transformé en prince, qui fait écho au mythe américain du self-made man. Mais à bien y regarder, c’est une promesse qui s’intègre dans un processus commercial auquel seuls les plus riches ont accès. Suivant cette logique, le château devient même le symbole du génie entrepreneurial de Walt Disney et permet de parer sa société d’une imagerie médiévaliste faisant justement oublier à quel point cette multinationale est un produit de la modernité industrielle.

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Texte intégral

  • 1 Voir à ce sujet Anne Besson (dir.), Dictionnaire de la Fantasy, Paris, Vendémiaire, 2018 et William (...)

1On le sait, le médiévalisme des romantiques – et par la suite de la fantasy – exprime une réaction négative – voire une critique – de la modernité industrielle1. Mais de manière frappante, il peut aussi être au cœur des productions de multinationales dégageant plusieurs dizaines de milliards de dollars de profits. À ce jeu, la firme Disney constitue sans aucun doute un cas qui mérite d’être largement étudié, tant le Moyen âge imaginaire semble être au centre de son discours au moins depuis les années 1930.

Un Moyen âge de self-made man

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  • 2 Voir à ce sujet Allan Robin, Walt Disney and Europe. European Influences on the Animated Feature Fi (...)
  • 3 Voir à ce sujet Myriam White-Le Goff, « Enfance » dans Anne Besson, William Blanc, Vincent Ferré (d (...)
  • 4 Sur ce mythe, renvoyons pour une introduction à Paul Heike, The Myths That Made America. An Introdu (...)
  • 5 Nous pensons notamment aux récits de fantasy écrits par Robert E. Howard. Voir à ce sujet William B (...)

3Walt Disney (1901-1966) s’inspire en effet très tôt de récits médiévalistes européens2 qui lui permettent de développer une vision du Moyen Âge associé à l’enfance et au merveilleux3. Son premier long métrage en dessins animés, Blanche-Neige et les sept nains (1937), s’inspire ainsi d’un conte des frères Grimm, tout comme le court métrage diffusé l’année suivante, Le Brave Petit Tailleur, qui est particulièrement intéressant pour notre propos. Mickey Mouse y incarne un jeune tailleur qui, par la seule force de son courage, finit par débarrasser un royaume d’un géant et épouser une princesse. Le choix de cette légende par Walt Disney ne doit sans doute pas grand-chose au hasard. Elle lui permet de mettre en scène un héros venu du peuple, un artisan travaillant de ses mains qui, s’affranchissant de sa condition, gravit les échelons sociaux et symbolise en somme une version médiévaliste du mythe du self-made man4. Ce n’est pas une première. Il a déjà employé un récit similaire – qui au même moment se diffuse également dans la fantasy publiée dans les pulps5 – dans un précédent court métrage médiévaliste, Mickey au Moyen âge, sorti lui en 1933.

  • 6 Voir à ce sujet Steven Watts, The Magic Kingdom. Walt Disney and the American Way of Life, Columbia (...)
  • 7 Ibid., p. 265.

4Ce trope est en effet central pour lui. Il permet à cet homme, ferme partisan du système de la libre entreprise, de redonner confiance dans la capacité de ce système à donner à chacun sa chance de réussir économiquement alors que la société américaine est marquée par la crise de 1929. Pour cela, à travers l’image d’un Mickey parti de rien et changé en prince, il diffuse aussi une version mythifiée de sa propre vie, celle d’un entrepreneur génial venu d’un milieu pauvre et devenu, en l’espace de quelques années, un titan du cinéma, discours déjà présent dès le début des années 1931 dans ses interventions publiques6. Ce lien entre lui et son personnage est d’ailleurs parfaitement assumé. Il joue lui-même la voix de la souris dans Mickey au Moyen Âge et Le Brave Petit Tailleur et il affirme dans une interview radiophonique de 1948 que Mickey parle pour lui et que lui parle pour Mickey7.

Le château, une part de rêve pour tous

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  • 8 Chris Strodder, The Disneyland Encyclopedia. The Unofficial, Unauthorized, and Unprecedented Histor (...)

6L’identification entre Disney et les produits de sa firme explique très certainement son investissement personnel dans la conception du parc d’attractions portant son nom à Anaheim en Californie. On le sait, celui-ci s’est rapidement construit autour d’un château, dit de la Belle au Bois dormant, directement inspiré de celui de Neuschwanstein bâti lors de la seconde moitié du xixe siècle pour le roi Louis II de Bavière8.

Illustration 1. Le château de Neuschwanstein. Photo par Thomas Wolf, Wikipedia Commons [En ligne], 31 juillet 2013, CC BY-SA 3.0, https://commons.wikimedia.org/​wiki/​File:Schloss_Neuschwanstein_2013.jpg (consulté le 14/05/2024).

7Mais la première version, dessinée par Herb Ryman, ne plaît pas à Walt Disney. Elle est trop élevée et le puissant patron du studio demande à ce que le château soit rapetissé. En effet, selon un livre officiel de la firme publié pour les quarante-cinq ans du parc en 2000 :

  • 9 Tim O’Day, Disneyland, A Pictorial Souvenir. Celebrating 45 Years of Magic, Disney Editions, New Yo (...)

Walt Disney s’est souvenu que les châteaux européens du Moyen âge étaient bâtis pour intimider les paysans. Il pensait qu’un château moins imposant apparaîtrait plus sympathique aux visiteurs de Disneyland. Aussi le Château de la Belle au Bois dormant est le plus petit de tous les châteaux des parcs d’attractions Disney9.

8Cette transformation interroge. Il ne fait aucun doute que le château de la Belle au Bois dormant, ouvert, comme Disneyland, à partir de 1955, reprend à son compte une partie du programme que Louis II avait appliqué à Neuschwanstein.

Illustration 2. Le château de la Belle au Bois dormant à Disneyland, Anaheim, Californie. Photo par HarshLight, Wikipedia Commons [En ligne], 31 octobre 2016, CC BY 2.0, https://commons.wikimedia.org/​wiki/​File:Halloween_Winter_Castle_(34399872936).jpg (consulté le 14/05/2024).

  • 10 Chris Strodder, The Disneyland Encyclopedia, op. cit., p. 157.
  • 11 Voir à ce sujet Tanja-Isabel Habicht, « La Bavière de Louis Ier et Louis II entre Wagner et Versail (...)

9S’en approcher, y pénétrer même, c’est un instant quitter le quotidien citadin pour partir dans un monde lointain fait de féérie et de merveilleux, comme le rappelle d’emblée l’inscription placée à l’entrée du parc : « Ici, vous quittez le monde d’aujourd’hui pour celui d’hier, de demain et de la fantasy10. » Mais Disney se positionne aussi contre le projet de son modèle. Ce château médiévaliste bavarois avait en effet été construit très à l’écart des grands centres urbains pour le plaisir d’un souverain quasi déchu, afin qu’il puisse fuir la société moderne et se réfugier dans une rêverie médiévaliste11.

