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Dossier
I/ Échos contemporains : la Révolution française, l’Europe et le monde (1789-1830)

« Cette heureuse contrée deviendra désormais une terre de promission » : la Révolution française écrite par des témoins britanniques à Paris

“This happy country will henceforth become a promised land”: the French Revolution described by British observers in Paris
Rachel Rogers

Résumés

Plusieurs hommes et femmes britanniques, inscrits dans des mouvements pour la réforme parlementaire en Grande-Bretagne, s’installèrent à Paris après la chute de la Bastille en juillet 1789 afin d’observer de plus près les événements de la Révolution française et d’y participer. Pour certains, c’est la chute de la monarchie le 10 août 1792 qui devient le moteur de leur engagement politique sur le sol français. Cet article a pour but de replacer les écrits des membres de la communauté britannique à Paris sur la Révolution dans leur contexte diplomatique et politique. Il se penche tout d’abord sur la réception de la Révolution française en Grande-Bretagne, avant de s’intéresser à la naissance du club politique qui rassembla les Britanniques et Irlandais partisans de la Révolution française et domiciliés à Paris et qui sera connu sous le nom de la « Société des amis des droits de l’homme ». Il s’attache ensuite à faire l’état des lieux des contributions des Britanniques au débat sur la rédaction d’une nouvelle constitution républicaine entre octobre 1792 et février 1793, en portant une attention particulière à la façon dont ces derniers appréhendèrent l’idée d’un gouvernement fondé sur la souveraineté populaire. Enfin, il jette un éclairage sur la façon dont ces auteurs – témoins oculaires des événements – appréhendèrent la Révolution et dont ils tentèrent, en insistant sur la véracité de leurs témoignages, d’infléchir l’opinion nationale dans leur pays natal.

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Texte intégral

L’auteur souhaite remercier Myriam-Isabelle Ducrocq et Fabrice Bensimon de leur aide précieuse en ce qui concerne la relecture du texte.

  • 1 Pour une étude des rapprochements entre les mouvements britanniques et irlandais pour la réforme p (...)
  • 2 Mathieu Ferradou, dans son article « Histoire d’un “festin patriotique” à l’hôtel White (18 novemb (...)

1La Société des amis des droits de l’homme, le club politique qui rassembla les Britanniques et Irlandais partisans de la Révolution française et domiciliés à Paris, fut fondée de manière officieuse en novembre 1792, peu après la déclaration de la République, et au moment de la victoire de l’armée républicaine à Jemappes1. Parmi les membres de la Société, qui se déclara auprès des autorités municipales en janvier 1793, figurent des Britanniques qui avaient fui au moment où le gouvernement de William Pitt le Jeune durcissait sa politique envers ceux qui s’étaient engagés au sein de mouvements pour la réforme parlementaire. S’y trouvent aussi des Irlandais, catholiques et protestants, résidant à Paris, dont certains participeront à la rébellion irlandaise en 1798. Certains de ces Irlandais se servent de cette expérience associative et politique pour faire évoluer leurs conceptions du républicanisme, idées qui seront motrices dans la rébellion de 17982. Au sein de ce club, qui avait pour lieu de rassemblement l’Hôtel de White, situé passage des Petits-Pères, près du Palais-Royal, se trouvaient également des représentants des sociétés pour la réforme, des entrepreneurs, des industriels, des journalistes ainsi que des éditeurs radicaux et des libraires exerçant leur métier en France. Si dans leur pays d’origine ils furent, à partir de 1792, ciblés par une politique visant à étouffer toute expression d’opposition à la Constitution établie, en France, à partir de février 1793, ils furent également amenés à se défendre contre des accusations de contre-révolution du fait même de leur nationalité, du fait de leur présence sur le territoire français, ainsi que de leurs affiliations politiques au moment où éclatait la guerre avec la Grande-Bretagne.

2Cet article a pour but de replacer les écrits des membres de la communauté britannique à Paris dans leur contexte diplomatique et politique. Il se penche tout d’abord sur la réception de la Révolution française en Grande-Bretagne, avant de s’intéresser à la naissance de ce club international à Paris. Il s’attache ensuite à faire l’état des lieux des contributions des Britanniques au débat sur la rédaction d’une nouvelle constitution républicaine entre octobre 1792 et février 1793, avec une attention particulière portée à la façon dont ces derniers appréhendèrent l’idée d’un gouvernement fondé sur la souveraineté populaire. Enfin, il jette un éclairage sur la façon dont ces auteurs – témoins oculaires des événements – appréhendèrent la Révolution et dont ils tentèrent désespérément, en insistant sur la véracité de leurs témoignages, d’infléchir l’opinion nationale dans leur pays natal.

La réception de la Révolution française de 1789 en Grande-Bretagne

  • 3 Sur ces deux sociétés et leurs principaux porte-paroles, Richard Price et John Cartwright, voir l’ (...)
  • 4 Pour de plus amples informations sur ce débat pamphlétaire, voir A. Goodrich, Debating England’s A (...)

3La Révolution de 1789 fut très largement approuvée à la fois par les whigs en Grande-Bretagne et par les membres des sociétés pour la réforme parlementaire telles que la Revolution Society et la Society for Constitutional Information3. Cependant, en novembre 1790, lors de la publication de son pamphlet, Reflections on the Revolution in France, l’homme politique whig Edmund Burke prit un point de vue opposé. En ne retenant que les théories abstraites des Lumières, la Révolution constituait, selon lui, un refus de la sagesse qui découle des leçons tirées de la lente accumulation de l’histoire. Bien qu’il ait accordé son soutien aux colons américains en lutte contre la Couronne en 1776, Burke voyait en la Révolution française la manifestation d’une conception de la liberté en totale opposition avec l’idée de stabilité constitutionnelle. La publication de son texte, écrit en réponse à l’allocution de Richard Price, A Discourse on the Love of Our Country, prononcée lors de la célébration annuelle de la Glorieuse Révolution le 5 novembre 1789, déclencha un débat pamphlétaire foisonnant, entre ceux qui soutenaient une interprétation rationnelle de la fondation d’un gouvernement – parmi lesquels Mary Wollstonecraft, Thomas Paine et William Godwin – et ceux, comme William Frend ou William Playfair, qui regrettaient l’avènement d’une révolution rapide et brutale en rupture avec la conception plus modérée d’une société perfectible à développement constant. Ce débat anima la scène publique britannique entre 1790 et 1795, année des fameux Gagging Acts, deux lois qui avaient pour but de restreindre considérablement les possibilités de rassemblement et de débat public4.

4Les événements survenus en France à la fin de l’année 1792 provoquèrent un changement de politique au sein du gouvernement britannique mené par William Pitt le Jeune. L’entrée en guerre contre l’Autriche et la Prusse, l’invasion du jardin des Tuileries par les milices parisiennes, les massacres dans les prisons de Paris en septembre, de même que la décision prise par la Convention nationale d’instaurer une République, ou encore le procès du roi, choquèrent à la fois les autorités, les whigs et un public britannique qui suivaient la Révolution de loin à travers le filtre de la presse. Le gouvernement britannique tenta d’éradiquer toute expression de désaccord avec le modèle britannique tout en freinant la circulation d’idées radicales, en poursuivant les imprimeurs, les éditeurs ainsi que les auteurs d’écrits radicaux qui avaient essayé de faire connaître leurs idées auprès d’un public plus large et socialement plus diversifié. Le roi promulgua en mai 1792 un décret nommé Royal Proclamation Against Seditious Writings visant à supprimer la publication et surtout la diffusion des écrits jugés séditieux.

  • 5 « It is time that nations should be rational, and not be governed like animals, for the pleasure o (...)
  • 6 « There is no occasion for apprehensions from Mr. Paine’s advice on the score of Economy and Refor (...)
  • 7 D’autres réformateurs britanniques comme Thomas Spence, James Ridgeway ou Daniel Isaac Eaton restè (...)

