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Regards croisés autour de la légitimation de la catégorie « agriculture familiale » et ses défis conceptuels

Cross Perspectives around the legitimation of the category “family farming” and ITS conceptual challenges
Clara Craviotti
Traduction de Antoine Ramo
p. 322-337

Résumés

L’agriculture familiale comme catégorie politique s’étend en Amérique latine à partir du début des années 2000. Il y a eu une influence internationale particulièrement importante, visible à la fois dans la circulation des idées et les accords politiques entre les gouvernements de plusieurs pays de la région. Cet article adopte un regard comparatif, en tenant compte de la façon dont certains modèles d’’agriculture familiale ont pris forme dans les politiques de l’État français, plus tard ont été incorporés dans les initiatives développées au Brésil et ont été appropriés par d’autres pays du Cône Sud comme c’est le cas de l’Argentine, en faisant attention aux contextes spécifiques dans lesquels ces initiatives ont été produites. Alors qu’une définition large de l’agriculture familiale ressort de cette légitimation politique, cela provoque un certain malaise d’un point de vue conceptuel car cette définition gomme l’hétérogénéité des formes d’agriculture familiale. Dans un deuxième temps, nous proposerons quelques clés pour rendre compte de cette diversité, de la situation actuelle de l’agriculture familiale et de ses évolutions.

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Notes de la rédaction

Texte traduit et révisé par Antoine Ramo

Texte intégral

1. Introduction

1L’agriculture familiale est apparue et s’est diffusée comme catégorie politique en Amérique latine au début des années 2000. Les nouvelles orientations politiques de plusieurs pays du continent ont renforcé l’interventionnisme en faveur de la petite agriculture. En effet, si dans les années 1990, le contexte était celui de l’instauration de politiques néolibérales, aboutissant à la suppression des subventions et des instruments de régulation des marchés, dans la dernière décennie le nouveau contexte politique a mis au premier plan la question de l’agriculture familiale. D’autres facteurs ont contribué à faire de l’agriculture familiale une priorité. Au niveau international, l’augmentation de la demande de produits agricoles a conduit plusieurs pays d’Amérique latine à revaloriser le rôle de l’agriculture dans l’économie. Cependant la valorisation d’un petit nombre de filières n’a pas garanti l’accès équitable à l’alimentation, la réponse aux questions environnementales et à la question des structures agraires. Enfin, il est particulièrement intéressant de mesurer l’influence des politiques françaises dans ce domaine et de voir à quel point elles ont inspiré les initiatives brésiliennes et celles d’autres pays du Cône Sud, comme l’Argentine. Une étude comparative s’impose en étant attentive aux contextes spécifiques dans lesquels ces initiatives ont vu le jour. Ainsi, nous verrons comment l’agriculture familiale s’est institutionnalisée dans les trois pays mentionnés (Brésil, France et Argentine). Le Brésil et l’Argentine sont les pays d’Amérique du Sud où l’agriculture familiale a connu la plus grande reconnaissance au niveau de l’État, même si elle ne revêt pas la même importance dans les deux pays. Alors qu’une définition large de l’agriculture familiale ressort de cette légitimation politique, cela provoque un certain malaise d’un point de vue conceptuel car cette définition gomme l’hétérogénéité des formes d’agriculture familiale. Dans un deuxième temps, nous proposerons quelques clés pour rendre de compte de cette diversité, de la situation actuelle de l’agriculture familiale et de ses évolutions.

2. Institutionnalisation de la catégorie “agriculture familiale” en France et Amérique du Sud

2Dans le contexte de l’après-guerre et notamment dans les années 1960, un certain nombre de politiques publiques ont été lancées en France au nom de la modernisation de l’agriculture, et cela afin d’atteindre les objectifs suivants : l’autosuffisance alimentaire, la compétitivité de l’activité dans le contexte de la formation du marché commun européen, la parité des revenus entre les agriculteurs et les autres catégories sociales, ainsi que la fourniture d’aliments à des prix raisonnables pour les consommateurs. Cette politique s’est appuyée sur la cogestion entre l’État et les organisations de producteurs qui avaient alors le monopole de la représentation du secteur.

3Le modèle encouragé par l’État, en accord avec les aspirations du CNJA (Cercle National des Jeunes Agriculteurs, branche de la Fédération Nationale des Syndicats des Exploitants Agricoles), pour atteindre l’ensemble de ces objectifs était celui de l’exploitation familiale de taille moyenne : il s’inscrivait dans une vision de l’agriculture française reposant sur trois sortes d’exploitations : les grandes, de type capitalistique, qui n’avaient pas besoin de se moderniser, les petites, dont il fallait faciliter la disparition, et les moyennes, de dimension familiale, qu’il fallait aider [Deléage 2013].