10Or celui de Disney est bâti en 1950 près de la métropole de Los Angeles (et aujourd’hui complètement intégrée à elle). Facile d’accès, ouvert à tous, il permet aux employés californiens de se sentir, le temps d’une visite, comme un roi ou une reine, de refaire en somme le parcours de Mickey dans Le Brave Petit Tailleur, et d’expérimenter, à travers une métaphore architecturale médiévaliste, le cheminement du self-mad man ou de la self-made woman. Plus largement, il s’agit encore une fois de rassurer le public américain sur la capacité de son pays à offrir une part de rêve et de succès à chacun, capacité qui prouve évidemment la supériorité des châteaux Disney sur leurs modèles européens, faits quant à eux uniquement pour la jouissance de quelques puissants. Cela explique pourquoi le château de la Belle au Bois dormant est au cœur de la communication de la firme depuis les années 1950. On le reproduit sur les tickets d’entrée du parc d’Anaheim, puis au centre de tous les parcs Disney ouverts depuis. Pareillement, il sert de logo à la société Walt Disney Pictures à partir de 1985, et se retrouve au début de chaque film qu’elle réalise aujourd’hui.

11Par ailleurs, le double dispositif permettant d’être transporté dans un ailleurs médiévaliste et de se transformer, le temps d’une visite, de tailleur en prince, a été perfectionné.

  • 12  « Cinderella’s Royal Table », The Disney Wiki [En ligne], n. d. https://disney.fandom.com/wiki/Cin (...)
  • 13 Martha Bayless, « Disney’s Castle and the Work of the Medieval in the Magic Kingdom », dans Susan A (...)
  • 14 On remarque que la firme Disney opère dans les boutiques Bibbidi Bobbidi une division genrée qui st (...)
  • 15  « Bibbidi Bobbidi Boutique at Magic Kingdom Park », Walt Disney World [En ligne], n. d., https://w (...)

12Le château de Cendrillon inauguré en 1971 au Magic Kingdom/Disney World en Floride contient ainsi un restaurant appelé Le Hall du banquet du roi Stéphane. Son nom actuel, La Table royale de Cendrillon, montre bien qu’il s’agit d’offrir aux touristes l’expérience d’un dîner fastueux où ils seront traités comme des aristocrates12. Même principe avec les boutiques Bibbidi Bobbidi, dont le nom renvoie à la formule magique prononcée dans le long métrage Cendrillon (1950) par Marraine la bonne fée pour transformer en princesse l’héroïne, jusque-là une servante méprisée. Comme l’indique leur appellation, ces lieux, situés à côté des châteaux dans plusieurs parcs de la firme, proposent à de jeunes filles d’être changées en princesses par des coiffeuses et des stylistes, qualifiées de « marraines fées13 ». Une version similaire existe pour les jeunes garçons14, qui deviendront eux des « chevaliers étincelants » (« shining knights »), terme qui renvoie très nettement au mythe arthurien15. Cette fois, le changement de statut du visiteur n’est pas que symbolique, mais est marqué par une transformation physique. Le discours reste toutefois le même. En entrant dans le monde de Disney, n’importe qui peut devenir une princesse ou un chevalier. Cette dimension est d’ailleurs accentuée par le fait que, sur le site de Disney World, la page consacrée à la boutique soit illustrée par des enfants afro-américains habillés en atours médiévalistes.

Illustration 3. Capture d’écran de la page « Bibbidi Bobbidi Boutique at Magic Kingdom Park », Walt Disney World [En ligne], n. d., https://www.disneyworld.eu/​shops/​magic-kingdom/​bibbidi-bobbidi-boutique-park/​ (réalisée le 27/05/2024).

13Décidément, l’entreprise Disney semble affirmer que le rêve d’un Moyen Âge imaginaire est bel et bien accessible à toutes et à tous, quelle que soit leur origine sociale ou leur couleur de peau.

Médiévalisme méritocratique

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  • 16  Karl Marx, Le Capital. Livre premier, Paris, PUF, 1993, p. 481-95. Pour une analyse récente, voir (...)
  • 17  Voir Anthony Galluzzo, La Fabrique du consommateur. Une histoire de la société marchande, Paris, L (...)
  • 18 Voir à ce sujet Laura Morowitz, « The Cathedral of Commerce. French Gothic Architecture and Wanamak (...)

15Mais tout cela ne doit pas faire oublier que les décors des parcs Disney s’inscrivent dans une longue tradition de pratiques commerciales où le médiévalisme est utilisé pour vendre. Cela n’est certes pas nouveau. Les premiers grands magasins du xixe siècle sont en effet conçus comme des outils de fétichisation de la marchandise16. Celle-ci n’est plus vendue dans son contexte social et économique de production, mais pour les valeurs et l’imagerie qui lui sont associées, et mise en scène au sein d’un dispositif suggérant le voyage, l’exotisme et l’ailleurs. Pour ce faire, les grands magasins déploient les marchandises dans des décors rappelant des régions lointaines ou des temps anciens : monde arabe, Chine et Japon fantasmés par l’orientalisme, mais aussi, évidemment Moyen Âge imaginaire du médiévalisme17. Ainsi, certains des plus grands magasins américains du début du xxe siècle sont construits en s’inspirant de cathédrales médiévales et multiplient des décorations intérieures médiévalistes comme Wanamaker’s à Philadelphie18.

  • 19 « Bibbidi Bobbidi Boutique at Magic Kingdom Park », art. cit.

16Mais les châteaux Disney constituent une forme d’innovation par rapport à ces pratiques, car en leur sein, le décor médiévaliste est utilisé pour vendre l’imagerie médiévaliste elle-même. En effet, la marchandise commercialisée ici n’est autre que cette transformation de tailleur en prince, et de servante en princesse. Mais celle-ci n’est en réalité pas à la portée de tous et il faut payer, parfois très cher, pour y avoir accès. À titre d’exemple, plus le visiteur déboursera dans les boutiques Bibbidi Bobbidi, plus la métamorphose en princesse sera complète, avec des prix pouvant aller d’environ 100 $ à plus de 450 $19. De même, parmi les nombreux d’hôtels de la firme Disney autour du parc d’attraction en France, à Marne-la-Vallée, celui proposant un thème médiévaliste est le seul à bénéficier de cinq étoiles.

Illustration 4. Capture d’écran de la page « Disneyland Hôtel », Disneyland Paris [En ligne], n. d., https://www.disneylandparis.com/​fr-fr/​hotels/​disneyland-hotel/​ (réalisée le 27/05/2024). Commentaire : L’hôtel le plus cher de Disneyland Paris est aussi celui qui fait le plus référence à l’imagerie médiévaliste, notamment à celle du château.

17C’est aussi évidemment le plus cher, avec des nuitées coûtant au minimum plusieurs centaines d’euros. La page internet officielle qui le présente et le vend multiplie les phrases proclamant d’emblée que ses visiteurs deviendront, le temps de leur séjour, des rois et des seigneurs. « PLUS QU’UN HÔTEL… VOTRE VÉRITABLE CONTE DE FÉES » annonce-t-on ainsi en titre en lettres capitales, avant de continuer avec des slogans publicitaires comme « Service royal », « Votre parenthèse royale » et surtout « Bienvenue dans votre demeure votre altesse. Célébrez les histoires Disney et écrivez la vôtre20 » qui montrent que le dispositif propose bel et bien aux visiteurs de reproduire en somme les parcours de Cendrillon ou d’un Mickey/Disney dans Le Brave Petit Tailleur. Mais ce cheminement, où il est même possible de dormir dans des chambres thématiques médiévalistes portant les noms de princesses Disney (« Suite Signature Cendrillon », « Suite Signature Belle au Bois Dormant », etc.), n’est plus un objet de consommation de masse, mais un outil de distinction sociale.

