Latin technique du XIIe au XVIIIe siècle
Résumé
Programme de l’année 2018-2019 : I. Les dialogues philosophiques de Jacques Lefèvre d’Étaples. — II. Textes sur l’alchimie et la magie.
Texte intégral
1I. On ignore à partir de quelle année Jacques Lefèvre d’Étaples (~1460-1537) commence à enseigner la philosophie et les mathématiques au collège parisien du Cardinal Lemoine. Il rédige dès 1490 son Introduction aux livres métaphysiques d’Aristote (Introductio in metaphysicorum libros Aristotelis), publiée en 1494 chez l’imprimeur parisien d’origine allemande Johannes Higman. Dans l’intervalle, en 1492, son premier livre imprimé paraît chez le même Higman, contenant ses Paraphrases sur toute la philosophie naturelle d’Aristote (Totius Aristotelis philosophiæ naturalis paraphrases), agrémentées de deux dialogues. Le premier est une discussion de niveau élémentaire sur les concepts fondamentaux de la physique d’Aristote, tandis que le second porte sur les difficultés de ladite physique. Quatre dialogues figurent en outre dans le volume consacré à la métaphysique, en plus de l’Introduction proprement dite.
- 1 Il s’agit de Stephanus Martini, originaire de Týn en Bohème (Eugene Rice, The Prefatory Epistles of (...)
- 2 « Charissime Stephane, […] tu curasti ut nostræ paraphrases castigatæ […] prodeant in lucem […]. Bo (...)
- 3 Dans l’épître dédicatoire des Paraphrases, adressée au chancelier de l’université Ambroise de Cambr (...)
- 4 Le voyage de Lefèvre en Italie a eu lieu durant l’hiver 1491-1492, à une époque où l’Introduction a (...)
- 5 « Interrogasti me, doctissime Germane, cur per dialogos […] commentariolos tibi dicatos composuerim (...)
- 6 « Si ita feceris, inquit [Gonterius], admonebis qui docturi erunt quo pacto interrogare debeant, in (...)
2Ces six dialogues ont été conçus pour servir de compléments didactiques aux textes qu’ils accompagnent. Dans la préface des Dialogues introductifs à la physique, Lefèvre explique que c’est l’un de ses élèves1, chargé de superviser l’impression des Paraphrases, qui lui a suggéré d’y ajouter des « dialogues introductifs », en lui faisant « très amicalement » valoir que ce serait dans l’intérêt de « la foule de nos co-philosophants »2, c’est-à-dire des étudiants en philosophie3 ; pour le remercier de cette fructueuse suggestion, Lefèvre lui dédie les deux dialogues. Pareillement, les quatre Dialogues expliquant l’Introduction métaphysique ont pour origine la requête d’un autre de ses élèves, « l’honnête adolescent Guillaume Gontier, qui en m’accompagnant en Italie4 m’a rendu de nombreux services »5. Là encore, Lefèvre s’est laissé « aisément persuader », car Gontier lui a dit : « Si tu procèdes ainsi [c’est-à-dire si tu rédiges une introduction dialoguée à la doctrine d’Aristote], tu indiqueras aux futurs professeurs de quelle manière ils doivent interroger et enseigner les choses sur lesquelles porte l’interrogation, et tu conseilleras utilement à la fois l’élève et l’enseignant »6.
- 7 Pour un tableau d’ensemble, voir Jean-Marie Flamand, « Lefèvre d’Étaples et le renouveau de l’ensei (...)
- 8 « In hoc opere continentur totius philosophiæ naturalis paraphrases, adjecto ad litteram familiari (...)
- 9 « […] Aristotelicas paraphrases, quas scholasticorum utilitati paravi qui in Aristotelica philosoph (...)
3Le premier des deux Dialogues introductifs à la physique a été examiné cette année. Pour en saisir la portée, il faut d’abord rappeler en quoi consiste la méthode pédagogique de Lefèvre7. L’élève n’a pas immédiatement accès aux textes d’Aristote, beaucoup trop complexes. Sa première tâche est d’apprendre par cœur les définitions et/ou les règles propres à chaque partie de la philosophie aristotélicienne, à la suite de quoi il est supposé lire et mémoriser les Paraphrases et autres Introductions de Lefèvre, et c’est seulement plus tard qu’il pourra lire Aristote en traduction latine (l’approche de Lefèvre n’est pas philologique, il s’adresse à des collégiens qui ignorent le grec ou n’en possèdent que des rudiments). En ce qui concerne les Paraphrases sur toute la philosophie naturelle d’Aristote, il est intéressant de noter qu’à partir de 1a réédition de 1502 elles sont « éclaircies par l’ajout d’un commentaire littéral familier »8 de son élève et collaborateur Josse Clichtove (1472-1543). Lefèvre avait composé ses Paraphrases en ayant à l’esprit « l’utilité des écoliers qui abordent l’étude de la philosophie d’Aristote »9, mais elles s’étaient révélées, à l’usage, encore trop difficiles pour des débutants ; d’où les gloses ajoutées par Clichtove (avec l’accord de l’auteur, cela va de soi), qui en aplanissent toutes les aspérités.
