1Plusieurs crues ont affecté gravement le Nordeste brésilien ces dernières années (ex : Pernambuco, Alagoas, janvier 2010). Celle du Rio Grangeiro, qui a provoqué d’importants dommages dans le centre‑ville de Crato (Ceará), le 28 janvier 2011, est un exemple de ces événements brutaux qui touchent les biens, les infrastructures et les personnes [Magalhães & Peulvast 2013]. Malgré la répétition récente de tels événements, ici et dans d’autres régions du Brésil (État de Rio de Janeiro, janvier 2010 et 2011 : [Coelho Netto et al. 2013]), il n’existe guère de « culture » [Glastron 2003] locale des risques, ni d’expression de cette problématique dans l’aménagement et la planification urbaine [Magalhães et al. 2010]. Dans la littérature scientifique, il n’existait jusqu’à récemment que des travaux ponctuels sur des crues et des mouvements de terrain de petite taille affectant les vallées et les interfluves qui forment le site urbain [Ribeiro & Guerra 2003, Carvalho & Ribeiro 2007].
2La question des risques naturels n’apparaît guère dans le Plan Directeur Municipal de Crato. Cependant, après bien d’autres crues importantes (environ une chaque année sur la période 2002‑2011), la crue du 28 janvier 2011 est venue rappeler qu’une partie des bas quartiers de la cité est inondable, là où les deux cours d’eau qui la traversent sont contenus dans d’étroits chenaux ou buses de béton construits dans les années 1990‑2000. L’ampleur des dégâts, en ville comme le long du « canal », associée à l’impact médiatique, psychologique, politique et financier, a entraîné un effort inédit d’enregistrement et de documentation, justifiant le choix de cette crue comme objet d’étude [Magalhães & Peulvast 2013].
3Largement médiatisé, cet événement pourrait avoir favorisé une prise de conscience des risques encourus, auprès de la population comme des acteurs locaux. Le présent travail a pour but d’évaluer cette prise de conscience, à travers la perception des phénomènes dangereux, et d’apprécier sa traduction dans les orientations récentes ou prévues de la gestion des aléas et des risques en relation avec l’aménagement urbain. Un bref rappel de la situation géographique de la ville et des inondations les plus récentes expose le contexte de ce travail qui s’appuie en particulier sur la réalisation, deux ans après la crue mais en pleine phase de réfection des ouvrages hydrauliques, d’une enquête auprès d’un échantillon de la population urbaine. L’analyse de ses résultats éclaire une partie du contexte dans lequel la question des risques naturels est actuellement traitée ou devrait l’être aux différents niveaux administratifs et politiques.
4Au sud de l’État du Ceará, dans la région du Cariri, le haut plateau appelé Chapada do Araripe forme un îlot humide contrastant avec la sécheresse de la dépression environnante (Fig. 1). Avec des altitudes de 900 à 1002 m, sa partie orientale domine par un haut escarpement la dépression périphérique du Cariri. Exposé aux alizés et à un renforcement orographique des précipitations, l’escarpement porte des forêts sempervirentes et semi-décidues typiques d’un climat tropical subhumide. Une haute corniche gréseuse dominant des glacis disséqués dessine deux vastes cirques d’érosion au-dessus de deux des principales villes de la région, Crato et Barbalha [Peulvast et al. 2011].
Figure 1 – Carte de localisation de la ville de Crato, au pied de la Chapada do Araripe
Modifié d’après [Peulvast et al. 2011].
5Proche de l’escarpement (3‑4 km), la ville‑centre de Crato (83 000 habitants sur les 120 000 de la commune) abrite une population en forte croissance sur le piémont NE de la Chapada. Fondée au xviiie siècle sur les rives du Rio Grangeiro, elle s’étend de façon plus ou moins désordonnée vers l’amont, principalement le long du torrent principal et sur les interfluves découpés par ses affluents et ses voisins dans un large glacis de piémont. Le Rio Grangeiro est l’un des cours d’eau subparallèles orientés vers le NE qui dissèquent le piémont de la Chapada do Araripe. D’une superficie de 20,96 km2, son bassin versant atteint 10,3 km de longueur à vol d’oiseau, jusqu’au confluent avec le Rio da Batateira. À l’aval de fonds de vallon en berceau ouverts au pied de l’escarpement, la vallée du Rio Grangeiro se resserre dans la partie moyenne, la plus encaissée (quartiers de Lameiro, Sossego et Pimenta). Le chenal principal, encadré par d’étroites basses terrasses constituées d’alluvions très hétérométriques et riches en gros blocs faiblement émoussés (terrasses de coulées de débris ou de laves torrentielles), s’élargit à l’aval du centre-ville de Crato.