  • 21 Renvoyons par exemple à Sopheap Theng, « Le luxe dans le champ du tourisme », Études caribéennes [E (...)
  • 22 Ce qui n’a rien d’étonnant. Les travaux de Sabrina Mittermeier montrent par exemple à quel point le (...)
  • 23 Le discours méritocratique est très présent dans les œuvres de Disney. Citons par exemple Rob Gosse (...)
  • 24 Car, selon cette idéologie, seuls ceux qui ont réussi à entreprendre sont méritants. Pour une criti (...)

18L’idée n’est pas nouvelle et des travaux de sociologie du tourisme montrent bien que les lieux considérés comme les plus dépaysants, notamment les centres historiques anciens (donc parfois en totalité ou en partie médiévaux) sont aussi souvent les plus chers21. Mais encore une fois, chez Disney, ce processus de distinction permet à une classe aisée de magnifier sa réussite sociale22. Eux sont les self-made men/women, eux sont les tailleurs devenus chevaliers, ou les servantes devenues princesses, et leur succès dans le champ socio-économique leur garantit d’avoir accès à la totalité de la rêverie médiévaliste. En somme, les châteaux Disney et les boutiques médiévalistes qui leur sont associées ne sont ni aristocratiques, comme Neuschwanstein, ni démocratiques, comme la firme se plaît à l’affirmer, mais sont des célébrations d’une méritocratie capitaliste23. Ils vendent un modèle qui justifie à terme les inégalités de revenus24.

Le château de l’entrepreneur

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  • 25 Voir à ce sujet Anthony Galluzzo, Le mythe de l’entrepreneur. Défaire l’imaginaire de la Silicon Va (...)

20Walt Disney est celui qui incarne le plus, nous l’avons dit, ce type de parcours, ce « mythe de l’entrepreneur » qui, venu de rien, aurait accompli tout à la seule force de son génie25. Aussi peut-on entrevoir une fonction symbolique supplémentaire aux châteaux des parcs d’attractions Disney. Des changements dans leur conception interviennent en effet à partir du milieu des années 1960.

21Le premier a lieu au moment du dixième anniversaire du château d’Anaheim, lorsque Walt Disney décide d’ajouter sur son fronton ses propres armoiries inspirées de celles d’une famille de chevaliers normands dont il prétend descendre.

Illustration 5. Les armoiries de Walt Disney sur le fronton du château de la Belle au Bois dormant à Disneyland, Anaheim, Californie. Photo par chrisinphilly5448, Wikipedia Commons [En ligne], 17 février 2018, CC BY-SA 2.0, détail, modifié (zoom) le 28/05/2024, https://commons.wikimedia.org/​wiki/​File:Sleeping_Beauty_Castle_Anaheim.jpg (consulté le 28/05/2024).

  • 26  Colin Paterson, « The Lincolnshire Village Honoured in Every Disney Film Since 2006 », BBC News [E (...)
  • 27 En réalité, l’arbre généalogique de la famille Disney remonte au plus loin en Irlande au xviiie siè (...)
  • 28 Voir par exemple « Disney et la France », Disney [En ligne], n. d., https://corporate.disney.fr/a-p (...)
  • 29 Voir Jeff Kurtti, Since the World Began. Walt Disney World, the First 25 Years, Hyperion, New York, (...)
  • 30  « Cinderella Castle Magic Kingdom », All Ears [En ligne], n. d., https://allears.net/magic-kingdom (...)

22Leur nom, d’Isigny, dérivé d’un village de l’actuel Calvados (Isigny-sur-Mer) dont ils seraient originaires, se serait en effet peu à peu transformé en « Disney » lorsqu’ils se seraient installés en Angleterre après la victoire de Guillaume le Conquérant26. On sait aujourd’hui que ce récit est une invention complète27. Pourtant, cela n’empêche pas la firme Disney de le diffuser et de le reproduire sur ses sites officiels28. On retrouve aussi les armes de Disney sur plusieurs châteaux des parcs d’attractions de la multinationale, par exemple celui de Floride29, où elles sont notamment visibles au restaurant La Table royale de Cendrillon30.

  • 31 Jeff Kurtti, Since the world began, op. cit., p. 43.
  • 32 Ibid., p. 35.

23C’est également avec ce nouveau parc que commence la seconde transformation des châteaux Disney. Le projet, lancé du vivant de Walt durant les années 1960, se distingue rapidement de celui d’Anaheim par sa taille. Cette fois, pas question d’abaisser les tours et de limiter la hauteur à 23,4 mètres, comme en Californie. Le château de Cendrillon culmine au contraire à près de 58 mètres et doit être vu au sein d’un vaste espace appelé Disney World comprenant bien plus qu’un parc d’attractions31. Il est également prévu qu’il contienne dans ses niveaux supérieurs des appartements réservés à la famille Disney32.

  • 33  Voir pour une première synthèse William Blanc, « Le grand patronat, de “nouveaux seigneurs !” », R (...)
  • 34 Jacqueline Grislain, Martine Le Blan, « L’art de bâtir chez les Roubaisiens. La filature Motte-Boss (...)

24En opérant ces diverses modifications dans ses châteaux, Walt Disney reproduit là encore une pratique datant du xixe siècle. Cette fois, son modèle n’est pas à chercher du côté de Neuschwanstein, mais de New York et plus largement en Amérique du Nord. En effet, avec le triomphe de la révolution industrielle, certains membres de la bourgeoisie d’affaires, pour s’affirmer les égaux de l’ancienne aristocratie, se sont mis à ériger leurs propres châteaux médiévalistes aux États-Unis et en Europe33. C’est à Roubaix qu’est bâti un des premiers exemples de ce type de structure avec la construction de l’usine textile Motte-Bossu à partir des années 1860. Celle-ci, aujourd’hui en partie conservée, a toutes les apparences d’un donjon34.

  • 35 Voir à ce sujet Thomas Piketty, Le Capital du xxie siècle, Paris, Éditions du Seuil, 2013, p. 553-5 (...)

25Aux États-Unis, le développement d’un capitalisme sans frein après la Guerre de Sécession crée une telle accumulation de capital dans les mains d’une petite minorité35 que les grands financiers de Wall Street, notamment à partir des années 1880, prennent l’habitude de se construire de vastes résidences directement inspirées de modèles médiévaux européens. Il s’agit pour ces hommes de se poser comme les égaux de l’ancienne aristocratie – mais des égaux qui seraient parvenus à la condition de châtelains non par la naissance, mais par le travail et le génie entrepreneurial. La famille Vanderbilt, qui a amassé une fortune immense dans les chemins de fer, l’un des secteurs les plus emblématiques du capitalisme industriel, fait ainsi bâtir à New York à partir des années 1880 plusieurs maisons de style « châteauesque » imitant le Moyen Âge tardif européen.

Illustration 6. La maison de Wm. K. Vanderbilt sur la 5e avenue à New York. Photo par Benjamin J. Falk, Wikipedia Commons [En ligne], v. 1897, Library of Congress, https://commons.wikimedia.org/​wiki/​File:660_5th_Avenue_New_York_City.jpg (consulté le 28/05/2024).

  • 36 Voir à ce sujet Hugh Long, « An Expensive Imitation: How the Vanderbilt Family Became the House of (...)
  • 37 Voir respectivement Matthew M. Reeve, Michael Windover (dir.), Casa Loma. Millionaires, Medievalism (...)
  • 38 Magnat américain de la presse qui s’est lui-même fait bâtir à partir de 1919 un château à San Simeo (...)

