1Depuis les années 1980, on assiste au développement d’une compétition entre villes, et ce tant au niveau national qu’international. C’est ainsi que les villes algériennes déploient des efforts pour développer une stratégie d’attractivité qui se définit comme : « la capacité d’un territoire à attirer et à retenir les activités, les entreprises et les populations, à travers l’existence de facteurs divers qui font qu’un territoire, de par ses caractéristiques propres, exerce un effet d’attraction plus ou moins fort sur les entreprises et les ménages, et leur permet de participer, avec un succès variable, à l’essor de ces derniers ». [Hatem 2004], elle laisse donc une place aux termes de rayonnement, de notoriété, d’effet d’aimant [Bouinot 2002]. On peut alors énoncer que l’attractivité a plusieurs dimensions : attractivité des compétences touristique, économique, résidentielle, environnementale ou culturelle. D’ailleurs, chaque dimension peut s’apprécier à partir des indicateurs qui permettent de mesurer la performance d’un territoire par rapport à d’autres entités nationales ou internationales (Fig. 1). L’attractivité n’est pas seulement conçue comme un moyen d’entrer dans la sphère de la mondialisation, mais elle est également un puissant levier de développement, de (re)dynamisation et de revitalisation des territoires [Bourgain & al 2010]. Elle est supposée générer des retombées positives sur le plan social, culturel et économique en s’inscrivant dans une approche de développement durable. À cet effet, la notion d’attractivité est omniprésente comme leitmotiv dans les politiques qui s’intéressent aux territoires, à l’économie, à l’évolution des sociétés dans les différents domaines de prospérité et de bien-être [Ingallina 2007].
2C’est ainsi que les investissements et l’installation de nouvelles entreprises sur un territoire contribuent à la formation du capital humain et facilitent les échanges internationaux, ce qui favoriserait la création d’un climat d’affaires plus compétitif et développerait les entreprises locales. Ainsi, les investissements directs nationaux et internationaux peuvent contribuer au développement des secteurs de haute technologie et des activités à haute valeur ajoutée dans la perspective d’améliorer les conditions environnementales et sociales du territoire d’accueil. [Bourgain & al 2010].
Figure 1– Les facteurs de l’attractivité territoriale
Source : Auteurs
3L’attractivité n’est pas seulement conçue comme un moyen d’entrer dans la sphère de la mondialisation, mais elle est également un puissant levier de développement, de (re)dynamisation et de revitalisation des territoires [Bourgain & al 2010]. Elle est supposée générer des retombées positives sur le plan social, culturel et économique en s’inscrivant dans une approche de développement durable. À cet effet, la notion d’attractivité est omniprésente comme leitmotiv dans les politiques qui s’intéressent aux territoires, à l’économie, à l’évolution des sociétés dans les différents domaines de prospérité et de bien-être [Ingallina 2007].
4C’est ainsi que les investissements et l’installation de nouvelles entreprises sur un territoire contribuent à la formation du capital humain et facilitent les échanges internationaux, ce qui favoriserait la création d’un climat d’affaires plus compétitif et développerait les entreprises locales. Ainsi, les investissements directs nationaux et internationaux peuvent contribuer au développement des secteurs de haute technologie et des activités à haute valeur ajoutée dans la perspective d’améliorer les conditions environnementales et sociales du territoire d’accueil. [Bourgain & al 2010].
5Partant de ces effets positifs sur l’économie locale, l’attractivité est devenue un enjeu majeur pour les villes algériennes [MATE 2008]. Le territoire de Jijel, qui constitue notre terrain d’étude, a bénéficié, comme d’autres villes, de projets ambitieux dans les différents secteurs (tourisme, industrie, infrastructures routières et portuaires, etc.) dans la perspective d’améliorer son attractivité. Mais, du fait de sa situation urbaine actuelle, la contribution de ces projets structurants dans le développement de l’attractivité de cette ville est apparue restreinte, par manque d’efforts dans l’amélioration des performances locales (habitat, aménagement urbain, santé, infrastructures touristiques, moyens de transport, etc.). Un déficit que nous allons essayer de démontrer dans notre article, à travers l’analyse multicritères (AMC) dont l’objectif est de montrer que le recours à un projet urbain d’attractivité pourrait être la solution adéquate pour faire de Jijel un pôle de croissance de la région nord-est du territoire algérien.
6La ville de Jijel se situe au nord-est de l’Algérie, à 30 minutes de vol d’Alger et à une heure de Barcelone, de Naples et de Marseille. À l’est, elle est limitrophe de la wilaya (préfecture) de Skikda, à l’ouest de Bejaïa, et au sud des villes de Sétif et de Mila. Cette ville, portuaire et touristique de taille moyenne avec 765 334 habitants [Préfecture de Jijel 2010], s’étale sur un territoire de 2 396, 63 km2 qui se caractérise par des données naturelles et géographiques extrêmement diversifiées : une position géographique stratégique (Fig. 2), un potentiel agricole, un climat méditerranéen (4 saisons), un littoral de 120 km, des forêts, des montagnes constituant 80 % de son parc naturel riche en biodiversité sont des éléments forts d’attractivité (tant résidentielle que touristique).
