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I. Face latine et caraïbe

L’héritage africain à travers le prisme américain

Lobna Mestaoui
p. 49-64

Riassunto

La découverte d’une identité créole et d’une appartenance à l’aire caraïbe, cette faculté de se voir par le prisme de l’héritage endogène s’inscrit dans un long processus où tâtonnement et adoption des cultures imposées ou revisitées s’est souvent déployé comme le fil d’Ariane d’une construction identitaire et imaginaire. Cette construction qui s’est déclinée, d’abord, en un profond travail d’assimilation à l’Occident, que Chamoiseau désigne par « la ruine intérieure », à laquelle riposteront le mouvement de l’indigénisme de Price-Mars en Haïti, la Négritude de Césaire en Martinique mais également l’émergence plus récente du « manifeste créole » enrôlant les différents acteurs de cette présence au monde marque les différentes étapes d’un discours sur soi, d’un regard souvent faussé continuellement réinventé. Certes les auteurs de ces aires outre-atlantiques ont souvent mobilisé dans la trame de leurs œuvres une écriture de l’héritage multiple aussi bien linguistique que culturel. Ils ont enregistré de ce fait l’hybridation et l’éclatement de leur horizon littéraire qui s’origine irrémédiablement dans la violence de la rencontre.

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Testo integrale

1Quand le commerce triangulaire fut instauré avec comme image d’Epinal le bateau négrier, l’affaire se limitait au transbordement forcé d’« hommes-machines », de bois d’ébène ou, comme le dit René Depestre, de minerai noir qui peuplerait les plantations de canne à sucre en Caraïbe et de coton en Amérique. Ce commerce et ses détenteurs n’avaient pas prédit au-delà de la rencontre forcée de la chair pour le peuplement des nouvelles terres et l’investissement économique la jonction imposée des esprits et des cultures et l’émergence de peuples créoles pour qui l’Afrique a voyagé dans les cœurs, les bribes de langues, la mouvance des corps aussi bien que dans les soirées des plantations et les rythmes des tambouyés de Martinique comme du Brésil, hélant la naissance des plus importantes diasporas africaines. Ainsi la dispersion des esclaves de la même ethnie et leur mélange avec des esclaves en provenance d’aires ethniques différentes afin de minimiser les révoltes et les rébellions n’a-t-elle fait que favoriser le processus d’hybridation et dynamiser le métissage donnant cours aux plus virtuoses créations artistiques et littéraires. Des œuvres revendiquant incontestablement l’entrelacement rhizomatique des identités et marquées au coin de l’apport prépondérant de l’héritage originel comme terreau des cultures du Nouveau Monde.

  • 1 Le mot « magouille », nous l’empruntons à Bernard Delpêche qui, dans son ouvrage Magouilles d’une e (...)

2Il s’agit dans cette lecture d’écrire la généalogie de ce processus de créolisation et d’analyser à partir de certains exemples artistiques et littéraires la permanence de cet héritage en questionnant les différentes figures de survivance pour les cultures africaines à travers le prisme américain, la richesse et même la truculence de ce legs qui, de stratégie de survie, modalité de « la magouille »1 à l’époque coloniale et esclavagiste, se mue notamment à l’orée du XXe siècle, en une revendication des origines indigènes.

3Convoquer la traite négrière à l’orée de cette analyse, c’est renvoyer aux différents espaces modernes qui ont contribué de gré ou de force à l’émergence des diasporas africaines outre-atlantique. Des mythiques ports européens où on affrétait les bateaux négriers chargés de marchandises de pacotille : tissus, miroirs, armes blanches et à feu comme Liverpool, Londres, Nantes, La Rochelle ou encore Lisbonne ou Amsterdam aux différents comptoirs africains où on s’approvisionnait en bois d’ébène sur les côtes africaines : l’île de Gorée, Ouidah, Luanda et Zanzibar et à tous ces ports de revente : Charleston, Rio de Janeiro, ceux de Cuba, de Martinique et de Guadeloupe… Des lieux, au demeurant, chargés de mémoire et d’histoire et qui en disent long sur une créolisation mise en place depuis des siècles et sur les divers modes d’échange instaurés par les différents protagonistes de la traite.

  • 2 Paul Gilroy, L’Atlantique noir. Modernité et double conscience, p. 30.

