1De nos jours, les informations manipulées occupent une place fondamentale, tant par leur champ d’action multimodal et multidimensionnel que par leur émergence aux yeux du grand public depuis les années 2010. Propulsé « mot de l’année » par le dictionnaire Collins en 2017, le terme fake news est en effet entré dans le langage courant, propagé par les leaders populistes puis les médias. Symbole et outil de cette communication d’une nouvelle ère, celle de la « post-vérité », la fake news – « nouvelle faussée » en français – a suscité l’intérêt des acteurs de la vie politique, économique ou sociale qui y ont trouvé un concept utile à exploiter, soit pour le dénoncer, soit pour en tirer profit.
2L’omniprésence de l’expression fake news ces dernières années peut cependant donner l’impression que le phénomène qu’elle décrit est nouveau alors qu’il est vieux d’au moins 2 500 ans (Le Bras, 2018 ; Brétéché et Cohen, 2018 ; Hanley et Munoriyarwa, 2022). Du Moyen Âge à l’ère contemporaine, la diffusion de fausses nouvelles ou de rumeurs à des fins stratégiques, pour instrumentaliser l’opinion publique, faire ou défaire la réputation d’un individu ou d’un groupe a toujours été une pratique courante dans les domaines militaire, politique et économique. Aujourd’hui, l’emballement médiatique autour de la désinformation peut, certes, s’expliquer par ses implications récentes parfois spectaculaires dans les sphères politique (l’élection de Donald Trump, le Brexit, la guerre Russie-Ukraine), sociale (mouvement Antivax et résurgence du dénialisme climatique), économique (les bulles de filtres des GAFAM) et scientifique (ghostwriting des entreprises multinationales, The Lancet Gate), mais révèle un vieux phénomène dans ses habits neufs.
3Déjà en 1993, Guy Durandin déclare que le XXe siècle était celui de « l’information et du mensonge », à la suite d’une analyse de l’évolution des moyens de production et de diffusion de l’information et de l’usage dévoyé qui leur était parfois réservé (Durandin, 1993). Les « merveilles » technologiques qu’il décrit, en particulier la radio, malgré leur rôle important dans la démocratisation de l’accès à l’information, ont aussi servi des visées de manipulation et de propagande notamment durant les deux guerres mondiales (Horten, 2003 ; Ribeiro, Wagner, & Morriss, 2019). Quand Durandin peint la société par ces traits, il ne s’imaginait pas que ce « petit phénomène », souvent isolé géographiquement, allait s’intensifier et se développer à travers le monde en l’espace de quelques années avec l’arrivée d’abord d’Internet et du Web, ensuite de la téléphonie mobile et enfin des plateformes sociales de diffusion et de partage de l’information.
4Ce changement d’échelle de la propagation de la désinformation à l’ère des médias sociaux doit être considéré à la lumière d’un ensemble varié de mutations sociales et politiques. Les travaux de recherche déjà menés sur les processus de la désinformation ont ouvert des perspectives multiples dans ce sens, abordant la question à partir de plusieurs angles, depuis la propagande (Colon, 2019) et les théories du complot (Nicolas, 2016 ; Imhoff et Lamberty, 2020 ; Cordonier, 2021), en passant par ses effets sur les mouvements sociaux (Lalbat, 2019 ; Bouloque, 2020 ; Ferrari, 2018) et sur l’action déterminante de certains acteurs ou groupes de pression (Wagener et al., 2021). Ces analyses suggèrent la complexité des modes et champs d’action concernés par la désinformation ; elles confirment l’intérêt d’étudier ces processus dans une approche interdisciplinaire et comparatiste, afin d’appréhender ce phénomène massif et omniprésent, comment il naît, circule et frappe.
5C’est ainsi que nous avons souhaité interroger à travers ce numéro thématique les enjeux des processus de désinformation dans la diversité de leurs procédés, formes et appellations (mésinformation, infox, avis trompeurs, faux récits, etc.) et dans la variété des situations (chronologiques, spatiales, sociales, etc.) où se déploient les pratiques de création et de relais d’informations trompeuses.
