Glamočak (Marina), La transition guerrière yougoslave
Glamočak (Marina), La transition guerrière yougoslave, Paris : L’Harmattan, 2002, 287 p.
Texte intégral
1« L’ouvrage de Marina Glamočak, tiré de sa thèse, richement documenté, va faire date parce qu’il remonte aux causes de la décomposition sanglante de l’ex-Yougoslavie » (p. 7). Cette première phrase de la préface d’Alain Joxe résume parfaitement la démarche intellectuelle de M. Glamočak. Sociologue, l’auteur a voulu sortir des cadres “étriqués” des théories existantes sur la « transition à la démocratie » et proposer une grille de lecture différente de l’éclatement de la Fédération yougoslave. Son postulat de départ est que « malgré les conflits guerriers, la transition yougoslave n’est pas séparable de la question du passage des anciens régimes socialistes au capitalisme. La guerre intérieure yougoslave, causée par des liens inextricables entre le processus de transition (que ce soit son acceptation ou son refus) et l’aspiration à l’indépendance, n’est qu’une des voies qu’emprunte la transition » (p. 20).
2Dans la première partie l’ouvrage, l’auteur revient sur « les clivages sociaux et le multipartisme dans la société ex-yougoslave », étude préliminaire indispensable à la compréhension des événements ultérieurs. L’originalité de cette étude du “prélude” à la guerre réside dans l’intérêt qui est porté à la structure même de la société yougoslave et aux rapports des différentes classes sociales en son sein, en s’interrogeant sur la capacité de celle-ci à répondre aux « besoins du multipartisme ». L’héritage politique du régime titiste est également traité, mettant en lumière la division de la population yougoslave en « cages nationales » (p. 58), circonstances qui auront un rôle déterminant au moment de la création de premiers partis politiques.
3La deuxième partie est centrée plus précisément sur le « multipartisme et la transition politique en Croatie et en Serbie », avec une présentation du multipartisme est-européen. Malgré les différences des sociétés serbe et croate, force est de constater une similitude dans le sort que ces dernières subissent, à savoir une désintégration et une segmentation, face à des institutions étatiques qui « se bornent à assurer le pouvoir et ne proposent aucune intégration sociale exceptée celle de la nation en guerre » (p. 110).
4La troisième partie, qui est selon nous la plus riche, est consacrée aux « rapports entre pouvoir et groupes militaires et paramilitaires ». L’auteur revient sur la décomposition de l’Armée populaire yougoslave (JNA) et démêle avec brio les liens politico-financiers qui ont permis le financement de l’armement dans les deux républiques yougoslaves, ainsi que l’avènement des armées républicaines nationales et des groupes paramilitaires.
5Enfin, dans une quatrième partie, les « conséquences de la transition guerrière » sont exposées, toujours dans une approche comparative entre la Serbie et la Croatie. Des questions comme le nationalisme populiste en Serbie, ou le rôle prééminent de l’Etat dans la construction et la consolidation du régime croate sont décortiquées, éléments parmi d’autres qui empêchent les deux républiques de « rejoindre un processus pacifiste de transition politique et économique » (p. 269).
6La transition guerrière yougoslave est par conséquent un ouvrage important pour la compréhension de la désintégration de l’ancienne fédération titiste. De manière plus globale, son approche méthodologique, qui sort des schémas classiques de lecture du concept de « transition », ouvre la voie à de nouvelles pistes de recherche sur le passage à la démocratie.
Pour citer cet article
Référence papier
Diane Masson, « Glamočak (Marina), La transition guerrière yougoslave », Balkanologie, Vol. VI, n° 1-2 | 2002, 273-274.
Référence électronique
Diane Masson, « Glamočak (Marina), La transition guerrière yougoslave », Balkanologie [En ligne], Vol. VI, n° 1-2 | 2002, mis en ligne le 04 février 2009, consulté le 13 janvier 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/balkanologie/1772 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/balkanologie.1772
Haut de pageDroits d’auteur
Le texte et les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés), sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.
Haut de page