Panorama des études philippines en Europe
Résumés
Les études sur les Philippines semblent bénéficier, ces dernières années, d’un nouvel élan en Europe. L’article brosse un tableau de la recherche européenne sur l’archipel ces quinze dernières années et identifie trois tendances dans les études : celle qui privilégie un cadre d’analyse austronésien ou malais, celle qui découle des études hispano-américaines et celle qui résulte d’une approche plus disciplinaire des Philippines, avec un appareil théorique important, appliqué ou testé sur le terrain philippin. Ce tour d’horizon permet d’identifier les directions de la recherche actuelle, d’en cerner les principaux centres mais également de souligner les possibles contradictions de ce champ d’études qui attire un nombre croissant de chercheurs et d’étudiants en Europe.
Texte intégral
1Les 5 et 6 juillet derniers, la SOAS accueillait la troisième édition de sa conférence annuelle sur les études philippines intitulée « Mindanao : Cartographies of History, Identity and Representation ». L’événement a attiré un nombre de participants supérieur à celui des années précédentes, confirmant l’intérêt et le dynamisme croissant des études sur l’archipel. Le sujet n’était pourtant pas destiné à un large public mais visait à réunir un groupe restreint de spécialistes sur le Sud des Philippines, et plus particulièrement sur l’île de Mindanao, afin de discuter de son histoire, de sa représentation et des questions de politique identitaire. Au total, une trentaine d’intervenants se sont succédé sur deux jours.
- 2 La liste des travaux présentés dans l’article n’est pas exhaustive et vise à mettre en lumière les (...)
2La réponse donnée à l’appel à communication a surpris les organisateurs tout autant que les participants et le succès grandissant de la conférence annuelle sur les Philippines à la SOAS, initiée en 2017, invite à réfléchir aux raisons et dynamiques de ce qui apparaît comme un développement relativement nouveau de ces études en Europe. Pour ce faire, il nous a semblé opportun de présenter un aperçu des récentes recherches européennes sur les Philippines, en particulier celles de ces quinze dernières années (2004-2019)2, qu’elles soient représentatives d’un nouvel élan ou dans la lignée d’une tradition universitaire plus ancienne. Ce tour d’horizon permet d’identifier les directions de la recherche actuelle, d’en cerner les principaux centres mais également d’en souligner les éventuels contradictions.
3Comparées aux travaux sur le reste du monde insulindien, les études produites en Europe sur les Philippines ont toujours été d’un nombre limité, voire inexistant par période dans nombre de disciplines. L’explication de ce phénomène est certainement à chercher dans les traditions universitaires des différents pays, lesquelles dépendent tout autant de l’héritage colonial que d’un ensemble de circonstances fortuites. Prenons l’exemple de l’Indonésie, la recherche française est particulièrement importante, et ce alors qu’il n’existe aucun lien historique fort entre les deux pays. Nous la devons à l’engouement d’une poignée de chercheurs, dont certains ont fondé cette revue, et à la tradition qu’ils ont instaurée dans les institutions au sein desquelles ils ont enseigné, l’INALCO, l’EHESS et l’EFEO. Force est de constater que le même phénomène ne s’est pas produit dans le cas philippin.
4Les études sur l’Asie du Sud-est ont par ailleurs été plus soutenues dans le nord que dans le sud de l’Europe. Aussi, une fois leur colonie perdue, nos voisins espagnols n’ont pas eu un grand intérêt pour l’archipel philippin, et la nouvelle situation géopolitique — née du transfert de souveraineté aux États-Unis — a fini d’éloigner les études philippines de l’Europe. Celles-ci ont trouvé un ancrage solide dans les universités américaines où se sont développées les Philippines Studies ainsi que les Asian American Studies, deux champs d’étude dont provient, aujourd’hui, une grande partie de la production scientifique publiée, et donc largement accessible. Une des spécificités de ces études tient à leur sujet — qui a trait en grande partie à la période américaine (1898-1946) et la suivante — ainsi qu’à leur orientation qui, lorsqu’elle n’est pas nationale, est très souvent transpacifique.
- 3 Zeus Salazar, « Philippine Studies and Pilipinolohiya : Past, Present and Future of Two Heuristic V (...)
5Les chercheurs européens ont généralement observé les Philippines de manière différente, à partir de chronologies et de points de vue autres, que nous présentons ici. Le poste d’observation le plus ancien a été l’Asie du Sud-est, où circulaient nombre d’Européens, qu’ils soient administrateurs coloniaux, religieux ou simples voyageurs. Rappelons à cet égard que lorsque José Rizal — qui est le premier à avoir formulé le champ des études philippines — proposa à Ferdinand Blumentritt de fonder l’Association Internationale des Philippinistes et d’en devenir le président en décembre 1888, il avait en tête un domaine de recherche qui concernerait l’archipel et plus largement les mondes austronésien et malais3. Aujourd’hui, nous devons à une poignée de collègues européens les travaux sur les Philippines qui prennent pour cadre d’analyse ce monde insulindien, dans une acception plus ou moins large.
6Les Philippines et les études aréales sur l’Asie
- 4 Voir le compte-rendu de J-P. Potet, Archipel 85, 2013, p. 260-263.
- 5 Marlies Spiecker-Salazar, « A contribution to Asian Historiography: European studies of Philippines (...)
- 6 Thomas Stolz, Lawrence Andrew Reid et Emilio Ridruejo Alonso (ed.), Philippine and Chamorro Linguis (...)
- 7 Morphosyntax und Morphologie. Die Ausrichtungsaffixe im Tagalog, München: Fink, 1987. “How to miss (...)
- 8 K. Adelaar & N. Himmelmann (eds.), The Austronesian Languages of Asia and Madagascar, London: Routl (...)
- 9 Il est l’auteur de plusieurs ouvrages récents sur les spécificités de la langue philippine notammen (...)