Figure 2 – Position géographique de Jijel au sein de son environnement régional selon SRAT
Source : [MATE.2010]
7La complémentarité de ces différentes caractéristiques (naturelles et géographiques) constitue-t-elle un atout pour le développement de l’attractivité de ce territoire ?
8Jijel est restée longtemps en marge de la dynamique du système urbain régional et national en raison, d’une part, de l’instabilité politique et d’autre part, du manque de décisions des pouvoirs publics dans la mise en place des projets de développement, entravés par son enclavement et l’absence de perspectives de réalisation de projets. Par ailleurs, la reprise de la croissance économique n’a eu lieu qu’en 2001 grâce à la stabilité politique après une « décennie noire » marquée par le spectre du terrorisme, suivie d’une embellie des exportations des hydrocarbures favorisant l’accélération de la croissance en Algérie, entre 2002 et 2010.
9Depuis cette époque, Jijel a renoué avec son développement économique et essaie aujourd’hui de rattraper le retard enregistré pendant de longues années, cherchant surtout à valoriser son attractivité dans un contexte de compétitivité accrue. Un défi à relever afin d’assurer son insertion économique régionale, nationale et internationale et de passer de son statut de petite localité enclavée, à celui de pôle industriel, de tourisme et d’affaires. Le Plan d’aménagement du territoire de la wilaya 2030 (PAWT) a mentionné ce défi dans la partie intitulée « Renforcement de l’attractivité de la wilaya et insertion de cette dernière dans l’économie régionale et nationale » [CNEAP 2011] présentant les stratégies et les projets mis en place pour atteindre l’objectif d’attractivité territoriale de cette ville.
10En raison de sa position géographique dans le bassin méditerranéen, ainsi que de ses potentialités humaines et économiques (une population locale, en majorité jeune, active et diplômée, un complexe industriel, un port international, un aéroport etc.), son attractivité ne dépend pas seulement de ses ressources objectives, mais également du rôle politique de ses élus, de ses élites et de ses économistes, ainsi que de l’implication de ses habitants et des investisseurs. En ce sens, il faut noter le grand intérêt qu’affichent les organismes nationaux vis-à-vis des projets de développement de cette ville, signe d’encouragement pour les acteurs institutionnels locaux. D’après le directeur de l’urbanisme de Jijel, « le gouvernement est soucieux de soutenir ses efforts pour appuyer le processus de développement dans la wilaya de Jijel à travers l’inscription de 6 112 projets de développement répartis entre projets sectoriels et locaux depuis 2000 à ce jour ». [directeur d’urbanisme de Jijel, entretien mars 2016]. Dans ce sens, le directeur du port de DjenDjen confirme que : « ces projets revêtent une importance capitale pour les autorités publiques qui la [Jijel] considèrent comme étant un des axes stratégiques du développement pour l’ensemble de la région ». [directeur du port de DjenDjen, entretien 2 février 2016].
11Parmi les actions les plus remarquables on peut citer :
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La mise en service du grand port commercial international de DjenDjen, situé à 20 kilomètres à l’est de Jijel.
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L’amélioration de la qualité des routes et l’augmentation des échanges commerciaux avec les autres régions du pays grâce à la pénétrante de l’autoroute Est-Ouest (Fig 3) reliant Jijel à Sétif et d’autres villes des hauts plateaux, une liaison routière qui va jouer un rôle important dans le désenclavement de la région de cette ville.
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La construction du troisième pôle universitaire qui accueillera jusqu’à 20 000 étudiants, en cours de réalisation.
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L’agrandissement et l’internationalisation de l’Aéroport Ferhat Abbas qui assure depuis 2010, des vols au niveau national et international.
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L’aménagement de la zone d’expansion touristique (ZET) d’El Aouana et une autre étude pour l’aménagement de trois autres zones.
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La réalisation d’un complexe sidérurgique à Ballera.
12Cependant, ces projets ambitieux apportent-ils de véritables réponses au développement de l’attractivité de cette ville ?
Figure 3 – Une partie du tracé de la pénétrante reliant le port- l’aéroport et l’autoroute Est-Ouest
Source : Direction des travaux publics – JIJEL
13Les autorités locales sont unanimes pour considérer que l’attractivité repose sur trois piliers : le secteur productif, le secteur résidentiel et le secteur touristique visant la mobilisation de toutes les potentialités de ce territoire. Il faut signaler que ces projets structurants appartiennent aux différents champs d’attractivité (touristique, économique et résidentielle). Selon le Plan d’Aménagement Wilayal [CNEAP 2012], cette ville a été restructurée en 3 zones de développement (Jijel Centre pour le tertiaire supérieur, Jijel Est pour l’industrie et Jijel Ouest pour le tourisme) (Fig.4). En dépit de la polémique suscitée par cette restructuration, dans le milieu des urbanistes et des gestionnaires de ce territoire, pour lesquels l’insertion des activités (touristiques et industrielles) est paradoxalement contradictoire sur un même territoire ; celle-ci peut également engendrer des résultats contraires aux objectifs tracés.
