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3. La comédie médicale chez Molière et ses contemporains

Le Malade imaginaire à la reconquête de ses intermèdes

Judith le Blanc et Jacqueline Razgonnikoff

Résumés

Si Le Malade imaginaire est l’une des pièces les plus représentées de Molière, elle n’est que rarement mise en scène avec ses divertissements. Au XIXe siècle, les intermèdes sont peu à peu abandonnés, tandis qu’on assiste au siècle suivant à leur reconquête progressive. L’article se focalise sur certaines productions du Malade imaginaire qui ont marqué l’histoire de sa mise en scène, précisément parce qu’elles ont pris la dimension musicale et chorégraphique de l’œuvre à bras le corps. Il apporte un éclairage inédit aux mises en scène de Jean-Marie Villégier (1990) et Vincent Tavernier (2022) qui redonnent à entendre l’œuvre « dans sa splendeur » avec la musique intégrale de Marc-Antoine Charpentier, ainsi qu’à celle de Claude Stratz (2001), lequel passe commande d’une musique originale à Marc-Olivier Dupin. Il évoque enfin Le Malade imaginaire en La majeur, adaptation de l’œuvre en comédie musicale par Raphaël Callandreau (2021).

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Texte intégral

1Si Le Malade imaginaire est l’une des pièces les plus connues de Molière, elle est rarement mise en scène avec ses divertissements. Cela s’explique non seulement par le coût élevé qu’implique la participation de musiciens et chanteurs professionnels mais aussi par le désintérêt progressif des metteurs en scène pour l’intégration des intermèdes dans la représentation. Au XIXe siècle, ils sont peu à peu abandonnés, tandis qu’on assiste au siècle suivant à leur reconquête progressive. Et pourtant…

  • 1 Stephen Fleck, « L’Imaginaire du Malade : Musique, voix et masque dans la fête ultime de Molière », (...)
  • 2 Voir William Christie, entretien, programme de salle de la représentation au Châtelet, 1990.

2Le dialogue entre la magnifique prose de Molière et les effets sonores et musicaux de la pièce a été reconnu et analysé à plusieurs reprises, par Stephen Fleck entre autres1 ou par le chef William Christie en 19902. Il a fallu attendre le XXe siècle pour que les Comédiens-Français, qui tout au long des VIIIe et XIXe siècles, se sont contentés de défiler deux par deux à la fin de la cérémonie d’intronisation d’Argan en médecin, se décident à faire un sort (ou non) à sa partie musicale, sans retour à la version originale.

Rappel des faits à la Comédie-Française

  • 3 André Warnod, Le Figaro, 28 octobre 1944.

3En octobre 1944, Raimu joue Le Malade imaginaire dans une mise en scène de Jean Meyer, joyeusement décorée par Louis Touchagues, sur une musique d’André Jolivet. Les intermèdes sont menés par Jean-Louis Barrault dans le rôle de Polichinelle, « jusqu’à la cérémonie, avec les apothicaires disposés sur de grandes échelles et armés de clystères multicolores comme des bougies d’arbres de Noël. La musique de Jolivet précipite le rythme3 ».

4En décembre 1958, on assiste à une mise en scène de Robert Manuel, avec les décors et costumes de Suzanne Lalique, et une musique de Georges Auric (cérémonie d’après la musique de Charpentier) :

  • 4 Olivier Merlin, Le Monde, 30 décembre 1958.

Les intermèdes chorégraphiques conçus comme à l’époque du carnaval où la pièce a été écrite, ainsi que la féerie burlesque qui clôt le dernier acte et devait tant divertir le roi à Versailles en 1674, un an après la mort de Molière, ont été rétablis avec habileté. M. Georges Auric a enchaîné sur du papier de soie les mélodies de Marc-Antoine Charpentier et Mlle Léone Mail a fait danser sur pointes discrètes ses masques et ses bergères4.

  • 5 Voir Paul Morelle, Libération, 29 décembre 1958.

5D’aucuns regrettent cependant que les metteurs en œuvre n’aient pas été jusqu’au bout et n’aient pas rétabli le prologue5.

  • 6 Nobuko Akiyama, « Les mises en scène du Bourgeois gentilhomme et du Malade imaginaire : le problème (...)

6En 1970, dans la mise en scène de Jean-Laurent Cochet, avec la musique de Michel Magne, et la chorégraphie de Norbert Schmucki, seule la cérémonie finale est conservée dans une atmosphère parodique de cérémonie religieuse, dont l’irrévérence choque chaque soir certain public particulièrement chatouilleux. Il faut ajouter que le metteur en scène supprime au deuxième acte la scène où Cléante présente l’intrigue du petit opéra : « En raccourcissant grandement cette partie, Jean-Laurent Cochet compromet la tension dramatique de cette scène6 ». Par ailleurs, Cochet élude également les interventions d’Argan pendant le petit opéra, et surtout il néglige le second intermède des « Égyptiens vêtus en Maures », amené par Béralde pour divertir Argan et lui donner du « plaisir ». En 1993, dans sa mise en scène, Gildas Bourdet privilégie l’aspect clownesque et les entrées de cirque, sans aucun divertissement.

7Que devient dès lors Le Malade imaginaire quand les metteurs en scène prennent à cœur la dimension musicale et chorégraphique de l’œuvre et les vertus du mélange de la comédie, de la musique, du chant et de la danse ?

Le Malade imaginaire « dans sa splendeur », mise en scène de Jean-Marie Villégier et Christophe Galland, 1990

  • 7 Le Malade imaginaire, mise en scène de Jean-Marie Villégier, direction musicale de William Christie (...)
  • 8 Voir Judith le Blanc, « Le Malade imaginaire “dans sa splendeur” : conversation avec William Christ (...)

8C’est dans la mise en scène de Jean-Marie Villégier au Théâtre du Châtelet en 19907, que pour la première fois, on a pu entendre Le Malade imaginaire « dans sa splendeur » selon les mots écrits par Charpentier lui-même sur la partition conservée dans ses Mélanges, c’est-à-dire avec la musique prévue par le compositeur pour la création de 1673. C’est grâce à la redécouverte de la musique du premier intermède et de celle du petit opéra impromptu de l’acte II, scène 5 – que l’on croyait perdue à jamais – à la Bibliothèque de la Comédie-Française par le musicologue John Scott Powell que cette mise en scène avec l’intégralité de la musique a été rendue possible8.

  • 9 Voir « Grands entretiens en-scènes : Jean-Marie Villégier », entretien avec Pierre Notte, https://e (...)

9Jean-Marie Villégier refuse catégoriquement l’étiquette de « reconstitution ». Il revendique une esthétique théâtrale, répondant à chaque œuvre montée, avec des constantes : jeu face public, décor symétrique, dont la formalisation permet d’affirmer la théâtralité. Le public doit prendre conscience qu’il s’agit de « théâtre s’adressant à des gens ». L’objet final n’est pas la « mise en scène » mais la « représentation », qui peut être différente chaque soir, avec le public pour partenaire9. Villégier dit volontiers que, pour monter une pièce, il y a lutte. C’est ainsi qu’il avait dû aborder, quelques années auparavant l’opéra de Lully et Quinault, Atys, dont le succès lui a acquis une sorte de légitimité à s’attaquer à la comédie mêlée de Molière. La collaboration de William Christie, à la tête des Arts Florissants, et de Francine Lancelot, pionniers dans la redécouverte du répertoire baroque, ajoute encore à cette légitimité. (Figures 1 et 2)

Figure 1. Jean-Marie Villégier et William Christie

Figure 1. Jean-Marie Villégier et William Christie

Photo Arts florissants © Michel Szabo, 1987

  • 10 En 1983, Béatrice Massin rencontre Francine Lancelot et intègre la compagnie Ris et Danceries. Elle (...)