6La ville a peu à peu gagné les interfluves et, plus récemment, les contreforts de l’escarpement. Depuis les années 1970, avec l’accroissement de la spéculation immobilière, d’anciens secteurs ruraux se sont urbanisés de façon plus ou moins organisée. Il existe encore, principalement dans les vallons de la partie SO du bassin-versant (Lameiro‑Belmonte) de larges secteurs ruraux occupés par une végétation secondaire, entre de petites exploitations agricoles ; mais l’installation de clubs récréatifs, un peu en contrebas des sources, y a été suivie par la construction de maisons de villégiature ou de propriétés de luxe et, plus récemment, par l’implantation de domaines résidentiels fermés (« condomínios fechados »).
7Plusieurs de ces quartiers sont exposés aux risques liés à des mouvements de masse rares mais potentiellement dangereux, qui peuvent affecter l’escarpement et son piémont [Peulvast et al. 2011]. L’âge et la fréquence de ces mouvements sont encore inconnus mais ils figurent parmi les aléas naturels à prendre en compte. Ce sont cependant les risques liés aux crues et aux inondations, en particulier celles du Rio Grangeiro, qui retiennent plus particulièrement l’attention car celles-ci atteignent le centre-ville.
8Provoquant de graves dégâts dans la ville, les précipitations et l’inondation qui ont atteint la commune de Crato le 28 janvier 2011 ont amené le maire à demander au Gouverneur de l’État du Ceará que soit décrété l’état d’urgence. Ce furent 162 mm qui tombèrent au petit matin, pratiquement sans interruption pendant 6 h. Cet épisode pluvieux [Magalhães & Peulvast 2013] a provoqué une brève mais très grosse crue éclair [Bravard & Petit 1997] du Rio Grangeiro et de ses affluents, la destruction partielle du « canal » (chenal artificialisé) qui traverse la ville, son débordement, et l’inondation d’une partie du centre située au même niveau ou en contrebas de ses marges. Les dégâts matériels ont été importants et de nombreuses familles se sont retrouvées sans abri. Aucune victime ne fut à déplorer, sans doute grâce à l’horaire très matinal de l’événement (entre 1 h et 7 h du matin) qui explique que les rues étaient désertes.
Figure 2 – Carte du centre-ville de Crato et des zones affectées par la crue du 28 janvier 2011
Légende : 1. Cours d’eau ; 2. Confluence aménagée ; 3. Section de cours d’eau busée ; 4. Aires construites, avec voirie en blanc ; 5. Canal ; 6. Rétrécissement du canal ; 7. Segment de canal endommagé ou détruit par la crue ; 8. Erosion en berge naturelle ; 9. Pont ; 10. Pont dégradé ou détruit. 11. Zone inondée. P : Prefeitura Municipal (mairie). CB : Corpo de Bombeiros (pompiers). H : Hôpital São Francisco de Assis. CO : Colegio Objetivo. V : Voçoroca do Seminário. NSF : Eglise Nossa Senhora de Fátima. PS : Praça da Sé. S : Shopping Residence.
D’après [Magalhães & Peulvast 2013]
9Le bilan humain s’élève à 498 personnes provisoirement évacuées, 305 sans-abri et 6 hospitalisées. Les dommages matériels ont affecté 166 habitations (dont 75 détruites), 10 édifices publics, 1 local associatif et 256 locaux commerciaux et artisanaux ; 6 véhicules ont été détruits. Parmi les infrastructures civiles, les avenues qui longent le canal du Rio Granjeiro ont été emportées sur une longueur de 500 m ainsi que les trottoirs, les systèmes d’adduction d’eau et d’énergie attenants. S’y ajoutent la dégradation ou la destruction partielle de 2 ponts de béton reliant les deux rives du chenal, ainsi que de 2 passerelles métalliques, de plusieurs transformateurs, et les pompes à essence d’une station-service à l’aval de la mairie. Le montant des dommages est évalué par la mairie à 3 153 000 R$ (~ 1,4 M euros : résidences, commerces, marchandises) et 55 529 000 R$ (~ 22 M euros : infrastructures) [Prefeitura de Crato 2011].
10Plusieurs tronçons de la partie amont du canal, déjà dégradés, ont été détruits ; les débris ont contribué à obstruer le cours et à augmenter le débordement. Les secteurs les plus affectés par l’inondation ont été les quartiers de Lameiro, Pimenta, Seminário et du Centre, les plus proches du « canal » (Fig. 2). Les rues du centre ont été atteintes car ce secteur est le moins élevé par rapport au talweg. Il correspond à l’ancienne plaine d’inondation, encadrée par les basses terrasses. C’est aussi le secteur où les rues sont les plus étroites, augmentant la vitesse d’écoulement de l’eau. Les enjeux y sont les plus importants, compte tenu de la concentration de bâtiments publics – y compris la mairie – et d’établissements privés ou publics de commerce, d’artisanat et d’enseignement, outre les habitations.