Figure 4 – Les unités d’aménagement de Jijel
Source : CNEAP, 2012 traité par les auteurs
14En effet, certains acteurs ont déclaré que l’insertion de l’activité industrielle à travers la mise en place du complexe sidérurgique dans cette ville, à caractère touristique, n’est pas le bon choix pour son développement. Ce choix industriel porte atteinte à l’environnement naturel (le sol, l’air, l’eau. etc.) de Jijel, ce potentiel naturel représente une opportunité majeure pour ses activités touristiques. Ce que le confirme cet urbaniste : « ce projet pourrait porter atteinte à l’image touristique de cette ville ». [urbaniste de la ville de Jijel, entretien 15 mars 2016].
15En revanche, le directeur du port de DjenDjen trouve que ces activités sont complémentaires au moment où chaque activité est localisée dans une partie du territoire (le tourisme côté Ouest de la ville où sont concentrées les ZET) et l’industrie du côté Est de la ville où se situent les infrastructures aéroportuaires et le complexe sidérurgique, ainsi que la plupart des zones d’activité industrielle : « Des d’études "d’impact sur l’environnement" et "de danger" du futur complexe sidérurgique de Bellara (El Milia) ont été faites par le bureau d’études espagnol IDOM. L’état vise à mettre en place des modes de production plus respectueux de l’environnement, et mettre en place les technologies qui rendront possible la « croissance verte ». [directeur du port de DjenDjen, entretien 2 février 2016].
16Pour sa part, le directeur de l’environnement ajoute : « L’État a décidé d’utiliser des procédés de "réduction directe au gaz naturel", une alternative économique classique qui élimine l’utilisation du charbon dans le projet du complexe sidérurgie de Ballera ». [directeur de l’environnement de la ville de Jijel, entretien 25 février 2016]
17En réalité, Jijel n’arrive pas vraiment à atteindre les objectifs fixés par les pouvoirs publics, afin de la rendre attractive en la transformant en pôle de croissance économique, industriel et touristique, du fait que le chômage demeure très élevé, compte tenu du développement local insatisfaisant. Dans ce contexte, comment peut-on expliquer cette défaillance ? Et pourquoi Jijel ne parvient pas à faire bonne figure, en développant son territoire tant à l’échelle régionale que nationale ? Existe-t-il des enjeux entravant le développement de son attractivité ? Comment peut-elle exister dans un univers d’attractivité concurrentielle ? Quelles nouvelles approches peuvent inspirer les élus et les responsables locaux, pour mettre en place une stratégie à son développement ?
18Afin de répondre à ces questions, nous présentons dans un premier temps un diagnostic territorial en utilisant la matrice SWOT (Strengths, Weaknesses, Opportunities, Threats), ce qui nous permettra de recenser les atouts, les opportunités, les forces et les faiblesses de la ville de Jijel. Nous compléterons la matrice SWOT par une évaluation d’attractivité en utilisant la grille AMC (analyse multicritère). Cette évaluation vise à apprécier globalement la performance de cette ville et son territoire, à définir les points clés de ses systèmes et de sa situation, à simuler ses possibilités d’évolution sous des conditions définies et par rapport à d’autres espaces de référence. L’objectif étant de faire ressortir les enjeux majeurs et prioritaires de cette ville.
19Pour valider notre diagnostic, nous avons utilisé la recherche documentaire (consultation des différents rapports, cartes, photos, livres d’histoire, articles de presses, données statistiques, instruments d’urbanisme (PDAU intercommunaux, POS), schémas territoriaux (PAW, SRAT , et le SDAT)), l’observation et des entretiens exploratoires, réalisés auprès d’un échantillon hétérogène composé de 40 personnes, en utilisant un guide d’entretien qui nous a permis de recueillir trois grands types d’informations :
-
Autodiagnostic de chaque acteur interrogé (regard sur le territoire : caractéristiques, forces, faiblesses, opportunités, menaces, principaux facteurs de blocage, connaissance d’un projet territorial).
-
Vision future (la vision future de chaque acteur et son point de vue sur les conditions de réussite du territoire).
-
Actions et projets de développement programmés.
20Nous avons interrogé les différentes catégories d’acteurs autour de notre objet d’études : responsables territoriaux (représentants de partis politiques, députés, acteurs économiques et administratifs, urbanistes), habitants et professionnels (Tab. 1) et qui devraient être ou sont impliqués pour bien mener le développement de territoire Jijilien.
Tableau 1 – Echantillon de l’enquête de terrain
Effectif
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Acteurs interrogés
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Date d’entretien
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Lieu de l’entretien
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Les responsables territoriaux (politiques, économiques et administratifs)
15 acteurs
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Le secrétaire du wali (le secrétaire du préfet)
Directeur de Tourisme
Directeur de transport
Directeur des Travaux publics Directeur du port de DjenDjen
Directeur de la programmation et suivi budgétaire de la wilaya
Directeur d’urbanisme
Directeur de l’environnement
Directeur de logement
Directeur d’équipement
Directeur de l’agriculture
Directeur de l’agence foncière
Directeur des Mines et de l’industrie
Direction de santé
Recteur de l’université de Jijel
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11 Décembre 201711 Janvier 2016 18 Janvier 2016 25 Janvier 2016 02 février 2016 15 février 2016
22 février 2016
25 février 2016
mars 2016
mars 2016
mars 2016
11 avril 2016
18 avril 2016
mai 2016
mai 2016
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Siège de la wilaya de Jijel
Direction du tourisme
Direction du transport
Direction des TP
Direction du port de DjenDjen
Direction du ex DPAT
Direction d’urbanisme
Direction de l’environnement
Direction de logement
Direction d’équipement
Direction de l’agriculture
Direction du l’agence foncière
La direction des Mines et de l’industrie
La direction de la santé
Université de Jijel
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Professionnels
15 acteurs
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Architectes-urbanistes (enseignants chercheurs/ gérants des bureaux d’études d’architecture et d’urbanisme à Jijel)
Chefs d’entreprises installées à Jijel
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Du 02 février au 28 mars 2016
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A l’université / laboratoire de recherche
Siege des bureaux d’études et des entreprises.