26Cela culmine avec la construction, achevée en 1895, de sa résidence sur le domaine de Biltmore (Caroline du Nord), directement inspirée par les châteaux de Blois, de Chambord, et du palais Jacques Cœur de Bourges36. Les Vanderbilt sont loin d’être la seule famille à employer l’imagerie médiévaliste dans leurs demeures. L’usage se diffuse même largement en Amérique du Nord à la fin du xixe siècle et au début du xxe siècle, avec par exemple des résidences comme celle de la Casa Loma à Toronto ou le Glencairn Museum en Pennsylvanie37. Cette pratique est tellement courante que la culture populaire s’en fait rapidement l’écho. Ainsi, le protagoniste du film Citizen Kane (1941) d’Orson Welles est un magnat de la presse (dont la vie est calquée sur celle de William Randolf Hearst38), doté d’une immense fortune, qui a fait construire un château médiévaliste en Floride.

Illustration 7. Capture d’écran du film Citizen Kane d’Orson Welles, 1941. Commentaire : La construction pharaonique du château Xanadu, dont le nom renvoie au poème médiévaliste et orientaliste Kubla Khan (1816) de Samuel Taylor Coleridge.

27Le long métrage commence même par une scène montrant cette demeure colossale, avec une voix off en décrivant toutes les richesses, comme si la résidence castrale inspirée d’un Moyen Âge imaginaire constituait le parfait symbole du capitalisme triomphant :

  • 39 Orson Welles, Citizen Kane, États-Unis, RKO Radio Pictures/Mercury Productions, 1941, 119 min., 00: (...)

Légendaire était Xanadu, où Kubilaï Khan a ordonné la construction de son majestueux palais des plaisirs. Aujourd’hui, Xanadu en Floride est presque tout aussi légendaire, le plus grand terrain de plaisir privé au monde. Ici, dans les déserts de la côte du Golfe, une montagne privée a été commandée et construite avec succès. Cent mille arbres, vingt mille tonnes de marbre ont été rassemblés pour créer la montagne de Xanadu39.

28Dans ce récit, l’immense pouvoir du capitalisme et de l’entrepreneur qui l’incarne est symbolisé non seulement par le château, mais aussi par la capacité de le reproduire dans un espace qui n’est pas fait pour cela (un désert en Floride), et aussi dans une région qui, historiquement, n’en a jamais abrité le moindre. Mais qu’importe : ici, le génie supposé du grand baron de Wall Street et la puissance de l’industrie américaine semblent à même de dépasser les obstacles naturels et historiques.

Le château comme symbole de la modernité triomphante

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  • 40 On la retrouve aussi au cœur de la construction de cathédrales néo-gothiques américaines. Voir à ce (...)

30Orson Welles ne se livre pas là à une simple caricature. Cette prétention à montrer que les châteaux du capitalisme outre-Atlantique sont égaux, voire supérieurs à ceux érigés par les aristocraties et les monarchies médiévales européennes, est bien présente au sein de la classe dominante étasunienne40.

31On la retrouve par exemple rattachée à Douglas Fairbanks, acteur qui, possédant son propre studio, devient vite l’un des patrons les plus puissants de l’Hollywood naissant durant les années 1920. Lui aussi cultive une image d’entrepreneur génial capable de tout, surtout de l’impossible et du gigantesque. Sa superproduction consacrée à Robin des Bois, dont l’appellation officielle (Douglas Fairbanks in Robin Hood) est ainsi largement associée à son nom, lui donne justement l’occasion de montrer ses talents de bâtisseur. Le château érigé dans l’agglomération de Los Angeles qui sert de décor au long métrage – et tout ce qui est relié à lui – est ainsi décrit dans la presse (y compris française) avec tous les superlatifs.

  • 41 Je sais tout, 15 février 1923.
  • 42 The Kansas City Star, 2 juillet 1922.
  • 43 The Birmingham News, 12 novembre 1922.

32Non seulement la construction a été rapide, mais elle a exigé une quantité impressionnante de matériaux : « Rien que pour la façade du château, on dut employer 225 000 kilos de plâtre, 25 400 kilos de fibres de bois, 1 500 sacs de ciment. […] Une fois terminée – ce travail de géants ne demanda que deux mois, – la façade du château se développa sur une longueur de 207 mètres41. » Dans d’autres publications, Fairbanks lui-même prétend que son château dépasse tous les records : « “Doug” […] nous fait remarquer que l’immense salle de banquet est la plus grande pièce du monde, bien plus grande que la salle des pas perdus de la Pennsylvania Station de New York42. » Tout cela incite des journalistes à dire que rien n’est impossible pour les décorateurs de l’industrie du septième art américain : « Il n’y a rien qu’ils ne peuvent reproduire43 » affirme ainsi un article consacré à la construction du château de Fairbanks.

  • 44 Selon Scribner’s en 1896, les « tours des forteresses médiévales n’étaient rien en comparaison aux (...)
  • 45 John Reddy, « The Living Legacy of Walt Disney », Reader’s Digest, juin 1967, p. 170.

33Ce discours renvoie nettement à la rapidité et au gigantisme présidant à la réalisation des gratte-ciels à New York, dont certains s’inspirent directement du modèle des cathédrales gothiques pour mieux les dépasser44. Et sans surprise, on le retrouve aussi lorsqu’il s’agit d’évoquer les châteaux de Disney. Leur construction est le symbole du triomphe de la modernité entrepreneuriale sur la nature : « Regardez ce qui s’est passé à Disneyland… Quand nous y sommes allés, ce n’était que des orangeraies45 » explique ainsi, dans une tirade qui n’est pas sans rappeler l’introduction de Citizen Kane, Roy O. Disney (le frère de Walt) au moment où se lance le projet du Magic Kingdom en Floride. Dans un livre officiel préfacé par Roy E. Disney (le fils de Roy O. Disney), on ne manque pas d’hyperboles, comme pour le donjon du film de Fairbanks, pour décrire la construction de ce même parc d’attractions :

  • 46 Jeff Kurtti, Since the World Began, op. cit., p. 35.

Vu que personne en Amérique n’avait jamais bâti de château de 58 mètres, il était difficile de trouver des artisans expérimentés, alors les artistes et les ingénieurs de WED se sont occupés de la majorité du travail, qui a duré 18 mois. Six cents tonnes d’acier ont été utilisées pour la structure. [On] a par la suite sculpté l’extérieur et l’intérieur afin qu’ils ressemblent à du granite. Les 10 flèches monumentales […], ont été mises en place au-dessus du bâtiment principal et fixées de manière permanente46.

  • 47 Pour Proptotype Expérimental de Communauté de Demain (Experimental Prototype Community of Tomorrow) (...)

34Le château devient ainsi le symbole d’un exploit réalisé par une entreprise qui est le prolongement physique du génie de l’entrepreneur. Le sigle de WED, la société alors en charge de la création des parcs Disney, reprend en effet les initiales complètes de leur fondateur : Walt Elias Disney. Ce que vendent en fin de compte les châteaux qu’il bâtit, c’est la puissance et la supériorité du capitalisme américain incarné par la figure du self-made man. C’est d’autant plus vrai qu’en Floride, le château de Cendrillon s’inscrit dans le projet plus vaste de Disney World, une zone considérable appartenant à la firme Disney dans laquelle Walt prévoit, à l’automne de sa vie, de construire une cité idéale, EPCOT47, qu’il présente en ces termes dans un film promotionnel de 1967 :

  • 48 Arthur J. Vitarelli, EPCOT, États-Unis, Walt Disney Productions, 1967, 26 min., 00:09:40-00:10:08.