- 10 Le corpus des écrits d’Aristote consacrés à la philosophie naturelle commence par les huit livres d (...)
- 11 En voici la séquence : Paraphrasis octo physicorum Aristotelis ; Paraphrasis quattuor de cælo et mu (...)
- 12 « Conducet tibi […] si introductorios dialogos paraphrasicæ expositioni prælegeris, præsertim primu (...)
4C’est pour cette même raison que les deux Dialogues introductifs à la physique ont été rédigés par Lefèvre, suivant les conseils de l’élève qui, en relisant les épreuves des Paraphrases, avait pris la mesure de la difficulté propre à la section concernant la Physique10. Dans le plan du volume contenant les Paraphrases, où chaque partie de la philosophie naturelle se voit attribuer sa paraphrase particulière11, ces dialogues constituent un appendice de la première paraphrase (celle qui porte sur la Physique), mais Lefèvre précise que le lecteur aura intérêt à « commencer par lire les dialogues introductifs à l’exposé paraphrastique » de la Physique avant de lire la paraphrase elle-même – « surtout le premier », précise-t-il12. En effet, le second dialogue, portant sur les difficultés de la Physique, est par nature moins fluide et n’a pas forcément vocation à être lu d’emblée ; il est d’ailleurs abondamment glosé par Clichtove, à la différence du premier, qui n’en avait nul besoin étant donné son caractère élémentaire.
- 13 Ce ne sont pas des sophistes qui vendent leur savoir. La distinction platonicienne entre philosophi (...)
- 14 « Noere, huic coæquali tuo physicam introductionem procura, quam ter quaterve repetitis vicibus leg (...)
5Les six dialogues philosophiques de Lefèvre ont pour cadre l’Antiquité grecque, sans plus de précisions, et mettent en scène les mêmes personnages. Les protagonistes du premier dialogue sont l’adolescent Épiponus (ἑπίπονος, laborieux) et les deux philosophes Hermeneus (ἑρμηνεύς, interprète, celui qui explique) et Oneropolus (ὀνειροπόλος, interprète des songes). Dans la scène d’ouverture, Hermeneus explique à son ami Oneropolus que le riche homme d’affaires Polypragmon (πολυπράγμων, qui s’occupe de beaucoup de choses) souhaite assurer à son fils Épiponus l’éducation philosophique dont lui-même n’a pu bénéficier. Après s’être assurés que l’adolescent présente de bonnes dispositions à l’étude, les deux philosophes acceptent de prendre en charge sa formation intellectuelle à titre amical13. Ils demandent à leur élève Noérus (νοερός, intelligent) de procurer à Épiponus « l’Introduction à la physique, pour qu’il la lise trois ou quatre fois de suite et l’apprenne »14.
- 15 « […] primum [dialogum], qui præcedenti introductioni servit » (Ad lectorem).
- 16 En intégrant son livre à l’Antiquité fictive du dialogue, Lefèvre laisse entendre qu’il est si fidè (...)
- 17 « 1o natura, materia, forma, res naturalis ; 2o causa, materia (propinqua), forma (remota), efficie (...)
6Il s’agit bien entendu de l’Introduction à la paraphrase physique (Introductio in physicam paraphrasim) de Lefèvre d’Étaples, servant de préambule à la première des Paraphrases contenues dans le volume ; c’est pourquoi Lefèvre dit dans sa préface au lecteur que le premier dialogue « est lié à l’introduction qui précède [la paraphrase] »15. Le dialogue met ainsi en scène – et en abyme – le mode d’emploi de l’ouvrage16. Ladite introduction consiste en une figure récapitulant les principales notions de la physique aristotélicienne, assortie d’un ensemble de définitions. La fonction mnémotechnique de ce dispositif est évidente, et Épiponus doit avant toute chose apprendre par cœur tant la figure que les définitions. Voici la liste de ces notions ou concepts17 :
- 1o nature, matière, forme, chose naturelle ;
- 2o cause, matière (prochaine), forme (éloignée), efficiente (par soi), fin (par accident), acte, puissance ;
- 3o mouvement, génération (par soi), corruption (par accident), augmentation (acquisitif), diminution (déperditif), altération (naturel), mutation (violent), sujet (indifférent), forme, tout ;
- 4o infini ;
- 5o lieu, commun, propre, naturel, violent ;
- 6o vide ;
- 7o temps, présent, passé, futur.