5Le pamphlet Rights of Man, écrit par Thomas Paine – pamphlet qui, dans sa première partie, critique la monarchie héréditaire, et dans sa seconde partie, publiée en février 1792, évoque les moyens d’une refonte du système représentatif britannique ainsi que des mesures importantes de changement économique et de répartition des richesses –, fut proscrit selon les termes de la Royal Proclamation, et ceux parmi les éditeurs et les imprimeurs qui tentèrent de le faire imprimer ou de faciliter sa diffusion (Thomas Spence, Daniel Isaac Eaton, James Rideway par exemple) furent aussi poursuivis en justice. Érigeant le système représentatif américain comme modèle à imiter, Paine se penche, dans la deuxième partie de Rights of Man, sur la réorganisation politique d’un pays selon des principes représentatifs, et fondée sur une constitution rédigée et validée par le peuple. Il s’attache ensuite, dans un chapitre intitulé « Ways and Means », à mettre en exergue les avantages du libre-échange et la nécessité d’une refonte du système des « corporations », modèle de gouvernement municipal qui concentre le pouvoir politique dans les mains d’une oligarchie locale. Il dénonce la stratégie fiscale de l’aristocratie qui consiste à éviter les impôts sur la fortune et sur la propriété terrienne tout en créant des impôts sur des produits de consommation payés par les plus pauvres. L’augmentation excessive des impôts publics depuis 1688 est, selon lui, un exemple parmi d’autres de l’exploitation injuste du peuple par ceux qui détiennent le pouvoir politique et économique du pays. Il en conclut : « Il est temps que les nations deviennent rationnelles et ne soient plus gouvernées comme des animaux, pour le seul plaisir de leurs cavaliers. »5 La diffusion très large de Rights of Man provoqua le retrait progressif du parti whig de la scène radicale. Si tout d’abord les « New Whigs » de la Society of the Friends of the People apportèrent leur soutien aux sociétés pour la réforme, ils exprimèrent ensuite leurs réserves quant aux idées exprimées par Paine sur la réorganisation politique et économique du pays. Une telle réticence fut dénoncée par l’éditeur radical Sampson Perry : « Il n’y a pas de raison de craindre les conseils de M. Paine en ce qui concerne l’économie et la réforme »6. D’autres auteurs et éditeurs furent condamnés, après leur refus de renoncer à un programme de réforme constitutionnelle. Sampson Perry, quant à lui, fut condamné pour diffamation à maintes reprises entre 1791 et 1792. Comme Thomas Paine, il quitta la Grande-Bretagne à la fin de 1792, à l’instar d’autres compatriotes issus de la classe moyenne – écrivains, journalistes, médecins, pharmaciens et avocats – menacés de prison ou proscrits d’une sphère publique et artistique qui se réduisait peu à peu7.

La fondation de la Société des amis des droits de l’homme à Paris

6À ce tournant de la Révolution, au moment où la politique intérieure se durcissait envers ceux qui étaient considérés comme ses détracteurs les plus virulents, des Britanniques fondèrent à Paris une société prorévolutionnaire qui, dans sa déclaration auprès des autorités municipales datée de janvier 1793, devait prendre le nom de « Société des amis des droits de l’homme ». Le Moniteur universel avait annoncé le 26 novembre 1792 une première réunion entre étrangers soutenant l’élan républicain de la Révolution :

  • 8 Le Moniteur universel, vol. XIV, lundi 26 novembre 1792, p. 562.

De Paris – Les Anglais demeurant à Paris se sont assemblés, il y a quelques jours, à l’Hôtel de Withes [sic], passage des Petits-Pères, pour célébrer les victoires des armées de la république française et le triomphe de la liberté. Des étrangers de différentes contrées de l’Europe ont été invités à cette fête, et ont pris part à la joie qui transportait l’assemblée. Ainsi s’étendent chaque jour les liens de la fraternité universelle à laquelle les Français ont invité tous les peuples, et qu’ils veulent établir au prix de leur sang.8

  • 9 AN C 11/278/40, « Adresse des Anglais, des Ecossais et des Irlandais résidans et domiciliés à Pari (...)

7À la suite de ce rassemblement, une déclaration de soutien à la République fut rédigée puis signée par cinquante personnes présentes, nommées en « commission » par la Société pour représenter la position collective de ses membres9. Le 7 janvier 1793, Le Moniteur universel fit suite à la première annonce, cette fois en précisant le nom et le lieu de rencontre de cette société nouvellement constituée :

  • 10 Le Moniteur universel, vol. XV, lundi 7 janvier 1793, p. 58.

Du 5 janvier : Des étrangers, pour la plupart Anglais, Ecossais et Irlandais, résidant à Paris, se sont présentés au secrétariat de la municipalité, et ont déclaré, suivant la loi, qu’ils se réuniront tous les dimanches et jeudis, sous le nom de Société des Amis des Droits de l’Homme, à l’Hôtel anglais de White, no. 7, passage des Petits-Pères.10

  • 11 Ceux qui adhérèrent au club parisien et qui furent également présents aux réunions de la Society f (...)
  • 12 Sur les liens entre Thomas Paine et la France révolutionnaire, voir l’ouvrage de C. Lounissi, Thom (...)
  • 13 La Société mit en place un système de présidence tournante, sans hiérarchie stricte et ouvert à la (...)
  • 14 Robert Rayment met en avant sa contribution au « projet de secourir les veuves et les orphelins de (...)

8Le club, qui se réunissait alors toutes les semaines, rassemblait à la fois des personnes connues dans le monde du radicalisme britannique et d’autres membres plus marginaux des sociétés de réforme, ainsi que des adhérents qui conjuguaient occupation professionnelle et fascination pour la Révolution. Au moins treize membres furent aussi affiliés à la Society for Constitutional Information de Londres11. Si Thomas Paine fut un des membres phares de la communauté britannique à Paris, il ne fut pas l’instigateur des réunions à l’Hôtel de White12. Le noyau dur était constitué par l’imprimeur John Hurford Stone, l’éditeur Sampson Perry, l’auteur et poète Robert Merry, le pharmacien William Choppin, le journaliste John Oswald, ainsi que par l’aristocrate et révolutionnaire irlandais lord Edward Fitzgerald. L’avocat John Frost et le médecin gallois George Edwards s’investirent aussi au sein d’une société qui se voulait égalitaire, tant sur le plan organisationnel qu’idéologique13. Ce sont donc des individus issus des classes moyennes éduquées, des milieux artistiques ou intellectuels qui menèrent des actions de soutien à la Révolution – collecte d’argent pour les femmes et les enfants des victimes de la journée du 10 août par exemple – tout en commentant les événements pour un public britannique qu’ils considéraient comme sciemment trompé par la presse britannique14. Des auteurs comme Mary Wollstonecraft, Charlotte Smith et Helen Maria Williams, si rarement présentes aux réunions officielles, jouèrent néanmoins un rôle important dans le cercle des expatriés à Paris. Elles rédigèrent leurs propres témoignages sur la Révolution, contribuant ainsi au vif débat d’idées sur l’avenir de la Révolution et sur son impact sur le devenir des peuples d’Europe.

L’accueil des Britanniques en France, 1792-1793

9Les partisans étrangers de la Révolution furent accueillis en France dans un esprit de fraternité universelle. Certains, comme Thomas Paine, Joseph Priestley et David Williams, reçurent même le titre de « citoyen » français en récompense de leur soutien à la Révolution. Cet esprit international servait néanmoins un but diplomatique. Les Français en guerre contre l’Autriche monarchique devaient rechercher l’appui d’autres nations d’Europe. L’accueil fut alors chaleureux pour les étrangers radicaux qui arrivèrent en France au cours de l’année 1792. Sampson Perry chanta les louanges de la liberté française dans une rubrique publiée en janvier 1793 dans la Chronique du mois, rubrique qui annonça la publication imminente de son journal The Argus, ainsi que le soutien apporté à ses compatriotes, amis de la Révolution :

  • 15 La Chronique du mois ou Les Cahiers patriotiques, janvier 1793, p. 80. Le projet de publication co (...)

