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Chemins de traverse d’Ignacio Martínez de Pisón

Roman de l’absence, roman de l’amour
André-Alain Morello
p. 229-245

Résumés

Chemins de traverse d’Ignacio Martínez de Pisón se présente comme la pseudo autobiographie d’un adolescent, Felipe, qui, à la mort de sa mère, est condamné à vivre avec un père marginal. Le texte est aussi la conversion d’un récit de type picaresque en un roman qui débouche sur la découverte mutuelle d’un père et d’un fils. L’errance des deux personnages, chemin de fuite destiné à compenser la disparition de Cecilia, conduit à une sorte d’assomption de l’amour.

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Mots-clés :

picaresque, chemin, amour, mère, père, fils

Palabras claves:

picaresca, camino, amor, madre, padre, hijo
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Texte intégral

1Né en 1960 à Saragosse, Ignacio Martínez de Pisón a publié quatre recueils de nouvelles et deux romans. Dans La Tendresse du dragon (La Ternura del dragon), livre qui a reçu le prix Casino de Mieres en 1984, l’auteur racontait l’histoire d’un enfant, Miguel, en convalescence chez ses grands-parents, et présentait cette convalescence comme une période transitoire entre l’enfance du rêve et l’état adulte. Dans ce roman, la vie avait déjà toutes les apparences d’un combat avec le dragon. Dans Chemins de traverse (Carreteras secundarias), publié en Espagne en 1996, et en France chez Gallimard dans la traduction de Serge Mestre en 1998, le romancier s’attache à suivre cette fois l’errance d’un père et d’un fils, de ville en ville, dans l’Espagne des dernières années de Franco. Roman du chemin, des épreuves traversées, et au dénouement ouvert, il présente l’histoire d’une solitude à deux. Au cœur des chemins de traverse, se révèle une double absence, celle de la mère, et celle d’un ancrage, d’un point fixe ; mais dans le même temps se dessine aussi la construction d’une sorte de couple, associée à une découverte mutuelle. Le père ne remplace pas la mère, mais l’absence de la mère est, au cœur du dénuement, comme compensée par la découverte de la seule richesse, qui est celle des sentiments. À la disparition de la mère, et du foyer, répond la renaissance de l’amour au cœur de l’errance du père et du fils.

  • 1 Nouvelle du recueil Le vin de Paris.

2Si le vrai sujet du roman de Martínez de Pisón est le couple père-fils, sa structure déambulatoire et ouverte, ainsi que la plupart de ses thèmes, renvoient au lointain modèle picaresque espagnol, ainsi qu’au moderne « road novel », au roman de la route à la façon de Kerouac, et à tout un courant de la littérature moderne qui semble revisiter la structure mythologique des jumeaux pour s’attacher aux couples de marginaux (on peut penser aux textes de Beckett, mais aussi à Des souris et des hommes de Steinbeck, ou encore à La Traversée de Paris de Marcel Aymé1). Le roman a été « librement adapté » au cinéma par Manuel Poirier en 2004.

I. Entre roman picaresque et road-movie

Roman picaresque

  • 2 Voir sa préface aux Romans picaresques espagnols, Gallimard, Bibliothèque de la Pléiade, 1968.
  • 3 Cette question a donné lieu à un programme de littérature comparée pour l’agrégation de lettres mod (...)
  • 4 Jacques Petit : « Permanence et renouveau du picaresque », Positions et oppositions sur le roman co (...)

3Même si l’on considère, avec Maurice Molho2, que le véritable roman picaresque, lié à des conditions sociales et historiques déterminées, a disparu dès le XVIIe siècle, on doit aussi reconnaître qu’on peut trouver des « échos picaresques » dans une partie de la littérature romanesque moderne3. On pourrait multiplier les exemples de ces « traces » picaresques chez des personnages du roman contemporain. Saul Bellow, avec Les Aventures d’Augie March (The adventures of Augie March) publié en 1953, a raconté l’histoire d’une sorte de picaro juif qui, refusant toute recette et toute idéologie, préfère la liberté. Dans La Ville des prodiges (La ciudad de los prodigios) de Mendoza (1986), le personnage d’Onofre Bouliva ressemble d’abord à un picaro moderne, essayant de survivre dans la Barcelone moderne, avant de devenir un homme riche et puissant. Mais le picaresque ne se limite pas à la simple présence d’un personnage ; il implique aussi un type de récit, une structure, un ton. C’est à juste titre que Jacques Petit a pu définir le picaresque par ses « traits extérieurs » : « un ton, un personnage, une structure. Le ton, amusé le plus souvent, peut aussi être grinçant, voire violent ; on le dirait plus justement « dépréciatif », le romancier picaresque décrivant une réalité qu’il condamne. Le personnage est mendiant, gueux, truand...; les circonstances ou – plus rarement – sa volonté expliquent cette situation « en marge ». Une succession, théoriquement indéfinie, d’épisodes, l’absence de dénouement véritable déterminent enfin une structure ouverte, apparemment lâche, qui se traduit fréquemment dans l’image du voyage »4.