  • 1 Cette notion a fait l’objet d’un travail de construction conjointe de la part des cadres des mouvem (...)

4Ainsi, un ensemble de mesures a favorisé la formation d’exploitations moyennes viables, susceptibles de rémunérer deux unités de travail humain (UTH)1. Le cadre institutionnel a encouragé un processus de sélection des agriculteurs en fonction de la taille de l’exploitation, leur formation et leur type d’emploi, en posant les conditions à remplir pour l’accès aux aides publiques (exigence d’une surface minimum d’installation, d’un niveau minimum d’études et de temps de travail dédié à l’activité agricole). Cette politique a été complétée par la régulation du marché foncier agricole à travers la création des Sociétés d’Aménagement Foncier et d’Établissement Rural (SAFER), le financement de compléments de retraite aux agriculteurs de plus de 55 ans prêts à cesser leur activité, et la reconversion professionnelle de la main d’œuvre quittant l’agriculture (Fonds d’action sociale pour l’aménagement des structures agricoles, FASASA) [Deléage 2013, Gauvrit 2012].

5Un large spectre d’organisations publiques et privées adhère à ce projet de modernisation de l’agriculture, articulé autour de l’exploitation familiale ”viable” et insérée dans des filières agroalimentaires. La ”cogestion” est évidente. Toutefois, la notion défendue n’était pas celle d’”agriculture familiale”, mais celle de l’agriculteur ”chef d’entreprise”.

6A partir des années 1970 ce projet modernisateur commence à se fissurer, face aux effets d’un modèle visant principalement à accroître la production et la productivité. La contestation du modèle repose non seulement sur les questions environnementales, mais aussi sur les conséquences sociales de la modernisation. Des réponses émergent ”de l’intérieur” comme c’est le cas de la création du Forum pour une Agriculture Raisonnée et Respectueuse de l’Environnement (FARRE). En dehors de ce modèle, les réponses tournent autour des notions d’agriculture paysanne et de souveraineté alimentaire promues par la Confédération Paysanne, créée en 1987 [Déléage 2012]. La cogestion elle-même est remise en cause à la fois par la reconnaissance du pluralisme syndical et par les réformes de la politique agricole commune, négociées à un niveau supranational plutôt que national [TRANSRURAL 2006].

7Dans un contexte différent, le Brésil a lancé au milieu des années 1990 un ensemble de politiques en faveur de l’agriculture familiale. Depuis les années 1960, le pays avait réussi à augmenter de manière significative la production agricole, ce qui lui avait permis de surmonter la pénurie alimentaire et son impact sur les processus inflationnistes, ainsi que de générer des excédents pour réduire le déficit budgétaire et la dette externe [Guanziroli 2014]. À la différence du cas français, ce développement a été mené par l’agriculture d’entreprise et non par l’agriculture familiale, bien qu’elle fût majoritaire [Batista 2012]. Le processus de modernisation a donc aggravé la concentration de la propriété et l’exclusion sociale dans le pays.

  • 2 Centrale Unitaire des Travailleurs et Mouvement des Travailleurs Sans Terre.
  • 3 Confédération Nationale des Travailleurs de l’Agriculture (ensuite fusionnée avec la CUT).
  • 4 A propos du rôle de l’agriculture familiale dans le développement agricole, et pour la différencier (...)

8Le retour à la démocratie initié en 1985 a facilité la mobilisation et l’émergence de nouvelles organisations (le CUT et le MST2) qui exigeaient des politiques pour faire face à la marginalisation de la petite production, exacerbée par l’adoption des politiques néolibérales et menacée par la création du MERCOSUR [Grisa & Schneider 2014]. Grâce à leur visibilité et aux échanges avec des organisations d’autres pays, le débat intellectuel sur la contribution économique de l’agriculture familiale gagna les milieux syndicaux et certaines organisations – la CUT, la CONTAG3- commencèrent à la promouvoir [Picolotto 2009, Schiavoni 2010]4. Les manifestations annuelles dénommées ”Gritos de la Terra” (Appels de la Terre) ont joué un rôle décisif dans la mise en place des premières politiques pour l’agriculture familiale : c’est le cas du PROVAP (programme de valorisation des petits producteurs ruraux) transformé en 1995 en PRONAF (programme pour renforcer l’agriculture familiale).