Samspon Perry, auteur d’un journal républicain, en Angleterre, The Argus of the People (La Sentinelle du Peuple) pour avoir défendu avec énergie les droits de l’homme, la révolution françoise, Horne-Tooke et Thomas Payne, son ami, n’a échappé que par sa fuite à des bourreaux. Perry et un autre écrivain anglois, Merry, célèbre par une pièce de théâtre, des vers républicains, et autres écrits philosophiques que nous ferons connoître, sont venus trouver de francs amis, chez les Directeurs de l’imprimerie du Cercle Social, qui vont publier en France, le journal persécuté, The Argus of the People, la Société angloise des Droits de l’Homme, et Thomas Payne et autres y contribueront avec zèle. Amis de la liberté vous leur devez secours, alliance et fraternité.15

10La fondation de la Société fut bien accueillie par la presse girondine qui appela les Français à faire preuve de solidarité auprès des exilés britanniques. En effet, un grand nombre de Britanniques militant à Paris nouèrent des relations étroites avec les membres du gouvernement révolutionnaire. Thomas Paine accepta un poste de conseiller auprès du Comité de la Constitution en octobre 1792. Pour sa part, Mary Wollstonecraft aida à rédiger un projet pour la réforme de l’éducation ; John Hurford Stone et Nicholas Madgett proposèrent leurs services en matière de traduction. D’autres tentèrent de mener à bien des projets de publication avec l’aide des révolutionnaires ou soumirent leurs avis sur le projet d’une nouvelle constitution républicaine à la Convention nationale.

  • 16 Voir M. Rapport, Nationality and Citizenship in Revolutionary France: The Treatment of Foreigners, (...)
  • 17 Pour une étude de ce changement de discours officiel, voir S. Wahnich et M. Bélissa, « Les crimes (...)
  • 18 Robert Rayment et sir Robert Smith, membres actifs de la Société britannique, se sont distingués p (...)

11Cependant, ainsi que l’ont noté plusieurs historiens dont Sophie Wahnich et Mike Rapport, au cours de l’année 1793, cette relation amicale et fructueuse entre les résidents britanniques et les membres du gouvernement révolutionnaire se détériora en raison des changements politiques et diplomatiques16. La France fut menacée de tous côtés par l’avancée des armées royalistes, soutenues par les émigrés français. De plus, la sentence de mort prononcée par la Convention à l’encontre de Louis XVI provoqua la colère des pays royalistes. Au lendemain de l’exécution du roi (le 21 janvier 1793), la France déclara la guerre à la Grande-Bretagne qui s’était associée aux pouvoirs contre-révolutionnaires. Cet événement eut de profondes répercussions sur la vie des étrangers à Paris. Si, en novembre 1792, la Convention proposait l’aide de la France aux peuples en lutte contre le joug de la tyrannie monarchique, y compris le peuple britannique, à la fin de l’année 1793, celui-ci fut rendu complice des crimes liberticides de son gouvernement17. Dans le nouveau contexte marqué par la guerre et par le tournant de la politique intérieure britannique, les étrangers à Paris, malgré leur passé prorévolutionnaire et leur attachement aux principes de la Révolution, eurent désormais à répondre aux accusations de vouloir préparer la contre-révolution18. Certains, comme Hurford Stone, furent accusés d’être les espions de Pitt et de son gouvernement, et tous ceux qui restèrent après la prise de Toulon par les Britanniques en août 1793 furent soumis aux conditions strictes de la Loi des suspects du 17 septembre. Cette loi mena à l’arrestation de tous les Britanniques résidant à Paris, quelles que soient leurs convictions politiques. Même après avoir passé plusieurs mois dans des prisons improvisées, certains Britanniques demeurèrent fidèles à l’esprit révolutionnaire. D’autres, comme David Williams et Henry Yorke, abandonnèrent l’enthousiasme de 1792 et se retirèrent de la scène publique. Sans pour autant devenir des « loyalistes », ils renouèrent avec une tradition de réforme ancrée dans un langage et des symboles nationaux, loin d’une conception universelle de la liberté fondée sur les droits de l’homme désormais associée à la France. 

Écrits politiques sur la nouvelle Constitution en France, 1792-1793

  • 19 Espion à Paris, le capitaine George Monro, écrivant à lord Grenville au ministère des Affaires int (...)

12C’est leur opposition farouche à ce qu’ils considéraient comme un modèle britannique en faillite, pourtant porté aux nues par ses défenseurs, qui rassembla les Britanniques prorévolutionnaires à Paris. C’est également cette opposition qui nourrit leurs écrits en faveur de la nouvelle Constitution républicaine en voie de s’établir en France. Cependant, les idées qu’ils défendirent et les propositions de renouvellement politique faites au tournant de 1793 se distinguèrent par leur hétérogénéité. Leurs réactions face aux manifestations de violence dans les prisons de Paris en septembre 1792 et lors de l’exécution du roi en janvier 1793 divergèrent, de même que leurs positions sur le degré de souveraineté populaire souhaité au sein d’un gouvernement démocratique, débat qui mena à une confrontation à la fois verbale et physique entre les membres de la Société19. Cependant, malgré cette diversité idéologique et politique au sein de la Société, on constate qu’un grand nombre de ses membres exprime une préférence pour un gouvernement fondé sur le principe de la souveraineté populaire et envisage un rôle pour le peuple sur la scène publique. Deux textes se distinguèrent par leur volonté de réserver une place prépondérante pour le peuple dans la République nouvellement constituée : ceux de John Oswald et celui de Robert Merry, deux membres actifs de la Société des amis des droits de l’homme.

  • 20 Sur les presses anglaises à Paris et le rôle que jouait John Hurford Stone, voir M. B. Stern, « Th (...)
  • 21 J. Oswald, Le gouvernement du peuple, ou Plan de constitution pour la République universelle, Pari (...)

13En 1792, John Oswald publia chez l’imprimeur anglais John Hurford Stone The Government of the People, or a Sketch of a Constitution for the Universal Commonwealth. Oswald publia également une version française de son texte en 1793, l’année de sa mort en Vendée, chez l’Imprimerie des Révolutions de Paris20. Dans ce tract, Oswald met en avant un modèle politique qui laisserait une place essentielle aux citoyens – le peuple souverain exerçant sa responsabilité d’assemblée, de délibération et de décision – dans la création des lois. Il se montre sceptique quant au modèle de gouvernement représentatif tant vanté par ceux qu’il appelle les « charlatans politiques de l’Angleterre », modèle qu’il décrit comme le « droit de voter pour se donner des maîtres »21. Il se livre à une critique acerbe et cinglante d’un système politique où les représentants sont les seuls détenteurs du pouvoir de décision :

  • 22 Ibid., p. 5.

J’avoue que je n’ai jamais pu réfléchir sur ce système de représentation sans m’étonner de la crédulité, je dirois presque la stupidité avec laquelle l’esprit humain avale les absurdités les plus palpables. Si un homme proposoit sérieusement que la nation pissât par procuration, on le traiteroit de fou ; et cependant penser par procuration est une proposition que l’on entend, non-seulement sans s’étonner, mais qu’on reçoit avec enthousiasme.22

  • 23 Ibid., p. 10.
  • 24 Ibid., p. 11.
  • 25 Ibid., p. 16.

