Une « politique de l’oubliance » ? Mémoire et oubli pendant les guerres de Religion (1550-1600)
Résumés
Les guerres de Religion en France (1562-1598) mettent curieusement en cause la mémoire. En effet, chaque édit de pacification est l’occasion pour la couronne française d’imposer un « oubli » des guerres récentes entre catholiques et protestants. Cette « politique de l’oubliance », censée permettre une stabilité de chaque nouvelle paix, a cependant rencontré des obstacles : quelles sont les réticences qu’elle a suscitées ? Comment mesurer l’efficacité de ces mesures ? Comment les commissaires du roi chargés de vérifier l’application des édits s’y sont-ils pris pour imposer cet oubli ?
Entrées d’index
Mots-clés :
oubli, oubliance, édits de paix, pacification, catholiques, protestants, guerres de ReligionPlan
Haut de pageTexte intégral
- 1 H. Weinrich, Léthé : art et critique de l’oubli, Paris, Fayard, 1999 ; Le Temps compté, Grenoble, (...)
1Nous partirons d’un constat que nous érigerons dans le même temps en hypothèse : pendant les guerres civiles (par exemple en Angleterre durant la guerre des Deux-Roses, 1455-1485) et jusqu’aux guerres de Religion en France (1562-1598), la mémoire est globalement restée cantonnée au domaine des facultés humaines (voir saint Thomas, Juan Luis Vivès, etc.), c’est-à-dire qu’elle n’a été concernée que par les théories de la connaissance et de l’âme. Mais les guerres de la Renaissance ont pour effet une politisation de la mémoire, c’est-à-dire que la théorie des facultés de l’âme se charge progressivement d’un enjeu politique et religieux. Ce constat a longtemps été minoré dans l’historiographie des guerres de Religion. Mais un changement s’opère aujourd’hui, sous l’effet probable des commissions de réconciliation qui ont travaillé en Afrique du Sud (Commission Vérité et réconciliation) ou au Rwanda (Commission nationale pour l’Unité et la Réconciliation du Rwanda) et qui contribuent à interroger le passé différemment. Les travaux de linguistes comme Harald Weinrich et Jean-Jacques Courtine, et d’historiens tels Michael Wolfe et Barbara Diefendorf, Philip Benedict (les calendriers), Marie-Madeleine Fragonard (la mémoire des guerres de Religion), Mark Greengrass (l’amnésie), prouvent à eux seuls l’intérêt renouvelé pour ces questions1. Elles sont cependant encore peu étudiées en France.
- 2 P. Nora éd., Les Lieux de mémoire, Paris, Gallimard, 1984, « Introduction ».
2Mais comment définir la mémoire ? Parle-t-on de la même chose quand on évoque les facultés de l’âme et les vagues mémoires d’un capitaine complaisant vis-à-vis de son propre rôle ? Mnémotechnique et souvenirs des troubles appartiennent-ils au même domaine ? Pour commencer, nous proposons de prendre un détour et de ne pas établir de distinction ferme entre mémoire et histoire2, entre une mémoire individuelle, qui possède la valeur du témoignage direct mais qui est nécessairement partielle, et une histoire (voire l’Histoire), dégagée de la finitude du témoignage individuel pour privilégier une pluralité de versions établies comme sources. Cette distinction entre mémoire et histoire n’est-elle pas surtout pertinente pour l’histoire contemporaine, qui s’est employée à mettre en perspective le témoignage direct ? Il faudrait pouvoir l’adapter pour l’utiliser dans le cadre de l’histoire moderne. Mais sans abondance de sources, l’historien se trouve dans une position délicate, que Jacques Berchtold et Marie-Madeleine Fragonard qualifient avec raison de « relative errance » :
- 3 J. Berchtold et M.-M. Fragonard éd., La mémoire des guerres de Religion, ouvr. cité, p. 9.
Les textes de l’histoire immédiate sont écrits souvent par et pour des guerriers et des politiques, on n’élude ni la guerre ni les récits de batailles. Mais comme Fabrice à Waterloo ne voit pas tout, on a des vues particulières sur les problèmes généraux, et, pour quelques grands récits héroïsés (Coutras, Ivry), une relative errance.3
- 4 Ibid., chap. I : « La mémoire individualisée ».
- 5 M. Halbwachs, Les cadres sociaux de la mémoire (1925), La Haye, Éd. Mouton, 1975, p. 279. Cette dé (...)
3Sans doute tout récit de conflit subit-il une sorte de contamination par la guerre, si bien que la mémoire elle-même en est affectée. Mais si nous proposons de faire de la Renaissance un tournant, ce n’est pas seulement pour cela. La mémoire n’y est plus seulement apparentée au souvenir personnel et rétrospectif du combattant, qui réécrit le passé selon ses intérêts4. Elle désigne bien plus un ensemble de souvenirs collectifs, plus ou moins confus et intenses, et constitutifs d’une identité politique et religieuse (définition proche de celle de Maurice Halbwachs5). Elle n’est donc pas une forme froide et distante, cristallisée en quelque sorte, d’un passé lui-même figé. Bien au contraire, elle constitue une dimension de la guerre elle-même qui met en jeu les identités politiques et religieuses des contemporains. Ce n’est donc ni de l’objectivité du récit ni de la conformité des sources à une prétendue réalité historique qu’il faut se préoccuper, car la mémoire ne se situe pas là. La guerre interdit ces prétentions réalistes et nous détourne de ces illusions méthodologiques…
4Une fois la guerre établie comme véritable « catégorie » de la mémoire, on peut s’interroger sur l’oubli (on eût dit « oubliance » au xvie siècle) imposé par les autorités dès la fin de chaque guerre de Religion. Cette politique volontariste de la couronne française montre à elle seule à quel point la mémoire est traversée par la question politique. Mais comment ce pouvoir s’exerce-t-il ? Quels types de rapports entre sujets dominants/dominés suppose-t-il ? Poser la question de l’oubliance, c’est interroger a contrario les mécanismes de la domination. Plus encore : comment définir cette période étrange de l’« après-guerre » ? Un simple intermède ? Un soulagement, mais qui voit toutes les revendications et les contestations reprendre forme ? Une pacification, mais qui permet aux armées de se reconstituer ? À ces questions s’ajoutent celles qui concernent la paix elle-même : comment mesurer l’impact et l’intensité de la pacification (et en particulier de cette « politique d’oubliance ») ? Quels critères adopter pour tenter de percevoir son sens pour les contemporains ? Sans prétendre répondre à toutes ces questions, nous tenterons d’étudier la « politique de l’oubliance » et les obstacles qu’elle a rencontrés dans la France de la deuxième moitié du xvie siècle.
La « politique de l’oubliance » : le rôle des autorités civiles
L’oubli, condition de la paix
5À chaque Édit de pacification, l’oubli est considéré par la couronne comme la principale condition du retour à une paix durable. Mais sur quoi l’obligation d’oubli porte-t-elle exactement ? La « politique d’oubliance » s’incarne dans l’Édit d’Amboise (mars 1563), dont l’article 9 précise que
- 6 La meilleure édition des Édits de pacification, sous la direction de Bernard Barbiche, est en lign (...)
toutes injures et offenses que l’iniquité du temps et les occasions qui en sont survenues ont peu faire naistre entre nosd. subjectz, et toutes autres choses passées et causées de ces presens tumultes, demoureront estainctes, comme mortes, ensevelies et non advenues.6
6« Mortes, ensevelies et non advenues » : ces mots sonnent comme une déformation du temps, une relecture du passé d’ailleurs paradoxale puisqu’il s’agit d’enfouir et oublier quelque chose qui ne serait pas arrivé… Sept ans et deux guerres civiles plus tard, cette exigence d’oubli demeure et occupe désormais, de manière symptomatique, la première place de l’Édit de Saint-Germain en Laye :
- 7 Édit de Saint-Germain en Laye (1570), <http://elec.enc.sorbonne.fr/editsdepacification/edit_05 #ar (...)