4Dans La Mulâtresse Solitude, André Schwarz-Bart renvoie à cette chasse à l’homme, au départ forcé et à la traversée de l’Atlantique. Car le bateau s’impose comme un espace-référence ou s’élabore la première cohabitation effective durant des semaines ou encore des mois et où se tissent les premiers échanges, aussi violents soient-ils. Le Bateau négrier de Joseph Mallord William Turner (1840) ou Execrable human Traffick (1789) de George Morland (1763-1804) figurent les soubassements du Nouveau Monde, les modalités de la prédation moderne. Quant à Paul Gilroy, il met l’accent sur ce transbordement et sur l’importance des navires non seulement en tant que moyens de transport mais en tant que microcosmes voire « microsystèmes d’hybridation linguistiques et politiques »2 porteurs de rencontres forcées à venir entre les hommes et les cultures. Ainsi, l’introduction de certains instruments musicaux en Afrique (la guitare baroque introduite sur ce continent par les Portugais au XVIe siècle) ou, au contraire, sur l’autre rive de l’Atlantique (le balafon ou marimba ancêtre du xylophone et le bania ou banjar ancêtre du banjo) remonte aussi loin que l’avènement de l’esclavage et témoigne de l’interaction entre les différents mondes, prélude d’une floraison et d’un foisonnement d’œuvres multiculturelles et plurilinguistiques dont le fondement demeure la cohabitation du divers.

  • 3 Ibid., p. 29.

Je me suis intéressé à l’image des navires en mouvement au travers des espaces séparant l’Europe, l’Amérique, l’Afrique et les Caraïbes comme à un symbole pivot […]. L’image du navire un système en mouvement, micropolitique, micro-culturel et vivant…3

5Amistad de Steven Spielberg (1997), avec Djimon Hounsou, renvoie aussi à ce monde clos et à ses lois. Le film met en scène l’instauration d’une hiérarchie impitoyable que les esclaves chercheront à renverser mais également, à la mise en place souvent inouïe d’un dialogue avec l’Autre au-delà des innombrables obstacles, hiérarchisations et dissemblances. Une réalité qui s’oppose diamétralement aux vœux initiaux affichés par les conquérants dont les objectifs se résument au commerce et à la colonisation des nouvelles terres conquises.

6Dans le roman éponyme, Moi Tituba la sorcière, Maryse Condé convoque le navire pour inscrire la captivité, la logique prédatrice de l’esclavage et la permanence du transbordement et sa réitération sans oublier de retracer la destinée d’une lignée de femmes (Abena, la mère, Man Yaya la guérisseuse protectrice et l’héroïne Tituba) adoptant l’invisible et le recours aux pouvoirs surnaturels comme une stratégie de résistance à l’assujettissement et à ses rouages. Fruit d’un viol que subit sa mère sur le bateau négrier, Tituba sera elle-même vendue comme esclave et effectuera le voyage de la Barbade natale au village de Salem en passant par Boston. Seule consolation dans cette destinée tragique, la culture de l’invisible et sa convocation à travers des liens scellés avec l’héritage ancestral comme alternative à la deshumanisation et à la perdition qui guette les âmes et les corps enchaînés. Ce roman met d’autre part l’accent sur le potentiel de créativité des esclaves qui, à chaque transbordement, réadaptent les savoirs ancestraux au nouveau contexte dans un travail continuel de déterritorialisation et reterritorialisation, une lecture que nous développerons ultérieurement lors de l’évocation de la permanence et de la réinvention des cultes africain, en Haïti comme en Amérique du Nord et en l’Amérique latine.

7Aidée par sa connaissance de l’invisible et par Judah White, un esprit bienveillant, ami de Man Yaya, l’héroïne s’acclimatera à l’univers américain où elle réussira à puiser ses nouveaux remèdes :

La vieille Judah m’indiqua le nom de chaque plante avec ses propriétés. J’ai noté là dans ma tête quelques unes des recettes qu’elle me révéla :

Pour se débarrasser des verrues, frotter leur emplacement avec un crapaud vivant jusqu’à ce que la peau de l’animal les absorbe. […]

  • 4 Maryse Condé, Moi, Tituba sorcière… noire de Salem, p. 85.

Je rentrai à Boston un peu réconfortée, ayant appris à voir des amis dans des bêtes auxquelles auparavant je n’aurais jamais prêté attention : le chat au pelage noir, la chouette, la coccinelle et le merle moqueur.4

8Il s’agit en effet de mettre en lumière, au-delà des crimes et de la barbarie, l’entreprise d’échange et de créolisation à l’œuvre dans ce processus de transbordement ainsi que la prédominance de rapports inhérents à l’Afrique pour les diasporas outre-atlantique :

  • 5 René Depestre, Ainsi parle le fleuve noir, p. 22.

Dans l’espace géographique qui s’étend des États-Unis au sud brésilien, d’une Amérique à l’autre, tout un monde est tombé du métier à métisser qu’aura été l’histoire des contacts de civilisation que l’expansion de l’Europe a suscités sur l’ensemble de la planète.5

9René Depestre évoque et renvoie souvent à l’Afrique par le prisme des Amériques. Il mentionne souvent que, dans la plupart des territoires insulaires ou continentaux américains, anciennes colonies des empires impériaux occidentaux, la présence des Noirs est viscéralement liée à l’anéantissement des Indiens dont la conséquence première est la traite négrière et ses lois :

  • 6 René Depestre, Rage de vivre. Œuvres poétiques complètes, p. 105.

