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Comptes rendus

Alenka Žbogar (dir.), 57. seminar slovenskega jezika, literature in kulture: ustvarjalke v slovenskem jeziku, literaturi in kulturi [57e séminaire sur la langue, la littérature et la culture slovènes : les femmes artistes dans la langue, la littérature et la culture slovènes]

Ljubljana, Založba Univerze, 2021
Héloïse Elisabeth Marie-Vincent Ghislaine Ducatteau
Référence(s) :

Alenka Žbogar (dir.), 57. seminar slovenskega jezika, literature in kulture: ustvarjalke v slovenskem jeziku, literaturi in kulturi [57séminaire sur la langue, la littérature et la culture slovènes : les femmes artistes dans la langue, la littérature et la culture slovènes], Ljubljana, Založba Univerze, 2021, 116 p., ISBN : 2386-057X, en ligne : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4312/SSJLK.57.2386-057X.

Texte intégral

1Rares sont les publications qui englobent à la fois la littérature, la langue et la culture slovènes. Cet ouvrage rassemble douze contributions synthétiques issues du 57e séminaire sur les études slovènes, qui s’est tenu du 5 au 16 juillet 2021 au Centre de slovène comme deuxième langue et langue étrangère. La thématique choisie était les femmes artistes dans la langue, la littérature et la culture slovènes. La directrice de la publication, Alenka Žgobar, est enseignante-chercheuse en didactique de la littérature à l’Université de Ljubljana.

2La première partie est dédiée à la linguistique. Mojca Smolej étudie le féminin d’un point de vue linguistique, à la fois au niveau lexicographique dans les dictionnaires mais également d’un point de vue morphologique au travers de l’écriture inclusive. Elle constate qu’un certain nombre de dénominations féminines utilisées au xixe siècle et au début du xxe siècle ont été délaissées après la Seconde Guerre mondiale. C’est un fait d’autant plus surprenant que l’Université de Ljubljana, dès sa création en 1919, a été ouverte aux femmes et que la première personne slovène à avoir reçu un doctorat était une femme, Anna Mayer. La langue semble ainsi avoir rétropédalé. Le masculin est devenu englobant pour les hommes et les femmes, comme dans beaucoup de langues, tel le français (dans lequel les vocables autrice et traductrice étaient utilisés il y a quatre siècles). Saška Štumberger met en relief cette ambiguïté du masculin, qui sert à la fois pour se référer à la gent masculine et aux deux sexes, et repère les contextes dans lesquels a lieu l’usage du féminin. La contribution de Branislava Vičar se situe à l’intersection entre les sciences du langage, les études urbaines et les sciences de l’art : elle porte sur les graffitis injurieux tracés sur les murs de villes slovènes. Elle révèle que le capitalisme a amplifié les structures patriarcales et que le statut ludique du graffiti empêche une réelle prise de conscience du caractère dévalorisant de certains de ces graffitis sexistes. Néanmoins, elle note la présence de graffitis féministes, qui contrecarrent les graffitis sexistes.

3La seconde partie se focalise sur la littérature. Un article fait le pont entre sciences du langage et sciences littéraires, celui de Milena Mileva Blažic et Kasilda Bedenk. Toutes deux se penchent sur le plurilinguisme chez différentes autrices : Luiza Pesjak pour le xixe siècle ; Ernestina Jelovšek qui écrit encore au tout début du xxe siècle ; Ljudmila Prunk, Marica Gregorič, Anica Žemlja et Tïna Wajtawa (également orthographié Tina ou Tyna Vajtova, de son vrai nom Valentina Pielich) pour la seconde moitié du xxe siècle ; Svetlana Makarovič et Anja Štefan pour la fin du xxe siècle et le début du xxie siècle. Katja Mihurko Poniž nous présente quant à elle la trajectoire et l’impact d’une journaliste, féministe et écrivaine active au début du xxe siècle, Zofka Kveder. Une partie de sa production journalistique était en langue allemande et est parue pour la plupart dans le journal publié à Zagreb Agramer Tagblatt, qui a existé de 1885 à 1923. Le reste a été publié, en langues slovène et croate, dans des revues variées, comme Ljubljanski zvon [La cloche de Ljubljana], Ženski svijet [Le monde des femmes] ou Jugoslavenska žena [La femme yougoslave], Savremenik [Le contemporain]. Elle a ainsi contribué à une meilleure connaissance du monde germanique (de Zurich à Prague en passant par Munich) en Slovénie et, inversement, à des connaissances plus solides sur l’ex-Yougoslavie dans les DACH-Länder (Allemagne, Autriche, Suisse). Irena Novak Popov s’intéresse ensuite à trois poétesses contemporaines récompensées ces dix dernières années par plusieurs prix littéraires, le Jenko et le Veronika entre autres : Anja Golob, Nina Dragičević et Kaja Teržan. Elle montre de quelle façon toutes trois contribuent à redéfinir dans leurs poèmes les rapports humains de façon plus horizontale, c’est-à-dire de façon juste et équitable. L’autrice Luiza Pesjak revient dans un autre chapitre, celui écrit par Urška Perenič. Dans ce texte, la slovéniste souligne le patriotisme de l’écrivaine, bien qu’une partie de son œuvre ait été rédigée en allemand. Elle procède par ailleurs à une catégorisation de ses écrits.