7En raison de leur sujet, les linguistes ont été les plus enclins à s’intéresser au monde austronésien puisque les langues de l’archipel appartiennent à la famille de langues du même nom. En Allemagne, le travail de Marlies Salazar, qui concerne les études européennes sur les langues philippines, a permis de retracer, à partir du cas philippin, l’évolution de la linguistique austronésienne depuis ses balbutiements du XVIIe siècle jusqu’à ces développements au XXe siècle. Son ouvrage, Perspectives on Philippine Languages : Five Centuries of European Scholarship4 (Quezon city : Ateneo de Manila), publié en 2012, représente la somme des travaux réalisés par l’auteur il y a déjà plusieurs décennies et qui ont été en partie publiés dans Archipel 5. Dans la même tradition, notons le travail collectif réalisé à l’université de Bremen sous la direction du professeur Thomas Stolz sur les études de linguistique coloniale des langues philippines et de Micronésie6. Toujours en Allemagne, on ne saurait oublier Nikolaus Himmelmann (Université de Cologne), et dont les premières recherche ont porté sur le tagalog, auquel il est revenu plus tard7. Il a également abondamment travaillé sur les langues d'Indonésie centrale (Sulawesi) et orientale, co-dirigé avec K. Adelaar un gros volume de synthèse sur les langues austronésiennes8. Le Français Jean-Paul Potet, auquel on doit, entre autres, Arabic and Persian Loanwords in Tagalog (lulu.com, 2013) et Tagalog Borrowings and Cognates (lulu.com, 2015), joue quant à lui des différentes échelles d’analyse austronésienne et malaise dans ses travaux9.
8Peu d’autres travaux français ou réalisés en France ont utilisé le monde insulindien comme paradigme de recherche ces dernières années. Les études de Noel Teodoro sur le réalisme dans les littératures d’Indonésie et des Philippines (thèse, EHESS, 1989) et de Ghislaine Loyré-de-Hauteclocque sur les Magindanao (thèse, Paris 10, 1992), avaient pourtant ouvert la voie, donnant une vision des Philippines dans une aire culturelle et linguistique plus large. Notons que le pionnier de cette approche aux Philippines, Zeus Salazar, a réalisé ses études en France, où il a écrit plusieurs articles et communications sur le sujet, lesquels sont rassemblés dans The Malayan connection : Ang Pilipinas sa Dunia Malayu (Quezon City : Palimbangan ng Lahi, 1998). Notre étude sur l’histoire culturelle de l’islamisation dans le Sud philippin (thèse, EHESS, 2013) se situe dans cette lignée et forme la dernière contribution en date aux études adoptant cette approche en France.
- 10 Wunsch und Wirklichkeit : deutsch-philippinische Beziehungen im Kontext globaler Verflechtungen 186 (...)
9Le contexte austronésien, ou sud-est asiatique, n’a pas non plus retenu l’attention des historiens germanophones travaillant sur les Philippines ces dernières années. Ceux-ci sont arrivés sur le terrain philippin par d’autres chemins, empruntant la voie des études japonaises ou chinoises. L’ouvrage de Birgit Tremml-Werner, Spain, China, and Japan in Manila, 1571-1644. Local Comparisons et Global Connections (Amsterdam : Amsterdam University Press, 2015) étudie les Philippines dans leurs rapports avec l’Asie orientale, et le travail en cours d’Elke Papelitzky (postdoctorat, NYU Shanghai) concerne la cartographie chinoise et japonaise de l’Asie du Sud-est aux XVe‑XVIIIe siècles. Ce faisant, toutes deux rappellent qu’une compréhension de l’histoire de l’archipel ne saurait se passer de l’étude de ses rapports avec les acteurs japonais et chinois. Il en va de même pour le travail de Sven Matthiessen sur les relations philippino-japonaises entre 1945 et 1990. Dans une veine différente, et faisant figure d’exception dans ce contexte, notons le travail de Volker Schult, qui se concentre sur les relations entre l’Allemagne et les Philippines aux XIXe et XXe siècles10.
- 11 Pour la période moderne, le meilleur exemple reste l’étude de Ruurdje Laarhoven, Triumph of Moro Di (...)
- 12 Voir le compte rendu de J-P. Potet « European Conference on Philippines Studies 1991, Amsterdam, 22 (...)
10Le cadre indonésiano-philippin est en revanche bien présent dans les études historiques aux Pays-Bas. Le comparatisme marque les deux ouvrages de l’historien Peter Keppy (NIOD, Amsterdam) : The Politics of Redress. War Damage Compensation and Restitution in Indonesia and the Philippines, 1940-1957 (Leiden : KITLV, 2010) et Tales of the Southeast Asian Jazz Age : Filipino, Indonesians and Popular Culture, 1920-1936 (Singapore : NUS Press, 2019), étude qui se concentre sur la figure du musicien de jazz Louis Borromeo et de l’actrice Miss Riboet. Les deux monographies montrent, s’il fallait encore s’en convaincre, que les archipels philippin et indonésien gagnent à être observés ensemble dans la période plus contemporaine11. Figure centrale des études sur les Philippines depuis les années 1990 aux Pays-Bas, Otto van den Muijzenberg (université d’Amsterdam) avait été à l’initiative de la première conférence européenne sur l’archipel philippin en 199112. Il avait à cette occasion recensé récits, rapports et travaux néerlandais sur ces îles dans Dutch Filipiniana : an Annotated Bibliography of Dutch Publications on the Philippines (Leiden : KITLV, 1992). Au-delà de sa fonction première d’outil bibliographique, l’ouvrage permettait de poser un autre regard sur les espaces coloniaux espagnol et néerlandais, en reconsidérant leur division. En cela, il s’inscrivait dans la veine des études aréales et sud-est asiatiques. Plus récemment, l’auteur a publié deux autres monographies puisant largement dans ces sources : Two Ethnographic Collectors in the Late Spanish Philippines : Alexander Schadenberg & P.K.A. Meerkamp van Embden (Leiden : Rijksmuseum voor Volkenkunde, 2004) suivi de The Philippines Through European Lenses. Late 19th-century Photographs from the Meerkamp van Embden Collection (Quezon City : Ateneo de Manila, 2009). D’inspiration similaire, la publication de J.A.B. Wiselius et Geert van der Linden, A Visit to Manila and its Environs (Quezon City : Ateneo de Manila, 2016), présente la traduction du voyage à Manille et Laguna du contrôleur de l’administration coloniale néerlandaise en 1875.
