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HomeIssues (1997-2012)Vol. VIII, n° 1Notes de lectureSidoti (Antoine), Partisans et Tc...

Notes de lecture

Sidoti (Antoine), Partisans et Tchetniks en Yougoslavie durant la Seconde Guerre mondiale. Idéologie et mythogénèse,

Paris : CNRS, 2004, 339 p. (index, bibliogr., illustr.)
Patrick Michels
Bibliographical reference

Sidoti (Antoine), Partisans et Tchetniks en Yougoslavie durant la Seconde Guerre mondiale. Idéologie et mythogénèse, Paris : CNRS, 2004, 339 p. (index, bibliogr., illustr.)

Full text

  • 1  Sidoti (Antoine), Le Monténégro et l'Italie durant la Seconde Guerre mondiale. Histoire, mythes et (...)

1On retrouve dans ce tome les mêmes qualités et les mêmes défauts que dans le précédent1. L'ouvrage, toujours sans conclusion, ni problématique, traite des deux mouvements de résistance qui ont vu le jour en Yougoslavie lors de la Seconde Guerre mondiale, comment ils se sont affrontés, passant des accords avec l'occupant pour avoir les mains libres l'un contre l'autre. Ici, l'iconographie des timbres-poste, « vecteurs essentiels d'un discours idéologique et politique » (p. 45), est plus présente et sert de base à l'argumentation. Les annexes sont intéressantes, pour suivre l'évolution de la résistance en Bosnie-Herzégovine, Slovénie et Croatie. Malheureusement, seules les archives italiennes sont utilisées, et non les allemandes.

2L'auteur rappelle quelques vérités historiques : les résistants communistes (Partisans) ont attendu l'attaque allemande contre l'URSS le 22 juin 1941 ; ils sont surtout présents en Bosnie-Herzégovine ; la capitulation de l'Italie leur donne l'occasion de se fournir en armes. Il souligne combien la guerre était aussi idéologique (Tito peut ainsi évoquer la « désertion » du roi, alors qu'il a quitté le territoire, malgré lui, sur les conseils qu'on lui a donnés). Les fuites de Tito sont évoquées, ainsi que les raisons de la collaboration des Tchetniks avec les occupants italiens (bien que Mussolini ne soit pas dupe), qui, au contraire des Ustaše ne commettent pas de massacre.

3A. Sidoti opère la distinction entre les Techtniks dražinovci (légaux) et les indépendants et rappelle que Mihailović a condamné « bien des crimes commis en son nom, mais sans être écouté ni obéi, contrairement à son adversaire communiste » (p. 111). À ce propos, le chapitre 12 est intéressant et montre l'incapacité du Roi Pierre II à soutenir les troupes de Mihailović. Il souligne comment les conférences tchetniks sont riches d'enseignement (le compte rendu est signé, ce qui donne une idée de la composition sociale des participants et de leur origine géographique, p. 55) bien qu'il s'étonne (p. 180) que « malgré le nombre important de participants à ce congrès tchetnik [Ba, 25-28 janvier 1944], rares sont les intervenants croates et Slovènes ».

4Selon l'auteur, les Tchetniks, à la différence des Partisans, ont l'habitude des combats, habitude remontant à leur lutte « contre les Turcs » (p. 42 -je pense qu'il faut lire Ottoman). Par contre, les communistes sont habitués à la clandestinité (p. 65), le PC ayant été interdit dans la 1ère Yougoslavie).

5L'ouvrage n'est pas exempt de maladresses. Alors qu'il disserte sur les opérations de résistance en Bosnie-Herzégovine, il évoque la terreur causée par Moša Pijade au Monténégro (p. 79). L'antinomie de certains adverbes soulève l'interrogation : « La manifestation a en réalité été organisée probablement sous l'influence directe de Mihailović » (p. 49) ; de même que l'insistance sur une religion : « les Croates et les Serbes orthodoxes  » (p. 57).

6Un temps, il met en avant les origines géographiques pour expliquer les choix et comportements des deux leaders de la résistance (p. 44 « cet ancrage charnel, historique et psychologique unissant Mihailović à la Šumadija est un facteur déterminant pour la compréhension de sa personnalité et ses choix politiques. A l'inverse, Tito plonge ses racines dans un contexte totalement différent »), un autre, il insiste sur la rationalité (p. 45 « le fait que Mihailović soit l'incarnation de la continuité de l'Etat yougoslave en exil à Londres permet de comprendre pourquoi le chef tchetnik estime pouvoir adopter une tactique attentiste, contrairement aux partisans qui, eux, prônent la révolution »), ne s'attardant pas sur cette contradiction.