14Le système représentatif se résume alors à l’abdication totale de la responsabilité de chacun de penser pour soi-même, jouant ainsi le jeu de la classe dirigeante et mettant en péril la réalisation de la volonté du peuple. Se penchant sur la situation en France, Oswald dénonce alors « les jongleurs » de l’assemblée constituante qui ont voulu établir « une parade de gouvernement au nom du peuple, qui n’y devoit point participer »23. Il envisage au contraire un système qui mobilise l’ensemble de la nation dans des assemblées primaires convoquées au cœur des places publiques, en lien direct avec une Assemblée nationale, et qui se prononceraient après avoir examiné les projets de loi. Ainsi « toute la masse d’intelligence qui existe dans la nation s’exerceroit au même moment sur le même sujet »24. Il termine son texte en évoquant la façon dont l’administration du gouvernement sera organisée, fondée sur le scrutin populaire en assemblées primaires et des élections fréquentes (allant de trois mois pour les assemblées primaires à un an pour l’Assemblée nationale) pour assurer que les élus de la nation « auront soutenu à plusieurs reprises l’épreuve de l’opinion publique »25.

  • 26 R. Merry, Réflexions politiques sur la nouvelle Constitution qui se prépare en France, adressées à (...)
  • 27 Ibid., p. 7.
  • 28 Ibid., p. 8.
  • 29 Loc. cit.

15Poète et partisan de la Révolution, Robert Merry est l’auteur d’un texte écrit en français, et publié probablement à la fin de l’année 179226. Sous le titre de Réflexions politiques sur la nouvelle Constitution qui se prépare en France, adressées à la République, Merry met en avant sa vision d’une république exempte des failles du système représentatif britannique. Son texte, de la même longueur que celui d’Oswald, fait écho à ce dernier lorsqu’il dénonce le système représentatif, même corrigé par une extension du droit de vote. Il met en avant le rôle actif des citoyens réunis en assemblées primaires qui pourraient émettre « individuellement leur véto ou leur approbation sur chacun de ces décrets »27. Merry, comme Oswald, envisage une citoyenneté dynamique et une Assemblée nationale régie par des élections fréquentes : « par la raison que plus souvent une nation entière est mise en action, plus la liberté publique est en sûreté »28. Les échos entre les deux textes sont frappants tant en ce qui concerne l’accent mis sur le rôle des assemblées primaires que dans le constat qu’« aucun homme ne peut déléguer à un autre le droit de penser pour lui »29. Il est fort probable alors que les deux hommes, qui faisaient partie de l’aile la plus radicale de la Société à Paris, travaillèrent ensemble à la rédaction de leurs propositions dans le cadre des rassemblements à l’Hôtel de White.  

  • 30 Ibid., p. 18.

16Alors qu’Oswald se cantonnait à la question de la représentation et à celle du fonctionnement de l’administration, Merry se pencha sur d’autres sujets, comme le rejet de la nécessité d’une armée permanente, les dangers d’un pouvoir exécutif trop puissant, la place essentielle d’une presse libre et l’importance d’abolir la peine de mort dans une société éclairée. Quant au progrès inexorable de la liberté, il prédit que celle-ci coulera aux quatre coins du globe tel un « fleuve bienfaisant »30. En ce sens, Merry reprend les thèmes de Richard Price, abordés dans son Discours de 1789 qui donne à la Révolution française une portée universelle.

17À l’inverse de Merry et d’Oswald, qui se montraient réticents au principe du gouvernement représentatif, même élu au scrutin élargi, et appelaient à une plus grande place pour la participation populaire sur la scène publique, Thomas Paine chanta ses louanges. Lui qui avait côtoyé les révolutionnaires américains au cours des années 1770 et 1780, et qui avait érigé le gouvernement de la nouvelle République américaine comme exemple dans Rights of Man, estimait qu’un système représentatif était le remède nécessaire au gouvernement « héréditaire ».

  • 31 La proposition de Joel Barlow a été publiée par Joseph Johnson en 1792, puis traduite en français (...)

18Le citoyen américain Joel Barlow ainsi que les Gallois David Williams et George Edwards contribuèrent également au débat sur la nouvelle Constitution. Les propositions de Barlow et de Williams sont, quant à elles, moins théoriques, et ancrées dans le débat sur la meilleure façon d’améliorer la Constitution monarchique de 179131. Enfin, George Edwards, le moins connu des militants britanniques à contribuer au débat, proposait un système pour la régénération totale de la société, système conçu pour la Grande-Bretagne mais applicable, à ses yeux, à la France. En effet, si ces auteurs – exception faite de Barlow – participèrent au débat public sur le gouvernement républicain idéal, leurs propos constituèrent souvent bien davantage une dénonciation de la vie politique britannique qu’un véritable modèle pour la République en devenir.

Témoignages sur la Révolution pour un public britannique

  • 32 J. G. Alger, Englishmen in the French Revolution, Londres, S. Low, Marston, Searle and Rivington, (...)
  • 33 T. C. Rickman, The Life of Thomas Paine: Author of Common Sense, Rights of Man, Age of Reason, Let (...)
  • 34 Le manuscrit des notes fragmentaires rédigées par J. Barlow en vue d’écrire une histoire de la Rév (...)

19La situation précaire des Britanniques à Paris après 1793 entraîna souvent leur retour vers la Grande-Bretagne. Certains restèrent toutefois en France, plus convaincus que jamais qu’il leur fallait dépasser les contradictions inhérentes à la mise en œuvre des principes de la Révolution, afin que l’esprit de cette dernière demeure un exemple pour l’humanité et soit moteur de progrès en Europe. Toutefois, comme le note John Alger dans son ouvrage Englishmen in the French Revolution, très peu de témoins oculaires étrangers publièrent des réflexions sur leurs expériences en France32. Un manuscrit de Thomas Paine ne survécut pas au passage de son auteur en prison, même si, selon son biographe qui fut aussi son contemporain, Thomas Clio Rickman, l’historien Edward Gibbon tenta de le récupérer des années plus tard33. Joel Barlow ne transforma jamais ses notes fragmentaires en un récit complet de la Révolution34 et Mary Wollstonecraft ne parvint pas à publier les volumes suivants de son histoire de la Révolution qu’elle avait annoncés dans la préface de An Historical and Moral View of the Origins and Progress of the French Revolution (1794).

  • 35 « Of the state of things here, and the decree against the English I will not speak », M. Wollstone (...)
  • 36 « I have just sent off great part of my M.S. which Miss William would fain have had [m]e burn, fol (...)
  • 37 D. Worrall, Theatric Revolution: Drama, Censorship, and Romantic Period Subcultures, 1773-1832, Ox (...)

20De plus, les mesures prises contre les étrangers à Paris informèrent les récits de la Révolution que firent les Britanniques pour leurs proches restés au pays. Si, après la prise de la Bastille, il était toujours possible d’envoyer outre-Manche des lettres contenant des témoignages sur les événements, le contexte du début de la guerre entre la Grande-Bretagne et la France restreignit considérablement toute possibilité de communication. Des membres de la communauté finirent par ne plus transmettre que des bribes d’informations liées à leur commerce ou à leurs affaires familiales. Toute question d’ordre politique fut évacuée, car les épistoliers savaient que leur correspondance était surveillée : « De la situation ici, et du décret contre les Anglais, je ne parlerai point », écrit Mary Wollstonecraft à Ruth Barlow en juillet 1794, préférant éviter tout propos en rapport avec le décret des 15 et 16 avril 1794 qui interdisait la participation des étrangers dans des clubs politiques et exigeait le départ des étrangers de la ville de Paris et de toute ville portuaire35. Pour certains, face à la menace d’une probable incarcération, la nécessité de détruire des manuscrits s’imposait. Ce fut le cas pour Thomas Paine et Helen Maria Williams, qui se débarrassèrent de leurs notes pour éviter d’éventuelles représailles. Dans une lettre destinée à sa sœur Everina, Mary Wollstonecraft lui fit part de sa détermination à présenter son texte à son éditeur, malgré les craintes exprimées par son amie Helen Maria Williams quant à la sagesse de cette démarche : « Je viens d’envoyer la majeure partie de mon manuscrit – Mlle Williams aurait préféré que je le brûle, suivant son exemple. Et, pour être tout à fait franche, ma vie aurait été en danger si on l’avait trouvé »36. L’historien David Worrall note ainsi la préférence croissante pour l’oralité au détriment de l’écrit pendant les années révolutionnaires37.