6Comment, par quels dispositifs socio-techniques ou rhétoriques et à quelles fins différents acteurs (outils, médias, groupes d’intérêt, etc.) ciblent-ils des populations spécifiques ? Quelles logiques, quels intérêts politiques, idéologiques, économiques sont servis, ciblés ou bafoués par des mécanismes de décrédibilisation ou de légitimation des informations ? Du point de vue de l’appropriation de la désinformation, que dit la recherche en sciences humaines et sociales des modes d’interprétation et d’usage de la désinformation par certains publics ? En quoi différents régimes de croyance, cadres professionnels et pratiques sociales participent-ils à renforcer ou à routiniser des processus de qualification ou de disqualification des informations ? En quoi des pratiques de sélection, de filtrage, de mobilisation de l’information s’installent-elles en fonction des appartenances identitaires, professionnelles, culturelles ou en fonction de formes de vulnérabilité ou de résilience de certaines populations ? Enfin, concernant les initiatives de la lutte contre la désinformation, en quoi celles-ci sont-elles orientées par des réalités institutionnelles, politiques, socio-culturelles ?
7Dans le cadre de ce double numéro, nous avons ainsi choisi de privilégier quatre axes d’analyse complémentaires et liés concernant :
81) la « fabrique » socio-technique de la désinformation ;
92) le rôle et les spécificités des contextes culturels de sa mise en circulation et de son appropriation ;
103) la dimension temporelle et diachronique des processus et des « épisodes » de désinformation ;
114) les modes de réponse et de résistance développés pour identifier, contrer, décrypter ou prévenir la désinformation.
12Les six contributions réunies dans cette première livraison couvrent un empan chronologique allant de la période des années 1930 jusqu’au présent. Les procédés et les ressorts de la désinformation soumis à l’étude sont variés, touchant aussi bien à des pratiques rédactionnelles visant à discréditer qu’aux réécritures numériques dans un objectif de « réinformation » idéologisée. Ces processus s’opèrent sur des discours et des corpus diversifiés (dossier administratif d’étranger, information de santé, textes médiatiques d’actualité politique) ; ils sont examinés à l’aune d’approches variées dans les domaines de l’histoire et des sciences de l’information et de la communication. Aux quatre articles de recherche s’ajoutent deux témoignages de praticiens, l’un proposé par une conservatrice des bibliothèques qui a enquêté sur le contenu des programmes de formation initiale de futurs professionnels de l’information, l’autre sous forme d’un entretien avec deux caricaturistes de renom, Vladimir Kazanevsky et Denis Lopatin, qui se confient sur le rôle de leur art en tant que contre-discours politique face à la désinformation, dans le contexte de la guerre russo-ukrainienne.
13Surtout, les cas examinés dans ce numéro donnent à voir un ensemble diversifié d’acteurs, de situations sociales et de motivations pour produire ou pour relayer des fausses informations, et, à l’inverse, pour y résister. Du côté de la production de la désinformation, on retrouve des profils et des statuts divers : des employés préfectoraux, des citoyens engagés ou méfiants, des médias alternatifs. Mus par des formes d’intolérance, de frustration, d’opportunisme politique, portés par des appareils d’État ou par des mouvements politiques, ces acteurs profitent d’un contexte de tension sociale pour tenter de mettre en doute, manipuler, imposer une vision du monde. Les analyses montrent en quoi ces processus ont pour effet de réorienter les relations interpersonnelles et de questionner des identités professionnelles. Comme le montrent les contributeurs, d’autres acteurs (journalistes, médecins, artistes, éducateurs) s’engagent à divers niveaux pour exposer, corriger et prévenir les effets d’une information faussée ou déformée.
14Parmi les sources de désinformation explorées dans le dossier, il y a celle de la propagande politique étatique sous le régime de Poutine. Dans un entretien mené par Valentyna Dymytrova, enseignante-chercheuse en sciences de l’information et de la communication, les dessinateurs de presse Vladimir Kazanevsky et Denis Lopatin situent leur art par rapport à l’histoire de la caricature russe devenue outil de propagande sous le régime soviétique. Cette pratique se prolonge et s’intensifie dans le contexte du conflit actuel en Ukraine, poussant ces caricaturistes à concevoir leurs productions en tant qu’arme et moyen de contre-propagande dans une guerre informationnelle.