Art. 1 : Premierement, que la memoire de toutes choses passées d’une part et d’autre dès et depuis les troubles advenuz en nostred. royaume et à l’occasion d’iceulx, demoure estaincte et assopie comme de chose non advenue ; et ne sera loysible ny permis à noz procureurs generaulx ny autre personne publicque ou privée quelzconques, en quelque temps ny pour quelque occasion que ce soyt, en faire mention, procés ou poursuite en aucune court ou jurisdiction.7
- 8 P. Ricœur, La Mémoire, l’Histoire, l’Oubli, Paris, Éd. du Seuil, 2000.
- 9 Archives municipales (AM), Mâcon, GG 122, pièce 31 (janvier 1571).
- 10 S. Wahnich écrit que « l’amnistie est souvent associée à l’amnésie, du fait qu’elle imposerait un (...)
- 11 N. Loraux, « De l’amnistie et de son contraire », dans Usages de l’oubli, Y. H. Yerushalmi, N. Lor (...)
7L’expression « comme de chose non advenue » souligne la magie de l’opération, le miracle accompli par la politique de réconciliation8. Il s’agit bien de « rebrousser l’histoire »… Les catholiques de Mâcon s’y réfèrent explicitement quand ils espèrent que ceux « de ladicte relligion ne ce [voudront] formaliser, que sera le meilleur suivant l’eedict de pacification et inthention de sadicte Majesté, article premier et deuziesme : en toute chose doibvent demeurer ez obly, comme non advenus, assouppies et estains, sans les renoveler »9. S’ils restent prisonniers de l’irréversibilité du temps, les hommes sont condamnés à se reprocher ad nauseam les gestes du passé. Annuler le passé revêt ici un sens métaphorique ou symbolique : il s’agit moins d’araser le souvenir mnésique de l’événement, comme s’il était gravé dans une tablette de cire et ainsi susceptible d’être effacé, que de se donner les moyens d’interdire son affleurement à la surface du présent, c’est-à-dire d’exclure le rappel de certains faits douloureux naguère advenus10. Dans l’analyse de Nicole Loraux, c’est bien le « comme si » qui importe : « la politique (de l’oubli), c’est faire comme si de rien n’était. Comme si rien ne s’était produit. Ni le conflit, ni le meurtre, ni la rancune (ou la rancœur) »11. L’amnistie de Charles IX n’a donc rien de chimérique, en ce sens que le monarque n’espère pas une amnésie subite ni même volontaire de ses sujets : personne ne prétend qu’il ne s’est rien passé, mais seulement que la survie du royaume implique qu’on fasse « comme s’il » ne s’était rien passé. La politique est un jeu. Il s’agit dès lors d’imposer une limitation politique des possibilités de poursuivre en justice les coupables. Ce sont moins les souvenirs-pour-soi, ressassés en privé, qui sont interdits, que leur évocation publique, comme le souligne l’article 2 de l’Édit de Saint-Germain qui défend aux Français « qu’ilz n’ayent à renouveller la mémoire [des troubles], s’attacquer, injurier ne provocquer l’un l’autre par reproche de ce qui s’est passé, en disputer, contester ». Il ne faut pas ranimer publiquement la souffrance attachée au souvenir et à la représentation d’événements pénibles.
8S’il est impossible d’intenter un procès pour une injure passée, l’Édit stipule toutefois que les biens accaparés seront restitués et les exilés réintégrés. Il y a bien là espoir d’un retour à la situation antérieure et nécessité d’un rappel de ce qui a été déréglé ou déformé par la guerre. La politique de l’oubliance ne constitue donc pas une négation ou un rejet, mais bien une série de mesures circonscrites dont la convergence doit permettre l’apaisement des consciences. De 1563 à 1598, cette même « clause d’oubliance » apparaît dans tous les édits de pacification, et la plupart du temps dans les premiers articles. Est-ce à dire qu’elle constitue pour la couronne la clause la plus importante, ou simplement qu’elle représente une précaution formelle ? Toujours est-il qu’elle est souvent assortie de considérations judiciaires afin de prévenir la multiplication des procès. C’est le cas dans l’Édit de Nantes (article 1) :
- 12 Édit de Nantes (1598), <http://elec.enc.sorbonne.fr/editsdepacification/edit_12#art_12_01 (consult (...)
Premierement, que la memoire de toutes choses passées d'une part et d'autre, depuis le commencement du mois de mars mil cinq cens quatre vingtz cinq jusques à nostre avenement à la couronne, et durant les autres troubles preceddens et à l'occasion d'iceulx, demourera estaincte et assoupie, comme de chose non advenue. Et ne sera loisible ny permis à noz procureurs generaulx ny autres personnes quelzconques, publiques ny privées, en quelque temps ny pour quelque occasion que ce soit, en faire mention, procés ou poursuitte en aucunes courtz ou jurisdictions que ce soit.12
9L’Édit de Nantes va donc plus loin que les édits antérieurs : les jurisconsultes et diplomates de l’entourage d’Henri IV tentent de réécrire l’histoire depuis 1585, année de la reconstitution de la Ligue, en faisant disparaître toute l’opposition catholique à Henri III et à son successeur. Comme dans les traités de pacification signés dans l’Empire au même moment, la question de la date de référence (à partir de laquelle les biens ecclésiastiques et les liens de culte sont restitués de part et d’autre) devient essentielle. Dans le cas français, c’est ici, plus précisément, la question de la continuité dynastique qui est en cause : Henri IV situe son règne dans le prolongement de celui de son cousin et invoque un apaisement de long terme, de près de dix années, qui passe par la journée des barricades, les États généraux de Blois, l’assassinat d’Henri III, la conversion du nouveau roi au catholicisme, son sacre enfin... Sans aucun doute, la couronne perçoit l’importance de ce que la linguiste Sophie Moirand appelle les « mots-événements », qui ont
- 13 S. Moirand, « Discours, mémoires et contextes : à propos du fonctionnement de l’allusion dans la p (...)
des effets de mémoire qui dépassent le sens des mots : ils véhiculent des représentations, voire des émotions, liées à des connaissances, à des faits et à des savoirs plutôt qu’à des dires. Ils sembleraient donc liés à la mémoire épisodique, en particulier lorsqu’il s’agit d’événements physiques liés à des expériences, réellement vécues ou par images interposées [et] peuvent également renvoyer à des savoirs historiques et fonctionner par analogie.13
- 14 B. Diefendorf, « Waging peace: memory, identity, and the Edict of Nantes », Religious Differences (...)
