Résumé
Cet article a pour sujet les origines et la floraison, entre les années 1930 et 1960, de ce qu’on appelle aujourd’hui le country noir. Situant ce genre dans le sillage de William Faulkner et Erskine Caldwell et dans le contexte d’un roman noir américain qu’on a trop souvent tendance à réduire au thème hammetto-chandlerien de la « ville pourrie », il en analyse les principales options narratives ainsi que les caractéristiques matérielles, dans une perspective à la fois esthétique et sociologique. Après avoir relié l’essor du genre à celui du livre de poche (paperback) dans les années 1950, il s’interroge sur les raisons de son succès, qui apparaît paradoxal à l’heure où la société américaine – et les lecteurs de paperbacks avec elle – semble se reconstruire autour d’un nouveau paradigme essentiellement urbain, le white collar (col blanc), aux antipodes des criminels solitaires du Sud ou de l’Ouest qui peuplent le country noir.
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- 1 Cet article reprend sous un angle différent certains éléments développés au chapitre 8 de mon ouvra (...)
- 2 Littéralement « dos en papier ». J’emploierai ici ce terme, qui suggère, davantage que le mot franç (...)
- 3 Au cours des années 1950, où les appellations génériques étaient plus fluides, le terme « backwoods(...)
1Un des phénomènes remarquables de l’histoire littéraire américaine de l’après-guerre est l’apparition du country noir, genre qui se développe au sein d’une forme de publication elle aussi émergente, le livre de poche (en anglais paperback2). En effet, le filon country ou backwoods – on pourrait discuter longuement de ces termes, dont l’usage n’est pas très stable et varie selon les époques3 –, est l’un des plus riches du paperback criminel des années 1950. Et, on le devine déjà à ces appellations, il évoque un univers opposé à celui des mean streets (« rues mauvaises ») hammettiennes et chandleriennes, dans lesquelles on a trop souvent coutume de voir le décor exclusif du roman noir américain. De fait, le polar de l’après-guerre semble largement quitter ce milieu urbain pour basculer vers des univers ruraux ou sauvages, lieux et contrées perdues qui exercent leur fascination au moment même où les mouvements de l’histoire tendent à en couper la population américaine mainstream.
- 4 C. Wright Mills, White Collar. New York, Oxford University Press, 1951 – Les Cols blancs. Essai sur (...)
2Tout en donnant une idée de l’ampleur et de la variété de ce genre, on voudrait s’interroger sur le paradoxe en vertu duquel une industrie, le paperback – qui représente, dans sa technologie et son économie mêmes, la quintessence d’une culture de masse produite par, et pour, une société d’après-guerre essentiellement urbaine – se focalise brusquement sur ce qui semble constituer sa parfaite antithèse : des histoires de criminels solitaires situées dans des lieux reculés du Sud, de l’Ouest ou du Sud-Ouest, loin des grandes villes et de leurs périphéries, loin de cet univers de « cols blancs » qui s’affirmait, à la même époque, comme le paradigme dominant de la société américaine moderne. C’est ce nouveau paradigme social que décrit, exactement à l’époque où le country noir s’affirme, l’ouvrage du sociologue C. Wright Mills, White Collar, dont la première édition date de 19514 et qui forme avec le corpus dont je parlerai un parfait contraste : de même que les personnages dociles qu’il décrit semblent le négatif des criminels non-domesticables des espaces naturels ou ruraux, de même l’univers managérial lisse et moderne du col blanc s’oppose aux relations rugueuses et archaïques mises en scène dans le country noir.
De la jungle d’asphalte à la prairie perdue
3Or, c’est précisément par rapport à ce nouvel univers urbain qu’il faut comprendre le country noir. En d’autres termes, le paradoxe premier du country noir, c’est qu’il ne s’agit pas d’un genre ancien et préurbain mais d’un genre nouveau et post-urbain. Tout le country noir est produit, consommé, regardé depuis la ville, même si cela n’implique pas que tous ses auteurs soient des citadins. C’est donc l’invisible dialectique de l’urbain et du country qui fonde les caractéristiques du genre. Pour la rendre apparente, et avant d’en venir aux paperbacks représentant le country noir proprement dit, je voudrais justement partir d’un point de vue urbain, celui du film Asphalt Jungle (Quand la ville dort) de John Huston, chef d’œuvre du film noir, adapté en 1950 d’un roman de W. R. Burnett publié l’année précédente. L’histoire est située dans une grande ville anonyme du Midwest et raconte le casse d’une bijouterie par un groupe de voleurs qui sont tous des professionnels indépendants, les derniers vrais artisans dans un monde de chaîne de montage ou, si l’on veut, les derniers rebelles dans un monde conformiste.