  • 5 Chemins de traverse, traduit de l’espagnol par Serge Mestre, Gallimard, 1998, p. 82. C’est à cette (...)
  • 6 Dans le roman picaresque espagnol, on a parfois rapproché la vie d’errance du pícaro avec le pèleri (...)

4Roman de la route, Chemins de traverse est une sorte de version espagnole de Sur la route de Kerouac. À cela près que les chemins suivis par Felipe et son père ne ressemblent guère aux highway américaines. Très nombreux sont les passages du roman où Felipe et son père quittent le lieu qui leur servait de refuge provisoire et se remettent en route. Felipe considère même que seule la route est à eux : « Dans le fond, notre situation n’est pas si désespérée ! [...] On a toujours la route »5. La route est, pour le père, le vecteur du souvenir. Ainsi fait-il cette confidence à Felipe : « J’ai dû prendre cette route, il y a longtemps, avec Cecilia [...] Cecilia devait être enceinte d’environ quatre mois » (p. 88). Par l’association de la mère disparue et de la route, le père relie le destin de Felipe à la route ; Felipe naît de la route, la route est en quelque sorte sa seconde mère. Dans un autre passage, alors qu’il promet à son fils de s’installer désormais dans une grande ville, à Lérida, c’est dans un village que borde une route nationale que le père décide de faire halte. « Tous ces villages ressemblent en général à un décor de western : on quitte la rue principale, qui d’ailleurs est une route, et on s’aperçoit que ça s’arrête là, il n’y a jamais rien derrière la première rangée de maisons » (p. 114). Ce n’est pas un hasard si Felipe évoque le western pour tenter de suggérer l’impression que lui inspire Almacellas : la route est la seule réalité d’un village qui n’est qu’un décor de cinéma. C’est dire que, dans cette errance à laquelle le couple du père et du fils semble condamné, seule la route paraît une réalité tangible, à laquelle se raccrocher, alors que tout le reste n’est qu’illusion, mirage. Mais Felipe souligne aussi ce que cette vie d’errance peut avoir d’inconfortable, de désolant : les voyageurs sont comme des êtres traqués : « on restait de moins en moins longtemps dans les lieux que mon père louait et j’avais l’impression que cela ne pouvait aller qu’en empirant, que notre vie n’était plus un incessant voyage, mais plutôt une interminable fuite » (p. 140). Ainsi, au terme de l’épisode burlesque du vol de la recette du théâtre par Paquita, alors que le père semble ne plus savoir que faire, Felipe demande : « — Et maintenant, que faisons-nous ? — Que faisons-nous ? répéta mon père. Que faisons-nous ? Tu demandes : que faisons-nous, c’est bien ça ? Eh bien on va continuer notre chemin, fiston. On va continuer notre chemin » (p. 178). Cette vie d’errance a pour conséquence la perte des repères, et la disparition du passé, comme englouti dans cette spirale de fuite. Felipe et son père se délestent de leur passé à chaque changement de lieu6 :

J’avais l’impression de n’avoir jamais eu de passé, ou plutôt d’en avoir eu un, mais de vivre comme si je n’en avais pas eu, comme s’il était très loin derrière moi, vraiment très loin [...] On continuait notre chemin, mon père et moi, et les seules choses qui nous suivaient c’était la voiture et notre maigre équipage. Pratiquement aucun autre objet n’avait continué le chemin avec nous. Je ne suis même pas sûr qu’il reste encore aujourd’hui un objet qui nous ait suivis depuis le début [...] Chaque fois que nous changions de maison, de nouvelles choses venaient s’ajouter à nos bagages tandis que d’autres disparaissaient pour toujours [...] Une partie de notre passé se gommait donc à chaque déménagement (p. 179-180).

  • 7 Sur cette question, voir Crystel Pinçonnat, Thomas Serrier, Régis Tettamanzi, Échos picaresques dan (...)

5Dans cet aveu de Felipe, la disparition de la mère s’estompe elle-même, effacée par la perte de tout un passé, par la disparition des objets qui sont associés aux années. Ce sera grâce à son récit que Felipe pourra récupérer une partie de son passé, et, dans une certaine mesure retrouver sa mère. La vie d’errance du père et du fils sera ainsi figée, conservée, par l’écriture. Et c’est encore une des marques du récit picaresque que l’on retrouve dans cette forme de pseudo-autobiographie7. Car le pícaro s’exprime à la première personne ; le roman picaresque se présente comme une confession, qui implique une sorte de dédoublement entre un je acteur et un je narrateur. Chemins de traverse se présente ainsi comme la confession de Felipe associant le récit de quelques années de sa jeunesse et un regard ironique sur les personnages qui l’ont entouré, comme le Journal du voleur, autre exemple possible d’un roman picaresque moderne, est le récit d’une vie de pícaro par Genet, acteur et narrateur.