Quand la sueur de l’Indien se trouva brusquement tarie par le soleil
Quand la frénésie de l’or draina au marché la dernière goutte du sang indien
De sorte qu’il ne resta plus un seul Indien aux alentours des mines d’or
On se tourna vers le fleuve musculaire de l’Afrique
Pour assurer la relève du désespoir
Alors commença la ruée vers l’inépuisable
Trésorerie de la chair noire
Alors commença la bousculade échevelée
Vers le rayonnant midi du corps noir
Et toute la terre retentit du vacarme des pioches
Dans l’épaisseur du minerai noir
Et tout juste si des chimistes ne pensèrent
Aux moyens d’obtenir quelque alliage précieux
Avec le métal noir tout juste si des dames ne
Rêvèrent d’une batterie de cuisine
En nègre du Sénégal d’un service à thé
En négrillon massif des Antilles6.

10Il s’avère que, dans la représentation des esclaves, ce départ forcé était toujours adouci par le rêve du retour que les multiples suicides convoquaient au débarquement de la cale comme une délivrance, voire comme une porte ouverte pour des retrouvailles inespérées avec le pays d’origine : the homeland.

11En créant La Black Star Line en 1919, Marcus Garvey a ravivé le mythe de « l’Atlantique noir » et celui du retour en Afrique. Cette entreprise ambitieuse se réfère incontestablement aux différents retours effectués par les Jamaïcains affranchis dès le XVIIIe siècle, suivis par les Nord-Américains et leur fondation de l’État du Libéria en 1847 et par les Brésiliens, dont les retours massifs datent de 1888 et se soldent par leur installation à Lagos, au Nigéria, notamment. Le dernier élan de masse est, peut-être, celui des Rastafariens dans les années 90 pour rejoindre l’Éthiopie et le mythe des origines.

12Ces retours interrogent le lien qui unit les diasporas à leur continent d’origine mais aussi leurs apports à ce dernier à travers les modes de vie et les cultures importés. Cependant ce destin, lié au continent d’origine et à la célébration de l’identité nègre a été instauré en amont par une nation dont le patrimoine culturel témoigne de l’importance de cette présence de l’Afrique en Amérique. Considérée comme l’Aînée de l’Afrique et le berceau du « Nègre debout », Haïti consacre inlassablement ce lien au continent d’origine.

Haïti, L’héritage à travers le prisme des nouvelles configurations

13Même si l’épisode de l’indépendance de Haïti (1804) renvoie essentiellement à ce processus d’assimilation et de fascination pour l’ancien colonisateur que manifeste l’acte fondateur et la subordination des intellectuels haïtiens durant presque un siècle à Paris et au Vieux Continent, Haïti demeure le terreau du « Nègre debout », de cet affranchissement du joug esclavagiste et colonial quand les nations africaines abordaient l’ère de la colonisation après les ravages de l’esclavage et que les Noirs d’Amérique attendent la guerre de Sécession (1865) pour accéder à un statut moins impitoyable.

  • 7 Le Royaume de ce monde d’Alejo Carpentier (1949) est un roman historique dont les événements se pas (...)

14À l’opposé d’un premier siècle d’acculturation et de création littéraire orientée vers l’Occident et son esthétique, nombre d’auteurs haïtiens se tourneront, dès le début du XXe siècle, dans le sillage de Jean Price-Mars, vers l’importance de l’héritage africain dans la formation du peuple haïtien et son imaginaire, mettant l’accent sur l’apport de ce substrat dans ce que, plus tard, Alejo Carpentier7 et Asturias nommeront le réalisme merveilleux. Clamer le double héritage pour la dignité des masses populaires haïtiennes relève, pour ce penseur, de la nécessité de s’ancrer dans une identité du terroir et revêt un caractère d’urgence. Voici une démarche galvanisée par le passage de Pierre Mabille et d’André Breton par Haïti. L’indigène, jusque là « piétiné » dans les représentations occidentales en tant qu’entité marquée au coin de sa sauvagerie, et de sa ténébreuse existence revendiquera l’origine ancestrale comme l’humus de son émergence sans renier l’apport de l’Occident. Ce choix renvoie également à la nécessité pour l’élite intellectuelle de renouer avec l’imaginaire haïtien et l’héritage africain. Il s’est agi pour Jean Price-Mars et d’autres intellectuels comme Jacques Roumain d’aborder une « orientation nouvelle », de contrecarrer les projets d’occupation américaine (1915-1934) et de mainmise sur le pays, de mettre en valeur la paysannerie haïtienne et ses fondements. L’indigénisme était essentiellement un mouvement de résistance à l’assimilation culturelle et politique se fondant incommensurablement sur la mise en valeur du patrimoine ancestral et la dénonciation du bovarysme des élites subordonnées à l’Occident :

  • 8 Jean Price-Mars, De Saint-Domingue à Haïti, p. 102.