  • 38 « From the very beginning, observers rushed to publish their accounts, as if writing down the even (...)

21Au-delà du contexte diplomatique, le peu de matériau fourni par les Britanniques peut s’expliquer par la paralysie ou le désarroi qu’ils ressentirent face aux événements dont ils furent les témoins privilégiés. Sampson Perry, Mary Wollstonecraft, Joel Barlow et Robert Merry décrivirent le bouleversement que provoqua la Révolution en ce qui concerne la perception du temps et l’idée d’un déroulement lent et progressif de l’histoire. Ils étaient conscients de la rupture, temporelle, philosophique et morale, que la Révolution avait entraînée, mais, ainsi que le résume Lynn Hunt, ils n’avaient pas pour autant les mots pour la décrire de manière cohérente : « Dès le début, des témoins se sont empressés de publier leurs observations, comme si le fait d’écrire les événements pouvait leur donner une cohérence qui leur faisait intrinsèquement défaut. »38

22C’est pourquoi les écrits produits par les observateurs prirent souvent la forme d’esquisses ou même, dans le cas de Barlow, de bribes de notes, insistant non pas sur une capacité de tout dire, mais sur le caractère partiel, subjectif et immédiat de leurs commentaires. Refusant toute prétention à l’histoire totale ou omnisciente, ils préféraient invoquer leur proximité spatiale avec les événements comme preuve de l’utilité et de l’authenticité de leurs écrits, à défaut de leur exhaustivité ou de leur originalité. Témoins directs de la Révolution, ils se refusèrent pourtant à l’analyser. En effet, ces auteurs-spectateurs étaient conscients qu’il reviendrait aux générations futures de déchiffrer la Révolution et de lui donner son sens. C’est pourquoi ils décrivirent principalement les événements vécus au travers des perceptions physiques et psychiques qu’ils avaient provoquées.

  • 39 A. Boime, « The sketch and caricature as metaphors for the French Revolution », Zeitschrift für Ku (...)

23Le choix de l’esquisse, comme l’a montré l’historien Albert Boime, est important. Le fait de proposer un texte inachevé plutôt qu’une œuvre complète avait aussi une signification politique et idéologique. À l’inverse du tableau peint par un grand maître, admiré pour son caractère achevé, une esquisse, dans le domaine de l’art, est une façon improvisée et rapide de saisir un objet, utilisant très peu de détails et faisant appel à l’imagination de celui qui le regarde. Comme le note Albert Boime, les erreurs sont acceptées, elles font même partie de l’œuvre ; car, si la peinture concerne avant tout les grands maîtres, l’esquisse est une forme ouverte aux amateurs, pour laquelle aucune connaissance, aucune culture picturale préalable ne sont requises. En choisissant des modes de représentation plus spontanés et bruts, les témoins de la Révolution mettaient en avant l’importance de l’expérimentation et de l’innovation, tout en rejetant la nécessité de respecter les acquis des siècles précédents dans la fondation d’une société idéale39. Pour celles et ceux qui avaient soutenu la Révolution, la rédaction d’un texte fragmentaire, libéré du carcan d’un plan, reflétait à merveille la constitution d’un pays lui-même en plein changement. Selon eux, un nouvel ordre ne pouvait émerger que si l’on se débarrassait du poids de l’histoire, une histoire qui empêchait toute tentative de renouveau et perpétuait l’ordre existant. Cependant, si les témoins britanniques refusèrent toute possibilité d’une histoire omnisciente de la Révolution, ils revendiquèrent néanmoins leur statut de témoins afin d’insister sur l’utilité ainsi que la véracité de leurs écrits face aux critiques publiées dans la presse britannique. Ces esquisses contribuèrent néanmoins à la recherche d’un modèle constitutionnel et politique idéal, qui viendrait remplacer les structures anciennes, remises en cause par l’élan révolutionnaire.

  • 40 R. Merry [?], A Circumstantial History of the Transactions at Paris on the Tenth of August Plainly (...)
  • 41 S. Perry, An Historical Sketch of the French Revolution; Commencing with its Predisposing Causes, (...)

24Un petit nombre d’écrits sur la Révolution furent publiés entre 1792 et 1796. Robert Merry fut le probable auteur de A Circumstantial History of the Transactions at Paris on the Tenth of August, un compte rendu de la journée du 10 août, publié à Londres à la fin de 179240. Mary Wollstoncraft publia une histoire des premiers mois de la Révolution en 1794, Helen Maria Williams écrit une série de huit volumes de lettres entre 1790 et 1796 et enfin, en 1796, Sampson Perry publia An Historical Sketch of the French Revolution, en deux tomes, après son retour en Grande-Bretagne en 179541. Perry et Williams furent incarcérés pendant la Terreur, Merry retourna en Grande-Bretagne en juin 1793 avant d’émigrer vers les États-Unis, et Wollstonecraft, à l’abri des effets de la loi de septembre 1793, car vivant en couple avec l’entrepreneur américain Gilbert Imlay, s’éloigna du centre de Paris pendant cette même année.

  • 42 « Nothing amuses us more than reading your news-papers, descriptive of the horrors of Paris. » T.  (...)
  • 43 « In every crisis of the revolution the people have been pushed to some lamentable or fatal excess (...)
  • 44 H. M. Williams, Souvenirs de la Révolution française, Paris, Dondey-Dupré père et fils, 1827, p. (...)

25L’objectif principal de ces écrits, à l’unique exception de l’œuvre de Wollstonecraft, dont le but était explicitement historique et philosophique, consistait à corriger des reportages parus dans la presse britannique. Les auteurs endossèrent le rôle d’observateurs animés par un esprit de liberté, à l’inverse de ceux qui, en raison de leur hostilité envers la République, faisaient des événements des comptes rendus inexacts. Il importait aussi, sinon de justifier certains événements – la prise des Tuileries en août 1792, les massacres de Septembre, l’exécution du roi, la Terreur –, dépeints dans la presse britannique comme la manifestation d’une violence déchaînée, du moins de les expliquer, de les remettre dans leur contexte et d’apporter les précisions nécessaires au public britannique. Écrivant à son frère à Londres, John Hurford Stone faisait part de sa stupéfaction face aux récits qui étaient faits des événements parisiens dans la presse britannique : « ll n’y a rien de plus amusant que de lire vos journaux qui décrivent les horreurs qui se passent à Paris. »42 Tout aussi important était le besoin de réhabiliter le peuple français – doué de franchise, de générosité et du sens de la justice – afin de montrer que les acteurs de la Révolution étaient des citoyens modèles. Ainsi, Sampson Perry, dans son tableau de la Révolution, n’eut de cesse de dégager le peuple de toute responsabilité dans le déclenchement de la violence, considérant au contraire que ce dernier avait agi sous une pression extrême, contre sa volonté : « À chaque crise dans la Révolution, on a poussé le peuple à commettre des excès regrettables ou mortels. »43 Selon Perry, la fureur du peuple était légitime et ses actions violentes provoquées par l’oppression ; sa vengeance n’était au contraire atténuée que par la clémence, l’humanité et la raison. L’œuvre de Helen Maria Williams fait toutefois entendre une voix dissonante : si elle reste admirative de la Révolution, elle est très critique vis-à-vis des excès qui caractérisent la période suivant la chute de la monarchie, décrivant les massacres de Septembre comme « le premier acte du régime de la terreur ». Elle ajoute : « ces massacres sont la honte de Paris, puisque son immense population, stupéfaite et glacée, les laissa faire »44. Le fait d’écrire leurs impressions permit aux témoins de réfléchir aux événements, de les replacer dans leur contexte et de tenter de comprendre ce qu’ils percevaient comme les contradictions à l’œuvre dans le processus révolutionnaire.