  • 8 Chemins de traverse, p. 229.
  • 9 Voir la chorale du père Apellaniz qui chantait des chants religieux sur des airs des Beatles (p. 24 (...)

6Dans Chemins de traverse cependant, si Felipe est le narrateur, le pícaro est d’abord le père. Ancien médecin légiste radié à la suite d’un procès, le père a dû changer de vie, et devenir un « pauvre diable »8, condamné à une existence itinérante, « précaire », comme on dirait de nos jours. On retrouve dans la seconde vie du père la marginalité du picaro : le père, dans sa recherche perpétuelle de moyens de survie, devient bel et bien un délinquant, ce qui le conduit en prison. Mais, à aucun moment, il ne devient le narrateur de sa propre histoire ; c’est Felipe qui essaie de le faire parler, de sa femme disparue, de ce qu’il pense de Franco, etc... Si le père ne s’exprime que grâce à son fils, en revanche, sa marginalité influence le comportement de ce fils, déjà privé de mère. Narrateur, Felipe est aussi un bel adolescent asocial, renvoyé de l’école à plusieurs reprises, ce qui donne lieu à des passages réjouissants dans le roman, qui semblent être autant de clins d’œil à l’univers d’Almodóvar, en particulier dans la satire de l’Église9. Il va de soi que cette « marginalité » de Felipe est aussi ce qui le conduit à raconter sa vie, avec toute l’ironie et l’impertinence qui le caractérisent ; tout artiste n’est-il pas, au fond, un être à part, en marge... Quant à la vie d’errance du père, non seulement Felipe est obligé de la partager, mais en plus il connaît lui-même la tentation de la fugue : « l’idée de la fugue vint me hanter, ainsi que les stratégies permettant de ne pas mourir de faim » (p. 154).

  • 10 Didier Souiller, Le roman picaresque, PUF, 1980.

7Lorsqu’il interroge l’intrigue des romans picaresques10, Didier Souiller discerne un certain nombre de traits communs : en particulier, les épreuves qu’affronte le personnage : la pauvreté, la faim, la prison, mais aussi l’amour. Felipe et son père connaissent la pauvreté et la faim ; un repas de Noël « on ne peut plus frugal : de la salade et du touron » (p. 284) en est une belle illustration. Le père connait aussi l’épreuve de la prison, ainsi que celle de l’amour.

  • 11 D. Souiller, p. 59.

8D. Souiller rappelle que « le roman picaresque est fondamentalement misogyne », et que « le pícaro se défie des femmes dont la duplicité est supérieure à la sienne »11. Le père, qui est resté « un veuf inconsolable » (p. 56), s’éprend tout de même d’une chanteuse, Estrella, qui le laisse tomber, avant de subir les effets de l’implacable jalousie de Paquita. Felipe, qui avoue ne rien connaître de la psychologie féminine (p. 203), et qui estime que « l’amour rend les gens stupides » (p. 204), tombe pourtant amoureux de Miranda, originaire d’Austin au Texas, mais il la perd, à cause de la sœur de celle-ci, Amy. Quant au père, il perd définitivement Estrella, à cause de Paquita.

Road-novel

  • 12 Alain Dister, dans La Beat Generation, La révolution hallucinée (Gallimard, collection Découvertes) (...)
  • 13 Il y a aussi cette autre Américaine dans le roman, Patricia Hearst, qui s’était rebellée contre son (...)
  • 14 Chemins de traverse, p. 189, 203.
  • 15 Sur la route, Folio Plus, p. 204.
  • 16 C’est même au deuxième chapitre de la III è partie de Sur la route, que se situe « l’instant crucia (...)