4Dans une des scènes importantes du film, l’un des gangsters, Dix Handley (interprété par Sterling Hayden), raconte à son amie Doll (Jean Hagen) son enfance dans le Sud : comment sa famille a perdu sa ferme et ses chevaux pendant la crise et comment, depuis lors, il rêve de gagner assez d’argent, justement en pariant sur les chevaux, pour retourner sur place et racheter cette ferme. Voici la transcription de leur dialogue :
[Doll] – You were talking in your sleep.
[Dix] – What was I saying?
– It was all jumbled up, but I heard one word real plain. You called it out several times. ‘Corn cracker.’ What’s that mean?
– Corn cracker. Corn cracker was a colt.
– Yeah, it would be.
– Yeah. He was a tall, black colt. Yeah, I remember what I was dreaming. I was up on that colt’s back. My father and my grandfather were there, watching the fun. That colt was buckjumping and pitching...and tried to scrape me off against the fence, but I stayed with him.
Then I heard my granddaddy say, ‘He’s a real Hanley, that boy. A real Hanley.’ And I felt proud as you please.
– Did that really happen, Dix, when you were a kid?
– No. The black colt pitched me into a fence on the first buck...and my old man come over, prodded me with his boot, said: ‘Maybe that'll teach you not to brag about how good you are on a horse.’
– It’s nice to hear you laugh.
– You know something? One of my ancestors imported the first Irish thoroughbred into our county.
– Is that a fact?
– Sure. Why, our farm was in the family for generations. One hundred sixty acres, fine barn and seven brood mares.
– It sounds wonderful, Dix.
– It was. And then everything happened at once. My old man died, and we lost our corn crop. That black colt I was telling you about, he broke his leg and had to be shot. That was a rotten year. I’ll never forget the day we left. Me and my brother swore we’d buy Hickorywood Farm back someday.
– Growing up in a place and then having to leave must be awful. I never had a proper home.
– Twelve grand would have swung it, and I almost made it once. I had more than $5000 in my pocket...and Pampoon was running in the Suburban. I figured he couldn’t lose. I put it all on his nose. He lost by a nose.
– Drink your coffee, honey, before it gets cold.
- 5 John Huston, scénario de John Huston et Ben Maddow, The Asphalt Jungle, MGM, 1950. Transcription du (...)
– The way I figure, my luck’s just gotta turn. One of these days, I’ll make a real killing, then I’m gonna head for home. First thing I do, I’ll take a bath in the creek and get this city dirt off me5.
5Le thème country se présente ici comme le récit d’une dépossession initiale. Celle-ci constitue une sorte de péripétie tragique (« And then everything happened at once ») ou, si l’on veut, de chute biblique : à l’écran, les souvenirs de Dix Handley transfigurent son visage maussade, éveillant l’être innocent qui sommeille en lui et soulignant, par contraste, la corruption des villes modernes, matérialisée par la « crasse » (« dirt ») qu’il rêve de nettoyer de son corps dès qu’il reviendra à la rivière de son enfance, à la campagne. De même, l’évocation des liens familiaux disloqués, de la propriété confisquée et de l’exode traumatique (« I’ll never forget the day we left ») s’oppose à sa condition actuelle de malfrat urbanisé et lumpenprolétarisé, de pigeon qui se fait plumer sur les champs de course, obsédé par l’idée de se refaire, à tous les sens du terme, en pariant sur les chevaux : ces mêmes chevaux qui, par une ironie du destin, ne sont plus les compagnons de son enfance mais les instruments de sa némésis.
- 6 Comme l’écrit Robert E. Park, « The city is, finally, the natural habitat of civilized man. », dans (...)
- 7 « It is as though the space between us were time: an irrevocable quality », dit Darl en regardant s (...)
6Ce qui transparaît dans le désir à contre-courant de Dix Handley, qu’on sent d’ores et déjà irréalisable, c’est la loi énoncée par l’école de Chicago à l’aube du xxe siècle : l’environnement écologique, économique et social de l’homme contemporain, c’est la ville6. Pour généraliser, on peut dire que le tragique, chez Burnett et chez Huston, c’est celui d’hommes qui regardent derrière eux et perdent leurs appuis, parce que ce qu’il y avait derrière eux n’existe plus. La société à laquelle ils appartenaient a elle-même disparu. Autrement dit, la distance entre la campagne et la ville, ce n’est pas que de l’espace, c’est surtout du temps, le temps de l’histoire qui a fait s’effondrer la structure anthropologique et économique du vieux monde country ou backwoods. C’est cette même distance-temps entre passé-country et présent-ville que, pour lancer ici un parallèle avec Faulkner que nous retrouverons plus loin, les membres de la famille Bundren parcourent en allant enterrer leur mère et épouse dans As I Lay Dying (1931)7. Et cette distance, ce temps, c’est par un regard en arrière qu’ils se découvrent, depuis le point de vue de la ville : c’est-à-dire, pour exprimer cela en termes romanesques, qu’ils se découvrent toujours et nécessairement quand il est trop tard.