10La couronne interdit donc le souvenir des événements marquants, parfois traumatisants (vécus ou simplement rapportés), pour mieux assurer la paix. Mais une « politique de l’oubliance » limitée à une telle interdiction aurait peu d’impact. C’est pourquoi l’édit de Nantes menace ensuite de punition, pour perturbation du repos public, qui entend (article 2) « renouveler la memoire, s'attaquer, ressentir, injurier ny provocquer l'un l'autre par reproche de ce qui s'est passé ». Plus encore, on raye des registres des cours de justice tout arrêt et toute mainmise, vente ou acte légal concernant les émotions publiques ; les pamphlets sont interdits ; les arrêts incriminant les protestants expulsés et réfugiés sont annulés, etc. On ne compte que deux exceptions : les délits communs au sein d’une même confession et les « cas exécrables » (viols, meurtres, etc.)14.
- 15 M. Greengrass, « Amnistie et oubliance… », art. cité, p. 113-123.
11Cette situation pose deux questions. Du côté du sujet, face à cet impératif, doit-on simplement feindre publiquement d’oublier la guerre, encore toute récente ? Et du côté du pouvoir, pourquoi et comment l’oubli est-il devenu une condition de la paix (plus que le pardon ou la repentance par exemple) ? Mark Greengrass15 a étudié les Remonstrances publiques d’Antoine Loisel, procureur général du roi. L’amnésie y apparaît comme le meilleur médicament contre les guerres civiles. Les Remontrances prononcées par Antoine Loisel à Agen en 1582 en constituent un bon exemple :
- 16 A. Loysel, Amnestie, ou de l’oubliance des choses des maux faicts et receus pendant les troubles (...)
Le Roy donc a tres prudemment advisé qu’il n’y avait point de remède plus propre pour commencer à pacifier son royaume que la praticque de ce mot solennel et legitime d’amnestie qui est d’oublier les tors & injures passees, abolir et effacer tout ce qui nous en pourrait ramener la memoire.16
12L’« amnestie », qui est ici confondue avec l’amnésie et qui suppose l’amnistie, accompagne donc le retour à la paix en calmant les consciences. À cette image du « remède » s’ajoutent parfois celles de l’accord musical (Hotman), de la constellation céleste, de l’enchaînement harmonieux, etc. Autant d’illustrations des attentes de retour à la paix de la couronne…
Sur l’efficacité de la « politique de l’oubliance »
- 17 J. Foa, Le tombeau de la paix. Une histoire des édits de pacification, Limoges, Pulim, 2015.
- 18 L. Daireaux, « De la paix à la coexistence : la mise en œuvre de l’Édit de Nantes en Normandie au (...)
13Reste à tenter de mesurer l’efficacité de cette pratique royale, en particulier du côté de la perception qu’en ont les contemporains. Les édits des guerres de Religion ont incontestablement eu un impact dans le royaume, comme l’indiquent les rapports des commissaires chargés d’en superviser l’application17. L’oubli sert à la fois à consolider la paix et évite la réapparition des conflits. Luc Daireaux18 a suivi deux commissaires envoyés par Henri IV en Normandie entre novembre 1599 et mai 1600, le catholique Antoine Le Camus de Jambeville et le protestant François de Quièvremont. Ils se sont trouvés confrontés principalement à deux problèmes : l’attribution des cimetières huguenots et les lieux de culte (avec transfert éventuel). Ainsi à Pont-Audemer, en mai 1600 : face à l’édification d’un temple au faubourg Saint-Germain en 1571, réalisé avec l’accord du maréchal de Montmorency, mais contesté en 1598 par les catholiques (en vertu des questions de restitution des espaces confessionnels), ils décident de confirmer le droit d’implantation du bâtiment et son statut de lieu de culte protestant. Parfois, le passé ne passe pas, si l’on peut dire, et les deux commissaires doivent s’incliner face aux pressions (ainsi à Montivillier, où ils ne parviennent pas à imposer un lieu de culte).
- 19 Archives départementales (AD), Dordogne, B 3545, fol. 308 vo.
14L’efficacité de la « politique d’oubliance » de la couronne doit également se mesurer auprès des autorités municipales. Certaines communautés urbaines, pendant toute la période des guerres de Religion, ont cherché à maintenir une paix locale qui a parfois pris la forme de pactes d’amitié civique. Ainsi à Périgueux, le 28 décembre 1570, une grande cérémonie de prestation de serment est-elle organisée par René Crespin, commissaire de l’Édit de Saint-Germain en Laye19.
[Magistrats, etc.] Ausquelz a esté remonstré le grand bien, fruict et proffict que peult advenir de [fol. 314] l’execution et entretenement dudict eedict de paciffication et comme il est très necessaire à tous citoyens se reunir et reassambler pour vivre en paix et obeyr au contenu audict eedict, oblier le passé et garder le peuplle de sedition et division.
15« Oblier le passé », « vivre en paix » et « obeyr au contenu audict eedict » : trois actions synonymes, trois manières de clore la guerre, trois actes de soumission politique à la couronne… Même après la Saint-Barthélemy, dont la nouvelle vient de se répandre dans le Languedoc, on continue de s’assurer de liens interconfessionnels locaux (appelés serments ou accords) qui garantissent la paix en renonçant au souvenir du passé. Par exemple à Saint-Affrique, le 14 septembre 1572, est signé un « Accord […] entre tous les habitans de la ville de St-Afrique afin de conduire soubz l’obéissance du roy et suyvant l’Édit de pacification faict par sa Majesté » :
- 20 Archives nationales (AN), TT 268 (1), fol. 169 et suiv., publié par O. Christin, « Amis, frères et (...)
Les exercices desdites religions se continueront en lad ville comme elles sont de present suivant la volonte du roy declarée par son édit de pacification sans que aucun y puisse estre troublé […] Entre lesdits habitans et concitoyens y aura paix concorde amour et amitie leurs executions et effects oublians toutes querelles passées, tant généralles que particulieres les ensevelissans suivant ladite volonté du roy qui nous est declarée par son édit de pacification totallement semblable à la volonté de Dieu […] Tout ce dessus a este promis affirme et assure par les soubsignez et autres cy dessous només qui ne scavent escrire par foy et serement presté par eux a Dieu et soubs le serement foy et obeissance quils doivent au roy.20
- 21 O. Christin, « Identités urbaines et pluralisme religieux : les pactes d’amitié entre confessions (...)
- 22 T. Amalou, « La célébration de la monarchie et le loyalisme des notables de Senlis (1589-1610) », (...)
16Plusieurs remarques sont nécessaires au sujet de ces « pactes d’amitié », tels que les a baptisés Olivier Christin21. Tout d’abord, les sources sont bibliques (c’est la langue du chrétien), mais aussi juridiques : certaines expressions figées comme « amis, concitoyens, confreres, etc. » viennent du Corpus juris civilis (c’est la langue des jurisconsultes, c’est-à-dire celle des autorités politiques). Ces pactes représentent ainsi l’expression du loyalisme monarchique (comme l’a indiqué Thierry Amalou à propos de Senlis)22, formulé par les autorités municipales dans une langue à la fois compréhensible par tous et compatible avec l’art oratoire de la couronne.
- 23 S. Gal, « Le serment pendant les guerres de Religion, contrat implicite et rituel de passage », Le (...)
- 24 P. Siblot, « De la dénomination à la nomination », Cahiers de praxématique, 2001, n° 36, p. 189-21 (...)