9Roman picaresque moderne, le roman de Martínez de Pisón se présente aussi comme une sorte de road-novel, sur le modèle du road-movie américain, comme une réécriture ironique du grand roman américain de la route, Sur la route, le roman mythique de Kerouac. Le personnage central du roman de Kerouac est Dean Moriarty, et le narrateur, Sal Paradise, en qui on reconnaît facilement l’auteur. Le roman raconte l’amitié des deux hommes, et l’influence, voire la fascination qu’exerce Dean sur Sal. Aux yeux de Sal, Dean représente une sorte de héros voué au culte de la route et de l’automobile, et refusant les normes de la société bourgeoise. On peut même parler d’une mystique de la route dans le roman de Kerouac12. La DS des Chemins de traverse, véritable symbole de la vie errante de Felipe et son père, n’est-elle pas un premier clin d’œil à Kerouac ? Dans le roman de Kerouac, l’auto, vieille Cadillac ou Hudson Commodore, s’est substituée à la maison, comme la DS pour Felipe et son père. Et par dessus le marché, dans Chemins de traverse, il y a aussi une « belle américaine »13: une Chevrolet rouge immatriculée au Texas14, la voiture du père de Miranda, la jeune fille dont Felipe est amoureux. Cette Chevrolet doit conduire Felipe à l’amour : « Je cherchais une voiture. Je cherchais une Chevrolet rouge », déclare Felipe partant à la recherche de Miranda. Le roman de Kerouac est un voyage à travers les États Unis, d’est en ouest, d’ouest en est, de New York à San Francisco, en passant par Denver ou Cheyenne; Chemins de traverse est un voyage à travers l’Espagne, d’est en ouest, et d’ouest en est, de Lérida à Vitoria, en passant par Saragosse. Comme Felipe, Dean Moriarty a perdu sa mère quand il était petit ; il « n’a jamais vu le visage de sa mère »15. Dans Chemins de traverse, l’épisode de la base américaine vient réactiver le mythe de l’Amérique. La base américaine de Saragosse représente une sorte d’Eldorado, avec de multiples possibilités d’enrichissement. Felipe, lui, y perdra son pucelage... Felipe est le Sal Paradise de Chemins de traverse, le père, un Dean Moriarty. Car Sal, le narrateur de Kerouac, est sans doute un ami mais aussi et surtout un observateur critique de Dean. Le roman de Kerouac retrace l’évolution de Sal vers l’amitié, exactement comme celui de Martínez de Pisón retrace l’évolution de Felipe vers la reconnaissance et l’amour de son père16.

Don Quichotte

  • 17 Voir aussi le beau roman de Georges Montforez, Les enfants du marais, qui raconte l’histoire de Rag (...)
  • 18 C’est dans un des appartements loués par son père, et qui avait été habité par un retraité de la RE (...)

10Entre roman picaresque et road-novel, le roman de Martínez de Pisón joue enfin avec un dernier modèle, qui est celui des récits consacrés au voyage d’un couple de compagnons17. Dans la tradition espagnole, ce modèle est d’abord celui de Don Quichotte. On n’est donc guère surpris qu’à plusieurs reprises, Felipe compare le couple qu’il forme avec son père au couple mythique de Cervantès, Don Quichotte et Sancho Pança18 : « Notre histoire était l’histoire d’une longue méprise, c’était l’histoire d’un égarement, une histoire aussi banale que celle de don Quichotte et Sancho Pança. En tous cas, on était aussi seuls que le furent ces deux hommes, et il était évident qu’ayant commencé le voyage seuls, on le finirait seuls » (p. 181).

11Le père a toutes les apparences d’un don Quichotte des temps modernes, d’un chevalier certes roturier, mais qui pourtant s’évertue à se comporter en gentilhomme. Il ne cesse de « se donner des airs », ce qui ne manque pas d’exaspérer Felipe. Il est en perpétuel décalage entre ce qu’il voudrait paraître, un homme avec de bonnes manières, et la réalité qui ne cesse de le contredire. Ainsi, lorsqu’il travaille pour le nettoyage des bureaux d’une compagnie d’assurance, le père doit endurer l’ironie des ouvriers « vêtus de salopettes bleues » comme lui : « — Voilà monsieur le marquis, lança l’un d’eux en guise de salut. — Je crois qu’aujourd’hui il va se salir les ongles » (p. 287). De don Quichotte, le père a aussi l’orgueil, qui l’empêche de demander pardon à sa mère, un orgueil que stigmatise à maintes reprises Felipe. Lors du voyage à Morella, à l’endroit où le Cid aurait combattu contre les Maures, le père veut atteindre le château sans demander son chemin :

Il aimait faire croire qu’il était un homme plein de ressources, un type capable de s’adapter à n’importe quelle situation. Il aimait l’image qu’il donnait de sa personne au volant de sa DS, cela le rendait sûr de lui, il avait l’impression que les gens qu’il croisait étaient impressionnés, mais il craignait aussi que cette image ne s’évanouît s’il s’abaissait à s’arrêter pour demander son chemin (p.54).

12En perpétuelle représentation, le père ne se soucie que de l’image qu’il donne de lui, et non de l’efficacité de son action. Comme don Quichotte, le père de Felipe ne cesse de construire des scénarios imaginaires pour surmonter les obstacles de la réalité. Felipe, en raillant par son ironie la folie de son père agit comme un Sancho Pança qui serait promu narrateur de l’histoire de son maître.

  • 19 Cervantès, Don Quichotte, II, 59, Classiques Garnier, traduction de Louis Viardot, 1992, p. 978.