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Habitants
10 acteurs
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05 Etudiants
05 Pères de famille
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De janvier à mars 2016
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A l’université
Au domicile de chaque habitant
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Source : Auteurs
21Les acteurs interrogés nous ont permis la construction du tableau de l’analyse SWOT et nous ont conduits à l’évaluation et à la notation des critères et des indicateurs de l’analyse multicritères (AMC), notamment ceux de type qualitatif.
22Basée sur la confrontation des facteurs internes et externes de développement, l’analyse SWOT (Tab. 2) peut déceler les facteurs qui sont favorables, utiles pour l’attractivité et ceux qui sont défavorables. En effet, les attributs de la ville présentés comme force devraient faire l’objet d’initiatives (éléments déclencheurs) d’une stratégie d’attractivité, alors que les attributs présentés comme faiblesses servent de point de départ pour élaborer une stratégie d’attractivité. Cette analyse qualitative nous donne une image globale, sommaire et récapitulative sur le territoire de Jijel, une démarche considérée comme un support et une source d’informations pour l’AMC.
23En plus de sa situation géographique et stratégique, ainsi que de ses ressources naturelles et touristiques remarquables, les acteurs interrogés sur la ville de Jijel sont, en majorité, d’accord sur deux atouts d’attractivité qui semblent capables de créer une mutation dans la vie économique de ce territoire :
24Le premier atout, c’est le projet d’agrandissement et la mise en service du port de Djen Djen, comme l’a mentionné le secrétaire général de la Wilaya (Préfeture) : « Le port de Djen Djen est un levier de développement et d’attractivité économique de Jijel, il peut profiter à l’économie algérienne en favorisant le désenclavement de l’ensemble du pays par son arrimage aux grandes routes maritimes ». [Le secrétaire général de la wilaya, entretien réalisé le 11 décembre 2017 à Jijel].
25Cette ambition s’accorde avec le souhait de l’État algérien de faire de Djen Djen, à moyen terme, un hub international et de le positionner comme concurrent du port de Tanger Med au Maroc et de celui d’Enfidha (futur hub tunisien en cours de réalisation). [Setti & al. 2011]. En évoquant cette compétitivité territoriale, il semble que la priorité pour l’Algérie n’est pas seulement la course au développement d’un hub, mais plutôt d’utiliser Djen Djen comme un levier de développement portuaire et économique de ce territoire et de toute la région nord-est du pays.
Tableau 2 (page suivante) – Listing exhaustif et classement des facteurs endogènes et exogènes liés aux thèmes de l’attractivité selon la méthode SWOT appliquée au territoire Jijilien
Atouts / Strengths
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Faiblesses / Weaknesses
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- Une position géographique permettant de jouer un rôle pivot dans les échanges internationaux. (Porte méditerranéenne, Débouché portuaire préférentiel pour une bonne partie de la région des Hauts Plateaux Est et le Sud du pays.)
- Un accroissement de population qui s’accélère depuis 1999 et qui bénéficie à l’ensemble du bassin de vie de Jijel ; le développement d’une force de travail. L’accroissement d’un marché de consommation.
- Un patrimoine naturel classé, richesse paysagère parmi les plus beaux du bassin méditerranéen.
- Des ressources naturelles variées : Eau, sol, énergie, terrains agricoles de fortes potentialités.
- Fort potentiel touristique 19 Zones d’Expansion Touristique (ZET) avec une surface totale de 4828 hectares, la première à l’échelle nationale.
- Aménagement des Zones d’Expansion Touristique d’Aouana, et 5 en cours d’étude.
- Accessibilité en amélioration (projets routiers, ferroviaire…etc.)
- L’attrait de la ville pour des projets importants et des investisseurs, port de DjenDjen, aéroport, port de plaisance, complexe sidérurgique d’El Milia …etc.)
- 2 pôles universitaires. Un troisième en cours de réalisation. Des centres de formation professionnelle, des laboratoires de recherches scientifiques
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- Expansion urbaine non maîtrisée (l’étalement urbain).
- La forte littoralisation des activités et du peuplement dont les conséquences sur l’écosystème se traduisent par la pollution des eaux et de l’environnement et le mitage des terres agricoles
- Ampleur et foisonnement de l’habitat non réglementé
- Déficit en équipements et en infrastructures.
- Manque de logements en quantité et en qualité
- Manque de services du tertiaire supérieur
- Manque d’offre immobilière aux entreprises
- Manque de transports en commun
- Déficit en offre touristique (hébergement, restaurant haut de gamme)
- Déficit en offre culturelle et en espaces de loisirs
- Mauvaise qualité de cadre de vie
- L’environnement urbain donne une mauvaise image pour les habitants et les visiteurs (qualité des espaces publics, cadre bâti, espaces verts…etc.)