Figure 2. Béatrice Massin10, Jean-Marie Villégier et Francine Lancelot

Figure 2. Béatrice Massin10, Jean-Marie Villégier et Francine Lancelot

Photo Arts florissants © Michel Szabo, 1987

10Dans la captation conservée par l’INA, la gravure de Le Pautre, qui a immortalisé la reprise du Malade imaginaire dans le cadre des Divertissements de Versailles donnés par le roi en juillet 1674, est projetée pendant l’ouverture et sert de cadre de scène créant un effet de trompe-l’œil saisissant lorsque les musiciens de la fosse se confondent avec ceux de la gravure (Figure 3).

Figure 3. Le Malade imaginaire représentée dans le Jardin de Versailles devant la Grotte de Thétis en 1674, estampe de Jean Lepautre, 1676

Figure 3. Le Malade imaginaire représentée dans le Jardin de Versailles devant la Grotte de Thétis en 1674, estampe de Jean Lepautre, 1676
  • 11 Voir « Conversation avec Catherine Cessac », Dans les coulisses du Malade imaginaire : la musique d (...)

11Avant que la musique de Charpentier ne commence, un texte explicatif défile sur la gravure : il rappelle le contexte de la création de l’œuvre en 1673 et la redécouverte du musicologue John Scott Powell. Si l’on considère que le roi n’a jamais vu Le Malade imaginaire du vivant de Molière, et qu’en 1674, la pièce fut jouée à la Cour, « avec les défenses », selon les mots de Charpentier dans ses Mélanges, c’est-à-dire avec les restrictions musicales11 que faisait alors peser Lully sur la scène des théâtres parisiens, le spectacle entier peut se lire comme une sorte de réparation posthume adressée par-delà les siècles à Molière et à Charpentier. En effet, il est fort possible que Louis XIV, dont le prologue chante la gloire, ne l’ait jamais entendu puisque c’est un prologue a minima, chanté par une bergère soliste que l’on entendit à Versailles en 1674.

  • 12 Voir « Grands entretiens en-scènes : Jean-Marie Villégier », entretien avec Pierre Notte, https://e (...)
  • 13 Extraits du programme de la représentation au Châtelet, 1990.

12Jean-Marie Villégier s’est largement exprimé dans le programme de la représentation du Châtelet, ainsi que dans un entretien télévisé visible dans les archives de l’INA et au cours de quelques conversations privées12. Pour lui, Argan demeure jusqu’au bout enferré dans sa folie, et les intermèdes, petit à petit, vont lui permettre d’intégrer littéralement son fantasme, tout comme Monsieur Jourdain intronisé Mamamouchi, « comme si la théâtralisation envahissait progressivement la chambre d’Argan ». Son postulat de départ est que la représentation est le déroulé de la vie de Molière, illustrée dans les rêves éveillés d’Argan, comme si Argan/Molière avait le pressentiment de sa mort prochaine. Dès lors, c’est Béralde, autre dédoublement à la fois d’Argan et de Molière, qui devient le maître du jeu et introduit le carnaval dans le monde bourgeois, « colbertien », d’Argan. Béralde, devenu « homme de cour, ami des fêtes, philosophe libertin, ami des plaisirs, ami des comédiens et de la musique, et protecteur attitré de l’art », dont l’attitude « héroïque », face à la maladie, est de « laisser faire la nature », se présente comme s’il était le « survivant » à la fin de la carrière de Molière, de ce qu’a été le Molière triomphant des années des Plaisirs de l’Ile enchantée ». Jean-Marie Villégier croit à la véritable maladie de Molière et à sa volonté de se maintenir « face au roi et face à la mort ». Outre Béralde, présent dès le prologue, qu’il surplombe depuis une loge avec son triple masque argenté, Toinette, en entrant progressivement dans le jeu d’Argan, mène tout doucement vers la fantaisie pure du dernier divertissement et de la cérémonie : « À la fois têtu et veule, colérique et peureux, tour à tour pleurnichard, grincheux ou tyrannique, Argan à lui seul incarne tout ce qui résiste à un esprit carnavalesque13 ». Le prologue débute non dans le monde d’Argan, mais dans un monde hautement fantaisiste, avec le concours de chant entre les bergers de la pastorale à la rhétorique quelque peu maladroite, suivi de chœurs majestueux célébrant Louis, « le plus grand des rois ». Villégier a souhaité que l’orchestre soit visible et « costumé », William Christie étant lui-même vêtu d’une somptueuse tunique en lamé or, rebrodé dans le dos d’un immense soleil (Figure 4), façon métonymique de rendre présent Louis XIV à la représentation qu’il n’a en réalité jamais vue, façon de compenser son absence, dans cette perspective de réparation ou de revanche posthume et symbolique prise par Molière et Charpentier.

Figure 4. William Christie

Figure 4. William Christie

Photo Arts florissants © Michel Szabo, 1987

13Ce soleil brodé évoque celui du costume devenu mythique revêtu par le jeune Louis XIV dans le Ballet royal de la Nuit de Benserade en 1653 (Figure 5). Tout se passe comme si Louis XIV assistait au Malade imaginaire « dans sa splendeur », ce qui est une façon de réécrire l’histoire.

Figure 5. Ballet royal de la nuit, costume pour le Soleil levant, dansé par Louis XIV, 1653

Figure 5. Ballet royal de la nuit, costume pour le Soleil levant, dansé par Louis XIV, 1653

14Du côté de la direction musicale, William Christie présente ainsi la musique de Charpentier :

La musique de Charpentier se compose de passages successifs entre cinq mondes théâtraux différents, dont celui de la comédie n’est qu’un élément, et dont chacun a des associations et des relations différentes avec la musique. Faisons-en le survol : du monde doublement mythologique du Prologue (à la fois pastoral et royal), on traverse le monde d’Argan, celui de fantaisie italienne de Polichinelle, celui du ballet de cour du second intermède pour accéder enfin au monde carnavalesque de la cérémonie médicale qui achève et métamorphose la comédie, mais contrebalance et parodie aussi la magnificence du Prologue.

  • 14 Les interventions de Patrice Cauchetier sont empruntées à Anne Verdier, qui prépare un livre sur la (...)

15Patrice Cauchetier14, le talentueux costumier du spectacle (comme il l’avait été pour Atys) explique : tous les membres de l’orchestre sont en costumes d’époque, dans des tissus lamés chatoyants (palette de gris et argent, bleu et or, brun et or, avec peinture sur taffetas et de grandes capes noires à enfiler pour la cérémonie finale – effet raté lors de la première car jamais répété). Les femmes sont en lamé or. William Christie endosse à la fin le rôle et la toge écarlate du Praeses et débite le discours en latin de cuisine. (Figure 6). Pour le Prologue, les costumes semblent inspirés des ballets de Bérain, avec coiffures à plumes, étoffes souples et soyeuses, dans les tons mordorés et argentés, agrémentés de dessins géométriques. (Figure 7).