Et alors nous nous sommes aperçus que pour nous rendre témoignage de ce que nous sommes tous, du haut en bas de l’échelle il fallait répudier nos anciennes catégories sociales, nous interroger et interroger le pays réel, interroger ses croyances, enregistrer les accents de sa voix, étudier son langage vernaculaire, recueillir ses légendes, ses chansons, ses dictons, enfin nous retrouver nous-mêmes par introspection et retrouver les autres par prospection8.

  • 9 Booker Tagliafero Washington est né esclave en 1856 en Virginie dans une plantation du comté de Fra (...)

15Cependant on ne peut ignorer, dans cet élan pour l’indigénisme comme mode de résistance à l’assimilation et son dernier avatar, le protectorat américain, le rôle majeur que joue à l’époque l’effervescence intellectuelle des afro-américains en combat permanent pour la promotion d’une vie meilleure. Ainsi, la rencontre de Jean Price-Mars avec Booker Tagliafero Washington9, directeur de l’École normale de Tuskegee et figure majeure de la communauté afro-américaine a profondément marqué l’intérêt du penseur haïtien pour cette diaspora et sa lutte. Le mouvement de la Renaissance de Harlem expose un autre pan de la lutte qui inspirera aussi bien les Haïtiens que les Africains. Le rayonnement international de certains intellectuels comme W.E.B. Du Bois, Claude McKay, Richard Wright ou encore Langston Hughes, la participation de certains d’entre eux au 1er et 2ème Congrès des écrivains et artistes noirs à Paris (1956) et à Rome (1959) attestent l’étendue de leur influence dans le mouvement panafricain qui se profile.

  • 10 Jaques Roumain, Les Gouverneurs de la rosée, Fort de France, librairie Désormeaux, 1977, p. 53.

16En 1920, Jaques Roumain illustre ce double héritage du peuple haïtien dans son roman les Gouverneurs de la Rosée. Il l’illustre à travers la figure du personnage de Manuel, incarnation du Haïtien issu du peuple et de ce monde créole, imprégné de son métissage et de ses combats. Manuel, l’enfant de la Caraïbe (natif de Haïti qui rentre au pays après un long séjour à Cuba) renvoie, dès son apparition dans l’œuvre, à l’imaginaire populaire flamboyant. Son inscription, dès la première scène, est liée à la route et aux sentiers que l’auteur égrène à l’envi et dont le dense symbolisme interpelle Papa Legba qui, selon la note de Roumain, n’est d’autre que le dieu afro-haïtien. Celui qui « ouvre » le chemin10. Le chapitre IV est consacré à la célébration du loa legba, « Atibon Legba, le maître des carrefours », ouvreur des barrières, qui préside aux frontières entre le monde humain et celui de l’invisible. À cette figure convoquant l’espoir s’oppose la figure d’Ogun, un autre loa du panthéon afro-haïtien, dieu du feu, du fer et de la guerre, issu également du panthéon yoruba.

  • 11 Ibid., p. 97.

17L’œuvre, travaillée par les voix de l’indigénisme, décline ses différentes assises : Manuel, le personnage principal, incarne Papa Leba dans le quotidien de ces « nègres-pieds-à-terre » fait de misère et de chiche pitance. Au prix de sa vie, il s’imposera par ses tracées à la recherche de la source d’eau en tant que métaphore d’une vie meilleure comme « l’ouvreur des barrières » pour « défricher la misère et planter la vie nouvelle »11.

  • 12 Ce choix est lisible dans les œuvres de certains auteurs latino qui mettent en avant l’importance d (...)

18D’autres auteurs puiseront au réel merveilleux pour mettre en avant la richesse de l’imaginaire haïtien et ses fondements en l’instaurant comme le levier de la lutte contre l’injustice et la subordination des libertés. Jean Price-Mars publie Ainsi parla l’oncle (1928), un recueil d’articles et de conférences qui servira de référence à nombre d’auteurs des diasporas africaines. Quant à René Depestre, il s’attellera dans ses poèmes comme dans ses romans plus tardivement à inscrire – malgré plus d’un demi siècle d’exil – à dire la poésie du réel merveilleux caraïbéen12. Ainsi dans son recueil Arc-en-ciel, consacre-t-il ses poèmes aux dieux du panthéon haïtien : Atibon Legba Ogou-Feraille, Damballah-Wèdo, Agoué_Taroyo, Chango, Baron-La-Croix, Loko, Baron-Samedi. Écoutons-le déclamer la généalogie de Papa Legba :

  • 13 René Depestre, Rage de vivre. Œuvres poétiques complètes, p. 183.

Je suis Atibon-Legba
Mon chapeau vient de la Guinée
De même que ma canne de bambou
De même que ma vieille douleur
De même que mes vieux os…13

19C’est ce même Papa Legba que le poète projettera dans différents espaces allant jusqu’à l’Alabama des années 50 pour dénoncer le racisme et le lynchage perpétrés contre les Noirs dans les États du Sud américain :

  • 14 Ibid., p. 183 sqq.