- Le sous-équipement et la dévitalisation des zones montagneuses enclavées.
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Opportunités / Opportunities
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Menaces / Threats
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- Une forte volonté politique pour le développement de la ville.
- Disponibilité des informations en termes quantitatifs et qualitatifs.
- Mise à jour des informations (monographie annuelle du territoire.
- Une façade maritime de 120 km, (ouverture sur l’international).
- Un climat de type humide, (plus de 900 mm de pluie en moyenne par an) doux, favorable au développement agricole.
- Mise à jour des informations (monographie annuelle du territoire).
- Intégration au sein du secteur du pôle de tourisme d’excellence Nord Est 2 favorisant de nombreux programmes en matière de tourisme.
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- L’étalement urbain au détriment des terrains agricoles à forte potentialité et les zones touristiques particulièrement celle du côté Est de la ville.
- L’absence d’une vision stratégique capable de porter un projet global pour le territoire.
- Le manque de coordination entre les différents secteurs (urbanisme, tourisme, industrie, etc.).
- Risques sismiques et d’inondations, érosion des sols.
- Jijel obéit encore à une démarche politique centralisée, volontariste, très peu participative. Les collectivités locales n’arrivent pas engager une concertation constructive pour l’amélioration des finances locales.
- Les limites des politiques et outils de planification de l’urbain.
- Dépendance des autorités locales aux investissements de l’État.
- La sous-exploitation de certains grands équipements existants.
- Le sous-équipement, l’enclavement et la dévitalisation des zones de montagne.
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Source : Auteurs
26En effet ce hub maritime, qui apporte une valeur ajoutée territoriale nulle ou presque, est saisi comme point d’ancrage pour attirer l’investissement étranger et des activités industrielles ou de distribution. Cette attractivité ne consiste pas uniquement à entrer dans une logique d’une pure économie extravertie, mais elle permet au port de Jijel de devenir la porte de l’Afrique subsaharienne, du fait que ce port devrait élargir son arrière-pays aux pays limitrophes, notamment au Niger. Dès lors, plusieurs éléments plaident en sa faveur, comme la réalisation de la pénétrante autoroutière reliant Jijel à l’autoroute Est-ouest, ce qui devrait permettre à cette infrastructure d’être connectée à la route Transsaharienne. [Mohamed- Cherif, Ducruet 2011]. Le deuxième atout est la réalisation du complexe sidérurgique à Ballera, un ancien rêve (qui date de 1974) qui prend forme le 9 mars 2015, en combinaison avec le port de Djen Djen ; Jijel est destinée à devenir un pôle industriel, portuaire et d’affaire dans sa région Nord-Est. Ce territoire est au cœur d’une nouvelle dynamique dont les effets devraient sortir à moyen terme cette région montagneuse de son légendaire enclavement et bouleverser positivement l’équation chômage-emploi. C’est le témoignage du directeur des Mines et d’industrie de Jijel : « Au-delà de ses impacts social et spatial, ce complexe va certainement augmenter le poids économique de la ville dans le futur proche à différents niveaux (Régional et national voir international) » [Le directeur des mines et de l’industrie de Jijel, entretien réalisé, le 18 avril 2016].
27Malgré ces opportunités, ce territoire souffre d’une lenteur très remarquable du processus de développement de son attractivité. On peut déduire des résultats de notre analyse qualitative que de véritables obstacles entravent l’essor urbain au niveau régional : défaillances et instabilité des structures et des systèmes de gestion, manque de stratégies de développement et d’attractivité clairement définies. Au-delà d’une crise formelle, caractérisée particulièrement par le déficit en disponibilité de logements, il manque également une offre territoriale diversifiée. En comparaison avec les wilayas environnantes, le territoire de Jijel manque surtout d’offre de services et de fonctions urbaines supérieures.
28Sur le plan urbain, il s’est avéré que les effets et les répercussions de la décennie noire qu’a vécue l’Algérie, sont présentement marqués par les déstructurations qu’a provoquées le terrorisme. Ce qui explique que Jijel n’arrive pas actuellement à maîtriser une urbanisation anarchique accentuée par l’absence de gestion urbaine performante : inefficacité du cadre réglementaire et des outils de planification et mauvaises décisions de l’État et des pouvoirs publics. Pris par l’urgence des réalisations, les pouvoirs publics n’ont eu de cesse de promouvoir des réponses rapides, partielles et ponctuelles aux problèmes urbains et à la forte demande sociale (même si ces réponses peuvent prendre la forme de dispositifs appelés programmes ou plans urbains) [Belguidoum 2013], tels que les grands programmes de logements (ZHUN dans les années 80, le programme ADAAL de l’an 2000…etc.), d’équipements, d’infrastructures qui sont des illustrations de ces mauvaises décisions étatiques qui reposent sur des logiques technicistes et technocratiques, surtout qu’elles sont génératrices de nouvelles contradictions et d’une évolution incohérente dans le territoire.
29Jijel n’arrive pas actuellement à rééquilibrer l’armature de son développement urbain, et le contraste se manifeste entre, d’un côté, des plaines qui représentent 20 % du territoire, relativement bien desservies en moyens de transport et bien équipées ; et de l’autre, des espaces montagneux isolés, sous-équipés et sous-développés, subissant doublement l’effet d’enclavement (Fig. 5).