- 18 Voir ci-dessus, note 6.
- 19 « Neque quæ sunt alterius artis aut peritiæ sibi vendicat [philosophia], sed logica logicis, et mat (...)
7Le dialogue va ensuite consister à éclairer, par questions et réponses, la compréhension des notions par l’élève, en suivant l’ordre établi dans la figure. Lefèvre nous donne à voir, comme sur une scène de théâtre, le déroulement d’un cours idéal d’introduction à la physique, fondé sur son propre manuel. En suivant ce modèle, comme le disait l’élève Gontier cité plus haut, « les futurs professeurs » sauront « de quelle manière ils doivent interroger » leurs élèves et comment « enseigner les choses sur lesquelles porte l’interrogation »18. Pour rompre la monotonie de la révision des notions, le dialogue est rythmé par des interruptions et des changements d’interlocuteur, ainsi que par des traits d’humour, des citations poétiques et des digressions. Ces dernières sont particulièrement instructives, car elles permettent à Lefèvre, par le truchement de ses personnages, de sortir du cadre strict de la physique pour se livrer à des réflexions d’ordre métaphysico-théologique ou éthique. Ce faisant, il paraît se mettre en contradiction avec la règle qu’il a lui-même énoncée dans la préface au lecteur des Paraphrases19 :
- 20 Cf. Pierre d’Ailly (1351-1420), Recommendatio sacræ scripturæ : « ordinatissimus omnium artifex Chr (...)
- 21 Lefèvre veut dire ici que la question de l’existence et des propriétés de l’infini en acte relève d (...)
[La philosophie] ne cherche pas à s’approprier ce qui relève d’un autre art ou d’un autre domaine d’expérience ; elle laisse aux logiciens le soin de trancher les questions de logique, aux mathématiciens les questions de mathématiques, et aux métaphysiciens les choses divines, observant la justice envers tous. C’est pourquoi, chaque fois qu’il arrivera que l’on se demande si quelque chose peut exister en vertu de la puissance qui se trouve au-dessus de la Nature alors qu’elle ne peut pas exister en vertu de la puissance de la Nature, comme par exemple l’infini ou le vide, notre philosophie naturelle n’a aucun droit là-dessus mais laisse à une autre discipline le soin de le savoir. Elle préfère en effet le bel et admirable ordonnancement du monde, suprême et suprêmement stable, du souverain artisan de la Nature, qu’elle imite autant qu’elle le peut. Dans ce riche ordonnancement de l’univers, dont le très ordonné artisan des choses20 l’a pourvu, cette philosophie a placé son fondement. De là vient que ceux qui, à l’encontre de cet ordonnancement, désirent que tout leur appartienne, n’agissent plus de manière philosophique. Il y a en effet des bases et des fondements en dehors de la philosophie ; et je ne pense pas qu’un tel désir doive être accepté par un philosophe naturel, pas plus qu’un mathématicien ne peut admettre une ligne infinie21, car dès lors qu’il l’admet ses principes et ses spéculations périssent.
- 22 « Quod sciscitari concepi, forte præter propositum esse judicabis » (Dialogus primus).
- 23 « Et quamvis quod quæris huic loco minus sit accommodum, licet tamen aliquantulum tui gratia digred (...)
- 24 « Hæc tamen digressio me mirum in modum demulsit, et eam quantum possum memoriæ affigo mihi forte a (...)
8Lefèvre est parfaitement conscient du problème. C’est pourquoi Épiponus dit, à l’occasion d’une discussion sur la notion de cause finale, qu’il souhaiterait demander si le bonheur est la fin de la vie humaine mais qu’il a un scrupule à le faire, car « tu estimeras peut-être que l’idée qui me tracasse est en dehors de notre propos »22 ; à quoi Oneropolus répond : « Bien que ta question ne soit guère à sa place ici, il convient que pour toi l’on digresse quelque peu »23. Et à la fin de la longue digression qui s’ensuit, Épiponus se réjouit : « Cette digression m’a merveilleusement charmé et je la fixe, autant que possible, dans ma mémoire pour m’en montrer un jour plus digne »24. Si la distinction des disciplines est un principe essentiel de la pensée aristotélicienne, il n’est pas interdit, estime Lefèvre, de s’en écarter par moments dans un but pédagogique, pour faire sentir à l’élève que l’étude quelque peu aride des concepts de la physique s’inscrit dans un cadre plus large, afin de maintenir son attention en éveil et de satisfaire ses éventuelles attentes. La prise en compte par Lefèvre des modalités pratiques permettant de faciliter l’apprentissage d’une doctrine abstraite mérite d’être soulignée.