11Alors que les facteurs naturels prédisposent déjà le Rio Grangeiro et ses affluents à des comportements dangereux, le resserrement du torrent dans un chenal étroit (2 à 3 m au fond) a aggravé la situation [Magalhães & Peulvast 2013]. Le contraste brutal entre les fortes pentes longitudinales des talwegs à l’amont (4,6 %) et les pentes plus faibles dans le site urbain (1,9 %) y favorise une tendance au ralentissement et à l’étalement latéral. C’est pourtant à cet endroit que le cours d’eau se trouve confiné dans un chenal de béton à profil trapézoïdal construit à partir de 1957 (premier tronçon : Seminário‑mairie). Ce chenal trop étroit et mal entretenu a contribué au phénomène d’inondation, augmentant la montée des eaux et le débordement.
12Particulièrement destructeur, cet événement n’est pourtant pas exceptionnel. La compilation des données pluviométriques obtenues de la FUNCEME (Fundação Cearense de Meteorologia), des autorités locales et des journaux sur la période 2000‑2011 fait apparaître la répétition quasi-annuelle de crues-éclair et d’inondations, au rythme moyen d’un événement par an, toujours pendant la saison des pluies (janvier‑avril) [Magalhães & Peulvast 2013]. Celle de 2011 aura coïncidé avec une aggravation de l’état du "canal", sans doute l’autre grand responsable de l’inondation. D’ailleurs, une nouvelle crue accompagnée d’une inondation à peine moins importante est survenue l’année suivante, le 5 mars 2012, détruisant les réparations engagées en 2011 ainsi que de nouveaux segments du « canal ».
13La connaissance des aléas concernant la ville de Crato et ses environs a commencé à s’étendre récemment avec l’identification de grands mouvements de masse ayant affecté l’escarpement (glissements) et les fonds de vallées (coulées de débris), probablement sur des temps de récurrence assez longs pour que ces événements soient restés ignorés [Peulvast et al. 2011]. En revanche, les crues et, en particulier, les crues-éclair, restent mal étudiées et gérées, en dépit des nombreuses annonces faites après chaque inondation. Le Rio Grangeiro n’a jusqu’à présent fait l’objet d’aucune mesure hydrologique. La cartographie des zones inondées et des dégâts commence à se mettre en place [Magalhães & Peulvast 2013] (Fig. 2), mais il manque encore une cartographie précise des zones inondables en fonction des hauteurs de crues prévisibles sur différents temps de récurrence, lesquelles dépendent aussi de l’état des ouvrages hydrauliques, de l’avancée de l’urbanisation et des modifications rapides du milieu (imperméabilisation des sols, etc.).
14L’autre domaine encore non étudié est celui de la perception des risques par la population concernée et de la façon dont ils sont pris en compte dans les pratiques et politiques urbaines. Une des méthodes utilisées pour évaluer la perception des risques est celle de l’enquête menée auprès d’un échantillon aussi représentatif que possible de la population concernée [Goeldner-Gianella & Humain-Lamoure 2010, Lacambre 2001, Lacambre et al. 2003]. S’agissant d’une ville de plus de 83 000 habitants dont seuls certains quartiers sont affectés par les inondations et autres phénomènes dangereux, il est apparu pertinent de limiter cette enquête à ces quartiers et à leurs environs immédiats, d’autant plus que la technique utilisée (démarchage des personnes à domicile, avec l’aide de groupes d’étudiants en géographie de l’Université Régionale du Cariri – URCA), le temps disponible (quelques jours) et la relative longueur du questionnaire (25 questions, dont 7 ouvertes) ne permettaient pas de multiplier les entretiens au-delà de la centaine. Dans ce contexte, l’inégale disponibilité des personnes rencontrées (de façon aléatoire) contribue aussi à expliquer que l’échantillon réuni (95 réponses exploitables) ne vise pas à une parfaite représentativité, qu’elle soit démographique ou socio-professionnelle. Il s’agit avant tout d’obtenir un « cliché », à un moment donné, de ce que les personnes interrogées ont subi, ressenti, craint et espéré par rapport aux événements passés (inondations et autres phénomènes naturels dangereux), à ceux qui menacent de se reproduire et aux autorités chargées de gérer les risques et les crises.
15Les réponses ont été traitées par calcul de pourcentages et construction de graphiques (histogrammes) pour celles à choix multiples et par relevé de fréquence de mots-clés pour les questions ouvertes.
16C’est en juin 2013, plus de deux ans après l’événement étudié mais en pleine période de travaux de restauration des ouvrages abîmés, que le questionnaire a été soumis, principalement le long du chenal mais aussi à l’écart de celui‑ci et dans des quartiers plus proches de la Chapada et des sources, concernés par d’autres risques (glissements de terrain, chutes de blocs, ravinement, etc.). Les abords du Rio Grangeiro ont été subdivisés en trois secteurs plus ou moins inondés (pont de Lameiro-église Nossa Senhora de Fátima ; église Nossa Senhora de Fátima-mairie ; mairie-extrémité aval du chenal) (Fig. 2).