13Les quatrième et sixième chapitres du roman se déroulent à Saragosse, ville natale d’Ignacio Martinez de Pison. Ne peut-on y voir encore une allusion à Don Quichotte ? Dans la seconde partie de Don Quichotte, Sancho et Don Quichotte se dirigent en effet vers Saragosse pour participer « aux fêtes appelées joutes du harnais, qu’on célèbre chaque année dans cette ville »19. À la suite de la publication d’une seconde partie apocryphe, aujourd’hui connue sous le nom du Quichotte de Avellaneda, dans laquelle Don Quichotte et Sancho se rendent aussi à Saragosse, Cervantès va changer ses plans, et dérouter ses personnages vers Barcelone pour contrecarrer le faussaire. Le père de Felipe, lui, connaîtra les joutes de Saragosse, au terme desquelles il sera conduit en prison (fin du quatrième chapitre) puis à l’hôpital (fin du sixième).

14Comme Don Quichotte, Chemins de traverse est l’histoire d’une solitude à deux : « On était à la fois ensemble et seuls. Comme Sancho Pança et don Quichotte » (p. 201), constate Felipe vers la fin de son récit, avant de récuser, in extremis, ce modèle trop exigeant : « On avait peut-être [...] ressemblé à don Quichotte et Sancho Pança [...] Nous n’étions en fait qu’un père et un fils gagnant leur vie comme ils pouvaient et se retrouvant le soir pour regarder les jeux télévisés sur un appareil qu’on leur avait prêté » (p. 295).

II. Audrey Hepburn et Frank Sinatra : la mère disparue, le père retrouvé

La disparition de la mère

  • 20 Voir le paragraphe consacré à ces photos de la mère, que Felipe peut regarder dans le petit apparte (...)

15L’incipit du roman présente Felipe les pieds dans l’eau, dans la mer : « J’avais retroussé mon pantalon et l’eau inondait complètement mes chevilles » ; mais Felipe qui éprouve un grand plaisir à rester ainsi immobile dans la mer, doit partir. Le père donne le signal du départ : « On y va », Felipe doit quitter la mer. Le père qui avait l’habitude de louer des appartements en hiver au bord de la mer, décide de déménager. Felipe, et son père, retrouvent la mer, à la dernière page du roman. Ces retrouvailles avec la mer scellent les retrouvailles du père avec son fils : « L’été suivant, on loua un appartement à la mer [...] je crois que mon père fut heureux. Plutôt heureux, en tous cas ». On peut évidemment associer cette mer perdue et retrouvée, à la mère disparue de Felipe, dont l’évocation constitue un leitmotiv du roman. Très vite, dès le début de son récit, Felipe évoque ce « passé à jamais révolu dans lequel ma mère avait jadis tenu une place importante » (p. 17). Les souvenirs de Felipe seront égrenés au fil du texte. Souvenirs de photographies, essentiellement20 ; s’opposant ainsi à Estrella la maîtresse de son père, la mère de Felipe était une femme maigre : « Je me souviens d’une photographie d’elle lorsqu’ils étaient encore jeunes mariés [...] Ma mère ressemblait beaucoup à Audrey Hepburn, mais en beaucoup plus menue. Sur cette photographie, elle arrivait à peine à l’épaule de mon père » (p. 48). Vivante, la mère était déjà toute petite... Pourtant, si l’on peut dire, sa taille est inversement proportionnelle à la « hauteur » du vide qu’elle a laissé : le père exige de ses maîtresses « qu’elles se montrent à la hauteur de ma mère ou plus exactement du vide que celle-ci nous avait laissé » (p. 57). Cette exigence du père satisfaisait le fils : « Cela voulait en quelque sorte dire que ma mère demeurait une femme irremplaçable ». Dans d’autres passages du roman, Felipe avoue son absence de souvenir de sa mère, même de son enterrement : « J’étais vraiment trop petit pour me souvenir de l’enterrement de ma mère » (p. 65). Lors des séances de spiritisme organisées par Paquita, c’est le désir impossible de parler avec sa mère que Felipe exprime : « J’aurais beaucoup aimé pouvoir parler avec ma mère... » (p. 138.) Mais c’est lorsque son père se retrouve en prison, et qu’il est recueilli par son oncle, que Felipe ne cesse de s’interroger sur sa mère :

Je pensais beaucoup à ma mère à cette époque [...] je me demandais sans arrêt à quoi aurait ressemblé notre relation si elle n’était pas morte. Est-ce que nous aurions eu la même relation que mon père entretenait avec sa mère ? Non, je suis sûr que non. Dans mon imagination, ma mère ressemblait à Audrey Hepburn, elle avait la même voix qu’elle et possédait son élégance et ses gestes si doux. Je ne savais pas si Audrey Hepburn avait eu des enfants et si elle s’entendait bien avec eux, mais j’étais certain qu’une femme comme elle ne pouvait pas être une mauvaise mère (p. 256).