9II. Les séances restantes ont porté sur l’Épître chymique (Epistola chemica) du médecin parisien d’origine poitevine Nicolas Salomon, écrite en 1673 en réaction à la publication, l’année précédente, d’un Portrait de la philosophie occulte (Icon philosophiæ occultæ) composé par un autre médecin parisien, Claude Germain. Cette épître a été imprimée par Salomon en 1678 en appendice au tome II de sa Bibliothèque des philosophes [chymiques], recueil de textes alchimiques en langue française. Le Portrait de Germain et l’Épître de Salomon feront l’objet d’une édition conjointe dans un futur proche.
Notes
1 Il s’agit de Stephanus Martini, originaire de Týn en Bohème (Eugene Rice, The Prefatory Epistles of Jacques Lefèvre d’Étaples and Related Texts, New York, Columbia University Press, 1972, p. 15).
2 « Charissime Stephane, […] tu curasti ut nostræ paraphrases castigatæ […] prodeant in lucem […]. Bonum insuper tibi visum est nos introductorios dialogos adjicere, quod eo libentius feci quo magis tu […] optaveris petierisque amicissime nostrorum conphilosophantium turba exponendos » (Prologus … in physices introductorios dialogos).
3 Dans l’épître dédicatoire des Paraphrases, adressée au chancelier de l’université Ambroise de Cambrai (qui exerça ses fonctions de 1482 à 1495 et mourut l’année suivante), Lefèvre utilise une expression presque identique pour désigner les étudiants de philosophie de l’université de Paris : « philosophantium turba in hac alma Parisiorum academia ».
4 Le voyage de Lefèvre en Italie a eu lieu durant l’hiver 1491-1492, à une époque où l’Introduction aux livres métaphysiques d’Aristote, comme je l’ai dit, était déjà écrite.
5 « Interrogasti me, doctissime Germane, cur per dialogos […] commentariolos tibi dicatos composuerim. Hanc ratione accipe. Ad hoc faciendum, honestus adolescens Guillermus Gonterius, qui me per Italicam oram comitatus multa officia præstitit, facile induxit » (In dialogos introductionis metaphysicæ declaratorios … præfatio). Les dialogues sur la métaphysique sont dédiés à Germain de Ganay (mort en 1520), chanoine de Notre-Dame de Paris et membre du conseil du roi de France Charles VIII.
6 « Si ita feceris, inquit [Gonterius], admonebis qui docturi erunt quo pacto interrogare debeant, interrogataque docere, et simul utiliter discipulo consules et docenti » (ibid.).
7 Pour un tableau d’ensemble, voir Jean-Marie Flamand, « Lefèvre d’Étaples et le renouveau de l’enseignement universitaire parisien », dans l’ouvrage collectif Paris, carrefour culturel autour de 1500, Paris, Presses de l’université Paris-Sorbonne, 2016, p. 29-50. On lira aussi avec profit Richard Ooster-hoff, Making Mathematical Culture : University and Print in the Circle of Lefèvre d’Étaples, Oxford, Oxford University Press, 2018.
8 « In hoc opere continentur totius philosophiæ naturalis paraphrases, adjecto ad litteram familiari commentario declaratæ » (Paris, Hopyl, 1502 [1501 ancien style]).
9 « […] Aristotelicas paraphrases, quas scholasticorum utilitati paravi qui in Aristotelica philosophia initiandi sunt » (Totius Aristotelis philosophiæ naturalis paraphrases, épître dédicatoire).
10 Le corpus des écrits d’Aristote consacrés à la philosophie naturelle commence par les huit livres de la Physique proprement dite, qui en constituent la partie la plus abstraite et la plus ardue.
11 En voici la séquence : Paraphrasis octo physicorum Aristotelis ; Paraphrasis quattuor de cælo et mundo ; Paraphrasis duorum de generatione et corruptione ; Paraphrasis quattuor metheororum ; Paraphrasis trium de anima ; Paraphrasis libri de sensu et sensato ; Paraphrasis libri de memoria et reminiscentia ; Paraphrasis libri de somno et vigilia ; Paraphrasis libri de longitudine et brevitate vitæ. Lefèvre a donc paraphrasé l’ensemble du corpus, à l’exception des écrits spécifiquement consacrés aux animaux et au traité (apocryphe) sur les plantes. Il en résulte un fort volume, auquel s’ajoutent les deux dialogues et, à partir de 1502, le surcommentaire de Clichtove, qui multiplie par deux la longueur de l’ouvrage.