A Circumstantial History of the Transactions at Paris on the Tenth of August : réécriture de la journée du 10 août

26Un grand nombre de Britanniques à Paris furent présents lors du siège des Tuileries du 10 août 1792. Thomas Paine, Helen Maria Williams ainsi que Robert Merry témoignèrent des événements. Le recours à la force populaire qui caractérisa la journée du 10 août diminua le soutien apporté par les whigs réformateurs britanniques et certains radicaux plus modérés en Grande-Bretagne à la Révolution, car s’ils réclamaient la réforme des institutions parlementaires, ils n’allaient pas jusqu’à revendiquer une place plus importante pour le peuple dans le processus décisionnel. De nombreux pamphlets publiés outre-Manche mettaient l’accent sur la brutalité du peuple. Un des éléments fédérateurs des témoignages des radicaux résidant à Paris fut leur désir de corriger ces portraits outranciers, de rétablir la réputation du peuple, de rendre Louis XVI responsable des violences et même responsable de sa propre chute, celui-ci étant perçu comme irrésolu, faible et hypocrite. Il importait au contraire de montrer le peuple parisien comme un groupe composé d’individus réfléchis et justes, cherchant avant tout à obtenir la reconnaissance de leurs droits.

  • 45 « a particular account of the Rise, and also of the Fall of Despotism in Paris, on the 10th of Aug (...)

27En guise d’exemple, considérons A Circumstantial History of the Transactions at Paris on the Tenth of August, pamphlet publié de façon anonyme par les éditeurs militants H. D. Symonds, R. Thomson et R. Lyttlejohn en septembre 1792. Le 11 septembre, le journal britannique The Times annonça la publication d’« un compte rendu de l’Essor et aussi de la Chute du Despotisme à Paris, le 10 août »45 par l’auteur Robert Merry. Plusieurs pistes donnent à penser que Merry est le probable auteur de ce texte. Tout d’abord, c’était un écrivain connu des éditeurs ; ensuite, le descriptif paru dans The Times reprend une partie de la conclusion de son texte ; enfin, la façon dont il aborde les événements correspond en tout point aux opinions qu’il avait exprimées dans d’autres publications.

  • 46 Le journal, édité par Louis-Marie Prud’homme, compte parmi ses contributeurs Élysée Loustalot, Syl (...)
  • 47 « to hear the other side », R. Merry [?], A Circumstantial History of the Transactions at Paris…, (...)

28Le texte se divise en deux parties : une préface, dans laquelle l’auteur donne les raisons de sa prise de parole, suivie d’un compte rendu des événements. Le compte rendu est en fait une traduction annotée d’un reportage paru dans le journal Révolutions de Paris entre le 4 et le 11 septembre, journal dont les principaux contributeurs soutinrent l’élan populaire que représenta la journée du 10 août46. Cette information est donnée dans la préface, ainsi que les objectifs de l’auteur. À la suite des reportages critiques diffusés à Londres, il se dit motivé par le désir de permettre aux Britanniques d’« entendre l’autre côté »47 de l’histoire. Il répond directement aux textes publiés dans les journaux nationaux, textes orientés non pas par la volonté de comprendre les motivations du peuple, mais par celle de dénoncer ses exactions. Il fustige les reportages qui sont l’œuvre de journalistes ennemis de la liberté, et qui, malgré leur présence sur le sol français, n’ont pas su voir ce qui se déroulait devant leurs yeux.

  • 48 « The effects of a just and necessary self-defence on the part of the people », ibid., p. vii.

29Malgré l’objectif affiché de rétablir la vérité, Merry ne nie pas la réalité des violences perpétrées, préférant les considérer comme des actes de légitime défense de la part du peuple français48. C’est un argument mis en avant dans d’autres textes : si le peuple a eu recours à la violence, cela s’explique par l’incapacité du pouvoir en place à répondre de manière satisfaisante au désir de liberté. Le courage des Français est opposé à la faiblesse du roi et à la vénalité de la noblesse. Il accuse enfin le clergé et l’aristocratie de s’être alliés aux puissances étrangères pour précipiter la chute de la Révolution.

30Les enjeux de ce numéro de Révolutions de Paris – montrer la supériorité morale du peuple, condamner totalement les tentatives de réprimer les classes défavorisées, ériger le droit de résistance face à un tyran – trouvent un écho dans le texte de Merry. Il se contente de reproduire le texte, tout en y ajoutant quelques commentaires. La faute est celle de Louis XVI et de ses ministres hypocrites. La lâcheté et le manque de vertu des gardes suisses sont également mis en avant, car, selon le texte, ces derniers auraient visé des femmes et des enfants depuis leur position protégée à l’intérieur du palais. Ces crimes sont mis en opposition avec le courage des hommes et des femmes ordinaires. L’accent est mis sur l’organisation incomparable dont ils ont fait preuve, leur supériorité morale ainsi que leur capacité à prendre des décisions justes. En ne se livrant pas au pillage ni au vol, le peuple a fait preuve de modération et de générosité.

31Les notes et commentaires de Robert Merry, adossés à la traduction du texte paru dans Révolutions de Paris, confirment de manière décisive son point de vue. Il établit un contraste saisissant entre la vertu et la bonté des gens ordinaires et l’inhumanité du régime, allant jusqu’à suggérer que c’était l’intention des forces du roi de provoquer un soulèvement, car pendant une promenade dans les rues de Paris avant les affrontements, il n’avait pas remarqué le moindre signe de préparation.

  • 49 Ibid., p. v.
  • 50 Dans le numéro du Times où figurait l’annonce de la publication de ce texte se trouve une dénoncia (...)

32L’auteur évoque ainsi la détresse de ceux qui ont perdu des proches pendant la journée, leurs recherches désespérées parmi les corps gisant à terre, ainsi que le courage des gens venus s’occuper des blessés. Le pamphlet dénonce avec véhémence les reportages diffusés dans les journaux britanniques qui, selon Merry, s’efforcèrent de gommer tout élément permettant au public britannique de comprendre le comportement du peuple français49. C’est une défense de la conduite du peuple et une dénonciation ouverte du roi, ainsi que de ses gardes et de ses conseillers. En s’appuyant sur la version des faits parue dans Révolutions de Paris, l’auteur fait certes une lecture radicale des événements, mais se montre également capable de distinguer entre des sources jugées fiables et des sources qui avaient pour but de mettre en péril la Révolution. Merry, défenseur de la Révolution et partisan d’une solution républicaine, prend parti contre les rédacteurs du journal britannique The Times, et s’érige en témoin fiable du soulèvement du peuple français50.

Conclusion

33Les réactions des Britanniques face à l’avènement de la Première République semblent contradictoires et discordantes. Dans leurs écrits, ils conjuguèrent différents styles, registres, auteurs, sources et objectifs. Ces écrits, qui reflètent la multiplicité des points de vue qui existaient au sein de la Société des amis des droits de l’homme à ce tournant de la Révolution, permettent néanmoins de dégager quelques traits communs. Si certains restent réticents à l’idée d’accorder une place plus importante au peuple dans la nouvelle République, bon nombre de Britanniques résidant à Paris sont convaincus de la nécessité d’élargir le pouvoir politique au peuple et voient dans la Révolution française et l’expérience républicaine un espoir pour les pays comme la Grande-Bretagne, où le peuple lutte sous le joug d’un gouvernement aristocrate et oligarchique qui agit dans son propre intérêt, et non dans celui de la population.