7La qualification de la langue est aussi problématique que dans le 1er tome : « serbocroate » (p. 8) (dans le tome précédent, langue serbe), « serbo-croate en caractère cyrillique » (p. 67), il évoque même « la lettre “B” en caractères cyrilliques - autrement dit, quatre "S" en caractères latins » [pp. 244, 271], lettre -B- qui doit certainement être C.

8Sa croyance au caractère inéluctable de la mort de la Yougoslavie (« en s'inspirant de la fédération russe pour instituer la nouvelle Yougoslavie (...) Tito [prodigue] des soins jugés indispensables dont les conséquences se révéleront finalement mortelles, bien des années plus tard » [p. 30] ou « l'édification de la Yougoslavie (...) selon le principe fédératif de l'AVNOJ de Jajce n'était en fait qu'une bombe à retardement » [pp. 153-154]) le pousse à voir un vide temporel entre le décès du dictateur et celui de l'État. Tito est la Yougoslavie, la Yougoslavie est Tito, il est donc normal que « la mort de Tito se charge du reste aussi quand, petit à petit, la population des lieux concernés se réapproprie les noms originels confisqués par la mythologie titiste » (p. 143), précisant même sa pensée dans la note 19 « mais, Tito disparu, elle reprend, le 2 avril 1992, sa dénomination originelle Podgorica », 12 ans quand même après son décès !

  • 2  Shoup (Paul), Communism and the Yugoslav National Question, New York/London : Columbia University (...)
  • 3  Djilas (Aleksa), The Contested Country : Yugoslav Unity and Communist Revolution, 1919-1953, Cambr (...)

9Si l'auteur précise bien la stratégie des uns et des autres, rappelant que le « but principal du PCY est d'utiliser la guerre de libération nationale avant tout comme moyen pour s'emparer du pouvoir » (p. 28), et que « dans la logique révolutionnaire communiste, le but à atteindre est supérieur aux sacrifices endurés par la population » (p. 92), il n'insiste pas assez sur les conséquences de cette idéologie ou sur les moyens mis en œuvre. P. Shoup, ou S. Palmer et R. King, pourtant, ont souligné ces travers2. Les communistes se moquaient des représailles qui pouvaient de toute façon leur apporter des partisans, allant même jusqu'à les provoquer. S'appuyant notamment sur les mémoires de M. Djilas pour critiquer le titisme, A. Sidoti laisse de côté tout un pan de la recherche consacré à la Yougoslavie qui aurait pu lui être utile. Notamment, la thèse du fils de M. Djilas lui aurait permis de mieux cerner le côté pragmatique dans l'idéologie des communistes3, même s'il en a mis en exergue une bonne partie.

10Toutefois, l'ouvrage a le mérite de combler une lacune en langue française. S'il existe plusieurs études traitant de ce sujet, la plupart sont en langue anglaise, et, surtout, peu se sont attachées uniquement à la Deuxième Guerre mondiale (qui reste un épisode dans la prise de pouvoir communiste). Enfin, l'apport des sources diplomatiques italiennes est un plus indéniable.

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Notes

1  Sidoti (Antoine), Le Monténégro et l'Italie durant la Seconde Guerre mondiale. Histoire, mythes et réalités, Paris : CNRS, 2003.

2  Shoup (Paul), Communism and the Yugoslav National Question, New York/London : Columbia University Press, 1968 ; Palmer (Stephen E.), King (Robert R.), Yugoslav Communism and the Macedonian Question, Hamden : Archon books, 1971.

3  Djilas (Aleksa), The Contested Country : Yugoslav Unity and Communist Revolution, 1919-1953, Cambridge : Harvard University Press, 1991.

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References

Electronic reference

Patrick Michels, “Sidoti (Antoine), Partisans et Tchetniks en Yougoslavie durant la Seconde Guerre mondiale. Idéologie et mythogénèse,Balkanologie [Online], Vol. VIII, n° 1 | 2004, Online since 21 January 2010, connection on 11 December 2024. URL: http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/balkanologie/2098; DOI: https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/balkanologie.2098

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