17Réunies en un formulaire de 6 pages, les questions ont porté sur la connaissance des catastrophes naturelles dans la région et plus particulièrement des crues et inondations, dont celle survenue à Crato le 28 janvier 2011. Des questions plus ciblées ont concerné les situations personnelles par rapport à l’inondation, les préjudices subis, leur coût, l’assurance éventuelle des biens, les mesures et aides financières dont ont bénéficié les personnes sinistrées. Il s’est agi aussi de savoir ce que les habitants connaissaient des problèmes survenus après la crue, des quartiers les plus atteints, de la réalisation d’ouvrages de prévention des catastrophes, lesquels et par qui, des secours et de leur organisation, de ce qu’est un secteur à risques, de l’existence d’informations à ce sujet, et de quelle provenance. Il leur a été également demandé s’ils avaient eu connaissance de documents municipaux traitant des risques, s’ils étaient informés sur le Plan Directeur Municipal, document réglementaire qui définit les orientations de l’urbanisme dans la commune, comment ils voyaient le développement urbain par rapport au milieu naturel, et ce qu’ils pensaient des mesures à prendre pour améliorer la situation. Les autres questions ont porté sur les données personnelles : sexe, âge, lieu de naissance, temps de résidence dans la ville, présence de personnes plus vulnérables dans le domicile, profession, niveau de revenu familial.
18Une brève présentation du profil de ces personnes a alimenté la réflexion sur d’éventuelles corrélations avec leur perception du milieu naturel et de la question des aléas et des risques dans la ville. Sur les 95 personnes interrogées, 37 (38,9 %) sont des hommes et 58 (61,1 %) des femmes.
19Parmi les personnes interrogées, la tranche d’âge prédominante est celle de 45 à 55 ans (25,3 %) (Fig. 3). Celles de 65 ans et plus ne représentent que 5,3 %. En ce qui concerne le lieu de naissance, 56,8 % des personnes sont originaires de Crato et, à ce titre, peuvent être les mieux à même de connaître la région et ses milieux naturels, sinon de garder la mémoire des événements catastrophiques survenus dans la ville. Les autres sont essentiellement originaires du reste du Ceará (32,6 %) et des États voisins (Pernambuco : 6,3 % ; Paraíba : 1,0 % ; Maranhão : 1,0 %).
20Du point de vue socio‑économique et professionnel, les réponses ont été regroupées dans les catégories suivantes : industrie et entrepreneurs (4,1 %) ; commerce (22,1 %) ; services et administration publique (39,9 %) ; agriculture (3,1 %) ; retraités (11,5 %) ; sans emploi (1,0 %) ; maîtresses de maison (3,1 %) ; étudiants (11,5 %). 3,1 % des personnes sollicitées n’ont pas répondu.
Figure 3 – Histogramme des tranches d’âge des personnes interrogées (n = 95)
21La majorité des personnes interrogées (63 %) déclare avoir été atteinte par une ou des catastrophes naturelles dans la ville ou la région. Parmi les phénomènes proposés dans le questionnaire, elles citent majoritairement (59 % du total, soit 77 % de celles qui ont été atteintes) les crues et inondations. Les glissements de terrain auraient atteint 8,4 % du total (13 % des sinistrés), l’érosion des sols (ravinement) 4,2 % et les chutes de blocs 2,1 % (respectivement 6,5 et 3,3 % des sinistrés). Certaines de ces personnes déclarent avoir été touchées par plus d’un de ces événements depuis 2004 (Fig. 4).
Figure 4 – Histogramme de fréquence des réponses sur les types d’événements naturels subis depuis 2004
22Interrogées sur les préjudices dus aux crues du Rio Grangeiro, les personnes interrogées évoquent principalement des dommages causés aux immeubles (59 %), sous forme de fissures, chutes de murs, peintures abîmées, trottoirs dégradés, etc., et des pertes de meubles, appareils électroménagers, ordinateurs, vêtements, livres, objets personnels (30 %). La plupart, pour l’essentiel non assurés, évaluent les préjudices subis à hauteur de 1000 à 3000 reais (400‑1200 euros). Bien qu’une grande partie de ces personnes - principalement celles qui habitent près du chenal - souhaitent souscrire une assurance pour garantir leurs biens, la plupart déclarent ne pas en avoir les moyens financiers.
23Sur les 58 personnes ayant déclaré avoir déjà été atteintes par des inondations, seulement 3 ont confirmé avoir reçu une aide financière publique ou caritative de deux à trois mois, parmi lesquelles 2 ont trouvé cette aide suffisante. Dans les faits, la Mairie indique avoir hébergé les familles sinistrées dans des abris d’urgence (écoles, résidence universitaire, locaux associatifs, etc.) et les avoir enregistrées pour leur attribuer une allocation de logement (« aluguel social ») de 150 reais (~60 euros) mensuels pendant 6 mois renouvelables. Pour certains, ce montant fut d’autant plus insuffisant que de nombreux propriétaires profitèrent des circonstances pour augmenter les loyers.