Je suis Alegba Papa
Le dieu de vos portes
Ce soir c’est moi
Le maître de vos layons
Et de vos carrefours de blancs
Moi le protecteur des fourmis et des plantes de vos maisons
Je suis le chef des barrières
[…]
J’arrive couvert de poussière
Je suis le grand ancêtre noir
[…]
Ô vous juge de l’Alabama
Je ne vois dans vos mains
Ni cruche d’eau ni bougie noire
Je ne vois pas mon vêvé tracé
Sur le plancher de la maison
Où est la bonne farine blanche
Où sont mes points cardinaux
Mes vieux os arrivent chez vous
Ô juge et ils ne voient pas
De bagui où poser leurs chagrins14

20Simple coïncidence ou pur hasard, les dieux du panthéon vaudou ont réussi à conquérir jusqu’à la peinture moderne dévoilant l’arborescence imprévisible de l’héritage. L’exposition Les maîtres du désordre, organisée au musée Quai Branly (11 avril-12 juillet 2012), mettait l’accent sur la question de l’héritage du savoir ésotérique ancestral et sur son actualité ou encore sa réactualisation à travers diverses œuvres anciennes et récentes dont Exu de Jean-Michel Basquiat (1960-1988), l’un des précurseurs de l’art contemporain qui interpelait dans ce tableau le vaudou haïtien et, par ricochet, l’Afrique yoruba et son panthéon. Car, en Afrique, Exu n’est d’autre que le dieu Eschu ou encore Legba, « le régulateur du cosmos, ouvreur des barrières » et puissant intermédiaire pour dire l’invisible et le convoquer. En le figurant comme divinité cornue, Basquiat n’ignore point l’acharnement des missionnaires occidentaux contre cette divinité assimilée par ces derniers au diable du christianisme. Une erreur. Par ailleurs, de nombreuses œuvres de Basquiat le rattachent à Haïti, l’île natale paternelle, et à son évocation de l’héritage africain. Si son tableau Gold Griot rappelle l’oralité africaine et l’art griotique comme le fondement de l’émergence même d’une parole débridée en Haïti (1984), le Grillo, est une œuvre qui convoque la figure d’Ogun, autre dieu du vaudou, dont les attributs, le fer et la lame, sont visibles dans l’œuvre du jeune peintre. Féru d’art et de culture, cet artiste prodige signe dans certaines autres œuvres, toujours avec humour et ironie, sa lecture très moderne de l’héritage et de la mémoire ancestrale. Slave Auction (1982), par exemple, relate la traite négrière où Baron Samedi, emblème de la mort, trône vêtu de l’habit des jazzmen de la Nouvelle-Orléans sur un fond bleu renvoyant au blues et où la couronne d’épines n’est que le symbole du sacrifice d’un peuple pour le bonheur d’un autre. Dans cette œuvre comme dans The Guilt of gold teeth, le jeune peintre puise son inspiration dans la culture populaire d’origine comme dans son contexte moderne pour la dicibilité d’un héritage encore vivace et son inscription dans l’avènement d’une nouvelle mouvance artistique urbaine désignée par le terme hip-hop qui se décline en différentes productions : rap, break dancing, graffiti et beatboxing.

Musique, rites et héritage

21Cette omniprésence de l’héritage africain est certainement plus visible dans les créations musicales ou cultuelles dites souvent populaires et qui s’adressent à un public plus large et illustrent plus concrètement ce processus de transfert culturel et sa permanence. Les captifs des différentes régions d’Afrique : Congo, Mozambique, Angola ou encore empire du Dahomey, arboraient le chant comme la seule consolation de l’être. Le chant, en Afrique, s’imposait comme le vecteur de la vie. Il s’immisçait dans les différents rituels de la vie collective et les ponctuait : naissance, mort, initiation, culture des champs…

  • 15 Lucien Malson, Histoire du Jazz et de la musique afro-américaine, p. 26.

22Les Works songs ou encore field hollers préfigurent l’importance du chant pour apaiser la rudesse du quotidien et décalquent certains traits du quotidien originel. Ces chants préfigurent également l’émergence du blues comme expression de l’âme triste et meurtrie à travers des psaumes profanisés. Les créations du blues, souvent désignées comme profanes, trouveront leurs sources dans les spirituals, leur pendant sacré où le syncrétisme religieux et musical est à son apogée. Nombre de chants, comme Cyan’Ride ou No more auction block, se réfèrent respectivement à une mélodie nigérienne et un chant ashanti15.

  • 16 Honoré Mobonda, « Les joutes musicales dominicales de Congo Square ou devoir délibéré de mémoire ?  (...)
  • 17 Ibid., p. 123.
  • 18 Ibid., p. 120.