9La création du PRONAF a été considérée comme une sorte de compromis politique passé entre les syndicats ruraux – principalement la CONTAG - et le gouvernement, ainsi que comme une stratégie visant à atténuer la mobilisation du MST [Grisa & Schneider 2014]. Mais il a également représenté la légitimation par l’État d’une nouvelle catégorie sociale, les agriculteurs familiaux, jusque-là désignés par le terme de ”petits producteurs”, ”producteurs à faible revenu” ou ”agriculture de subsistance” [Guanziroli & Basco 2009]. Ce nouveau regard ”positif” sur l’agriculture familiale a été accompagné par des efforts visant à quantifier sa contribution à la production et à l’emploi. La catégorie ”agriculteurs familiaux” fait alors consensus auprès de différents acteurs : les organisations de producteurs, les responsables politiques et les intellectuels se sont impliqués dans l’élaboration de la nouvelle politique.

10La notion d’Agriculture Familiale, jusqu’alors presque inconnue par la société brésilienne, a donc fait l’objet d’un intense processus de construction de sens par certaines organisations, qui ont mis l’accent sur son rôle de productrice d’aliments moderne et efficace [Neves 2006, Picolotto 2009]. Néanmoins, le terme est ensuite contesté par des intellectuels et des mouvements sociaux comme le MST qui opposent au ”modèle” de l’agrobusiness, la construction d’un projet d’autonomie paysanne face au capitalisme [Schneider 2014a, Picolotto 2014].

11Après le lancement du PRONAF, l’institutionnalisation de l’Agriculture Familiale s’affirme au Brésil avec la promulgation de la loi 11326 en 2006 qui étend ses débouchés. Ainsi, l’État achète des produits aux fermes familiales, destinés à la formation de stocks stratégiques et à la distribution aux personnes en situation d’insécurité alimentaire. Le programme national d’alimentation scolaire (PNAE) est aussi réorganisé et oblige les municipalités à acheter un minimum de 30 % des produits de l’agriculture familiale. Ces politiques se sont renforcées depuis la création du Ministère de Développement Agraire (MDA) en 1999. La cogestion entre l’État et les organisations d’agriculteurs familiaux [Sabourin 2014] ou même une sorte de néo-corporatisme [Picolotto 2014] sont assurés par la participation de leurs représentants dans les secrétariats du MDA. Le dualisme de la politique agricole brésilienne se réaffirme, avec deux ministères voués à l’agriculture, et la mise en place de deux plans annuels différents (Plano Safra pour l’agriculture familiale et Plan de l’agriculture et l’élevage pour le secteur agro-industriel).

12Comme en France, au début du processus d’institutionnalisation de l’agriculture familiale, c’est une conception particulière de la structure agraire qui a inspiré les actions mises en œuvre. Selon Moruzzi Marques [2003] les documents sur lesquels s’est appuyée l’élaboration du PRONAF depuis le début ont distingué agriculture d’entreprise (patronale) et agriculture familiale. Trois secteurs de l’agriculture familiale étaient clairement définis selon le revenu dégagé : le secteur performant intégré aux marchés et aux circuits technologiques, un secteur en transition partiellement intégré et le secteur marginal. On attribuait à ce secteur peu de possibilités de développement et on le considérait comme le principal destinataire des politiques sociales. Le deuxième secteur en revanche, était le principal bénéficiaire de cette politique de développement agricole étant donné son potentiel de croissance et sa capacité à rejoindre le groupe ”idéal” des agriculteurs familiaux performants [Tonneau & al. 2005]. L’objectif était de moderniser l’agriculture familiale par le recours au crédit.

  • 5 Cet aspect a été modifié en 2011 avec l’exigence d’un revenu minimum provenant de l’unité de produc (...)
  • 6 En 1999, quatre catégories d’exploitations familiales (A, B, C et D) avaient été mises en place sel (...)

13Dans ces premières études, même si la définition adoptée mettait l’accent sur les rapports sociaux de production comme caractéristique distinctive de l’agriculture familiale, les critères opérationnels étaient relativement lâches : la main-d’œuvre familiale devait être plus nombreuse que la main-d’œuvre salariée et la surface de l’exploitation pouvait atteindre jusqu’à 15 fois la taille moyenne de chaque région [Guanziroli 2014]. Dans la mise en œuvre du PRONAF ces critères ont été ajustés et la limite supérieure a été réduite à 4 modules fiscaux. Les modifications successives ont élargi les bénéficiaires potentiels, en permettant l’embauche de deux employés permanents (Résolution 2310, 1996). La loi 11326 de 2006 a proposé une définition relativement large de l’agriculture familiale, car elle n’exige pas la résidence sur la propriété ou dans une ville proche, et ne fixe pas de limite à l’embauche de salariés extérieurs à la famille, ni de critère de revenu5, tout en maintenant la limite supérieure de quatre modules fiscaux de terre. Quant aux types d’agriculture familiale définis au début du PRONAF – et qui étaient retenus comme conditions d’accès au crédit –, ils ont été simplifiés par la suite en raison des difficultés d’application de la typologie sur le terrain6. Les plafonds conditionnant l’accès ont été élargis.