17Mais allons plus loin : si le xvie siècle apparaît comme une civilisation du serment23, il ne s’agit pas seulement de singer la langue du pouvoir pour faire acte d’allégeance et feindre d’oublier les troubles passés. Bien plus, on attend des cérémonies d’engagement ou de formulation des serments qu’elles impliquent la communauté tout entière, qu’elles la consolident en quelque sorte. L’oubli vecteur de paix n’est pas seulement une douce invocation destinée à rassurer les commissaires royaux : c’est une manière de dire ce qui doit être. On peut ici faire un lien avec la théorie de Paul Siblot sur le dialogisme de la nomination : la nomination est « un acte de catégorisation », qui est simultanément social et linguistique, si bien que « nommer ce n’est pas seulement se situer à l’égard de l’objet, c’est aussi prendre position à l’égard d’autres dénominations du même objet, à travers lesquelles des locuteurs prennent également position »24. La « politique de l’oubliance » représente donc à la fois une sélection du passé (disparition) et une requalification des événements (transformation). En imposant un oubli général vecteur de paix, en incriminant la mémoire vive, blessée, la monarchie cherche, à chaque édit, à contenir ce qui a selon elle rompu le lien d’obéissance et permis, constamment, la reprise des hostilités.
18Le passé comme la mémoire sont des objets dont la couronne peut s’emparer pour les éliminer, les changer, les parfaire (réhabilitation de Coligny, restitutions des biens des exilés, etc.). En distinguant ce qui est pardonnable de ce qui ne l’est pas, le souverain se pense, en dernier recours, comme le juge ultime d’une subtile distinction, celle qui sépare les violences légitimes, inévitables en temps de guerre, des violences privées, détestables. Sur le terrain, pourtant, il reste malaisé de distinguer un meurtre advenu « hors camp ou assemblée de guerre » d’un autre survenu durant ce même temps. D’où la récurrence des conflits de datation, et la nécessité – contradictoire avec la politique d’oubli – de conserver des preuves du passé et, souvent, de les falsifier. Ce faisant, la possibilité de jouer avec l’oubli et d’en tirer des bénéfices est aussi ouverte aux sujets du roi, des plus humbles aux plus en vue, qui sont toujours capables de se servir de l’oubli pour construire, souvent reconstruire, leur propre représentation du passé.
De l’usage du trou de mémoire : la sélectivité de l’oubli
La labilité de l’oubli
- 25 J. Foa, Le tombeau de la paix, ouvr. cité.
19Dans sa politique d’oubliance, la monarchie ne se paie jamais de mots. Elle connaît trop les détours qui mènent d’une norme à son application. C’est pourquoi elle met un soin particulier à faire appliquer ses édits de pacification. Des « commissaires des édits de pacification », juristes envoyés deux par deux dans les provinces, assurent cette diffusion et cette application du texte de loi – et notamment sa clause d’oubliance25. Ils ont pour tâche, de ville en ville et de village en village, de faire la paix entre les habitants au lendemain des conflits : trancher les conflits d’hier, apaiser les craintes, réintégrer les exilés, rendre les biens confisqués, etc. À eux prioritairement revient de savoir ce qu’il importe de poursuivre et ce qu’il faut savoir oublier. En leurs mains, une irréductible contradiction, symptomatique d’une sortie de guerre civile : d’un côté, un intense besoin de justice, une volonté de savoir pour ne pas laisser impunies les atrocités commises ; de l’autre, l’impérieuse nécessité de reconstruire un consensus social. L’oubli, donc. Trop enquêter, n’est-ce pas prendre le risque de voir renaître les conflits ? Inversement, comment s’assurer que l’oubli ne sera pas vécu comme une injustice de la part des victimes ? Pour poser la question de manière plus prosaïque : comment se répartissent bénéfices et bénéficiaires de l’oubli ? Comment faire en sorte que la justice recherchée par les commissaires n’apparaisse pas comme un instrument de vengeance au profit de certains habitants ?
20À plusieurs reprises, les troubles suscités par leurs enquêtes judiciaires montrent aux commissaires du roi les bornes qu’ils doivent savoir assigner à leur curiosité s’ils désirent préserver l’unité de la communauté d’habitants, valeur suprême de toute politique de pacification. Dans ses mémoires, le maréchal de Vieilleville, l’un des pacificateurs de la couronne, s’en prend aux commissaires de la paix qu’il accuse d’avoir lancé une infinité de poursuites
et tant d’autres menues ordonnances approchants plus du stile de chicquane que de la vraye forme d’establir une bonne et parfaicte union. D’autant que telle recherches regardoient directement ceulx qui avoient commandé [durant les troubles lyonnais en 1562-1563] et les personnes d’autorité, qui avoient exécuté leur commandement ; et que c’estoit plustost esmouvoir de rechef les troubles que de confirmer la paix tant desirée par le roi.
- 26 Mémoires de Vieilleville, dans Collection Universelle des mémoires particuliers relatifs à l’histo (...)
21Aussi bien le maréchal prend-il la décision de casser les poursuites lancées par les commissaires du roi, et rappelle la clause de l’édit d’Amboise qui stipule l’interdiction de rechercher « par reproche de ce qui s’est passé »26. S’il est bien sûr possible d’interpréter le passage comme un témoignage du divorce entre les deux types de pacificateurs employés par la couronne (militaires d’un côté, juristes de l’autre) et sur deux cultures différentes de l’apaisement, l’une par l’accord, l’autre par le procès, on doit aussi y voir la possibilité, pour les mêmes agents du roi, de passer, en fonction des circonstances, d’une application souple à une conception stricte de l’injonction d’oubli. Au commissaire de décider jusqu’où il peut fermer les yeux – hormis les quelques cas exécrables explicitement écartés de l’amnistie.
- 27 C. de Rubys, Histoire veritable de la ville de Lyon, Lyon, B. Nugo, 1604, p. 409.
- 28 Bibliothèque nationale (BN), site de Richelieu, Manuscrits français (ms. fr.) 15878, fol. 110 vo ( (...)
22À plusieurs reprises, les inquisitions trop pressées des commissaires réveillent les troubles au niveau local, ce qui est directement contraire au but de leur mission et incite par conséquent les hommes de Charles IX à plus de souplesse. À Lyon, le très catholique Claude de Rubys accuse les poursuites lancées par le commissaire Jean-Jacques de Mesmes d’être à l’origine du massacre de la Saint-Barthélemy27. Il arrive, de fait, que la venue des commissaires soit pervertie et utilisée par les habitants dans des stratégies de vengeance. Il s’ensuit que l’arme d’oubliance est essentielle aux commissaires dès qu’ils craignent un dérapage de leur tâche judiciaire. Pour calmer les passions, rien de tel que de déclarer aux habitants, comme le font Bourgneuf et Masparraulte à Saint-Maixent, que « ce dont ilz se plaignoient estoit pardonné et aboli »28. L’oubliance se présente ce faisant comme le lieu par excellence où s’exerce l’arbitraire du pouvoir.
- 29 AD Dordogne, B 3545, fol. 314 (28 décembre 1570).