24Selon une grande majorité (94 %) des personnes interrogées, certains quartiers ont été plus atteints que d’autres, en particulier ceux qui jouxtent le Rio Grangeiro. D’après 88 % des réponses obtenues, les lieux les plus atteints furent la zone commerciale (galerie commerçante, boutiques, dépôts, etc.). Viennent ensuite les zones résidentielles (maisons, appartements, etc. : 69 %), la voirie urbaine (62 %), les ponts (47 %), les édifices publics et privés (mairie, banques, etc. : 41 %), les écoles (40 %), les routes (21 %), les aires de loisirs (places, etc. : 16 %), les terrains inoccupés (7,5 %), tandis qu’aucune réponse n’a mentionné d’installation industrielle. Il est vrai que les principales industries de la ville (usine de chaussures GRENDENE, briqueteries) sont localisées sur les interfluves.
25Le nombre d’habitants sinistrés est estimé à 200 ou plus dans 37 % des réponses, entre 100 et 200 dans 27 %, 50 à 100 dans 14 %, 5 à 50 dans 10 %, aucun dans 2 %. Cette dispersion, jointe à l’absence de réponse dans 9 % des cas, révèle une certaine méconnaissance des conséquences humaines de la crue. Parmi les mesures prises après la crue, sont cités l’évacuation de la population des secteurs à risque (48 %), les aides financières (« aluguel social », etc. ; 41 %), la distribution d’aliments, de vêtements, de médicaments (37 %), une assistance médicale (10 %), le relogement dans des lieux plus sûrs (8 %). L’absence d’aide est évoquée dans 8 % des réponses.
26Parmi les principaux problèmes se posant après l’inondation sont évoqués les dommages matériels (78 %), les pertes de biens personnels (70 %), le nettoyage des rues (56 %), le nettoyage des lieux d’habitation (47 %), les problèmes de santé (47 %), le manque d’aide financière (38 %), le manque d’information (24 %), les jours chômés et sans école (22 %), l’évacuation et le relogement des sinistrés (14 %) et l’isolement (10 %).
27Selon la grande majorité des réponses (95 %), la population de Crato n’est pas bien protégée des catastrophes naturelles. 61 % des personnes interrogées estiment d’ailleurs être menacées par d’autres risques naturels, dont les glissements de terrain, les sécheresses, la foudre, les ravinements, les chutes de blocs, l’érosion en général, auxquels s’ajoutent les risques d’incendie de forêt. À 78 %, elles estiment savoir ce qu’est une zone à risques et mentionnent comme telle des lieux habités et dangereux du fait de la proximité de cours d’eau (zones inondables), d’escarpements, de secteurs déboisés, d’aires soumises à de fortes pluies et propices à des glissements de terrain ou à l’érosion des sols.
28Sur l’appréhension des dangers, 70 % des personnes interrogées pensent qu’il est dangereux d’habiter près du Rio Grangeiro, du « canal » ou de la Chapada do Araripe, tandis que 14 % estiment que ce n’est que moyennement dangereux, et 11 % pas du tout. Les dangers les plus cités sont ceux liés aux crues, aux glissements de terrain, aux chutes de blocs, aux attaques d’animaux sauvages venus de la Chapada, au mauvais entretien du canal ou au ravinement lors des pluies intenses. Par ailleurs, à 70 %, les habitants interrogés affirment qu’il n’existe pas d’association dans leur quartier, et seulement 23 % disent savoir que le thème des risques naturels a été discuté lors de réunions publiques ou associatives.
29Sur les causes des inondations, on trouve une majorité de réponses multiples mentionnant le mauvais état du chenal du Rio Grangeiro et les autres causes des dommages subis. Parmi elles, la situation du centre-ville dans un secteur plat et peu surélevé par rapport à la partie la moins profonde du chenal ; la destruction de la végétation des rives et le déboisement sur l’escarpement de la Chapada ; l’accumulation de détritus dans le chenal ; l’absence de contrôles et d’actions d’information par les autorités sur la propreté en ville et l’occupation des zones à risques ; le manque de projets et de politiques environnementaux dans la ville ; l’absence de prévention des inondations et de planification urbaine ; le manque d’associations de quartiers traitant de ces problèmes. L’intensité des pluies est aussi évoquée mais les réponses montrent que les causes des inondations sont avant tout perçues comme anthropiques.
30Les types de solutions les plus cités sont : en premier lieu, la construction d’ouvrages de contention des eaux à l’amont de la zone urbaine ; l’amélioration de la structure du « canal » ou sa reconstruction, après étude détaillée des lieux ; l’assainissement urbain et le nettoyage régulier du chenal afin d’éviter les embâcles lors des crues ; le détournement des cours d’eau ou encore la construction de barrages ou retenues et la construction d’autres canaux (sans autres précisions). Ensuite, viennent la reforestation et la restauration de la ripisylve ; la réglementation des usages de l’eau ; l’éducation et l’information de la population afin d’éviter les dépôts d’ordures dans le chenal ; l’élargissement et l’approfondissement (voire la couverture) dudit chenal ; l’élaboration de projets et de politiques sérieuses à tous les niveaux ; la suppression des avenues de part et d’autre du chenal, afin de permettre son élargissement ; un contrôle strict de l’occupation des aires à risques, assorti de sanctions ; une planification urbaine définissant les aires constructibles ou non ; une information plus ample sur ce thème ; une bonne administration municipale ; la protection des sols ; l’amélioration du drainage en ville ; la création d’associations environnementales dans chaque quartier.