7C’est ce même paradoxe spatio-temporel qui fonde le country noir d’après-guerre, dont il nous faut à présent esquisser l’histoire et la typologie.
Le country noir, d’Erskine Caldwell à Charles Williams
8Le country noir s’impose comme production massive avec la révolution du paperback original de 1950 – l’année même où Huston réalise Asphalt Jungle. Il y a là une coïncidence de dates, et sans doute davantage qu’une coïncidence : tout se passe comme si le désir de retour en arrière qui s’incarne en Dix Handley symbolisait celui qui s’empare au même moment de la fiction de masse américaine.
- 8 A propos du paperback original, notamment (mais pas seulement) criminel, on consultera Malcolm Cowl (...)
- 9 Typologie empruntée pour l’essentiel à Malcolm Cowley, The Literary Situation, op. cit., p. 123.
- 10 Notamment celle d’Anthony Boucher (William Anthony Parker Whyte, 1911-1968), le meilleur critique d (...)
9Rappelons que le paperback original est, comme son nom l’indique, un livre qui sort directement en poche, sans avoir connu de publication préalable en hardback : il représente une révolution éditoriale fondamentale pour l’histoire du polar8. Né en 1950, donc, le paperback original développe aussitôt une arborescence de genres et sous-genres qui se constitue de manière empirique, suivant la demande du marché et l’ingéniosité des auteurs et éditeurs. Le genre « noir », qui n’existait pas encore aux États-Unis sous ce nom, traverse plusieurs de ces sous-genres, eux-mêmes passablement enchevêtrés les uns avec les autres, qui se définissent essentiellement par le type de personnages – généralement des rebelles et des marginaux – et de relations sulfureuses qu’ils mettent en avant : drogués, prostituées, homos, alcooliques, psychopathes, nymphomanes, délinquants juvéniles, cowboys, détectives, gangsters, mafias portuaires, « sexe prolétarien », « sexe historique », frictions raciales, etc.9 Cette focalisation sur les marges explique en partie la déconsidération du paperback original en tant que forme éditoriale, mal vue (ou plutôt, pas vue du tout) par la critique, à de rares exceptions près10.
10Or, parmi ces sous-genres, il y a toute une série de récits qui s’inscrivent dans le sillage des romans ruraux d’Erskine Caldwell, en particulier Tobacco Road (La route au tabac, 1932) et God’s Little Acre (Le petit arpent du bon Dieu, 1933), parus au début des années 1930 mais qui devinrent d’énormes best-sellers à retardement lorsqu’ils furent réédités en paperback après la Deuxième Guerre mondiale (Fig. 1 et 2).

Figure 1 : Erskine Caldwell, Tabacco Road, Signet, 1956 1932. Illustration James Avati. Figure 2 : Erskine Caldwell, God’s Little Acre, Signet, 1956 1933. Illustration James Avati
11Les romans tragicomiques de Caldwell décrivent les comportements pulsionnels, libidineux et souvent violents de paysans pauvres de Géorgie, détachés sur un arrière-plan de perte de fécondité de la terre. Or, étant donné les ventes colossales de ces livres lorsqu’ils sont réédités en format paperback, infiniment supérieures à celles de leurs premières éditions en grand format, on peut considérer qu’ils constituent eux aussi, en fin de compte, non pas tant des rééditions que des originaux. De surcroît, les vingt années qui séparent leur première parution de l’édition paperback, loin de les démoder, ajoutent encore à ce qui fait leur puissance d’attraction pour un lecteur citadin col blanc : la distance dans l’espace et dans le temps (et rappelons-nous que l’espace, c’est justement du temps). Elle renforce le caractère archaïque de l’univers présenté dans les romans, qui deviendra à son tour une caractéristique fondamentale du country noir des années 1950. Ceux-ci constituent en effet des récits régressifs par excellence, dont la plupart pourraient se dérouler dans les années 1930 – jusqu’au moment où la modernité y fait irruption pour détruire leur équilibre traditionnel.
12Les récits inspirés par le succès de Caldwell étaient variés et n’étaient pas tous criminels. Certains se focalisaient sur l’aspect « libido et pauvreté rurale » de Tobacco Road, comme les romans de Harry Whittington écrits sous le pseudonyme de Hallam Whitney, aux couvertures décorées de jeunes paysannes provocantes (Fig. 3).