23C’est donc tout à la fois pour éviter de transformer la paix en vindicte et pour maîtriser le discours légitime sur les troubles que les commissaires rappellent systématiquement aux habitants les dispositions d’oubliance et les invitent à ensepvelir les différends d’hier. Maîtriser la représentation du conflit, ce qu’on peut en dire et ce qu’on doit occulter, constitue un des enjeux essentiels de la pacification. À cet égard, ces injonctions d’oubli, répétées mais sélectives, font des commissaires les censeurs en chef de la couronne. En 1570 à Périgueux, les commissaires Montdoulcet et Crespin enjoignent aux notables d’« oblier le passé et garder le peuple de sedition et division »29. L’injonction est déjà plus précise en ce qu’elle lie oubli et ordre public. C’est sans doute à Saint-Maixent, en 1563, que les commissaires Bourgneuf et Masparraulte posent le mieux la question de la contradiction entre oubli et « recherche des injures ». Dans une lettre au roi datée d’août 1563, ils rapportent à Catherine de Médicis que
- 30 BN, ms. fr. 15878, fol. 110 (18 août 1563).
ceux de la religion reformée, se proposants que du tout nous fussions venuz à leur faveur et confusion des autres, nous ont presenté une infinité de requestes, se plaignants avoir esté pillez et oultragez par ceux de party contraire. D’autre part, ceux de la religion romaine, craignants que les menasses des autres sortissent effect par nostre moien, commencoient à faire des conseils à part et assemblées, lesquelles eussent peu tourner à quelque grande consequence si, Madame, nous ne eussions suyvi quelque moyen en cest affaire : parlant doulcement aux ungs et aux aultres, leur remonstrant la volonté du roy et la vostre que vos subiectz vivent en paix et qu’ilz oublient leurs inimitiez passées. À quelques ungs des plus opiniastres avons permis informer des faictz contenus en leurs requestes, pour l’information estre rapportée par devers nous [et] estre par nous decidé si lesdicts caz contenuz esdictes informations sont remiz et aboliz par l’edict, aux autres desnyé du tout de faire information.30
24Les potentialités de l’oubli sont ici dévoilées : même s’ils sont contraints par les textes de loi, ce sont les commissaires qui, en dernier recours, décident (« estre par nous decidé… ») si les cas sont « remis et aboliz par l’edict ». Telle distinction entre les « plus opiniastres » et les autres, sous ombre de psychologie, trahit surtout le pouvoir des commissaires de prendre en compte les rapports de force locaux. Les plus « opiniastres » sont souvent les plus forts…
25Ainsi, les bénéfices d’un balisage bien imprécis de l’oubli n’appartiennent pas qu’aux commissaires ni à la couronne. Certains sujets sont experts à réclamer que leur soit appliquée l’oubliance ou, à l’inverse, à se plaindre d’une interprétation abusive des clauses d’amnistie en faveur de leurs ennemis. Pour s’opposer aux huguenots, qui exigent un remboursement des amendes levées sur eux durant les guerres, les échevins de Dijon affirment aux commissaires que ce serait
- 31 AM Dijon, B 200, fol. 43 et suiv. (12 août 1563).
directement proceder contre le texte exprès de l’edict de paciffication et forme de [leur] commission. D’aultant que, par l’ung et par l’autre, y a clause expresse par lesquelles le roy veult et entend que le tout demeure ensepveli et mis soubz le pied, sans pouvoir faire repetition des injures passées, ny d’une part ny d’aultre, mesmes de ce qui s’est faict du temps d’hostilité.31
26À l’inverse, c’est justement en invoquant l’oubli des condamnations que François Galaup, procureur au présidial d’Agen, réclame au commissaire Montdoulcet une annulation de ses amendes :
- 32 AM Agen, GG 201, pièce 6 (avril 1571).
comme par l’edict de paciffication desdicts troubles toutes poursuytes, procedures, aultres arrestz et aultres condepnations intimées en quelque façon et manyere que ce soit pandant lesdicts troubles contre lesdits de la religion, sont declarés nulles et pour non advenues, il vous plaise de vos graces faisciez jouyr icelluy suppliant du fruict dudict edict.32
27Loin de stopper les débats, les normes d’oubliance tendent au contraire à multiplier les opérations d’interprétation, les « conflits de qualification » : nul ne sait à l’avance – et les textes de loi n’y changent rien – ce qui tombe sous le coup de l’oubli ou de la loi. Récuser l’essentialisation de l’oubliable et du condamnable, c’est rappeler qu’une telle partition constitue l’enjeu même de toute négociation entre commissaires et sujets du roi. Il s’agit de se faire, en un mot, l’historien de l’oubli et de la curiosité davantage que leur promoteur.
Histoires parallèles : les effets collatéraux d’une politique d’oubli
- 33 BN, Ms. fr. 16221, fol. 122 vo (27 août 1563). Toutefois, l’affaire n’en reste pas là puisque la d (...)
- 34 AM Clermont, BB 30, non folioté (20 novembre 1570).
28Non que l’on doive renoncer à rétablir in fine la vérité des faits. On n’en prendra qu’un exemple. À Clermont, en Auvergne, à la suite de la plainte d’une veuve qui réclame aux commissaires justice du meurtre de son mari, Gilbert Douxsainctz, les commissaires se mettent en peine d’interroger la municipalité, catholique, sur les raisons de cette mort. Pour éviter les poursuites, les échevins affirment en réponse que Douxsainctz, ce huguenot tué en marge de la procession de la Fête-Dieu en 1568, « a esté homicidé pendant et durant les troubles ». À l’évidence, ils mentent et leurs archives le prouvent à qui les consulte : Douxsainctz a succombé à ses meurtriers le 20 juin 1568, date à laquelle la paix de Longjumeau n’avait pas été révoquée. Le meurtre ne peut donc être mis en oubli. Mais de cette supercherie historique découle une possible requalification juridique du « crime » en simple « fait de guerre », pardonnable. À Lisieux, quelques années plus tôt, en août 1563, les commissaires Viole et la Guesle avaient imposé « silence » à Christine Hébert, catholique, au sujet du meurtre de son mari – tué, lui, lors d’un affrontement avec des huguenots –, effectivement advenu durant les troubles de la première guerre civile33. C’est bien pourquoi les échevins de Clermont supplient Potier et Lamoignon « de n’en fere instance contre ladicte ville ne habitans d’icelle, actandu mesmement que par l’eedict de paciffication le roy veult que toutes choses qui ont esté faictes, comme le cas est advenu pendant et durant les troubles soyent et demeurent admortyes, sans en fere aucune recharge »34. Pour l’historien, tout l’enjeu est de parvenir à faire l’histoire de faits dont les seules traces sont, la plupart du temps, laissées par ceux qui appartenaient à la confession dominante.
- 35 Mêmes remarques à propos de l’Édit de Nantes dans D. C. Margolf, « Adjucating memory : law and rel (...)
29Dans la bataille pour l’histoire, les catholiques et notamment les ecclésiastiques disposent en effet d’un atout non négligeable, qui provient de leur bonne maîtrise de la datation des événements. Par son habitude de l’écrit, sa tradition de coucher dans des registres les événements importants, l’Église se retrouve en position favorable pour raconter et, partant, façonner sa propre histoire. À l’inverse, les réformés sont fréquemment privés des institutions capables de conserver les traces du passé, ou du moins les histoires qu’ils rédigent s’appuient-elles largement sur des témoignages. En vertu des textes de loi et des pratiques commissariales, les clercs ont par exemple tout intérêt, s’ils espèrent réparation, à postdater la date de leurs malheurs et à faire du temps « d’après l’édit » celui de toutes les destructions35. Ce qui est advenu pendant les guerres est en effet « oublié ». C’est ce qui explique que la plupart des remonstrances adressées aux commissaires par des ecclésiastiques soucieux de réparation concernent des faits survenus après les troubles, c’est-à-dire dans la période pour laquelle ils peuvent espérer restitution.
- 36 M. Béziers, Histoire sommaire de la ville de Bayeux, Caen, J. Manoury, 1773, p. 3-16.
- 37 AD Isère, 7 H 8, pièce non numérotée (14 octobre 1563).