16Ses interrogations sur sa mère disparue, c’est finalement à son père que Felipe devra les poser. Mais il faudra attendre que le dialogue entre le père et le fils soit possible :

Et ma mère ? J’eus plusieurs fois envie de poser des questions à mon père mais je n’y parvins jamais [...] Et ma mère ? C’était pourtant si facile de poser une telle question et d’attendre que mon père commence à évoquer sa mémoire, à me parler de sa passion pour elle et des choix qu’il avait dû faire pour vivre auprès d’elle. Je me demandais si nous parviendrions vraiment à parler d’elle un jour, et quand. Peut-être que cela se ferait quand il serait très vieux, qu’il serait couché sur un lit d’hôpital, avec un tuyau dans le nez, en train de se remettre d’un infarctus (p. 295-296).

17Mère irremplaçable, fils inconsolable. Faire parler le père, à défaut de pouvoir parler à sa mère. Le récit de Felipe est bien une quête de la mère disparue, un défi à l’absence, une sommation adressée au père, au moins autant que l’histoire de la découverte d’un père par son fils.

Le père retrouvé

  • 21 « Je te hais, dis-je du regard à mon père. Et je vous assure que c’était aussi clair que si je m’ét (...)

18Au début du roman, Felipe et son père semblent bien éloignés l’un de l’autre : « Mon père et moi étions si différents l’un de l’autre que nous n’avions jamais réussi à nous comprendre » (p. 16). Comme il se doit, Felipe commence par avouer la haine qu’il portait à son père, qui n’était certes pas exprimée par des mots, mais par des regards21. Ancien médecin légiste, le père de Felipe voue une admiration sans borne au professeur Barnard, qui a réalisé la première transplantation cardiaque. C’est avec ce culte de « l’as des cœurs » (p. 24) que se produit un premier rapprochement entre le père et son fils. Felipe et son père s’en vont jusqu’à Madrid pour apercevoir le professeur, et obtenir un autographe. Ce « beau Moi » du père, promu au rang de star, est un clair symbole de l’idéal du père de Felipe : faire battre les cœurs... Le chemin est encore long, pour que Felipe réponde à cet idéal. Le fils n’épargne guère les maladresses et les naïvetés de son père : « comment peut-on être aussi con ? » (p. 65) Le père, loin d’être un modèle à imiter, est plutôt un repoussoir pour Felipe. « Moi, je ne demandais qu’une seule chose, c’était de ne surtout jamais lui ressembler » (p. 66). Pourtant, les sentiments de Felipe vont évoluer, et passer du mépris et de la honte à la compassion et à la fierté (p. 98-101). Felipe ne peut cacher une certaine forme d’estime qu’il a pour ce père qui ne s’avoue jamais vaincu, et qui passe des paris sur les matchs de football au commerce des champignons, de l’achat de pompes à essence à l’entreprise de communications téléphoniques clandestines. Avec la découverte de l’amour par Felipe, se produit un second rapprochement : « Je commençais à comprendre un peu le comportement de mon père » (p. 199), « je n’éprouvais plus la même hostilité envers mon père » (p. 200). Felipe en vient à excuser certaines attitudes de son père qui l’exaspéraient le plus, comme « cet acharnement à vouloir passer pour un homme distingué qui fait des affaires » (p. 201). Si Felipe imagine sa mère avec les traits d’Audrey Hepburn, il estime que son père ressemble beaucoup à Frank Sinatra. Lorsqu’il vient annoncer solennellement à son fils que sa maitresse Estrella est partie, le père lui rappelle le crooner chantant Strangers in the night (p. 65), et lorsqu’il assiste aux spectacles de la même Estrella à Lérida, il « avait tout du gigolo italien » (p. 157). C’est l’épreuve de l’emprisonnement du père qui provoque le rapprochement décisif avec son fils. Au parloir de la prison, Felipe apporte à son père une coupure de journal avec une photo d’Estrella.

Alors que je continuais à plaquer le bout de journal sur la vitre, l’époque où mon père me mettait de côté tous les articles de journaux concernant les exploits du docteur Barnard me revint en mémoire. À présent les rôles étaient inversés. Tout se passait comme si j’étais adulte et qu’il était mon fils (p. 254).

19Dès lors, tout bascule. Parce que son père refuse l’argent que lui propose l’oncle Jorge, Felipe devient très fier de son père : « ce que mon père ignorait, c’est que j’étais très fier de son attitude. Ce qu’il ignorait, c’est que si je trouvais absurde sa manière de résister, je la trouvais également héroïque » (p. 263). La scène du parloir où le père et le fils échangent un sourire annonce celle du repas de Noël et de l’échange des cadeaux. Parce qu’il découvre entre temps une police d’assurance vie dans le coffre de la DS, Felipe comprend que son père avait envisagé de se suicider, de se sacrifier pour lui. Felipe passe alors résolument du côté de son père, du côté de ces « hommes à la dérive, avec un regard brillant et craintif, comme s’ils avaient un jour aperçu l’abîme » (p.291), et contre l’oncle Jorge, et tous ceux qui sont entrés dans le rang. La position de Felipe est radicale : « Il n’y avait pas trente-six solutions : ou l’on acceptait de leur ressembler ou l’on était leur ennemi » (p. 266).