Figure 6. William Christie en Praeses

Figure 6. William Christie en Praeses

Photo Arts florissants © Michel Szabo, 1987

Figure 7. Les musiciens de l’orchestre

Figure 7. Les musiciens de l’orchestre

Photo Arts florissants © Michel Szabo, 1987

  • 15 Ce tableau, dans la captation, intervient au moment du premier intermède, essentiellement dédié à l (...)

16Il ne s’agit pourtant pas de « reconstitution », pas plus que pour la chorégraphie, mais d’une réinvention ludique, parsemée de clins d’œil humoristiques (telles les sortes de gibecières portées par les bergers). Outre les danseurs, danseuses, chanteurs et chanteuses, une foule de figurants se presse sur les côtés et au fond de la scène, on y reconnaît les « farceurs français et italiens peints en 1673 » dans le tableau emblématique qui trône au foyer des comédiens de la Comédie-Française, et où Molière, costumé en Arnolphe, semble rendre hommage à ses prédécesseurs et à ses contemporains15. (Figure 8).

Figure 8. Les Farceurs français et italiens en 1670, attribué à Verio, huile sur toile, 1670

Figure 8. Les Farceurs français et italiens en 1670, attribué à Verio, huile sur toile, 1670

Photo © RMN-Grand Palais / Agence Bulloz

  • 16 Voir « Parcours Molière Dossier pédagogique », réalisé par Frédérique Brunner et Laure Saveus (...)
  • 17 Cathos, Magdelon et Mascarille, La princesse d’Élide, Mélicerte, Célie et Sganarelle, Scapin et Gér (...)
  • 18 Voir Anne Verdier, « Patrice Cauchetier, tailleur d’habits de Monsieur Molière », Art. cit., p. 68.

17Mais on y distingue aussi des personnages du répertoire moliéresque, qui semblent descendus du tableau d’Edmond Geffroy, « Molière et les caractères de ses comédies »16, qui surplombe, dans cette même Comédie-Française, le palier de l’administration, ou encore sortis des frontispices de l’édition des œuvres de 1682. On ne compte pas moins de dix-sept personnages ainsi évoqués, jalonnant la carrière de celui qui la revoit ainsi en rêve17. On les retrouvera, comme récurrents dans la mémoire de l’auteur et des spectateurs, lors des intermèdes suivants. De ces costumes, Patrice Cauchetier dit volontiers : « Les costumes du prologue – qui en citent tant d’autres – c’est mon histoire avec Molière18 ».

18Le décor de Carlo Tommasi, tout en perspective fuyante, n’a pas d’esthétique particulière et nous ferait penser, s’il n’y avait pas, çà et là, de petits lustres suspendus évoquant les théâtres de l’époque, à un immense parking. Villégier lui reconnaît cependant des qualités fonctionnelles :

Quant à la perspective, je dirais qu’elle est volontairement ouverte à des interprétations multiples, tantôt en miroir du roi, elle est point de fuite vers le point de fuite de la scène qui n’est autre que le reflet de la position spectatrice du prince, dans le divertissement par exemple. Elle est le grand espace illusoire où les proportions relatives du lieu et des personnages du théâtre sont bouleversées par l’image théâtrale même.

  • 19 Argan, omniprésent sur la scène, est absent de la fin de l’acte I et du début de l’acte II, ce qui (...)
  • 20 La scène est à rapprocher du premier intermède de La Princesse d’Élide (1664), où le personnage de (...)

19Et il ajoute, c’est aussi « le lieu d’angoisse où vit Argan ». Selon Villégier et Cauchetier, il y a trois niveaux de lecture et de fonctionnement dans la représentation et les costumes y jouent leur rôle d’une manière très prégnante. Le premier niveau est celui de la fête, jubilatoire et grandiose, celui du chant et de la danse. Le premier intermède met en scène la comédie italienne, avec Polichinelle, interprété par Molière lui-même lors de la création19. C’est le type de rôle dans lequel Molière excellait20, tout comme Alain Trétout, qui figure sur le disque avec William Christie (Harmonia mundi, rééd. 2021, Diapason d’or) (Figure 9).

Figure 9. Alain Trétout dans le rôle de Polichinelle

Figure 9. Alain Trétout dans le rôle de Polichinelle

Photo Arts florissants © Michel Szabo, 1987

  • 21 Masques et bouffons, Comédie italienne. Texte et dessins par Maurice Sand, gravures par A. Manceau, (...)

20Dans la mise en scène, les Polichinelles sont multipliés, et, si l’on y fait bien attention, leurs costumes semblent sortir des pages de Masques et bouffons, cet ouvrage où Maurice Sand présente les diverses versions du costume du Pulcinella italien21. (Figure 10). Les numéros de jeu expressif, comme celui de Polichinelle avec son masque, dans le premier intermède, sont réglés par Adriano Sinivia, spécialiste de la Commedia dell’arte et diplômé de l’École du mime Marceau.

Figure 10. Les Polichinelles

Figure 10. Les Polichinelles

Photo Arts florissants © Michel Szabo, 1987

21L’intermède des Maures, avec sa musique plus solennelle, évoque les autres ballets contemporains où interviennent des Maures – topos à la mode – avec leurs masques et leurs maillots noirs, sur lesquels brillent les étoffes bayadères qui symbolisent l’exotisme. La danse est lente et répétitive, malgré des paroles qui engagent à « profiter du printemps » et des « beaux ans », selon une morale épicurienne toute moliéresque (Figure 11).

Figure 11. L’intermède des Maures

Figure 11. L’intermède des Maures

Photo Arts florissants © Michel Szabo, 1987

  • 22 Voir Judith le Blanc, « Entretien avec Bénédicte Louvat : Contexte de création et conditions matéri (...)

22Au deuxième niveau, à la limite du réalisme, sont les costumes des protagonistes de la comédie. Villégier les a voulus raisonnables, significatifs de l’univers colbertien de la riche bourgeoisie. La robe de chambre d’Argan est doublée de fourrure – on est économe dans cette maison – et le malade est forcément emmitouflé pour ne pas prendre froid. On connaît précisément le costume d’Argan, par l’inventaire après décès de Rosimond, comédien qui reprit le rôle à partir de 1674. Il était notamment composé d’« un manteau de pluche couleur de rose doublé de fourrure blanche » et d’« un bonnet de panne couleur de rose garni de dentelle », soit la tenue d’un malade gardant la chambre22… Les costumes féminins sont simples, de bon goût, sans colifichets superflus – on respecte les édits somptuaires. Quant aux Diafoirus père et fils, ils ne sont pas affublés du costume traditionnel et du chapeau pointu des médecins, ils sont bourgeoisement et sobrement vêtus de noir. Le fils porte un peu plus de dentelles que le père, issus qu’ils sont eux aussi de cette bourgeoisie bien-pensante et satisfaite d’elle-même dont Molière se moque autant que de la médecine (Figure 12).

Figure 12. Les Diafoirus, Argan et Angélique, II, 5

Figure 12. Les Diafoirus, Argan et Angélique, II, 5

Photo Arts florissants © Michel Szabo, 1987

23En revanche, pour la cérémonie finale, ainsi que pour les scènes caricaturales de Purgon et de Fleurant, la tradition des apothicaires et des médecins est respectée, le noir domine, et les clystères fleurissent. Le vêtement de médecin que revêt Argan pour la cérémonie est celui qu’a porté Toinette en travesti, il consiste en une sorte de longue houppelande en velours noir, agrémentée d’un camail d’un rouge atténué qui éclate aux reflets des lumières du finale. Se distinguant des autres habits de médecin, il est un élément poétique ajouté à l’ensemble et se présente littéralement comme un « déguisement ». Enfin, dans cet univers poétique et pratiquement mental, les costumes de la nombreuse figuration représentent les types de la Commedia dell’arte et personnages de Molière évoqués plus haut. Ainsi la pièce peut-elle se lire à plusieurs niveaux, du drame bourgeois à la fête, en passant par le souvenir. La mise en scène renoue avec la dimension de spectacle de cour et joue sur la porosité entre la scène et la salle mais aussi entre la salle et la fosse.