34En tant que témoins enthousiastes, tant au moment de la prise de la Bastille que pendant les mois de transition vers une forme républicaine de gouvernement, ils évoluèrent dans un paysage politique de plus en plus complexe, où la violence allait de pair avec une participation politique populaire croissante et où l’éloquence oratoire était perçue tantôt comme un masque dissimulant des désirs contre-révolutionnaires, tantôt comme une façon de promouvoir le progrès de la raison. Helen Maria Williams a ainsi souligné le passage de la simplicité de 1789 à la complexité de l’époque de la jeune République. La polyphonie des témoignages (réflexions originales adossées aux écrits des autres, lectures optimistes mêlées à des réactions pessimistes sur le progrès de la Révolution) reflète la position singulière des observateurs britanniques après la création de la République, tiraillés entre pessimisme et désir d’effacement après 1793 et attachement aux principes fondateurs qui, selon eux, n’avaient pas été mis en œuvre. Certains partisans de la Révolution, tels Henry Yorke et David Williams, perdirent tout enthousiasme pour la dynamique révolutionnaire une fois retournés en Grande-Bretagne. Mais la plupart de ces témoins de la Révolution semblent avoir gardé un certain optimisme quant à la capacité d’un mouvement révolutionnaire à contribuer à la création d’un gouvernement et d’une société fondés sur des principes de liberté et de rationalité et assurant le bonheur du plus grand nombre.

  • 51 H. M. Williams, Souvenirs de la Révolution française, op. cit., p. 46.

35En 1828, écrivant ses Souvenirs de la Révolution française, Helen Maria Williams prolongea ce travail de réhabilitation, affirmant : « ce qu’on répète encore aujourd’hui du regret de l’ancien régime, c’est une fable et non de l’histoire »51. Le rapport des témoins britanniques à la Révolution est d’autant plus complexe qu’il est intimement lié au mouvement pour la réforme en Grande-Bretagne. Outre le fait que, avant d’arriver à Paris, de nombreux Britanniques avaient été actifs au sein de la mouvance radicale outre-Manche, leurs discussions politiques, leurs écrits constitutionnels et leurs témoignages historiques se démarquèrent par la façon dont ils croisèrent à la fois une admiration pour la nouvelle République et l’espoir de voir des changements importants advenir dans leur propre pays. Les radicaux britanniques regardèrent ainsi leur pays à travers le prisme de la France révolutionnaire.

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Notes

1 Pour une étude des rapprochements entre les mouvements britanniques et irlandais pour la réforme politique, voir R. Rogers, « The Society of the Friends of the Rights of Man, 1792-94: British and Irish radical conjunctions in republican Paris », La Révolution française, no 11, 2016. En ligne : [https://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/lrf/1629] (consulté le 07/07/2021).

2 Mathieu Ferradou, dans son article « Histoire d’un “festin patriotique” à l’hôtel White (18 novembre 1792) : les Irlandais patriotes à Paris, 1789-1795 », Annales historiques de la Révolution française, no 382, 2015, p. 123-143, s’intéresse à la contribution des Irlandais à cette société politique et y voit la genèse d’un républicanisme irlandais bien avant la rébellion de 1798.

3 Sur ces deux sociétés et leurs principaux porte-paroles, Richard Price et John Cartwright, voir l’ouvrage de R. Duthille, Le discours radical en Grande-Bretagne, 1768-1789, Oxford, Voltaire Foundation, 2017. La Revolution Society avait pour but de commémorer la Glorieuse Révolution de 1688-1689.

4 Pour de plus amples informations sur ce débat pamphlétaire, voir A. Goodrich, Debating England’s Aristocracy in the 1790s, Woodbridge, Boydell Press, 2005 et G. Claeys, The French Revolution Debate in Britain, Basingstoke, Palgrave Macmillan, 2007. Sur la surveillance de l’expression privée dans des lieux publics, l’ouvrage de John Barrell fait référence : J. Barrell, The Spirit of Despotism: Invasions of Privacy in the 1790s, Oxford, Oxford University Press, 2006.

5 « It is time that nations should be rational, and not be governed like animals, for the pleasure of their riders. » T. Paine, Rights of Man, H. Collins éd., Harmondsworth, Penguin Books, 1985, p. 236 (nous traduisons).

6 « There is no occasion for apprehensions from Mr. Paine’s advice on the score of Economy and Reform », The Argus, 16 novembre 1792, cité dans J. Mee, « The Magician No Conjuror: Robert Merry and the political alchemy of the 1790s », dans P. A. Pickering et M. T. Davis éd., Unrespectable Radicals? Popular Politics in the Age of Reform, Aldershot, Ashgate, 2008, p. 49 (nous traduisons).

7 D’autres réformateurs britanniques comme Thomas Spence, James Ridgeway ou Daniel Isaac Eaton restèrent sur le sol britannique et furent condamnés pour leurs activités éditoriales ou leurs travaux de publication de textes radicaux. Pour le témoignage de Spence à la suite de son arrestation, voir T. Spence, The Case of Thomas Spence, Bookseller…, [Londres], [s. n.], 1792.

8 Le Moniteur universel, vol. XIV, lundi 26 novembre 1792, p. 562.

9 AN C 11/278/40, « Adresse des Anglais, des Ecossais et des Irlandais résidans et domiciliés à Paris », signée le 24 novembre 1792.

10 Le Moniteur universel, vol. XV, lundi 7 janvier 1793, p. 58.

11 Ceux qui adhérèrent au club parisien et qui furent également présents aux réunions de la Society for Constitutional Information sont Robert Merry, Thomas Paine, William Maxwell, George Edwards, John Frost, Henry Yorke, William Choppin, Francis Tweddell, lord Edward Fitzgerald, Sampson Perry, Joel Barlow, William Watts et Thomas Cooper (The National Archive, TS 11/962/3508). John Hurford Stone participa aux rassemblements de la Revolution Society.

12 Sur les liens entre Thomas Paine et la France révolutionnaire, voir l’ouvrage de C. Lounissi, Thomas Paine and the French Revolution, Cham, Palgrave Macmillan, 2018.

13 La Société mit en place un système de présidence tournante, sans hiérarchie stricte et ouvert à la dissension.

14 Robert Rayment met en avant sa contribution au « projet de secourir les veuves et les orphelins des défenseurs morts à la journée du 10 août » dans une pétition présentée au Comité de salut public le 5 août 1792, peu après la chute de Robespierre (AN F7/4774/88).

15 La Chronique du mois ou Les Cahiers patriotiques, janvier 1793, p. 80. Le projet de publication conçu par Perry n’aboutit pas, malgré l’annonce. Pour une étude de la presse anglophone à Paris pendant la Révolution française, voir S. Macdonald, « English-language newspapers in revolutionary France », Journal for Eighteenth-Century Studies, vol. XXXVI, no 1, 2013, p. 17-33.

16 Voir M. Rapport, Nationality and Citizenship in Revolutionary France: The Treatment of Foreigners, 1789-1799, Oxford, Clarendon Press, 2000 ; S. Wahnich, L’impossible citoyen : l’étranger dans le discours de la Révolution française, Paris, Albin Michel, 1997.

17 Pour une étude de ce changement de discours officiel, voir S. Wahnich et M. Bélissa, « Les crimes des Anglais : trahir le droit », Annales historiques de la Révolution française, no 300, 1995, p. 233-248.

18 Robert Rayment et sir Robert Smith, membres actifs de la Société britannique, se sont distingués par leurs tentatives particulièrement déterminées d’obtenir leur liberté, en envoyant des pétitions et des témoignages rédigés par des membres de leurs sections. Voir AN F7/4774/88 pour Rayment et AN F7/4775/20/3 pour Smith.

19 Espion à Paris, le capitaine George Monro, écrivant à lord Grenville au ministère des Affaires intérieures le 27 décembre 1792, explique qu’après la proposition faite par Thomas Paine et Robert Merry de présenter un autre texte de soutien à la Convention nationale, les participants avaient failli en venir aux mains. Lettre de George Monro à lord Grenville, 27 décembre 1792, dans G. G. L. Gower, The Despatches of Earl Gower, English Ambassador at Paris from June 1790 to August 1792…, O. Browning éd., Cambridge, Cambridge University Press, 1885, p. 268.