31À 66 %, le groupe interrogé dit ne pas avoir reçu d’informations sur les risques naturels dans la ville. Pour ceux qui ont répondu affirmativement (32 %), l’information provient de bulletins et dépliants (13 %), des journaux (63 %), de la télévision (80 %), de la radio (63 %), des médias informatiques (SMS, internet, Facebook, Tweeter, etc. : 17 %) ; de réunions publiques organisées par la mairie, des scientifiques, des représentants d’organismes environnementaux, des associations de quartier, des syndicats, etc. (10 %). Pour 20 %, l’information a circulé sur les lieux de travail, et pour 30 % dans l’entourage personnel (famille, amis, voisins).
32À 85 %, les habitants interrogés ignorent s’il existe une législation concernant la protection des biens et des personnes dans les zones à risques. Ce pourcentage varie peu quels que soient l’âge, le domicile (près ou loin du Rio Grangeiro) ou la durée de résidence dans la ville. Il atteint 96 % chez les moins de 25 ans, presque autant chez les 25‑35 ans et 100 % chez les 55‑65 ans. Seules les personnes de 45 à 55 ans paraissent un peu mieux informées (21 %) alors que 75 % de celles de 35 à 45 ans ne savent pas. La personne la plus âgée (84 ans) fut la seule à déclarer connaître l’existence de telles lois.
33A la question sur la connaissance de documents municipaux faisant référence aux risques naturels, 97 % de réponses négatives ont été obtenues. Seulement deux personnes ont évoqué un arrêté concernant la protection de la nature, sans autres précisions. Le Plan Directeur de la ville n’a été cité que par 3 personnes, dont deux capables d’en définir les objectifs en matière d’occupation des sols et d’organisation de l’espace urbain.
34Les réponses concernant les acteurs publics ou privés qui sont intervenus après l’inondation de janvier 2011 ont été la mairie (secrétariat à l’environnement, planification urbaine), à 65 % ; la population (volontaires), à 60 %, les pompiers (50 %), le gouvernement de l’État (34 %), la Défense civile (21 %), les dirigeants de tous ordres (commerce, construction civile, politique, église, écoles, universités, etc.) : 16 % ; les ONG (au sens d’associations dépassant l’échelle du quartier) : 5 %.
35Concernant la gestion des risques dans la ville, 58 % des personnes interrogées disent n’avoir aucune connaissance de travaux réalisés pour éviter les catastrophes naturelles. Pour ceux qui se disent informés (42 %), ces actions devraient être réalisées par le gouvernement de l’État (75 %), la mairie (55 %), les services de l’Environnement (7 %), des associations de quartiers (7 %) ou des entités particulières (5 %).
36Parmi les types de travaux cités en priorité par la population interrogée, apparaissent la reconstruction du « canal » (100 %) et la réfection des ponts (58 %), suivis par l’enlèvement des détritus et des blocs du lit de la rivière (33 %). Mais sont aussi évoqués des travaux de prévention et de protection individuels sur les biens privés (reconstruction ou surélévation des murs, réfection des trottoirs – lesquels sont de la responsabilité des riverains ‑ etc.) : 13 %.
37Malgré une proportion assez faible de réponses négatives (« ne sait pas ») ou inexploitables, le questionnaire met bien en évidence le fait que la population des quartiers enquêtés se sent concernée par la question des risques naturels et en particulier des crues et inondations. Même si elle n’a pas clairement identifié tous ces risques (en particulier ceux, d’ordre morphodynamique, liés à la morphologie de l’escarpement de la Chapada, pourtant proche) [Peulvast et al. 2011], elle est attentive à la gestion des phénomènes les plus fréquents, les inondations surtout, telle qu’elle a été observée jusqu’à présent et telle qu’elle paraît souhaitable.
38Il existe un cadre juridique et administratif spécifique, le plus souvent d’institution récente. La structure fédérale du pays explique une relative complexité.
39Au niveau fédéral, deux lois sont particulièrement importantes mais trop récentes pour avoir été prises en compte. La loi 12 340 du 1er décembre 2010 traite des transferts de ressources aux services des États, du District Fédéral et des communes (« Municípios ») pour les actions de réponse aux désastres (terme officiel) et de récupération des zones touchées, et du Fonds Spécial pour les Calamités Publiques. La loi 12 608 du 10 avril 2012 institue une « Politique nationale de protection et de Défense civile » (PNPDEC), un « Système national de Protection et Défense civile » (SINPDEC) et un « Conseil national de Protection et Défense civile » (CONPDEC). Elle préconise la création de systèmes d’information et de surveillance (« monitoramento ») des catastrophes. Cependant, les décrets d’application ne sont pas encore sortis.