23D’autre part, des lieux mythiques s’illustreront où la danse comme la musique demeurent omniprésentes dans le paradigme du devoir de la mémoire et de la « refaite de soi », à comprendre comme la reconstruction de soi. Dans Les joutes musicales de Congo Square ou devoir délibéré de mémoire, Honoré Mobonda mentionne la place qu’occupaient les esclaves congo dans la perpétuation de la mémoire ancestrale lors de leurs réunions à Congo Square, à la Nouvelle Orléans. Contrairement à l’explication donnée par les Français à l’époque : « faire la bamboula signifie faire la fête avec toutes les connotations négatives qu’elle véhicule : désordre, insouciance, négligence »16. La bamboula, selon les explications de l’auteur, renvoie à un devoir de mémoire et « une danse du souvenir », « a dance to remember »17. Par le choix de cet espace qui, auparavant, était un marché aux esclaves, ces derniers tentaient de recréer leur lieu d’origine, bousculant les lois impitoyables de l’esclavage et de la déterritorialisation imposée. D’autre part, la mémoire de cet espace est inscrite dans les interstices d’une chanson de Duke Ellington, Koko18, dans laquelle le musicien rend hommage à son grand-père, musicien à Congo Square au XIXe siècle.

24C’est dans ce melting pot culturel que naîtra le jazz, nourri à la fois des bribes de l’héritage africain et de sa proximité et de sa cohabitation avec la tradition musicale occidentale.

25Cependant, si la censure était de mise à la Nouvelle Orléans et en Amérique du Nord, excluant un certain nombre de danses de la place publique comme la calinda (dansée par les esclaves emportés par les Français au XVIIIe siècle) ou encore l’ombiliguide, jugées très érotiques et souvent corollaires des cultes vaudou, des variantes de ces mêmes danses se retrouvent autorisées dans la Caraïbe ou en Amérique Latine, où se pratiquait le batuque (le mot est d’origine kikongo) et l’umbigada, et dont l’exécution semble davantage tolérée, malgré la réprobation officielle de la lascivité, jugée contraire aux mœurs.

26Il faut mentionner d’autre part que ces danses réprouvées qui accompagnent les chants des esclaves vont, grâce au processus d’hybridation, engendrer des œuvres universelles qui, par ricochet, imprègneront les cultures dominatrices hexagonales. Citons, en l’occurrence, le jazz comme vitrine de l’Amérique, ou encore cette filiation entre certaines danses et musiques rituelles et des répertoires connus. Ainsi en va-t-il du lundum et du fofa exécutés à Salvador de Bahia, qui vont connaître un grand succès. Ce sont ces mêmes créations qui seront à l’origine du fado portugais selon les propos d’Elisabetta Maino :

  • 19 Elisabetta Maino, « Axé Africa : transtemporalités africaines de la créativité musicale à Salvador (...)

[…] introduits également à Lisbonne d’abord comme spectacles de dérision des Noirs et des Métis brésiliens, lundum et fofa devinrent très populaires au Portugal au point que leur fusion et l’incorporation de la guitare portugaise à l’origine du Fado, genre élevé au rang d’expression de « l’âme portugaise » par l’Estado Novo salazariste.19

  • 20 Olivier Sangi Lutondo, « Ciyanda cokwe et samba brésilienne : lecture comparative de la parenté », (...)

27Dans l’étude comparative d’un genre musical brésilien et d’un genre africain présentée par Olivier Sangi Lutondo, la samba brésilienne, célèbre dans le monde, rappelle pour une paysanne congolaise par son air musical et, par son nom de désignation, la cyanda cokwe centrafricaine. Le mot africain samba est un anthroponyme qui condense de nombreux sens dont la richesse et le symbolisme le subliment et dévoilent le poids de sa polysémie, parmi lesquels on peut citer, sous l’autorité d’Olivier Sangi Lutondo, l’expression Kusamba mwana signifiant : « honorer la fille, la reine, la source, la gardienne, la multiplicatrice de la vie », kusamba mulonga signifiant « juger une palabre et gagner »20.

  • 21 Ibid., p. 203.

Dans l’univers culturel africain […] samba signifie hymne à l’amour même dans les situations les plus tragiques. Elle est conjuration du mauvais sort, de l’aliénation et exorcisme pour une meilleure célébration du cycle perpétuel de la vie ».21

28Selon l’étude comparative d’Olivier Sangi Lutondo, la filiation entre les deux genres est attestée. Le transbordement a permis, en effet, le passage d’une œuvre créée « pour célébrer la victoire de la vie » à une modalité de survie à la déshumanisation.

29Cependant, toujours selon ce même chercheur, le premier critère de mutation s’avère la vitesse de l’exécution de la samba brésilienne, vitesse corollaire au transbordement et à la condition impitoyable des esclaves. En effet, l’œuvre musicale enregistre et dévoile l’insécurité du vécu et son irrationnel. Elle témoigne de cette rupture cruelle avec l’harmonie d’antan.

  • 22 Ibid., p. 204.