EPCOT s’inspirera des nouvelles idées et des nouvelles technologies qui émergent actuellement des centres créatifs de l’industrie américaine. Ce sera une communauté de demain qui ne sera jamais achevée, mais qui introduira, testera et mettra en avant toujours de nouveaux matériaux et systèmes. Et EPCOT sera toujours pour le monde entier une vitrine de l’ingéniosité et de l’esprit imaginatif de la libre entreprise américaine48.

35Ce projet futuriste semble entrer en contradiction avec l’imagerie médiévaliste au centre des parcs Disney. En apparence du moins. Pour le comprendre, revenons encore une fois en arrière.

La cathédrale du commerce

36 

37Achevé en 1913, le Woolworth Building de New York, alors le plus haut bâtiment au monde, est vite décrit comme la « cathédrale du commerce », et ce d’autant plus que la structure s’inspire nettement d’une basilique gothique, non seulement pour son aspect extérieur, mais également pour son architecture intérieure.

Illustration 8. Le Woolworth Building, Wikipedia Commons [En ligne], années 1910, Library of Congress, https://commons.wikimedia.org/​wiki/​File:View_of_Woolworth_Building_and_surrounding_buildings,_New_York_City_LCCN2001695058.jpg (consulté le 28/05/2024).

38Le hall d’entrée est ainsi construit sur un modèle mélangeant style roman et gothique. Il est également doté de peintures imitant des tympans d’église. Mais à la place d’un Christ triomphant sont représentées des allégories du travail et du commerce en habits médiévalistes devant chacune desquelles s’agenouillent deux jeunes adolescents (eux aussi en costumes renvoyant au Moyen Âge).

  • 49 Voir Gail Fenske, The Skyscraper and the City. The Woolworth Building and the Making of Modern New (...)
  • 50 Voir à ce sujet Maureen A. Flanagan, America Reformed. Progressives and Progressivisms, 1890s-1920s(...)
  • 51 Voir à ce sujet William Blanc, « Progressime », dans Anne Besson, William Blanc, Vincent Ferré (dir (...)

39Plusieurs études récentes ont finement analysé la signification de ce programme iconographique49. Le commanditaire du bâtiment, Frank Woolworth, est en effet un magnat de la grande distribution à bas prix. Or, le début du xxe siècle voit surgir aux États-Unis une importante vague de contestations progressistes face aux dégâts provoqués par le capitalisme sauvage de la seconde moitié du xixe siècle50. C’est notamment au sein de ce courant que l’on emploie la métaphore médiévaliste de « barons voleurs » pour désigner les maîtres de Wall Street51.

  • 52 Voir à ce sujet Peter D. Anthony, John Ruskin’s Labour. A Study of Ruskin’s Social Theory, Cambridg (...)

40En installant le siège de son entreprise dans un gratte-ciel gothique, Woolworth souhaite donc modifier la perception négative que le public a d’elle (et de sa propre personne) en lui donnant l’apparence artisanale largement associée aux constructeurs des cathédrales. Ce faisant, l’industriel détourne tout un discours médiévaliste critique utilisé au xixe siècle en Angleterre par des figures comme John Ruskin puis William Morris, qui opposaient fermement la condition de l’artisan médiéval à celle du prolétaire en usine : le premier aurait été libre de créer alors que l’autre est enchainé dans un travail répétitif sur lequel il n’a aucune prise52. En somme, le baron voleur fait place à l’honnête bâtisseur de cathédrale. Plus largement, le grand magnat détourne à son profit tout une symbolique qui fait du Moyen âge imaginaire l’exact opposé de la modernité.

  • 53 Fabienne Bercegol, « L’imaginaire de la cathédrale chez Chateaubriand », Orages. Littérature et cul (...)
  • 54 Samuel Parkes Cadman, « Foreword », dans Edwin A. Cochran, The Cathedral of Commerce, the Highest B (...)

41L’emploi d’une structure rappelant une église médiévale permet aussi d’entremêler les affaires de Frank Woolworth avec l’image idéalisée qui, depuis le début du xixe siècle et des auteurs comme Chateaubriand, associe les cathédrales à un christianisme lumineux et pacifique, digne, voire supérieur aux temples grecs ou romains53. Ce faisant, Woolworth fait non seulement de l’Amérique capitaliste l’émule des grandes civilisations du passé, mais donne également à ses magasins les atours d’une entreprise éthique travaillant pour une grande cause. Ainsi, dans un ouvrage composé à la gloire du gratte-ciel gothique et publié en 1916, le révérend Samuel Parkes Cadman voit dans ce bâtiment la métaphore d’un âge d’harmonie et de prospérité, une nouvelle cathédrale annonçant une utopie libérale où l’humanité serait unie dans la pratique du commerce. La « cathédrale du commerce » serait « le lieu désigné de cet esprit en l’homme qui, à travers les outils de l’échange, lie des peuples étrangers dans l’unité et la paix, et réduit les risques de guerres et de massacres. Telle est ce dont elle témoigne, grâce à Frank W. Woolworth54». Propos renforcé par le fait que l’allégorie du commerce, telle qu’elle est dépeinte dans le hall d’entrée, tient dans ses mains un globe terrestre.

Illustration 9. L’allégorie du commerce à l’intérieur du Woolworth Building. Photo par Muncharelli, via Wikipedia Commons [En ligne], 30 juillet 2015, CC BY-SA 4.0, https://commons.wikimedia.org/​wiki/​File:Woolworth_Building_Interior.jpg?uselang=fr (consulté le 08/05/2024). Commentaire : Bien que vêtu en habits médiévalistes, le jeune page agenouillé à droite de l’allégorie du commerce tient dans ses mains une locomotive à vapeur, un des symboles du capitalisme industriel. Ici, on pare une incarnation de la modernité avec des atours médiévalistes pour lui donner un aspect rassurant.

  • 55 Gail Fenske, The Skyscraper and the City, op. cit., p. 269.

42L’imagerie médiévaliste vient donc vendre au public une utopie moderne, celle d’une planète unie par le capitalisme. Là encore, la contradiction n’est qu’apparente. Face à une société industrielle engendrant des bouleversements sociaux jamais vus, le Moyen Âge est, depuis le xixe siècle, considéré comme une période refuge, un monde de stabilité rassurante. Woolworth reprend cette idée à son compte, et la détourne à son profit. Désormais, espère-t-il, c’est vers la nouvelle cathédrale du capitalisme que le public se tournera pour apaiser ses angoisses, en oubliant au passage que celles-ci sont en partie provoquées par l’absence de régulation des grandes entreprises aux États-Unis en ce début de xxe siècle. La « cathédrale du commerce » s’affiche donc comme le remède de maux qu’on l’accuse alors d’engendrer55.

Medievalwashing

43 

  • 56 « Le Château de la Belle au Bois Dormant se réveille en splendeur après 12 mois de rénovation monum (...)