14Selon Aquino & Schneider [2010], ces mesures n’ont pas seulement occulté un biais du programme en faveur des producteurs à capital important, mais elles ont aussi accru les inégalités au sein de l’agriculture familiale. Les données montrent que les producteurs ayant des liens plus étroits avec la banque et l’agro-industrie (principalement situés dans les régions du sud du Brésil) ont obtenu la plus grande partie des ressources. Ces mesures illustrent également la préférence des responsables politiques pour un modèle d’agriculture familiale modernisée et capable de se reproduire par l’activité agricole. Par ailleurs, l’accès à cet ensemble de politiques est lié à un outil d’enregistrement auprès des organisations de producteurs, la déclaration d’aptitude agricole (DAP), qui de fait exclut certains secteurs de l’AF [Grisa & Schneider 2014].

15Dans un processus de circulation des idées et d’accords politiques suscité par la création du MERCOSUR, les définitions de l’agriculture familiale adoptées par le Brésil, ont fortement influencé sa reconnaissance dans les autres pays appartenant au bloc régional. En 2004, la proposition du gouvernement brésilien de créer un organisme régional spécifique – la réunion spécialisée sur l’agriculture familiale (REAF) – fut acceptée. Il a contribué à l’instauration d’un recensement des agriculteurs familiaux dans les pays où on ne le pratiquait pas (Argentine, Paraguay et Uruguay).

16Toutefois, l’Argentine avait déjà mis en place des actions en faveur de la ”petite production” ou minifundio. Pendant les années 1990, le pays avait lancé plusieurs programmes - certains d’entre eux avec un financement international- pour atténuer les effets de l’application des politiques néolibérales. Ces actions étaient destinées aux secteurs les plus pauvres ou sous-capitalisés de l’agriculture ; l’État leur fournissait du conseil, de petites subventions ou des crédits. L’objectif était d’améliorer la capacité du secteur à créer de l’emploi familial afin de lutter contre la pauvreté et d’éviter la migration de la population rurale vers les centres urbains [Lattuada & al. 2012].

17L’institutionnalisation de la catégorie AF s’est produite dans le cadre de l’arrivée au pouvoir, en 2003, d’un nouveau gouvernement ayant une orientation politique différente de celui des années 1990. Il souhaitait promouvoir une plus grande intervention de l’État dans l’économie et une répartition plus équitable des revenus. Mais c’est seulement lors de la création au sein du Mercosur, de la REAF, proposée par le Brésil, que la question de l’agriculture familiale est devenue une priorité pour l’État argentin. Le gouvernement s’étant engagé à organiser la section argentine de la REAF, il crée le Forum national de l’agriculture familiale FONAF, constitué de représentants de l’État et des organisations de producteurs.

18La définition de l’agriculture familiale, issue du FONAF, la conçoit comme un ”mode de vie” et une ”question culturelle”, dont l’objectif principal est la reproduction sociale de la famille dans de bonnes conditions. Dans le cadre de l’agriculture familiale, la gestion de l’unité de production et les investissements sont faits par des personnes ayant des liens familiaux, l’essentiel du travail est assuré par les membres de la famille, la propriété des moyens de production leur appartient (mais pas nécessairement la terre), c’est aussi à l’intérieur de la famille que se fait la transmission des valeurs, des savoir-faire et de l’expérience [FONAF 2006].

19Comme au Brésil, l’Argentine a fait des études pour mesurer la contribution du secteur à la production et à l’emploi. La première de ces études, menée dans le cadre d’un programme de financement international destiné aux petits producteurs [Obschatko et al. 2006], retient cette approche et définit l’agriculteur familial comme quelqu’un qui dirige l’exploitation et y travaille, n’emploie pas de travailleurs rémunérés permanents non familiaux et ne dépasserait pas en matière de surface et de têtes de bétail un seuil excédant la capacité de travail d’une famille. Une étude ultérieure [Obschatko 2009] élargit le concept d’agriculture familiale à un nouveau groupe d’agriculteurs pouvant employer jusqu’à deux salariés permanents.

  • 7 Devenu ensuite Secrétariat lorsque le Ministère de l’Agriculture a été créé en 2009.

20En 2008, la création du Sous-Secrétariat au Développement Rural et à l’agriculture familiale institutionnalise encore davantage cette question7. Sous sa houlette, de nombreux programmes en faveur de ce programme ont vu le jour. La création de ce sous-secrétariat est issue du conflit qui a opposé les organisations traditionnelles du secteur agricole au gouvernement lorsque celui-ci a modifié la fiscalité à l’exportation des céréales et des oléagineux, ce qui l’a conduit à chercher d’autres alliés politiques.