20 Sur les presses anglaises à Paris et le rôle que jouait John Hurford Stone, voir M. B. Stern, « The English press in Paris and its successors, 1793-1852 », The Papers of the Bibliographical Society of America, vol. LXXIV, no 4, 1980, p. 307-359, ainsi que Id., « The Franco-American book trade in the late eighteenth and early nineteenth centuries », Publishing Research Quarterly, vol. X, no 1, 1994, p. 47-54. Pour une étude de la vie de John Oswald en France et sa place au sein de la communauté internationale à Paris, l’ouvrage de David Erdman est incontournable : D. V. Erdman, Commerce des Lumières: John Oswald and the British in Paris in 1790-93, Columbia, University of Missouri Press, 1986.

21 J. Oswald, Le gouvernement du peuple, ou Plan de constitution pour la République universelle, Paris, Imprimerie des Révolutions de Paris, 1793, p. 9 et 5.

22 Ibid., p. 5.

23 Ibid., p. 10.

24 Ibid., p. 11.

25 Ibid., p. 16.

26 R. Merry, Réflexions politiques sur la nouvelle Constitution qui se prépare en France, adressées à la République, Paris, Imprimerie de J. Reyner, [1792]. Sur la version répertoriée à la Bibliothèque nationale de France, la date de publication est 1793. Cette date a été rayée à la main et remplacée par 1792. Aucune version anglaise ne semble exister.

27 Ibid., p. 7.

28 Ibid., p. 8.

29 Loc. cit.

30 Ibid., p. 18.

31 La proposition de Joel Barlow a été publiée par Joseph Johnson en 1792, puis traduite en français par Wilhelm Ludger et publiée sous le titre de Lettre à la Convention nationale de France sur les vices de la Constitution de 1791 et sur l’étendue des amendemens à y porter. Quant à David Williams, son manuscrit a été traduit par le citoyen Maudru et imprimé chez l’Imprimerie du Cercle social en 1793 sous le titre d’Observations sur la dernière constitution de la France, avec des vues pour la formation de la nouvelle constitution.

32 J. G. Alger, Englishmen in the French Revolution, Londres, S. Low, Marston, Searle and Rivington, 1889.

33 T. C. Rickman, The Life of Thomas Paine: Author of Common Sense, Rights of Man, Age of Reason, Letter to the Addressers, &c. &c., Londres, T. C. Rickman, 1819, p. 137.

34 Le manuscrit des notes fragmentaires rédigées par J. Barlow en vue d’écrire une histoire de la Révolution française se trouve à la bibliothèque de Houghton aux États-Unis : « Notes for a hist. of the Fr. Rev. », Joel Barlow Papers, 1775-1935. HL MS Am 1448 (18) f. 7.

35 « Of the state of things here, and the decree against the English I will not speak », M. Wollstonecraft à R. Barlow, Le Havre, 8 juillet 1794, dans M. Wollstonecraft, The Collected Letters of Mary Wollstonecraft, J. M. Todd éd., New York, Columbia University Press, 2003, p. 255 (nous traduisons). M. Wollstonecraft faisait allusion aux lois du 27 germinal (16 avril 1794) et du 7 prairial (26 mai 1794) qui renforçaient les mesures prises contre des étrangers résidant à Paris et actaient qu’aucun prisonnier ne serait pris pendant le conflit.

36 « I have just sent off great part of my M.S. which Miss William would fain have had [m]e burn, following her example. – And to tell you the truth, – my life would not have been worth much, had it been found », M. Wollstonecraft à E. Wollstonecraft, [Le] Havre, 10 mars [17]94, ibid., p. 248 (nous traduisons).

37 D. Worrall, Theatric Revolution: Drama, Censorship, and Romantic Period Subcultures, 1773-1832, Oxford, Oxford University Press, 2006.

38 « From the very beginning, observers rushed to publish their accounts, as if writing down the events would give them a coherence they lacked intrinsically. » L. Hunt, « The world we have gained: the future of the French Revolution », American Historical Review, vol. CVIII, no 1, 2003, p. 4 (nous traduisons).

39 A. Boime, « The sketch and caricature as metaphors for the French Revolution », Zeitschrift für Kunstgeschichte, vol. LV, no 2, 1992, p. 256-267.

40 R. Merry [?], A Circumstantial History of the Transactions at Paris on the Tenth of August Plainly Shewing the Perfidy of Louis XVI, and the General Unanimity of the People, in Defence of their Rights, Londres, printed for R. Thomson, R. Lyttlejohn, and H. D. Symonds, 1792.

41 S. Perry, An Historical Sketch of the French Revolution; Commencing with its Predisposing Causes, and Carried on to the Acceptation of the Constitution, in 1795, Londres, printed for H. D. Symonds, 1796, 2 vol.

42 « Nothing amuses us more than reading your news-papers, descriptive of the horrors of Paris. » T. B. Howell, A Complete Collection of State Trials and Proceedings for High Treason and Other Crimes and Misdemeanours from the Earliest Period to the Year 1783, with Notes and Other Illustrations… and Continued from the Year 1793 to the Present Time, vol. XXV, Londres, Longman, Rees, Orme, Brown & Green, 1818, p. 1215 (nous traduisons).

43 « In every crisis of the revolution the people have been pushed to some lamentable or fatal excess. » S. Perry, An Historical Sketch of the French Revolution, op. cit., vol. II, p. 375 (nous traduisons).

44 H. M. Williams, Souvenirs de la Révolution française, Paris, Dondey-Dupré père et fils, 1827, p. 35.

45 « a particular account of the Rise, and also of the Fall of Despotism in Paris, on the 10th of August », The Times, 11 septembre 1792 (nous traduisons).

46 Le journal, édité par Louis-Marie Prud’homme, compte parmi ses contributeurs Élysée Loustalot, Sylvain Maréchal, Pierre Gaspard Chaumette and Philippe Fabre d’Églantine. Le journal met en avant la supériorité morale du peuple et affirme le droit des classes opprimées à résister à la tyrannie de la monarchie.

47 « to hear the other side », R. Merry [?], A Circumstantial History of the Transactions at Paris…, op. cit., p. 17 (nous traduisons).

48 « The effects of a just and necessary self-defence on the part of the people », ibid., p. vii.

49 Ibid., p. v.

50 Dans le numéro du Times où figurait l’annonce de la publication de ce texte se trouve une dénonciation de la « foule sanguinaire » qui avait commis des crimes dans les prisons de Paris la semaine précédente (The Times, 11 septembre 1792).

51 H. M. Williams, Souvenirs de la Révolution française, op. cit., p. 46.

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Pour citer cet article

Référence électronique

Rachel Rogers, « « Cette heureuse contrée deviendra désormais une terre de promission » : la Révolution française écrite par des témoins britanniques à Paris »Astérion [En ligne], 24 | 2021, mis en ligne le 12 octobre 2021, consulté le 08 février 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/asterion/5689 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/asterion.5689

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Auteur

Rachel Rogers

Université Toulouse-Jean-Jaurès, laboratoire CAS • Rachel Rogers est maître de conférences en civilisation britannique au département des études du monde anglophone à l’université Toulouse-Jean-Jaurès. Ses recherches portent sur l’histoire politique et populaire ainsi que sur les mouvements radicaux en Grande-Bretagne aux XVIIIe et XIXe siècles. Pour sa thèse de doctorat, elle a étudié la communauté britannique à Paris pendant les premières années de la République française (1792-1794). Elle est l’auteur de plusieurs articles et chapitres d’ouvrages, notamment : « White’s Hotel: a junction of British radical culture in early 1790s Paris », Caliban, no 33, 2013, p. 153-172 et « “Relinquish[ing] all former connections”: British radical emigration to early republican Paris », dans D. Duff et M. Porée éd., Exiles, Émigrés and Expatriates in Romantic-Era Paris and London (Université Charles de Prague, faculté de philosophie, 2019).

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Droits d’auteur

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