15Cependant, la fabrique de la désinformation peut s’appuyer sur des outils de rhétorique subtils, validés implicitement par un milieu social et professionnel. On est ici loin de la propagande politique, mais dans une forme de subversion au quotidien peu visible des faits qui risque de passer inaperçue. Dans sa contribution, l’historienne Laurence Prempain met en avant une « grammaire » de la désinformation décelable dans les pratiques rédactionnelles des fonctionnaires de la période 1930-1950. Elle analyse les enjeux de l’emploi insidieux et généralisé du temps du conditionnel par des employés préfectoraux français dans la rédaction des pièces du dossier administratif « de contrôle » concernant Joachim Eisack, un Juif allemand réfugié en France en 1933 après l’arrivée au pouvoir d’Hitler ; cette particularité rédactionnelle, lourde de conséquences pour Eisack et sa famille, met systématiquement en doute les éléments de sa biographie allant jusqu’à effacer son rôle dans la Résistance et dans l’arrestation en 1945 de l’ambassadeur du Troisième Reich Otto Abetz. À travers cette étude de cas, Laurence Prempain dévoile la nature profondément xénophobe des gestes scripturaux ordinaires des milieux de la bureaucratie française : dans un cadre politique hostile à l’immigration, ces scripteurs anonymes créent et mettent en circulation une vision suspecte d’Eisack, ainsi que d’autres réfugiés, retardant de façon injustifiée le traitement de sa demande de naturalisation, le privant de la reconnaissance qui lui est due par une écriture administrative diffamante qui tord les faits et détruit sa réputation.
16Aujourd’hui, la réécriture mensongère prend d’autres formes, émanant d’individus qui s’emparent d’outils d’éditorialisation numérique d’usage courant tels que des blogs, afin de donner de la visibilité à une idéologie. Stéphanie Lukasik et Alexandra Salou, chercheuses en sciences de l’information et de la communication, étudient les ressorts du procédé contemporain de désinformation connu sous l’appellation « réinformation », pour en décrypter les conséquences sur la pratique journalistique. Elles montrent comment les sites web de réinformation tels que FdeSouche, site agrégateur d’actualités fondé par Pierre Sautarel proche du mouvement identitaire français, se faisant passer pour des revues de presse, opèrent des détournements de textes publiés par des médias traditionnels afin de soutenir une position idéologique d’extrême droite. L’analyse porte sur ces procédés de recontextualisation de textes médiatiques à la faveur de visions biaisées (complotisme, xénophobie, racisme, transphobie, etc.) et dans le même temps donne un visage humain à ce phénomène à travers une série d’entretiens qualitatifs avec des publics de la réinformation dont certains en deviennent à leur tour des producteurs. Les enquêtés, dont un militant du mouvement des gilets jaunes, sont animés par la méfiance envers les médias professionnels et revendiquent une posture de lanceur d’alerte face à une presse jugée insuffisamment pluraliste. Ainsi, cette production citoyenne de désinformation « réinformante » emprunte les arguments de la contestation militante et les valeurs de la transparence.
17Cependant, le phénomène de la désinformation dépend de l’étendue de sa mise en circulation –aujourd’hui on parle de viralité – tout comme de la nature et de l’intensité des réactions provoquées par les situations de sa réception et de relais. Dans le cas étudié par Laurence Prempain, le conditionnel employé dans le langage des différentes pièces du dossier de Joachim Eisack met en branle un engrenage bureaucratique et décisionnel implacable : les doutes s’accumulent sur son caractère au fur et à mesure que le dossier sera partagé entre agents, annoté et resynthétisé, passant de service en service au moment des prises de décision sur le sort d’Eisack qui lui seront de plus en plus défavorables et hostiles. Cette mise en circulation par les employés de l’administration contribue au brouillage des informations figurant dans le dossier. Pour leur part, Stéphanie Lukasik et Alexandra Salou considèrent les formes de réaction et de relais des internautes (par le biais de commentaires et de partages) en ce qu’elles font vivre et circuler les messages réinformés ; en comparant les statistiques de retweet d’un texte journalistique par rapport à sa version « réinformée » selon l’affinité politique des internautes, les auteurs démontrent en quoi l’interaction renforce et révèle la polarisation politique des médias sociaux et l’enfermement idéologique des individus.
18Ce risque d’enfermement touche également les relations entre professionnels de la santé et leurs patients, comme le montrent Cécile Dolbeau-Bandin, enseignante-chercheuse en sciences de l’information et de la communication et son co-auteur Mathieu Bouillon, médecin généraliste. Ces auteurs présentent les résultats d’une enquête ayant pour objectif de sonder les praticiens généralistes sur leur vécu et leur ressenti à l’égard des fausses informations appropriées et relayées par leurs patients pendant la crise sanitaire du COVID. Tandis que les médecins mettent en place des procédés de veille informationnelle et restent à la recherche de modes de soutien en réseau pour accéder à des informations fiables dans un contexte très mouvant, ils doivent en même temps faire face à des patients influencés à divers degrés par les fausses informations qui circulent sur le virus, son traitement et sa prévention. La désinformation envahit l’échange médecin-patient, s’ajoutant aux autres tensions liées à la pandémie ; l’interaction avec le patient s’en trouve profondément affectée. Ce phénomène est situé dans le contexte de la méfiance grandissante envers le corps médical qui fragilise le rapport de confiance et de proximité avec le médecin généraliste. Les résultats de l’étude suggèrent que les médecins interrogés, attachés à une posture neutre d’écoute professionnelle malgré le discours de certains patients, peinent à faire valoir le paradigme de la scientificité en tant que critère de crédibilité des discours face aux pratiques sociales de l’information de leurs patients.