13D’autres, relevant de la « comédie de ploucs » (hick comedy), prenaient pour protagonistes des paysans roués, spécialistes de l’alambic clandestin et de toutes espèces de trafics, tournant en bourrique les shérifs qui cherchaient désespérément à les coincer, comme dans la série de romans à succès écrits par le petit frère de William Faulkner, John, qui commence avec Cabin Road (Gold Medal, 1951) et se poursuit avec, entre autres titres, Uncle Good’s Girls (Gold Medal, 1952) (Fig. 4 et 5).

Figure 4 : John Faulkner, Cabin Road, Gold Medal, 1951. Figure 5 : John Faulkner, Uncle Good’s Girls, Gold Medal, 1952. Illustration Barye Phillips
- 11 Traduit autrefois en Série noire sous le titre Fantasia chez les ploucs, récemment retraduit chez G (...)
14C’est cette même veine comique que l’on retrouve chez Charles Williams dans son célèbre Diamond Bikini (Gold Medal, 195611) et sa suite Uncle Sagamore and his Girls (Gold Medal, 1959 ; Aux urnes les ploucs!, Série noire, 1960), qui reprennent tous deux la tradition de l’« oncle » madré entouré de jolies filles, héritée du roman de John Faulkner, publié chez le même éditeur Fawcett dans la collection Gold Medal (Fig. 6 et 7).

Figure 6 : Charles Williams, The Diamond Bikini, Gold Medal, 1956. Illustration Casey Jones. Figure 7 : Charles Williams, Uncle Sagamore and His Girls, Gold Medal, 1959
15Une troisième série de romans se focalise davantage sur les aspects criminels de la violence des espaces ruraux ou sauvages : c’est celle que l’on peut qualifier aujourd’hui de country noir, mais il est important de souligner qu’elle naît de la même matrice que les deux variantes précédentes et qu’elle est souvent produite par les mêmes auteurs. Je verrais volontiers dans ce country noir le résultat de la fécondation, si j’ose dire, de Caldwell par l’autre plus grand bestseller de paperbacks dans l’après-guerre : Mickey Spillane, l’auteur d’I, the Jury (Fig. 8) et inventeur du détective violent Mike Hammer – soit l’alliance de la libido tellurique caldwellienne et de la pulsion de mort spillanienne. Seul le paperback original de l’époque, qui remixait démocratiquement les littératures haute et basse, rurale et citadine, permettait de telles rencontres entre des formes qui auraient sans doute été maintenues séparées dans le monde éditorial plus balisé et hiérarchisé de l’avant-guerre. C’est encore à Charles Williams que l’on doit le développement de ce filon, avec son premier roman pour la collection Gold Medal, Hill Girl (1951), qui fut un bestseller avec un tirage de plus d’un million d’exemplaires (Fig. 9) et reprenait certains éléments de God’s Little Acre pour en faire son intrigue principale (une femme fait tourner la tête à deux frères, un paysan et un playboy, qui finissent par s’entretuer) tout en en accentuant la violence.

Figure 8 : Mickey Spillane, I, the Jury, Signet, 1948. Illustration Lu Kimmel. Figure 9 : Charles Williams, Hill Girl, Gold Medal, 1951. Illustration Barye Phillips
16D’un point de vue visuel (on n’insistera jamais assez sur l’importance du point de vue dans l’édition/promotion des paperbacks : chaque couverture ouvre une profondeur de champ qui s’offre au regard d’un acheteur/lecteur supposé masculin), la couverture du roman de Williams emprunte à celles de Caldwell (Fig. 1 et 2) l’univers rural de ses personnages, en même temps qu’elle reprend à celle de Spillane (Fig. 8) l’arme à feu oblique et très phallique du protagoniste masculin. Le cadrage cinématographique de la couverture de Hill Girl est pratiquement le même que celle d’I, the Jury. Il oriente le point de vue du lecteur, qui s’emboîte sur celui de l’homme vu de dos, vers la femme provocante au cœur de l’illustration. Cette couverture envoie ainsi au lecteur un faisceau de signaux qui fusionne les traditions, en réalité très hétérogènes, de Caldwell et Spillane : le roman de pauvreté rurale sudiste de la Dépression, d’une part ; le roman de privé new-yorkais macho de l’après-Deuxième Guerre mondiale, de l’autre. Comme la femme en son centre, cette couverture fait de l’œil au lecteur, en suggérant les plaisirs d’une double transgression, celle du sexe et de la violence, en même temps que d’une double régression, à travers les barrières de l’espace et du temps.
Vers le Sud
17Williams continuera de développer le genre du noir caldwellien avec des romans comme Big City Girl, River Girl (peut-être son chef d’œuvre) et Girl Out Back (Fig. 10, 11, 12).