24 La représentation progresse inexorablement vers la théâtralité voulue par le metteur en scène et l’exemple le plus concluant de cette théâtralisation triomphante est la scène où Cléante, face au public, mais jouant avec les autres protagonistes, comme avec des marionnettes, présente l’argument du petit opéra qu’il va chanter avec Angélique.

25Soulignons enfin l’excellence de l’interprétation des acteurs, avec, en tête de distribution, Jean Dautremay, pas si malade que cela, colérique, vieil enfant têtu et naïf, et Christine Murillo, Toinette à la fois rieuse et touchante. Reprenant les mots de Jean-Marie Villégier, rappelons que, pour lui :

La pièce présente l’image d’un homme qui au dernier moment revoit à toute allure le film de sa vie, revoit les fêtes de cour, revoit la comédie italienne, revoit les divertissements exotiques dans lesquels il a largement donné, revoit les moments héroïques, les moments bouffons… elle est hantée par ce voyage à travers les différents genres de la comédie et du théâtre.

Comédie-Française, 2001 : mise en scène « crépusculaire » de Claude Stratz23

  • 23 Décors et costumes d’Ezio Toffolutti. Lumières de Jean-Philippe Roy. Musique originale de Marc-Oliv (...)
  • 24 Programme de salle de la Comédie-Française, 2001.
  • 25 Programme de la représentation, 2001.

26Claude Stratz, à la création de cette mise en scène, qui aujourd’hui est devenue « historique », puisqu’elle a été reprise plusieurs fois depuis 2001, qualifiait la comédie de « crépusculaire, teintée d’amertume et de mélancolie »24. La musique originale de Marc-Olivier Dupin s’accorde, avec son minimalisme raffiné, au clair-obscur de la représentation, poétique, mais non festive. Elle est interprétée par un quatuor de chanteurs, un clavecin et une viole de gambe. Le premier intermède, en forme de sérénade, fait une nette référence à la Commedia dell’arte et à la « musique vocale italienne, populaire et savante de la fin de la Renaissance et du baroque25 ».

27Quant au second intermède, sur une musique qui fait référence, selon le compositeur, et dans sa conception carnavalesque, au Stravinsky de Pulcinella ou du Rake’s progress, c’est un carnaval plutôt inquiétant qu’elle introduit dans la chambre d’Argan et dans son cauchemar, remplaçant les Maures de la version originale par des Polichinelles grimaçants conduits par Brighella :

  • 26 Marc-Olivier Dupin, programme de salle, 2001.

[L]e deuxième est davantage un pastiche déglingué comme Stravinsky les aimait : une « carcasse » classique, mais des rythmes et des dissonances à la mesure de l’exaspération du Malade. Le dernier intermède qui consacre la réception d’Argan en médecin suit assez fidèlement la structure du texte de Molière. La première séquence, en latin bringuebalant et truffé de français, est presque en forme de rap : parlé rythmé, dansant et métriquement irrégulier. La deuxième qui correspond aux discours pompeux des docteurs est une fugue didactique, construite sur le thème le plus stupide qui soit26.

28Une bande son évoque le monde extérieur dont Argan s’est exclu lui-même dans sa monomanie : claveciniste faisant des exercices dans une maison voisine, une cloche, un chien au lointain, les bruits du carnaval… Alors que dans la première scène, Argan est celui qui retient – les humeurs, l’argent… –, il est à la fin capable de se dépenser, de se divertir de son mal imaginaire, de se « désennuyer » pour reprendre le mot de Louison (II, 8). La satire de la médecine se trouve ainsi transfigurée par la grâce du théâtre et de la musique, dans une apothéose carnavalesque sublime et grotesque qui est aussi un hommage rendu à la comédie. Depuis maintenant plus de vingt ans, cette mise en scène, dont l’auteur a disparu en 2007, a été reprise plusieurs fois, et, selon la tradition en vigueur à la Comédie-Française, a connu plusieurs changements de distribution, qui, sans avoir modifié l’atmosphère générale de la représentation, ont pu néanmoins l’enrichir de la réflexion des protagonistes.

  • 27 Voir les photos du spectacle de Raynaud de Lage dans Le Malade imaginaire, « Pièce [dé]montée », n° (...)

29Le décor d’Ezio Toffolutti évoque une fin d’époque27. Certes la demeure d’Argan a dû être riche, elle a quelques beaux restes, mais on en a muré certaines ouvertures, ne laissant qu’une entrée par le fond, qui limite la circulation des personnages autour d’Argan, véritable centre de la pièce sur son fauteuil médicalisé et entouré des signes de la maladie. L’esthétique de cette mise en scène, grâce à ce décor à la fois sobre et inventif, entre en résonance avec celle des tableaux de Georges de La Tour ou du Caravage, par son sens de l’épure, son recours au clair-obscur, le mélange de rouge, de blanc et de noir, et la présence de l’éclairage à la bougie.

30Argan ne porte pas au début, dans l’intimité de sa maison, une robe de chambre, mais une longue chemise de nuit, et, sous cette chemise de nuit, les marques de sa probable incontinence (des couches). La robe de chambre sera ajoutée lorsqu’il faudra recevoir les Diafoirus. Les costumes des femmes sont discrets, traditionnels, tout comme les longues redingotes noires des Diafoirus et les robes de Purgon et Fleurant, ce dernier étant affublé en outre d’un goître des plus effrayants. Car la vie d’Argan se présente de plus en plus comme une espèce de cauchemar, avec une réelle peur de la mort. Les figures des intermèdes s’allongent autour de lui, en ombres portées terrifiantes. L’espace scénique est constitué de hauts murs et de portes murées de briques que l’intrusion du carnaval fait exploser dans le troisième intermède. Au centre trône la chaise percée d’Argan sous un baldaquin prêt à l’ensevelir comme un linceul. Cette mise en scène excelle à mettre au jour le mélange des registres, passant du clair à l’obscur, de la farce la plus crue – par exemple quand Toinette en médecin, reprenant le jeu de scène de Sganarelle dans Le Médecin volant, ingurgite le contenu recueilli sous la chaise percée d’Argan pour en faire des gargarismes et recrache ensuite le tout pour diagnostiquer « le poumon » – à l’émotion la plus pure. Dans la version originelle captée en 2001, l’interprétation de Cléante par Éric Ruf frôle celle d’un jeune premier de tragédie. La figure cauchemardesque de M. Fleurant brandissant son clystère s’apparente à celle d’un bourreau. Les médecins et le notaire sont représentés comme des corbeaux inquiétants.

31Béralde introduit le carnaval dans la maison, avec son masque rouge porté sur le front – est-ce un clin d’œil ou un hommage rendu au Béralde de Villégier ? –, traînant des serpentins et des confettis plein la perruque. Quant au déguisement de Toinette, il est exceptionnellement de couleur claire, vaste robe hyperbolique où se perd la silhouette frêle de la servante (d’abord interprétée par Catherine Hiégel et aujourd’hui par Julie Sicard).