19Dans son étude sur les habilités à l’esprit critique d’un groupe d’étudiants primo-arrivants sénégalais à l’École de bibliothécaires archivistes et documentalistes (EBAD) de Dakar, Sylvestre Kouakou en tire des conclusions similaires. Les étudiants interrogés montrent une fragilité certaine dans leur capacité à prendre du recul par rapport aux ressorts argumentatifs des messages pseudo-scientifiques relayés par les médias. Maîtrisant peu les critères et les codes de crédibilité scientifique objectivants, sujets aux biais cognitifs, ils s’appuient essentiellement sur les opinions de leurs proches (familles, personnalités religieuses) ou sur les caractéristiques visuelles des documents soumis à leur attention pour évaluer la fiabilité des sources ; ils restent pour la plupart séduits par des messages complotistes répandus ou validés par les membres de leur entourage. Ce qui peut surprendre dans ces résultats, c’est que les participants à l’enquête sont de futurs professionnels de l’information ayant réussi, pendant le semestre qui précède le début de l’étude, un cours d’introduction à la recherche d’information à l’université. Le travail de Sylvestre Kouakou, en montrant le caractère encore peu affirmé des réflexes critiques chez ce groupe d’étudiants, met en cause la pertinence des programmes éducatifs sénégalais du secondaire en matière de littératie, peu centrés sur l’éducation critique à l’information et aux médias.
20Si les travaux réunis dans ce dossier fournissent peu d’indices des formes de résilience et de vigilance développées par les individus à l’égard de la désinformation, les témoignages suggèrent pourtant l’exceptionnalité de profils imperméables à l’échange de points de vue et au débat. Sont considérés ici des moments particulièrement tendus pendant lesquels les repères informationnels se construisent ou se reconstruisent (périodes de confinement en temps de pandémie ; transition à la vie étudiante) ; il resterait à approfondir les analyses des populations étudiées afin d’enrichir notre compréhension des logiques d’évaluation mobilisées dans différentes situations sociales du quotidien et à travers des dynamiques d’échange.
21À l’instar des conclusions de l’étude menée par Sylvestre Kouakou auprès des étudiants de l’EBAD, toutes les contributions du dossier mettent en avant des pistes pour appréhender voire contrer le problème de la désinformation. Laurence Prempain suggère, à travers son analyse de l’histoire du dossier de Joachim Eisack, combien le travail de l’historien et du chercheur peut participer à dévoiler les mécanismes invisibles de la désinformation ainsi que les préjugés qui la sous-tendent. La réhabilitation posthume d’Eisack en est un résultat ; à travers cette étude de cas se mettent au jour les pratiques subtiles de désinformation diffamante à l’échelle d’un milieu professionnel.
22Pour leur part, les dessinateurs Vladimir Kazanevsky et Denis Lopatin montrent en quoi leurs dessins sont conçus pour déjouer et dénoncer la propagande poutinienne autour de la guerre en Ukraine, avec art, humour et sarcasme ; ces créateurs restent animés par le souhait de conscientiser leurs publics et en particulier les publics russes, même si l’effet de leurs caricatures reste difficile à mesurer et dépend en grande partie du relais massif des images, notamment par les réseaux sociaux.