21Par ailleurs, le gouvernement a mis en place des actions pour faciliter l’accès des agriculteurs familiaux à la sécurité sociale et leur insertion dans l’économie formelle. Des organismes techniques liés à l’activité agricole, comme l’Institut de Recherche et Technologie Agricole (INTA), ont créé des agences spécifiques pour s’occuper de l’agriculture familiale. Une nouvelle étape dans l’institutionnalisation est survenue en novembre de 2014, avec l’approbation par la Chambre de Députés de la loi de ”Réparation historique de l’agriculture familiale”, qui la considère comme un acteur clé pour le développement des territoires. Des représentants de certaines organisations de producteurs occupent des postes clés au Secrétariat de l’Agriculture Familiale. 

22Sans en arriver à une situation semblable au Brésil, doté de deux ministères voués à l’agriculture, on perçoit dans le cas argentin, de très faibles liens entre les visions et propositions du tout nouveau secrétariat et celles qui émanent d’autres secteurs de l’État, y compris du Ministère de l’Agriculture. Ainsi, le Plan stratégique agroalimentaire 2000-2020 ne fait que peu référence à l’agriculture familiale par rapport à la multiplicité des actions prévues pour améliorer la place de l’Argentine sur les marchés mondiaux. Cette situation nourrit l’hypothèse de la promotion de deux modèles agricoles différents, dont les tensions ne sont pas résolues.

23Par ailleurs, la notion même de l’agriculture familiale ne s’impose pas dans les mondes agricoles ou académiques. Les sujets qui pourraient être considérés comme relevant de l’agriculture familiale ne s’affichent pas toujours comme tels. En fait, les formes de représentation des agriculteurs familiaux sont hétérogènes : elles comprennent à la fois des agriculteurs techniquement avancés et intégrés aux marchés, mais qui ont des difficultés pour soutenir des processus d’accumulation, et des paysans qui luttent pour défendre leurs droits aux terres et qui déploient des stratégies essentiellement fondées sur l’autoconsommation [Schiavoni 2010]. Dans ce contexte, l’adoption du terme ”agriculture familiale” conduit à l’invisibilité des agriculteurs les plus faibles. D’autres organisations, cependant, se revendiquent de l’agriculture familiale, de façon pragmatique, en ajoutant éventuellement à l’agriculture familiale les qualificatifs de ”paysanne” ou d’”indigène”, afin d’avoir accès aux programmes gouvernementaux.

24Du point de vue conceptuel, il existe également des tensions chez les chercheurs. La proposition de prendre l’agriculture familiale comme catégorie élargie s’écarte d’une tradition intellectuelle du pays qui différencie les paysans des producteurs familiaux capitalisés, ceux qui ont la possibilité d’accumuler du capital et sont entièrement insérés dans le marché [Archetti & Stolen 1975]. Ainsi cette catégorie est remise en cause, car elle balaierait les efforts théoriques faits pour définir les différents types sociaux [Barbetta & al. 2012]. D’autre part on estime qu’une approche qui met l’accent sur les liens familiaux rejette au second plan la question de l’insertion économique de l’agriculture familiale [Lacanna & al. 2011].

25On peut affirmer cependant que la définition large de l’agriculture familiale présente quelques avantages d’un point de vue politique car elle offre une plus grande capacité de représentation et de pouvoir [González & Manzanal 2011]. Elle offre en même temps une plus grande légitimité à la nécessité d’envisager des politiques spécifiques face à l’agriculture entrepreunariale.

26D’un point de vue purement conceptuel, l’adoption de la catégorie Agriculture Familiale n’implique pas nécessairement de renoncer aux efforts faits pour saisir la diversité des individus concernés et pour répondre à des questions fondamentales : quels types sociaux émergent et quels sont ceux qui disparaissent dans des sociétés en mouvement ? Quelles en sont les conséquences pour les territoires ?

3. La diversité de l’agriculture familiale

27Nous proposons dans cette partie d’aborder quelques axes d’analyse pour rendre compte de la diversité de l’agriculture familiale dans les pays du Cône Sud.

  • 8 Les indicateurs utilisés dans les études analysées par Soto-Barquero et al [2007] ont été les nivea (...)