Figure 5 – Distribution du réseau routier dans la wilaya de Jijel
Source : Abdelaziz 2015
30Avec une pression démographique et environnementale constante, 70 % de ce territoire est urbanisé, ce qui laisse peu de place au développement dans ses limites. Or, les besoins d’urbanisation sont en augmentation régulière et la ville s’étale sur les terres agricoles et les espaces naturels de qualité, conséquence d’une mauvaise maîtrise des processus de construction et d’urbanisation. À cela, s’ajoute, l’inefficience du cadre juridique et une mauvaise gestion du foncier, un ensemble favorisant un malaise urbain qui ronge la ville. Selon le directeur de l’agence foncière de Jijel, « la réserve foncière urbanisable à terme représente 15 % du territoire, elle offre peu de possibilités d’extension et appelle d’urgence la mise en place d’opérations de renouvellement urbain ». Il ajoute que : « la problématique est au niveau du foncier urbain vu le caractère forestier de la ville. Actuellement il y a 13 dossiers au niveau du Ministère de l’agriculture pour avis [ministériel]. Il convient de souligner que ces dossiers concernent des terrains agricoles et forestiers. Une fois validés, ils seront destinés pour l’implantation des équipements publics, de logements. Pour le foncier touristique, il figure dans les 19 Zones d’expansion touristique, avec une surface globale de 4232 Ha, et le foncier industriel 672.21 Ha entre zones industrielles et zones d’activité ». [Directeur de l’agence foncière de Jijel, entretien réalisé le 11 avril 2016].
31D’après ces déclarations, on comprend que la crise de gouvernance, qui peine à trouver des réponses efficaces aux problèmes de développement de ce territoire, est au cœur des pressions (démographique, environnementale, économique) conditionnant l’évolution future de cette région. Cette crise de gouvernance est significative à Jijel car elle obéit à une démarche centralisée, volontariste, très peu participative, d’où les collectivités locales n’arrivent pas à trouver la voie pour engager une concertation constructive avec l’ensemble des acteurs concernés. On se rend compte que la crise est double parce que : premièrement elle repose sur la centralisation de l’État, dans ses décisions au détriment du pouvoir local sans impliquer les acteurs de la société civile dans des décisions contraires au discours officiel. Les pouvoirs locaux ont toujours été un service pour exécuter le programme de l’État. [Mouaziz- Bouchentouf 2008].
32À ce manque de coordination permanente entre les acteurs et les secteurs (tourisme, industrie, logements, urbanisme, transport…etc.), s’ajoute la sectorisation excessive de l’urbanisation accompagnée d’une stratégie de territorialisation relativement fragile imposant une dynamique d’urbanisation incohérente, conséquence du manque de conciliation politique, d’action réfléchie, de lois régies et de pratiques publiques.
33Deuxièmement, l’implication des acteurs de la société civile en matière d’aménagement et de gestion de la ville est presque inexistante. L’avis du citoyen de cette ville est souvent négligé du champ décisionnel, sans solliciter l’adhésion de la population aux politiques urbaines proposées au développement territorial et aux stratégies d’attractivité.
34La première question est de savoir si ce territoire est réellement apte à promouvoir l’attractivité, à travers une évaluation pertinente par le biais de l’analyse multicritère.
35À travers la recherche théorique sur les facteurs de l’attractivité économique, touristique et résidentielle (Fig. 1), nous avons pu relever une série de critères et d’indicateurs correspondant à une attractivité généralisée (résidentielle, économique et touristique), et ce, selon l’objectif signalé dans le Plan d’aménagement wilayal de Jijel (PAW) qui correspondrait aux caractères de la ville et à la spécificité de ses ressources et de son potentiel.
36La grille proposée couvre 39 critères et 90 indicateurs organisés en 12 domaines : population et démographie ; gouvernance ; équipements structurants ; conditions d’implantation ; accessibilité et mobilité adaptée ; connectivité ; qualité du cadre de vie ; développement de la recherche et de nouvelles technologies ; soutien à l’économie de connaissance ; ressources culturelles, naturelles et paysages ; infrastructures touristiques ; image de la ville.
37Les indicateurs choisis sont notés selon un barème équilibré sur une échelle de 5 (Tab. 3), préalablement défini par nous-mêmes, sans aucune pondération qui consiste à attribuer un poids ou une valeur spécifique aux différents indicateurs et critères. À cet effet, nous avons choisi l’utilisation de la moyenne simple et non pas la moyenne pondérée, en considérant que tous les indicateurs ont la même importance.
Tableau 3 – Échelle de notation utilisée dans l’évaluation
1
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2
|
3
|
4
|
5
|
Très défavorable à l’attractivité
|
Défavorable à l’attractivité
|
Moyennement favorable
|
Favorable
|
Très favorable à l’attractivité
|
Source : Auteurs]
38
Figure 6 – Etapes d’évaluation de l’attractivité de Jijel
Source : Auteurs
39Afin de faciliter la lecture des résultats de l’évaluation (Fig. 6) que nous avons interprétés par un graphe synthétique sous forme de diagrammes radar, se rapportant à l’évaluation de chaque domaine ou, d’une manière globale, aux domaines par rapport à un schéma de référence (Fig. 7).