Figures 10 : Charles Williams, Big City Girl, Gold Medal, 1951. Illustration Barye Phillips. Figure 11 : Charles Williams, River Girl, Gold Medal, 1951. Illustration Barye Phillips. Figure 12 : Charles Williams, Girl Out Back, Gold Medal, 1951. Illustration Ernest « Darcy » Chiriaka
18Ce genre est également illustré par Jim Thompson dans Cropper’s Cabin (Lion Books, 1952) (Fig. 13) et par d’autres auteurs des années 1950 comme Gil Brewer, Harry Whittington, Day Keene, Clifton Adams, Paul Connolly (pseudonyme du journaliste Tom Wicker) ou Elliott Chaze.
19Tous représentent une remarquable génération d’écrivains nés dans le Sud ou Sud-Ouest des États-Unis, dont les histoires se déroulent entre la terre aride des métayers exploités et le bayou touffu des habitants des marais (ou parfois, comme chez Jim Thompson et Clifton Adams, dans les champs pétrolifères de l’Oklahoma ou du Texas – ou ceux du Mississippi chez Elliott Chaze dans Black Wings Has My Angel). Pris ensemble, leurs romans représentent une bonne partie du corpus du roman noir des années 1950 et certains des titres classiques des collections Gold Medal et Série noire.
20Ces romans noirs country mettent en valeur une séduction féminine débridée. Or, même si on pressent en eux, et sur leurs couvertures, le début du paperback rural sexuel de pure exploitation (genre qui s’affirmera dans les années 1960 comme une sous-catégorie du livre de poche pornographique), les personnages féminins des récits sont en réalité plus complexes que ne peuvent le laisser penser les illustrations. Ce sont moins des objets sexuels que des sujets qui remettent en cause la domination masculine et s’apparentent à la nature sauvage, par opposition au monde brutal et calculateur des hommes. Sur le plan symbolique, les romans noirs ruraux sont en effet souvent fondés sur le contraste entre une nature luxuriante et vierge, parfois sombre et terrifiante mais encore immaculée, et l’empiètement, aux marges de son univers, d’une Amérique urbaine, moderne et corruptrice.
21Cette intrusion peut être représentée de bien des façons ; un dispositif fréquent est celui de l’argent fatal qui fait irruption dans les forêts et marécages de la région du Golfe du Mexique et suscite une concurrence fiévreuse et meurtrière au sein de la population locale. Il peut s’agir de la paie d’une usine qui se perd dans les marais, quand l’avion qui la transporte s’écrase, comme dans Swamp Sister de Robert Edmond Alter (Gold Medal, 1961, Fig. 14), ou du butin d’un hold-up de banque caché par un gangster dans les marécages de Floride (Harry Whittington, Backwoods Tramp, Gold Medal, 1959, Fig. 15) ou encore, comme dans Swamp Sanctuary de Bob McKnight (Ace Books, 1959, Fig. 16), de la prime sur la tête d’un meurtrier évadé du pénitencier, qui s’est réfugié dans son clan des Everglades.

Figure 14 : Robert Edmond Alter, Swamp Sister, Gold Medal, 1961. Illustration Mitchell Hooks. Figure 15 : Harry Whittington, Backwoods Tramp, Gold Medal, 1959. Illustration Barye Phillips. Figure 16 : Bob McKnight, Swamp Sanctuary, Ace, 1959. Illustration Robert Maguire
22Dans tous ces romans, on peut voir les auteurs de country noir reprendre, sous une forme criminelle, deux tropes fondamentaux du roman sudiste, l’un propre à Caldwell, l’autre à Faulkner. À Caldwell, ils empruntent le motif de la fièvre de l’or, qui occupe une place centrale dans God’s Little Acre où il symbolise la mort de la terre, qui n’est plus patiemment cultivée mais creusée comme un gruyère par des paysans possédés par la fièvre illusoire de l’agent facile. À Faulkner, ils empruntent un thème remontant à Sanctuary (1931), celui de la profanation. De ce point de vue, Sanctuary constitue, avec les premiers romans de Caldwell, la référence primordiale de tout le country noir des années 1950. Le roman avait été un succès en paperback, réimprimé plusieurs fois chez Signet, et une influence évidente sur des auteurs comme Brewer ou Whittington. Comme on le sait, Faulkner y raconte, entre autres choses, l’enlèvement d’une jeune femme sudiste, Temple, par un gangster sexuellement impuissant venu de la ville, Popeye, et son viol par le même Popeye armé d’un épi de maïs. L’histoire symbolique de Sanctuaire – mot qui a en anglais deux sens, celui de « sanctuaire » et celui de « refuge » – c’est qu’il n’y a plus ni sanctuaire ni refuge contre la violence moderne : ni la femme, dont la pureté était la clé de voûte de la mythologie du Sud et qui est violée et contaminée par le vice urbain ; ni la nature immaculée du Sud, qui est profanée par les formes contemporaines et concomitantes de l’exploitation et de la criminalité.