Dans ce contexte, la ciyanda fut utilisée comme une arme de survie pour les esclaves, l’essentiel étant de maintenir non pas un rythme de battement du cœur mais un rythme de la pensée, à la recherche d’un exutoire pour se libérer.22

  • 23 Notons l’existence en Uruguay d’un candombe datant du XXe siècle qui, après avoir été interdit de l (...)

30Si les cultes afro-américains représentaient pour les Occidentaux un trait indiscutable du paganisme et une preuve matérielle de la sauvagerie par la lascivité des gestes, les rythmes syncopés et la dissipation, ils sont pour les pratiquants une autre modalité du marronnage, donnant libre cours à l’esprit contre l’enchaînement physique et l’aliénation imposés. Le candomblé brésilien, la santèra cubaine ou encore le rite shango de Trinidad renvoient, malgré les variantes, à une même réalité imprégnée de contextes d’implantation différenciés23. Les termes employés pour désigner ces productions aussi bien que les œuvres elles-mêmes attestent leur origine africaine. Cette implantation dans différents pays révèle l’importance de l’héritage et la richesse des hybridations induites par le contact avec les cultures locales ou d’autres cultures d’importation, comme l’occidentale.

  • 24 Elisabetta Maino, « Axé Africa : transtemporalités africaines de la créativité musicale à Salvador (...)

31Les productions contemporaines, accessibles via la médiatisation comme le carnaval ou la capoeira, preuve d’un mouvement transculturel mondial, s’inscrivent au Brésil comme « un espace social d’affirmation identitaire et une occasion pour réinventer la mémoire africaine »24.

32L’une des manifestations qui nous paraît accessible est la capoeira, pratiquée à travers le monde. Certains, comme le précise Elisabetta Maino, la rattachent à un rituel angolais appelé ngolo, d’autres la présentent comme un art de combat créé par les esclaves qui, grâce à l’accompagnement musical, a pu berner la vigilance des maîtres et leur permettre de s’exercer à la lutte, prélude des libérations à venir.

33On ne peut ignorer, à l’issue de cette lecture, la dynamique de l’hybridation à l’œuvre qui dévoile la place accordé à l’échange interculturel et au métissage caractéristique indéniable des cultures afro-américaines sans restriction géographique, englobant ainsi, aussi bien la Caraïbe, l’Amérique du Nord, que l’Amérique Latine. L’héritage africain, à travers le prisme américain, révèle, malgré les variantes et l’éclatement des productions abordées, l’interaction permanente et la symbiose née de la jonction du divers. Tango, samba ou jazz, des genres mondialement reconnus enregistrent ce lien viscéral à l’Afrique mais également, à tous points de vue, la portée inclusive des œuvres écrites ou plus largement artistiques s’érigeant comme une modalité de résistance et un catalyseur pour la préservation d’un patrimoine enté sur l’échange permanent et revigoré par une mondialisation galopante. La rumba congolaise dévoile, à rebours, l’interférence entre les différents espaces et le kaléidoscope de créations que suscitent les échanges entre le continent d’origine et les multiples diasporas décloisonnant de ce fait les genres et les trajectoires par les voies d’un métissage constamment réinventé.

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Bibliografia

Agudelo Carlos, Capucine Boidin et Livio Sansone, coord. Autour de « L’Atlantique noir », une polyphonie de perspectives. Paris : Éditions de l’IHEAL, 2009.

Chamoiseau, Patrick. Écrire en pays dominé. Paris : Éditions Gallimard, 1997.

Condé, Maryse, Moi, Tituba sorcière… Noire de Salem. Cher : Mercure de France, 1968.

Gilroy, Paul. The black Atlantic. Modernity and double consciousness. Londres: Verso, 1993.

Gilroy, Paul. L’Atlantique noir. Modernité et double conscience. Cahors : Kargo, 2003.

Delpêche, Bernard. Magouille d’une esthétique : René Depestre et le vodou. Paris : Éditions Caractères, 2005.

Depestre, René. Ainsi parle le fleuve noir. Grigny : Éditions Paroles d’Aube, 1998.

Depestre, René. Rage de vivre. Œuvres poétiques complètes. Paris : Seghers, 2006.

Maino, Elisabetta. « Axé Africa : transtemporalités africaines de la créativité musicale à Salvador de Bahia (Brésil) ». Héritage de la musique africaine dans les Amériques et les Caraïbes. Éd. Alpha Noël Malonga et Mukala Kadima-Nzuji, Paris : L’Harmattan, 2007. 147-186.

Malson, Lucien. Histoire du Jazz et de la musique afro-américaine. Paris : Éditions du Seuil, 2005.

Mobonda, Honoré. « Les joutes musicales dominicales de congo square ou devoir délibéré de mémoire ? ». Héritage de la musique africaine dans les Amériques et les Caraïbes. Éd. Alpha Noël Malonga et Mukala Kadima-Nzuji, Paris : L’Harmattan, 2007. 117-124.

Price-Mars, Jean. De Saint-Domingue à Haïti. Paris : Présence africaine, 1959.