23Les autres solutions abordées montrent à quel point la désinformation provoque de la réflexivité de la part des professionnels : les journalistes canadiens, français et luxembourgeois interrogés par Stéphanie Lukasik et Alexandra Salou reconnaissent la responsabilité d’un journalisme « de bureau » dans la distance creusée entre les journalistes et leurs publics. Ces professionnels, soucieux de renouveler leur pratique professionnelle, voient dans le journalisme participatif une voie potentielle pour restaurer ces liens et pour développer des sujets davantage en phase avec les préoccupations de leurs lecteurs. De façon similaire, Cécile Dolbeau-Bandin et Mathieu Bouillon insistent sur la nécessité de programmes solides d’éducation à l’information et aux médias tout au long de la vie en tant qu’appui indispensable pour soutenir le rôle de gatekeeper informationnel désormais joué par les médecins généralistes auprès de leurs patients. Les dispositifs de mise en commun mentionnés par les praticiens (réseaux, veille partagée) suggèrent une profession qui s’interroge sur les conditions de mise en œuvre d’un nouvel « ethos médical post-COVID ». La question se pose également de la manière dont les médecins généralistes, amenés à accompagner leurs patients vers des sources d’information fiables, sont eux-mêmes formés à l’information et aux médias dans leurs cursus.
24Cette question de la formation des professionnels se pose de façon aigüe pour les bibliothécaires et les documentalistes qui sont de plus en plus sollicités pour sensibiliser leurs publics aux enjeux de la désinformation. Dans sa contribution, Élisabeth Noël, conservatrice des bibliothèques, part de sa propre expérience de montage d’un enseignement sur les enjeux de l’évaluation de l’information pour s’interroger sur les contenus abordés en matière d’éducation aux médias et à l’information (EMI) dans les cursus de formation initiale de futurs professionnels de l’information. Elle propose les résultats d’une enquête exploratoire au niveau national menée auprès de responsables de formation dans les domaines des bibliothèques, de la documentation et du journalisme. L’enquête fait part du caractère peu approfondi de certains sujets dans les formations, tels que la problématique de l’usage détourné des réseaux sociaux ou l’identification de la fake science, pour le domaine des bibliothèques. Élisabeth Noël suggère que ces lacunes sont à l’origine d’un sentiment de manque de légitimité à proposer des dispositifs d’EMI chez certains professionnels ; elle préconise une vision élargie du champ ainsi qu’un meilleur partage de compétences entre professionnels de secteurs différents devant assumer le rôle de formateur à l’information.
25Dans l’ensemble des contributions, d’après les acteurs interrogés, la lutte contre la désinformation est surtout celle de l’éducation, de la conscientisation, de la sensibilisation et de la prévention, en particulier en direction des futurs médiateurs et professionnels. Toutes les contributions mettent à mal l’idée d’une réponse simple par l’apprentissage de « bonnes pratiques » ; une des clés de la contre-offensive réside dans les outils de compréhension à développer pour aborder et appréhender les enjeux des pratiques scripturales, informationnelles et médiatiques en contexte, quel que soit ce dernier : de la culture de la bureaucratie aux consultations en cabinet médical, des pratiques autonomes de recherche d’informations de santé aux interactions avec les informations d’actualité. La désinformation soulève de multiples problématiques institutionnelles et culturelles propres à des environnements historiques, professionnels, géographiques. Le prochain numéro de Balisages approfondira cette dimension contextuelle des processus de la désinformation.
- Pierre-Yves Beaurepaire (Université Côte-d'Azur)
- Julien Bouchet (Centre d'Histoire « Espaces et Cultures » [CHEC]-Centre Jules-Isaac, Clermont-Ferrand)
- Philippe Bourdin (Université Clermont Auvergne)
- Viviane Clavier (Université Grenoble Alpes)
- Valérie Croissant (Université Lumière Lyon 2)
- Simona De Iulio (Université de Lille)
- Vincent Flauraud (Université Clermont Auvergne)
- Aline Fryzsman (Centre d'Histoire « Espaces et Cultures » (CHEC)-Université Clermont Auvergne)
- Julien Giry (Université de Tours)
- Sophie Jehel (Université Paris 8)
- Audrey Laplante (Université de Montréal)
- Valérie Lepine (Université Paul-Valéry Montpellier 3)
- Renaud Meltz (Université de Haute-Alsace)
- Ahmeth Ndiaye (Université Cheikh Anta Diop de Dakar, Sénégal)
- Simon Ngono (Université de la Réunion)
- Dominique Pinsolle (Université Bordeaux Montaigne)
- Nathalie Ponsard (Université Clermont Auvergne)
- Hélène Romeyer (Université de Bourgogne-Franche Comté)
- Mouhamadou Moustapha Sow (Université Cheikh Anta Diop de Dakar, Sénégal)
- William Spano (Université Lumière Lyon 2)
- Adrian Staii (Université Jean Moulin Lyon 3)
- Angèle Stalder (Université Jean Moulin Lyon 3)
- Bérengère Stassin (Université de Lorraine)
- Florence Thiault (Université Rennes 2)