- 12 Comme on l’apprend de l’édition française parue en Série noire (Le chant de l’alligator, Gallimard, (...)
23Le titre ironique de Faulkner suggérait donc, de plusieurs façons, l’impossibilité de résister au mal et à la modernité, ou au mal comme modernité et à la modernité comme mal : or, c’est bien là le problème tragique que l’on retrouve au cœur du noir sudiste. Il est présent dans les titres et sur les couvertures, comme celle du roman de McKnight, Swamp Sanctuary (« Le sanctuaire des marécages », Fig. 16), dont le blurb énonce le dilemme fondamental, « Blood Kin Code vs. Blood Money », c’est-à-dire, littéralement, le « code du sang » contre « l’argent du sang » : d’un côté, la vieille assise anthropologique des clans ruraux et, de l’autre, l’argent sale qui la détruit inexorablement. Et c’est un même double-bind que l’on retrouve dans Backwoods Tramp, l’un des grands romans noirs des années 1950, que Whittington avait à l’origine intitulé Never Find Sanctuary (« Tu ne trouveras jamais de sanctuaire/refuge »)12, avec son héros à la Charles Williams, sportif déclassé et vétéran de la guerre tombé dans une histoire criminelle au cœur des marais, où il s’éprend d’une fille primitive, passionnée et tragique, qui ne peut être arrachée à son univers sans en mourir. Le sanctuaire/refuge impossible, cette allégorie qui rayonne à l’arrière-plan du country noir, figure la fin d’une société qui se voit disloquée et recomposée par l’économie et la culture mainstream américaines.
24Revenons pour finir à notre question initiale : comment expliquer le paradoxe de la naissance du country noir, comme phénomène massif, à une époque où la société américaine est sans cesse plus urbanisée ? Il y a, à cette question, au moins trois réponses possibles. Premièrement, une réponse démographique. Si l’on tient compte du fait que la population urbaine des États-Unis n’a dépassé la population rurale qu’en 1920, le basculement vers l’Ouest et le Sud de tout un pan du roman noir d’après-guerre semble traduire une nostalgie collective envers une société et un paysage en voie de disparition, exprimée par une génération d’auteurs qui étaient eux-mêmes nés peu avant que la balance ne penche du côté urbain.
- 13 Michael Denning, The Cultural Front. Londres, Verso, 1997, p. 467.
25Deuxièmement, une réponse culturelle. Comme le note Michael Denning, les grandes migrations du Sud vers le Nord pendant la guerre changent les inflexions de la culture nationale américaine, qui acquiert alors « un accent du sud13 », sensible par exemple dans l’essor du blues urbain de Chicago ou du rhythm and blues, ou dans le rock d’Elvis Presley, ou dans le passage de William Faulkner du rang d’écrivain régionaliste à celui de grand romancier national. Certes, tout ce qui est country n’est pas sudiste et tout ce qui est sudiste n’est pas country, mais ce sont là des courants qui s’entrecroisent et se favorisent mutuellement.
26Troisièmement, une réponse sociologique. Le country noir n’est pas, comme j’ai essayé de le suggérer, un genre distinct du polar urbain, mais plutôt son envers. Son économie archaïque, autarcique, précapitaliste, ses espaces non cartographiés, ses structures claniques, ses outlaws, ses jeunes femmes sauvages et sa sexualité débridée figurent l’exact négatif du mainstream d’après-guerre, avec sa société réorganisée sur des bases managériales, ses nouvelles classes moyennes enfermées dans le cycle sans fin de la consommation et du crédit, sa vie maritale tristounette, ses espaces suburbains surveillés par les voisins curieux ou par la police, ses formes de déviance traquées par le FBI. Le country noir représente l’envers de tous ces modes de contrôle social et spatial, qui s’imposent avec force au sortir de la Deuxième Guerre mondiale. C’est pourquoi il prend son essor exactement au même moment que le roman de procédure policière (McKinlay Kantor, Signal 32, 1950), qui met au contraire l’accent sur la surveillance du territoire et de la société et dont l’emblème est la voiture-radio qui patrouille dans les rues de la ville. C’est cette même voiture-radio que l’on retrouve aux premières images du film Asphalt Jungle et à laquelle Dix Handley, homme du Sud rural « tombé » dans la vie citadine et dans le crime, échappe de justesse. Ce que montre le country noir, envisagé de ce point de vue, c’est donc la capture d’une société archaïque et son assujettissement forcé au mainstream, c’est-à-dire le moment où, pour reprendre le vocabulaire de C. Wright Mills, l’homme de la frontière est transformé en col blanc – à moins que, comme Dix Handley, il ne fasse un effort surhumain pour échapper à la police et aller mourir, une balle dans le ventre, près des chevaux de son enfance.