30Cette réécriture de l’histoire a souvent contaminé l’ensemble de l’historiographie fondée sur ces récits. En 1563, l’évêque et les chanoines de Bayeux assurent ainsi à Viole et la Guesle que les protestants « depuis l’édit, ont emporté, prins et dérobé les cloches tant des Fauxbourgs et de cette ville, que des lieux et paroisses circonvoisines »36. Ce n’est peut-être pas faux, mais la date tombe opportunément après la conclusion de l’édit d’Amboise et interdit du coup aux voleurs de prétendre à l’amnistie. Semblablement, les prêcheurs de Grenoble se plaignent à Vieilleville des vols advenus « durant les troubles par cy devant passé [sic] et encores puis le moys de mars dernier et que feust venu à la notice la paix »37. Le larcin est d’autant plus blâmable que la nouvelle – la notice – de la paix est publique et connue de tous : nul n’en peut prétendre cause d’ignorance. Les ecclésiastiques visent ainsi la requalification de l’acte (prescrit) de guerre en acte (répréhensible) de larcins en période de paix. De la sorte, les soldats huguenots, mais aussi les iconoclastes, sont transformés en simples voleurs.
- 38 C’est la limite du travail de V. Carrière, Introduction aux études d’histoire ecclésiastique local (...)
31Il devient dès lors difficile de dater avec certitude les vols d’objets ecclésiastiques à partir de ces sources. De cet observatoire, on prend conscience avec étonnement que les vols ont toujours été commis par deux fois, en un temps historique et en un temps juridique, pendant les troubles mais aussi après les troubles. La politique d’oubli fait bégayer l’histoire des guerres de Religion ; elle produit, tel un miroir déformant, un double fonctionnel conforme aux requêtes judiciaires. Il en ressort qu’il faut utiliser avec la plus grande précaution les remontrances catholiques pour dater, et parfois même pour retracer le temps des troubles. Produits textuels destinés à se vendre sur un marché spécifique – celui de la paix, celui de l’oubli –, leur but n’est pas d’écrire une histoire réelle et advenue mais bien d’anticiper des réactions officielles et d’obtenir remboursement38. Autrement dit, les plaintes catholiques ne peuvent être extraites telles quelles des archives, sans être mises en regard des textes de loi qui guident leur rédaction, mais aussi des rapports de force locaux et des circonstances précises de leur réception.
Les enjeux matériels du souvenir et de l’oubli
- 39 Article 3 de l’Édit d’Amboise : « Que en toutes les villes esquelles lad. Religion estoit jusques (...)
32Ècrire l’histoire revêt le même caractère d’urgence pour les huguenots, mais souvent avec moins de succès dans la mesure où, très souvent, leur font défaut les institutions qui permettent de certifier, d’attester les événements passés et de tirer ainsi le meilleur bénéfice de la politique d’oubli. Il en va ainsi des « temples de concession ». En vertu de l’Édit d’Amboise (1563) en effet, les réformés ont le droit d’établir un temple en centre-ville là où le culte était célébré à la conclusion de la paix, soit le 7 mars 156339. Dans la plupart des cas, ce droit ne pose aucun problème puisque la clause concerne essentiellement des communautés à majorité protestante, dont les instances dirigeantes ne formulent pas d’objections à l’installation d’un prêche. Mais quelques cités soulèvent de véritables problèmes d’authentification aux commissaires : comment certifier un événement historique – la présence continue d’un culte – à une époque où tous les témoignages sont sujets à caution ? L’histoire n’est pas une science expérimentale dans laquelle on pourrait répéter les expériences indécises. Les doutes des commissaires disent ici non plus seulement les difficultés des huguenots à exister dans l’espace, mais aussi dans le temps. Leur impuissance à insérer leur existence dans une histoire séculaire les expose donc non seulement aux critiques des catholiques, qui les accusent d’être de la « nouvelle religion », mais elle les empêche parfois d’obtenir des temples tant tout manque pour établir le passé.
- 40 Sur l’iconoclasme comme pratique de marquage spatial, O. Christin, Une révolution symbolique. L’ic (...)
33La question se pose à Argentan où, à défaut d’obtenir un prêche de concession, les huguenots prétendent être éligibles au rang de ville ayant célébré le culte réformé « tant auparavant que depuys le septiesme mars [1563]». Pour appuyer leurs dires, ils fournissent aux commissaires Viole et La Guesle plusieurs éléments d’attestation, sous forme de « pieces attachées » à leur requête. Il apparaît dans ces dernières qu’il « y auroit eu ministre envoyé dès janvier mil cinq cens soixante et ung » et par ailleurs que « depuys le dix‑septiesme mars dernier que les ymages furent brisées, il y auroit eu presches et prosnes de ladicte religion au temple Sainct‑Germain, qui est ès enclos de ladicte ville ». L’iconoclasme est ici non seulement instrumentalisé comme marqueur spatial mais aussi comme marqueur temporel : il sert à dater l’appropriation huguenote40.
- 41 BN, Ms. fr. 4053, fol. 8 vo-9 vo (8 octobre 1563).
- 42 Sur le sujet, voir les mises au point récentes de J.-C. Blanchetière, « Les origines de la Réforme (...)
34Mais les pièces qu’ils produisent ont dix jours de retard, puisque l’iconoclasme qu’elles signalent remonte au 17 et non au 7 mars – les huguenots espéraient‑ils tromper la vigilance des commissaires ? Pour ces derniers, les pièces n’attestent en rien qu’il y eut des prêches « le septiesme dudit moys de mars dernier, ce qui est requis par ledict, ne pareillement ès jours prochains precedens icelluy jour, ains y avoit apparence par ladicte attestation que, s’il y en avoit eu, ce seroit depuys le dix septiesme dudit moys de mars »41. À dix jours près, ce qui ailleurs aurait pu être accordé par la grâce des commissaires devient une supercherie historique. La maladresse des pièces probatoires jette le discrédit sur tout un argumentaire, qui ne manque pourtant pas d’atouts : quand les réformés soulignent que le prêche d’Alençon n’est pas « de concession » mais bien un prêche historique (« combien que ladicte religion fust de present exercée en la ville d’Alençon, c’estoit parce que leur y avoit tousjours esté tenu de exercice et mesmes le septiesme mars »), la précision, authentique, aurait dû faire mouche et octroyer de facto aux huguenots du bailliage un autre lieu de culte42.
Conclusion : oubli et écriture de l’histoire
- 43 S. Wahnich éd., Une histoire politique de l’amnistie..., ouvr. cité, p. 47.
35De l’oubli ou du souvenir d’un événement passé découlent ainsi des enjeux qu’on ne peut résumer en termes d’intérêts scientifiques : l’installation d’un prêche, le maintien d’une procession commémorative, l’espoir de récupérer un reliquaire, poussent les habitants à écrire l’histoire. Celle-ci se fait donc en dehors des cabinets des historiens. Et l’amnistie est indissociable des mécanismes de réécriture et de réinterprétation de l’histoire, comme le montre Sophie Wahnich, processus qui proposent des filiations avec le présent ou, au contraire, les récusent. Elle constitue par conséquent toujours « un révisionnisme historique qui change la focale et l’éclairage sur les événements »43. Telle révision est précisément l’enjeu d’une grande partie des remonstrances qui sont adressées aux commissaires.
- 44 M. Yardeni, « Histoires de villes, histoires de provinces et naissance d’une identité française au (...)