  • 28 « Qu’il vive, vive ».
  • 29 Marc-Olivier Dupin, programme de salle, 2001.

32L’hypothèse de départ de Claude Stratz est que la pièce présente une vivante dialectique du vrai et du faux, où c’est le mensonge qui va révéler la vérité, chaque personnage ment à son tour, jusqu’à la fausse mort qui pourrait faire basculer la comédie dans le tragique. La cérémonie finale, toute carnavalesque, permet de terminer la représentation en apothéose ; baignée dans les vapeurs d’encens, elle met en valeur l’analogie entre médecine et religion – rappelons que Le Malade imaginaire peut se lire comme la dernière réponse que Molière fait aux dévots. La cérémonie du troisième intermède exalte la théâtralité et sanctionne la fusion entre le monde d’Argan et celui des intermèdes, la porosité entre le temps de la fiction et le temps réel du carnaval – sans retour au degré zéro de la comédie. Loin de guérir Argan de sa folie, elle actualise et aggrave d’une certaine manière la nature maniaque du faux malade en l’intronisant faux médecin. Il y a ainsi une évolution, de la solitude de la scène 1 de l’acte I, qui « assoit » à proprement parler la comédie, au finale, où le carnaval envahit la scène et entraîne Argan dans une danse inoffensive avec la mort, semblable à une messe noire qui est paradoxalement un hymne à la vie (« Vivat, vivat28 ») et au théâtre. « Le juro précède un récitatif parlé d’Argan sur fond de clavecin. Le vivat se termine par une ronde effrénée29 ». On passe de la solitude à la foule, de l’immobilité au mouvement, de la fermeture à l’ouverture, d’une camisole de nuit blanche à une toge rouge cardinalesque dans une scène d’apothéose où Argan est porté en triomphe, par la grâce du théâtre qui, à défaut de la guérir, sublime et transcende sa manie.

  • 30 Voir Giovanni Macchia, Le Silence de Molière, Paris, Desjonquères, 2004.

33À Alain Pralon, Argan péremptoire et colérique, parfois méchant, ont succédé Gérard Giroudon, vieil enfant capricieux, et, en 2019, Guillaume Gallienne, plus jeune, plus complexe que ses deux prédécesseurs, à la fois tyrannique et dramatique, réellement « despote absolu de sa famille », selon la définition de Giovanni Macchia30.

34Alain Lenglet, Béralde « historique », souligne dans le programme de la reprise avec Guillaume Gallienne :

À la création, je jouais le « jeune frère » d’Argan/Alain Pralon ; aujourd’hui ce rapport va être complètement inversé face à Guillaume Gallienne. Entre-temps, j’ai joué Béralde face à Gérard Giroudon, qui incarnait un Argan pareil à un grand enfant désemparé, et très malheureux ; en tant que Béralde avec le temps, je devenais peut-être plus inquiet pour cet Argan-là que pour celui d’Alain Pralon.

Théâtre Graslin de Nantes et autres théâtres de province, 2022, mise en scène de Vincent Tavernier31

35Vincent Tavernier, Hervé Niquet et Marie-Geneviève Massé ont eux aussi choisi de représenter Le Malade imaginaire « dans sa splendeur » en s’appuyant d’une part sur la toute nouvelle édition qu’en propose Catherine Cessac au Centre de musique baroque de Versailles, d’autre part sur le texte de 1675 redécouvert grâce à l’édition de Georges Forestier dans la Pléiade32. Catherine Cessac a été heureuse que cette version dans « sa splendeur » ait « été suivie à la note près »33. Il n’est pas anodin que cette année 2022 soit aussi celle d’une nouvelle production d’Atys (par Leonardo García Alarcón et Angelin Preljocaj, Genève, Opéra royal de Versailles, mars 2022) que personne n’avait osé reprendre depuis la version historique et canonique de Villégier, Christie et Lancelot en 1987, ressuscitée en 2011. On n’avait donc pas revu ce Malade « dans sa splendeur » depuis 1990. Ce spectacle s’inscrit en outre dans une série, puisque le trio Niquet, Tavernier, Massé a monté pour le quadricentenaire de la naissance de Molière le « Projet Molière 2022 », c’est-à-dire trois comédies-ballets : Le Malade imaginaire, Le Mariage forcé et Le Sicilien34. Le Concert Spirituel, Les Malins Plaisirs et la Compagnie de Danse l’Éventail ont acquis, dans le domaine qui leur est spécifique, et grâce à la collaboration qu’ils mènent ensemble depuis de nombreuses années, une connaissance approfondie du genre. Après L’Amour médecin, Monsieur de Pourceaugnac et Les Amants magnifiques, les trois compagnies poursuivent leur « Projet » dans les spectacles de comédies-ballets de Molière montées avec l’intégralité́ des textes, musiques, chants et danses, sans retranchements ni ajouts, considérant comme il est écrit dans le dossier de présentation « qu’il importe de s’appuyer sur une construction dont l’étude approfondie révèle qu’elle est toujours dramatiquement juste ».

36La mise en scène de ce Malade s’appuie d’ailleurs sur la lecture de la biographie récente de Georges Forestier qui s’emploie à dépoussiérer les mythes attachés à l’œuvre et notamment celui « persistant d’un artiste quasi moribond, exorcisant son angoisse en mettant en scène un risible hypocondriaque. Tout laisse à penser, au contraire, que Molière se portait comme un charme et qu’il dut sa fin prématurée à une violente quinte de toux consécutive à une méchante “fluxion de poitrine” (une épidémie de bronchite fit des ravages, dit-on, cet hiver-là) ».

37Le parti pris consiste à prendre le carnaval – la pièce a été créée en février 1673 et Béralde introduit le dernier intermède par la célèbre réplique « Le carnaval autorise cela » – comme fil rouge et porte d’entrée ou grille de lecture, ce qui a tendance à niveler les différents niveaux et les différents registres qui font toute la variété et l’hétérogénéité consubstantielle et assumée de l’œuvre. Ici, tout est carnaval ou prétexte à carnaval. Ceci a pour effet de nous faire perdre un peu la solennité du prologue opératique, qui n’est plus ni pastoral, ni mythologique mais dont Tavernier révèle une nouvelle verve comique et parodique tout en second degré, loin de la pompe des prologues à la gloire de Louis XIV (Figure 13).

Figure 13. Le prologue du Malade imaginaire, mise en scène de Vincent Tavernier

Figure 13. Le prologue du Malade imaginaire, mise en scène de Vincent Tavernier

© Hélène Aubert, 2022

38Le Polichinelle du premier intermède évoque Dupont et Dupond avec sa moustache, son melon et son parapluie. Le décor léger et pratique, dessiné par Claire Niquet, décor de panneaux mobiles déplacés à vue, s’ouvre et se déplie comme un livre d’images. Ici Tavernier met en scène la tentative quelque peu maladroite de Molière pour tenter de coudre le premier intermède au reste de l’intrigue à l’acte I, scène 8 (Figure 14).

Figure 14. Le Malade imaginaire, mise en scène de Vincent Tavernier

Figure 14. Le Malade imaginaire, mise en scène de Vincent Tavernier

© Hélène Aubert, 2022

39La scène des Diafoirus et du petit opéra impromptu est particulièrement réussie grâce au jeu bouffon de Thomas Diafoirus incarné par Benoît Dallongeville qui matérialise physiquement l’obstacle entre Cléante à Angélique, mur à la fois poreux et hermétique à la musique des sentiments. (Figure 15).