40Le 8 août 2013, la Présidente Dilma Roussef a lancé un Plan National de Gestion et de Réponse aux Désastres (PNGRD) et l’installation d’un Centre national de Gestion des Risques et des Désastres (CENAD). Les actions y sont groupées en quatre axes thématiques : Prévention, Cartographie, Surveillance, Alerte et réponse aux désastres naturels. La mise en place est en cours.
41Au niveau de l’État du Ceará, on note surtout une organisation de la gestion de crises. C’est de la Coordination de la Défense Civile (CEDEC), instituée en 2005, que dépendent les 25 unités opérationnelles de pompiers réparties sur 20 régions administratives. Elle est en outre responsable de la divulgation d’alertes météorologiques, de l’organisation d’actions sociales auprès des communautés établies dans des zones à risques, de l’acquisition et de la collecte de vivres et vêtements pour l’assistance humanitaire dans les zones touchées, de l’homologation des arrêtés de situation d’urgence, de la surveillance sismique et des réserves hydriques, etc. Pour les alertes météorologiques, la FUNCEME (Fundação Cearense de Meteorologia e Recursos Hídricos) en est encore à l’élaboration d’un projet de prévision de crues à court terme sur la base de modèles climato-hydrologiques dans les régions semi-arides.
42Au niveau municipal enfin, le Plan Directeur Municipal et le Plan de Requalification Urbaine (PRU) de Crato ne font aucune mention de la question des risques. Il en est de même pour le livret intitulé « Uso do espaço urbano » publié en 2012 par la mairie. Parallèlement, les universités présentes dans la région du Cariri (Universidade Federal do Ceará, URCA) commencent à prendre en main le problème, comme l’illustre l’atelier de mai 2012 sur le contrôle des crues du Rio Granjeiro.
43Les réponses analysées font ressortir une profonde méconnaissance de l’existence de ces lois ou règlements. Malgré la mise en place rapide de mesures d’assistance d’urgence (relogement, indemnités de logement, etc.), les modalités d’indemnisation ne sont guère mieux connues, en particulier leurs sources. Pourtant, le jour suivant la crue du 28 janvier 2011, la mairie, la Défense Civile et le Corps de Pompiers ont transféré les familles touchées vers des abris d’urgence, des centres de soins, une résidence universitaire et des écoles. Différentes associations ont participé à une campagne de collecte de dons de nourriture, de vêtements, de couvertures, de médicaments, etc. Le Service d’Assistance sociale est intervenu avec des psychologues et des infirmiers auprès des familles sans abri, fournissant un accompagnement psychologique ainsi que des vaccins aux personnes qui avaient été en contact avec les eaux polluées. Les familles sans abri ont été recensées, dans le but de leur attribuer une aide financière pour louer provisoirement un logement dans une zone plus sûre de la ville.
44Le manque d’information explique cette méconnaissance mais le constat, à tous les niveaux, de pratiques consistant à ne pas respecter les dispositifs existants en est aussi responsable.
45Sur la gestion actuelle et passée des risques, la plupart du temps réduite à une gestion de crise [Léone et al. 2011] et à la réfection improvisée de certains ouvrages, les faits donnent raison aux jugements souvent sévères [Magalhães & Peulvast 2013]. Il existe pourtant une forte attente, en particulier au lendemain de chaque phénomène catastrophique ou dommageable, en matière d’aménagements susceptibles de réduire l’impact de ces phénomènes à défaut d’en réduire l’intensité ou la fréquence sur le plus long terme. Ainsi, le 8 mars 2012, après une nouvelle crue, s’est tenue une manifestation des riverains du « Canal » du Rio Granjeiro (rebaptisé par un journaliste « Canal do Medo » : Canal de la Peur) demandant aux autorités des mesures immédiates remédiant aux graves problèmes de cet ouvrage.
46Une majorité de réponses aux questions portant sur les solutions techniques ont donc mentionné le Rio Grangeiro et plus particulièrement son tronçon canalisé, perçu comme un voisin d’autant plus dangereux que sa présence a pu donner à la population l’illusion qu’elle était bien protégée. De plus, depuis le début des années 2000, chaque crue a été suivie de promesses des autorités (commune, État) de régler « définitivement » le problème du « canal » et de ses débordements. Une partie des propos recueillis est ainsi résumée par un habitant : « on devrait détruire le canal du Rio Grangeiro et tous les édifices construits autour pour que la rivière existe à nouveau et retrouve son chemin » (traduction). Une solution radicale, théoriquement efficace, mais pratiquement inenvisageable compte tenu du contexte urbain et socio-politique...