- 13 « Arab Muslim Migrants in the Colonial Philippines: the Hadhramaut Connection », in Noel Brehony, ( (...)
- 14 A.T. Gallop, « Islamic Manuscript Art of the Philippines », in Kawashima Midori (ed.), The Qur’an a (...)
11Au Royaume-Uni, le travail de William Gervaise Clarence-Smith (SOAS) sur les migrants du Moyen-Orient13, ou encore les recherches d’Annabel Gallop (British Library) sur les Corans, participent du même élan. Débutés sur un terrain vierge à partir des études malaises, les travaux d’Annabel Teh Gallop ont permis de révéler des aspects inconnus de traditions musulmanes inconnue : la copie de manuscrits religieux et l’usage de sceaux à Mindanao14. Le travail en cours de Cristina Juan, qui suit la trace d’objets de provenance philippine dans les collections britanniques, tend également à replacer les Philippines dans leur contexte régional. L’exposition « Empire : Philippine-British Entanglements until the 19th Century », qui s’est tenue à la SOAS du 12 avril au 22 juin a mis en lumière les multiples connexions britanniques avec l’archipel. Enfin, il convient de mentionner la récente thèse de Stéphanie Mawson « Incomplete Conquests in the Philippine Archipelago 1565-1700 » (Ph.D., Cambridge University, 2018) qui apparaît être à cheval sur deux champs d’étude : celui de la world history, de laquelle la thèse se revendique, et celui du monde malais, que le travail aborde timidement. Mais si « Incomplete Conquests » s’est surtout attaché à démontrer la faible prise des Espagnols à Mindanao, il a mis à jour d’autres sphères d’influence et le nouveau sujet d’étude de l’auteur, qui s’intéresse à l’est indonésien et à la Papouasie Nouvelle-Guinée, est révélateur de ce changement de perspective.
- 15 Islamic Far East : Ethnogenesis of Philippine Islam, Quezon City : UP Press, 2014.
- 16 Historia cultural de la lengua espanola en Filipina, Madrid : Editorial Verbum, 2012.
12Enfin, dans le paysage scientifique espagnol, malgré un nombre croissant d’études sur les Philippines, seuls les travaux d’Isaac Donoso sur l’islam philippin adoptent une vision plus largement sud-est asiatique15. Précisons qu’il n’existe aucune institution dispensant un enseignement sur la région et que l’offre de formation sur l’Asie, modeste, se limite à l’Asie orientale. Dans ce contexte, et en raison des relations passées, on comprend qu’une grande partie des études concernent l’héritage colonial et les rapports avec l’ancien État colonisateur, à l’image des travaux du même auteur sur la littérature philippine en langue espagnole16.
13Les Philippines et les études hispano-américaines
- 17 Pour une liste commentée des travaux en langues européennes sur Rizal, voir le compte-rendu de Z. S (...)
- 18 « La littérature philippine en langue espagnole (1898-2008) », université de Brest, 2009.
- 19 « Acapulco et le Galion de Manille, la réalité quotidienne au XVIIe siècle », Paris III, 2012.
- 20 « Clothing and the Colonial Culture of Appearances in XIXth Century Spanish Philippines (1820-1896) (...)
- 21 « Images in Print : the Manileña in Periodicals (1898-1938) », université de Nice, 2017. Ce travail (...)
- 22 « L’Arxiu et l’Archipel, les Philippines à l’Archivium Historicum Societas Iesu Cataloniae », Revue (...)
14Le champ des études espagnoles et hispanophones constitue le second pan de la production scientifique sur les Philippines en Europe. En France, quelques travaux proviennent des départements d’études ibériques, lesquels sont significatifs de la place, relativement nouvelle, que prennent les Philippines au sein de ces études. Notons à cet égard l’ouvrage d’Hélène Goujat (université d’Angers), Entre réforme et révolution : Le projet national de José Rizal (1861-1896) pour les Philippines17 (Paris : Connaissances et Savoirs, 2010) ou encore la thèse de Cindy Nedelec qui analyse l’expression des sentiments et aspirations chez les Philippins, qui se sont emparés de la langue espagnole en signe de résistance à la présence américaine18. L’histoire des mondes hispaniques apporte également son lot d’études avec d’intéressants travaux en histoire sociale. Citons ici les thèses de Beatrice Palazuelos Mazars sur le Galion de Manille et la vie quotidienne au XVIIe siècle19, celle de Stéphanie Marie R. Coo sur l’histoire des vêtements à Manille20 et celle de Katherine Lacson sur la représentation des femmes de cette ville dans la presse au début du XXe siècle21. À noter également, l’ouvrage de Clotilde Jacquelard (Université Paris-Sorbonne), De Séville à Manille les Espagnols en mer de Chine, 1520-1610 (Paris : Les Indes Savantes, 2015), qui étudie l’image de l’Asie construite par les Espagnols péninsulaires et américains dans la littérature de voyage des XVIe et XVIIe siècles. Enfin, Jean-Noël Sanchez (université de Strasbourg) — qui avait organisé la seconde conférence internationale sur les Philippines en Europe (2010) — travaille à la mise à jour et au traitement de nouvelles sources jésuites ayant trait au XVIIe siècle22.
- 23 « ¿Fortalecer la cohesión interna? El ‘peligro moro’ en las Filipinas coloniales en la segunda mita (...)
15En Espagne, la Casa de Velázquez, qui est une école française à l'étranger, ainsi que le Conseil supérieur pour la recherche scientifique (Consejo Superior de Investigaciones Cientificas – CSIC), forment les deux principaux centres d’études s’intéressant aux rapports de l’Espagne à l’Asie-Pacifique. C’est au sein de ces institutions que Xavier Huetz de Lemps, associé au premier, et María Dolores Elizalde, rattachée au second, ont édité avec Gonzalo Àlvarez Chillida l’ouvrage Gobernar colonias, administrar almas. Poder colonial y órdenes religiosas en los imperios ibéricos (1808-1930) (Madrid : Casa Velásquez, 2018), recueil d’articles sur les rapports entre pouvoirs colonial et religieux, ainsi que Filipinas, Siglo XIX. Coexistencia e interacción entre comunidades en las Filipinas del siglo XIX (Madrid : Polifemo, 2017). Un troisième ouvrage, à paraître, propose de suivre la trajectoire de la construction nationale à travers une des grandes familles créoles des Philippines (La Construcción de la Nación Filipina : Un Caso de Estudio a través de la Familia Roxas, eds. María Dolores Elizalde et Xavier Huetz de Lemps). Enfin, il faut mentionner dans la petite sphère madrilène l’autrichien Eberhard Crailsheim (Marie Curie postdoctoral fellow au CSIC, 2016-2019), qui travaille sur la représentation de la menace extérieure aux Philippines (1600-1800), en particulier sur la perception des musulmans (moros)23.