40
Figure n° 7 – Profil général d’évaluation de l’attractivité de Jijel et de son territoire
Source : Auteurs d’après les résultats de l’AMC]
41Le profil en radars général dressé (Fig. 7) met en évidence les domaines d’attractivité qui enregistrent un déficit parce qu’ils nécessitent une mise à niveau, c’est-à-dire qu’il faudrait identifier les enjeux sur lesquels il faut agir en priorité et ceux qui présentent des opportunités pour un développement futur de l’attractivité de cette ville.
42D’après la figure 7, les domaines d’attractivité : « Qualité de cadre de vie », « Gouvernance », « Image de la ville », « Infrastructures touristiques » et « Soutien de l’économie de connaissance » sont considérés comme non performants parce qu’ils sont en dessous du seuil de performance d’attractivité, dont la valeur est égale à 3. Cette faible valeur traduit le manque d’une image de marque et d’une stratégie de marketing territorial à Jijel. Quant aux domaines « Infrastructure touristique » et « Qualité de cadre vie », ils constituent une grande faiblesse pour cette ville qui souffre d’un manque d’offres en matière d’habitat, d’équipements et d’infrastructures touristiques, afin de répondre aux besoins des habitants, des touristes et des investisseurs.
43Par ailleurs, les domaines « Conditions d’implantation », « Accessibilité et mobilité adaptée », se trouvent dans un intervalle moyen par rapport à l’échelle d’évaluation. Ces résultats s’expliquent par les efforts manifestés par les pouvoirs publics, non seulement pour l’amélioration de l’accessibilité du territoire jijilien, à travers certains projets routiers et aéroportuaires, mais aussi pour celle des zones d’activités.
44D’un autre côté, les critères composant les domaines de « population et démographie », « ressources culturelles, naturelles et paysages » sont jugés performants, et constituent des atouts importants pour le développement de l’attractivité dans cette ville. En revanche, les domaines « Connectivité », « Équipements structurants » sont au-dessus du seuil de performance, dont la valeur est égale à 3. Ces domaines sont jugés performants, mais nécessitent plus de développement pour arriver à la plus grande valeur de performance.
45À partir de la matrice SWOT et des résultats analysés pour chaque domaine séparément dans l’ensemble du territoire, nous pouvons formuler quatre enjeux stratégiques et prioritaires pour la ville de Jijel : faiblesse de gouvernance urbaine, mauvaise qualité du cadre de vie, inefficacité de l’offre du territoire et manque d’une offre globale de qualité, absence d’une image distinctive et affirmée. Les enjeux à venir peuvent être résumés comme suit :
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Mauvaise qualité du cadre de vie : à ce sujet, R. Diziain précise que « c’est la qualité de l’environnement urbain et la maîtrise des grands équilibres en termes de cohésion sociale, de déplacement et de respect de l’environnement qui font l’attractivité des territoires » [Diziain 2002]. C’est ainsi que la ville de Jijel enregistre d’après le profil présenté dans la figure 7, un manque important dans ce domaine. À l’exception du critère de la sécurité des biens et des personnes et celui de l’attractivité environnementale qui se situent dans un intervalle moyen, le reste des critères composant le domaine “qualité du cadre de vie” affichent des valeurs très faibles et nécessitent une mise à niveau urgente :
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Qualité de l’espace urbain (qualité d’aménagement des espaces extérieurs, densité des jardins publics, offre suffisante en espace public de qualité.) ;
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Image de la ville (degré de convivialité de la ville, cohésion sociale, capacité de la ville à se construire une identité et à la diffuser auprès des populations.) ;
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Attractivité résidentielle (offre et qualité de logements, équipements sociaux et de santé, offre de transport de qualité et mobilité adaptée.). D’après nos résultats, l’attractivité ne se résume pas uniquement à la mise en place des projets de grande envergure, mais la qualité de vie reste un élément très impliqué et non négligeable pour construire une économie urbaine performante.
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Manque d’une offre territoriale de qualité. D’après les résultats de notre analyse AMC et les entretiens réalisés auprès de différents acteurs, cette ville possède l’offre territoriale simple qui facilite l’implantation des entreprises (ressources territoriale, eau, énergie, paysage et potentiel naturel…etc.), en revanche l’offre territoriale complexe, qui suscite l’implantation des entreprises et des touristes, est jugée très faible. D’ailleurs, nos enquêtés expliquent que la ville de Jijel est confrontée à un manque d’offres en matière de réceptivité (infrastructures d’accueil, de loisirs, de consommation, d’accessibilité de transport, immeuble du tertiaire supérieur, etc.), d’activités (service, loisirs, consommation, etc.) et d’habitabilité (qualité de l’espace urbain, de logements, hôtels, etc.). Dans ce sens, une transformation fonctionnelle de la ville s’impose pour aboutir à l’objectif d’attractivité.