20Ce père fantasque et maladroit, Felipe se met à le comprendre, et à l’aimer. Ce père « avait tout simplement refusé de ressembler à cet aïeul qui avait fondé la chaîne de cinémas et la chaîne d’hôtels. Il avait même refusé de ressembler à son père, ce héros de la guerre civile devenu gouverneur de province sous l’étiquette du parti franquiste » (p. 267). Le roman s’achève sur cette découverte mutuelle, symbolisée par l’échange des cadeaux de Noël, celle du père qui se reconnaît dans son fils, quand les masques sont tombés, et celle du fils, appelé à devenir père de son père.

III. Les chemins de Felipe

La croisée des chemins

  • 22 Voir p. 65: « il se mettait à improviser une de ces saynètes dont lui seul a toujours eu le secret  (...)
  • 23 Voir la conversation « politique » entre le père et le fils (p. 132-133)
  • 24 Ex. p. 204 : « j’étais à la fois spectateur et acteur de mon histoire d’amour ».

21À l’image de son père, Felipe ne sait pas où il va. Bien des chemins s’offrent à lui. À commencer par un destin de moderne pícaro, suivant les chemins de traverse empruntés par son père. N’a-t-il pas toutes les ressources de son père ? Parfait comédien comme son père22, il refuse pourtant la voie de la mauvaise vie. Quand il vend ses montres à domicile, il sait refuser. Refuser de devenir gigolo, refuser de devenir joueur (p. 281-283). Au début de son récit, alors qu’il ne comprend rien à la vie de son père, il ne sait pas contre qui se retourner : « je crois que j’avais terriblement envie de me battre mais que je n’avais pas encore trouvé contre qui » (p. 122). Il envisage ensuite la voie de la révolte. C’est le sens de son intérêt pour l’histoire de Patricia Hearst, la fille d’un magnat nord-américain enlevée, et qui, en décidant de « prendre fait et cause pour ses ravisseurs » (p. 58), bascule dans la révolution. Patricia Hearst incarne la révolte contre le père, une tentation de Felipe. Elle éclipse le professeur Barnard, dans le hit-parade de Felipe. Mais Felipe ne deviendra pas non plus un révolutionnaire. S’il comprend progressivement la nature du régime franquiste23, et « la stupidité criminelle de cette époque » (p. 124), et s’il finit par prendre part à une manifestation contre Franco à Saragosse, le chemin qu’il va suivre est celui de la parole confiée à l’écrit, du récit. Témoin de la scène vaudevillesque où son père est coincé entre ses deux maîtresses, Estrella et Paquita, Felipe, en observateur avisé, commente : « on était assis sur une bombe – c’est comme ça que les romanciers qualifient d’habitude le genre de situation que je suis en train de décrire » (p. 161). C’est que Felipe s’intéresse par dessus tout au théâtre de la vie, parce qu’il est à la fois spectateur et acteur de son histoire24, parce qu’il a l’âme de l’artiste.

La victoire de Felipe

  • 25 Revue Positif, mars 2004, p. 33.

22En définitive, si Felipe s’en sort, c’est grâce à sa parole, et grâce à son amour, comme si les deux étaient liés. Sa victoire, c’est sa parole, son récit : « Ma victoire est verbale », comme l’écrit Genet dans Journal du voleur. L’ironie de Felipe accompagne les méandres de ses sentiments à l’égard de son père. Son récit fait ainsi apparaître la naissance de l’amour pour son père. On ne saurait mieux suggérer que la littérature est amour, et rien d’autre. Les chemins de traverse sont doubles : ce sont ceux empruntés par le père, en marge de la société, de la légalité, les combines et les petites escroqueries qui l’ont conduit en prison ; ce sont aussi ceux du cœur, labyrinthiques, ceux que Felipe doit suivre pour comprendre son père. Comme le souligne Jean A. Gili dans une critique du film de Manuel Poirier, « l’errance spatiale n’est jamais ici que le reflet des troubles de l’âme, toujours écartelée entre la contemplation désenchantée du présent et l’aspiration au mieux-être »25. Le roman n’est pas un réquisitoire contre la société moderne ; il enregistre la difficulté d’être. Dans le film de M. Poirier, Estrella, la maîtresse du père de Felipe interprète dans un récital la chanson d’Édith Piaf : « À quoi ça sert l’amour ? ». À cette question, Chemins de traverse apporte une réponse : « À survivre ».

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Notes

1 Nouvelle du recueil Le vin de Paris.

2 Voir sa préface aux Romans picaresques espagnols, Gallimard, Bibliothèque de la Pléiade, 1968.

3 Cette question a donné lieu à un programme de littérature comparée pour l’agrégation de lettres modernes en 2004. Échos picaresques dans le roman du XXe siècle : Céline, Voyage au bout de la nuit ; Ralph Ellison : Invisible Man ; Günter Grass : Le Tambour. Étrangement, aucune œuvre espagnole n’était retenue dans le programme.