- 24 « Les Philippines et leur monde. Gouverner et vivre aux confins des empires ibériques », co-organis (...)
- 25 En Espagne, on assiste à une hausse remarquable du nombre de thèses en histoire sur les Philippines (...)
- 26 México y Filipinas : culturas y memorias sobre el Pacífico, El Colegio de Michoacán/Ateneo de Manil (...)
16La Casa de Velázquez finance également le projet « Vaincre la distance. Acteurs et pratiques du gouvernement des empires espagnol et portugais » mené en partenariat avec l’université de Toulouse-Jean Jaurès (Labex Structuration des mondes sociaux) et sous la direction de Guillaume Gaudin. Si le sujet principal des recherches concerne l’histoire politique de la Monarchie catholique, et fait a priori peu cas de la vie des Philippins, la conférence organisée en juin 201724 promettait « une approche au “ras du sol” […] de la société philippine en s’attachant à des études de cas, trajectoires, expériences ou faits identifiés du quotidien ». Le projet ne paraît cependant pas répondre à cette profession de foi et semble plutôt prendre le tournant d’une histoire coloniale classique, vue à travers le prisme de l’administration. Il reste que le labex « Distance » a pour effet de mettre les Philippines sur le devant de la scène et que cette exposition ne peut qu’être bénéfique pour attirer la curiosité de futurs chercheurs ou étudiants25. L’équipe internationale associe de plus, pour la première fois, collègues mexicains, espagnols, portugais et français travaillant sur les Philippines. On peut espérer que la multiplicité des points de vue permettra de renouveler les approches ; les recherches de Paulina Machuca et Thomas Calvo (Colegio de Michoacán, Mexique) sur les échanges culturels entre le Mexique et les Philippines sont en cela prometteurs26.
- 27 « Chinese Mestizo and Natives’ Disputes in Manila and the 1812 Constitution : Old Privileges and Ne (...)
17Malgré un intérêt encore fort pour les rouages du pouvoir ibérique, une plongée dans le quotidien des communautés de l’archipel se fait de plus en plus sensible et on ne peut que s’en réjouir, car elle permettra de mieux saisir la complexité sociale et culturelle de l’archipel. À cet égard, il faut noter le travail de Ruth de Llobet (université Pompeu Fabra), qui s’intéresse aux métis chinois de Manille27. Le très bel ouvrage de Romain Bertrand, Le long remords de la conquête, Manille-Mexico-Madrid, L’affaire Diego de Ávila (1577-1580) – dont nous avons rendu compte dans cette revue (Archipel 94, 2017) – est un exemple parfait de la fenêtre que ce genre d’étude peut offrir sur le monde rural philippin, en l’occurrence celui des ensorceleuses de Cebu.
18Notons enfin une contribution du plus grand intérêt en linguistique. Rebecca Fernández Rodríguez (University of Amsterdam and Utrecht) étudie les textes anciens des missionnaires espagnols dans une perspective de linguistique historique, s’intéressant tout autant à l’histoire de la traduction et aux innovations lexicographiques qu’à ce que ces textes ont à dire sur les sociétés qu’ils concernent. Ses travaux sur les listes de vocabulaires sont résumés dans « Lexicography in the Philippines (1600-1800) » (Historiographia Linguistica 41(1), 2014 : 1-32), mais elle a surtout fourni un important travail sur le Calepino Ylocano, un texte de la fin du XVIIIe siècle écrit par le frère Augustin Pedro de Vivar, et travaille actuellement à l’édition scientifique du plus ancien dictionnaire bilingue Ilocano-Espagnol Tesoro de la lengua Ylocana (ca. 1760).
19Nous avons surtout insisté sur les avancées des études en histoire, littérature et linguistique, qui forment le pan le plus délaissé de la recherche sur les Philippines. Il faut dire un mot des travaux dans les autres disciplines, notamment en anthropologie, archéologie, sociologie et géographie, lesquels occupent une place importante de la production scientifique.
20Les Philippines : approches locales et comparatisme
- 28 Parmi ses très nombreux études, citons, parmi les plus récentes, La quête en épouse : Mämiminbin, u (...)
21La première conférence internationale sur l’archipel, organisée à Amsterdam et mentionnée précédemment, avait permis de réunir une trentaine de chercheurs dont les ethnologues Jürg Helbling, Nicole Revel et Charles Mc Donald, spécialistes des Alangan de Mindoro pour le premier, et des Palawan de l’île du même nom pour les deux autres. Aujourd’hui, les groupes ethnolinguistiques minoritaires de ces deux îles sont encore le sujet d’études françaises en anthropologie des Philippines. On doit à Nicole Revel, spécialiste des arts de la parole à Palawan, une production scientifique constante depuis plus de 30 ans, relevant en particulier de la linguistique et de l’anthropologie. Ses multiples collaborations aux Philippines ont permis la mise en ligne d’archives sonores, en collaboration avec Ateneo de Manila, et la publication multilingue d’épopées. Le dernier ouvrage en date, trilingue et multimedia, concerne Les arts de la paroles des montagnards Palawan (Paris : Geuthner, 2017)28. Elisabeth Luquin travaille quant à elle sur le langage rituel des Hanunoo-Mangyan.
- 29 « Being and Becoming: Imagination, Memory, and Violence in the Southern Philippines », Freie Univer (...)
- 30 « Between Re-Traditionalization and Islamic Resurgence. The Influence of the National Question and (...)
- 31 « The Papal Election in the Philippines: Negotiating Religious Authority in Newspapers », Journal o (...)