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Absence d’une image spécifique et affirmée . De nombreux habitants, professionnels et gestionnaires déclarent que Jijel est un territoire méconnu par les investisseurs et les visiteurs. Bien qu’elle dispose de potentialités et de ressources qui lui permettent de rehausser son image de marque pour pouvoir retrouver sa singularité et se distinguer des autres villes limitrophes (Bejaïa, Constantine, Skikda, Annaba…), Jijel est réputée pour son patrimoine naturel exceptionnel (Fig. 8), un atout pour la promotion de son image comme base d’une stratégie de marketing.
Figure 8 – La « corniche Jijilienne » de réputation mondiale
Source : Auteurs 2016
46D’autres enquêtés voient que les nouveaux projets structurants (Port de DjenDjen, complexe sidérurgique, l’aménagement de la Zone d’Expansion touristique d’Aouana) peuvent être aussi le sujet d’une stratégie de marketing à Jijel surtout que ces projets ont une dimension régionale, nationale, voire internationale.
47Mais l’image de marque qui fait la réputation de ce territoire jijilien ne se crée pas uniquement à travers la valorisation de ses particularités locales (patrimoine naturel, paysage, ressources.), elle est liée aussi à la qualité de son espace urbain. Dans cette optique, les différents acteurs de cette ville, sont appelés à redoubler leurs efforts pour assurer un urbanisme de qualité. Ces initiatives nécessiteraient un marketing urbain afin de véhiculer une nouvelle image pour promouvoir la notoriété de cette ville. Les acteurs interrogés recommandent plusieurs types d’outils disponibles qui peuvent être utilisés : TV Kotama, la radio de Jijel, le site officiel de la wilaya (préfecture), des affiches publicitaires, des brochures, des guides touristiques, des films et reportages, des pages sur réseaux sociaux, etc.
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Faiblesse de gouvernance urbaine : Il est cependant clair que, avant de prétendre à une attractivité nationale ou internationale, une mise à niveau de l’ensemble des collectivités locales s’impose. La volonté politique d’une démarche directive top-down ne peut pas, à elle seule, suffire à insuffler une dynamique d’amélioration de l’attractivité. Elle doit rencontrer des offres provenant du terrain, dans une démarche incitative bottom-up qui ne peut naître que de l’estimation des atouts et faiblesses et de la créativité locale dans leur exploitation à des fins de développement.
48L’amélioration de la gouvernance urbaine à travers le renforcement du partenariat public-privé, le développement de la coopération intercommunale et la coordination entre les différents secteurs et acteurs sont un enjeu prioritaire pour Jijel. Sans coordination entre ces différents secteurs, F. Leloup, L. Moyart et B. Pecqueur (2005) appellent la « gouvernance locale », un territoire voué à demeurer un espace passif qui subit les évolutions et les contraintes de son environnement extérieur. [Moyart & Pecqueur 2005]
49Si les caractéristiques territoriales de Jijel jouent un rôle important dans le processus d’attraction des entreprises, des touristes, des compétences et des nouveaux habitants, elles ne sauraient constituer l’essentiel de l’explication des choix de localisation des entreprises et des activités touristiques sur ce territoire. Cette ville méditerranéenne affiche des ambitions d’évolution audacieuses exprimées dans son Plan d’Aménagement Wilayal (PAW) à l’horizon 2030. Mais en dépit des efforts fournis par les pouvoirs publics, l’objectif d’attractivité est encore loin d’être atteint selon les résultats de notre analyse.
50Il s’est avéré que cette ville souffre d’énormes faiblesses liées à l’offre, à la qualité de vie, à l’image, à la gestion urbaine et à la gouvernance. En plus de la volonté des pouvoirs publics et de l’État de faire avancer les projets de cette ville, le changement indispensable des modalités d’action n’a pas encore intégré le processus de sa gestion urbaine. Jijel devrait donc chercher une alternative dans une planification stratégique de son développement. L’adaptation d’instruments de programmation, de planification, d’aménagement, de normalisation et de la mise en place d’outils de montages fonciers, financiers, de monitoring et de marketing, s’avèrent indispensables [Berezowska 2012].
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Figure 9 – Les axes et les composants du projet urbain d’attractivité de Jijel
Source : Auteurs
52Pour répondre aux enjeux cités précédemment, le recours au projet urbain, encore embryonnaire en Algérie, comme action globale, négociée, en boucle itérative, transversale, et prospective [Ingallina 2001], semble nécessaire pour remplacer la démarche classique souvent volontariste, centralisée et très peu participative. La ville de Jijel a donc besoin d’un projet à deux facettes complémentaires : un projet sur les formes urbaines et un projet touchant une stratégie socio-économique plus générale. C’est pourquoi le projet urbain et l’attractivité entretiennent un rapport aussi fort : le premier constitue un cadre pour l’élaboration d’une stratégie et peut offrir, en même temps, une meilleure visibilité et lisibilité de cette ville dans sa dimension globale. Cette démarche a l’avantage d’être évolutive, souple, réactive, partagée, non figée, non finie, et en mesure de s’adapter aux évolutions et aux incertitudes de ce projet urbain qui ne peut être établi que :
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À partir des spécificités, des opportunités, des atouts qui caractérisent le contexte local ;
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À travers un travail d’élaboration collective impliquant l’ensemble des acteurs de la vie urbaine.
53En définitive, ce projet urbain d’attractivité (Fig. 9) a besoin d’un soubassement juridique, règlementaire et opérationnel solide et suffisamment flexible et préparé d’avance.