36Pour les sujets comme pour les agents du roi, l’enjeu de l’oubli, c’est, au sens propre, de refaire l’histoire. Pour faire l’histoire de l’oubli donc, importe sans doute autant de rétablir la vérité historique que d’étudier les procédés par lesquels les habitants, et en particulier les plus habiles, souvent les plus forts, maintiennent cette vérité à distance, font sombrer l’impardonnable dans l’oubli ou, à l’inverse, exagèrent la gravité de peccadilles. Loin d’être cantonnée aux cabinets des historiographes, l’histoire des troubles se rédige au ras du sol, elle se nourrit de et nourrit l’érudition locale44. Il s’agit dès lors de mettre en évidence les techniques permettant aux commissaires de se prononcer sur la vérité historique, à certains habitants de la contrefaire et à d’autres de la réhabiliter. Parce que l’oubli est une variable lâche qui suscite d’intenses conflits de qualification mais aussi de datation des événements, on doit se donner pour mission non simplement de dire ce que fut la vérité historique, mais aussi l’enjeu de sa « fixation » aux yeux des acteurs.
- 45 Congratulation sur la paix générale faite au mois de mars 1598.
37Paradoxalement, alors que l’oubli se trouve tiraillé entre guerre et paix, dans une tension qui en menace la portée, la mémoire devient pendant les guerres de Religion un signe de positionnement politique. Elle constitue une faculté maîtrisée, dont on fait usage pour se situer politiquement ou religieusement. Ainsi en va-t-il d’Étienne Pasquier, dont la Congratulation45 de 1598 présentée à Henri IV, qui fait référence à la paix signée en mars avec le duc de Mercoeur (le dernier grand seigneur ligueur), accomplit une sorte de « rite d’oubli ». Le texte insiste sur la
- 46 U. Langer, « La rhétorique de la conciliation dans la Congratulation sur la paix générale, faicte (...)
transformation singulière par laquelle nous eschangions le souvenir horrible du passé, en une allégresse presente […] comme celuy qui, ayant esté agité d’une longue tourmente, après qu’il est surgy à bon port, leve les mains, & les yeux au Ciel, va à l’Eglise acquitter ses vœux, raconte à ses voisins & amis le danger dont il est eschappé ; & à peu dire, le contentement qu’il a d’estre sur la terre ferme, luy fait oublier toutes les traverses passées46
38Alors que le souvenir des conflits passés permet un positionnement dans le cadre des polémiques entre catholiques et protestants, l’oubli, pour sa part, correspond au choix du parti royal (pacification). D’où le choix historiographique de l’oubli : les récits de la guerre (Mémoires) préparent la paix en écartant ou minorant certains épisodes. Marie-Madeleine Fragonard a remarqué que
- 47 M.-M. Fragonard, La Mémoire des guerres de Religion, ouvr. cité, introduction, p. 9.
Les faits sont souvent horribles, et les divers récits et pamphlets recensés par Denis Crouzet témoignent assez d’une cruauté que tous les textes plus élaborés littérairement ne racontent pourtant pas : on pourrait faire un catalogue des in-racontables et des in-racontés, genres par genres et génération par génération. Les Mémoires par exemple ne racontent pas le massacre de la Saint-Barthélemy, exceptés ceux de Marguerite de Valois et quelques pages de Sully ; Aubigné ne consacre que 20 lignes dans Sa vie à ses enfants, alors que les Tragiques détaillent le cauchemar, mais cette fois en « vision divine », et non comme un témoignage : l’épique peut dire l’abominable.47
Notes
1 H. Weinrich, Léthé : art et critique de l’oubli, Paris, Fayard, 1999 ; Le Temps compté, Grenoble, Jérôme Millon, 2009 ; M. Wolfe, « Amnesty and oubliance at the end of the French Wars of Religion », Cahiers d’histoire [revue du département d’histoire de l’université de Montréal], 1996, vol. XVI, n° 2, p. 45-68 ; B. Diefendorf, « Reconciliation and remembering: A dévot writes the history of the Holy League », Cahiers d’histoire [revue du département d’histoire de l’université de Montréal], 1996, vol. XVI, n° 2, p. 69-79 ; P. Benedict, « Divided Memories? Historical calendars, commemorative processions, and the recollection of the Wars of Religion during the Ancien Régime», French History, 2008, vol. 22, n° 4, p. 381-405 ; J. Berchtold et M.-M. Fragonard éd., La Mémoire des guerres de Religion. La concurrence des genres historiques, xvie-xviiie siècles, Genève, Droz, 2007 ; M. Greengrass, « Amnistie et oubliance : un discours politique autour des édits de pacification pendant les guerres de Religion », dans Paix des armes, paix des âmes, P. Mironneau et I. Pebay-Clottes éd., Paris, Imprimerie Nationale, 2000, p. 113-123.
2 P. Nora éd., Les Lieux de mémoire, Paris, Gallimard, 1984, « Introduction ».
3 J. Berchtold et M.-M. Fragonard éd., La mémoire des guerres de Religion, ouvr. cité, p. 9.
4 Ibid., chap. I : « La mémoire individualisée ».
5 M. Halbwachs, Les cadres sociaux de la mémoire (1925), La Haye, Éd. Mouton, 1975, p. 279. Cette définition a été reprise dans le colloque publié par F. Pernot et V. Toureille éd., Lendemains de guerre. De l’Antiquité au monde contemporain : les hommes, l’espace et le récit, l’économie et le politique, Berne, P. Lang, 2010.
6 La meilleure édition des Édits de pacification, sous la direction de Bernard Barbiche, est en ligne : <http://elec.enc.sorbonne.fr/editsdepacification/edit_02#art_02_09> (consulté le 9 juin 2016). Sauf mention contraire, toutes les citations de ces Édits sont extraites de cette édition.
7 Édit de Saint-Germain en Laye (1570), <http://elec.enc.sorbonne.fr/editsdepacification/edit_05 #art_05_01> (consulté le 12 octobre 2016).
8 P. Ricœur, La Mémoire, l’Histoire, l’Oubli, Paris, Éd. du Seuil, 2000.
9 Archives municipales (AM), Mâcon, GG 122, pièce 31 (janvier 1571).
10 S. Wahnich écrit que « l’amnistie est souvent associée à l’amnésie, du fait qu’elle imposerait un impératif d’oubli. En fait, elle est plutôt l’expression de l’obligation de ne pas rappeler les malheurs du passé […]. Dans les faits, elle n’impose aucun oubli privé et cette privatisation du débat déplace simplement les enjeux du récit historique ». S. Wahnich éd., Une histoire politique de l’amnistie, Paris, PUF, 2007, p. 47.
11 N. Loraux, « De l’amnistie et de son contraire », dans Usages de l’oubli, Y. H. Yerushalmi, N. Loraux, H. Mommsen, J.-C. Milner et G. Vattimo éd., Paris, Éd. du Seuil, 1988, p. 30.
12 Édit de Nantes (1598), <http://elec.enc.sorbonne.fr/editsdepacification/edit_12#art_12_01> (consulté le 12 octobre 2016).
13 S. Moirand, « Discours, mémoires et contextes : à propos du fonctionnement de l’allusion dans la presse », Cognition, représentation, langage, 2007, HS, n° 6, <http://corela.revues.org/1567> (consulté le 28 janvier 2015).
14 B. Diefendorf, « Waging peace: memory, identity, and the Edict of Nantes », Religious Differences in France, K. Perry Long éd., Kirksville, Truman University Press, 2006, p. 19-49.