- 32 « Publicizing Independence. Thoughts on the Filipino Ilustrado Isabelo de los Reyes, the Iglesia Fi (...)
- 33 « Politik und Gesellschaft in der philippinischen Pfingstbewegung », Universität Heidelberg, 2017.
22En Allemagne, la thèse de Rosa Castillo29 (2017), sur la formation de l’identité bangsamoro chez les Magindanao du MILF (Front Islamic de Libération Moro), et celle de Birte Brecht-Drouart30 (2011) sur la manipulation de la tradition, à des fins politiques, chez les Maranao, offrent deux exemples de travaux traitant le conflit armé du sud musulman de manière nouvelle. Le phénomène religieux est le second thème relativement bien représenté dans l’espace germanophone, à la fois par l’anthropologie et les sciences religieuses. Il faut citer ici Kerstin Radde-Antweiler31 (université de Brême), qui travaille sur les rapports entre médias et religion, ainsi que le très intéressant travail du professeur Adrian Hermann (université de Bonn), sur le catholicisme indigène et l’Église philippine indépendante32 et celui de Giovanni Maltese (université de Hamburg) sur le pentecôtisme philippin33. Notons que les deux auteurs coordonnent avec Deirdre de la Cruz (université du Michigan) un ouvrage intitulé The Philippines as a Site of Religion : Local Identities and Global Entanglements (à paraître, 2020) qui rassemble chercheurs français, allemands, suisse, espagnol et philippins autour de la question religieuse, sa pratique, son histoire et ses différentes manifestations.
- 34 Van der Ploeg J., Aquino D.M., Minter T. & Van Weerd M., « Recognising Land Rights for Conservation (...)
- 35 « Beneficiaries in Negros Occidental: From Hacienda Workers to Landed Laborers? », in M. A. Manahan (...)
23Aux Pays-Bas, les études comparatives avec l’Indonésie sont nombreuses et les questions environnementales et foncières dominantes. Il faut mentionner ici le rôle joué par Gerard Persoon (université de Leyde), à la tête de la chaire pour l’Environnement, le développement et les populations indigènes de l’Asie du Sud-est, et dont les recherches concernent les interactions entre humains et environnement chez les peuples forestiers (Philippines et Indonésie). Formé sous son égide, Jan van der Ploeg a travaillé sur les rapports entre les animaux et les humains, en l’occurrence les crocodiles et les communautés philippines, avant de se tourner vers la question des droits indigènes et de la préservation de l’environnement chez les Agta (Cordillère), sujet sur lequel il travaille avec Tessa Minter34. Parmi les travaux les plus récents, mentionnons enfin la thèse de Tania Salerno, « The Politics of Lands Deals : Cargill’s Acquisition Agendas in Indonesia and the Philippines » (université de Leyde, 2018) et le travail de Rosanne Rutten sur les effets de la réforme agraire35.
- 36 Francois Sémah, Thomas Ingicco et Florent Détroit du Muséum National d’Histoire Naturelle mènent ch (...)
- 37 H. Xhauflair et al., « What plants might potentially have been used in the forests of prehistoric S (...)
24On retrouve cet intérêt pour les interactions hommes-environnement dans les travaux en archéologie. L’Archaeological Studies Program de l’Université des Philippines et le Museum National ont mené, et mènent encore, des programmes de recherche en partenariat avec des collègues européens (Irlande, Allemagne, Italie et France). Nous ne mentionnons pas ici les travaux parus à la suite des fouilles collectives en raison de leur nombre et de leur spécialisation36. Citons tout de même le travail d’Hermine Xhauflair qui se trouve à la croisée de l’archéologie et l’ethnologie, et s’intéresse à la culture matérielle en végétal37.
- 38 « A case study about the global policing of Third World intermarried women: Filipino women and marr (...)
- 39 « De l’auto-ségrégation à l’effacement du particularisme communautaire : le cas des Cantonais de Ma (...)
- 40 « Transmission intergénérationnelle et pratiques linguistiques plurielles dans les familles belgo-p (...)
- 41 Caring for Strangers: Filipino Medical Workers in Asia, NIAS Press, 2017.
- 42 « Philippine Women on the Move: Marriage across Borders », International Migration, 46 (4), 2008, p (...)
- 43 « A “Minority” on the Move. Boundary Work among Filipina Muslim Migrant Domestic Workers in the Mid (...)
- 44 L’université de Hambourg et Ateneo de Manila y collaborent dans l’étude des processus d’intégration (...)
25Enfin, on ne saurait clore sans mentionner le thème de la migration, sujet récurrent dans les études philippines et enjeu majeur pour le pays, autour duquel les études se sont multipliées. Le nombre de migrants en provenance des Philippines a doublé dans le monde entre 2003-2013 — environ 10 % de la population travaille à l’étranger — ce qui explique l’intérêt, et également le besoin grandissant de recherches sur le phénomène. Si l’ouvrage de Deirdre McKay (université de Keele), An Archipelago of Care. Filipino Migrants and Global Networks (Bloomington : Indiana University Press, 2017) est le dernier en date, il faut aussi noter les travaux de Gwenola Ricordeau38 (université de Lille/université d’État de Californie, Chico depuis 2017) et de Catherine Guéguen39 (université Paris Sorbonne) en France, ceux d’Asuncion Fresnoza-Flot40 (Université Libre de Bruxelles) en Belgique, de Megha Amrith41 (Max Planck Institute Göttingen) et Andrea Lauser42 (université de Göttingen) en Allemagne ou encore de Julien Debonneville43 (université de Genève) en Suisse. La migration y est abordée à travers le thème des mariages à distance, de la ville, la transmission intergénérationnelle, les familles mixtes ou encore la vieillesse et les soins. Nous ne citons pas les travaux en sciences politiques qui intègrent les Philippines à leur analyse, les performances économiques et l’administration actuelle du président Duterte ayant favorisé un intérêt pour l’archipel. Notons cependant que les Philippines occupent une place non négligeable dans le projet européen CRISEA (2017-2020) qui concerne la gestion des crises en Asie du Sud-est44.