Figure 15. Le Malade imaginaire, II, 5, mise en scène de Vincent Tavernier

Figure 15. Le Malade imaginaire, II, 5, mise en scène de Vincent Tavernier

© Hélène Aubert, 2022

40Disciple de Francine Lancelot, Marie-Geneviève Massé, assistée d’Olivier Collin, joue avec les codes de la danse baroque dans une chorégraphie qui, dans le deuxième intermède, fait pénétrer le carnaval dans l’univers bourgeois et confiné d’Argan, tout en empruntant à l’esthétique de la danse indienne. (Figure 16). Les Maures y font sauter des singes-peluches. (Figure 17).

Figure 16. Le Malade imaginaire, intermède des Maures, mise en scène de Vincent Tavernier

Figure 16. Le Malade imaginaire, intermède des Maures, mise en scène de Vincent Tavernier

© Hélène Aubert, 2022

Figure 17. Intermède des Maures, mise en scène de Vincent Tavernier

Figure 17. Intermède des Maures, mise en scène de Vincent Tavernier

© Hélène Aubert, 2022

41On est dans ce spectacle coloré aux antipodes de l’atmosphère crépusculaire de Stratz ou de celle de proximité de la mort de Molière et d’une certaine austérité dans le spectacle de Villégier. Ici c’est la vie du carnaval qui emporte tout. Les costumes du carnaval sont inspirés par la fantaisie débridée du ballet de cour. (Figures 18 et 19).

Figure 18. Maquettes de costumes. Maquettes d’Erick Plaza-Cochet. Costumes des danseurs pour le prologue du Malade imaginaire

Figure 18. Maquettes de costumes. Maquettes d’Erick Plaza-Cochet. Costumes des danseurs pour le prologue du Malade imaginaire

Figure 19. Le prologue du Malade imaginaire, mise en scène de Vincent Tavernier

Figure 19. Le prologue du Malade imaginaire, mise en scène de Vincent Tavernier

© Hélène Aubert, 2022

42Rien dans le spectacle ne rappelle le contexte historique, Louis XIV ou la mort proche de Molière. À ce titre, il est significatif que Tavernier ait opté pour la version du texte de 1675 – que l’on entend pour la première fois sur scène – dans la fameuse scène de confrontation entre Argan et Béralde à l’acte III, scène 3. Dans cette version publiée en 1675, il se peut que, peu après la mort de Molière, les comédiens, par superstition et par peur de la mort, autant que par pudeur ou par décence, aient censuré le texte original prononcé en scène par Argan-Molière à la création. En ce sens, l’édition de 1682, pour cette scène, aurait bien été « rétabli[e] sur l’original de l’auteur » comme l’indiquent les éditeurs :

  • 35 Le Malade imaginaire, Œuvres Complètes, op. cit., t. II, p. 696-697.

ARGAN
Ce sont de plaisants impertinents que vos Comédiens, avec leurs Comédies de Molière ; c’est bien à faire à eux à se moquer de la Médecine. Ce sont de bons nigauds, et je les trouve bien ridicules de mettre sur leur Théâtre de vénérables Messieurs comme ces Messieurs-là.
BÉRALDE
Que voulez-vous qu’ils y mettent que les diverses professions des hommes ? Nous y voyons bien tous les jours des princes et des rois qui sont du moins d’aussi bonne maison que les Médecins.
ARGAN
Par la mort non d’un diable, je les attraperais bien quand ils seraient malades, ils auraient beau me prier, je prendrais plaisir à les voir souffrir, je ne voudrais pas les soulager en rien, je ne leur ordonnerais pas la moindre petite saignée, le moindre petit lavement, je me vengerais bien de leur insolence, et leur dirais : « Crevez, crevez, crevez mes petits Messieurs, cela vous apprendra à vous moquer une autre fois de la Faculté35 ».

  • 36 Conversation privée de Vincent Tavernier avec Judith le Blanc le 2 avril 2022.

43Dans cet acte III, Vincent Tavernier pratique le « caviardage régulier »36 entre la version de 1675 et celle de 1682 qu’il choisit pour les scènes de Fleurant, Purgon et Toinette en médecin. C’est la mise à l’épreuve de la scène des deux versions qui a orienté ces choix. Voici en outre ce qu’on lit dans le dossier de présentation sur le site des Malins plaisirs :

Le Malade imaginaire, considéré dans son intégralité, ne reflète en aucune façon l’angoisse d’un auteur en semi-disgrâce, miné par la maladie et conscient de sa mort prochaine. Au contraire, la comédie-ballet, écrite à l’occasion des traditionnelles fêtes du début d’année, expose le triomphe progressif du Carnaval sur la neurasthénie d’Argan et la tristesse qui ronge toute sa maisonnée. Dans ce qui apparaît comme une splendide leçon de vie, Molière arrache les masques tristes – ceux de Béline, Bonnefoi, Diafoirus, Fleurant et autres Purgon – pour exalter les masques joyeux – Toinette en médecin, Cléante en maître de musique, Argan lui-même en faux mort – jusqu’à l’immense et folle cérémonie finale37.

44Tavernier organise la dynamique de sa mise en scène entre « la ville » (dans laquelle se passe également le prologue malgré les « tendres ormeaux » chantés dans la pastorale) et « la chambre » :

Argan s’est enfermé, et a enfermé avec lui ses familiers, dans le giron protecteur de sa pseudo-maladie. Chacun doit se plier à cette « passion triste » et s’organiser en fonction d’elle. Sa maison, à la fois cocon, forteresse et prison, en est la matérialisation. Tout autour, la ville est au contraire en fête, parcourue et vivifiée par le Carnaval, force tonique s’il en est. Tout le dispositif scénique s’ordonne autour de cette confrontation – dont le Carnaval sortira forcément vainqueur, n’apportant pas pour autant la raison à Argan (est-ce qu’on demande cela au Carnaval !), mais métamorphosant sa folie38.

45La dernière proposition de mise en scène que nous évoquons brièvement est une réécriture du Malade imaginaire en comédie musicale par Raphaël Callandreau.

Le Malade imaginaire en la majeur, musique et mise en scène de Raphaël Callandreau, Comédie Bastille, 2021-2022

  • 39 Le Malade imaginaire en la majeur, musique et mise en scène de Raphaël Callandreau, Comédie Bastill (...)
  • 40 Le Malade imaginaire en la majeur, musique et mise en scène de Raphaël Callandreau, Comédie Bastill (...)
  • 41 Le Malade imaginaire en la majeur, musique et mise en scène de Raphaël Callandreau, Comédie Bastill (...)

46Deux acteurs (dont un acteur-pianiste) et deux actrices se partagent dix rôles et chantent accompagnés par un seul piano. Les acteurs/chanteurs extraient, pour le plus grand plaisir des spectateurs, dans une mise en scène dépouillée de tout artifice, la substantifique moelle de la pièce. Ce spectacle qui dure un peu plus d’une heure met au jour avec un sens de l’économie jubilatoire, ce que le texte de Molière recèle en creux de puissance musicale. R. Callandreau musicalise en effet les scènes de la pièce qui sont autant de clous, comme celle d’Argan faisant ses comptes39, la dispute entre Toinette et Argan, juste après le quiproquo de l’acte I40, ou celle du poumon41, dont l’écriture se prête naturellement à la musicalisation. Dans ces scènes, c’est bien le rythme de l’écriture de Molière qui donne naissance presque naturellement à la musique. Le spectacle se termine par un hommage rendu à la nature, délivrant en musique une ultime leçon de vie, fidèle à l’esprit de l’œuvre moliéresque. Le public sort purgé de toute mélancolie, convaincu que musique et comédie demeurent ses meilleures alliées pour porter haut la résistance des filles contre le patriarcat et la critique de la société de consommation. Cette actualisation performe la cure préconisée par Molière de façon efficace.