15 M. Greengrass, « Amnistie et oubliance… », art. cité, p. 113-123.
16 A. Loysel, Amnestie, ou de l’oubliance des choses des maux faicts et receus pendant les troubles & à l’occasion d’iceux, Paris, Abel L’Angelier, 1595, p. 16. Sur les remontrances non parlementaires, voir P.-A. Mellet, « L’expression politique de la plainte : les Remonstrances aux États généraux de Blois de 1588 », dans La plainte à la Renaissance, F. Alazard éd., Paris, H. Champion, 2008, p. 327-344.
17 J. Foa, Le tombeau de la paix. Une histoire des édits de pacification, Limoges, Pulim, 2015.
18 L. Daireaux, « De la paix à la coexistence : la mise en œuvre de l’Édit de Nantes en Normandie au début du xviie siècle », Archiv für Reformationsgeschichte, 2006, p. 212 et suiv.
19 Archives départementales (AD), Dordogne, B 3545, fol. 308 vo.
20 Archives nationales (AN), TT 268 (1), fol. 169 et suiv., publié par O. Christin, « Amis, frères et concitoyens. Ceux qui refusèrent la Saint-Barthélemy (1572) », Cahiers de la Villa Gillet, 2000, no 11, p. 71-94.
21 O. Christin, « Identités urbaines et pluralisme religieux : les pactes d’amitié entre confessions en France à l’époque des guerres civiles », dans Religion et identité, G. Audisio éd., Aix-en-Provence, Publications de l’Université de Provence, 1998, p. 69-76.
22 T. Amalou, « La célébration de la monarchie et le loyalisme des notables de Senlis (1589-1610) », dans Paix des armes, paix des âmes, ouvr. cité, p. 432.
23 S. Gal, « Le serment pendant les guerres de Religion, contrat implicite et rituel de passage », Le destin des rituels : faire corps dans l’espace urbain, Italie-France-Allemagne. Il destino dei rituali : « faire corps » nello spazio urbano, Italia-Francia-Germania, G. Bertrand et I. Taddei éd., Rome, École française de Rome, 2008, p. 227-244.
24 P. Siblot, « De la dénomination à la nomination », Cahiers de praxématique, 2001, n° 36, p. 189-214 ; et du même, « Nomination et production de sens : le praxème », Langages, 1997, n° 127, p. 55.
25 J. Foa, Le tombeau de la paix, ouvr. cité.
26 Mémoires de Vieilleville, dans Collection Universelle des mémoires particuliers relatifs à l’histoire de France, tome XXXII, contenant les mémoires de François de Scépeaux, Sire de Vieilleville et Comte de Duretal, Maréchal de France ; commençant en 1527 et finissant en 1571, Londres, s. n., 1787, livre 10e, chapitre I, p. 285.
27 C. de Rubys, Histoire veritable de la ville de Lyon, Lyon, B. Nugo, 1604, p. 409.
28 Bibliothèque nationale (BN), site de Richelieu, Manuscrits français (ms. fr.) 15878, fol. 110 vo (18 août 1563).
29 AD Dordogne, B 3545, fol. 314 (28 décembre 1570).
30 BN, ms. fr. 15878, fol. 110 (18 août 1563).
31 AM Dijon, B 200, fol. 43 et suiv. (12 août 1563).
32 AM Agen, GG 201, pièce 6 (avril 1571).
33 BN, Ms. fr. 16221, fol. 122 vo (27 août 1563). Toutefois, l’affaire n’en reste pas là puisque la décision des commissaires, en théorie appelable uniquement devant le roi, est cassée par le parlement de Rouen le 25 août 1564. Le 20 janvier 1567 enfin, à la demande de Jacques Faulcon, écuyer, et des habitants huguenots de Lisieux, le roi casse cette dernière décision et « impose à ladicte Cristine silence » (c’est-à-dire la forme la plus superficielle de l’oubli).
34 AM Clermont, BB 30, non folioté (20 novembre 1570).
35 Mêmes remarques à propos de l’Édit de Nantes dans D. C. Margolf, « Adjucating memory : law and religious difference in early modern Seventeenth-Century France », The Sixteenth Century Journal, 1996, vol. 27, n° 2, p. 399-418.
36 M. Béziers, Histoire sommaire de la ville de Bayeux, Caen, J. Manoury, 1773, p. 3-16.
37 AD Isère, 7 H 8, pièce non numérotée (14 octobre 1563).
38 C’est la limite du travail de V. Carrière, Introduction aux études d’histoire ecclésiastique locale, Paris, P. Letouzey et Ané, 1934-1940, 3 vol.
39 Article 3 de l’Édit d’Amboise : « Que en toutes les villes esquelles lad. Religion estoit jusques au septiesme de ce present moys de mars exercée, oultre les autres villes qui seront, ainsi que dict est, particulierement specifiées desd. bailliages et seneschaulcées, le mesme exercice sera continué en ung ou deux lieux dedans lad. Ville » (<http://elec.enc.sorbonne.fr/editsdepacification/edit_02#art_02_03>, consulté le 12 octobre 2016). La date du 7 mars fait référence à la « conférence de Saint-Mesmin », à côté d’Orléans alors assiégée (7 et 8 mars 1563). La conférence réunit catholiques (Catherine de Médicis, Montmorency) et protestants (Condé, d’Andelot), et il y fut couché par écrit le texte de l’Édit d’Amboise.
40 Sur l’iconoclasme comme pratique de marquage spatial, O. Christin, Une révolution symbolique. L’iconoclasme huguenot et la reconstruction catholique, Paris, Éd. de Minuit, 1991.
41 BN, Ms. fr. 4053, fol. 8 vo-9 vo (8 octobre 1563).
42 Sur le sujet, voir les mises au point récentes de J.-C. Blanchetière, « Les origines de la Réforme à Alençon (1520-1572) », et D. Bouchard, « Catholiques et protestants à Alençon de l’Édit de Nantes à sa révocation (1598-1685) », Société historique et archéologique de l’Orne, 2003, vol. 22, n° 4, respectivement p. 5-79 et p. 81-121.
43 S. Wahnich éd., Une histoire politique de l’amnistie..., ouvr. cité, p. 47.
44 M. Yardeni, « Histoires de villes, histoires de provinces et naissance d’une identité française au xvie siècle », Journal des savants [fondé en 1665], 1993, 5e série, t. 72, n° 1, p. 111-134.
45 Congratulation sur la paix générale faite au mois de mars 1598.
46 U. Langer, « La rhétorique de la conciliation dans la Congratulation sur la paix générale, faicte au mois de mars 1598… d’Étienne Pasquier », dans De Michel de L’Hospital à l’Édit de Nantes. Politique et religion face aux Églises, Th. Wanegffelen éd., Clermont-Ferrand, Presses universitaires Blaise-Pascal, 2002, p. 409.
47 M.-M. Fragonard, La Mémoire des guerres de Religion, ouvr. cité, introduction, p. 9.
Haut de pagePour citer cet article
Référence électronique
Paul-Alexis Mellet et Jérémie Foa, « Une « politique de l’oubliance » ? Mémoire et oubli pendant les guerres de Religion (1550-1600) », Astérion [En ligne], 15 | 2016, mis en ligne le 08 novembre 2016, consulté le 13 février 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/asterion/2829 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/asterion.2829
Haut de pageDroits d’auteur
Le texte seul est utilisable sous licence CC BY-NC-ND 4.0. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.
Haut de page