26Dynamiques actuelles des études philippines
27Si les études philippines bénéficient encore d’un soutien institutionnel limité, celui-ci reste sans précédent. En 2017, la School of Oriental and African Studies a inauguré à Londres le « Philippine Studies at SOAS », un forum qui vise à soutenir l’enseignement, la recherche et la production culturelle sur l’archipel au Royaume-Uni, et plus largement en Europe. Coordonné par Cristina Juan, le forum propose une conférence internationale annuelle, ainsi que des master-classes et des cours de langue. Parmi les invités prestigieux des deux dernières années on compte l’historien Vicente Rafael (université de Washington), l’anthropologue Oona Paredes (UCLA), le politologue Patricio Abinales (University of Hawai’i at Manoa) et l’écrivain Gina Apostol. Outre la mise en valeur des ressources propres à la SOAS par le biais d’une bibliothèque en ligne (Digital Filipiniana Collection), le programme sert de catalyseur pour « penser » les Philippines. L’atelier d’écriture SULAT (Southeast Asian Creative Writing Space) et l’exposition d’art contemporain « Motions of this Kind : Propositions and Problems of Belatedness » (12 avril-22 juin 2019, Brunei Gallery, SOAS) sont les exemples les plus récents de ces moments de réflexion autour de l’archipel.
28À Berlin, Rosa Castillo a initié depuis 2014 le Philippine Studies Series Berlin au sein du Département pour les Études Sud-Est Asiatiques de l’Université de Humbolt. La plateforme a permis d’organiser pas moins d’une quarantaine de présentations sur des thèmes aussi divers que l’appropriation de la cuisine philippine ou la guerre contre la drogue de Duterte, faisant de Berlin un lieu incontournable de discussions sur les études contemporaines philippines. Notons qu’en 2015 et 2017, la plateforme a également co-organisé le festival du film philippin de Berlin. Depuis juillet 2019, le Philippine Studies Series Berlin a laissé la place à un programme de plus grande envergure également piloté par Rosa Castillo, Advancing Philippine Studies at Humbolt University. Il prévoit la programmation de cours de langue, un soutien financier plus important pour l’organisation d’évènements scientifiques et culturels et a récemment permis la venue d’une vingtaine de collègues philippins à la conférence de l’Euroseas (11-13 septembre 2019, Berlin), où les Philippines étaient beaucoup plus représentées dans les ateliers que les années précédentes. Enfin, à Hambourg, la section d’études austronésiennes a décidé depuis 2019 d’élargir son offre de cours sur les Philippines, le but étant d’intégrer pleinement l’archipel au curriculum portant sur l’aire linguistique et culturelle à laquelle elle appartient. En sus d’enseignements de licence et de master proposés chaque semestre, des cours de langue intégrés au cursus seront dispensés par Elisabeth Luquin, responsable de la section de philippin de l’INALCO (Paris).
29La limite de cet élan sans précédent est bien entendu d’ordre politique. Les programmes de la SOAS et de Humbolt ont été rendus possibles par une subvention de 5 millions de pesos (85 000 euros) du bureau de la sénatrice philippine Loren Legarda à chacune de ces universités et ce pour trois ans. Les cours de filipino, à Hamburg, seront quant à eux financé par l’Union Européenne au titre de la mobilité enseignante Erasmus. Or si ces établissements ont montré leur intérêt pour les études philippines, il faut maintenant qu’ils trouvent le moyen de les rendre pérennes, ce qui passe par le recrutement de professeurs, voire, chose moins probable, l’établissement d’une chaire. L’INALCO reste à ce jour le seul établissement d’enseignement supérieur à offrir, en Europe, un cursus universitaire complet de licence en Filipino.
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30L’ouverture de postes sur les Philippines serait pourtant pertinente au regard du nombre de thèses, en hausse, sur le pays. Il s’agit de ce que l’on constate après une rapide recherche dans les bases de données européennes. Sur ces cinq dernières années, pas moins d’une trentaine de doctorats ont été soutenus en Europe45. Les universités du Royaume-Uni se trouvent en tête de liste46, suivies par les Pays-Bas, la France, la Suède — où quatre thèses ont été soutenues en 2016 et 2017 sur le tourisme sexuel, les catastrophes naturelles et le clientélisme — et la Finlande où l’on compte trois thèses. Aux Pays-Bas, la tendance se retrouve également au niveau du master avec huit mémoires soutenus les cinq dernières années en anthropologie culturelle et sociologie du développement, relations internationales, histoire, études asiatiques et archéologie.
31Si l’intérêt est manifeste et que l’on peut compter sur un soutien financier pour les prochaines années, que reste-il à faire pour accompagner la dynamique en marche ? Il faudrait certainement aider à la publication et à la circulation des travaux européens, justement en Europe. Un certain nombre des études que nous avons présentées sont uniquement publiées aux Philippines, notamment par les presses de l’université d’Ateneo de Manila. Si l’on peut se réjouir de la circulation de ces travaux, on regrettera cependant la difficulté à se les procurer en Europe et leur manque de visibilité qui en est une conséquence directe. Les publications en langue anglaise ont sans aucun doute pour but de toucher un public plus large, servant le marché philippin et américain sur lequel les presses universitaires philippines sont distribuées. Il reste que cette situation est loin de servir le développement des études en Europe. Aussi, en s’appuyant sur la dynamique actuelle, plus de publications en langues européennes seraient les bienvenues.
- 47 Cette question est également au centre de débats houleux aux Philippines depuis plusieurs décennies (...)
32La question de la langue est également un point qu’il faudra certainement aborder dans un futur proche. Les Philippines studies se passent volontiers de l’apprentissage des langues philippines et outre l’anthropologie ou la linguistique, peu de disciplines en font un prérequis. La question a été débattue lors de la conférence d’Amsterdam en 1991 et de celle de Strasbourg en 2010, sans qu’il soit possible d’arriver à un consensus. Même si l’histoire et la situation linguistique de l’archipel expliquent la prééminence des langues anglaise et espagnole dans les sources et les études, on s’étonnera de cette résistance à l’usage du tagalog/filipino dans la recherche, alors même qu’il s’agit d’une évidence et d’une garantie de rigueur scientifique, pour toute autre aire culturelle sud-est asiatique47.