44De manière frappante, les caractéristiques du médiévalisme du Woolworth Building se retrouvent dans les parcs Disney. Ainsi, dans un article consacré à la rénovation du Château de la Belle au Bois dormant à Disneyland Paris, le site officiel du parc met en avant la collaboration pour ce chantier d’artisans « français reconnus dans le domaine de la restauration de monuments historiques. ». Et le site de continuer son communiqué avec un inventaire qui rappelle celui employé pour décrire le château du film Robin des Bois de 1922 : « 19 900 ardoises ont été créées sur mesure et posées avec 19 900 crochets sur les toits. Elles représentent 7.8 km de coupe d’ardoise.  41 200 feuilles d’or ont été posées à la main par des poseurs de feuilles d’or pour réaliser les dorures du château56. »

45Comme pour le gratte-ciel new-yorkais, il s’agit de faire oublier l’origine industrielle du château du parc Disney en l’associant à des pratiques artisanales considérées comme des héritières directes de celles du Moyen Âge, le tout donnant à cette bâtisse érigée à la fin du xxe siècle un vernis d’authenticité qu’elle n’a pas en réalité, mais qui ajoute à sa valeur marchande.

46Le caractère utopique du Woolworth Building se retrouve aussi dans les châteaux Disney à travers, nous l’avons vu, l’idée qu’il est possible que tout un chacun se change de tailleur en prince. Quant à son aspect rassurant, il est également présent, comme le révèle cette interview dans laquelle John Hench, un scénographe de l’entreprise WED qui a participé à la conception de plusieurs parcs Disney, évoque le château de la Belle au Bois dormant en Floride :

  • 57 Cité dans Priscilla Hobbs, Walt’s Utopia. Disneyland and American Mythmaking, Jefferson, McFarland, (...)

Le château […] est un lieu où on se sent en sécurité. Je pense que les églises médiévales renvoyaient à des émotions similaires. C’étaient des proclamations architecturales affirmant aux populations qu’elles étaient un point de ralliement, un endroit sûr, un refuge57.

47Dans un monde moderne fait de vitesse et de changement, le château de Disney semble désormais incarner un point fixe et stable, un endroit vers lequel un public angoissé peut se tourner, où il est encore possible de croire que le rêve américain du self-made man existe alors que le mythe est largement contredit par la réalité et la reproduction sociale des élites.

  • 58 En référence au greenwashing qu’emploient nombre d’entreprises polluantes pour se donner des atours (...)

48Mais la fonction principale des châteaux de Disney est en fin de compte de fournir des moyens, comme la « cathédrale du commerce » de Woolworth, de faire oublier à quel point cette multinationale est associée avec la modernité industrielle. C’est un médiévalisme employé pour dissimuler le fait que la firme est là avant tout pour vendre des marchandises, et notamment sa propre version d’une rêverie médiévaliste. Une forme de medievalwashing en somme58.

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Notes

1 Voir à ce sujet Anne Besson (dir.), Dictionnaire de la Fantasy, Paris, Vendémiaire, 2018 et William Blanc, Winter is coming. Une brève histoire politique de la fantasy (2018), Montreuil, Libertalia, 2023.

2 Voir à ce sujet Allan Robin, Walt Disney and Europe. European Influences on the Animated Feature Films of Walt Disney, Bloomington, Indiana University Press, 1999 et plus récemment, Susan Aronstein, Tison Pugh (dir.), The Disney Middle Ages. A Fairy-Tale and Fantasy Past, Palgrave Macmillan, New York, 2012.

3 Voir à ce sujet Myriam White-Le Goff, « Enfance » dans Anne Besson, William Blanc, Vincent Ferré (dir.), Dictionnaire du Moyen âge imaginaire, Paris, Vendémiaire, 2022, p. 128-131.

4 Sur ce mythe, renvoyons pour une introduction à Paul Heike, The Myths That Made America. An Introduction to American Studies, Bielefeld, Transcript, 2014, p. 367-420.

5 Nous pensons notamment aux récits de fantasy écrits par Robert E. Howard. Voir à ce sujet William Blanc, « L’illustration de fantasy : un sublime de la confrontation entre monstruosité et barbarie, d’Edmund Burke à Frank Frazetta », dans Anne Besson, Florent Favard, Natacha Vas-Deyres (dir.), Fantasy & médias. Actes du colloque des Imaginales 2022, Chambéry, ActuSF, p. 21-46.

6 Voir à ce sujet Steven Watts, The Magic Kingdom. Walt Disney and the American Way of Life, Columbia, University of Missouri Press, 2001, p. 47.

7 Ibid., p. 265.

8 Chris Strodder, The Disneyland Encyclopedia. The Unofficial, Unauthorized, and Unprecedented History of Every Land, Attraction, Restaurant, Shop, and Event in the Original Magic Kingdom, Santa Monica, Santa Monica Press, 2008 p. 379.

9 Tim O’Day, Disneyland, A Pictorial Souvenir. Celebrating 45 Years of Magic, Disney Editions, New York, 1999, n. p., cité dans Chris Strodder, The Disneyland Encyclopedia, op. cit., p. 379. Notre traduction. Sauf mention contraire, toutes les traductions sont de notre fait.

10 Chris Strodder, The Disneyland Encyclopedia, op. cit., p. 157.

11 Voir à ce sujet Tanja-Isabel Habicht, « La Bavière de Louis Ier et Louis II entre Wagner et Versailles », dans Laura Fournier-Finocchiaro, Tanja-Isabel Habicht (dir.), Gallomanie et gallophobie. Le mythe français en Europe au xixe siècle, Rennes, PUR, 2012, p. 83-95.

12  « Cinderella’s Royal Table », The Disney Wiki [En ligne], n. d. https://disney.fandom.com/wiki/Cinderella's_Royal_Table (consulté le 31/102024).

13 Martha Bayless, « Disney’s Castle and the Work of the Medieval in the Magic Kingdom », dans Susan Aronstein, Tison Pugh (dir.), The Disney Middle Ages, op. cit., p. 39-56.

14 On remarque que la firme Disney opère dans les boutiques Bibbidi Bobbidi une division genrée qui structure également nombre de ses productions. Au garçon, la guerre et l’aventure, symbolisées par la fonction chevaleresque, et à la fille la préoccupation de plaire, qui s’incarne dans le personnage de la princesse. Voir à ce sujet pour une première approche Simon Massei, « L’esquisse du genre. Représentations de la féminité et de la masculinité dans les longs-métrages Disney (1937-2013) », Genre, sexualité & société, n° 17, printemps 2017, mis en ligne le 01/06/207, https://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/gss/4015 (consulté le 14/05/2024), et surtout Christina Gutierrez-Dennehy, « Taming the Fairy Tale. Performing Affective Medievalism in Fantasyland », dans Jennifer A. Kokai, Tom Robson (dir.), Performance and the Disney Theme Park Experience, Cham, Palgrave Macmillan, 2019, notamment p. 76-77. Suite à une enquête sur le terrain, cet article montre bien que les représentations genrées hétéronormatives sous-tendent l’offre des boutiques Bibbidi Bobbidi. Cela va de pair avec la célébration du modèle de la famille blanche de la classe moyenne qui reste un des thèmes centraux des productions et des parcs Disney.

15  « Bibbidi Bobbidi Boutique at Magic Kingdom Park », Walt Disney World [En ligne], n. d., https://www.disneyworld.eu/shops/magic-kingdom/bibbidi-bobbidi-boutique-park/ (consulté le 14/05/2024). Le nom de Shining knight renvoie à un super-héros arthurien créé en 1941. Voir à ce sujet William Blanc, Le Roi Arthur, un mythe contemporain (2016), Montreuil, Libertalia, 2020, p. 451-511.