12 « Conducet tibi […] si introductorios dialogos paraphrasicæ expositioni prælegeris, præsertim primum […] » (Ad lectorem).
13 Ce ne sont pas des sophistes qui vendent leur savoir. La distinction platonicienne entre philosophie et sophistique est omniprésente chez Lefèvre, et il est évident qu’il s’est inspiré des dialogues de Platon pour écrire ses propres dialogues philosophiques, même si leur contenu est aristotélicien.
14 « Noere, huic coæquali tuo physicam introductionem procura, quam ter quaterve repetitis vicibus legat memoriæque mandet » (Dialogus primus).
15 « […] primum [dialogum], qui præcedenti introductioni servit » (Ad lectorem).
16 En intégrant son livre à l’Antiquité fictive du dialogue, Lefèvre laisse entendre qu’il est si fidèle à l’authentique doctrine d’Aristote qu’il aurait pu être utilisé en tant que manuel par les Anciens eux-mêmes.
17 « 1o natura, materia, forma, res naturalis ; 2o causa, materia (propinqua), forma (remota), efficiens (per se), finis (per accidens), actus, potentia ; 3o motus, generatio (per se), corruptio (per accidens), augmentatio (acquisitivus), diminutio (deperditivus), alteratio (naturalis), mutatio (violentus), subjectum (indifferens), forma, totum ; 4o infinitum ; 5o locus, communis, proprius, naturalis, violentus ; 6o vacuum ; 7o tempus, præsens, præteritum, futurum » (Introductio in physicam paraphrasim).
18 Voir ci-dessus, note 6.
19 « Neque quæ sunt alterius artis aut peritiæ sibi vendicat [philosophia], sed logica logicis, et mathematica mathematicis, et divina metaphysicis relinquit discutienda, ad omnes justitiam servans. Quo fit ut quoties inciderit sermo an quicquam ea potentia quæ supra naturam est, esse possit, quod naturæ potentia esse non potest, ut infinitum, ut vacuum, jus illic nostra naturalis philosophia nullum habet, sed alteri disciplinæ relinquit cognoscendum. Supponit enim illam pulchram et admirandam universi ordinationem, quæ illam summam et stabilissimam optimi naturæ opificis quantum potest imitatur. In qua decora universi ordinatione ipsi ab ordinatissimo rerum opifice concessa, hæc philosophia suum locavit fundamentum. Hinc evenit ut qui contra hanc ordinationem quicquam sibi admitti petunt, non amplius philosophice agant. Sunt enim extra philosophiæ bases et fundamenta ; neque a naturali philosopho potius id recipiendum esse censeo, quam a mathematico lineam esse infinitam, quo admisso, sua principia et suæ contemplationes pereunt » (Ad lectorem).
20 Cf. Pierre d’Ailly (1351-1420), Recommendatio sacræ scripturæ : « ordinatissimus omnium artifex Christus ».
21 Lefèvre veut dire ici que la question de l’existence et des propriétés de l’infini en acte relève de la métaphysique, tandis que les mathématiques ne s’occupent que de l’infini en puissance – ou, pour le dire en termes cartésiens sans doute plus parlants pour un lecteur moderne, les mathématiques ne peuvent contempler qu’une étendue (ou une succession de nombres) indéfinie.
22 « Quod sciscitari concepi, forte præter propositum esse judicabis » (Dialogus primus).
23 « Et quamvis quod quæris huic loco minus sit accommodum, licet tamen aliquantulum tui gratia digredi » (ibid.).
24 « Hæc tamen digressio me mirum in modum demulsit, et eam quantum possum memoriæ affigo mihi forte alias amplius valituram » (ibid.).
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Référence papier
Jean-Marc Mandosio, « Latin technique du XIIe au XVIIIe siècle », Annuaire de l'École pratique des hautes études (EPHE), Section des sciences historiques et philologiques, 151 | 2020, 178-182.
Référence électronique
Jean-Marc Mandosio, « Latin technique du XIIe au XVIIIe siècle », Annuaire de l'École pratique des hautes études (EPHE), Section des sciences historiques et philologiques [En ligne], 151 | 2020, mis en ligne le 09 juillet 2020, consulté le 17 janvier 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/ashp/3761 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/ashp.3761
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