47Laissons le mot de la fin à Molière, dans le dernier intermède de L’Amour médecin en 1665, un intermède qui vaut manifeste et plaidoyer pour la représentation du Malade imaginaire, avec ses ornements :

  • 42 Molière, L’Amour médecin, dans Œuvres complètes, op. cit., t. I, p. 632.

La Comédie, le Ballet et la Musique
Tous trois ensemble
Sans nous tous les hommes
Deviendraient malsains
Et c’est nous qui sommes
Leurs grands Médecins42.

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Notes

1 Stephen Fleck, « L’Imaginaire du Malade : Musique, voix et masque dans la fête ultime de Molière », Molière et la fête, Pézenas, Domens, 2003, p. 307-330.

2 Voir William Christie, entretien, programme de salle de la représentation au Châtelet, 1990.

3 André Warnod, Le Figaro, 28 octobre 1944.

4 Olivier Merlin, Le Monde, 30 décembre 1958.

5 Voir Paul Morelle, Libération, 29 décembre 1958.

6 Nobuko Akiyama, « Les mises en scène du Bourgeois gentilhomme et du Malade imaginaire : le problème des intermèdes et des scènes musicales », Les Mises en scène de Molière du XXe siècle à nos jours. Actes du 3ème colloque international de Pézenas, 3-4 juin 2005, sous la direction de Gabriel Conesa et de Jean Émelina, Pézenas, Domens, 2007, p. 128.

7 Le Malade imaginaire, mise en scène de Jean-Marie Villégier, direction musicale de William Christie à la tête des Arts florissants, chorégraphie de Francine Lancelot, Théâtre du Châtelet, 1990, https://www.arts-florissants.org/programmation/le-malade-imaginaire.html (consulté le 7 décembre 2023).

8 Voir Judith le Blanc, « Le Malade imaginaire “dans sa splendeur” : conversation avec William Christie », 2021, https://www.arts-florissants.org/video/le-malade-imaginaire-dans-sa-splendeur-conversation-avec-william-christie.html (consulté le 7 décembre 2023).

9 Voir « Grands entretiens en-scènes : Jean-Marie Villégier », entretien avec Pierre Notte, https://entretiens.ina.fr/en-scenes/Villegier/jean-marie-villegier (consulté le 7 décembre 2023).

10 En 1983, Béatrice Massin rencontre Francine Lancelot et intègre la compagnie Ris et Danceries. Elle y est successivement interprète, assistante, collaboratrice et chorégraphe. 

11 Voir « Conversation avec Catherine Cessac », Dans les coulisses du Malade imaginaire : la musique de Marc-Antoine Charpentier, 2021, https://www.youtube.com/watch ?v =AnKFJ2x_M8E&t =7s ; https://cmbv.fr/sites/default/files/cmbv/fichiers/cmbv-dossier-support-malade-imaginaire-def.pdf (consulté le 7 décembre 2023).

12 Voir « Grands entretiens en-scènes : Jean-Marie Villégier », entretien avec Pierre Notte, https://entretiens.ina.fr/en-scenes/Villegier/jean-marie-villegier (consulté le 7 décembre 2023).

13 Extraits du programme de la représentation au Châtelet, 1990.

14 Les interventions de Patrice Cauchetier sont empruntées à Anne Verdier, qui prépare un livre sur la carrière du grand costumier, et qui a rédigé, pour le catalogue de l’exposition « Molière en costumes » qui s’est tenue au Centre national du costume de scène de Moulins (26 mai-6 novembre 2022), un article sur ses contributions moliéresques. Nous la remercions pour les renseignements qu’elle nous a donnés, grâce aussi à l’amitié de Patrice Cauchetier lui-même. Voir « Patrice Cauchetier, tailleur d’habits de Monsieur Molière », dans Molière en costumes, dir. Véronique Meunier, Milan, 5 Continents Editions (coédition avec le CNCS, en partenariat avec la BnF), 2022, p. 63-68.

15 Ce tableau, dans la captation, intervient au moment du premier intermède, essentiellement dédié à la Commedia dell’arte.

16 Voir « Parcours Molière Dossier pédagogique », réalisé par Frédérique Brunner et Laure Saveuse-Boulay, sous la direction de Joël Huthwohl, conservateur-archiviste de la Bibliothèque-Musée de la Comédie-Française, sd [2007 ?]. http://girous.free.fr/daac/IMG/pdf/dossier_pedagogique_parcoursmoliere.pdf, p. 19 et 27 (consulté le 7 décembre 2023).

17 Cathos, Magdelon et Mascarille, La princesse d’Élide, Mélicerte, Célie et Sganarelle, Scapin et Géronte, Amphitryon, Célimène et Alceste, Harpagon, Agnès et Arnolphe, Dorimène et M. Jourdain.

18 Voir Anne Verdier, « Patrice Cauchetier, tailleur d’habits de Monsieur Molière », Art. cit., p. 68.

19 Argan, omniprésent sur la scène, est absent de la fin de l’acte I et du début de l’acte II, ce qui laissait le temps à Molière de changer de costume.

20 La scène est à rapprocher du premier intermède de La Princesse d’Élide (1664), où le personnage de Lyciscas, interprété par Molière, vit comme Polichinelle dans un monde où l’on s’exprime en chantant. Dans les deux intermèdes on retrouve une équipe de fâcheux ; Lyciscas implore ceux qui l’entourent de le laisser dormir en se plaignant : « Quoi toujours ? a-t-on jamais vu une pareille furie de chanter ? », Œuvres Complètes, dir. Georges Forestier et Claude Bourqui, Paris, Gallimard, Bibliothèque de la Pléiade, 2010, 2 vol. , t. I, p. 539.

21 Masques et bouffons, Comédie italienne. Texte et dessins par Maurice Sand, gravures par A. Manceau, préface de George Sand, 2 vol. , Paris, A. Lévy, 1862.

22 Voir Judith le Blanc, « Entretien avec Bénédicte Louvat : Contexte de création et conditions matérielles de la représentation », Dans les coulisses du Malade imaginaire, Paris, Centre de musique baroque de Versailles, sd. [2021], p. 3-8.
https://cmbv.fr/sites/default/files/cmbv/fichiers/cmbv-dossier-support-malade-imaginaire-def.pdf (consulté le 6 avril 2023).

23 Décors et costumes d’Ezio Toffolutti. Lumières de Jean-Philippe Roy. Musique originale de Marc-Olivier Dupin. Travail chorégraphique de Sophie Mayer. Conception des maquillages, des perruques et des prothèses de Kuno Schlegelmilch.

24 Programme de salle de la Comédie-Française, 2001.

25 Programme de la représentation, 2001.

26 Marc-Olivier Dupin, programme de salle, 2001.

27 Voir les photos du spectacle de Raynaud de Lage dans Le Malade imaginaire, « Pièce [dé]montée », n° 313, septembre 2019, https://cdn.reseau-canope.fr/archivage/valid/NT-piece--de-montee---le-malade-imaginaire-23706-16336.pdf (consulté le 7 décembre 2023).

