Conclusion de la séance : « Le littoral : enjeu global, action locale »
Texte intégral
1S’il est un fil rouge qui s’impose à l’issue de cette séance, c’est l’incertitude et c’est encourageant. La recherche procède de l’envie de connaître, de savoir, de chercher à relier des observations, à les classer, à les référer par le recours à ce qui a déjà été écrit : elle ne peut progresser qu’en butant sur des obstacles qu’il faut franchir, parfois en les contournant avant d’y revenir par une meilleure appréciation des difficultés. En cela, cette journée est une réussite car elle inscrit clairement la démarche des chercheurs dans la modernité contemporaine : tout est lié, rien n’échappe à la nécessité de faire système dans toute approche scientifique (ou politique).
2La gestion intégrée des zones côtières, en transparence, en espoir encore, exprime bien cette approche, du local au global et, dans le Pas-de-Calais, on est bien dans ce contexte, entre les aspirations des collectivités à mieux maîtriser leur destin à terre et les centaines de navires de tous types et de toutes (presque) tailles qui transitent dans le détroit, croisant le trafic transmanche dans un ballet dont on peut chaque jour s’étonner qu’il ne soit pas plus porteur d’accidents dramatiques. Incertitudes donc, quand à la mesure de l’érosion côtière : mieux armés des outils de la mesure (LiDAR…), mieux assurés de la dimension gestionnaire comme dans le Pas de Calais ou à travers le programme Cocorisco en Bretagne, les spécialistes butent sur des situations contrastées et rarement univoques ou pour le politique, de « représentations » peu concordantes.
3Avec un large recul, on est tenté dans ce domaine, de considérer avec pessimisme que les choses n’ont guère évolué depuis une trentaine d’années ; sauf à dire que la production de papier et le bureaucratisme sont largement en progrès ! D’un autre côté, c’est aussi la preuve que les initiatives foisonnent, frémissement d’un futur en gestation, presque toutes portées par la protection de l’environnement, par une « patrimonialisation » sans doute nécessaire mais qui sera forcément une affaire de choix : tout protéger, tout conserver, tout patrimonialiser, c’est renoncer à choisir, particulière forme d’impuissance en politique, c’est figer et accepter l’obsolescence et renoncer à toute forme de « progrès ».
4Tous les exposés vont dans ce sens, qu’il s’agisse du parc des Calanques où l’on voit l’ombre portée d’une grande métropole assombrir quelque peu les ambitions des acteurs engagés, de l’Opération Grand site pour mieux gérer les dunes, enjeu capital face aux modifications du trait de côte ou encore, ou du parc naturel marin des estuaires picards et de la Côte d’Opale. Conserver dans l’espoir d’offrir à tous un futur mais aussi avec à l’esprit l’idée qu’il faut lutter contre des inégalités environnementales qui sont pourtant la conséquence de choix sociologiques : que protéger et pour qui ? Vieille question depuis la création en 1976 du Conservatoire du littoral. Du local – nous y sommes- au global, on touche au domaine de l’État en France, en difficulté mais toujours très présent dans les esprits et dans les faits, avec des administrations qui, de réforme en réforme, deviennent chaque fois plus complexes et plus illisibles au niveau local, celui de l’action sur le terrain.
5Un seul exemple mais éloquent : ces ports français qui en 35 ans n’ont guère progressé dans le traitement des volumes de marchandises. En cela comme en bien d’autres points illustrés dans cette journée, les littoraux, domaine de marge mais aussi interface remarquable, restent au cœur des préoccupations contemporaines. Des territoires de l’incertitude face auxquels les géographes, par la pluralité des approches, ne sont pas les moins armés !
Pour citer cet article
Référence papier
Alain Miossec, « Conclusion de la séance : « Le littoral : enjeu global, action locale » », Bulletin de l’association de géographes français, 93-4 | 2016, 423-424.
Référence électronique
Alain Miossec, « Conclusion de la séance : « Le littoral : enjeu global, action locale » », Bulletin de l’association de géographes français [En ligne], 93-4 | 2016, mis en ligne le 22 janvier 2018, consulté le 14 janvier 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/bagf/996 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/bagf.996
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