33Enfin, nous l’avons vu, les Philippines ne forment pas ici un champ de recherche indépendant. Tantôt annexe des études sur le monde insulindien, le Japon ou la Chine, tantôt rattachées aux études hispano-américaines, les recherches sur les Philippines en Europe ont certainement encore à trouver leur voie. La multiplicité des approches paraît faire la particularité de ces études en Europe et pourrait être sa force, si le dialogue se nouait entre les disciplines.
Notes
2 La liste des travaux présentés dans l’article n’est pas exhaustive et vise à mettre en lumière les dynamiques actuelles de la recherche européenne sur la région, ainsi que les principaux thèmes abordés. Pour une vue des travaux antérieurs en français sur les Philippines, voir Bernard Pot, Philippines : Bibliographie thématique en langue française annotée et commentée, Paris : sevenOrients, Librairie orientaliste Paul Geuthner, 2003.
3 Zeus Salazar, « Philippine Studies and Pilipinolohiya : Past, Present and Future of Two Heuristic Views in the Study of the Philippines », in The Malayan Connection. Ang Pilipinas sa Dunia Melayu, Quezon City : Palimbagan ng Lahi, 1998, p. 303.
4 Voir le compte-rendu de J-P. Potet, Archipel 85, 2013, p. 260-263.
5 Marlies Spiecker-Salazar, « A contribution to Asian Historiography: European studies of Philippines languages from the 17th to the 20th century », Archipel 44, 1992. p. 183-202 ; « The Enigma of H. Costenoble — The Long Search for the Author of Die Chamoro Sprache », Archipel 77, 2009. p. 21-25.
6 Thomas Stolz, Lawrence Andrew Reid et Emilio Ridruejo Alonso (ed.), Philippine and Chamorro Linguistics Before the Advent of structuralism, Band 2 von Koloniale und Postkoloniale Linguistik/Colonial and Postcolonial Linguistics (KPL/CPL), Berlin: Akademie Verlag, 2012.
7 Morphosyntax und Morphologie. Die Ausrichtungsaffixe im Tagalog, München: Fink, 1987. “How to miss a paradigm or two: Multifunctional ma- in Tagalog”, in F. Ameka, A. Dench & N. Evans (eds.), Catching Language, Berlin: Mouton de Gruyter, 2006: 487-526. “Lexical categories and voice in Tagalog”, in P. Austin & S. Musgrave (eds.), Voice and Grammatical Relations in Austronesian Languages, Stanford: CSLI, 2008: 247-293.
8 K. Adelaar & N. Himmelmann (eds.), The Austronesian Languages of Asia and Madagascar, London: Routledge, 2005.
9 Il est l’auteur de plusieurs ouvrages récents sur les spécificités de la langue philippine notamment sur les expressions numériques en tagalog (Numbers and Units in Old Tagalog, lulu.com, 2012), les néologismes créés dans le domaine scientifique (Filipino Neologisms, lulu.com, 2019) ou encore le syllabaire baybayin (Baybayin , the Syllabic Alphabet of the Tagalogs, lulu.com, 2019).
10 Wunsch und Wirklichkeit : deutsch-philippinische Beziehungen im Kontext globaler Verflechtungen 1860-1945, Berlin: Logos Verlag, 2008.
11 Pour la période moderne, le meilleur exemple reste l’étude de Ruurdje Laarhoven, Triumph of Moro Diplomacy : The Maguindanao Sultanate in the 17th Century (Quezon City : New Day Publishers, 1989) qui est la première à avoir fait usage des sources néerlandaises sur la région et à avoir montré la participation du sultanat de Magindanao aux réseaux de commerce sud-est asiatiques.
12 Voir le compte rendu de J-P. Potet « European Conference on Philippines Studies 1991, Amsterdam, 22-25 avril 1991 », Archipel 42, 1991, p. 14-18.
13 « Arab Muslim Migrants in the Colonial Philippines: the Hadhramaut Connection », in Noel Brehony, (ed.), Hadhramaut and its Diaspora: Yemeni Politics, Identity and Migration, London: I. B. Tauris, p. 124-141.
14 A.T. Gallop, « Islamic Manuscript Art of the Philippines », in Kawashima Midori (ed.), The Qur’an and Islamic Manuscripts of Mindanao, Tokyo : Sophia University, 2012, p. 71-98, et « Islamic Seals of the Philippines », in Isaac Donoso (ed.), More Islamic than We Admit: Insights into Philippine Cultural History, Quezon City: Vibal Foundation, 2017, p. 234-249).
15 Islamic Far East : Ethnogenesis of Philippine Islam, Quezon City : UP Press, 2014.
16 Historia cultural de la lengua espanola en Filipina, Madrid : Editorial Verbum, 2012.
17 Pour une liste commentée des travaux en langues européennes sur Rizal, voir le compte-rendu de Z. Salazar sur la biographie du héros national publiée par Bernard Dahm en 1988 dans Archipel 40, 1990, p. 213-215.
18 « La littérature philippine en langue espagnole (1898-2008) », université de Brest, 2009.
19 « Acapulco et le Galion de Manille, la réalité quotidienne au XVIIe siècle », Paris III, 2012.
20 « Clothing and the Colonial Culture of Appearances in XIXth Century Spanish Philippines (1820-1896) », Université de Nice Sophia Antipolis, 2014.
21 « Images in Print : the Manileña in Periodicals (1898-1938) », université de Nice, 2017. Ce travail et le précédent, rédigés en anglais, sont le produit du travail de 3e cycle d’étudiants philippins et ne sont pas sans rappeler, dans leur thème, le doctorat de Maria Luisa Camagay réalisé en France puis publié aux Philippines Working Women of Manila in the 19th Century (Quezon City : UP Press, 1995).
22 « L’Arxiu et l’Archipel, les Philippines à l’Archivium Historicum Societas Iesu Cataloniae », Revue d’Études Catalanes, n°5, Christian Camps (dir.), Montpellier III, 2002, p. 27- 42.