16  Karl Marx, Le Capital. Livre premier, Paris, PUF, 1993, p. 481-95. Pour une analyse récente, voir Norbert Lenoir, « Le fétichisme chez Marx : une mise en scène du capitalisme », La Pensée, n° 394, 2018, p. 52-63.

17  Voir Anthony Galluzzo, La Fabrique du consommateur. Une histoire de la société marchande, Paris, La Découverte, 2020, notamment p. 37-39.

18 Voir à ce sujet Laura Morowitz, « The Cathedral of Commerce. French Gothic Architecture and Wanamaker’s Department Store, » dans Janet T. Marquardt, Alyce A. Jordan (dir.), Medieval Art and Architecture after the Middle Ages, Cambridge, Cambridge Scholars Publishing, 2009, p. 340-362.

19 « Bibbidi Bobbidi Boutique at Magic Kingdom Park », art. cit.

20  « Disneyland Hôtel », Disneyland Paris [En ligne], n. d., https://www.disneylandparis.com/fr-fr/hotels/disneyland-hotel/ (consulté le 14/05/2024).

21 Renvoyons par exemple à Sopheap Theng, « Le luxe dans le champ du tourisme », Études caribéennes [En ligne], n° 30, avril 2015, mis en ligne le 15/04/2015, http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/etudescaribeennes/7470 (consulté le 28/09/2024).

22 Ce qui n’a rien d’étonnant. Les travaux de Sabrina Mittermeier montrent par exemple à quel point les parcs Disney ont d’abord été conçus pour des consommateurs issus des classes moyennes et supérieures. D’ailleurs, dans certains pays, ils n’apparaissent qu’au moment du développement de ces groupes sociaux, comme cela a été le cas en Chine avec Shanghai Disneyland, ouvert en 2016. Voir à ce sujet Sabrina Mittermeier, A Cultural History of the Disneyland Theme Parks. Middle Class Kingdoms, Bristol, Intellect, 2021, notamment p. 184-194 pour l’exemple de Shanghai Disneyland.

23 Le discours méritocratique est très présent dans les œuvres de Disney. Citons par exemple Rob Gossedge, « The Sword in the Stone. American Translatio and Disney’s Antimedievalism », dans Susan Aronstein, Tison Pugh (dir.), The Disney Middle Ages, op. cit., p. 128 ou Gregory Beaudine, Oyemolade Osibodu, Aliya Beavers, « Disney’s Metaphorical Exploration of Racism and Stereotypes. A Review of Zootopia », Comparative Education Review, vol. 61, n° 1, février 2017, p. 227-234.

24 Car, selon cette idéologie, seuls ceux qui ont réussi à entreprendre sont méritants. Pour une critique récente du cas américain qui nous occupe dans cet article, voir Stephen J. McNamee, Robert K. Miller Jr., The Meritocracy Myth, Lanham, Rowman & Littlefield Publishers, 2004.

25 Voir à ce sujet Anthony Galluzzo, Le mythe de l’entrepreneur. Défaire l’imaginaire de la Silicon Valley, Paris, La Découverte, 2023.

26  Colin Paterson, « The Lincolnshire Village Honoured in Every Disney Film Since 2006 », BBC News [En ligne], 16/10/2023, https://www.bbc.co.uk/news/entertainment-arts-67102341.amp (consulté le 14/05/2024).

27 En réalité, l’arbre généalogique de la famille Disney remonte au plus loin en Irlande au xviiie siècle, au sein des couches populaires. Voir à ce sujet Michael Barrier, The Animated Man. A Life of Walt Disney, Berkeley, University of California Press, 2007, p. 12.

28 Voir par exemple « Disney et la France », Disney [En ligne], n. d., https://corporate.disney.fr/a-propos/disney-et-la-france (consulté le 14/05/2024).

29 Voir Jeff Kurtti, Since the World Began. Walt Disney World, the First 25 Years, Hyperion, New York, 1996, p. 35.

30  « Cinderella Castle Magic Kingdom », All Ears [En ligne], n. d., https://allears.net/magic-kingdom/cinderella-castle-magic-kingdom/ (consulté le 27/05/2024).

31 Jeff Kurtti, Since the world began, op. cit., p. 43.

32 Ibid., p. 35.

33  Voir pour une première synthèse William Blanc, « Le grand patronat, de “nouveaux seigneurs !” », Retronews [En ligne], 23/03/2023, https://www.retronews.fr/societe/long-format/2023/03/23/capitalisme-nouvelle-feodalite (consulté le 14/05/2024).

34 Jacqueline Grislain, Martine Le Blan, « L’art de bâtir chez les Roubaisiens. La filature Motte-Bossut (1853-1985) », Revue du Nord, n° 265, 1985, p. 485-516.

35 Voir à ce sujet Thomas Piketty, Le Capital du xxie siècle, Paris, Éditions du Seuil, 2013, p. 553-554 et 816-818.

36 Voir à ce sujet Hugh Long, « An Expensive Imitation: How the Vanderbilt Family Became the House of Vanderbilt », Global Tides, vol. 8, article 11, 2014.

37 Voir respectivement Matthew M. Reeve, Michael Windover (dir.), Casa Loma. Millionaires, Medievalism, and Modernity in Toronto’s Gilded Age, Montreal, McGill-Queen’s University Press, 2023 et Jennifer Borland, Martha Easton, « Integrated Pasts : Glencairn Museum and Hammond Castle », Gesta, vol. 57, n° 1, 2018, p. 95-118.

38 Magnat américain de la presse qui s’est lui-même fait bâtir à partir de 1919 un château à San Simeon, Californie.

39 Orson Welles, Citizen Kane, États-Unis, RKO Radio Pictures/Mercury Productions, 1941, 119 min., 00:03:18-00:03:43.

40 On la retrouve aussi au cœur de la construction de cathédrales néo-gothiques américaines. Voir à ce sujet Elizabeth Emery, « Postcolonial Gothic : The Medievalisms of America’s “National” Cathedrals », dans Kathleen Davis, Nadia Altschul (dir.), Medievalisms in the Postcolonial World. The Idea of « the Middle Ages » Outside Europe, Baltimore, Johns Hopkins University Press, 2009, p. 237-264.

41 Je sais tout, 15 février 1923.

42 The Kansas City Star, 2 juillet 1922.

43 The Birmingham News, 12 novembre 1922.

44 Selon Scribner’s en 1896, les « tours des forteresses médiévales n’étaient rien en comparaison aux grands bâtiments d’aujourd’hui en taille et en masse ». Cité dans Mona Domosh, « Those “Sudden Peaks That Scrape the Sky” : The Changing Imagery of New York’s First Skyscrapers », dans Leo Zonn (dir.), Place Images in Media. Portrayal, Experience, and Meaning, Savage, Rowman & Littlefield Publishers, 1990, p. 20.

45 John Reddy, « The Living Legacy of Walt Disney », Reader’s Digest, juin 1967, p. 170.

46 Jeff Kurtti, Since the World Began, op. cit., p. 35.

47 Pour Proptotype Expérimental de Communauté de Demain (Experimental Prototype Community of Tomorrow). Voir à ce sujet Steve Mannheim, Walt Disney and the Quest for Community, Burlington, Ashgate, 2002.