  • 1 Kramberger Petra, Samide Irena, Žigon Tanja (dir.), Frauen, die studieren, sind gefährlich: Ausgewä (...)

4La troisième partie est centrée sur la culture. Milica Antić Gaber analyse l’évolution de la place des femmes au sein du monde académique et constate que ce sont les hommes qui captent la majorité des postes convoités et récoltent le plus de prix. Saša Babič étudie les rôles assignés aux femmes dans les proverbes, énigmes et farces folkloriques. Sans surprise, ils correspondent aux topoi courants en Europe. Tone Smolej s’intéresse quant à lui aux dix premières femmes à avoir reçu le titre de docteure, entre 1911 et 1925, à Graz, Vienne, Ljubljana et Prague. Sa contribution reprend en grande partie l’ouvrage collectif publié récemment par Petra Kramberger, Irena Samide et Tanja Žigon1 et cite d’autres docteures, comme l’historienne Vera Vabič, dont la thèse a porté sur les relations entre l’Autriche et la Serbie entre 1807 et 1810. On peut également mentionner Alma Sodnik, chercheuse en psychologie et en philosophie, première femme de Slovénie mais également d’ex-Yougoslavie à avoir été promue doyenne à l’université.

5Les deux dernières contributions forment une section à part, celle des travaux de « la relève ». Ce choix ne semble pas forcément judicieux, puisqu’elles auraient eu toute leur place dans les sections portant sur la langue et la littérature. Ces deux contributions se situent au carrefour de la linguistique et des études urbaines. Tout d’abord, Neža Marija Slosar étudie les rues portant des noms de femmes à Ljubljana, qui ne représentent que trois pour cent de la totalité des rues de la ville. Ce sont d’abord des femmes dirigeantes qui sont mises à l’honneur, suivies de combattantes de la Seconde Guerre mondiale et, en troisième lieu, d’intellectuelles. La moitié de cette troisième catégorie est composée d’écrivaines. En s’intéressant à ces dernières, l’autrice montre que l’imbrication des rues reflète parfois les réseaux historiques. L’ouvrage se clôt sur la contribution d’Ivana Zajc, qui aborde les œuvres de deux dramaturges actuelles, Simona Semenič et Varja Hrvatin, qui traitent de sujets de société comme le suicide, la maternité, la maladie. Elle se penche en particulier sur Pepelka/Cendrillon (2014) de Simona Semenič, une réécriture du conte transcrit pour la première fois par Giambattista Basile au début du xviie siècle. Selon Ivana Zajc, cette pièce se prête bien à des écolier·ère·s du primaire en vue d’une sensibilisation aux questions de genre car elle transmet une image émancipée de la femme, la protagoniste refusant d’épouser le prince au profit du cuisinier. La pièce de théâtre Kako sem postal lisičje krzno [Comment je suis devenu une fourrure de renard] de Varja Hrvatin permet quant à elle de sensibiliser des lecteur·rice·s collégien·ne·s en révélant les risques de l’autocratie.

6De par la richesse des approches qu’il mobilise, sa perspective multiculturelle, sa concision et son application, ce livre mérite amplement d’être traduit dans d’autres langues, ou du moins de servir de base pour des manuels d’introduction à la civilisation slovène. Un regret : nous aurions aimé pouvoir disposer d’une frise chronologique, au début ou à la fin de l’ouvrage, pour mieux nous repérer. Des images – photographies, captures d’écran de films, gravures, bandes dessinées, peintures – auraient permis d’illustrer le propos. Les journaux auraient pu être davantage présentés, que ce soit en termes de lectorat, de positionnement politique, de structure... Enfin, davantage de pistes de recherche concrètes auraient pu être suggérées, pour rédiger de futurs articles, mémoires de licence et de master sur les sujets abordés : corpus non encore débroussaillés et numérisables, etc.

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Notes

1 Kramberger Petra, Samide Irena, Žigon Tanja (dir.), Frauen, die studieren, sind gefährlich: Ausgewählte Porträts slowenischer Frauen der Intelligenz [Les femmes qui étudient sont dangereuses : portraits choisis de femmes slovènes de l’intelligentsia], Ljubljana, Znanstvena založba Filozofske fakultete Univerze v Ljubljani, 2018.

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Pour citer cet article

Référence électronique

Héloïse Elisabeth Marie-Vincent Ghislaine Ducatteau, « Alenka Žbogar (dir.), 57. seminar slovenskega jezika, literature in kulture: ustvarjalke v slovenskem jeziku, literaturi in kulturi [57e séminaire sur la langue, la littérature et la culture slovènes : les femmes artistes dans la langue, la littérature et la culture slovènes] »Balkanologie [En ligne], Vol. 18 n° 2 | 2023, mis en ligne le 01 mai 2024, consulté le 19 janvier 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/balkanologie/5513 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/11qfp

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