Notes
1 Cet article reprend sous un angle différent certains éléments développés au chapitre 8 de mon ouvrage Front criminel : une histoire du polar américain de 1919 à nos jours (Paris, PUF, 2018), consacré au développement du paperback original (récits publiés directement en livre de poche) dans les années 1950. Le lecteur me pardonnera, je l’espère, certaines redites inévitables, que j’ai toutefois essayé de limiter au minimum.
2 Littéralement « dos en papier ». J’emploierai ici ce terme, qui suggère, davantage que le mot français, que cette forme de publication est plutôt une mutation des magazines pulps que de la littérature parue en édition reliée (hardback, ou « dos dur », en anglais).
3 Au cours des années 1950, où les appellations génériques étaient plus fluides, le terme « backwoods » (qui signifie en américain, selon le dictionnaire Webster, « lieu boisé loin des villes » ou « lieu éloigné ou culturellement attardé ») prédomine, comme en témoignent nombre de titres de paperbacks. Il n’est rendu qu’imparfaitement en français par les termes « rural » ou « campagnard », car il renvoie aussi bien à une nature sauvage, comme celle des bayous, qu’à des environnements agricoles traditionnels. De ce point de vue, il correspond davantage à l’adjectif « country », qui s’est imposé dans la nomenclature littéraire ces derniers temps (et que nous adopterons donc dans cet article), conjuguée toutefois avec l’idée d’un retard culturel ou historique qu’il est important de garder à l’esprit. Voir à ce sujet la thèse d’Alice Jacquelin, Genèse et circulations d'un paradigme culturel populaire en régime médiatique : le cas du Country Noir, Université de Poitiers, 2019.
4 C. Wright Mills, White Collar. New York, Oxford University Press, 1951 – Les Cols blancs. Essai sur les classes moyennes américaines, Paris, Maspéro, 1966. Pour une vision plus récente de la société américaine mainstream des années 1950, on consultera en particulier l’ouvrage d’Anna G. Creadick, Perfectly Average : The Pursuit of Normality in Postwar America, Amherst, University of Massachussetts Press, 2010.
5 John Huston, scénario de John Huston et Ben Maddow, The Asphalt Jungle, MGM, 1950. Transcription du dialogue. Je traduis :
[Doll] – Tu parlais dans ton sommeil.
[Dix] – Qu’est-ce que je disais ?
– C’était tout embrouillé, mais il y avait un mot bien clair. Tu l’as dit plusieurs fois. « Corn Cracker ». Ça veut dire quoi ?
– « Corn Cracker ». Corn Cracker était un poulain.
– Ah, ça ne me surprend pas.
– Ouais. C’était un grand poulain noir. Ouais, je me souviens de mon rêve. J’étais sur le dos de ce poulain. Mon père et mon grand-père étaient là, à me regarder faire le malin. Le poulain était en train de ruer et de plonger... et il a essayé de se débarrasser de moi contre la clôture, mais je me suis cramponné. Puis j’ai entendu mon grand-père dire : « C'est un vrai Hanley, ce garçon. Un vrai Hanley. » Et je me suis senti fier comme Artaban.
– Ça s’est vraiment passé, Dix, quand tu étais petit ?
– Non. Le poulain noir m’a balancé dans une clôture à la première ruade. Et mon vieux s’est pointé, m’a poussé avec sa botte et a dit : « Ça t’apprendra à te vanter de tes talents de cavalier. »
– C’est bien de t’entendre rire.
– Tu sais quoi ? Un de mes ancêtres a importé le premier pur-sang irlandais dans notre comté.
– Vraiment ?
– Oui. Notre ferme est dans la famille depuis des générations. 65 hectares, une belle grange et sept poulinières.
– Ça a l’air merveilleux, Dix.
– Ça l’était. Et puis tout a basculé d’un coup. Mon vieux est mort, on a perdu la récolte de maïs. Le poulain noir dont je te parlais s'est cassé la jambe et a dû être abattu. Ç’a été une année pourrie. Je n’oublierai jamais le jour où on est partis. Moi et mon frère, on s’est juré de racheter la ferme Hickorywood un jour.
– Ça doit être terrible de grandir dans une maison et d’être forcé de la quitter ensuite. Moi je n’ai jamais eu de vraie maison.
– $12000 m’auraient suffi, et une fois j’ai failli y arriver. J’avais plus de $5000 en poche... et Pampoon était en lice dans les Suburban Stakes. J’étais sûr qu’il allait gagner. J’ai mis tout mon fric sur sa tête. Il a perdu d’une tête.
– Bois ton café, chéri, avant qu’il refroidisse.