23 « ¿Fortalecer la cohesión interna? El ‘peligro moro’ en las Filipinas coloniales en la segunda mitad del siglo XVIII », in María Dolores, Elizalde Pérez-Grueso, Xavier Huetz de Lemps, Filipinas. Siglo XIX. Coexistencia e interacción entre comunidades en el Imperio español, Madrid: Polifemo, 2017, p. 393-425. À noter également, « The Baptism of Sultan Azim ud-Din of Sulu: Festivities for the Consolidation of Spanish Power in the Philippines in the Middle of the Eighteenth Century », in Astrid Windus and Eberhard Crailsheim (eds.), Image –Object – Performance. Mediality and Communication in Contact Zones of Colonial Latin America and the Philippines, Munster : Waxmann, 2013, p. 93-120.
24 « Les Philippines et leur monde. Gouverner et vivre aux confins des empires ibériques », co-organisée par le CERI Science Po, l’université de Toulouse-Jean Jaurès et le Colegio de Michoacán (Mexique).
25 En Espagne, on assiste à une hausse remarquable du nombre de thèses en histoire sur les Philippines qui est passé de 28 entre 2000-2009 à 84 pour la période 2010-2019. Si le nombre peut facilement être réduit de moitié, car un certain nombre de titres sont trompeurs, la hausse reste notable (Dialnet, base de données sur la production hispanique en sciences humaines et sociales).
26 México y Filipinas : culturas y memorias sobre el Pacífico, El Colegio de Michoacán/Ateneo de Manila, 2015.
27 « Chinese Mestizo and Natives’ Disputes in Manila and the 1812 Constitution : Old Privileges and New Political Realities (1813-15) », Journal of Southeast Asian Studies 45 (2), 2014, p. 214-235.
28 Parmi ses très nombreux études, citons, parmi les plus récentes, La quête en épouse : Mämiminbin, une Épopée palawan chantée par Mäsinu, Paris : UNESCO – L'Asiathèque, 2000. Literature of Voice : Epics in the Philippines, Quezon city : Ateneo de Manila, 2005 ; Ainsi que (en collaboration), Le Voyage au ciel d’un héros Sama, Silungan Baltapa, Paris : Geuthner, 2005.
29 « Being and Becoming: Imagination, Memory, and Violence in the Southern Philippines », Freie Universität Berlin, 2017.
30 « Between Re-Traditionalization and Islamic Resurgence. The Influence of the National Question and the Revival of Tradition on Gender Issues among Maranaos in the Southern Philippines »,Université Goethe-Frankfurt, 2011.
31 « The Papal Election in the Philippines: Negotiating Religious Authority in Newspapers », Journal of Religion, Media and Digital Culture 7, 2018, p. 400-421.
32 « Publicizing Independence. Thoughts on the Filipino Ilustrado Isabelo de los Reyes, the Iglesia Filipina Independiente, and the Emergence of an Indigenous-Christian Public Sphere », Journal of World Christianity 6 (1), 2016, p. 99-122.
33 « Politik und Gesellschaft in der philippinischen Pfingstbewegung », Universität Heidelberg, 2017.
34 Van der Ploeg J., Aquino D.M., Minter T. & Van Weerd M., « Recognising Land Rights for Conservation? Tenure Reforms in The Northern Sierra Madre, The Philippines », Conservation and Society 14 (2), 2016, p. 146-160.
35 « Beneficiaries in Negros Occidental: From Hacienda Workers to Landed Laborers? », in M. A. Manahan (ed.), Repormang Agraryo at Pagbabago?: Narratives on Agrarian Conflicts, Transitions, and Transformation, Quezon City : Focus on the Global South, 2018, p. 108-127.
36 Francois Sémah, Thomas Ingicco et Florent Détroit du Muséum National d’Histoire Naturelle mènent chacun des programmes de fouilles à Luzon et Palawan.
37 H. Xhauflair et al., « What plants might potentially have been used in the forests of prehistoric Southeast Asia? An insight from the resources used nowadays by local communities in the forested highlands of Palawan Island », Quaternary International 448, 2017, p. 169-189.
38 « A case study about the global policing of Third World intermarried women: Filipino women and marriage migration », Cad. Pagu [online], n°51, 2017.
39 « De l’auto-ségrégation à l’effacement du particularisme communautaire : le cas des Cantonais de Manille (Philippines) », Culture et gouvernance locale, Université laurentienne Ottawa, vol 4, n°1, 2012, p. 62-79.
40 « Transmission intergénérationnelle et pratiques linguistiques plurielles dans les familles belgo-philippines en Belgique », Migrations Société 30 ( 172), 2018, p. 91-103.
41 Caring for Strangers: Filipino Medical Workers in Asia, NIAS Press, 2017.
42 « Philippine Women on the Move: Marriage across Borders », International Migration, 46 (4), 2008, p. 85-110.
43 « A “Minority” on the Move. Boundary Work among Filipina Muslim Migrant Domestic Workers in the Middle-East », The Asia Pacific Journal of Anthropology, 20 (4), 2019, p. 344-361.
44 L’université de Hambourg et Ateneo de Manila y collaborent dans l’étude des processus d’intégration régionale.
45 Il s’agit d’un chiffre minimum qui exclut les travaux en sciences de la terre et ne tient compte que des thèses électroniques référencées sur le portail Dart-Europe.
46 Les bourses Chevening dont bénéficient nombre d’étudiants philippins ne sont certainement pas étrangères à ce phénomène.
47 Cette question est également au centre de débats houleux aux Philippines depuis plusieurs décennies. L’utilisation du filipino comme langue de travail scientifique divise la communauté et est accusée, souvent à tort, de réaction nationaliste voir nativiste. Pour plus de détails sur la question, voir la très bonne synthèse de Lily S. Mendoza « Theoretical Advances in the Discourse of Indigenization », in Atoy Navarro and Lagbao-Bolante (ed.), Mga Babasahin Sa Agham Panlipunang Pilipino: Sikolohiyang Pilipino, Pilipinolohiya, at Pantayong Pananaw. Quezon City: C&E Publications, 2007, p. 241-297.
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Référence papier
Elsa Clavé , « Panorama des études philippines en Europe », Archipel, 98 | 2019, 35-48.
Référence électronique
Elsa Clavé , « Panorama des études philippines en Europe », Archipel [En ligne], 98 | 2019, mis en ligne le 11 décembre 2019, consulté le 18 janvier 2025. URL : http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/archipel/1301 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/archipel.1301
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