28 « Qu’il vive, vive ».

29 Marc-Olivier Dupin, programme de salle, 2001.

30 Voir Giovanni Macchia, Le Silence de Molière, Paris, Desjonquères, 2004.

31 Musique de Marc-Antoine Charpentier interprétée par Hervé Niquet et le Concert spirituel. Chorégraphie de Marie-Geneviève Massé et la Compagnie de Danse L’Éventail. Décors de Claire Niquet, Costumes d’Erick Plaza-Cochet. Lumières de Carlos Perez.

32 Molière, Œuvres complètes, op. cit.

33 Entretien privé avec Judith le Blanc.

34 https://lesmalinsplaisirs.com/le-projet-moliere-2022/ (consulté le 7 décembre 2023).

35 Le Malade imaginaire, Œuvres Complètes, op. cit., t. II, p. 696-697.

36 Conversation privée de Vincent Tavernier avec Judith le Blanc le 2 avril 2022.

37 Dossier de présentation, https://lesmalinsplaisirs.com/LMP_2021/wp-content/uploads/2022/08/DP-Malade-imaginaire-min.pdf, 2022 (consulté le 7 décembre 2023).

38 Dossier de présentation, https://lesmalinsplaisirs.com/LMP_2021/wp-content/uploads/2022/08/DP-Malade-imaginaire-min.pdf (consulté le 7 décembre 2023).

39 Le Malade imaginaire en la majeur, musique et mise en scène de Raphaël Callandreau, Comédie Bastille, 2021-2022, https://www.youtube.com/watch ?v =xDq3v6eKLkM (consulté le 7 décembre 2023).

40 Le Malade imaginaire en la majeur, musique et mise en scène de Raphaël Callandreau, Comédie Bastille, 2021-2022, https://www.youtube.com/watch ?v =ihGAMBufB_c (consulté le 7 décembre 2023).

41 Le Malade imaginaire en la majeur, musique et mise en scène de Raphaël Callandreau, Comédie Bastille, 2021-2022, https://www.radiofrance.fr/francemusique/concerts/cabaret-42e-rue-et-dieu-crea-le-swing-le-malade-imaginaire-en-la-majeur-l-homme-de-la-mancha/moliere-le-poumon-le-malade-imaginaire-en-la-majeur-5167158 (consulté le 7 décembre 2023).

42 Molière, L’Amour médecin, dans Œuvres complètes, op. cit., t. I, p. 632.

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Table des illustrations

Titre Figure 1. Jean-Marie Villégier et William Christie
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Titre Figure 2. Béatrice Massin10, Jean-Marie Villégier et Francine Lancelot
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Titre Figure 3. Le Malade imaginaire représentée dans le Jardin de Versailles devant la Grotte de Thétis en 1674, estampe de Jean Lepautre, 1676
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Titre Figure 4. William Christie
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Titre Figure 5. Ballet royal de la nuit, costume pour le Soleil levant, dansé par Louis XIV, 1653
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Titre Figure 6. William Christie en Praeses
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Titre Figure 7. Les musiciens de l’orchestre
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Titre Figure 8. Les Farceurs français et italiens en 1670, attribué à Verio, huile sur toile, 1670
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Titre Figure 9. Alain Trétout dans le rôle de Polichinelle
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Titre Figure 10. Les Polichinelles
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Titre Figure 11. L’intermède des Maures
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Titre Figure 12. Les Diafoirus, Argan et Angélique, II, 5
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Titre Figure 13. Le prologue du Malade imaginaire, mise en scène de Vincent Tavernier
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Titre Figure 14. Le Malade imaginaire, mise en scène de Vincent Tavernier
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Titre Figure 15. Le Malade imaginaire, II, 5, mise en scène de Vincent Tavernier
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Titre Figure 16. Le Malade imaginaire, intermède des Maures, mise en scène de Vincent Tavernier
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Titre Figure 17. Intermède des Maures, mise en scène de Vincent Tavernier
Crédits © Hélène Aubert, 2022
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Titre Figure 18. Maquettes de costumes. Maquettes d’Erick Plaza-Cochet. Costumes des danseurs pour le prologue du Malade imaginaire
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Titre Figure 19. Le prologue du Malade imaginaire, mise en scène de Vincent Tavernier
Crédits © Hélène Aubert, 2022
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Pour citer cet article

Référence électronique

Judith le Blanc et Jacqueline Razgonnikoff, « Le Malade imaginaire à la reconquête de ses intermèdes »Arrêt sur scène / Scene Focus [En ligne], 12 | 2023, mis en ligne le 22 mars 2024, consulté le 14 février 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/asf/5377 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/asf.5377

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Auteurs

Judith le Blanc

Judith le Blanc est maîtresse de conférences à Rouen, chercheuse associée au Centre de musique baroque de Versailles, membre du comité de rédaction de Théâtre/public et metteuse en scène. Spécialiste du théâtre musical des XVIIe et XVIIIe siècles, elle est l’autrice d’Avatars d’opéras. Parodies et circulation des airs chantés sur les scènes parisiennes (Garnier, 2014 ; Prix des Muses Singer-Polignac 2015 – Prix de l’essai), codirige avec Claudine Poulouin Fontenelle et l’opéra. Rayonnement et métamorphoses (PURH, 2021), avec Raphaëlle Legrand et Marie-Cécile Schang Le Théâtre de Michel-Jean Sedaine. Une œuvre en dialogue (PUPS, 2021) et édite Le Malade imaginaire (GF, 2020).
Judith le Blanc is a senior lecturer at the University of Rouen, an associate researcher at the Centre de musique baroque de Versailles, a member of the editorial board of Théâtre/public and a stage director. A specialist in musical theatre and French opera of the seventeenth and eighteenth centuries, she is the author of Avatars d’opéras. Parodies et circulation des airs chantés sur les scènes parisiennes (Garnier, 2014, Prix des Muses Singer-Polignac 2015 – Prix de l’essai). She has co-edited Fontenelle et l’opéra. Rayonnement et métamorphoses, with Claudine Poulouin (PURH, 2021), Le Théâtre de Michel-Jean Sedaine. Une œuvre en dialogue, with Raphaëlle Legrand and Marie-Cécile Schang (PUPS, 2021) and is currently editing Le Malade imaginaire (GF, 2020).

Jacqueline Razgonnikoff

Jacqueline Razgonnikoff est historienne du théâtre et de la Comédie-Française, bibliothécaire-archiviste à la Bibliothèque-Musée de la Comédie-Française (1976-2007). Elle est vice-présidente de la Société des Amis d’Alexandre Dumas. Dernières publications : Le Paris de Molière (Paris, éd. Alexandrines, 2017) ; François-René Molé, biographie (Paris, Classiques Garnier, 2022) ; Six pièces en un acte et monologues de Iakovos Kambanellis, traduction du grec par J. Razgonnikoff (Athènes, Herodotos, 2023).
Jacqueline Razgonnikoff is a theatre and Comédie-Française historian, librarian-archivist at the Bibliothèque-Musée de la Comédie-Française (1976-2007). She is vice-president of the Société des Amis d’Alexandre Dumas. Recent publications include : Le Paris de Molière (Paris, éd. Alexandrines, 2017) ; François-René Molé, biographie, (Paris, Classiques Garnier, 2022) ; Six pièces en un acte et monologues, by Iakovos Kambanellis, translated from Greek by J. Razgonnikoff (Athens, Herodotos, 2023).

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