28On peut utiliser des indicateurs structurels pour différencier les types d’Agriculture Familiale, comme c’est le cas des études financées par l’Organisation des Nations Unies pour l’Agriculture et l’Alimentation8. Ces indicateurs sont relativement simples et obéissent aux contraintes des sources quantitatives disponibles. Cependant, ces indicateurs structurels ne saisissent que partiellement la complexité du secteur, notamment si on considère que l’AF est un mode de vie où les aspects domestiques et productifs sont liés, et qui combine des éléments marchands et non marchands.

29Le cadre d’analyse de Bourdieu [1994] est particulièrement approprié pour saisir les stratégies de reproduction sociale puisqu’il aborde les aspects biologique, héréditaire, économique, culturel, social et symbolique. Ainsi, lunité danalyse retenue est le ménage plutôt que lunité de production, ce qui est plus approprié à notre objet d’étude. Cette approche met en évidence un aspect essentiel pour la reproduction de l’agriculture familiale dans le contexte actuel, qui est la question de la succession, ainsi que les différentes modalités d’exercice de la pluriactivité ; une pluriactivité qui n’est pas seulement le fait des exploitations pauvres. Il permet également de considérer d’autres situations comme les contributions de travail à l’exploitation des membres qui appartiennent à des différents ménages, ayant une parenté entre eux. Cette approche peut être enrichie par un examen plus approfondi des pratiques de production et à leur signification pour les producteurs [Craviotti 2012].

30Par ailleurs, il faut considérer un axe diachronique et cela à différentes échelles : les régions ou les espaces particuliers, celui des familles et de leurs parcours de vie. On constate en effet, que la diversité actuelle de l’agriculture familiale est liée à des origines historiques différentes et tient aux modes d’accès à la terre. Une partie de l’agriculture familiale est fondée sur un accès précoce à la propriété puisqu’il est dû à des expériences de colonisation promues par l’État, généralement destinées aux immigrés d’origine européenne. Dans d’autres cas, il s’agit de petits agriculteurs ayant un accès précaire à la terre et liés aux grandes unités de production (haciendas ou estancias), bénéficiaires ne serait-ce que partiellement de politiques qui leur ont permis d’accéder à la propriété. Une petite partie d’entre eux proviennent même du monde urbain et sont sans expérience agricole.

31Outre ces différentes origines historiques de l’agriculture familiale on prend en compte différentes modalités d’évolution, qui sont influencées par les politiques nationales. Si l’on considère les dernières décennies, on note une grande diversité parmi les pays du Cône Sud dans l’adoption des politiques néolibérales, y compris dans le démantèlement des outils de protection, ainsi que dans l’adoption plus tardive de ce que l’on a appelé le post-néolibéralisme. Tout cela, associé à l’intégration du secteur agricole dans la mondialisation, a eu des impacts différents sur les structures agraires. En général, on observe une diminution du nombre des petites unités de production en Amérique latine ; dans certains cas leur nombre demeure stable, mais elles n’ont pas augmenté (à l’exception du Brésil, où il y a eu une légère croissance). Une partie du secteur s’est capitalisée et a même cessé d’appartenir à l’agriculture familiale, mais une autre partie est devenue une activité refuge, où l’accès à des revenus non agricoles (notamment par des stratégies multi-localisation des ménages) a permis le maintien à la terre motivé par la recherche de la sécurité ou des raisons identitaires.

32Le quatrième axe d’analyse est spatial. Il correspond aux caractéristiques des régions (potentiel agro-écologique, densité de population et liens entre le rural et l’urbain) qui favorisent tel ou tel type d’agriculture familiale. En Argentine une différence ”classique” a été établie entre la région pampéenne et ses grandes cultures d’exportation, et les zones non pampéennes, qui ont des productions orientées vers le marché intérieur. Bien que les changements au cours des dernières décennies - la réorientation de quelques filières vers l’exportation (notamment la viticulture et le citron), ainsi que l’expansion territoriale de la culture de soja fortement insérée dans les marchés mondiaux - aient remis en question cette division traditionnelle du territoire argentin, des différences subsistent entre les régions en matière de structures agraires et de poids relatif de l’agriculture familiale, qui reste plus fort dans le nord du pays. Les études montrent également que la partie sous-capitalisée de l’agriculture est beaucoup plus importante dans cette région [Obschatko & al. 2006]. Les ménages se composent d’un plus grand nombre de membres et de travailleurs familiaux ; les surfaces sont plus petites, et parfois les producteurs ont un accès précaire à la terre.

