Sidoti (Antoine), Le Monténégro et l'Italie durant la Seconde Guerre mondiale. Histoire, mythes et réalités
Sidoti (Antoine), Le Monténégro et l'Italie durant la Seconde Guerre mondiale. Histoire, mythes et réalités, Paris : CNRS, 2003, 419 p. ; annexes, illust., bibliogr.
Texte intégral
1A. Sidoti dresse dans cet ouvrage un tableau de l'occupation italienne du Monténégro entre 1941 et 1943.
2La longue introduction traite de l'évolution de la première Yougoslavie. L'ouvrage proprement dit est divisé en deux sections : l'occupation du Monténégro et son administration et celle des Bouches de Kotor.
3Dans la première partie, A. Sidoti retrace les grandes lignes de l'histoire du Monténégro, en s'attardant sur les symboles (Petar II Petorvić Njegoš, le mausolée édifié à l'époque titiste, Danilo I, Nikola I,...), et la psychologie (« honneur et liberté ») monténégrins. Puis, il nous conte l'occupation italienne du Monténégro. Grâce aux sources diplomatiques italiennes, l'auteur nous permet de nous rendre compte des soucis qu'ont eu les fascistes italiens pour satisfaire tout le monde (les Ustaše, les Monténégrins, les Albanais), des erreurs d'interprétation qu'ils ont commises, des anticipations non satisfaites qu'ils ont rencontrées.
4Il s'arrête longuement sur l'insurrection du 13 juillet (qui a lieu le lendemain de la « déclaration du retour du royaume du Monténégro »). Son succès tient pour beaucoup aux déceptions monténégrines (pertes territoriales, pas d'indépendance réelle, une occupation de fait), lesquelles étaient toutefois perceptibles bien auparavant (opposition pacifique à l'occupation, avec les rues vides, maisons fermées,...), mais dont les occupants ont préféré ne pas tenir compte. Toutefois, ce soulèvement populaire dure quelques mois, avant que les Partisans soient chassés, en partie avec l'aide la population (à cause des exactions commises, des crimes sur les non communistes). Mais, ainsi que le dit l'auteur, il s'agit d'une « collaboration calculée » (p. 241), d'autant plus que l'indépendance promise n'est toujours pas réalisée. L'union des Bijelaši avec les Tchetniks, oeuvrant principalement contre les Partisans (qui n'ont pas hésité à massacrer les troupes qu'ils croisaient, alors que les uns et les autres étaient des résistants), les Zelanaši indépendantistes membres à part entière de l'administration italienne du Monténégro, sont autant de traces de ce calcul.
5Le chapitre « le serment courtisé de Njegoš » fait mention de l'utilisation d'un symbole national par l'occupant, sans qu'il en comprenne tout le sens (ou du moins sans qu'il appréhende toute la signification qu'il peut avoir pour l'occupé), symbole également utilisé par les Partisans et les Tchetniks.
6La seconde partie concerne les Bouches de Kotor, région à part, aux rattachements divers. L'occupant italien en fait une région administrative de la Dalmatie et une région militaire de l'Albanie, privant les Monténégrins d'une de leurs revendications. Le préfet Francesco Scassellati parvient à composer avec la population locale (via diverses bonifications), qui calcule sa collaboration.
7Docteur es Langues et Littératures étrangères, A. Sidoti s'est essayé à l'histoire. La philatélie, l'héraldique servent à illustrer les propos de l'auteur. Cet usage peu courant, associé aux annexes de cet ouvrage, font de ce livre un ouvrage historique intéressant. Toutefois, ce travail (sans problématique et sans conclusion) traite surtout des vicissitudes qu'a connues l'administration italienne lors de l'occupation du Monténégro (comment dessiner les frontières entre les États occupés, trouver un roi pour le Monténégro,...), des intérêts divers et concurrents qu'elle a dû tenter de concilier.
8En ce sens, le titre de l'ouvrage ne traduit pas ce qu'il contient. De nombreux événements et scissions internes monténégrins ne sont pas abordés. Si la division entre Bijelaši et Zelenasi est évoquée, celles au sein de ces derniers ne l'est pas. L'auteur passe rapidement sur la lutte de pouvoir que mènent les rois de Serbie et du Monténégro pour la couronne serbe, y voyant là preuve de la serbité des Monténégrins, le soulèvement de janvier 1919, le groupe terroriste de Savo Raspopović, le comité de libération du Monténégro (constitué à Tirana).
9La psychologie, la caractérologie des Monténégrins sont mises en avant pour dresser un tableau de ce peuple. On peut toutefois penser que leur mobilisation tient à l'utilisation, subtile ou maladroite, de symboles « nationaux », faite par les Tchetniks, les Partisans et les Italiens. D'autant plus qu'A. Sidoti évoque la construction de certains symboles au début de son livre. Mais, il s'agit là d'une digression, bien éloignée du sujet de son travail historique.
10Comme dans toute publication, quelques coquilles agrémentent le texte : avril 1940 (p. 185) au lieu de 1941 ; mars 1941 au lieu de 1942 (p. 239) ; Pav, (p. 209) pour Plav ;... L'affiche « en serbe » (p. 212) est bien en cyrillique, mais en iékavien (où l'on aborde, sans le vouloir, le problème de nommer les langues).
Pour citer cet article
Référence électronique
Patrick Michels, « Sidoti (Antoine), Le Monténégro et l'Italie durant la Seconde Guerre mondiale. Histoire, mythes et réalités », Balkanologie [En ligne], Vol. VIII, n° 1 | 2004, mis en ligne le 21 janvier 2010, consulté le 12 décembre 2024. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/balkanologie/2089 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/balkanologie.2089
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