4 Jacques Petit : « Permanence et renouveau du picaresque », Positions et oppositions sur le roman contemporain, Actes du colloque de Strasbourg, textes recueillis et présentés par Michel Mansuy, Paris, Ed. Klincksieck, 1971, p. 43-53.

5 Chemins de traverse, traduit de l’espagnol par Serge Mestre, Gallimard, 1998, p. 82. C’est à cette édition que nous renvoyons.

6 Dans le roman picaresque espagnol, on a parfois rapproché la vie d’errance du pícaro avec le pèlerinage, répandu à l’époque. Mais la vie du pícaro offre comme une image renversée du chemin de régénération intellectuelle du pèlerin. Le Guzman d’Alfarache de Mateo Aleman contient un débat entre le pícaro ascète, qui, en suivant son chemin de pauvreté, semble suivre les ordres mendiants de Saint François d’Assise, et le pícaro pécheur entièrement livré au mal. On retrouve aussi ce débat dans Sur la route de Kerouac ; ses personnages ont renoncé à la richesse pour se consacrer à l’extase de la route.

7 Sur cette question, voir Crystel Pinçonnat, Thomas Serrier, Régis Tettamanzi, Échos picaresques dans le roman du XX è siècle, Éditions Atlande, 2004, p. 23-24.

8 Chemins de traverse, p. 229.

9 Voir la chorale du père Apellaniz qui chantait des chants religieux sur des airs des Beatles (p. 248-249)

10 Didier Souiller, Le roman picaresque, PUF, 1980.

11 D. Souiller, p. 59.

12 Alain Dister, dans La Beat Generation, La révolution hallucinée (Gallimard, collection Découvertes), rappelle que Sur la route peut être lu dans un sens bouddhiste : comme le chemin qui mène vers soi » (p. 40). C’est un Dean Moriarty qui en était venu à la résolution taoïste, qui déclare à Sal : « tu frayes ta propre route [...] c’est la route du saint, la route du fou, la route d’arc-en-ciel » (Sur la route, traduit de l’anglais par Jacques Houbart, Gallimard, éd. Folio plus, p. 390)

13 Il y a aussi cette autre Américaine dans le roman, Patricia Hearst, qui s’était rebellée contre son père, et dont l’histoire fascine Felipe...

14 Chemins de traverse, p. 189, 203.

15 Sur la route, Folio Plus, p. 204.

16 C’est même au deuxième chapitre de la III è partie de Sur la route, que se situe « l’instant crucial » de l’amitié entre les deux hommes : « J’étais heureux d’être venu, il avait besoin de moi maintenant », commente Sal, « quelque chose se déclencha entre nous deux » (Kerouac, Sur la route, Folio plus, p. 293-294)

17 Voir aussi le beau roman de Georges Montforez, Les enfants du marais, qui raconte l’histoire de Ragris et Pignolle, deux compagnons qui se serrent les coudes pour échapper à la solitude. Ce roman, publié chez Gallimard en 1958, a été adapté au cinéma par Jean Becker en 1998, avec un scénario de Sébastien Japrisot.

18 C’est dans un des appartements loués par son père, et qui avait été habité par un retraité de la RENFE, que Felipe découvre un exemplaire du Quichotte (p. 116)

19 Cervantès, Don Quichotte, II, 59, Classiques Garnier, traduction de Louis Viardot, 1992, p. 978.

20 Voir le paragraphe consacré à ces photos de la mère, que Felipe peut regarder dans le petit appartement de sa grand-mère: « sur la photographie la plus récente, on voyait ma mère qui avait passé un peignoir sur sa chemise de nuit. Elle était en train de bercer un nouveau-né. C’était moi, bien sûr. Ce doit être la dernière photographie d’elle » (p. 84).

21 « Je te hais, dis-je du regard à mon père. Et je vous assure que c’était aussi clair que si je m’étais appliqué à articuler distinctement chacune des syllabes » (p. 20).

22 Voir p. 65: « il se mettait à improviser une de ces saynètes dont lui seul a toujours eu le secret ».

23 Voir la conversation « politique » entre le père et le fils (p. 132-133)

24 Ex. p. 204 : « j’étais à la fois spectateur et acteur de mon histoire d’amour ».

25 Revue Positif, mars 2004, p. 33.

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Pour citer cet article

Référence papier

André-Alain Morello, « Chemins de traverse d’Ignacio Martínez de Pisón »Babel, 13 | 2006, 229-245.

Référence électronique

André-Alain Morello, « Chemins de traverse d’Ignacio Martínez de Pisón »Babel [En ligne], 13 | 2006, mis en ligne le 07 août 2012, consulté le 02 décembre 2024. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/babel/952 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/babel.952

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Auteur

André-Alain Morello

Université du Sud (Toulon-Var)

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