48 Arthur J. Vitarelli, EPCOT, États-Unis, Walt Disney Productions, 1967, 26 min., 00:09:40-00:10:08.

49 Voir Gail Fenske, The Skyscraper and the City. The Woolworth Building and the Making of Modern New York, Chicago, University of Chicago Press, 2008 et Elizabeth Emery « The Corporate Gothic of New York’s Woolworth Building : Medieval Branding in the Original “Cathedral of Commerce” », Studies in Medievalism, n° 22, 2013, p. 1-10.

50 Voir à ce sujet Maureen A. Flanagan, America Reformed. Progressives and Progressivisms, 1890s-1920s, Oxford, Oxford University Press, 2007.

51 Voir à ce sujet William Blanc, « Progressime », dans Anne Besson, William Blanc, Vincent Ferré (dir.), Dictionnaire du Moyen âge imaginaire, op. cit., p. 352-356.

52 Voir à ce sujet Peter D. Anthony, John Ruskin’s Labour. A Study of Ruskin’s Social Theory, Cambridge, Cambridge University Press, 1984, notamment p. 45-71.

53 Fabienne Bercegol, « L’imaginaire de la cathédrale chez Chateaubriand », Orages. Littérature et culture (1760-1830), n° 15, 2016, p. 225-245.

54 Samuel Parkes Cadman, « Foreword », dans Edwin A. Cochran, The Cathedral of Commerce, the Highest Building in the World (1917), Baltimore, Thomsen-Ellis Company, 1921, n. p.

55 Gail Fenske, The Skyscraper and the City, op. cit., p. 269.

56 « Le Château de la Belle au Bois Dormant se réveille en splendeur après 12 mois de rénovation monumentale à Disneyland Paris », Disneyland Paris [En ligne], 17/12/2021, https://disneylandparis-news.com/chateau-renovation/ (consulté le 17/05/2024).

57 Cité dans Priscilla Hobbs, Walt’s Utopia. Disneyland and American Mythmaking, Jefferson, McFarland, 2015, p. 144.

58 En référence au greenwashing qu’emploient nombre d’entreprises polluantes pour se donner des atours écologiques. Voir Aurélien Berlan, Guillaume Carbou, Laure Teulières (dir.), Greenwashing. Manuel pour dépolluer le débat public, Paris, Éditions du Seuil, 2022. Il y aurait même un parallèle à faire entre greenwashing et medievalwashing, tant le Moyen âge imaginaire véhicule une imagerie associée à une nature inviolée.

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Table des illustrations

Légende Illustration 1. Le château de Neuschwanstein. Photo par Thomas Wolf, Wikipedia Commons [En ligne], 31 juillet 2013, CC BY-SA 3.0, https://commons.wikimedia.org/​wiki/​File:Schloss_Neuschwanstein_2013.jpg (consulté le 14/05/2024).
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Légende Illustration 2. Le château de la Belle au Bois dormant à Disneyland, Anaheim, Californie. Photo par HarshLight, Wikipedia Commons [En ligne], 31 octobre 2016, CC BY 2.0, https://commons.wikimedia.org/​wiki/​File:Halloween_Winter_Castle_(34399872936).jpg (consulté le 14/05/2024).
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Légende Illustration 3. Capture d’écran de la page « Bibbidi Bobbidi Boutique at Magic Kingdom Park », Walt Disney World [En ligne], n. d., https://www.disneyworld.eu/​shops/​magic-kingdom/​bibbidi-bobbidi-boutique-park/​ (réalisée le 27/05/2024).
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Légende Illustration 4. Capture d’écran de la page « Disneyland Hôtel », Disneyland Paris [En ligne], n. d., https://www.disneylandparis.com/​fr-fr/​hotels/​disneyland-hotel/​ (réalisée le 27/05/2024). Commentaire : L’hôtel le plus cher de Disneyland Paris est aussi celui qui fait le plus référence à l’imagerie médiévaliste, notamment à celle du château.
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Légende Illustration 5. Les armoiries de Walt Disney sur le fronton du château de la Belle au Bois dormant à Disneyland, Anaheim, Californie. Photo par chrisinphilly5448, Wikipedia Commons [En ligne], 17 février 2018, CC BY-SA 2.0, détail, modifié (zoom) le 28/05/2024, https://commons.wikimedia.org/​wiki/​File:Sleeping_Beauty_Castle_Anaheim.jpg (consulté le 28/05/2024).
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Légende Illustration 6. La maison de Wm. K. Vanderbilt sur la 5e avenue à New York. Photo par Benjamin J. Falk, Wikipedia Commons [En ligne], v. 1897, Library of Congress, https://commons.wikimedia.org/​wiki/​File:660_5th_Avenue_New_York_City.jpg (consulté le 28/05/2024).
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Légende Illustration 7. Capture d’écran du film Citizen Kane d’Orson Welles, 1941. Commentaire : La construction pharaonique du château Xanadu, dont le nom renvoie au poème médiévaliste et orientaliste Kubla Khan (1816) de Samuel Taylor Coleridge.
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Légende Illustration 8. Le Woolworth Building, Wikipedia Commons [En ligne], années 1910, Library of Congress, https://commons.wikimedia.org/​wiki/​File:View_of_Woolworth_Building_and_surrounding_buildings,_New_York_City_LCCN2001695058.jpg (consulté le 28/05/2024).
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Légende Illustration 9. L’allégorie du commerce à l’intérieur du Woolworth Building. Photo par Muncharelli, via Wikipedia Commons [En ligne], 30 juillet 2015, CC BY-SA 4.0, https://commons.wikimedia.org/​wiki/​File:Woolworth_Building_Interior.jpg?uselang=fr (consulté le 08/05/2024). Commentaire : Bien que vêtu en habits médiévalistes, le jeune page agenouillé à droite de l’allégorie du commerce tient dans ses mains une locomotive à vapeur, un des symboles du capitalisme industriel. Ici, on pare une incarnation de la modernité avec des atours médiévalistes pour lui donner un aspect rassurant.
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Pour citer cet article

Référence électronique

William Blanc, « Les châteaux des parcs Disney. Le médiévalisme comme mythe entrepreneurial »Belphégor [En ligne], 22-2 | 2024, mis en ligne le 28 novembre 2024, consulté le 18 mars 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/belphegor/6411 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/130ve

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William Blanc

Historien

William Blanc est historien. Après ses études consacrées à l’histoire du Moyen Âge à l’université Paris 1 puis à l’EHESS, ses recherches portent aujourd’hui principalement sur les représentations contemporaines du Moyen Âge (le médiévalisme), que ce soit dans les usages politiques et sociaux ou bien dans la culture populaire (BD, cinéma, jeux, séries télévisées, arts graphiques), thème auquel il a consacré plusieurs ouvrages. Il a notamment publié Le Roi Arthur, un mythe contemporain (Libertalia, 2016), Winter is Coming, une brève histoire politique de la fantasy (Libertalia, 2018) et co-dirigé, avec Anne Besson et Vincent Ferré, le Dictionnaire du Moyen âge imaginaire (Vendémiaire, 2022). Il écrit aussi des articles de vulgarisation sur ses champs de recherches, notamment pour les magazines L’Histoire, Historia, la BNF, Retronews, Chimères ou la chaîne YouTube Nota Bene.
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