47Les rapports techniques établis après la crue du 28 janvier 2011 ne vont pas jusque-là mais les défauts de conception sont reconnus, de même que l’absence d’entretien ou la hâte avec laquelle sont engagés des travaux de réfection, sans aucune étude préalable [Oliveira 2011, Silva, 2011a,b]. On reste frappé par cette improvisation qui semble surtout répondre au souci de rassurer immédiatement la population riveraine. Ainsi, dans les mois qui ont suivi la crue du 28 janvier 2011, les fonds débloqués par l’État (4 millions de reais, soit ~ 1,6 M d’euros) ont servi à des remblaiements partiels de certains des segments de parois détruits au moyen de gabions reposant directement sur le fond alluvial mis à nu, accompagnés de variations supplémentaires de profil transversal et de section. Inévitablement, ces réparations de fortune ont été mises à mal par la crue du 5 mars 2012 et ont même pu en aggraver les effets sur les berges déjà affouillées et privées de protection. Les travaux engagés en 2013 dans un ouvrage de section variable relèvent de la même logique (Fig. 5) et n’annoncent aucune atténuation du danger.
Figure 5 – Le « canal » du Rio Grangeiro en reconstruction à l’aval du Collège Objetivo (quartier Centro)
Vu vers l’amont
Photo J.-P. Peulvast
48Face à ces faits visibles par tous, les facteurs plus généraux tels que l’absence de gestion du bassin-versant à l’amont, l’absence de contrôle du respect des aires de protection environnementale et l’absence de réglementation des implantations dans les zones de risque (lesquelles ne sont d’ailleurs ni définies ni cartographiées dans aucun document), sont encore plus préoccupants.
49Les rapports consultés [Sousa 2006, Oliveira 2011, Silva 2011a,b] soulignent l’absence de gestion coordonnée du bassin-versant mais aucune solution cohérente n’est proposée, le « Plano de Requalificação Urbana » (PRU) de Crato établi en 2005 et révisé en 2009 ne mentionnant guère la question des risques. Ainsi, l’urbanisation a continué et s’est même accélérée pendant toute la décennie 2000, dans les vallées comme sur les interfluves. Il n’existe actuellement pas de données sur le taux de couverture et d’imperméabilisation des sols, données d’ailleurs mouvantes et difficiles à acquérir dans un contexte d’urbanisation rapide et de spéculation foncière. Les lotissements en construction ou récemment construits ne comportent pas de poches de rétention des eaux, ce qui montre là aussi l’absence de gestion des phénomènes de ruissellement.
50Seuls sont envisagés des ouvrages plus importants, sur les axes où les écoulements se sont déjà concentrés. C’est dans les années 2000 qu’est apparue l’idée de construire ou rétablir six retenues dans les parties amont du bassin-versant. Le PRU en donne même la localisation approximative, sur le Rio Grangeiro et trois de ses affluents, dont le Riacho das Piabas et le Riacho da Vala, entre 1 et 2 km en amont du centre-ville, mais il n’a pas été possible d’accéder aux documents d’ingénierie cités, faute de réponse aux demandes, ni aux éventuels chiffrages ou aux évaluations de faisabilité en termes fonciers. À défaut d’une planification prenant réellement en compte une gestion intégrée des risques, basée sur les études scientifiques qui commencent à s’entreprendre, les solutions purement techniques, souvent inadéquates, risquent de prendre encore longtemps le pas sur les autres.
51Après quelques crues dévastatrices récemment survenues dans le Nordeste brésilien, la thématique des aléas et des risques naturels s’impose au géographe autant qu’à l’ingénieur. Elle reste pourtant peu identifiable dans les mentalités ou les comportements, chez la population comme parmi les acteurs locaux. Malgré des dispositions législatives récentes au niveau fédéral, elle n’a guère de traduction dans la planification urbaine, si ce n’est sous forme de mesures plus ou moins ponctuelles répondant aux crises. C’est ce qui s’est produit après la crue survenue à Crato le 28 janvier 2011, avec la réfection hâtive du chenal bétonné (« canal ») du Rio Grangeiro et de la voirie riveraine, sans étude ni traitement du problème hydraulique. L’enquête menée dans le cadre de ce travail auprès d’un échantillon de population sélectionné dans les quartiers les plus concernés montre que cet événement largement médiatisé a favorisé, malgré un déficit d’informations précises, une prise de conscience souvent aiguë des risques encourus, chez la population, sinon parmi les acteurs locaux. Appréciée à travers une perception souvent pertinente des phénomènes dangereux, de leurs causes et des solutions possibles, elle n’a encore guère de traduction dans les orientations récentes ou prévues de la gestion des risques en relation avec l’aménagement urbain. Nos résultats, encore préliminaires, montrent l’intérêt de la méthode d’enquête. Utilisée de façon plus systématique, elle pourrait être une des bases de l’élaboration de programmes de prévention et de gestion des risques naturels adaptées au contexte économique et socio-éducatif, et conformes aux attentes de la population comme aux politiques en cours de mise en place au niveau fédéral.
L’auteur remercie les étudiants du cours de Géographie de l’Université Régionale du Cariri (URCA, Crato) qui ont participé à la réalisation de l’enquête sur le terrain. Que soient également remerciés Monique Fort, François Bétard, Frédéric Bertrand et un évaluateur anonyme dont les remarques ont largement contribué à améliorer le manuscrit.