33En raison de l’avancée de la frontière agricole, les agriculteurs familiaux se déplacent aussi bien vers le nord-ouest que le nord-est de l’Argentine. En revanche, dans la Pampa les difficultés pour se maintenir comme producteurs dans des activités où le changement technologique favorise l’augmentation de la taille des exploitations ont conduit quelques-uns à devenir de petits rentiers. D’autres se sont développés, pas nécessairement à travers l’augmentation de leur équipement et des emplois salariés, mais grâce à l’externalisation de tâches confiées à des prestataires de service. Dans certaines parties de cette région on assiste à des stratégies différentes visant à renforcer les ressources endogènes des exploitations à travers l’intensification du travail familial, l’élaboration de sous-produits et la mise en place des réseaux d’échanges non marchands, par exemple pour réaliser des travaux qui requièrent des machines spécialisées [Craviotti & Pardías 2014].

34Un cinquième axe d’analyse de la diversité de l’ agriculture familiale tient à la modalité d’insertion (dans le territoire ou dans la filière). Un critère fréquemment retenu dans les définitions opérationnelles adoptées par les pays du Mercosur est la résidence de la famille sur l’exploitation ou dans une ville voisine. Cependant les agriculteurs familiaux ne sont pas nécessairement liés aux endroits où ils habitent. Il existe un type d’agriculture familiale que l’on peut qualifier de sectorielle, dans la mesure où sa production est le premier maillon d’une chaîne plus vaste. C’est un type d’agriculture familiale qui a des rapports avec les différents marchés de produits. Elle vise davantage à avoir plus de poids dans une production donnée vers laquelle elle a dirigé ses investissements plutôt que de s’intégrer à son territoire. Ce type d’exploitation repose sur la transmission intergénérationnelle du patrimoine familial, même si les plus importantes d’entre elles ont développé des formes juridiques leur permettant de dissocier l’unité de production de l’unité domestique. On parle ici de situations où la famille habite dans un village ou une ville, mais généralement pas sur la ferme. Il y a aussi une autre agriculture familiale, l’agriculture familiale localisée qui, contrairement à l’agriculture familiale sectorielle repose, pour se reproduire, sur la proximité à la fois géographique et sociale, principalement à travers les circuits de commercialisation de sa production. Ce sont des exploitations plus diversifiées que les précédentes. Le degré de participation des membres de la famille dans les activités de l’unité et l’intensité de leur travail sont généralement plus élevés. Certaines de ces exploitations remettent en cause le modèle productiviste et mettent en œuvre des formes alternatives. Dans d’autres cas, il n’y a pas cette volonté, mais les producteurs ont trouvé dans la diversification un moyen de réduire les risques liés au marché et aux aléas climatiques, ainsi qu’un moyen de stabiliser leurs revenus tout au long de l’année. Ils ont recours aux circuits courts pour mieux maîtriser leur commercialisation, sans pour autant abandonner les autres circuits. Ce sont peut-être les cas les plus intéressants à analyser parce qu’il s’agit de situations hybrides qui ouvrent tout un champ de recherche pour les études rurales. Ce type d’unités se retrouve, dans un pays aussi divers que l’Argentine, dans des zones à forte présence paysanne, comme la province de Misiones, ou dans certaines parties de la Pampa, à proximité des centres urbains ou des circuits touristiques. Ce type d’agriculture familiale est peut-être le type le moins visible.

35Enfin, un sixième axe d’analyse peut être proposé. Il s’agit des liens que l’agriculture familiale établit avec d’autres formes de production et les acteurs ruraux non agricoles. En Amérique latine, il y a quelques années, on parlait du couple latifundium-minifundium. Dans une étude de 1995, Kay notait que ce dualisme avait disparu et avait été remplacé par une structure agraire plus complexe. Toutefois, au cours des dernières années, l’agriculture d’entreprise a pris un nouvel essor avec l’expansion des productions orientées vers l’exportation et, dans certains cas, des biocarburants. Elle a développé de nouvelles façons d’organiser la production, notamment des réseaux flexibles d’externalisation, et elle a renforcé ses liens avec le capital financier. Désormais un nouveau dualisme apparaît pour le chercheur, celui opposant l’agriculture familiale à l’agro-business.

36Par conséquent la relation de l’agriculture familiale avec l’agro-business (une catégorie tout aussi diverse) doit être étudiée, car on rencontre différents types de situations. Lorsqu’il y a concurrence pour l’exploitation de la ressource (terre, eau), il peut y avoir une exclusion de l’agriculture familiale qui conduit à son déplacement ; ou dans une moindre mesure il peut y avoir des rapports de subordination ou de complémentarité.

4. Pour conclure

37En France, la question de l’agriculture familiale avait pour objectif de moderniser l’agriculture et la notion de chef d’entreprise était plus invoquée que celle d’agriculteur familial. Les revenus agricoles ont atteint un niveau équivalent à ceux d’autres catégories sociales, même si les tendances à la concentration de la production et les disparités entre agriculteurs et régions persistent, et si la question d’une agriculture plus respectueuse de l’environnement n’est pas résolue.