– Mais la chance va tourner, j’en suis sûr. Un de ces jours je vais faire un gros coup et puis je rentrerai chez moi. La première chose que je ferai, c'est me baigner dans le ruisseau pour me débarrasser de cette crasse de la ville.
6 Comme l’écrit Robert E. Park, « The city is, finally, the natural habitat of civilized man. », dans Robert E. Park & Ernest W. Burgess, The City: Suggestions for Investigation of Human Behavior in the Urban Environment, Chicago, Chicago University Press, 1967 1925, p. 2.
7 « It is as though the space between us were time: an irrevocable quality », dit Darl en regardant sa famille de l’autre côté du fleuve qui lui reste à traverser. L’espace est orienté de la campagne vers la ville ; le courant de l’histoire, comme celui du fleuve, ne va jamais que dans un seul sens. William Faulkner, As I lay Dying, New York, Norton, 2010 1931, p. 85.
8 A propos du paperback original, notamment (mais pas seulement) criminel, on consultera Malcolm Cowley, The Literary Situation, New York, Viking Press, 1955 ; Geoffrey O’Brien, Hardboiled America: Lurid Paperbacks and the Masters of Noir, New York, Da Capo Press, 1997 1981 ; Kenneth C. Davis, Two-Bit Culture: The Paperbacking of America, Boston, Houghton Mifflin, 1984 ; Paula Rabinowitz, American Pulp: How Paperbacks Brought Modernism to Main Street, Princeton, Princeton University Press, 2014.
9 Typologie empruntée pour l’essentiel à Malcolm Cowley, The Literary Situation, op. cit., p. 123.
10 Notamment celle d’Anthony Boucher (William Anthony Parker Whyte, 1911-1968), le meilleur critique de littérature criminelle de son temps, qui rendait régulièrement compte des parutions en paperback originals dans sa chronique du New York Times, « Criminals at Large ».
11 Traduit autrefois en Série noire sous le titre Fantasia chez les ploucs, récemment retraduit chez Gallmeister sous son titre original : Fantasia chez les ploucs, trad. Marcel Duhamel, Paris, Gallimard, 1957 ; Le bikini de diamant (traduction de Laura Derajinksi), Paris, Gallmeister, 2017.
12 Comme on l’apprend de l’édition française parue en Série noire (Le chant de l’alligator, Gallimard, 1957), traduite à partir du manuscrit de Whittington avant que le roman ne paraisse aux USA.
13 Michael Denning, The Cultural Front. Londres, Verso, 1997, p. 467.
Haut de pageTable des illustrations
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Légende | Figure 1 : Erskine Caldwell, Tabacco Road, Signet, 1956 1932. Illustration James Avati. Figure 2 : Erskine Caldwell, God’s Little Acre, Signet, 1956 1933. Illustration James Avati |
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Légende | Figure 3 : Hallam Whitney (Harry Whittington), Backwoods Shack, Carnival Books, 1954 |
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Légende | Figure 4 : John Faulkner, Cabin Road, Gold Medal, 1951. Figure 5 : John Faulkner, Uncle Good’s Girls, Gold Medal, 1952. Illustration Barye Phillips |
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Légende | Figure 6 : Charles Williams, The Diamond Bikini, Gold Medal, 1956. Illustration Casey Jones. Figure 7 : Charles Williams, Uncle Sagamore and His Girls, Gold Medal, 1959 |
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Légende | Figure 8 : Mickey Spillane, I, the Jury, Signet, 1948. Illustration Lu Kimmel. Figure 9 : Charles Williams, Hill Girl, Gold Medal, 1951. Illustration Barye Phillips |
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Légende | Figures 10 : Charles Williams, Big City Girl, Gold Medal, 1951. Illustration Barye Phillips. Figure 11 : Charles Williams, River Girl, Gold Medal, 1951. Illustration Barye Phillips. Figure 12 : Charles Williams, Girl Out Back, Gold Medal, 1951. Illustration Ernest « Darcy » Chiriaka |
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Légende | Figure 13 : Jim Thompson, Cropper’s Cabin, Lion Books, 1952 |
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Légende | Figure 14 : Robert Edmond Alter, Swamp Sister, Gold Medal, 1961. Illustration Mitchell Hooks. Figure 15 : Harry Whittington, Backwoods Tramp, Gold Medal, 1959. Illustration Barye Phillips. Figure 16 : Bob McKnight, Swamp Sanctuary, Ace, 1959. Illustration Robert Maguire |
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Pour citer cet article
Référence électronique
Benoît Tadié, « Les paradoxes fondateurs du country noir », Belphégor [En ligne], 21-2 | 2023, mis en ligne le 13 décembre 2023, consulté le 19 mars 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/belphegor/5569 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/belphegor.5569
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