Price-Mars, Jean. Ainsi parla l’oncle. Compiègne : Imprimerie de Compiègne, 1928.

Richet, Isabelle, éd. Harlem. De la métropole noire au ghetto, de la Renaissance culturelle à l’exclusion. Paris : Éditions Autrement, 1993.

Sangi Lutondo, Olivier. « Ciyanda cokwe et samba brésilienne : lecture comparative de la parenté ». Héritage de la musique africaine dans les Amériques et les Caraïbes. Éd. Alpha Noël Malonga et Mukala Kadima-Nzuji, Paris : L’Harmattan, 2007. 199-206.

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Note

1 Le mot « magouille », nous l’empruntons à Bernard Delpêche qui, dans son ouvrage Magouilles d’une esthétique : René Depestre et le vodou, désigne par ce terme la « présence indésirée des juifs dans les colonies françaises » et leurs techniques de survie. « Magog donc c’était l’autre qui se cachait pour se protéger. Gog ou Magog comme on peut le lire dans l’Apocalypse, XX, 8 se réfère à une situation de croisades, de lutte » (p. 9). Bernard Delpêche renvoie à « un ensemble de techniques qu’on acquiert dans une mauvaise passe » (idem).

2 Paul Gilroy, L’Atlantique noir. Modernité et double conscience, p. 30.

3 Ibid., p. 29.

4 Maryse Condé, Moi, Tituba sorcière… noire de Salem, p. 85.

5 René Depestre, Ainsi parle le fleuve noir, p. 22.

6 René Depestre, Rage de vivre. Œuvres poétiques complètes, p. 105.

7 Le Royaume de ce monde d’Alejo Carpentier (1949) est un roman historique dont les événements se passent en Haïti à l’époque de la révolution sur fond de vodou et de réalisme merveilleux comme une donnée principale du terroir à travers le regard de Ti Noël. Le roman comme le prologue illustrent le concept de « real-maravilloso ».

8 Jean Price-Mars, De Saint-Domingue à Haïti, p. 102.

9 Booker Tagliafero Washington est né esclave en 1856 en Virginie dans une plantation du comté de Franklin. Après l’abolition de l’esclavage et la guerre de Sécession, il travailla comme mineur. Il fut nommé directeur de l’École normale de Tuskegee en 1881.

10 Jaques Roumain, Les Gouverneurs de la rosée, Fort de France, librairie Désormeaux, 1977, p. 53.

11 Ibid., p. 97.

12 Ce choix est lisible dans les œuvres de certains auteurs latino qui mettent en avant l’importance de l’héritage comme fondement de l’identité. Jorge Amado met en fiction l’univers de Salvador de Bahia comme dans Pais do Carnaval (1931). Il décrit – dans O Sumiço da Santa : um historia de fétiçaria, Rio de Janeiro, Editora Record, 1988, p. 21 – Salvador comme « la capitale générale de l’Afrique dans l’orient du monde ».

13 René Depestre, Rage de vivre. Œuvres poétiques complètes, p. 183.

14 Ibid., p. 183 sqq.

15 Lucien Malson, Histoire du Jazz et de la musique afro-américaine, p. 26.

16 Honoré Mobonda, « Les joutes musicales dominicales de Congo Square ou devoir délibéré de mémoire ? », p. 120.

17 Ibid., p. 123.

18 Ibid., p. 120.

19 Elisabetta Maino, « Axé Africa : transtemporalités africaines de la créativité musicale à Salvador de Bahia (Brésil) », p. 148.

20 Olivier Sangi Lutondo, « Ciyanda cokwe et samba brésilienne : lecture comparative de la parenté », p. 202.

21 Ibid., p. 203.

22 Ibid., p. 204.

23 Notons l’existence en Uruguay d’un candombe datant du XXe siècle qui, après avoir été interdit de la scène publique, a prospéré sur les planches et dans les salles en ballet comme, en 1963, avec Evocación del candombe sous la direction de Francisco Merino au teatro Negro, Del candombe al tango (1972), Candombes y sonrisas (1980) ou encore la Misa cancombe de Gilberto Silva en 1984.

24 Elisabetta Maino, « Axé Africa : transtemporalités africaines de la créativité musicale à Salvador de Bahia (Brésil) », p. 156.

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Per citare questo articolo

Riferimento cartaceo

Lobna Mestaoui, «L’héritage africain à travers le prisme américain»Babel, 28 | 2013, 49-64.

Riferimento elettronico

Lobna Mestaoui, «L’héritage africain à travers le prisme américain»Babel [Online], 28 | 2013, Messo online il 01 décembre 2014, consultato il 14 décembre 2024. URL: http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/babel/3459; DOI: https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/babel.3459

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Autore

Lobna Mestaoui

Université Paris XII - Groupe de Recherches et Études en Littératures Francophones de l’Université Paris-Est-Créteil EA LIS 4395

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