38Dans les cas du Brésil et de l’Argentine, la persistance de la pauvreté rurale et d’agriculteurs partiellement intégrés dans les processus de développement justifie un agenda différent. Dans ce contexte, des définitions larges de l’agriculture familiale ont été élaborées. Mais l’importance de l’agriculture d’entreprise pour l’exportation et l’excédent commercial rejettent à l’arrière-plan les tensions entre acteurs. Ces derniers étant pris en charge par des institutions différentes, il est, dans les faits, difficile d’avoir une vision d’ensemble des problèmes liés à l’agriculture.

39Dans le processus d’affirmation de la notion d’agriculture familiale, on observe une circulation d’idées qui dépassent les cadres géographiques et les communautés scientifiques dont elles sont issues. Elles émanent désormais des intellectuels, des experts, des politiciens et des représentants d’organisations de tous horizons. Pourtant, en dépit de son institutionnalisation, cette notion n’a pas atteint une légitimation totale parmi les pays du Cône Sud, tant d’un point de vue politique que conceptuel. Au niveau politique, on peut lui reprocher de masquer la problématique des sujets les plus démunis du secteur agricole et au niveau conceptuel d’aboutir à une simplification excessive de la réalité. Enfin, il s’agit de ne pas abandonner les efforts pour saisir l’hétérogénéité interne de l’agriculture familiale, et pour identifier les types sociaux qui émergent et qui disparaissent au sein de sociétés contemporaines en évolution.

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Notes

1 Cette notion a fait l’objet d’un travail de construction conjointe de la part des cadres des mouvements, des responsables politiques et des chercheurs. « Dans cette construction, la première UTH est l’agriculteur chef d’exploitation, à la seconde correspond l’épouse agricultrice, un enfant aide familial, parfois une combinaison des deux, ou encore un salarié » [Hervieu & Purseigle 2013, p. 128].

2 Centrale Unitaire des Travailleurs et Mouvement des Travailleurs Sans Terre.

3 Confédération Nationale des Travailleurs de l’Agriculture (ensuite fusionnée avec la CUT).

4 A propos du rôle de l’agriculture familiale dans le développement agricole, et pour la différencier de l’agriculture paysanne, voir les contributions d’Eli da Veiga et Ricardo Abramovay, ainsi que le chapitre sur le Brésil dans l’étude comparative internationale cordonnée par Hugues Lamarche, écrit par Maria Nazareth Wanderley [cf. Grisa & Schneider 2014, Picolotto 2014].

5 Cet aspect a été modifié en 2011 avec l’exigence d’un revenu minimum provenant de l’unité de production.

6 En 1999, quatre catégories d’exploitations familiales (A, B, C et D) avaient été mises en place selon le revenu et le statut de bénéficiaire de la réforme agraire (Résolution 2629). En 2004 (Résolution 3206) un nouveau groupe E de revenu plus élevé a été ajouté [Zaar 2010]. En 2008, les groupes C, D et E ont été regroupés en une seule catégorie AF [Nierderle 2014].

7 Devenu ensuite Secrétariat lorsque le Ministère de l’Agriculture a été créé en 2009.

8 Les indicateurs utilisés dans les études analysées par Soto-Barquero et al [2007] ont été les niveaux de revenu, dans le cas du Brésil ; au Mexique, la taille des exploitations agricoles ; en Colombie, les niveaux de salaires mensuels ; au Chili et en Équateur, les salariés permanents et temporaires par rapport à l’utilisation de main-d’œuvre familiale. L’étude coordonnée par Schneider [2014b] pour le Brésil, le Chili, la Colombie, l’Équateur, El Salvador, le Guatemala et le Mexique a pris la part du revenu agricole dans le revenu total.

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Pour citer cet article

Référence papier

Clara Craviotti, « Regards croisés autour de la légitimation de la catégorie « agriculture familiale » et ses défis conceptuels »Bulletin de l’association de géographes français, 92-3 | 2015, 322-337.

Référence électronique

Clara Craviotti, « Regards croisés autour de la légitimation de la catégorie « agriculture familiale » et ses défis conceptuels »Bulletin de l’association de géographes français [En ligne], 92-3 | 2015, mis en ligne le 22 janvier 2018, consulté le 04 décembre 2024. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/bagf/683 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/bagf.683

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Auteur

Clara Craviotti

Docteur en géographie, Chercheuse du Conseil National de la Recherche Scientifique et Technologique (CONICET), Argentine, Av. Córdoba 2122, (1120) Ciudad de Buenos Aires, Argentine, – Courriel : c.craviotti[at]conicet.gov.ar

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